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December 23, 2017 | Author: grindaizer | Category: Demonstration (Protest), Mosque, Politics, Government, Elections
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Nesroulah Yous A vec fa collaboration de Salima Mellah

Qui a tué à Bentalha ? Chronique d 'un massacre annoncé Postface de François Gèze el Salin/a Mellah

ÉDITIONS LA DÉCOUVERTE 9 bis, rue Abel-Hovelacque PARIS XIII" 2000

A Anne

À mes enfallts et il tous les enfants victimes, ljuij'espère pourront vivre libre,~ lflljour et pardollner «

Je veux lOumer la page, mais je veux la lire avanr. » Oriss Benzekri, prés ident du Forum Vérité e t Justice au Maroc

Catalo!!a!,!e Éleel"'. Bihlio!,!r~phie Yl~ ;.~. Ne,roulah Qui atu de Baraki. Le père survei ll ait les milita ires e t en 19%. en fo rçant un barrage, il a été tué. Sida li a comme ncé à constru ire en 1989 sur une des rucs tran sversa les du boul evard . II s'est installé e n 199 1 à Haï el-Djilal i et a ouvert une gargote pour les ouvriers qu i travaillent dans le grand chantier du quartier: ils bâtissent alors une pan ie de la c ité 200 logements et de nombreuses maisons individuelles. Plus tard, Sidali aménage une plu s grande gargote et pui s il ouvre un magasi n d'alimentation . Les voyous se sont serv is de lu i et il s'est lai ssé fai re par lâcheté. Au dé but. un certa in Voucef, de la cité 200 logements, le père Be namrane et d'autres l'a idai ent et étaient nourri s e n éch ange. Ils venaient chez lui , se servaie nt e t se comportaie nt comme s' il s étaient chez eux. Mais c'est avec l'appari tion des groupes qu' il a été de plus en plus acculé et s'est compromi s. Le malheur de Haï el- Djilalj est venu de lù. Le local de Sidali es t devenu une es pèce de pe tit QG local. Il ne suit pas ces voyous par conviction, mais il a peur. J'ai discuté plusieurs fois avec lui: il ne sai t pas com me nt se déba rrasser de ces personnes. Entre-temps, les mil itaires instal lés au poste avancé ont co mpris q ue Sida li es t une plaque to urna nle pou r ce groupe. Il est boîte postale, lieu de regroupement et de survei llance. lls fo nt pression sur lui pour qu ' il change de comportemenl el c'est à partir de ce momen t-là qu'il refuse de faire le jeu des Benamrane. Cela s'est passé fin novembre 1996. Je me trouve à Baraki et j'apprends qu ' il y a eu une tueri e la veill e. Je m'e mpresse d ' aller à Bentalha pour me renseigner et on me raconte que, à la tombée de la nuit , un g ro upe armé - dont Djeha el Chergu i - a fait une descente. Il s sont arri vés en voitures, et l'une s'est arrêtée chez S idali. Djeha Benamrane et Cherg ui e ntrenl dans III mai son. Penda nt près d'une heu re, les voisins entendent des cris et des disputes à l'i ntérieu r de la demeure. Dj c ha accuse S idali d 'avoir ,( ve nd u" so n père , tu é une semai ne auparavant dans une embuscade mililaire. Il prétend 11 5

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la ml... guerre (/II 4lUJ/irlil'lI

