Nous abordons l’étude des lettres hébraïques. Il n’était pas coutume il y a vingt ans pour un Chrétien d’apprendre l’héb...
Les lettres hébraïques des énergies vivantes Nous abordons cette saison l’étude des lettres hébraïques. Il n’était pas coutume il y a vingt ans pour un Chrétien d’apprendre l’hébreu et je crois assez unique qu’un homme, ayant reçu l’initiation de la Qabbale la transmette à un non-Juif. C’est ce cadeau royal que j’ai reçu que je vais essayer de vous transmettre. En même temps que je recevais cette tradition je faisais mes études de théologie dans le Christianisme Orthodoxe et j’avais l’impression extraordinaire de boire aux deux mamelles de la même mère, car les deux disaient la même chose en partant, l’un, de la course qabbalistique hébraïque, et l’autre de la tradition chrétienne. Je crois que le Christianisme qui refuse ces bases hébraïques, se coupe de ses racines et le Judaïsme, tel qu’il est transmis par la Qabbale, pour moi, débouche sur le message chrétien. Vivre ainsi cette coexistence de deux traditions a été pour moi une charnière énorme qui m’a obligée de vivre d’une autre façon et qui m’imposait de transmettre ce que je recevais. Et cela m’incite à vous faire comprendre qu’il ne s’agit pas pour vous de vivre ce message uniquement sur le plan intellectuel, parce que cela « fait bien », mais que nous allons travailler ces lettres hébraïques qui sont des énergies vivantes et qui font écho en nous à des forces fondamentales, nous obligeant à nous transformer. C’est d’autant plus vrai qu’il y a une correspondance étroite entre chacune de ces lettres et chacun des organes et membres de notre corps, dont je ne vous parlerai pas maintenant, mais qui pourrait peut-être constituer un troisième volet de notre étude. Il y a un texte qabbalistique hébreu qui dit que lorsqu’un mystique juif méditait de façon pas juste toute une nuit sur une lettre, il se retrouvait le lendemain matin avec une altération de la partie correspondante de son corps. Et le Zohar nous dit que lorsque le Saint, béni soit-Il, jouait avec les âmes des lettres de l’alphabet, Il en faisait Ses délices. D’après les Hébreux ces lettres sont de « petites lettres créées par rapport aux « grandes lettres » archétypiques qui sont les énergies divines, incréées. De même qu’il en est pour le corps humain en tant que symbole dont je vous parlais la saison dernière, elles sont reliées à leurs archétypes par ce que j’appelle « un cordon ombilical », un cordon nourricier, qui nous informe constamment. L’écriture hébraïque procède d’écritures très anciennes, comme d’ailleurs toutes ces langues dont on ne connaît pas l’origine. Nous nous rendons de plus en plus compte que c’est la langue qui fait le parlant, que c’est le Verbe qui nous crée, qui nous structure à chaque moment. Prisonniers de nos catégories mentales nous avons l’habitude de penser le contraire. Or le Verbe est vibratoire, il nous informe au sens cybernétique du terme, il nous informe par l’intérieur et notre
forme humaine n’en est que le résultat. Nous comprenons alors que chacun de nos organes peut être relié à la vibration de chacune de ces lettres. Nous n’aurons pas le temps de raconter tous les avatars de ces lettres, de leur sculpture, mais nous pouvons dire que du temps d’Esdras, après la déportation de Babylone, au IVe siècle environ avant J.-C. la langue et les lettres ont reçu leur dernière forme. Personnage extrêmement important dans l’histoire de l’écriture hébraïque, il a fait au niveau de la langue, des lettres et des sons, une sorte de circoncision qui leur a donné une densité d’énergies vibratoires que nous ne retrouvons dans aucune autre langue, sinon peut-être dans le sanskrit. Elle se prête à des lectures allant de plus en plus loin, comme si le fruit n’était jamais le dernier. Remarquez que l’écriture est une crucifixion. En figeant le Verbe qui est créateur, nous lui faisons subir une mort. Esdras a formé les lettres au nombre de vingt-deux. Ce ne sont que des consonnes, les voyelles n’existent pas en hébreu. Selon les différents mots la prononciation est autre. Ainsi le mot David dans un autre contexte va se prononcer Dvod et ce sera un tout autre mot qui signifiera l’ainé, le chéri. Et pourtant ce sont les trois mêmes lettres, les trois mêmes énergies qui structurent les deux mots qui, pour nous, sont très différents, mais qui, dans la conscience des Hébreux, ont un lien étroit. Nous trouvons souvent dans la langue hébraïque au niveau du même mot des contradictions qui nous font dresser les cheveux sur la tête. C’est ainsi qu’une même racine donne le mot « Saint » et le mot « prostituée ». Ce sont les mêmes énergies qui font découvrir la clef du message extraordinaire de cette langue. Bien sûr pour faciliter la lecture on intercale entre les consonnes des lettres qui sont appelées « mères de lecture », « matrices de lecture » mais, alourdissant la langue, elles ne seront pas gardées. Maintenant dans la Thora nous allons trouver sous ou à côté des lettres un petit point ou un tiret qui indiquera la vocalisation. L’écriture hébraïque s’écrit de droite à gauche. Cela n’a pas toujours été le cas. Comme l’écriture chinoise, elle a été verticale. Et puis de façon très curieuse elle devient serpentine, c’est-à-dire qu’on commence par écrire de droite à gauche et, au bout de la ligne, elle repart de gauche à droite, et ainsi de suite. Elle trouvera son orientation définitive au moment d’Esdras, de droite à gauche. On en ignore la raison. Etudions à présent les lettres, leur histoire, leurs avatars, car le graphisme n’a pas toujours été celui d’aujourd’hui. Il remonte à des temps très anciens.
Chacune des lettres va correspondre à un nombre. L’un et l’autre sont inséparables. Tous deux sont une énergie, icône de l’énergie divine correspondante. Certaines lettres correspondent aux dix premiers nombres des unités jusqu’à 9 compris. Les dix lettres suivantes vont correspondre non pas au 11, 12, 13, etc., mais à 20, 30, 40, etc., c’est-à-dire aux dizaines et puis, les dernières lettres aux centaines. Quand nous arrivons au Tav, ayant la valeur de 400, nous sommes arrêtés. Comment alors s’expriment le 500, 600, jusqu’à 900 et même 1 000 ? Par certaines lettres déjà vues jusque-là qui arriveront à la fin d’un mot et qui vont prendre cette valeur. Par exemple le Mem a pour nombre 40 et lorsqu’il arrive à la fin d’un mot il aura un graphisme un peu différent et vaudra 600. Et puis la dernière lettre qui est aussi la première, Aleph, par qui tout se termine, vaut en finale 1000. La toute première lettre que je vous présente est Aleph. Les lettres hébraïques ne sont pas monosyllabes comme nos lettres françaises, elles sont l’initiale d’un mot entier. Qu’est-ce que Aleph ? C’est une bête cornue (voir le graphisme de la lettre) ainsi que le montre son dessin primitif. Et puis il subira des avatars, les cornes ne se tiendront plus vers en-haut, mais vers le côté, pour finalement tomber en verticale vers le bas. Nous trouverons là l’alpha grec et enfin l’amorce de notre A. Nous savons maintenant et la graphologie nous l’a confirmé, que l’écriture exprime toute une partie non seulement de notre inconscient, mais de l’inconscient collectif. L’évolution de la lettre se fera en fonction de l’évolution de l’humanité. De même qu’autour du XVIIIe siècle av. J.-C. Abraham, venant d’Ur, ville lumière, conduit tout ce peuple hébreu à vivre une nuit avant d’atteindre une lumière encore plus vive, c’est-à-dire la Terre Promise, de même nous verrons très nettement dans les dessins des lettres une chute du symbole de leur signification profonde. Il est intéressant de voir que le mot Aleph est essentiellement la bête cornue, mais aussi la racine du mot qui veut dire enseigner, instruire et aussi l’époux, le prince, le chef, le général des armées, celui qui va conduire les hommes, les instruire. Quel est le rapport de ces significations avec la bête cornue ? Il est dans le symbolisme des cornes, de celui des cheveux qui ont la même composition chimique que les cornes et que nos ongles. Ils sont nos racines d’en-haut, nos antennes qui symboliquement sont dressées vers le ciel pour en recevoir l’information, et aussi l’énergie, la nourriture nécessaire pour vivre ce message et pour pouvoir en instruire les autres. Celui qui enseigne est le chef, celui qui sert de charnière entre le monde divin et le monde qui en recevra la connaissance. C’est dramatique que ces cornes qui, au début, étaient orientées vers le haut, vers le monde du MI, ce monde de l’archétype, sont maintenant tendues vers le monde du MA. L’humanité est coupée du monde d’en-haut, coupée de ce noyau divin en nous et au lieu de chercher nos informations dans la conscience aiguë à l’intérieur de nous, nous allons les chercher à l’extérieur. Nous avons perdu le contact avec les lois ontologiques que le monde divin est prêt à nous donner. Déjà le monde grec ne possédait plus la sagesse divine, mais la sagesse du monde et dans le A latin, les cornes sont totalement à l’envers.
