Musique HD

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La musique en Haute Définition

Les majors et distributeurs tentent une énième parade contre le téléchargement illégal : la musique en haute définition. Cette étude démontre qu’en plus d’être vendue plus chère, celle-ci s’avère être en réalité une chimère technique et audiophile.

Mathieu Vendret

Mai 2013

Auteur : Mathieu Vendret

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Sommaire 1

INTRODUCTION A LA MUSIQUE H.D .............................................................................. 3

2

LE COMPACT DISC AMENE LA NUMERISATION .......................................................... 5

3

LA RESOLUTION .................................................................................................................. 6

4

L'ECHANTILLONNAGE ...................................................................................................... 7

5

LE MASTERING ..................................................................................................................... 8

6

LA REMASTERISATION ....................................................................................................... 9

7

DEFINITIONS ET EXPLICATIONS DE LA HD ............................................................... 11 7.1

LA RESOLUTION : 24 BITS .................................................................................................................................................... 11

7.2

L'ECHANTILLONNAGE : 192 KHZ ..................................................................................................................................... 12

8

9

FICTION ET REALITE ........................................................................................................ 14 8.1

LA FICTION : CE QU’ON ATTEND DE LA MUSIQUE HD .................................................................................................. 14

8.2

LA REALITE ............................................................................................................................................................................ 15 8.2.1

La réalité théorique ........................................................................................................................................... 15

8.2.2

Le sur-échantillonnage ...................................................................................................................................... 16

8.2.3

La réalité par l'écoute ....................................................................................................................................... 16

TESTS D’ECOUTE ................................................................................................................ 19 Take 6 - Doo Be Doo Wop bop! - Get Away Jordan ............................................................................................................. 19 Michael Jackson - Bad (1987) - Bad .................................................................................................................................... 22 Diana Krall - We Just Couldn't Say Goodbye....................................................................................................................... 26 The Rolling Stones – Start Me Up ........................................................................................................................................ 29

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11

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LES AUTRES COTES…OBSCURS ....................................................................................... 31 10.1

VOTRE SYSTEME ? .......................................................................................................................................................... 31

10.2

LE STOCKAGE ................................................................................................................................................................. 31

LES ASPECTS ECONOMIQUES ......................................................................................... 32 11.1

POURQUOI LA MUSIQUE HD (POINT DE VUE DES CONSOMMATEURS) ? ............................................................... 32

11.2

POURQUOI LA MUSIQUE HD (POINT DE VUE DES VENDEURS) ?............................................................................ 33

CONCLUSION ...................................................................................................................... 37

Auteur : Mathieu Vendret

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1 Introduction à la musique H.D Notre façon d’écouter la musique a évolué et s’est démocratisée au fil des années, pas seulement grâce aux radios ou à la télévision. L’informatique, donc le numérique, et surtout internet, ont entrainé beaucoup de changements sur le partage des informations. Jadis cantonnée au support du compact disc (CD), annoncé sur le déclin depuis de nombreuses années, internet s’est chargé de créer une mini révolution dans nos habitudes musicales. Mais, même démocratisée, la qualité de cette musique n’a pas évolué. Pire, avec l'arrivée du MP3, elle a même trouvé un regain d’intérêt avec une réduction de la qualité sonore en contrepartie. Doit-on en déduire que le succès populaire de la musique est proportionnel à sa praticité et non à sa qualité ? Peut-être pas, puisqu’aujourd’hui, à contre-courant de nos nouvelles habitudes, la musique en Haute Définition (HD) fait son apparition. Nous avons connu une évolution similaire avec la vidéo qui s’est standardisée sur une résolution de 1920*1080. Le gain est réel et indiscutable. Prémices de l'ultra HD qui arrive petit à petit, la vidéo HD apporte un vrai plus en terme de définition, relief, détail. Mais pour cela, il a fallu changer tout notre matériel, jeter nos téléviseurs cathodiques, nos lecteurs DVD, racheter nos films en Blu Ray, etc… avec toutes les augmentations tarifaires que cela implique. Cela a donc coûté beaucoup d'argent aux consommateurs, mais ravi le marché économique malgré leurs plaintes sur le téléchargement illégal. Aujourd’hui c’est donc au tour de la musique de se mettre à la Haute Définition. Par le biais de sites de téléchargements légaux comme Qobuz ou HDTracks, la musique HD commence à se faire une petite place sur le marché du téléchargement. Balayant les avantages du MP3 que sont la praticité, la facilité d’utilisation et la compatibilité, la musique en haute définition se veut

plus lourde à transporter, moins

compatible avec nos supports existants, et surtout vendue encore plus chère que les CD. Mais alors quel objectif et quel avantage nous propose cette nouvelle musique ? Réponse de la publicité : Une qualité imparable, au plus près de l’enregistrement original, directement issu des archives de l’ingénieur du son. Voilà de quoi nous parlons : votre album préféré avec une qualité sonore accrue, encore plus pure que le CD, encore plus dynamique...

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Mais le CD ne permet pas de stocker ce nouveau format. Tout bonnement incompatible. Vous devrez donc la télécharger à partir d’internet sur des sites marchands. Pour notre plus grand plaisir ou pour sauver le marché de la musique ? Car avant de se rendre chez nos revendeurs favoris pour renouveler cette fois-ci notre matériel audio afin de pouvoir lire cette musique, il serait sain de se poser certaines questions : La musique HD a-t-elle raison, comme la vidéo, de prétendre être indiscutablement de meilleure qualité ? Si oui, que cela implique-t-il pour nous consommateurs, désormais habitués au MP3 ? Nous allons donc essayer de décortiquer tout cela, afin d’abord de comprendre ce qu’est la musique HD, puis de la comparer au CD, format presque obsolète. J’ai donc testé. Plein d’espoir. Ma déception a été malheureusement proportionnelle à cet espoir. J’ai donc cherché à comprendre. Comprendre pourquoi le défi théorique n’était pas relevé lors de l’écoute. J’ai aussi cherché d’autres avis. Peu d’articles existent. Je ne suis pourtant pas le seul à dénoncer l’inefficacité de la musique HD, mais le sujet reste quand même confidentiel. Je pense que l’apparition de la musique HD provient de plusieurs causes, techniques et économiques. Ainsi, mettre à la portée du consommateur les raisons, complexes et peut-être dissimulées (nous allons le voir), qui ont fait naître et se développer la musique HD est un challenge intéressant. Cela dans un seul but : que les non techniciens mais mélomanes puissent comprendre ce qu’est la musique HD et ce qu’elle apporte ou non à la musique, et qu'ils puissent décider par eux-mêmes (et non par ce qu’en disent les distributeurs ou les intéressés) si un achat plus cher de leur musique préférée est justifiée. Essayons donc d’aborder la compréhension de ce format prometteur et de faire ressortir la réalité technique, commerciale et surtout auditive qui en découle...

La Haute Fidélité n'est plus. Place à la Haute Définition.

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2 Le Compact Disc amène la numérisation Au milieu des années 80, le CD a marqué une énorme évolution dans la reproduction musicale : la numérisation. Par rapport au vinyle, le CD s'est aussi révélé pratique et d’excellente qualité sonore. Avec en plus l'énorme avantage de posséder un stockage plus important. En effet, alors que le vinyle, dans son format 33 tours, ne peut contenir que 44 min, le CD lui, proposait à ses débuts quelques 74 minutes pour s’étendre par la suite à presque 80 min. Le CD se vante alors de prouesses techniques alléchantes (dynamique, rapport signal / bruit). Mais le vinyle continue sa petite route malgré tout et bon nombre de mélomanes et audiophiles justifient la coexistence avec le cd avec une réelle qualité sonore, différente du CD. Cela montre qu'au-delà de cette course à la distorsion la plus faible et aux chiffres (rapport signal bruit, dynamique, bande passante) qui caractérise notre époque, la qualité d'une production musicale peut être appréciée pour bien d’autres raisons que les seules caractéristiques techniques. Mais le CD possède néanmoins de gros inconvénients. Contrairement à ce qu’on nous a vendu, il est peu résistant dans le temps et il coûte cher. 30 ans après, on nous le vend toujours trop cher. Mais internet permet aujourd'hui de lui redonner une place économique avec la concurrence des sites marchands. Le CD a été une vraie révolution. Le signal audio devenait numérique. Deux normes principales régissent les caractéristiques du signal numérique : - La résolution - L’échantillonnage La résolution se quantifie en bits, qui déterminent le nombre de valeurs possibles, et ces valeurs sont les décibels. Le nombre de décibels disponible en fonction du nombre de bits indiquera deux choses : - La dynamique possible - Le rapport signal/bruit possible L’échantillonnage, lui, représente la manière de découper le signal analogique sur une seconde. Car pour passer de l'analogique au numérique, il faut découper le temps afin de coder sous forme numérique (bits). Ainsi, le compact disc est basé sur une résolution de 16 bits et un échantillonnage de 44.1KHz. Concrètement, que cela signifie-t-il ? Développons un petit peu ci-dessous la résolution et l’échantillonnage... Mai 2013