que Sidali aurait changé de camp. O n dit que ce dernier aurait démenti ce qu ·on lu i reproche . La rumeur eolporre aussi que. quelque temps auparavant. Omar, le frère de Dje ha, aurai t demandé la main de la fi lle de Sidali et essuyé un refus. Omar, pour s'assurer que ce rejet ne le concernait pas personnellement, aurait envoyé une fe mme chez Sidali pour demander la main de sa fil le pour son frère policier et Sidali aurait accepté . Ce sont peul-être des ragots. Sidali s'était aussi rem is à fume r, alors qu'à cette époque les interdits des groupes étaient encore de rigueur ct il n'y avait que Kilddour qui en avaÎt le droi t. (II faut savoir que les interdits sont total ement di ffére nts d ' une région CI d' un endroit à l'autre: cela dépend de chaque émir, qui les dicte . Par exemple, à Larbaa, des gro upes se sont introduits d ans des mai so ns pou r casser to us les té lé vise urs. À Bentalha, la parabole était interd ite - la tête de l' adjudantchef sur l'assiette était un avertissement - , alors qu'à Baraki plus de 60 % des gens avaielllia parabole,) Après la di sp ute, il s égorge nt Sida li, so n épouse don t l'accouchement est imminent et ses deux fi Iles. Une parente et Omar, le plus jeune fi ls de Si d al i, o nt la vic sa uve ct so nt e nfe rmés dans une pièce. Le grand , Mohamed , est à celle époque en pri son pou r une affai rc de vol dans unc bijouterie . Les tueurs de la deuxième voiture se rendent entre-temps chez Abderrahmane, qui habite en face de la boulangerie, et le traînent dehors. Son fïls, un jeu ne homme de vingt-deux ans, les su it, Ile comprenant pas pou rquoi on emmène son père. Il s les em poigne nt alors to us les deux et les égorgent. Pui s il s se re ndent chez Cheik h Rabah. le propriéta ire d'un café . Il s sc jettent sur lui et l'exécutent, ainsi que son fïl s et son gendre. Je ne sais pas pourquoi il s o nt tué Abdcrrahmanc . Il travaillait chez Bi ot ie, une usine pharmace utiq ue à Se mmar. Avait-il refusé de les approv isionner en médi caments ? Ont-ils tué Cheikh Rabah parce qu ' il gère un ca fé et q u'on y j oue aux dominos ? C'est possible, étant don né que, par le passé, il aVilit été menacé à plusieurs reprises. Je ne sais pas q uel est le lien en tre les trois groupes de personnes tuées . Mais les assassi ns n'ont pas encore achevé leur sale boulot. puisqu'i ls sc ren de nt dans le magasin de C ho uch et st! renseignent à propos d 'une fille, du nom de Kicha. Il s veu le nt 116

l'(lr mù pre/ld le de,HIIS

savoir où e lle habi te . Son frère, un ami du fï ls de Chouch Boukhadra, se tro uve par hasard dans le magasi n. Il veut savoir pourquoi il s cherchent sa sœu r, o n lu i ré po nd de ne pas se mêler de ce qu i ne le regarde pas. Décontenancé, il donne l'adresse. Les « terros» surgissent chez la sœ ur et il s la tuent. Je ne sais pas qui encore a été tué, mais ce soir-là il y a e u treize morts.

La vengeance des patriotes Les militaires débarquent le lende main chez Sidali avec sa parente rescapée de la veille. Quand elle ouvre la pOrle, une bombe expl ose . Il y a cncore des morts . Le q uarti er est e ncercl é. Les habita nts qu i sorte nt de leur demeure au petit matin pour aller travailler sont frappés et insultés, beaucoup sont parqués dans le stade. Plusieurs jeunes sont arrêtés, parmi lesquels Omar, le frère de Djeha le « terro », El -Keehbo ur et Ghazal , qui écopera de plu s de deux ans de pri son. Certains ont disparu depui s. Le fil s de Sida li , Omar, est placé dan s une fam ille proche tandi s que l'autre fil s, Mohamed, emprisonné, est autorisé à assister à l'enterremen t. Peu de temps après, il est relâc hé et s'installe dans la maison parentale. Il veut deveni r patri ote ct, e n fait, je pense que c'est la raison pour laq uelle il a été relâché . Moi, je sui s abso lume nt co ntre le fait qu'on lui donne des armes, parce que c'es t un voyo u. Je sui s même intervenu auprès du com mandant pour qu'on ne lui en remette pas . Le surlendemain, les patri otes de Baraki viennent très tôt le matin pour arrêter El-Azraoui, un pauvre gars qui habite lout près des vergers et chez qui les gro upes se rasse mblent pour se restaurer, el trois autres vois ins parmi lesquels Lyes. le mari de Fatma, cell e qui lave le linge des groupes. Ce dernier prend la fu ite avec les autres, mais fi nalement ils se rendent à la brigade de gendarmerie; il s son t emprisonnés et passe nt e n j ustice. Près de troi s mois plu s tard, ils sont relâchés, mais il s ne reviennent pas à Haï el-Dj ilal i. 117