Le Aleph, en fait, est formé par une autre lettre qui est transversale, le Vav et deux petits Yod enserrés par le Vav, ce qui lui donne le nombre proche du Tétragramme divin, Yod-Hé-Vov-Hé qui a pour valeur arithmologique 26. Le Aleph = 1. D’où vient le 1 ? nous ne le savons pas, de même que pour le point en géométrie, nous ne pouvons lui donner une origine. Et nous verrons que toutes les autres lettres vont procéder de lui. Il semblerait qu’il soit un don divin par excellence. Il est curieux que le point qui est indéfinissable est aussi une négation dans sa signification dialectique. Il est et il n’est pas. Il en est de même pour le 1 et pour le Aleph qui symbolise par ses cornes et leurs transformations, cette énergie divine créatrice. Pour interroger les lettres je m’appuierai beaucoup sur une histoire citée dans le Zohar : Après que le Saint, béni soit-Il, jouait avec les vingt-deux lettres de l’alphabet, les unes et les autres, en commençant par la dernière, comme dans une danse sacrée, sont venues le trouver pour lui demander le privilège de présider à la création du monde. Chacune se réclame de commencer un mot d’une grande beauté. Et le Saint, béni soit-Il, leur répond à chacune : « Tu es belle, tu es bonne, tu es magnifique, mais tu es réservée pour autre chose. Ou bien tu commences tel mot, ou bien tu en fais partie et, en conséquence, tu ne peux absolument pas le quitter et je ne peux pas te donner la présidence. » Et toutes les lettres sont renvoyées les unes après les autres jusqu’à ce que la lettre Beith, venue se présenter à son tour lui dit : « Je commence le mot avec lequel on Te bénit en-haut et en-bas ». Et le Saint, béni soit-Il la retient et lui dit : « Oui, tu es bénie et tu seras à la base de toute la Création. Aleph n’est pas venu se présenter et c’est le Saint, béni soit-Il qui l’appelle. Elle est la seule lettre à avoir été appelée. « Mais Aleph, dit le Saint, pourquoi n’es-tu pas venue ? » Et Aleph répond : « D’abord parce que tu as déjà donné la place au Beith et il ne convient pas que Tu la reprennes pour me la donner. » Et la lettre est louée par Dieu : « Et bien, si tu ne présides pas à la création du monde, tu es réservée pour quelque chose de beaucoup plus grand encore ! » Et l’on sent que la lettre Aleph va émailler la langue hébraïque comme pour la féconder d’une manière essentielle, car ce sera toujours elle qui va apporter la lumière divine, sans laquelle les autres lettres ne pourraient pas vivre. Aleph va nous poser le problème du pourquoi de la Création. Car, à partir du moment où Aleph va poser le Beith, le 1 posant le 2, où Dieu va poser l’altérité, nous entrons dans le mystère. Pourquoi le Aleph, étant tout le don de l’amour divin, Dieu a-t-Il encore besoin de créer ? Nous verrons, au fur et à mesure que nous entrerons dans l’intelligence des lettres, que le 1 se suffit à lui-même, qu’il n’a pas besoin du 2, tout en en ayant besoin. Dieu a besoin et n’a pas besoin et cependant dans Sa perfection absolue, Il a besoin de cette création qui viendra s’ajouter à sa perfection pour l’amener encore à un plus que parfait.
De même, dans notre évolution personnelle, nous devons tendre vers un équilibre parfait qui, à la limite, est la mort et qui devra se rompre un jour pour nous amener encore plus loin. C’est ainsi qu’on arrive à comprendre le Beith qui, en entrant dans le mystère de l’Aleph, qui se donne pour être reçu, rejoint celui-ci et l’enrichit. C’est pourquoi, lorsque ces deux lettres sont posées, tout est dit, le rythme est créé, nous pourrions nous arrêter là. Et si les autres lettres viennent enrichir la danse sacrée, c’est pour poser les lois qui vont permettre à Beith de rejoindre l’Aleph. Qu’est-ce que Beith par rapport à l’Aleph ? C’est une lettre pratiquement carrée dont un côté reste ouvert. Elle est l’initiale du mot Beith qui signifie « maison ». C’est un élément réceptif qui s’ouvre pour recevoir. Cette lettre aussi va se transformer, tourner à la verticalité et vers la gauche, pour, à travers des changements successifs, se retourner et le B va pratiquement se construire. Mais qu’est-ce que cette maison que figure Beith ? Elle est construite sur deux lettres, Beith et Tav qui renferment toute la Loi et Aleph est là qui se profile à travers le Yod. Lorsque nous rassemblons le Beith et le Tav en interposant un Yod, nous avons le mot qui veut dire la fille, le mot Bath, ou encore la Vierge d’Israël, celle qui doit mettre au monde l’Enfant divin et qui, ensuite, doit être épousée par Aleph. Toutes les traditions ont une conscience lointaine de cette Vierge qui doit enfanter coexistensivement toute la Création, parce que le Verbe contient la Création qui doit enfanter le Divin. De même chacun de nous en tant que Création toute entière, doit mettre au monde le Divin pour être épousé de Dieu. Dans cette perspective Nous comprenons les mystères chrétiens dans lesquels la virginité est liée à la maternité, celle-ci précédant le mariage. Quand le Aleph pose le Beith, le mot Av, juxtaposition de la lettre A et B (le B se prononce V à la fin d’un mot), rend compte du Père. Et quand nous retournons ce mot, nous obtenons Bo qui rend compte de l’avenir, du Beith allant vers son Aleph final. C’est toute la vocation de l’humanité. La fille signifiant aussi bien l’homme que la femme, doit être épousée du Père et cette loi est tellement sacrée Que je crois qu’elle fait l’objet de toutes les lois morales concernant l’inceste. Car si un père quelconque biologique s’interpose entre l’homme et le Père divin il l’empêche d’être épousé par lui. La Vierge d’Israël est l’humanité toute entière, nous avons tous la même vocation. Répondant à une question : Je ne connais pas la langue sanskrite, mais certainement elle contient aussi des énergies très denses et qui sont très proches de l’hébreu. Il serait question d’une langue primordiale qui aurait donné naissance à une branche sanskrite d’un côté, hébraïque de l’autre. La Bible en parle au moment de la Tour de Babel. Tous les hommes, dit le texte, avaient à ce moment une langue une, une langue divine, très proche des sons. Chez les Chrétiens il y a aussi
au moment de la Pentecôte les langues de feu qui descendent sur les Apôtres et ceux-ci, pénétrés d’une science que nous ne connaissons pas, parlent une langue qui est comprise de tous. Compte rendu de la rencontre du 8.11.1978 Une première partie de la réunion se passe à récapituler pour des nouveaux venus, les sujets de la réunion d’octobre, c’est-à-dire les lettres Aleph et Beith. Nous ne reviendrons pas là-dessus. « J’ai terminé la dernière fois, dit Annik de Souzenelle, en disant que tout pourrait s’arrêter là, le 1 ayant posé le 2 et le 2 devant revenir au 1. Toutes les autres lettres vont raconter ce retour. Déjà dans le Guimel qui est la lettre 3 nous allons trouver l’énergie nécessaire au Beith pour retourner à l’Aleph. Dans chaque lettre qui va suivre, nous verrons le rôle énergétique qu’elle va avoir à jouer dans ce but. La première lettre de Guimel a la valeur 3. Son graphisme est caractérisé par un petit crochet — avec une langue du côté droit et elle est symbolisée par le cou d’un chameau. Si, au sujet d’Aleph je vous ai dit qu’il correspondait au premier jour de la création où Dieu créa la Lumière, que le Beith correspond au deuxième jour pendant lequel Dieu sépara les Eaux d’en-bas et les Eaux d’en-haut, le Guimel correspond au troisième jour au cours duquel nous voyons deux opérations se faire, l’une est au niveau des eaux d’en-bas la séparation du sec et de l’humide. Les Hébreux, dans la Genèse nous disent que Dieu ordonne aux Eaux