Sentiments Troublants - Tome 1
Short Description
Résumé : Lana Queen et Emma Nollan sont collègues et amies depuis l'intégration d'Emma à la section criminelle d...
Description
Kyrian Malone & Jamie Leigh
Sentiments Troublants
~ Collection ST Éditions ~
3
Ce livre est une fiction. Les personnages et dialogues sont les produits de l’imagination des auteurs. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite.
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Copyright © 2014 par Kyrian Malone et Jamie Leigh
Tous droits réservés. Toute reproduction, diffusion ou utilisation partielle est strictement prohibée sans l'accord préalable des auteurs et de ST Éditions. Toutes les infos sur : http://steditions.com/
Cette histoire a été rédigée en décembre 2014
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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 9
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 11
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 13
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 15
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 17
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 19
et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 21
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 23
Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 25
— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 27
— J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare 29
de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 31
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur 33
la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui 35
se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue 37
avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait 39
trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à 41
nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. 43
Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. 45
— Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie 47
à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, 49
tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la 51
sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. 53
— Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en 55
tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait 57
bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant 59
chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une 61
addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser 63
sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. 65
Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des 67
blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de 69
son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des 71
cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. 73
Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. 75
— Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons 77
constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle 79
n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance 81
absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. 83
— J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant 85
son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous 87
prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la 89
porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni 91
la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien 93
équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. 95
Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? 97
— Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu 99
avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire 101
comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. 103
Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? 105
— Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle 107
vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans 109
seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne 111
plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau 113
depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par 115
balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. 117
— Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une 119
urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la 121
luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils 123
avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. 125
Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus 127
longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée...
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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 131
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 133
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 135
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 137
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 139
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 141
et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 143
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 145
Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 147
— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 149
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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 153
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 155
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 157
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 159
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 161
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 163
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 165
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 167
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 169
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 171
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 173
et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 175
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 177
Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 179
— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 181
— J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare 183
de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 185
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur 187
la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui 189
se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue 191
avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée...
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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 195
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 197
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 199
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 201
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 203
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 205
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 207
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 209
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 211
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 213
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 215
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 217
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 219
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 221
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 223
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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 227
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 229
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 231
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 233
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 235
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 237
et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 239
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 241
Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 243
— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 245
— J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare 247
de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 249
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur 251
la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui 253
se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue 255
avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait 257
trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à 259
nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. 261
Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. 263
— Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie 265
à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, 267
tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la 269
sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. 271
— Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en 273
tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait 275
bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant 277
chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une 279
addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser 281
sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. 283
Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des 285
blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de 287
son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des 289
cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. 291
Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. 293
— Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons 295
constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée...
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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 299
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 301
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 303
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 305
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 307
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 309
et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 311
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 313
Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 315
— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 317
— J'aimerais la voir si elle est réveillée...
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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 321
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 323
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 325
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 327
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 329
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 331
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 333
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 335
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 337
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 339
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 341
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 343
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 345
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 347
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 349
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 351
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 353
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 355
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 357
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 359
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 361
et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 363
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 365
Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 367
— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 369
— J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare 371
de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 373
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur 375
la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui 377
se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue 379
avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée...
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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 383
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 385
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 387
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 389
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 391
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 393
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 395
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 397
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 399
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 401
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 403
vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 405
"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 407
par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 409
un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 411
* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 413
et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 415
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 417
Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 419
— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 421
— J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare 423
de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 425
* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur 427
la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui 429
se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue 431
avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait 433
trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à 435
nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. 437
Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. 439
— Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie 441
à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, 443
tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la 445
sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. 447
— Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en 449
tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait 451
bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant 453
chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une 455
addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser 457
sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. 459
Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des 461
blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de 463
son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des 465
cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. 467
Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. 469
— Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons 471
constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle 473
n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance 475
absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. 477
— J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant 479
son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous 481
prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Fin...
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