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Le s pat riot~ s vont auss i chez Mohamed Bo uamra , aUa.\· t ( Pil ote )), qu i es t liquidé par l'un d'entre eux , Hamid B., un patriote de Baraki . Mais le pauvre gars ne meurt pas sur le coup et agonise en perdant tOUI son sang. Sa mère appelle en vai n de r aide ct le tran sporte dans une brouelle sur une distance de cent mètres. Il fin ira par rendre l' âme. On dit que« Pil ote» travailla it pour les gro upes. Fodhil. lu i, reçoi t la visite des forces combi nées l' après- mid i ct est embarqué; il a di sparu depui s. Quelques jours plus tard, un bulldozer rase la maison d ' EI -Azraoui (n° 80). La famille , sans abri. quine le quartier. En fa it. ce sont IOUS des hommes qui ont servi les groupes armés de gré ou de force, mai s qui n' ont commis aucun crime de sang. En revanche, les vérita bles assassins sont en liberté. Des patri otes de Bilraki m' ont raconté qu' i Is avaient plus d ' une fois dé noncé 11 la ge ndarmerie des personnes connues pour leur activi sme mai s q ui n 'avaie nt pas été arrêt ées, alors que d ' autres qui Il ' avaient vrai ment pas fait grand-chose di sparai ssaient ou écopaient de plu sieurs années de prison. Le patriote Ham id B. il tué beaucoup de gens, sans être pmti queme nt jamais inq uiété par le s force s de séc urité. En se pte mbre 1997, une q uin zai ne de jou rs avant le massacre, alors que la pa nique et la peur sont à leur summum e t ont envahi to ut l'A lgérois, Moussa, Hamid B. et son cousin Krimo font une descente un soi r 11 EI-Harrach, pour prêter main-forte à un de leurs amis, ha bitant la cité 200 logements, q ui s'y est fa it agresser; il s fo nt sorti r des gens de leurs maisons. Ceux-ci ont cru avoir a ffaire à des terrori stes et ils ont ameuté tout le quart ier. Des hom mes de la SM les ont arrêtés chez eux et les o nl interrogés. À la suite de ce t é pi sode, Ham id B. a été désarmé pendant deux ou Irois mois, mai s il a pu reprendre ses fo ncti ons peu après . Krimo B. et Mou ssa o nt élé eux au ss i privés de le urs armcs mais, .. près llvo ir été interrogés par la SM. ils o nt repri s leurs aCli vités comme par le passé. Mai s re venons 11 l'assassinat de Sidali, en novembre 1996. Les habitants de Haï el-Dj ilali ne comprennent pas ce qui s'est passé pendant ce lte journée fatal e . Il s ne pleurent pas Sidali mai s Abderrahmane, une personne très appréciée, ainsi que la jeune lïlle. Celle tuerie a des répercussions considérables dans leur percepli on de la situati on générale. Certains se révoltent et

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"aml/Et! l'fl'Jld fI' dessus