d’en-bas de se rassembler en un lieu « UN » qui se dit en hébreu : « El Maqom Ehad ». El est un nom divin, le singulier d’Elohim, c’est le suffixe que nous trouvons dans Michel, Emmanuel, etc. et qui indique le Divin. Maqom veut dire le « lieu ». Il est aussi un mot divin, car qu’est-ce que le lieu sinon l’espace, l’espace qui n’a de sens que lorsqu’il correspond à notre espace intérieur, c’est-à-dire à notre plan de conscience, appelé à se transformer continuellement, car nous avons à remonter cette échelle qui nous sépare et nous relie au monde d’en-haut. Et lorsque nous aurons remonté tous ces plans de conscience, nous nous retrouverons dans le lieu divin. Le dernier espace enhaut, en fin de compte, c’est aussi Dieu. Ehad signifie Unité, également mot divin. Autrement dit les eaux qui doivent se rassembler dans un lieu UN ont la vocation d’être divins, d’être l’ensemble de ces énergies divines qui vont féconder tout ce qui apparaît comme étant le sec séparé de l’humide; mais qui, comme les eaux d’en-bas, ont été séparées des eaux d’en haut. Le sec va continuellement être fécondé par l’humide. Qu’est-ce que le chameau ? C’est celui qui traverse le désert en portant en lui son eau, c’est-àdire toute l’énergie qui lui permettra de traverser le désert. Car à partir du moment où la création est séparée du Créateur, le Beith de l’Aleph, surtout dans notre monde en chute, elle est dans un désert. Mais lorsqu’elle prend la décision de retrouver le Aleph, de revenir à ses origines, elle a besoin de toute son énergie intérieure. Nous ne réalisons pas actuellement que nous sommes dans un désert, parce que nous avons oublié notre objectif qui ne devrait être que le Divin. Nos «
jardins » actuels sont des illusions, des prisons, mais lorsque ceux-ci sont icônes du jardin divin, celui-ci nous nourrit et nous donne une certaine force pour aller vers lui. Lorsque le Guimel est venu lui aussi trouver le Saint, béni soit-Il, pour solliciter la première place dans la création du monde, il est renvoyé parce que le Daleth, la lettre suivante, venue elle aussi solliciter, a reçu pour ordre de rester toujours liée au Guimel, ces deux lettres ayant pour valeur 4 et 3, et parce que « le pauvre a besoin du riche ». Nous verrons plus tard le sens de cette histoire qui n’a rien à voir avec la morale. Lorsque les Hébreux quittèrent l’Egypte où ils étaient esclaves et entrèrent dans le désert, ils n’en prirent pas conscience étant encore extrêmement infantiles. Ils se retournèrent vers Moïse et se révoltèrent, car ils avaient faim et soif. Ça c’est le cri de l’humanité qui a horreur d’être libre, qui veut être sécurisée, car la sécurité divine n’est pas évidente. Et Dieu dit à Moïse : « Frappe le rocher et l’eau jaillira ! » Qu’est-ce que le rocher, si ce n’est nous ? Nous sommes pierre vivante, elle est notre noyau, notre énergie nucléaire en nous, car nous sommes construits comme l’atome. Mais, hélas ! nous n’avons pas encore atteint notre noyau qui pourrait libérer l’énergie du dieu que nous sommes en puissance. Et c’est bien pour cela que l’atome pourrait nous tuer tant que nous n’aurons pas atteint cette dimension intérieure nous permettant de fissurer notre atome intérieur pour en dégager l’énergie. « Frappe le rocher et l’eau jaillira », c’est l’ordre que nous recevons tous les jours, voilà le chameau, celui qui porte l’eau. Les Hébreux à nouveau ont soif et Moïse à nouveau se tourne vers Dieu qui lui dit : « Parle au rocher et l’eau jaillira ! » Mais Moïse frappe le rocher et c’est pour cela qu’il n’entrera pas en Terre Promise. Non pas en tant que punition, mais parce qu’il n’était pas encore devenu Verbe. L’eau n’avait pas encore jailli de son front pour qu’il puisse avoir la dimension de Verbe. S’il était malgré cela entré en Terre Promise, il eut été consumé par l’énergie qu’il y rencontrait, car nous ne pouvons entrer dans un plan énergétique qu’en étant devenus nous-mêmes cette énergie. Et Guimel, le chameau va retrouver toute son énergie en lui. Comment cette lettre si intéressante est-elle construite ? Si nous prenons la première et la dernière lettre nous avons ce qui correspond en français au G. et au L qui donnent le mot Gal, signifiant le libérateur. Gilgal en hébreu veut dire une grande roue. Elle contient aussi la notion de libération. L’invention de la roue a été une chose extraordinaire, tandis que le cercle est une totalité. Le Mem qui est au milieu du mot Guimel signifie la maîtrise, c’est-à-dire que le chameau est maître de la libération. La circoncision dont nous avons déjà parlé longuement est signifiée par le mot Gal. Or si nous voulons que nos énergies nous conduisent jusqu’à la Terre Promise, nous devons circoncire, tailler continuellement l’Arbre que nous sommes. Et si les Hébreux se circoncisent au niveau du
sexe, c’est parce qu’il doit y avoir une sexualité vécue de façon juste et non de façon délirante telle que nous le voyons actuellement sous prétexte de libération. C’est comme cela qu’est construit le chameau, il est le porteur d’eau, il est le porteur de libération et, en même temps, il implique la circoncision. Deux opérations se font le troisième jour de la création, d’une part l’eau d’en-bas fait apparaître le sec, appelé terre et, d’autre part, apparaît la verdure. On peut dire que le nombre 3 n’est pas seulement l’énergie qui va nous conduire à notre Aleph-Beith, mais il est aussi symbole de la fécondité essentielle qui nous permettra de mettre au monde l’Enfant Divin. Le Daleth a la valeur 4. Il a la forme d’une petite potence et veut dire : porte. Son histoire est simple. Il est représenté par un triangle, un peu comme la porte d’une tente, d’une maison primitive. Le triangle, comme les autres lettres, va devenir plus ou moins de travers, pencher à droite et à gauche. Il est étrange de voir cette lettre qui a pour valeur 4, représentée par un triangle conformément à ce que le Saint, béni soit-Il lui a ordonné, à savoir de ne jamais se séparer du 3. Alors de quoi s’agit-il ? Le nombre 4, c’est l’équilibre, la stabilité, l’arrêt par rapport au 3 qui est le mouvement, l’énergie. Le 4 rend aussi quelquefois compte d’une épreuve, à la limite d’une quarantaine effective, puisque liée à une maladie contagieuse qui s’incube pendant quarante jours, ou encore à cette coutume mystérieuse de quarante jours après la mort où il se passe toujours quelque chose de très important que nous ignorons. Il est intéressant que ce 4 soit un arrêt, une épreuve et, en même temps une porte. Et Mem, le nombre 40 signifie la matrice, le lieu de la gestation qui se termine par une porte. L’enfant, en naissant, sort de la matrice de sa mère pour entrer dans une autre matrice, celle de son foyer. Nous allons toujours de notre naissance à notre mort de matrice en matrice, dans lesquelles nous avons à assumer notre gestation. Et lorsque le temps sera venu, nous naîtrons à une naissance que nous ignorons. Si nous voyions la mort de l’autre côté, nous nous en réjouirions. La plupart du temps les gens vont vivre ce 4, ce temps de gestation, comme une épreuve. Mais si nous prenons conscience que tout 4 est une porte, à ce moment-là la vie prend un sens. Et lorsque le Saint, béni soit-Il, dit que les lettres Daleth et Guimel ne doivent jamais se séparer, c’est parce qu’Il demande aux structures que représente ce 4, de contenir la vie, cette énergie qui passe à l’intérieur. Si l’enfant ne la rencontre pas, il ne pourra assumer ses neuf mois de gestation et si le ventre reste stérile, s’il ne contient pas le 3, c’est-à-dire toute l’énergie pour faire cet enfant, celui-ci ne se fera pas non plus.