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3 La résolution Il est souvent résumé que la résolution, qui se quantifie en bit, détermine la dynamique possible et par conséquent le recul du bruit de fond. Or même si c'est loin d'être faux, il y a une petite différence. La dynamique ne détermine pas tout à fait le rapport signal/bruit, car un léger bruit de fond peut être créé sur les étages analogiques par exemple. Si une résolution permettra d’avoir 100 dB de dynamique possible, cela signifie que le son le plus faible audible sera à -100 dB par rapport au 0 dB relatif au seuil d’écrêtage. Le bruit de fond sera donc reculé à -100 dB. Sauf si un bruit de fond de l'étage analogique vient perturber ce seuil. Le codage sous 16 bits (notre CD) permet d'obtenir 65 536 valeurs différentes (2 puissance 16). Sur un bit (la variation de tension), on code le 0 et le 1. Pour convertir ces données en décibels, la formule suivante s'applique : 20 x log (Valeur Max/Valeur min), ce qui donne 20 x log 65 536 / 2, ce qui donne 90.3 dB. Il est néanmoins établi pour vulgariser qu'un bit vaut 6 dB donc 16bits (notre CD) * 6 dB = 96 décibels possibles (dB). Le CD a une dynamique possible maximum de 96 dB et "normalement" un rapport signal/bruit de 96 dB. Par convention, la valeur relative de la limite sonore avant saturation numérique est 0 dB. Donc avant d'atteindre cette valeur, nous avons 96 dB exploitables. Cela détermine ainsi le souffle (le peu de souffle) que l’on aura sur le CD et aussi la dynamique possible entre les signaux les plus faibles (-96 dB) et les plus forts (0 dB). Bien entendu, votre musique n'aura pas une dynamique de 96 dB (loin de là...). Philippe Muller, spécialiste de prises de son, indiquait dans Stéréo et Image Prestige n°74, "on a rarement besoin de plus de 10 bits utiles, cela fait 60 dB qu'en moyenne on ne dépasse que très rarement dans le cas des enregistrements de classique ou de jazz", alors une dynamique globale de 96 dB pour le consommateur, c'est suffisant. Surtout au regard des conditions dans lesquelles nous écoutons la musique. Si un détail, une fin de note, est enregistré à -75 dB, il faut pouvoir l'entendre. Et comment l'entendre si déjà votre système produit un bruit de fond non négligeable et surtout que votre environnement produit également de toute façon un bruit sonore de plusieurs dizaines de décibels ? Une pièce silencieuse atteint généralement 40 dB.

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4 L'échantillonnage L’échantillonnage, lui, est le nombre de découpes faites sur une seconde de musique. Le CD a une fréquence d’échantillonnage de 44.1 KHz soit 44100 Hertz. Cela veut dire qu’une seconde de musique sera découpée en 44100 morceaux (échantillons). Signal analogique Représentation

1 seconde

graphique assez connue de l’échantillonnage 44100 découpes

Il ne reste plus qu'à rassembler ces morceaux pour les convertir en un signal analogique audible sur nos enceintes. Et cela peut être en théorie problématique. Prenons l’exemple de la planche de bois d’une épaisseur de 1 cm. Coupez là en 44 100 planchettes et rassemblez ces planchettes ensuite pour reformer la planche. Elle ne fera plus 1 cm d’épaisseur. Et les jointures vont se voir, votre planchette ne sera donc plus lisse. C’est une représentation usuelle voire grossière de l’échantillonnage qu’on peut se faire. C'est LA différence majeure entre l'analogique et le numérique. En numérique, la théorie, tout du moins la croyance populaire, veut que, plus il y a de découpes, mieux c'est car cela augmente le lissage permettant ainsi de se rapprocher du signal analogique qui lui n'est pas découpé. Mais ce n’est pas vraiment réel. Car l’intégralité du signal est largement correctement capturée par l’échantillonnage courant de 44.1Khz. Cette valeur de 44.1 KHz n’a pas été choisie au hasard. Elle provient du théorème de Nyquist-Shannon, qui détermine que la fréquence d’échantillonnage doit être deux fois supérieure (2,3 exactement) à la plus haute fréquence reproduite. Ainsi, 44.1 KHz donne une fréquence maximale reproduite de 22 KHz (plus précisément 19,17 kHz), ce qui devrait être suffisant puisqu’une excellente oreille humaine n'entend « que » jusqu’à 20 KHz.

Le CD a donc 96 dB de dynamique possible et a une bande passante de 20 KHz environ. Mai 2013

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5 Le mastering Une arme de destruction massive ?

Pour que notre CD existe, commercialement du moins, il y a… le mastering.

Pour fournir la musique aux distributeurs afin qu'elle arrive chez nous sous forme de CD, l’ingénieur du son va procéder au mastering. C’est presque LA phase la plus importante durant laquelle sera créé le format final, celui qui sera diffusé. Notre ingénieur du son va pouvoir créer plusieurs masters à partir de ses pistes mixées en studio. Un de ces formats sera par exemple au format 16bits/44,1 kHz à destination de la maison de disque pour le CD, un autre en 24/192 pour ses archives etc… Ainsi, si un jour la maison de disque décide de diffuser un autre format que le CD, l'ingénieur du son ou le studio n'aura qu'à le fournir, car il aura bien été créé à l'origine. Une fois les pistes traitées et mixées, c'est par le mastering que sont définies les réelles qualités (compression, dynamique, format..) de l'œuvre complète pour la diffusion. Lors du mastering, l'ingénieur du son règlera donc son mix pour s'approcher du 0 dB, mais sans toucher le fameux 0 dB, synonyme d'écrêtage. A contrario, notre ingénieur n'a pas d'intérêt à ce que les crêtes les plus hautes se situent à -6 ou -12 dB donc loin du 0 dB, ce serait de la perte de niveau sonore inutile à l’écoute. En tous cas, au vu des niveaux sonores ambiants de notre environnement, des capacités dynamiques réelles de la musique enregistrée et surtout de la compression que l’on va imposer à cette dernière, il paraît déjà presqu’inutile d’avoir 96 dB d’exploitable…

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6 La remasterisation

+

+

+

Avant d’avoir eu l'idée de proposer au public la Haute Définition, et pour relancer des ventes déjà archi-amorties sur des anciens albums, les studios ont créé la remasterisation. Pour leur plus grand bonheur assurément. Car ils peuvent vendre deux fois le même album et de fait, de nombreux CD aujourd'hui sont réédités en édition remasterisée. La remasterisation nous a été vendue comme une amélioration ultime du son initial du CD, argument massue de la publicité sur les jaquettes. Le problème est que souvent, on constate une définition assez spéciale de l'actualisation et de l'amélioration dudit son. La plupart du temps, c’est même catastrophique. Car les ingénieurs du son essaient de mettre au goût du jour le son d'un album ancien à grand renfort d'égaliseurs et de compresseurs. Le but (à part de relancer des ventes) : mettre le son aux normes d’aujourd’hui, car la musique s’écoute aussi souvent sur des autoradios, baladeurs, mini chaînes que sur des systèmes haut de gamme. La question de la compression et donc du volume sonore apparaît primordiale. Il faut que ça "sonne" plus fort. Sauf qu'il est impossible de dépasser le 0 dB. Donc on compresse une nouvelle fois le son pour augmenter artificiellement la perception que l'on peut en avoir. La remasterisation compresse encore plus la musique (cela diminue donc la dynamique) pour augmenter le volume sonore global. Ce procédé va donc déjà à l'encontre de la HD. Les morceaux sont également passés à la moulinette des égaliseurs, et il faut reconnaitre que souvent, ils ne donnent pas dans la finesse. Sur un ensemble de bandes de fréquences, ils peuvent jouer sur des écarts de 10 dB et avec cet effet loudness dévastateur, on pousse les graves, les aigus, pour après compresser, raboter les impacts et rendre plus impressionnant le niveau global. Jusqu’à saturation ? Oui sur certains CD, on entend même clairement la saturation. La remasterisation mal faite a pour conséquence une perte de détail évidente. En voulant améliorer le son, on le détériore. Mai 2013