veul ent avoir des armes. Nous, nous étions déjà chez ma mère et nous y resteron s encore pour un certain temps. Je me sens me nacé personne ll eme nt , parce que ma tan te dit à ma mère qu'Omar, le frère de Djeha, qu i se trouve en prison avec son fil s, l'aurait prévenu que j'aura is déno ncé des mem bres de groupe c t qu'on voul ait ma peau . J 'év ite donc Be ntalh a quelq ue temps et ce n'est que lorsque j'apprends q ue Djeha est mon que nous songeons à rentrer. Dj eha sera pri s au piège ent re Baraki e t Ben ta lha , unc se maine après la mort de Sidali. Étant connu de tout le monde, il ne pouvait plu s c irculer fac ilement. Il rencontre à Haouch Mihoub une patrouille militaire et SI.! réfugie avec quatre ou cinq de ses acolytes dans une mai so n. Il pre nd en otage les habitants pendant deux ou troi s jo urs. Une femme réussî t à s'échapper et préviem la brigade de ge ndarme ri e. Dj e ha , s'é lant rendu compte de sa fuit e, se vcnge sur so n mari et quelques autres membres de sa famill e. Les forces de sécurité cncerclenl la mai son et, au bout d ' une j ournée de bl ocus, elles les débu squent. J' étais au trava il et, quand je rentre en fin d ' après-midi à Baraki,je descends à la station d 'esscnce et je vois une foule rassemblée à l'arrêt de bu s. On me dit que les soldats vien nent ju ste de transporter les cadavres à la morgue de la polyclinique dl.! Baraki. Je m' y re nds parce que j e veux les voir de mes pro pres yeux, m .. is c'est tro p tard . Il y a un monde fo u, des femm es et des jeunes. r ap prends que les cadavres ont été accrochés pendant un bon moment aux grilles du parc de la mairie à Baraki, après avoir été transportés ct ex hi bés dans Bentalha dans une 404 bâchée. Ma fe mme, qu i va de te mps e n temps à Haï el-Djilali pour prendre des affaire s ou rendre visite aux voisines, appre nd par Sa lim a, notre vois ine directe, que les patriotes patrou illent dans le quartier et marquent d ' une croix toutes les maisons inocc upées , dans l'intention de les faire démoli r. Qu and ma femme m'en informe, je me rends à Haï el-Djilali ct j'apprends que c'est la garde républicaine qui a ordo nné aux patriotes de préve nir les habitan ts et de leur conseille r de ré intégrer leur maison. Je n'ai jam:lis compris pourquoi la garde républi caine, en pri ncipe chargée de la protecti on du président de la République, est interven ue d ans le s affa ires d'u n modeste

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quartier d'une commune de la grande banlieue d 'Alger. On nous oblige en tout cas à revenir. Et on nous menace même! Malgré cet ave rt issement , il fa ut e nvi ron un mois pour qu'u ne partie des anciens habitants se réinstalle dans Bental ha. Les gens viennent et partent, se concertent entre voisins, mai s ne se déciden t pas fa cilement. Nou s allo ns voir le capi taine M' rizck, à la caserne mi lita ire de Baraki ; c'est lui qui se charge d ' organiser les patroui lles dans le quartier. Et nous lui expliq uon s que nou s ne compto ns reve nir que si certai nes conditions so nt sllti sfa iles : nous vou lo ns un poste mîlitllire dan s Haï cI-Djilali. au ni veau de l' oued, et nous voul ons des armes. D'ailleurs, celle idée d'armement a été lancée par les militaires eux - mêmes. Quand ils faisaient leurs ronde s, ils nous répétaient q u'il s n ' al laien t pas tarder à se retirer pour rejoindre leurs casernes el que 110US serions alors livrés à nou smêmes . Il s nous conse ill aient donc de nous préparer à nous défendre ct suggéraiellt de déposer des dossiers de demande d'armes à la caserne. Ce qui me décide à revenir à Haï el-Dj ilali, c'est le fait que les miliwires font des promesses et qu ' il est même questi on d'installer la garde communale au niveau du kiosque . Entretem ps, nous contactons les habitants qui ont fui dans les alentours pour les prévenir des intentions des mil itaires. Malgré le délai acco rdé par ce s derniers. ce rta ines fa milles ne sonl revenues qu ' après des moi s. Mu stapha Benyahia , qui ava it loué sa mai son, Ile s ' y est déc idé qu ' une semai ne avant le massacre, À chaque fois que je le voyais dans la rue ou que je passai s à la mairie de Baraki o ù il travai ll ait. il me demandait quelle étai t la situat ion ct si je pensais qu ' il pouvait reven ir. Je lui di s que je ne pouvais rien décider pour lui . Mê me Abelkader Tlidji ne, le père de Fouad , qui avait fu i Bental ha pendant plu s d ' un an , reviendra chez lui après avoi r échappé à un ancnta! 11 la bombe le 9 juillet 1997 à Belcourt , un quartier d ' Alger. Abdelkader me dira: \( On n'est en sécurité nulle part! Si cela doit arriver, autant mourir chez soi . »