Le mot Daleth correspond donc au 4, la lettre Tav à 400 et le Lamed qui est au milieu, au 30. Encore une fois le Daleth et le Guimel sont réunis. Mais s’ils ne doivent pas se séparer, ils n’en doivent pas davantage s’écraser l’un, l’autre. Ils doivent être ensemble dans un juste rapport. Si le 4 écrase le 3, les structures seront prégnantes, si le 4 prédomine sur le 3; le Lamed, symbole du mouvement, de vie, n’existe plus, il ne reste que la matrice qui se dessèche, devient stérile. Et que reste-t-il ? Le mot Dath fait du Daleth et du Tav, qui veut dire la Loi. Or si cette loi est trop contraignante, elle écrase la vie. Et si la vie n’a pas de loi, elle ne peut grandir. Mais ces lois ne sont pas immuables et au fur et à mesure que l’homme va grandir, les lois aussi se transforment. Annik de Souzenelle fait alors un parallèle entre l’époque que nous vivons et où les générations qui montent font éclater toutes les lois. « Le drame, dit-elle, c’est que la génération actuelle fait sauter la morale, mais qu’elle n’a pas de point de référence pour trouver une autre loi, parce que leurs parents n’ont pu en rendre compte, ne l’ayant pas trouvée en eux-mêmes. Car il n’est qu’en soi que l’on trouve ces lois. C’est le fait d’être adulte. Il est important d’aller à la recherche d’autres lois qui ne soient pas contraignantes, mais libératrices, parce qu’elles nous permettront de grandir. Voici notre 4 qui n’est juste que s’il est au service du 3, du Guimel. La structure est inséparable de la vie. Si on trace sur deux triangles homologues les jours de la création on s’aperçoit que le jour un correspond au jour quatre, que le jour deux correspond au jour cinq et que le jour trois correspond au jour six. Donc le premier jour fut celui de la révélation de la Lumière et le jour quatre furent créés les luminaires dans le ciel. Le jour deux il y eut séparation des eaux d’en-bas et des eaux d’en-haut, tandis que le jour cinq furent créés les oiseaux dans le ciel et les poissons dans l’eau. Le troisième jour fut celui de la séparation du sec et de l’humide et de l’apparition de la verdure, des arbres, de toute cette fécondité. Deux opérations se font aussi le sixième jour, la création des animaux et de l’homme. Le septième jour Dieu se retire afin que toute sa création puisse librement retrouver le chemin, la remontée de ses énergies. Ainsi, lorsque l’homme arrive le dernier, il récapitule le tout, il est tout cela dans ses structures intérieures, il est le MI et le MA, la ténèbre et la lumière, le soleil et la lune. Retourner au Aleph, c’est-à-dire au Père, c’est remonter tous ces niveaux énergétiques que nous portons à l’intérieur de nous-mêmes.
Donc, le quatrième jour, création des luminaires, le grand pour éclairer le jour et le petit pour éclairer la nuit et un petit troisième, les étoiles qui sont le Lamed entre les deux colonnes du quatre, colonnes du Daleth, sortes de chambranles symbolisant ses structures. Dans l’Apocalypse l’Apôtre Jean dit « Les sept étoiles sont les sept Anges des sept Eglises ». Ce sont ces Anges qui parcourent l’échelle en montant et en descendant. Ce sont ces énergies qui viennent d’en-haut pour nous nourrir et nos énergies qui viennent d’en-bas et qui vont à la rencontre des autres. Dans l’étude des autres lettres nous verrons encore que le soleil et la lune correspondent aux structures espace/temps. La lune va marquer le temps et le soleil l’espace. Mais en haut de l’échelle « il n’y a plus ni espace, ni temps, ni soleil, ni lune, car Yod-Hé-Vov-Hé sera ta lumière à toujours. » Tant que nous ne sommes pas reliés au Divin que nous sommes, nous traverserons des espaces liés au temps. C’est pour cela que quand nous mourrons, nous ne serons pas tout de suite dans l’éternité Nous entrerons dans un nouveau temps. Ces quarante jours après la mort; à quel temps, correspondent-ils ? Nous ne le savons pas. Et ce n’est qu’après la mort qu’il y aura évolution à travers des espaces/temps, à travers ces « terres nouvelles » dont parle l’Apôtre Jean dans l’Apocalypse, et que nous entrons dans de nouveaux plans de conscience. Quand selon l’ordre du Saint, béni soit-Il, le Guimel rencontre le Daleth c’est dans le mot Gad qui signifie « bonheur ». C’est-à-dire que le 3 et le 4 réunis, donnent le nombre 7, si important. Lorsque nous retournons le mot Gab, nous avons Dag le poisson. C’est le germe de tout le bonheur en perspective, le poisson étant un germe renfermant la totalité. Chaque terre conquise n’est que le germe d’une terre nouvelle à atteindre. Et au septième jour, il y a totalité, tout est accompli. Dieu se retire, Il se fait germe à l’intérieur de nous pour que nous devenions Lui. Compte rendu de la rencontre du 14.12.1978 Nous abordons aujourd’hui la cinquième lettre de l’alphabet hébraïque, le HE qui a pour valeur 5 et qu’il ne faut pas confondre avec celle qui a pour valeur 8, la lettre HEITH qui, elle, n’a pas la petite ouverture en haut à gauche. La lettre HE ne correspond pas à un mot, elle est une des rares lettres monosyllabiques. Elle signifie « le souffle ». Au début de son histoire elle représente un petit homme qui souffle et qui prend toutes ses forces d’en haut. Elle symbolise essentiellement les poumons. La lettre étant entièrement signifiée par le haut du corps ou verra très vite disparaître le bas de son graphisme pour ne plus avoir que le dessin stylisé d’une barre verticale avec trois branches horizontales. Et comme les autres lettres, celle-ci se retournera et formera E constitué par la tête et les deux bras du petit bonhomme. Le symbolisme de cette lettre nous est aussi donné par le cinquième jour de la Création, celui des oiseaux du ciel et des poissons dans l’eau. Tandis qu’au deuxième jour, dont la lettre symbolique
est l’homologue du HE, il y avait eu séparation des eaux, le Maïm s’étant séparé en deux formant le monde du MI, celui d’en haut et du MA, celui d’en bas. Nous voyons donc que les oiseaux symbolisent toute l’évolution vers le monde d’en haut et que les poissons sont le germe d’en bas. Lorsque la lettre HE alla trouver le Saint-béni-Soit-Il pour lui demander de présider à la création du monde, le Saint-béni-Soit-Il la renvoie en lui disant qu’elle était avec le VAV et le YOD chargée de former le Tétragramme Divin, Yod-He-Vov-He, et que consacrée à une si importante fonction, elle n’avait pas à en réclamer une autre. Nous allons donc faire l’étude des trois lettres composant la Tétragramme sacré. Annik de Souzenelle en modifie le graphisme dont l’opportunité lui a été confirmée par une phrase du Zohar : le Tétragramme est une épée, le Yod en est le pommeau, le Vav la lame et les deux He, les deux tranchants. Que viennent faire là nos germes, nos oiseaux et nos poissons ? L’explication nous en est déjà donnée dans le premier livre d’Annik de Souzenelle : « L’Arbre de Vie et le Schéma corporel » : tout notre travail essentiel, lorsque nous sommes vraiment entrés dans notre incarnation — pas celle de l’enfance, mais à partir du moment où nous allons vraiment entrer dans notre corps symboliquement — nous avons à vivre les contradictions des deux HE, pôles de la dualité, dans un mariage, c’est-à-dire à un niveau supérieur, où les rapports entre les êtres ne sont plus des rapports de force, mais d’amour. Ces deux pôles de la contradiction vont être vécus d’une part par une expérience de la lumière et d’autre part par une redescente dans les ténèbres, dans toute la somme énergétique que nous sommes, mais que nous n’avons pas encore extraite de sa gangue afin de l’amener à nouveau à la lumière, avant de redescendre encore un peu plus loin dans encore plus de ténèbres et de remonter à encore plus de lumière. Et ainsi de suite jusqu’à ce que la totalité des énergies soient ramenée à la lumière et fasse de nous des êtres totalement réalisés, car nous sommes appelés a devenir divins. Le mythe de Noé symbolise merveilleusement ces montées et ces descentes, le vol des oiseaux nous renseignant sur le travail qui se fait à l’intérieur de l’Arche, la colombe signifiant la montée dans les hauteurs et le corbeau la descente dans les profondeurs. Ce même symbolisme est présent dans le cinquième jour de la Genèse, le germe poisson étant symbole des énergies des profondeurs. Il se retrouve également dans la dernière descente de Job dans les eaux souterraines, ou il est accompagné par Yod-He-Vov-He Lui-même, pour en extraire les énergies que nous sommes et les ramener à la lumière.