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Pourtant, l'ingénieur du son est le seul à disposer des différentes pistes en les traitant individuellement et un vrai travail d'amélioration peut certaines fois être bénéfique. La remasterisation a longtemps été, et est encore, une valeur marchande pour les distributeurs. En effet, dans l’inconscient audiophile, pour beaucoup, la remasterisation correspond à une évolution positive, un gain qualitatif. Beaucoup d’œuvres, très mal enregistrées à l’époque, peuvent bénéficier d’une remasterisation ben faite. Le procédé peut donc être très louable s’il est bien utilisé. Et là est le souci. Car la sur-compression, les effets loudness dévastent plus qu’ils n’arrangent. Argument donc commercial avantageux pour les distributeurs, ces réarrangements, étaient donc mentionnées sur la jaquette des CD. Or, aujourd’hui, pour ceux d’entre nous possédant les premières éditions des CD sortis de nos albums favoris, nous pouvons constater que beaucoup (la plupart… ?) des CD en vente aujourd’hui sont des rééditions remasterisées sans que cela soit mentionné sur les jaquettes. Les rééditions vont souvent de paire avec la remasterisation. Et la comparaison avec une édition CD originale est parfois cruelle pour la version rééditée. Ce n’est du coup pas étonnant si certains préfèrent écouter leur Dark Side Of The Moon sur leur platine vinyles plutôt qu’en CD ré-ré-ré-édité…

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7 Définitions et explications de la HD Aujourd'hui, après le CD et le CD remasterisé, c'est donc au tour de la haute définition d’apparaître. La haute définition : littéralement, on parle d’une augmentation de détail, de définition justement. En vidéo, sur une même surface, nous avons plus de pixels, cela accentue le détail, la finesse du rendu. C’est un fait. En musique, cela devrait être la même chose. Nous devrions découvrir (ou redécouvrir) notre musique, augmentée de détails, de précision que nous ne connaissions pas avec nos CD. C’est prometteur. Le format proposé n'est plus en 16 bits mais en 20 ou 24. Et on ne travaille plus en 44,1 kHz mais en 88.2, 96, 192 ou même 384 kHz. Le test auprès des consommateurs avait d’ailleurs déjà été fait, il ya quelques années avec le SACD, qui s'était soldé...par un échec. Voyons, ce que techniquement, la haute définition apporte...

7.1 La résolution : 24 bits C’est 144 dB de dynamique et donc un bien meilleur rapport signal / bruit que le CD. Je rappelle qu’on considère qu’1 bit équivaut à 6 dB environ, c’est pourquoi le CD basé sur 16 bits dispose de 96 dB. Ainsi une résolution de 24 bits permet 144 dB (24-16 = 8 bits et 8*6 dB = 48 dB supplémentaires pouvant être exploités). Si on veut être tatillon, on reprend notre calcul de 2 puissance 24 soit 16 777 216 et 20 x log (16 777 216/2) = 138 dB exactement. Le hic, c’est que ces 8 bits supplémentaire (de 16 à 24), ne vont coder que les sons les plus faibles se trouvant en-deçà du fameux seuil de 96 dB du CD. Ces 8 bits supplémentaires vont donc s’occuper de coder sur la plage de -96 dB à -144 dB. Par conséquent cela ne rajoute aucun niveau sonore possible, la limite est toujours 0 dB. Toutefois, le bruit de fond théorique est repoussé, le rapport signal / bruit amélioré.

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Voici comment nous pouvons le représenter facilement : 0

0

db

db

Seuil d'écrêtage 16 bits

16 bits

Résolution du CD

CD -

-

96db

96db

8 bits soit

20 à 24 bits

48 db -

-

144 db

144 db

La théorie n’est donc pas absurde mais elle se trouve être à l’opposé de certains de nos besoins. Les prises de son ainsi que nos oreilles, permettent-elles d'utiliser à bon escient cette plage supplémentaire de -96 à 144 dB ? Et pour les mélomanes et audiophiles, le 24 bits apporte-t-il quelque chose ? Je veux dire, quelque chose de probant ? De réellement audible ? Reconnaissable à l’aveugle ? Pas par cet effet placebo qui régit plus de la moitié de nos points de vue sur l’audio et qui contente le commerce à coups d'accessoires idiophiles ? Dans le chapitre des écoutes, nous étudierons ces questions, qui reste les plus importantes à se poser. 96 db

7.2 L'échantillonnage : 192 KHz Il existe un échantillonnage à 96, 192 ou 384 kHz. Nous prendrons l'exemple du 192 kHz. Ici nous parlons de samples, d’échantillons. La numérisation fait que nous devons découper le temps. Pour le CD, c'est 44.1 KHz. Pour la HD, au lieu de découper notre seconde de musique en 44100 samples, nous la découpons en 192000, elle est donc en théorie plus lisse. Mais le nombre de samples de 44100 sur une seule seconde est de toute façon largement suffisant. Nous parlons de 44100 découpes en une seule seconde quand même... Augmenter la résolution, cela revient également à repousser la fréquence la plus haute reproduite possible. Mais au-dessus de 20 kHz, qu'y-a-t-il ? Quels instruments vont au-delà de

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cette limite ? Et quel micro utilisé lors des prises de son ? Quelle oreille.. ? Cela paraît un peu ridicule d'un point de vue théorique. On sait que l’oreille humaine n’est pas capable d’entendre au-delà de 20 kHz (donc l’échantillonnage de 44.1 KHz qui crée une valeur max de 20 kHz reproduite serait largement suffisant), il n’est pas utile d’utiliser un échantillonnage de 192 kHz. Mais certains défendent l'idée que l’oreille est plus complexe que ne le suppose cette affirmation. Ainsi, la reproduction de fréquences supérieures à 20 KHz aurait une incidence sur les fréquences inférieures et leur reproduction. Sur certaines enceintes haut de gamme, il est même prévu l’ajout de super tweeters pour reproduire ces dites fréquences. L’utilisation de tweeters à ruban par exemple permet de reproduire des fréquences jusque 40 KHz ou plus. D'autres parts, des artefacts peuvent être créés sur des fréquences audibles par l'utilisation des filtres anti repliements (forte pente d'atténuation). Nous le verrons sur le suréchantillonnage. Représentation basique d’un signal analogique et de l’échantillonnage :

Découpe

en

192000

Signal analogique

échantillons

Amplitude

Temps : 1s

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8 Fiction et réalité Comme nous avons pu le voir plus haut, la haute définition s'explique aisément par la théorie et la technique. Mais au final, à l'instar d'un plat gastronomique, au diable la recette et vive la dégustation. Ce qui importe avant tout, c'est le résultat. La technique ne vaut pas grand-chose si le résultat est invisible, ou dans notre cas, inaudible. Et la musique est avant tout faite pour être écoutée. Et ce plaisir recherché, d'écouter une meilleure définition, ne doit pas se faire en intellectualisant l'écoute. Nous ne devons pas nous concentrer sur un détail, en le réécoutant plusieurs fois, en l'analysant, pour se poser la question si c'est mieux ou non. Nous ne devons pas non plus nous persuader inconsciemment que l'aération par exemple entre les instruments est meilleure, comme beaucoup peuvent le faire en écoutant certains accessoires folkloriques du monde de la haute-fidélité. Le plaisir doit donc être évident. Même si nous avons vu que la reproduction de cette musique HD n'est justement pas accessible facilement (matériel adéquat de bout en bout), je m'accorde volontiers à lui pardonner si, et seulement si, à l'écoute, j'ai enfin trouvé mieux que ce bon vieux CD !

