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LA VERIFICATION DES THEODOLITES ET TACHEOMETRES : QUELLES SONT LES NORMES APPLICABLES ? Alain MARTIN RABAUD et Jean-Marie CARREZ MÉTRIDE 25, rue de la Vosne 69250 NEUVILLE-sur-Saône
Résumé Les mesures par théodolite et par tachéomètre, utilisées depuis des années dans l'industrie, posent un sérieux problème aux entreprises qui appliquent les dispositions des normes ISO 9000 : il n'existe pas à l'heure actuelle de norme s'appliquant à ces instruments qui permette de les étalonner. Nous examinons dans ce texte les différentes utilisations de ces instruments, les sources d'erreur qu'il semble nécessaire de vérifier et les normes existantes qu'il est possible d'appliquer.
Abstract Measurement with theodolite and tacheometer used since many years in industrial field induces a serious lack to companies who wanted to respect ISO 9000 norms: actually, there is no norm for this kind of equipment in order to calibrate them. In this presentation, we analyze the several uses of these sensors, errors' origins which it seems necessary to verify and actual norms which is be able to apply.
Introduction Les théodolites et tachéomètres posent un problème majeur aux services de contrôle des industries utilisatrices de ces équipements qui respectent la norme ISO 9000 quelque soit leur secteur d'activité (travaux publics, mécanique lourde, chaudronnerie, aéronautique, construction navale, construction automobile…). Si les moyens de contrôle conventionnel disposent de normes adaptées à leur étalonnage et leur vérification, les mesures angulaires et sur grandes longueurs présentent un manque dans ce domaine. Les instruments neufs sont garantis par les constructeurs en référence à une norme allemande DIN 18723 (section 3 pour les théodolites et section 6 pour les distancemètres électroniques), dont le champ d'application concerne surtout l'utilisation en géodésie
classique pour des distances supérieures à 100 m, avec la prise en compte des conditions atmosphériques, soit des conditions très éloignées des applications industrielles habituelles. De plus, pour la mesure de distance, la norme n'est plus adaptée aux nouvelles générations d'appareils et de cibles utilisées dans l'industrie. L'exposé présentera le principe de cette norme et mettra en évidence les hypothèses sous-jacentes qui la rendent inadaptée à l'utilisation dans l'industrie et avec les appareils actuels – par exemple, la répartition des erreurs de distance ne suit pas une loi normale, lorsque les instruments sont associés à des cibles rétroréfléchissantes, couramment utilisés dans l'industrie. Il montrera ensuite la possibilité d'une adaptation pour permettre que chaque utilisateur puisse réaliser luimême la vérification de son instrument avec les objectifs suivants : mieux connaître les défauts géométriques internes, mieux maîtriser les incertitudes liées aux différents accessoires qu'il utilise (cibles de différents types, accessoires optiques spécifiques…), mieux suivre l'évolution de son appareil sans la nécessité d'un retour au constructeur.
Quelles principales utilisations des théodolites et tachéomètres ? Longtemps, ces appareils ont été dévolus aux utilisations de géodésie, c'est à dire aux mesures de très grandes longueurs : distance de 10 m à 1 km. Les applications industrielles étaient assez exceptionnelles et servaient souvent à dégrossir des réglages délicats comme l'installation de gros composants (turbine de grosse puissance, échangeurs…). D'autre part, les appareils étant assez difficiles à utiliser (réglage délicat de la verticalité de l'appareil, lecture des graduations au travers d'un oculaire, compensation des erreurs de lecture, d'appareil par une procédure très coûteuse en temps), leur intervention était souvent limitée au strict nécessaire.
Depuis l'arrivée de l'électronique et de l'informatique, les théodolites et tachéomètres ont énormément gagné en souplesse d'utilisation, en rapidité de mesure, en précision… De ce fait, ils ont pu conquérir de nouveaux milieux et de nombreux produits industriels sont maintenant mesurés, contrôlés, réglés par ces outils.
Le temps de mesure Dans les applications géodésiques, le nombre de points de mesure est assez limité et la productivité de mesure n'est pas le critère le plus essentiel. De ce fait, pour garantir une bonne qualité de mesure (voir chapitre suivant), les opérateurs réalisent des mesures par double retournement. Or, depuis l'arrivée des appareils électroniques, les constructeurs ont inclus des procédures de réglage qui compensent les erreurs de construction géométrique et donc n'imposent plus de réaliser ces opérations de double retournement. Ceci a pour conséquence d'améliorer le temps de mesure, mais aussi d'augmenter le risque d'une mesure fausse, par déréglage de l'appareil.