Au contraire tous les symboles des oiseaux vont être ceux de la montée dans la lumière depuis le plus petit des oiseaux jusqu’au plus grand, l’aigle, dont il est question aussi bien dans les mythes grecs que dans l’Apocalypse. Voici donc les deux souffles ascendant et descendant. C’est la vie humaine. Le souffle nous est donné dans les deux narines qui sont les prolongements des poumons. Le jour où Adam a été créé, Dieu souffle un souffle de vie dans ses narines, l’âme étant don du souffle divin. La lettre HE représente l’article défini. Ainsi si Adam est le nom d’Adam, HA-ADAM est « Le » Adam. Autrement dit, chaque personne et chaque nom en hébreu est défini par la qualité de son souffle. Les deux HE prolongent les deux poumons. D’autre part ce n’est pas un hasard que nous ayons cinq doigts à chaque main, lesquelles réunies vont faire le Yod (valeur 10), mariant ainsi toutes nos contradictions, les intégrant totalement. Le Yod qui est censé être situé à la base de la colonne vertébrale, commence alors à vibrer et à remonter le long de l’épine dorsale et lorsqu’il aura atteint son sommet, l’homme sera devenu Yod-He-Vov-He Lui-même. Il entrera dans la dimension du Dieu qu’il est en puissance. Symboliquement nos deux mains sont extrêmement importantes. Elles sont inséparables l’une de l’autre et font l’œuvre du Yod. Comme on parle d’un troisième œil par rapport aux yeux, on pourrait dire que le Yod est la troisième main. Yod veut dire « main ». Cette troisième main représente ce « faire » intérieur que nous sommes enjoints d’accomplir dans notre vie et qui est symbolisé par le « faire » extérieur, en particulier par le travail manuel qui joue un grand rôle dans la constitution de notre être. Un des mots les plus intéressants illustrés par le He, est AHAVAH qui s’écrit He-Beith-He et qui veut dire l’amour, dans lequel les deux He, les deux poumons, les deux mains, pétrissent les deux lettres Aleph et Beith qui sont les relations entre Créateur et créé. Et comme Aleph et Beith réunis forment le mot AV, le Père, toute la relation du Père et de sa Fille, la Création, représente de même que l’amour, un échange de souffle entre le Père et la Fille. Si nous prenons conscience de cela et si nous relevons la polarisation de nos désirs et de nos échanges de souffle avec le Divin, nous aurons des rapports bien plus justes avec les autres. Généralement nous n’aimons pas véritablement l’autre, parce que cela ne passe pas par le Divin et que la plupart du temps c’est nous que nous aimons dans l’autre. Je veux encore vous faire remarquer qu’en hébreu il n’y a pas de présent, il n’y a qu’un participe qui sert de présent, sauf pour le verbe « être ». Toute la Bible va être écrite pour signifier le présent au futur en rajoutant une petite lettre qui va rendre le futur passé et qu’on appelle « conversif ».
Si bien que par exemple en lisant la Genèse, on se trouve devant un futur qui est aussi un passé, c’est-à-dire ni futur, ni passé, donc présent. La forme verbale va rendre compte d’un verbe qui est de tous les temps, qui est de l’instant, mais qui s’incarne aussi bien dans le passé que dans le présent et le futur. Le verbe être est pourtant employé une fois au présent dans l’Exode IX, un peu avant que Moïse va se mesurer avec le Pharaon. Dieu dit à Moïse : « Tu diras à Pharaon que s’il ne laisse pas sortir les Hébreux d’Egypte, la main de Yod-He-Vov-He est sur Pharaon, sur son troupeau, sur son peuple, sur tout le pays, etc. » Cette phrase si grave contient deux fois Yod-HeVov-He une fois par la main et une fois par lui-même. Adaptée à notre temps elle signifie : Si nous ne laissons pas sortir d’Egypte, c’est-à-dire du monde de la servitude, nos énergies consacrées à faire le Yod en nous, alors la main de Yod-HeVov-He est sur nous et toutes ces énergies se retourneront contre nous, créant des maladies, des cancers, des dépressions nerveuses, etc…, etc… Le mot AVAH, c’est le désir, il renferme aussi la notion du Père. Annik de Souzenelle nous cite encore plusieurs mots intéressants dérivés de la lettre HE, que nos lecteurs trouveront dans son livre : « La Lettre, chemin de vie. » Nous passons à présent à la lettre VAV qui a pour valeur 6 et qui signifie le crochet, le clou, ce qui relie un objet à un autre objet ou à une chose. Et c’est en effet le VAV qui est la conjonction ; donc encore ce qui lie. Son histoire est simple, c’est un crochet qui comme il en est de toutes les lettres, évolue et va très vite devenir non pas le véritable Ypsilon, mais une lettre qui a disparu, le digamma, lettre grecque. Elle s’est confondue avec Ypsilon pour donner notre Y à nous. De même que le HE et le YOD, le VAV fait partie de Tétragramme Yod-He-Vov-He. Elle est la conjonction « et ». Symbole du sixième jour de la Création au cours duquel apparaissent les animaux des champs, la terre et l’homme, deux opérations divines comme au troisième jour où il y eut séparation du sec et de l’humide et la création de la verdure et de l’arbre. Car à de différents niveaux l’homme et l’arbre dans la profondeur sont une même réalité. L’homme est un arbre, l’arbre est un homme en devenir. L’homme est aussi l’animal, puisqu’il est la répétition de toute la Création, de toutes ces énergies qu’il a à redevenir dans un expire. Dans l’inspire il est appelé à remonter tous ces niveaux énergétiques et à redevenir la lumière du premier jour. Le VAV, c’est l’homme, la colonne vertébrale cosmique de l’univers, il est microthéos, un petit univers, et macrothéos, reliant le cosmos tout entier au Divin. Il est la « RAQYA-SHAMAIM » qui unit le monde du MA au monde du MI et lorsque l’homme est total, il est à l’image du Christ. La posture de l’homme sur la terre est quelque chose d’immense, comme le dit le premier des psaumes : « Heureux l’homme qui est dans le Conseil des Justes, il est comme un arbre planté à
la rupture des eaux ». « La rupture des eaux » est la référence au second jour de la Genèse, c’està-dire qu’il a les pieds dans le MA et la tête dans le MI. Annik alors nous cite les mots intéressants en rapport avec le VAV, comme BO formé par la rencontre d’Aleph et Beith à travers la conjonction « et », qui signifie le devenir, mais aussi pénétrer, c’est-à-dire que c’est toute la création qui entre dans la Terre Promise, dans la dernière terre. David signifie le « bien aimé ». Ecrit en lettres hébraïques, le VAV est saisi entre deux portes : le Bien aimé est celui qui est, en marche, qui sort d’une structure pour aller dans une autre, qui passe des portes successives, les échelons de l’échelle. C’est celui-là qui est aimé. Le mot AOR que nous étudierons avec la lettre Reish est la lumière. Ayant pour valeur 200 il est comme un autre Beith. Si Beith est la maison, Reish est la maison au niveau cosmique. Nous sommes renvoyés à l’idée non seulement de réceptivité, mais aussi de résistance. Car nous touchons là aussi bien aux structures physiques, que psychologiques, et que spirituelles du monde, car il n’y a lumière que si il y a réceptivité, voire résistance à la lumière, résistance qui, en même temps, la révèle. Sur le plan psychologique je ne peux donner toute ma tendresse que si la personne qui en est l’objet ne la fuit pas. Sur le plan spirituel, c’est la grande aventure de l’humanité avec son Dieu. Nous pouvons dire que toute l’aventure du peuple hébreu va être une histoire de résistance avec son Dieu. Job par exemple, n’accepte ses épreuves que s’il les comprend et c’est un peu la même histoire avec Jean-Baptiste par rapport au Christ. Malgré sa résistance il conduira l’humanité à la dimension chrétienne. Il y a lumière que quand cette résistance se fait réceptivité. Nous allons encore parler de la lettre ZAIN, elle est comme une espèce de tremblement, un éclair, c’est l’épée en forme de flamme. Elle a pour valeur 7 et s’écrit avec un Yod et un Noun final. Le Noun fait une espèce de crochet, mais quand il est final il est comme un Vav prolongé. Après le 6, donc après le Vav et jusqu’au Yod, le 10, nous allons avoir le Zain, le Heith et le Teith qui vont comprendre en leur milieu le Yod, comme si l’homme, à partir du Vav, était gros du Yod. Et ces trois lettres vont symboliquement réaliser, avant de mettre au monde le Yod, trois étapes essentielles de l’humanité et de chacun de nous en particulier. La première image du Zain est celle d’une flèche qui traverse une peau d’animal. Très vite elle va se styliser en ne gardant plus que deux plans horizontaux qui nous amènera à notre Z en sens contraire pour commencer. Pour comprendre cette évolution de la lettre, rapportons-nous à son histoire auprès du Saint-Béni-Soit-Il. Se référant au psaume : « Souviens-toi du Sabbath », elle