8.1 La fiction : ce qu’on attend de la musique HD Après l’échec du SACD et du DVD Audio, pourtant sur des principes quasi-similaires, la musique HD a l'air de représenter un peu le dernier espoir de la quête du graal audiophile sur les sources. Surtout avec le déclin évident du CD. Et on nous la vend bien d’ailleurs. HDTracks nous promet « the world’s greatest sound in music downloads ». Quant à Qobuz, voici l’offre alléchante : “ces albums reproduisent à l’identique le son fourni par le studio d’enregistrement en sortie de console, et offre un confort d’écoute inégalé, supérieur à celui du CD ». Qualité d’écoute inégalée donc. Qobuz précise également une chose intéressante : « les albums vendus par Qobuz en qualité « Qobuz studio masters » nous sont fournis par les labels directement. Ils ne sont pas réencodés depuis des SACD et nous garantissons leur provenance directe ». C’est donc une très bonne chose que Qobuz se fournisse directement auprès du label, ce qui évite des trafics de fichiers chez les intermédiaires. En effet, des fichiers fake circulent. Chez HDTracks par exemple. Fondée pourtant par les frères Chesky, spécialistes dans les belles prises de son jazz Mai 2013

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et classiques, souvent utilisées dans le monde audiophile, HDTracks vendait des albums en HD alors que lesdits fichiers analysés par des logiciels audio ne montraient aucune différence et leur taille (poids du fichier informatique) était le même que la version 16 bits. Cela montre à quel point le consommateur, même audiophile, est pris pour un imbécile. Sans parler des éditions vendues up-samplées à partir de SACD, de fichiers 16 bits, des conversion de 16 bits en 24 etc… Il faut donc être vigilent. Mais comment savoir ? Pas évident. La sinusoïde (ou le codage binaire) peut montrer si un fichier HD est réellement HD. Devons-nous nous amuser à déchiffrer le code binaire d'un fichier pour attester de sa provenance...?

8.2 La réalité Il y a la réalité théorique et l’écoute. Ce sont deux choses différentes.

8.2.1 La réalité théorique Nous l’avons vu, la théorie plaide en faveur du bien-fondé de la musique HD. Plus grande dynamique, recul du bruit de fond, meilleur lissage, bande passante plus large. Maintenant, en toute logique, il faut aussi admettre que même sur la théorie, on peut commencer à adopter un sens critique bienvenu. Sur l’échantillonnage par exemple. Avec déjà un nombre de samples conséquent de 44100 Hz, augmenter cette découpe a-t-il vraiment un effet bénéfique audible… De même, cette fameuse bande passante augmentée alors que nos oreilles ont déjà du mal à entendre jusque 20 KHz… Cette limite de 20 Khz n’a pas été fixée au hasard. C’est précisément là où se rejoignent les courbes du seuil de l’audition et du seuil de la douleur. Voila pourquoi l’oreille humaine ne peut entendre au-delà. En d’autres termes, pour entendre au-delà de cette limite, il faudra que le signal soit tellement élevé que le seuil de douleur sera atteint. Dans cette réalité théorique, nous pouvons aussi comparer nos fichiers. Un morceau de musique numérique reste un fichier binaire que l’on peut visualiser par des logiciels audio. N’importe quel morceau peut donc être ouvert via des logiciels audio de studio afin de voir la forme du signal audio. C’est ce qu’on appelle vulgairement la sinusoïde (mais c'est plutôt une courbe amplitude/temps). Cette « sinusoïde » montrera par exemple une courbe en fonction de la dynamique du morceau. Ce qui nous intéresse fortement. Rappelons que la dynamique n’est

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pas là que pour avoir des sons forts. Au contraire. Plus la plage de dynamique sera importante, plus les signaux les plus faibles (donc les détails) seront distincts du reste. On est donc clairement dans une amélioration plausible de la qualité audio. Comparer un CD et sa version HD sur leurs sinusoïdes est un bon moyen pour se rendre compte d'un apport éventuel de la HD. De plus, la réalité théorique nous imposerait que chacun de nos maillons ait un rapport signal/bruit d'au moins 144 dB. Principe théorique évident. Or aucun de nos appareils n'a cette avantageuse caractéristique.

8.2.2 Le sur-échantillonnage Si l’échantillonnage à 44.1 ou 48 kHz parait donc suffisant sur le papier, il est possible de le montrer du doigt pour une seule chose : lors du passage de l’analogique vers le numérique, et vice-versa, lorsque des signaux dépassent la fréquence de Nyquist-Shannon, ceux-ci se replient pour devenir « théoriquement » audibles pour créer une « possible » distorsion. Les convertisseurs numériques-analogiques doivent donc couper ces fréquences supérieures à 20 kHz à l’aide d’un filtre passe-bas (anti-repliement) pour supprimer ces dites fréquences. Ce filtre peut se faire sur la partie numérique et analogique. Pour que ce filtre soit faisable (et éviter une pente ultra-raide pour atteindre -96db), le convertisseur va convertir (CQFD) sa fréquence d’échantillonnage (44.1) en une autre, plus élevée (8x, 12x..), c’est le sur-échantillonnage. Une fois le signal sur-échantillonné, on obtient alors une bande passante plus large, ce qui laisse plus de marge pour le filtre anti-repliement, et permet d’abaisser la pente dudit filtre, surtout celui se trouvant sur la partie analogique (car plus dur à élaborer qu’un filtre numérique). Le sur-échantillonnage apporte donc l’énorme avantage d’utiliser un filtre beaucoup moins raide car plus éloigné, bien au-delà du seuil de l’écoute. On élimine donc le seul inconvénient de l’échantillonnage à 44.1 Khz sans passer par la HD.

8.2.3 La réalité par l'écoute

J'ai écouté bon nombres de mêmes morceaux en HD et CD afin de me faire une idée précise de ce qu'on me vend. Mais il faut que je vous explique comment j'ai écouté tout ça...

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Car pour espérer avoir un avis le plus objectif possible, il faut établir un protocole de test afin de ne pas attribuer les possibles différences au principe du 24 bits alors qu’il est imputable à une autre raison technique ou psychologique. Il faut donc écouter le même morceau en 16 bits et en 24 bits (issus d’une même session de mastering bien sûr), sur le même matériel audio de bout en bout. Ce matériel audio doit bien sûr pouvoir décoder de bout en bout le 24 bits. Et il faut également être très précis sur le volume sonore qui doit être le même sur les deux écoutes car une différence de niveau même très faible (au décibel près), pourra ne pas être entendue comme une différence de volume mais une meilleure présence de la voix, un détail un peu plus évident et donc être attribué à tort à l'apport de la HD.

Voici le protocole que je me suis imposé : - Comparer les mêmes morceaux, en SD et HD (là est le piège, vous le verrez plus loin) - La comparaison doit se faire sur le même matériel de bout en bout (évident mais il vaut mieux le rappeler) - L'écoute doit se faire au même niveau sonore sur les deux morceaux comparés (ce sera le plus compliqué) - L'écoute doit se faire au même moment de la journée (en alternant des comparaisons immédiates et plus éloignées dans le temps quand même) - La comparaison doit se faire en aveugle. Cela signifie que pour chaque morceau écouté, vous ne savez pas lequel est joué (version HD ou SD)

Enfin, je rajouterais une ou deux règles que j'ai appliquées : à savoir, faire ces tests sur plusieurs personnes, afin de me disculper d'une probable inobjectivité de ma part, et sur plusieurs systèmes audio différents, dans mon cas, trois convertisseurs différents ont été utilisés, et des écoutes sur enceintes et casque également.

Le matériel utilisé : 1er système d'écoute : - système dématérialisé sur PC monté par mes soins en fanless afin d'éliminer un bruit gênant et optimisé en PC dit audiophile, - lecteur Foobar avec pilote Asio, - Dac Bel Canto 2.5,

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- Bel Canto Ref500S, - enceintes DIY à base de HP de chez Audiotechnology et tweeter ruban et casque Sony CD3000 et Beyerdynamics T5P 2ème système d'écoute : - même système de musiquedématérialisée, - même lecteur et piloteAsio, - entrée numérique coaxiale sur convertisseur nomade Colorfly C4 (supportant le 24 bits 192 KHz) - ampli Krell KSA 100, - enceintes DIY à base de HP de chez Audiotechnology et tweeter ruban

Quelle musique ? Je voulais rester sur des morceaux que je connaissais particulièrement bien. Le cerveau n'analyse pas et n'interprète pas du tout les mêmes informations pour une découverte sonore par rapport à une écoute familière déjà maintes fois appréciée voire analysée. J'ai donc recherché en HD des morceaux que je connaissais très bien et que je possédais évidemment en version CD. Ce ne fut pas difficile à trouver. Je me suis fourni chez Qobuz. Je le nomme volontairement car c'est le seul site de vente en ligne, à ma connaissance, qui communique sur une vraie transparence et une garantie de vraie musique HD, appelée Studio Masters. Leur politique est simple, et louable : se fournir directement chez l'éditeur ou la maison de disque en évitant donc tout intermédiaire afin de ne pas prendre de risque sur une éventuelle escroquerie par un distributeur (musique ré-échantillonnée en 24 bits...). Qobuz affirme même analyser les albums en HD afin de confirmer leur provenance. Nous sommes donc à priori rassurés. Nous avons vu qu'il existait des fake, avec des albums ré-échantillonnées en 24 bits à partir des versions CD, qui ont été vendus sur des sites téléchargement pourtant légaux et renommés. Si le fake n'est pas fait grossièrement, il peut être difficile de l'identifier car, comme des exifs en photos, les informations techniques de la musique indiquera bien une résolution de 24 bits, et le poids du fichier rassurera... Mais cela ne suffit absolument pas pour savoir si la HD est réelle ou pas. Le magasine Stéréo Prestige et Image expliqua dans un article qu'il était néanmoins possible d'identifier ces fake, en analysant leur suite binaire. Des groupes de 0 se suivant anormalement peuvent mettre la puce à l'oreille... Et bien sûr, les sinusoïdes également montreront les leurres. Alors, pour être sûr de ne pas être dupé à la source, j'ai fait mon marché chez M. Qobuz.

