Sentiments Troublants - Tome 1

January 31, 2018 | Author: Télécharger des romans lesbiens | Category: Emma (Novel), Casino, Poker, Human Sexuality, Slot Machine
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Résumé : Lana Queen et Emma Nollan sont collègues et amies depuis l'intégration d'Emma à la section criminelle d...

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Kyrian Malone & Jamie Leigh

Sentiments Troublants

~ Collection ST Éditions ~

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Ce livre est une fiction. Les personnages et dialogues sont les produits de l’imagination des auteurs. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite.

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Copyright © 2014 par Kyrian Malone et Jamie Leigh

Tous droits réservés. Toute reproduction, diffusion ou utilisation partielle est strictement prohibée sans l'accord préalable des auteurs et de ST Éditions. Toutes les infos sur : http://steditions.com/

Cette histoire a été rédigée en décembre 2014

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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 9

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 11

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 13

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 15

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 17

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 19

et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 21

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 23

Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 25

— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 27

— J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare 29

de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 31

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur 33

la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui 35

se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue 37

avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait 39

trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à 41

nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. 43

Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. 45

— Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie 47

à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, 49

tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la 51

sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. 53

— Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en 55

tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait 57

bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant 59

chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une 61

addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser 63

sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. 65

Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des 67

blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de 69

son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des 71

cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. 73

Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. 75

— Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons 77

constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle 79

n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance 81

absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. 83

— J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant 85

son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous 87

prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la 89

porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni 91

la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien 93

équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. 95

Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? 97

— Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu 99

avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire 101

comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. 103

Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? 105

— Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle 107

vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans 109

seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne 111

plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau 113

depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par 115

balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. 117

— Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une 119

urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la 121

luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils 123

avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. 125

Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus 127

longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée...

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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 131

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 133

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 135

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 137

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 139

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 141

et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 143

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 145

Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 147

— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 149

— J'aimerais la voir si elle est réveillée...

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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 153

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 155

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 157

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 159

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 161

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 163

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 165

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 167

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 169

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 171

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 173

et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 175

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 177

Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 179

— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 181

— J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare 183

de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 185

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur 187

la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui 189

se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue 191

avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée...

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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 195

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 197

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 199

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 201

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 203

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 205

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 207

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 209

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 211

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 213

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 215

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 217

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 219

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 221

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 223

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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 227

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 229

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 231

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 233

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 235

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 237

et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 239

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 241

Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 243

— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 245

— J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare 247

de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 249

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur 251

la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui 253

se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue 255

avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait 257

trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à 259

nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. 261

Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. 263

— Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie 265

à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, 267

tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la 269

sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. 271

— Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en 273

tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait 275

bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant 277

chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une 279

addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser 281

sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. 283

Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des 285

blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de 287

son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des 289

cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. 291

Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. 293

— Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons 295

constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée...

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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 299

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 301

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 303

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 305

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 307

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 309

et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 311

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 313

Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 315

— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 317

— J'aimerais la voir si elle est réveillée...

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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 321

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 323

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 325

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 327

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 329

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 331

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 333

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 335

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 337

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 339

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 341

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 343

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 345

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 347

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 349

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 351

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 353

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 355

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 357

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 359

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 361

et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 363

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 365

Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 367

— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 369

— J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare 371

de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 373

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur 375

la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui 377

se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue 379

avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée...

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* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 383

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 385

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 387

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 389

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 391

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 393

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 395

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 397

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 399

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 401

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus 403

vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * 405

"Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée 407

par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement 409

un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... 411

* * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils 413

et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 415

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à 417

Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? 419

— J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. 421

— J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare 423

de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... 425

* * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur 427

la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui 429

se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue 431

avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait 433

trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à 435

nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. 437

Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. 439

— Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie 441

à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, 443

tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la 445

sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. 447

— Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en 449

tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait 451

bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant 453

chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une 455

addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser 457

sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. 459

Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des 461

blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de 463

son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des 465

cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. — J'arrive dans un instant, répondit-elle. 467

Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant son pantalon de satin et son débardeur en coton. 469

— Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons 471

constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. — J'aimerais la voir si elle est réveillée... * * * Certaines personnes faisaient parfois le choix de passer de l'autre côté. Sexuellement parlant. Un père ou une mère violents, des compagnes ou compagnons trop envahissants, amenaient certains à détester les gens du sexe opposé pour se convertir au plaisir de la chair avec des partenaires du même sexe. Certains trouvaient des explications à leur sexualité, d'autres n'en trouvaient pas. Il arrivait que les hétéros virent homos pour X ou Y raison. Par volonté, curiosité ou simplement de façon naturelle. Certains ne se posaient pas de questions et goûtaient aux deux côtés. Emma Nollan avait pris le contrepied de ces généralités. Aucun de ses amis et collègues à la police criminelle de New York n'aurait pu deviner ses antécédents privés, car Emma ne se confiait jamais, à personne. Elle se consacrait corps et âme à son travail, car sa vie en dehors du commissariat était un désastre. Tout avait basculé l'avant-veille de Noël après son travail à Atlantic City. On l'avait appelé pour une urgence, elle était sortie en laissant son fils de sept ans seul chez elle et à son retour tôt le matin, un coup de feu avait retenti tandis qu'elle se trouvait sur le seuil de la porte. Jamais Emma n'oublierait ce matin-là. Jamais elle 473

n'oublierait le temps qu'il faisait, les odeurs du couloir de son appartement et la détonation de son arme résonnant chaque nuit dans son sommeil. Elle était entrée chez elle, tremblante, avait marché jusqu'à sa chambre et avait trouvé Timmy allongé sur le sol, baignant dans une mare de sang. Après sa compagne, on lui avait arraché son fils et jamais elle ne se pardonnerait de ne pas avoir été plus vigilante. Son refuge avait d'abord été son travail en tant qu'inspecteur au commissariat d'Atlantic City. Et en dehors du bureau, elle avait découvert l'adrénaline des jeux clandestins. Quoi de plus normal dans la seconde ville d'Amérique réputée pour ses Casinos et club de strip-tease. Malgré ses écarts, malgré ses drames, Emma s'était relevée. Au fil des semaines, des mois, elle avait tout fait pour que sa vie se stabilise. Elle avait même rencontré une fille sympa du nom de Karen. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Alors Emma non plus ne rentrerait pas chez elle, pas plus qu'elle n'irait dans un bar pour oublier cet énième fiasco dans sa vie privée. Son refuge en cet instant n'était autre que le grand Casino de New York sur la Cinquième. Machines à sous, tables de poker, blackjack, roulettes, seule l'ambiance de ces lieux baignés par le vice et la luxure apaisait ses tourments. Dans son esprit résolu à ne plus songer à l'avenir, chacun était libre de se détruire comme il l'entendait. Pour Emma, ce n'était ni l'alcool ni la drogue, mais l'adrénaline du jeu, la dépendance 475

absolue à un plaisir éphémère, consistant à regarder des cartes se retourner sur un tapis. Le poker était une addiction destructrice à d'infimes secondes qui la sortaient de son néant avant qu'elle n'y sombre à nouveau une fois ce laps de temps écoulé... * * * "Je n'ai pas besoin de te parler, j'ai besoin de prendre l'air !" Tels avaient été les derniers mots d'Emma ce soir avant que Lana Queen ne quitte les bureaux à son tour. Elle n'avait jamais vu Emma dans un tel état. Jamais sa collègue n'avait été aussi froide, distante, agressive et vindicative à son égard. Ses collègues et partenaires de terrain, Connor Morran ou Somers Harris, lui avaient souvent répété qu'Emma la considérait comme un exemple à suivre au sein de la section, et pourtant, sa réaction envers elle avait été pleine de rancœur, comme si Emma la rendait responsable de l'échec de leur dernière enquête. Pete Alexander, soupçonné de meurtre, avait été reconnu non coupable par les jurés, une affaire dans laquelle Emma s'était investie. — Tu viens au lit ? lança Sean qui revenait de la salle de bains une serviette autour de la taille. Lana sortit de ses songes, assise sur le canapé, les jambes repliées sous ses fesses. Depuis quelques mois, Sean Lockley, son ancien collègue, vivait avec elle. Ils avaient été amants par le passé, l'étaient à nouveau depuis qu'une enquête commune les avait rapprochés. Lana s'était laissé charmer par les avances de son ancien équipier qui lui apportait tendresse et sécurité. 477