prétend elle aussi à présider à la Création, premièrement parce que « Souviens-toi » en hébreu commence par la lettre Zain et, deuxièmement, parce que le Sabbath a lieu le septième jour. Mais le Saint-béni-soit-Il, la renvoie en disant: « Non, tu ne présideras pas à la Création puisque tu es comme le Noun final, tu as la forme d’un sabre effilé, tu présides donc à la mort, à la destruction. Et, en effet, le mot Zain veut dire une arme, plus précisément une flèche. Le jour du Sabbath, Dieu qui se retire se fait arc, le Père laisse partir l’enfant qui est la flèche, c’est-à-dire toute la Création. Tout en se retirant, Dieu est toujours là discrètement, laissant la Création jouer son rôle, chanter son chant, vivre sa vie. Et si l’on peut comparer la Création à un expire, la flèche va être tout le mouvement de l’inspire, du retour au Divin qui va nous obliger à passer à travers nos états de conscience successifs. La lettre Zain va œuvrer pour nous obliger à mourir à un plan pour rentrer dans un autre. Elle est redoutable parce qu’elle va détruire quelque chose pour nous contraindre à reconstruire. Ce qui est intéressant, c’est que le chiffre 7 en hébreu s’appelle SCHEVA, ce qui est très proche de Shiva, le dieu des Hindous et cela nous incite à penser qu’il y a une origine commune à ces deux mots, car ils ont la même fonction, Shiva détruisant tout ce qui ne ressortit pas à l’unité, tout ce qui rend compte de la dualité. Or le Zain va œuvrer pour que les deux HE, ces deux pôles de la contradiction, fassent le Yod. Annik mentionne alors le mot ZAKOR qui signifie à la fois souviens-toi et mâle. C’est faire œuvre mâle de se souvenir. Lorsqu’on dit : « Dieu se souvient des hommes », Dieu se fait mâle et descend dans l’homme. Lorsque nous descendons en nous pour trouver le Soi qui est le germe divin, nous trouvons Dieu qui descend dans l’homme pour « se souvenir de lui ». Le mot EZER est aussi très important. On y retrouve le Reish qui vaut 70 et qui est donc dans la même note que le Zain qui est 7. C’est un mot que nous trouvons au moment de la création de la femme, de ce pôle féminin dans l’homme, qui est « l’aide ». Dieu dit : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul, faisons une « aide » semblable à lui. » Généralement les traducteurs mettent « semblable » au lieu d’ « aide ». C’est faux, c’est NAGOD, c’est-à-dire face à face. C’est tout le mystère du féminin par rapport à nous tous. Les deux mots ZAKOR et EZER se complètent. On pourrait aussi dire : Il n’est pas bon que l’homme soit séparé (composé des mêmes lettres) de lui-même, faisons-lui prendre conscience de ses profondeurs. Nous analysons encore les mots AR ou Ra signifiant l’ennemi, mais aussi l’ami, le mot ZOV ou ZOBOV qui s’écrivent Zain, Beith ou Zain, He et Beith. Là le Zain œuvre dans le Beith qui lui, œuvre dans la Création et qui alors veut dire « écouler ». C’est l’écoulement des énergies que l’homme va réaliser. Et quand le HE se trouve au milieu et que cela passe par le souffle, nous avons le mot ZAHAV qui est l’or. Donc l’écoulement de toutes nos énergies donne l’or. C’est
aussi l’écoulement divin que les Hébreux appellent « le sperme divin » qui descend dans l’Arbre de Vie et qui va féconder tous les mondes, c’est le pays de HAVILAH, là où coule l’or. Le Zain est la toute première lettre qui nous sépare du Yod après que l’homme ait vécu le 6. Le passage du 6 au 7 est fantastique, parce que l’homme qui reste dans le 6, reste dans la répétition, dans la chaîne du Samsâra. Le 7, ce sont les terres nouvelles, les cieux nouveaux que nous trouvons aussi dans l’Apocalypse. C’est très important de passer ce 6, de vivre le Shabbath qui est la Fille qui touche à la dernière terre et qui donc s’accomplit. Nous verrons la prochaine fois le HEITH, la première barrière où nous allons être testés : sommes-nous oui ou non capables d’aller plus loin ? Les Lois sont implacables. Compte rendu de la rencontre du 11.1.1979 De nouveaux venus incitèrent Annik de Souzenelle à reparler du VAV, la lettre qui tient le centre du Tétragramme Yod-He-Vov-He. Nous renvoyons nos lecteurs au précédent compte rendu. Le Zain, le Heith et le Teith sont comme les matrices du Yod, la dernière lettre. Elles vont être écrites de telle façon que le Yod se trouvera au milieu d’elles. Le Yod ne pourra naître que quand les énergies, après avoir joué dans le Zain et le Heith, seront présentes au niveau du Teith. Le Zain, lié au nombre 7, est symbole de la plénitude acquise et chaque fois qu’il y a une perfection, il y a nécessairement une rupture de cette perfection pour passer à un autre cycle. Le Shabbath, lié au Zain, le septième jour, c’est le retournement du Divin qui n’est pas autre chose qu’un retournement de la conscience pour passer à un autre plan de conscience. Dieu va être parfaitement insaisissable, Il va laisser jouer la Création afin de se faire connaître. Et, à partir du HEITH, cela va être toute cette aventure de la conquête du Divin par la Création. La lettre HEITH a pour valeur 8, elle est l’initiale du mot Heith. Elle est comme un petit rectangle ouvert à la base. A ne pas confondre avec le HE. HEITH, qui exprime une idée de barrière, va évoluer tout au long des deux millénaires qui précèdent notre ère chrétienne, jusqu’à faire le ETA grec qui va donner notre H, sans en avoir le son guttural. Pourquoi cette barrière ? Parce que suivant l’évolution que je vous ai proposée, nous venons de vivre un plan de réalité où tout a été vécu en plénitude. Le ZAIN a fait son œuvre de rupture pour nous faire passer à un plan supérieur et nous amener à un champ énergétique bien supérieur à celui vécu dans notre dernière expérience. Dans cette qualité de vie qui nous est maintenant dévolue, il est indispensable que nous soyons testés. Car si