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9 Tests d’écoute Michael Jackson, Take 6, Diana Krallet The Rolling Stones, sont au programme.

Pour tous les tests pratiqués, j'ai comparé les morceaux à l'aveugle, et sans avoir vu les sinusoïdes au préalable, afin de ne pas être influencé. La sinusoïde est là pour confirmer ou infirmer l'écoute.

1er test : Take 6 - Doo Be Doo Wop bop! - Get Away Jordan

Take 6 est un sextet gospel - jazz vocal - a capella. Morceau Acapella, c'est donc une analyse intéressante puisque le message sonore sera quand même simplifié puisqu'exempt de musique. Bon morceau pour écouter les timbres des voix, les écarts de dynamique, le recul du bruit de fond.

Connaissant le CD par cœur, j'ai commencé par une première écoute du morceau acheté en HD. Et là, une différence m'a immédiatement sauté aux oreilles. Je n'écoutais pas du tout le même morceau que celui que je connais si bien. Je possède le CD, acheté il y a des années. Le bruit de vagues du début a ici, sur la version HD une sonorité plus synthétique. Quand les voix sont arrivées, il était évident que je n'écoutais pas du tout le même mix. Les claquements de doigts sur le CD "original" sont normalement en stéréo avec un léger décalage de timing créant un effet voulu entre le côté gauche et droit, comme un écho. Là sur le morceau HD, le claquement de doigt sur lequel repose la rythmique est devenu mono et est très en retrait, et sans écho. La HD produit-elle cette transformation ? (c'est ironique hein, ne répondez pas tout de suite NON d'un air assuré). Quant à la prise de son des voix, cela n'a encore rien à voir avec le CD. Le lead vocal est très proche du micro dans la version HD, la prise de son est très studio, très capitonnée. Sur mon CD, le lead a une prise de son avec une distance évidente avec le micro et on dirait même que l'amortissement du studio était différent. L'ingénieur a sûrement repris des overdubs effectués par le lead à l'époque pour refaire complètement le morceau. Quant à la dynamique des chœurs, la prise de son n'a rien à Mai 2013

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voir là non plus. Toutes les dynamiques des chœurs qui doivent normalement éclater et surprendre sont ici gommées. Sur les éclats de voix des chœurs, le volume est baissé instantanément. Incompréhensible. Et ces chœurs sont très étouffés. Bref, ce n'est pas le même enregistrement. Alors comment comparer ? Une personne désirant acheter en HD un album qu'il avait jadis en CD, peut facilement croire au miracle audiophile par la simple différence audible à l'écoute alors qu'en fait, il ne s'agit simplement pas du même disque ! Les différences sonores ne sont pas du tout imputables au principe technologique de la HD. D'autant qu'honnêtement, la version HD vendue est de qualité très médiocre, seul le lead vocal a un gain de qualité…

Alors, pour comparer réellement un éventuel gain de la HD, j'ai acheté la version 16 bits proposée par le même site. A l'écoute de la version 16 bits de Qobuz, on retrouve exactement le son et le mix de la version HD. Au moins, ces versions pourront se comparer entre elles. Ce fut d'ailleurs assez facile car je n'ai pas eu à régler le volume sonore... Après plusieurs aller-retour au casque, sur les enceintes, je n'ai pu faire que cet unique constat : il est impossible de faire la différence en aveugle. Apport de la HD = 0. Mais pour faire ce constat, il faut comparer les mêmes masters... Car il est évident que le téléchargement proposé de la version 16 bits et HD ne sont pas du tout les mêmes que le CD que je possède. Et je trouve ça assez pervers. En effet, je me suis aperçu de cela car j'ai acheté les deux versions sur le site (CD et Studio Master) et que je connais par cœur la version originale. Qui va acheter les deux versions ? Or comme il est évident que la version HD proposée n'est pas la même que le CD, il est très facile d'attribuer ce changement auditif à la HD, ce qui est faux. C'est un leurre. Les mix ne sont pas les mêmes.

Rappelons qu'en studio, l'ingénieur du son va effectuer plusieurs mix différents, et publiera selon lui, le meilleur. Un exemple : Bruce Swedien, ingénieur du son de Michael Jackson, a fait 99 mix différents de son célèbre Billie Jean… C'est le 2ème qui est connu du grand public, sur le CD. Imaginez qu'un site de vente en ligne vous propose l'album le plus vendu de tous les temps en Studio Masters mais avec à l'intérieur, sans vous prévenir, d'autres mixs des morceaux... Sans parler des remasterisations. La major fournit un album remasterisé et vous le fait passer sur le bénéfice de la HD. Sans parler du studio, qui pour fournir une version HD va refaire un mix pour l'occasion.. Beaucoup de possibilités pour se faire avoir. Et en tous cas, pour ce 1er morceau, sur une vraie comparaison aveugle des deux versions, il n'y a

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pas de différence audible. Ce qu'on me vend n'a donc aucun avantage, à part qu'il est plus cher et plus gros à stocker. On est bien content d'avoir acheté au prix fort une qualité soi-disant révolutionnaire.

Analyse des sinusoïdes : Take 6 \ Doo Be Doo Wop bop! \ titre : Get Away Jordan \ Version : 16 bits 44,1KHz

16 bits - 44.1 KHz.

Version 16 bits standard CD ci-dessus, sur la 1ère minute du morceau.

24 bits - 96 KHz

Et ci-dessus, même introduction du morceau en 24 bits cette fois-ci. La sinusoïde ne montre pas de différence. Ou trop peu. En zoomant sur la sinusoïde, on voit quelques petits

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écarts mais on se doute alors qu'à l'écoute, ça va être impossible d'identifier ces différences. Il est intéressant de noter que les niveaux sonores sont les mêmes.

La sinusoïde confirme donc l'écoute. Apport de la version Studio Masters : nulle

2ème test : Michael Jackson - Bad (1987) - Bad

Sorti en 1987, cet album est à l'époque sorti simultanément en 33 tours, K7 et en CD. La version CD originale a un volume sonore assez faible comparé aux CD d'aujourd'hui. Les compresseurs étaient plus cléments. Puis Bruce Swedien, ingénieur du son de M. Jackson, a fourni des versions remasterisées pour les rééditions des années suivantes. Sur les premières éditions remasterisées, le volume général est bien sûr plus élevé car plus compressé mais rien ne sature au moins. La compression est très audible, on perçoit beaucoup moins les micro détails, l'espace entre les instruments est bien moins grand, et le loudness est de la partie. Bref, de la remasterisation quoi. Les aigus éclatent plus, mais c'est pas si mal fait. Puis les ayant droits de Michael Jackson ont décidé de rééditer l'album en 2012 pour le 25ème anniversaire. D'un point de vue audiophile et donc sonore, c'est l'une des plus grosses honte de remasterisation existantes. Tout ce qu'il ne faut pas faire est dans l'édition Bad 25th. Ca sature presque en permanence, c'est une vraie bouillie sonore. Alors quand Qobuz a sorti l'album Bad en édition Studio Master sur leur site de vente en ligne, l'occasion était trop belle. Le 1st pressing étant d'excellente qualité, je me réjouis de le découvrir et de le comparer à la version Studio Masters HD. Je tiens à préciser que je connais ce disque également par cœur et le son de toutes les éditions aussi. Il sera donc très facile de repérer les qualités ou défauts de ce qu'on me vend.

J'ai tout d'abord écouté la version Studio Masters sans comparer. J'ai tenu moins de 10 secondes. L'intro du 1er morceau, Bad, m'a fait mal aux oreilles. Saturation, bouillie sonore, loudness à fond. Inécoutable. 10 secondes pour regretter un achat. J'ai très vite compris que le mix qui avait servi à faire ce Studio Master était le mix de l'album Bad 25th, soit la pire version sonore existante. Il est totalement impossible de faire quoique ce soit d'audible avec cette remasterisation.