— J'arrive dans un instant, répondit-elle. Sean se pencha par-dessus le canapé et posa un baiser sur son front. — Ok, à tout à l'heure alors. Il s'éloigna et Lana récupéra son téléphone portable sur la table basse. Elle avait envoyé plusieurs messages à Emma, sans réponse. Elle était inquiète, tendue, tiraillée par un mauvais pressentiment. Elle connaissait le background d'Emma, savait à quel point certains flics pouvaient basculer quand tout allait mal. Et pour Emma, ce qu’il s'était passé aujourd'hui au tribunal était certainement la goutte d'eau. Elle soupira en silence et se leva finalement. Peut-être angoissait-elle pour rien... Peut-être Emma était-elle déjà profondément endormie dans son lit et serait de meilleure humeur demain matin au bureau... Elle s'apprêta à partir vers le couloir quand son téléphone sonna. Elle vérifia le numéro inconnu et décrocha : — Oui ? # Inspecteur Queen ? — Oui c'est moi, qui est à l'appareil ? demanda-t-elle d'un ton inquiet. # Je suis l'infirmière Holden, je vous appelle de l'hôpital Mercy. Nous devons signaler à la police les blessures par balles et Emma Nollan a demandé à ce que nous vous prévenions avant d'être emmenée en salle d'opération. Le sang de Lana se glaça d'effroi. Une agression par balles ? Emma était emmenée en salle d'opération ? — Je... J'arrive tout de suite, dit-elle sans attendre. Elle raccrocha, se précipita vers la chambre tout en ôtant 479

son pantalon de satin et son débardeur en coton. — Emma est à l'hôpital, annonça-t-elle à Sean. Ce dernier se redressa aussitôt, vêtu d'un simple short en tissu. — Quoi ? Emma ? Tu parles de Nollan ? Qu'est-ce qui se passe ? — J'en sais rien, répondit Lana en enfilant rapidement un pantalon... Quelqu'un lui a tiré dessus. Sean se leva. — Attends, je t'accompagne. — Non, fit Lana. Je dois y aller, je t'appelle plus tard. Sean la vit quitter la chambre tout en boutonnant son chemisier. Si Lana préférait y aller seule, alors il se résignerait à l'attendre jusqu'à son coup de fil... * * * Le jour se levait sur la ville de New York et Lana avait patienté jusqu'alors dans une salle d'attente du bloc opératoire. On lui avait dit qu'Emma était arrivée seule à l'hôpital, couverte de sang, avant de s'effondrer par terre et de donner son nom et son numéro de téléphone. Lana n'avait pu obtenir aucun autre détail de la part du personnel. Un médecin approcha et Lana demanda : — Comment va-t-elle docteur ? — Elle est hors de danger, répondit-il. La balle s'était logée non loin des poumons et l'extraction a été plus longue que prévu. — Est-ce qu'elle vous a dit quelque chose, est-ce qu'elle vous a parlé ? — Non, elle a juste eu le temps de nous dire de vous 481

prévenir avant de perdre connaissance. Nous avons constaté plusieurs fractures aux côtes en plus des blessures multiples au visage et aux poings. Elle avait bu. Ses analyses de sang ont révélé un taux d'alcoolémie à un gramme dix et de toute évidence, elle s'est battue avant qu'on ne lui tire dessus. Une fille qui ne posait pas de questions, qui ne rejetait pas ses allures garçonnes. Seul soutien de son entourage en dehors de la section, Karen était devenue sa marraine puis son amante, mais ce soir, avant même qu'elle ne quitte le commissariat, Karen l'avait appelé pour lui dire qu'elle ne serait pas là quand elle rentrerait... Fin...

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