Quels sont les changements importants dans l'utilisation de ces appareils ? Le champ de mesure En géodésie, la distance de mesure varie de 10 m à 1 km, dans les applications industrielles les plus courantes, la distance n'excède pas 50 m. Les principales différences qui interviennent concernent principalement les points suivants :
Quelles erreurs d'appareil prendre en compte ?
L'influence des facteurs d'environnement n'intervient pas de la même façon à courte distance - en effet, la température agit plus sur la stabilité dimensionnelle de l'objet mesuré (par rapport aux incertitudes recherchées) lorsque l'on est proche, l'hygrométrie et la stabilité de l'air agit plus sur les longues distances.
Lorsque l'on analyse le diagramme ci-dessous qui présente les sources d'incertitude d'une mesure par tachéomètre (extrapolation de l'analyse réalisée par le groupe de travail MTPO du Collège de Métrologie du MFQ sur les mesures par topométrie - voir référence [2]), les sources d'incertitude liées à l'appareil ne représentent qu'une faible partie de l'ensemble des incertitudes de la mesure :
Pour les tachéomètres, le poids de chacun des capteurs (angle ou distance) n'est pas le même lorsqu'il est utilisé à courte ou longue distance. De ce fait, les précautions d'utilisation sont diamétralement opposées : la distance, source principale d'incertitude à courte distance, doit être particulièrement vérifiée dans les applications industrielles, alors que pour la géodésie, la mesure angulaire peut être la plus grande source d'erreur. De ce fait, les approches ne sont pas forcément les mêmes, ainsi que les méthodes de vérification d'appareil.
Le capteur "théodolite" Il est composé de plusieurs parties comme la figure cidessous issue de [1] le montre :
MOYEN
METHODE
Stratégie de mesure
Théodolite Distancemétre
Mesure du point Exploitation des mesures
Cible
Loi de comportement en fonction des facteurs d'environnement
Facteurs d'environnement
Acuité visuelle Expérience Mouvement
Eclairage ambiant Déformation
Etat de surface (brillance, réflection)
MILIEU
MATIERE
"Stress" Nombre
MAIN D'OEUVRE
Lunette
Axe de visée
Codeur Vt
Axe des tourillons
Limbe Vertical Nivelle bi-axiale Codeur Hz
Limbe Horizontal
Axe principal
Le réglage de la verticalité de l'axe principal Dégauchi par les vis calantes, le résidu de verticalité est compensé en partie par le capteur de verticalité bi-axiale de l'appareil. Le défaut de réglage du capteur ne peut être compensé que par un contrôle de l'appareil par le constructeur L'orientation de la lunette Il s'agit de la rotation autour de l'axe principal (axe vertical de l'appareil) et de la lunette autour de l'axe des tourillons. Les défauts de perpendicularité et de décentrement des axes de tourillon et principal peuvent être compensés par les mesures par double-retournement ou en intégrant les erreurs par un traitement informatique des mesures à partir d'une procédure de réglage interne proposée par les constructeurs. La lunette de visée Les erreurs sont liées à l'optique de la lunette, le positionnement du réticule dans la lunette, la correspondance entre l'axe optique et l'axe de positionnement du capteur angulaire, à la qualité de visée de l'opérateur… Une partie de ces erreurs peut être compensée par la procédure de doubleretournement ou par les réglages internes de l'appareil. La mesure des angles Principale source d'erreur avec les anciens théodolites traditionnels, la lecture électronique et l'informatique ont fortement réduit les risques d'erreurs (en particulier les erreurs de lecture). Subsistent les erreurs de construction des codeurs, les défauts de positionnement des codeurs par rapport aux axes de rotation correspondants et aux défauts d'origine du limbe vertical. Les incertitudes
annoncées par les constructeurs correspondent aux valeurs liées aux erreurs de graduation des codeurs. Il apparaît que la principale source de réduction des erreurs est la procédure de double-retournement. Les procédures de réglage interne des index permettent de compenser les erreurs et donc d'omettre cette procédure. Cependant, il y a nécessité de réaliser correctement ces réglages internes, de les réaliser régulièrement et de vérifier leur influence sur les mesures. D'autre part, les incertitudes annoncées par les constructeurs sont-elles susceptibles d'évoluer, d'un appareil à l'autre, dans le temps… ? Le capteur "distancemètre" Il est toujours associé à la cible utilisée. De ce fait, le comportement d'un couple distancemètre-cible peut être très différent en utilisant la même cible avec deux distancemètres ou le même distancemètre avec deux cibles différentes. Pour preuve la figure suivante réalisée avec le même appareil et deux cibles très différentes : une cible rétro-réfléchissante et un prisme réflecteur (coin-cube).