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Alors je n'ai même pas cherché à faire une comparaison à l'aveugle entre les différentes versions. Ca ne valait tout simplement pas le coup. Finalement, la question devient autre. Certes, Qobuz se réfugiera derrière la franchise de sa vente. S'ils ont présenté l'édition Bad 25th en studio master, il est normal que cela soit cette édition vendue en HD. Et là se pose une nouvelle question : au-delà du questionnement de la véracité audible de la musique HD par ses principes techniques, de toute façon, tout dépendra ce qui nous est vendu en HD : une remasterisation mal faite ? Que la HD ne sauvera donc jamais. Mes amis mélomanes et audiophiles conviennent avec moi de cet adage bien connu : "le résultat sonore de votre équipement sera toujours à la hauteur de votre maillon le plus faible". Ainsi, effectivement, si on nous vend de la HD à partir de remasterisation horribles...vous avez compris la suite.

Il est d'ailleurs une chose assez étrange. Aujourd'hui, Qobuz ne propose plus à la vente l'album Bad en Studio masters. L'auraient-ils écouté ? Vont-ils nous présenter une autre version dans le futur ? Décidément, il est difficile de savoir ce que l'on achète.

Alors qu'aujourd'hui, on est en droit de se demander ce qu'on mange, on ne sait pas ce qu'on écoute non plus. Même sur la musique, les consommateurs s'aperçoivent, après avoir acheté, que le contenu de leur achat n'est peut-être pas si clair que cela.

Je vous ai donc mis l'introduction du 1er morceau Bad de cet album en sinusoïde, mais sur les 3 versions (Version 24bits Qobuz, version 16bits Qobuz et version CD originale de 1987) :

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Version de Qobuz en 16 bits (version du CDbad édition 25th) : Michael Jackson \ Album bad 25th\Titre : Bad _ Version : 16 bits 44,1 KHz

Saturation très présente, à l'écoute, ce n'est juste pas possible. Version de Qobuz en 24 bits: Michael Jackson \ Album bad 25th \ Titre : Bad _ Version : 24 bits 96 KHz

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Quand je regarde la sinusoïde de la version Studio Masters, je ne peux m'empêcher de croire à un faux. Les crêtes sont simplement coupées, gommées. Et même si à l'écoute, le niveau sonore global est plus bas, cela sature encore et on voit même sur la sinusoïde l'amputation des crêtes, comme si cela avait été coupé à la règle. Ce qui n'est pas logique en 24 bits. Une amputation des crêtes. Ca donne envie ! Je pense donc que cet album a subi un petit trafic mal fait. On abaisse le volume global, on coupe les crêtes pour gommer un peu de saturation, et voilà. Deuxième achat fait à perte.

Voici la version CD originale de 1987 non remasterisée : Michael Jackson \ Album bad (1st Pressing) \ Titre : Bad _ Version : 16 bits 44.1 KHz

Voilà un album qui mérite d'être possédé ! Point de saturation, la dynamique est grande et respectée jusque dans les crêtes. Rien à dire. Et à l'écoute, cela s'entend. Et oui ce n'est « qu'un CD ».

Conclusion :

La version Studio Master est à jeter à la poubelle. C'est un fake. On ne s'étend pas dessus. A part pour le prix qu'on a payé pour ce leurre. Et il n'y a pas de match puisqu'il est impossible d'effectuer quelque comparaison que ce soit. Deuxième désillusion.

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3ème test : Diana Krall - We Just Couldn't Say Goodbye

Pour ce troisième test, et après le fiasco des deux 1ers, j'ai essayé un morceau de Diana Krall que je ne connais pas aussi bien que les premiers. C'est une artiste que j'écoute mais je ne connais pas parfaitement la prise de son ou les détails de chaque morceau, loin de là. C'est une artiste connue du milieu audiophile, écoutée lors des tests dans les revues spécialisées, et dont les prises de son sont très souvent réussies. Et, surtout, après m'être fait avoir deux fois de suite, je voulais un disque récent, où la possibilité d'avoir affaire à une réédition remasterisée ou à d'autres mix que les originaux ne puisse pas exister et me gâcher le plaisir. J'ai donc choisi le dernier album "Glad Rag Doll". Sur le 1er morceau de l'album, derrière le piano de l'introduction, qui a une prise de son assez restreinte sur la gamme de fréquence, on distingue bien un souffle présent qui est assez dommage pour ce type de morceau. Quand Diana Krall rentre dans le morceau, avec la contrebasse et les guitares, les jeux de guitare sont bien rendus, la prise de son est bonne. Mais les extrémités de la bande passante sont volontairement assez écourtées. Ici, pas d'extravagances, ni de démonstration de force pour flatter la finesse des tweeters. La voix de Miss Krall a ce son jazzy, avec cette mini reverb "ambiance cave". L'espace entre les instruments est quand même peu présent et la scène sonore est assez réduite. Heureusement il y a de la profondeur, ce qui, avec ce son jazzy mid-fréquence, donne de la vie et de l'authenticité à ce morceau. Volonté de justesse donc, bonne prise de son mais assez minimaliste et surtout pas aguicheuse. Pour la comparaison aveugle, seuls les deux morceaux (SD et HD) de miss Diana peuplent ma playlist sur Foobar. L'autre version, CD, a été achetée également chez Qobuz. Je passe de l'un à l'autre sans savoir lequel est joué. Je cherche. Je cherche la faille. Je cherche plutôt les plaisirs de la HD que je n'ai pas découverts jusque-là. Je veux me convaincre que je vais avoir une révélation. Au moins un début de révélation alors. Une piste ? Une esquisse ? Allez… Un "semblant de" au moins... Mais voilà ce qu’est devenu mon écoute : une masturbation audiophile bien connue, à essayer de distinguer le plus petit signe qui révèlerait une différence minime et insignifiante en se concentrant sur les micro-détails, la scène sonore, les timbres etc.. .

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J'abandonne. Il n'y a pas de différence audible. Sauf pour ceux qui veulent s'en persuader. Donc même sur un exemple de morceau dont la prise de son a été soignée et dont la remasterisation n'a pas gommé toute la dynamique originale, une écoute en 24 bits 96 kHz n'apporte rien.

Regardons maintenant les sinusoïdes :

Version de Qobuz en 16 bits : Diana Krall \ Glad Rag Doll \ We Just Couldn't Say GoodBye _ 16 bits 44,1KHz

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Version de Qobuz en 24 bits : Diana Krall \ Glad Rag Doll \We Just Couldn't Say GoodBye _ 24 bits 96KHz

Des minimes différences graphiques apparaissent sur la version HD, différences trop minimes qui ne peuvent être entendues à l'écoute

Conclusion : L'écoute n'a révélé aucune différence audible. Pourtant nous avions là l'exemple parfait de ce que la HD pouvait apporter. Un disque récent, n'ayant subi aucune remasterisation. Une prise de son soignée pour une artiste souvent écoutée dans les salons haute-fidélité. Les sinusoïdes confirment l'écoute.

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4ème test : The Rolling Stones – Start Me Up

Je poursuis sur un dernier test...

En effet, après avoir lu un article très intéressant dans Stéréo Prestige et Image traitant justement du numérique en audio, j'ai eu envie de réagir à l'un de leurs exemples sur le chapitre de l'analyse spectrale. Une comparaison de morceau entre une version 16 bits et une version Studio Masters. Mais cette comparaison a été faite à partir de deux éditions différentes. Je ne partage donc pas cette analyse qui, pour moi, trompe une nouvelle fois le consommateur. Pour ma part, il ne faut pas comparer des versions qui ne sont pas issus des mêmes éditions. Un morceau pris sur un Best Of acheté en HD ne peut être comparé au même morceau issu de l'album original de ce morceau pour juger de l'apport de la HD. Le morceau sur le Best Of a pu être remasterisé contrairement à l'album original. Il n'aura donc pas du tout le même son, et cela ne proviendra pas de la HD. Les différences flagrantes à l'écoute ne proviendront donc pas de la HD mais de la remasterisation, sans parler des mix différents. Ce qui n'a rien à voir. Alors, reprenant leur exemple, j'ai acheté la version HD de Start Me Up du Best Of des Rolling Stones et la version 16 bits du même CD Best Of, et non la version de l'album original Tatoo comme ils l'ont fait. Pour comparer ce qui est comparable. Et là, les sinusoïdes sont bien moins éloignées que ce que la revue nous rapporte. Regardez plutôt :

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Rolling Stones \ Album GRRR! \ Titre :Start Me Up _ Version : 16 bits 44,1 KHz

Rolling Stones \ Album GRRR! \ Titre :Start Me Up _ Version : 24 bits 88.2KHz

Conclusion de l'écoute comparative :

A l'écoute,si on fait attention à comparer les mêmes éditions, la musique Haute Définition ne convainc pas du tout, une nouvelle fois.