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La vie reprend dans le quartier Après la mort de certains membres de gro upes armés ct avec la présence de l' armée et des gardes communaux , une certai ne confi ance revient à Bentalha. La vie sociale reprend peu à peu . Je me remets aux travaux de la mai son et je pousse les autres à faire de même. Je fai s partie de ceux qui pensent qu 'on ne peut pas lai sser tant de maisons inhabitées. qu' il nous faut trouver des locataires, déblayer les endroits où les taill is et buissons bloquent la vue vers les vergers, construire des murs de c lôture, etc. Les militaires qui ont abandonné leurs mai sons dès 1994 nt: les ont pas toujours louées. Nous pensons que, pour garanti r no tre sécurité, il faut être nombreux sur p lace. mai s aussi savoir quelles familles héberger à Haï el-Djilali. Les patriotes veulent y place r leurs gens, mais nou s ne leur fai so ns pas confiance. Nous voulons que les personnes qu i emménage nt aient des attaches fami liales dans le quartier et non pas fai re un com merce de maisons vides en exigeant des comm iss ion s, comme le font les patriotes. Depui s le début de l' année 1997, de plus e n plus de gens fui ent d'autres régions. Des massacres sont perpétrés dans la région de Médéa, notamment à Beni Slimane et TablaI. où les GIA font la guerre aux autres maquis. Caïd-Gacem est sous le contrôle à la fo is des groupes et des mil itai res. Tous ces ge ns qui fuient ne savent pas où aller. De notre côté , nous espérons re nforcer la cohé s io n socia le dan s le quartier grâce a ux nouveaux venus, Mais il nous fau t demander l' autorisation aux propriétaires. Je vais voir trois mil itaires qui ont construit près de chez moi ct je les préviens des menaces de destruction des maisons. Ils se rendent personnelle ment ta la caserne de Baraki et demanden t une entrevue avec le capitai ne M' rizek . Par la suite. il s nous permetten t de trouver des locataires pour leur mai son. Chez le com mandant Hassan (n° 55), c' est Warda qui se réinsta lle . Elle y avai t déjà habité, mais elle avait quitté Bent;l lha après la mort de son mari , Cheikh Larbi. Elle emménage avec ses deux pet its enfants. Dans la maison de l'adj udant-chef de la SM (n047), nous avons installé Abdelkader Menaoui, originaire de Caïd-Gacem, et, dan s celle du capitaine de la SM 121

la snlt!' gl/t!'ut!' 1111 If",,/idit'II

(n° 46 ), ce so nt deux ne veux de Mou ss a, Abdera7.ek et Ramdane, et leurs famî1les , originaires de TablaI. qui [.W!uvent y habiter il condi tion de continuer la construction. Des anciens habi tmHs de Bentalha reviennelll, co mme Messaoud (originilire de Tablat), qui travai lle à Baraki. Ces changements nous permeltent de créer une bonne atmosphère dans Haï ei-Djilllii et l'idée de s'armer mûrit de plus en plus. Abdcl kader Menaoui est l'un des dern iers à emménager à Haïel -Djilali. en mai oujui n 1997. Il a fui Caïd-Gacern parce qu 'i l y a rencontré beau coup de problèmes. Sa fille, mariée à un pol icier qui a été ;rssassiné, est sans ressources. Elle habite chez ses parents avec son bébé. Les groupes armés dé barquaient sa ns cesse chez Menaoui , ordonnant de les lIider, cc qu ïl refusait, puis c'est l'armée qui venait et le traqu