nous n’avons pas acquis les structures nécessaires pour y pénétrer, nous risquons d’être brûlés, anéantis. Cette barrière est semblable à tous les Gardiens du Seuil des différents mythes. Il nous faut donner le mot de passe qui ne signifie pas seulement une reconnaissance entre frères, comme il en est le cas dans les sociétés initiatiques, mais il représente la vibration qui correspond à un champ énergétique nouveau et si nous ne sommes pas capables de le prononcer, de le vivre, donc de l’être, nous ne pouvons pas entrer. Ce ne sera pas le fait d’une punition, mais une mesure de prudence. La barrière est là pour le vérifier. La lettre HEITH est faite du Yod qu’entourent le Heith et le Tav. Si nous supprimons le Yod, nous lisons Hath, c’est-à-dire le mot : « terreur », lié à l’idée du Grand Œuvre alchimique où l’esprit dépendant d’un nouveau champ de conscience est terrifié. Il est certain que quand nous entrons dans une nouvelle terre, il y a crainte et tremblement. Nous sommes devant l’inconnu et cet inconnu fait peur. En hébreu le mot TERA qui est « la crainte », donne naissance au Hieros grec, qui est le sacré. Dieu, le sixième jour demande à l’homme de nommer les animaux des champs, c’est-à-dire d’avoir sur eux le pouvoir qui lui fait conquérir son premier champ de conscience. Puis Adam est plongé dans le sommeil, TARDEMA (même racine que Thora), qui est la descente dans la profondeur, c’est-à-dire qu’il doit faire tout ce cheminement à partir de l’image de Dieu que nous sommes, jusqu’à aller vers sa parfaite ressemblance (DEMA) et devenir Yod-He-VovHe. Après que l’homme eut nommé les animaux, Dieu lui fait connaître son féminin, c’est-àdire la profondeur de son être, son puits profond dans lequel sont toutes ses énergies. L’homme nu de la Bible, c’est l’homme tout à fait connaissant qui connaît le chemin. La notion de honte est fausse, c’est le verbe « attarder », il ne s’attarde pas, mais va tout de suite plus loin. Il sait ce qui lui reste à faire. Le serpent qui est « connaissant » se fait barrière. C’est lui qui va nous tester, car nous avons à devenir les énergies qu’il représente. Dans le mot HACHEDEN, les animaux des champs, les deux HE sont réunis. Ils ont chacun la valeur 5. Remplacés par le Yod (10) nous trouvons le nom divin SHADAI qui est le ToutPuissant. Le serpent, instrument du Divin a pour nom en hébreu, NAHASH avec au centre le Heith entre le Noun (germe) et le Shin qui est l’explosion de toutes les énergies, l’explosion nucléaire. Et lorsque nous vivons notre Shin, nous sommes des êtres totalement réalisés.
Le serpent nous offre ce fameux fruit, c’est-à-dire une nourriture que nous ne sommes pas encore capables d’intégrer. N’étant pas capables de vivre les lois sans les enfreindre, les événements se retournent contre nous. C’est ce que nous vivons aujourd’hui encore au lieu d’avoir, après le Heith, pu atteindre le Yod dans l’harmonie et non dans la douleur. Quand le Heith est vu se présenter devant le Saint-Béni-soit-Il, il a été renvoyé, car il commence le mot HATA qui veut dire « pêché ». HATA est le mot que nous rencontrons pour la première fois dans l’histoire de Caïn et d’Abel. On parle beaucoup du « péché originel », terme extrêmement mauvais, car qu’avons-nous à faire avec quelqu’un qui a commis un péché dans la nuit des temps ? La Genèse est un présent et chacun de nous participe d’une erreur. Je suis convaincue que la rédemption est davantage liée à l’histoire de Caïn et d’Abel qu’à cette faute ontologique, parce qu’il y a tout le drame du sang qui y coule et que la terre boit. Et nous allons voir que le Christ a donné son sang pour purifier cette terre du sang d’Abel. Le mot « péché » n’apparaît qu’avec le mythe de Caïn et d’Abel. Il signifie d’ailleurs le fait de « mal viser » plus que de pécher. Lorsque Caïn jalouse son frère parce que son offrande n’a pas été reçue, Dieu lui dit : « Si tu relèves ton visage (symboliquement), si tu vis cet événement au plus haut niveau de ton être, avec l’intelligence des choses divines, « Tov » ! c’est bien ! Mais si tu regardes en-bas, le péché, HATA, se couche à ta porte et il porte ses désirs sur toi. Domine-le ». Et nous voyons que quand l’homme est pris dans des événements passionnels, ce n’est pas lui qui désire faire le mal, mais c’est le mal qui désire l’homme. Celui qui désire est toujours en état d’infériorité par rapport a celui qui est désiré, il est esclave de l’objet désiré et celui-ci a une puissance sur lui. Donc si Caïn entre dans l’intelligence divine des événements, il ne donnera pas prise à ses désirs. Mais « visant mal », il a donné à l’événement une puissance sur lui, puissance que seul Dieu doit avoir. Il y a transfert de puissance et les énergies alors se retournent. L’homme est intervenu et a transgressé toutes les barrières. HATA ontologiquement est un garde-fou. AR, Aleph et Heith, signifie « frère » et c’est par lui que Aleph, le Divin, se fait barrière. Qu’il est bon pour des frères de vivre ensemble à condition que cette fraternité soit vécue vraiment par le dépassement de cette barrière qui se présente à nous pour trouver le Divin au travers de tous les écrans psychiques. Et si nous trouvons le Divin dans l’autre, nous le trouvons aussi en nous, parce qu’il y a résonnance. C’est pour cette raison que les communautés sont l’épreuve la plus difficile. On ne peut vivre ces barrières successives que sont tous les autres dans une communauté, que si on a conscience du Divin.
Très proche du AR il y a le nombre 1 qui est un des noms divins, EHAD, dans lequel il y a surtout cette notion de frère. Dans le tétragramme le frère, c’est chaque HE qui a pour frère l’autre HE, et chaque HE doit épouser l’autre, doit passer la barrière et structurer toute cette colonne vertébrale, cette échelle de Jacob que nous avons à vivre pour construire le sommet de notre temple. La lettre TEITH ne correspond pas à un mot. L’hiéroglyphe primitif c’est l’écu, le bouclier, donc encore une barrière. Tout au long de la Bible nous retrouvons cette notion. Ainsi Dieu, avant que Moïse ne revienne en Egypte pour libérer les Hébreux, se met sur son chemin pour le faire mourir. Dieu se fait barrière, afin que Moise puisse se mesurer à Pharaon et permettre aux Hébreux de sortir d’Égypte, de leur matrice, d’assumer leur naissance lorsqu’ils passeront pas la Pâque, la Mer Rouge, etc. Dieu va le tester. C’est une mort initiatique. Lorsque se fait le dépassement des barrières, il y a libération. Si le 7, le Zain, est une mort, le 8, Heith, est une barrière et la résurrection au-delà de la barrière. Les baptistères primitifs étaient octogonaux. Le nombre 8 est bien le symbole de la résurrection. Il est juste qu’avant de rencontrer le Yod nous avions à nous mesurer au Teith, au bouclier, le Yod-He-Vov-He étant le profil de l’épée. La rencontre de l’épée et du bouclier se retrouve dans toutes les guerres saintes, la guerre sainte que nous devrions mener à l’intérieur de nous-mêmes et non à l’extérieur. C’est là que se rencontrent l’épée et le bouclier. L’homme, avec le nombre 9, va symboliser la dernière perfection. Le 7, la perfection acquise impliquait une rupture de cette plénitude pour passer à un autre plan. Arrivés au 9, l’homme et la Création toute entière se revêtent d’une perfection totale. Et lorsque le bouclier a pu vérifier la possibilité de la personne de mettre au monde le Yod, donc de rencontrer l’épée, il se retourne et se fait coupe. Il reçoit alors l’épée. Ce 9, symbole de perfection se retrouve chez Pythagore, Platon, avec les neuf Muses, les neuf Prophétesses de l’Ile de Sein chez les Druides, les neuf Béatitudes qui contiennent toute la dimension de l’évolution de l’homme dans la perspective chrétienne. C’est tout le Grand Œuvre Alchimique qui s’accomplit. Le Teith va se présenter devant de Saint-Béni-soit-Il, se réclamant d’être l’initiale du mot TOV. Son graphisme est intéressant, nous le verrons souvent sous la forme du serpent qui se mord la queue. C’est l’homme qui enfante le Divin, c’est aussi la naissance de l’Enfant Divin. Tov signifie le bien dans l’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal que le serpent va proposer à Adam et à la femme. C’est aussi le mot qui va ponctuer chaque jour de la Création. Il sera répété sept fois et le dernier jour par Tov Meod, l’ensemble.