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10 Les autres côtés…obscurs 10.1 Votre système ? Même si vous croyez encore au bénéfice audible de la Haute Définition en audio, il faut que les maillons de votre chaine haute-fidélité puissent être capables de retranscrire le 24 bits / 192 KHz. Pour ce faire, il faut donc impérativement un convertisseur ayant cette capacité. Et pour l’échantillonnage, ce sera selon si vous pensez que le gain sur la bande passante est important ou non. S’il l'est pour vous, vérifiez la bande passante effective de votre préamplificateur, amplificateur car bien des modèles s'arrêtent à 20 KHz. Et pour les enceintes, tous les tweeters ne montent pas au-delà de 20 KHz. Quant aux casques, n'en parlons pas. TOUTE la chaine doit être à la hauteur de la source. Ne vous extasiez pas devant telle musique en pensant que l'aigu file haut et que l'extinction des notes est longue et parfaite donnant cause entendue à la HD (et à vos oreilles supersoniques) si l'un de vos éléments restreint votre bande passante. Il est facile d'acheter un petit convertisseur 24/192, et proclamer écouter de la HD. Mais si on écoute sur des enceintes bas de gamme, dans un environnement qui ne sera pas totalement silencieux (ça, oubliez d'ailleurs), c'est totalement vain.

10.2 Le stockage Il est aisé aujourd'hui de stocker de la musique sur un ordinateur et de remplacer son bon vieux lecteur CD. Les disques durs ont des capacités largement suffisantes pour stocker notre discothèque. Et dans le meilleur des cas, ce stockage s'effectuera sur un serveur Nas domestique afin de rendre cette musique accessible à tous les ordinateurs de la maison, avec en plus un système de sauvegarde si le serveur a plusieurs baies fonctionnant en raid 1. Mais pour la musique HD, sachez quand même qu'un album prend beaucoup plus de place. Jusqu'à 2-3 Go l'album. La question du stockage et du coût de celui-ci peut recommencer à se poser. Enième inconvénient de cette musique HD.

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11 Les aspects économiques 11.1 Pourquoi la musique HD (point de vue des consommateurs) ? L’attente audiophile est réelle. Après les amplificateurs numériques, une proposition sur un éventuel progrès sur la numérisation de la musique elle-même est la bienvenue, surtout depuis que le CD décline fortement. De plus, la perspective de redécouvrir nos anciens albums prestigieux sous un jour nouveau est alléchante. Ainsi, comme pour la vidéo, pouvoir redécouvrir sa musique en bien meilleure qualité et faire évoluer la qualité générale de la reproduction sonore est une attente légitime des consommateurs audiophiles et mélomanes. Même si, lorsque cela arrivera, et si cela arrive... il faudra sans doute, comme pour la vidéo, changer tout notre matériel.

Je me rappelle de l'arrivée du SACD. Le Super Audio Compact Disc. Même s'il tenait sur un format CD, c'était un format particulier ne pouvant être lu sur les lecteurs CD traditionnels. Alors j'avais été chez mon revendeur favori. Et ça tombait bien, parce qu’un album que je connaissais absolument par cœur venait de sortir en SACD. J'écoutais donc Thriller sur cette platine SACD de Sony. Je l'ai comparé et recomparé au CD original. Au casque CD3000, qui avait la qualité d'être armé de bonnes intentions sonores, une des références audiophiles à l'époque. Ayant ce trait de caractère agaçant de tout remettre en question par principe avant de me laisser avaler par le marketing, j'écoutais donc attentivement, sur mes passages préférés, ce fameux SACD, guettant toute amélioration qui aurait été la bienvenue. Je cachais même les pochettes pour faire l'échange dans la platine CD afin de moi-même me protéger de cet effet placebo. Et puis rien, ou tellement peu, tellement rien surtout, et tellement déçu. Je n'entendis pas grand-chose. Une question m'envahit immédiatement : mes amis qui me décrivaient comme une excellente oreille...me flattaient-ils ? Qui avait raison, le SACD ou moi ? En tous cas, moi, je suis encore là…Première grande déception sur l'avenir d'un son meilleur.

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Peu importe, il était évident, déjà à cette époque, que le CD peinait à survivre. Si ce n'était le SACD ou même le DVD audio, ce serait autre chose, encore mieux. Ce n'était qu'une question de temps. Aujourd’hui, la HD n'est néanmoins toujours pas la solution.

11.2 Pourquoi la musique HD (point de vue des vendeurs) ? Il n'est pas difficile d'imaginer les raisons de la volonté des majors, et distributeurs de faire évoluer la qualité musicale, surtout dans ces dernières années.

Le marché de la musique va mal nous dit-on. Soit. Le téléchargement illégal est montré du doigt. Coupable facilement trouvé. Les majors n'avouent toujours pas leur propre responsabilité en n'ayant pas été capable d'anticiper le virage internet et l'évolution de la consommation. Et le CD n'a pas pris une ride, il a carrément pris un coup de vieux. Alors au lieu de le rajeunir, on nous a vendus des prix verts sur des œuvres maintes fois amorties commercialement. Pourtant le prix fort restait pratiqué sur bon nombres d'albums dans les bacs de la Fnac, excluant une possible remise en question de nos distributeurs et majors. De plus, plusieurs études sérieuses dont la dernière commanditée par le Centre Commun de Recherche de la Commission Européenne et publiée en avril 2013 ont démontré que le téléchargement illégal n'était pas une cause réelle de la baisse des ventes de CD. Parmi les évidentes conclusions qui en ressortent, nous ne pouvons qu’approuver par exemple que : Les musiques téléchargées n’auraient pas été achetées de toute façon, Que les méchants pirates eux-mêmes consomment légalement du contenu, Que ce partage illégal a lui-même contribué à la renommée et découverte d’artistes, Que ce système de téléchargement a eu un impact évident sur la fréquentation des salles de concerts, et autres ventes dérivées, Et combien d’artistes ont bien compris que ce téléchargement illégal leur était profitable et recherche une vraie distribution gratuite… Et le cinéma se porte-il si mal que cela du fait du téléchargement ?

On nous a vendu les bienfaits d'une répression loupée et mal organisée. Mai 2013

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Hadopi est un échec. C'était prévisible, avant même sa naissance. N'en déplaise à Mme Marais, Hadopi est inefficace et surtout ne répond pas aux réalités évidentes du marché et du partage internet. Et puis artistiquement, il n'est pas si évident d'avoir envie d'acheter 18 € un CD aujourd'hui. Qualitativement, tout le monde reconnait facilement que sur un album, si 2-3 morceaux sont de bonne qualité, nous serons alors bien heureux. Certains artistes ont plus de Best Of que d'albums originaux. Un disque sur deux qui sort est un best of ou une compilation de genre. Un marché en berne, un téléchargement illégal accusé, les majors et distributeurs ont essayé de riposter. D'abord par l'achat de musique en ligne. Oui, une fois qu'ils avaient découvert, sûrement par hasard, l’existence d’internet et donc qu'un câble réseau offrait la possibilité de communiquer avec le monde extérieur, donc également avec les méchants pirates, ils ont tentés de les appâter en leur faisant les yeux doux sur leur propre terrain. Très bonne initiative ! Malheureusement, un peu comme Patrick le Lay qui nous promettait de nous abrutir pour nous vendre du coca-cola pendant les pubs en rendant notre cerveau disponible par ses supers productions de jeu idiot et de téléréalité, les majors et distributeurs n'ont a priori pas forcément une meilleure opinion de leurs clients et de leur intellect. Sous couvert d'une communication qui nous a fait croire à une ouverture enfin autorisée sur la concurrence, cette dernière était en fait maitrisée et même muselée avec un accord sur les prix. Pas de liberté des prix. Où est donc le principe de concurrence ? Donc ça sera 99 cents le morceau. Pas en dessous. En gros comprenez ceci : La concurrence n’existe pas. Tout le monde vendra au même prix et vous achèterez. C'est comme ça. Vous n'allez pas vous apercevoir de toute façon qu'on se fiche de vous, donc on est tranquille. Ah mais par contre, si un site veut vendre plus cher, on va pas l’empêcher, on est open. Mais contrairement à ce qu'ils peuvent penser, nous sommes capables de faire une addition. Et nous avons quand même noté qu'on peut nous vendre tranquillement la totalité des morceaux plus chère que l'album lui-même. Vaches à lait ? Et que dire des prix pratiqués. Les albums en téléchargement sont à 12-13 €. Les majors et distributeurs nous montrent clairement qu'ils n'ont pas compris. Pas compris le monde actuel, les besoins, les moyens que nous possédons. Comment expliquer qu'une musique qui n'est plus sur un support physique soit vendue à ce prix-là...