Je dois monter jusqu ' à la terrasse to ut seul , les autres étant déj à parti s. Après avoir reconnu quelques visages qui éta ient avec moi sur ma terrasse ,je me rappelle d u serment que j ' ai rait à la jeune Souhila, la fi lle de Nass ia. Je demande auss itôt si la fam il le Bo uli est là et quelqu ' un me répond que oui. Je s ui s SOUlllgé CI je n'en dem ande pas plus. Ce n' est que le lendemain que j ' apprendrai que chez AÏlar il n'y avait que les deux ti lles les plus âgées et les deux peti ts gMçons. Nassia ct sll!ille Souhi la, ainsi qu ' EI -Hadi . étaient restés chez Warda. Lui n' a pas voul u abando nner sa mère . Et la mère es t certainemen t restée à cause de sa fi lle qui paniquait. Les deux on t été tuées, tund is qu ' EI-Hadi a sauté de la terrasse avec Amine, le !i ls de Sali ma, e t Ramdane. Ils ont fait le mon et ont s urvécu. Quand j'llrrive sur la terrasse, il . » Pour autant, au-de lü de cette confusion :;cicmment entretenue entre l'A IS et les GIA (on sait que nombre de ces dernier:;, su rto ut à pani r de 1995, Ol1t ~.~ .

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en fait mené une guerre ineXpiable à l' AIS et aux au tres fractions ne partageant pas leurs posi ti ons), n'y a-t-il eu aucune revendicali on de groupe islamiste '! Ce lles qui ont été rendues pu bliques proviennent toutes du GIA , le plus sou vent sous la fo rme de communiqués incendia ires diffu sés à part ir de Lo ndres. Ai nsi, en février 1997, le GIA an nonce ~~ un e " nouve ll e phase" de la guerre avec le pouvoir algérien, promettant des explosions au cœur de la capitale. [ .. . ] Dans ce communiqué, le GIA promet d' égorger "tous les apostats et leurs alliés dans les villes et les villages" el de provoquer "des exp los ions en pl e in cœ ur d'Al ge r et d e Blida" \7 » . S'agissant des massacre s de Raïs, Sidi- Youcef et Bentalha, le seul documen t qui pui sse être considéré comme une rev~nd i cation est le « communiqué n° 5 1 » de 1'« ém ir » Antar Zouabri , publi é à Lo ndre s par AI -Ansar (so uvent présenté comme l'organe des GIA à l'étranger), le 27 septembre 1997, où l'on peut li re notamment: « Le reniement de ce peuple mécréant de sa fo i, son apostasie ainsi que son refu s de se so lidariser et de se rallier aux moudjahidin n' affectera en rien notre volonté el not re résolUl ion [d' all er de l'a van t] et ne nou s portera, avee l' aide de Dieu, auc un préj udice. Ainsi, tout ce qui a été commi s comme crime, égorge men t, banni sse ment, déplace ment de populations, incendi es, confi scat ion de biens et appropriation de femmes [, .. ] ne fut ri en qu· une offra nde il Dieu .18. » L'essentiel du communiqué est une diatribe virulente contre les « tyran s» au pouvoir, l'appel à la trêve de l'A IS et la « complici té» de la France . Mais on n'y trouve rien qui permettrait de lever le doute sur l'identité véritable de son ou ses aUlCurs. Un doute exprimé par les services de renseignements occi dentaux, mais aussi pllr de nom breux observateu rs indépendants. Ainsi. pour le consultant Antoine Basbous, « la diffusion de ce texte a suscÎlé beaucoup d'interrogati ons; ce chefd'œuvre du genre aurait pu être fabriqué par le bureau chargé de l' in toxication ou de la lutte contre l'i slamisme au sein de la

s,. .16. In,erview de Ah~ Une information p[ausible, bi en que non confirmée par d'autres sources 41. Dans cc m ~ m e article, Patrick Forestier affirm e que des milita ires so nt imp liqués dans Ics massacres. Mais l' explication qu'il en donne - q ui scra souvent reprise - est pour le moins sujene à caut ion. En s'appuyant sur un « rapport confident iel de la Sécuri té militaire », il avance que les GIA aurai",nt perpétré les ITliISSaCres pour le compte de « militaires qui appartiennent il la nomenklatura du com plexe mi 1itaro- industriel rangée derrière le président Zéroual :», o pposés au camp des « éradicaleurs » dirigé par [e général Mohamed Lamari. Leur objectif aurait été de facilitcr la mainmi se du «clan des affairi stes:» s ur Ics cent mille hectares constructibl es de la plaine de la Mitidja, appartenant à J'État et devant êt re privati sés au déb ut de [998. En « vidant les fermes collectives de leurs habitants » par la terreur. ils e mpêche rai e nt ces dern iers de fai re j oue r le ur dro it de préempt ion et laisseraient le cham p libre aux affai ristes de la hi érarchie militaire.