•
L'influence de la réflexion de la cible sur le signal de retour
•
La détermination de la constante de la cible, c'est à dire la position entre le point de réflexion de la cible et le centre géométrique
La figure présentée plus haut montre que la réponse du capteur n'est absolument pas indépendante de la nature de la cible et qu'il convient de déterminer précisément la relation distance réelle - distance affichée pour chaque type de cible dès lors que l'incertitude de mesure de la distance devient important dans le processus de mesure. L'expérience prouve aussi que ces valeurs évoluent dans le temps, non pas de manière aléatoire, mais certains termes varient comme l'amplitude des oscillations, par exemple.
Quelles normes appliquer ? Peu de normes existent : Les constructeurs se réfèrent à la norme DIN 18723 (section 3 pour les théodolites et section 6 pour les distancemètres électroniques) qui a été transformée en norme ISO en 1997 [3] & [4]. Cette norme s'applique pour déterminer la précision des théodolites et distancemètres sur le site, c'est à dire qu'elle permet d'évaluer l'écart-type de l'erreur angulaire liée aux codeurs de l'instrument (pour les théodolites) et de distance pour les distancemètres. Elle est fondée sur une répartition statistique des points de mesure et par décalage de l'origine de la mesure et répétition des mesures, il est possible d'évaluer un écart-type. Elle élimine tous les défauts géométriques de l'appareil (voir plus haut). Son domaine d'application concerne les grands champs de mesure : de l'ordre de 100 à 1000 m. Des normes sont en préparation, en particulier la norme NF E 11-308 est annoncée, mais ne semble pas aboutir. Les normes applicables aux interféromètres NF E 11-016 ne sont absolument pas transposables aux distancemètres électroniques Les normes applicables aux mesures angulaires (NF E 11-301 à 305) ne peuvent pas non plus être transposables aux théodolites.
Conclusion : comment évoluer vers des normes applicables aux théodolites et tachéomètres ? La base de la norme ISO [3] semble tout à fait transposable aux mesures de théodolites aux restrictions suivantes : •
Il est indispensable d'introduire dans la norme une vérification des erreurs géométriques de l'appareil, source beaucoup plus importante d'erreur que le codeur lui-même. Il s'agit de ressortir des calculs les paramètres nécessaires, la campagne de mesure proposée étant suffisante pour les obtenir
•
Il faut ajuster la norme aux contraintes des applications industrielles (distance de l'ordre de 10 m, influence atmosphérique négligeable…)
Il est à noter que cette norme peut s'étendre aux nouveaux tachéomètres que sont les lasers de poursuite (LTD 500 de LEICA et SMX). Par contre, la norme ISO pour les distancemètres [4] est complètement inapplicable et la méthode utilisée actuellement qui consiste à comparer la mesure du distancemètre à celle d'un interféromètre raccordé semble la plus raisonnable. Mais il est aussi nécessaire de définir une norme pour la détermination de la constante de prisme.
Références [1] Michel KASSER Topographie, topométrie et géodésie Article C5010 des Techniques de l'Ingénieur (8-1993) [2] Alain MARTIN-RABAUD Intercomparaison des méthodes de mesure par procédés optiques Congrès de Métrologie 97 (10-1997) [3] Norme ISO 12857-2 Optique et instruments d'optique- Instruments géodésiques - Méthodes de détermination sur site de la précision - Partie 2 : Théodolites (1997) [4] Norme ISO 12857-3 Optique et instruments d'optique- Instruments géodésiques - Méthodes de détermination sur site de la précision - Partie 3 : Distancemètres électro-optiques (1997)
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