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Plus de gravure, d'industrialisation, de fabrication, d'impression, de transports, de stockage. Toute cette énorme économie. Pour avoir au final des albums à 13 €. Ils gagnent encore plus d'argent qu'avec les CD déjà vendus trop chers. Alors qu'aujourd'hui, recherchez n'importe quel album CD sur Amazon ou d'autres plateformes, et vous le trouverez à quelques euros port compris selon les vendeurs. Il est plus économique de continuer à acheter le CD plutôt qu'effectuer un achat en ligne, qui coûte beaucoup moins au fournisseur (à part le coût du site lui-même et des serveurs). C'est donc cette offre, totalement sous contrôle et hors de prix, qui devrait relancer le marché de la musique ? Et je ne parle même pas de l’idée géniale de l'imposition des DRM dont était jadis affublée la musique achetée... Mais aujourd'hui, oyez oyez, tremblez, la musique HD arrive, et encore plus chère !

Il n'est donc pas venu à l'idée aux maisons de disques de proposer leur fameuse musique de meilleure qualité mais à un prix inférieur au CD, acceptant une vraie concurrence internet des prix, tout en étayant les contenus, ce qui aurait été un vrai argument contre le téléchargement illégal, sans parler des possibilités de forfaits personnalisés possibles, etc..

Et si Google était venu voir les maisons de disques afin de collecter leur musique pour la dématérialiser et la rendre publique ? C'est pourtant bien ce qu'ils ont fait avec les bibliothèques. Cette numérisation littéraire ressemblait peut-être à une intention louable au départ : Rendre la culture accessible à tous. En tous cas, Google réussit à manipuler son monde (les bibliothèques) afin de prendre possession de millions d'ouvrages et s'affranchir des droits d'auteur sur plus de 6 millions d'œuvres (les 4 autres étant tombés dans le domaine public). Mais en fait, cette intention culturelle était trompeuse. Google a juste contracté un pacte avec le diable (lui-même) pour s'offrir le plus grand monopole culturel mondial afin d'en user et abuser selon son bon vouloir économique. Et Google réinventa le téléchargement illégal.

Revenons à Qobuz et ses amis. Ils ont mis les moyens pour communiquer sur leur nouveau cheval de bataille. On peut trouver une bonne publicité un bon article sur Lepoint.fr qui rend compte de cette communication : "le Studio Master va-t-il dynamiser le téléchargement légal". Le titre relaie bien le but réel de la dernière trouvaille économique musicale : combattre le téléchargement illégal. Voilà réellement pourquoi on veut tant vous vendre de la musique HD.

Mai 2013

Auteur : Mathieu Vendret

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Le Point admet être convaincu par la démonstration (sur des enceintes à 20 K€), en ayant comparé un studio Master à un...fichier MP3 (les Scala n'ont pas dû s'en remettre).Si si je vous assure. Moi qui croyais que les fichiers HD étaient censés rivaliser avec le CD. Faut tout de même avoir un gros doute pour comparer ses Studio Master HD à des MP3 plutôt qu'au CD... Ou alors peut-être tentaient-ils de nous faire passer le message que le MP3 était finalement aussi bon que le CD ? Et pourtant, malgré ce match à priori déséquilibré, Le Point explique quand même ne pas avoir entendu grand-chose ("les différences sont difficiles à déceler"). Vraiment Qobuz n’avait pas besoin de cela… Pourtant, on avait mis toutes les chances de notre côté se dirent Qobuz...(enceintes à 20 k€, match face à du MP3). Finalement Qobuz, toujours eux, a même dû aider les auditeurs et expliquer aux journalistes ce qu'il fallait entendre (je cite encore : "mais une fois les clés de décryptage données..."). Mais même là, c'était difficilement avouable ("les différences sont très sensibles"). Bref, ils admettent, malgré eux, que l'on parle bien d'un effet placebo. Il a fallu leur expliquer ce qu'ils devaient entendre. Petite publicité manquée.

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Auteur : Mathieu Vendret

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12 Conclusion Le but de cet article était double : - Expliquer ce qu'était, pardon je parle déjà au passé, ce qu'est la musique en haute définition pour que chacun ait connaissance de ce qu'on lui vend. - Tester cette musique haute définition face à notre compact disc afin de savoir si la publicité dit vrai. En gros, pour savoir si ca lave plus blanc que blanc.

Dans notre explication technique, qui aurait pu être bien plus détaillée, nous avons donc quand même vu que le principe de la musique numérique repose sur deux techniques essentielles : la résolution et l'échantillonnage. Pour avoir une meilleure qualité, il a fallu repousser les limites de ces deux techniques. Cela a été fait avec la musique HD. Nous passons de 16 à 24 bits et de de 44.1KHz à 192 KHz (ou 96, 384..). Sur le papier, il n'y a rien à dire. Théoriquement, cette évolution amène une plus grande dynamique disponible donc un bruit de fond reculé et une plus grande bande passante.

Mais notre oreille est-elle capable d'entendre ces différences techniques ? Je rappelle que jadis dans les années 70 et 80, les marques de haute-fidélité nous vantaient leurs amplificateurs ayant une distorsion avec plusieurs 0 après la virgule comme étant un gain évident qualitatif pendant que les amplis à tubes eux, tant aimés par les audiophiles, frôlaient les 1%. Nous savon bien que nos sens peuvent être facilement dépassés par le jusqu'auboutisme des technologies.

Alors pour vérifier, j'ai écouté dans les conditions qui me semblaient optimales, les mêmes morceaux en CD et HD. Le constat fut double :

- Les éditions vendues en HD ne sont pas forcément les éditions originales mais bien des éditions remasterisées compressées et donc ce ne sont peut-être pas celles que vous possédez. Pire, vous pouvez très facilement acheter en HD de très mauvaises éditions remasterisées qui dénaturent carrément l'œuvre. Mai 2013

Auteur : Mathieu Vendret

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Il faut donc comparer des mêmes éditions entre elles.

- Enfin, pour le test ultime et seul test véritable, sur les mêmes éditions, entre le format CD et la HD (difficile de savoir d’ailleurs si les sources sont les mêmes), le constat est sans appel. A l'écoute il est pratiquement impossible de reconnaître un morceau en HD d'un morceau en édition CD. Et ce constat est confirmé lorsque l’on compare les courbes amplitude/temps de chaque version.

On nous vend et revend des mêmes fichiers dont le gain de qualité est inaudible et ce, à des prix plus cher que le CD lui-même, et dont le poids est beaucoup plus lourd, et qui ne sont pas compatibles avec bon nombre de nos matériels.

Voilà. Voilà finalement ce dont nous parlons :

-

De nos mêmes albums, mais plus chers, plus lourds à stocker et moins compatibles.

-

D’une qualité théorique qui ne tient pas du tout ses promesses à l’écoute.

-

De fichiers dont il est presque impossible d’identifier leur authenticité.

-

Et enfin nous parlons surtout d’une énième tentative de relever le marché des ventes.

Tentative

qui

témoigne

toujours

d’une

négligence

totale

des

consommateurs : alors que le prix de la musique est très justement montré du doigt, leur solution tient à augmenter les prix en nous vendant donc encore plus cher un format qui leur coûte moins. Pour ma part, je continuerai donc à télécharger des formats lossless en 16 bits et à acheter de temps en temps des CD dénichés à des justes prix chez des sites marchands. Enfin, la recherche d’une meilleure qualité sonore ne passera pas par la HD alors que notre musique est de toute façon compressée… si l’on veut une meilleure source, il faudra revoir les impératifs du mastering.

Le CD est mort. Vive le CD ! .

Musique HD de Mathieu Vendret est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Pas de Modification 3.0 France

Mai 2013

Auteur : Mathieu Vendret

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