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Amuine H A",,~ l s.l_ "1.rl:s a"oi r refuse d' obéir aux injonclion~ dc.~ mili taires de s' armer. les habi· l"nlS ;é GI\M~ ".~ .« L' DllcntJI ,le r aé '"pol1 ~. i" Rh'" )~n , ~s S,\NHK"~"Tlf:kl .~. & ,Imme ll/ldlw :'

s urt ou t ri parti r de 1993-1994, da ns l' A lgé ro is mais auss i aill curs, les qu artiers populaires ayant sy mpathi sé avec le FI S sont écrasés par un vérit:lble « rouleau compresseur », dans le but de terroriser CI de détru ire to ut lien ent re une population hostile au pouvoir et les is llll11 istes armés. Toutes les formes de violences sont cmployées : r..Itissagcs, dynmnitilges de maisons, assass inats «c iblés », mi tra illages à la sortie des mosquées, arrestations clandestines ou à gnmd spectacle, IOrlllres d ' une c ruau té ino uïe - le c hal umeau es t couram ment utilisésuivies de l'exposition de cadavres décapités ... Loi n d ',lvoir l'effet escompté, cette violence va w ntribuer :a grossir I c.~ r:lIlgs de l'oppos ition armée. Certai ns jeunes serOnl pris en charge par les G IA, d 'a ut res créeront le urs pro pres groupes locaux . Ex altés et avides de vengeance, ils mu lt iplieront les :Ittentats et les assassinats« ciblés >. - d ' abord de re prése nt:lIlt s de l' É tassinats). C' est aussi l' époque où, d;ms de no mbreuses vi ll es de l' Algéroi s, les G IA et les gro upes locau x « assujettissent la po pul ati on à un sévère ct vio lent contrôle soc ial. Des centai nes d 'écoles sont incendiées. La vente de eigarell es et de journa ux j ugés inféodés a u régi me es t pro hibée, [ ... 1 Le po rt du hidj ab pour les fem mes es t ex igé tand is que la collec te des impôts est prosc rite !lO. » De plus en pl us de gens ruient ces quartiers. 1994-/995 : f' ill srruml!lIwlisalùm dt!.~ GIA

Au printemps 1994, la guerre c hange d'éc helle et, en partie, de natu re. En premier lieu, l'armée mu ltip lie les opérations de grande envergure contre les maquis des moudjahidi ncs proches

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du FIS et leur porte des coups sévères: « Parfois bombardés au na palm comme à Mertah, les maquis du M IA sont, dès 1994 , dans l' incapacité de ronctionner, ce qui provoq ue la dispersion de ses combattants 61. » Nesroulah Yousconfinne dans son réci t la présence de ces maq uis ct comment l' armée reprend le dessus à partir de la mi- 1994. Après ces ex pédi tions mi litaires, les premiers maqu is du centre sont déci més et pour un certai n temps, d.ms l' Algérois, il n 'est plus qu esti on q ue des G IA (Nes ro ul:lh raconte q u' ils n'étai ent pas présents j usque-là à Bematha ; ce n'est qu' après la fa me use évas ion de Tazoult, en mars l 994 , que les groupes loca ux leu r fo nt allége anc e). Ceux-ci anno nce ront, en mai. l' unificati on sous ce nom de plusieurs gro upes, dont certai ns ~{ resc apé s» des maqui s (i l s' agi t notamm ent d ' une parti e de ceux du MI A et du MEl ou de ce qu ' il en reste, de Hijra wa rakJir et de mil itants du FIS du eouran! de la la:. 'lira , sous la directi on de Mohamed Saïd). L'A IS, créée deux mo is plus tard, restera cantonnée à l'Est et à l'Ouest du pays. Oc sanglan ts règlements de comptes se mu ltiplient au sein des G IA : le gro upe de Mo ha med Saïd sera ains i anéiln ti fi n 1995 ; le chef de la LIDO (Ligue islam ique pour la daawa et le djihad), actif dans la région de Médéa, rapportera que les G IA leu r ont déclaré la guerre à parti r de 1995, et qu' il s les ont alors q uittés pour créer plus tard , en 1997, la Ll D() 62 (leur ka riba _ unité combattante - a connu pl us de pcnes dans les combats avec les G IA qu'avec l' armée). De plu s en plus de gro upes feront défection, dénonçant la dérive des G IA qui ont claireme nt déclaré la guerre au peuple algérien, qualifi é d' « impie» et de « mécréant ». Les G IA s'en pre ndront également à l' AIS et su rtout aux fa milles de mi litants des groupes qui ne leur font pas all égeance. C'est là la première dérive de la guerre: dilns l'A lgéroi s. au début de 1994, les G IA bilscu lent dans une ~{ log ique de terreur pure et si mple, qui n' épargne plus la popuiation 6J ». Nesroulah 61. Luis MilnlNI 1. UI Il''''''NTI .MS Si\N.~ 1M'>'-, II·.MI:S. Ù' (/r"",~ "'J.:hir". "l'. (";1 .. p. 4.~.

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Vous fait état de cc« cortège des morts» dont on ne sait plus qui les a tués: les terrori stes ou les militaires? Mai s très vite, les habitants de la région comprennent confu séme nt que ceue di stinction a pe rdu son sens: les premi ers peuvent être de s soldats déguisés. les seconds s' accommodcnt parfaitement de la pré se nce de « terros » connus de tous. Et les un s co mme les autres mènent le même type d'actions. À Be ntalha et a Baraki , Nes roulah montre bien que les groupes locaux bénéficiant jusqu'alors de la sy mpathie de la population se transforment progressivement: la plupart des combattants issus de la région ont été tués par l'armée, et ils sont remplacés par des voyous et des illconnus qui, à partir de 1994. agissent au nom des GIA et s'i mposent de plu s en plus par la violence et le racket. Les habitants de ces quartiers sc plaignent de l'abandon de l'année. qui les laisse impui ssants face à la violence des groupes. Une habitantc de Bentalha expliquera à la BBC : " Ils vivaient parmi nous, personne ne peut vous dire le contraire. Dès la tombée de la nuit , l'armée partait et eux, ils arri vaient avec leur tenue afghane. Et il s sc baladaient dans le village, mai s I·armée ne leur a ri en f,lit. Nous, tau! çc qu 'on pouvait faÎre. c'était de prévenir l'armée, mai s elle ne fai sait rien ""'. » Pire. mi li tai res ct " terros») semblem souvellt marcher main dans la main . À preuve. cette terrible notati on de Nesrou lah : « De plus en plus de gens se plai gnent à la police des agissements des groupes; et peu de temps après, ils sont liquidés 6.< .» C'est cette conviction que certains groupes locaux bénéficient de complic ités au sein des forces de séc urité qui explique la méliance de la population vis-à-v is ces dernières. Une méfiance alime ntée par des nouvelle s étonnantes en provenance des régions mon tagneuses proches de Bentalha : de plu s e n plus so uven t. on parle d'inc ursio ns d'hommes débarqu és d'hélicoptères. coiffés de bandeaux allestant une identité « islamiste .), terrorisant et massacrant des civils dan~ les villages. Après ces" nettoyages », l'armée se réinstal le. Il devient évident que des faux maqui s co mbattent les vrais. rom t>4 . IJrlll"III,j : AW"I'Jif li ."" 11/".....", T". Cpu;s l'J9J, le sigle GIA 3 ~I~ ut i..."" ,ms... hicn par des ,n""l'C ' réelleme nl auhlllomcs Ilue pa . ' ..

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