Le Saint-Béni-soit-Il renvoie la lettre en disant : « Tu est Tov, mais tu n’est que la graine du véritable Tov. Tu ne salueras pas la création du monde, car tu es réservé pour le monde futur. Tu n’as rien de commun avec le monde que je veux créer maintenant. Le bien que tu représentes est enfermé et caché en toi, ainsi qu’il est écrit : « Grande est l’abondance de ta bonté que tu as cachée pour ceux qui te craignent ». C’est précisément à cause du bien que tu caches en toi, que les Portes du Temple seront enfoncées dans la terre, ainsi qu’il est écrit dans les Lamentations de Jérémie : « Ses portes sont enfoncées dans la terre ». Tov ne sera véritablement le Tov que lorsqu’il aura intégré tout ce qui est encore dans la ténèbre. Si dans la Bible RA, qui se rapproche de la notion de ténèbre, est considéré dans certains cas comme l’esprit des Elohim, on pourrait en déduire que Dieu est l’esprit du mal. Mais il ne s’agit pas de Dieu en tant qu’Il se fait mal, mais en tant qu’Il se fait barrière. Quand tout ce RA (le mal) sera intégré au Tov, le Tov sera véritablement le Tov. Ce n’est que quand nous serons devenus entièrement lumière, étant allés dans nos profondeurs chercher toute la somme des énergies qui nous constituent, que nous serons Tov. Celui-ci n’a rien à voir avec le petit Tov du départ, c’està-dire avec l’élément lumière élémentaire du départ, Les Portes du Temple enfoncées dans la terre sont tout le symbolisme du grain de blé, du Tov du départ qui deviendra toute lumière. Lorsque toute cette ténèbre est intégrée, naît le Yod, la dixième lettre qui est le retour à l’Unité. Les HE, 5 + 5, se sont épousés, la colonne vertébrale aura été construite, l’homme met vraiment au monde le Yod qu’il est, ce Yod-He-Vov-He à venir. Si nous sommes ici réunis, c’est parce qu’il y a en nous un appel au dépassement de l’absurde extérieur pour entrer dans une compréhension profonde de ce que nous sommes. C’est Yod-He-Vov-He qui travaille en nous pour que les HE se marient et que nous devenions véritablement Yod-He-Vov-He. Yod, cette petite virgule, c’est la main, la réunion des deux mains qui n’ont pas par hasard cinq doigts. Elles sont le prolongement du souffle et quand les deux mains se rejoignent, elles sont aussi la connaissance. Toute la main est symbole de connaissance, d’expérience. La toute dernière expérience, c’est celle qui a intégré la dualité et qui vit la réalisation du Divin total. C’est pourquoi Isaï, parlant de cette arrivée de l’humanité à la réalisation de son unité, dit : « Il n’y aura plus ni soleil, ni lune, car Yod-He-Vov-He sera ta lumière à toujours ». Soleil et Lune, symboles des terres de l’espace-temps que nous vivons jusqu’à ce que nous entrions dans le Divin qui est notre dernier espace-temps, l’éternité même. Réponse à une question : Ce qui est important, c’est de bien connaître au départ les neuf premiers nombres, puis le dix. Ce sont les nombres des principes. Le dix sera l’actualisation et le départ d’un autre plan. Les unités sont aux dizaines ce qu’est le premier chapitre de la Genèse
par rapport à l’autre. Les structures du monde sont mises en place et dans ce qu’il est, convenu d’appeler la seconde Genèse, Yod-He-Vov-He qui n’apparaît qu’à ce moment, va commencer à travailler. Dans le premier chapitre ce sont uniquement les Elohim. Tout ce faire divin va commencer à jouer dans le second chapitre, Yod-He-Vov-He va travailler avec Elohim. Lorsqu’après la création des Lois, les principes sont posés, nous entrons dans l’Univers. Après chaque dizaine il y a un cycle complet supérieur, c’est pourquoi le Saint-Béni-soit-Il dit au 9: « Tu seras le 900 et, à ce moment là, beaucoup plus que le 9, parce que sera accompli tout ce monde des principes ». A la fin de la Genèse il y a cette phrase que je cite de mémoire : « Les cieux et la terre sont achevés dans le jour où Dieu a créé le ciel et la terre pour les faire ». La Création est loin d’être faite, elle n’a pas encore joué avec Yod-He-Vov-He qui est l’homme lui-même, qui entre en travail avec le Créateur. Comme il en est dans une œuvre artistique, l’artiste commence à créer, il pose le principe de son œuvre, mais après il n’en est plus le maître, c’est l’œuvre qui a une personnalité. Elle s’empare du créateur et se fait avec lui. Compte rendu de la rencontre du 8.2.1979 Annick de Souzenelle nous rappelle que les trois lettres qui vont séparer le Vav du Yod contiennent le Yod dans leur ventre.Le Zain, le Heith et le Teith oeuvrant à sa mise au monde. Le Zain qui a pour valeur 7 est le symbole de l’arme qui traverse notre tunique de peau, c’est-àdire nos différents plans de conscience et qui nous oblige à mourir à ceux-ci pour renaître aux plans supérieurs. Nous allons aller vers de nouveaux cieux et de nouvelles terres. Avec le Heith qui a pour nombre 8, nous avons à traverser une barrière qui nous obligera à vérifier si nous avons les structures nécessaires pour entrer dans une nouvelle terre, dans un nouveau champ d’expérience. Le Teith, lui, nombre 9, est encore une barrière, celle du bouclier se présentant devant l’épée. Le guerrier va à la rencontre de l’épée, le Yod se protégeant avec le bouclier. Derrière cette barrière nos structures sont à nouveau vérifiées, afin que nous puissions atteindre l’énergie des énergies que nous allons rencontrer maintenant et qui est le Yod. Et alors le bouclier devient la coupe qui reçoit l’épée. Le Yod naît, il a la valeur 10 et rejoint l’unité. Chaque fois que nous rencontrons l’unité, soit par le 1 (Aleph), le Yod jusqu’au Aleph final qui vaut 1.000, nous aurons accès à des plans d’expériences différents, tout en retournant à l’unité, symbole du Divin.
Le Yod se compose de deux lettres, le Yod et le Daleth. Prononcé Yad, il signifie la main. Quel mystère que la main ! Nous verrons que beaucoup de lettres signifiant des dizaines, expriment une partie du corps et nous feront quitter le monde des Principes pour entrer dans celui de l’expérience vécue. On parle de deux créations du monde qui paraissent contradictoires mais qui, en fait, se complètent : Dans la première Genèse nous sommes dans le monde des Principes, des grandes Lois que pose Dieu et qui structurent le monde et chacun de nous. La seconde Genèse qui est la même, mais vécue autrement, va s’exprimer par les lettres que nous étudierons maintenant et qui expriment les dizaines et nous allons voir comment l’humanité va vivre ces dizaines. Ce n’est pas par hasard que l’expérience vécue arrive avec le mot Yad — la main — car elle est « toucher » de la vie. Yad est la structure même du mot Yado qui veut dire : « je connais », non d’une connaissance intellectuelle, mais ce sont tous nos sens qui sont contenus au bout de nos doigts. Les mains et les yeux sont intimement liés comme si nous avions des cellules visuelles au bout de nos doigts. La parapsychologie est en train de le découvrir. Chacun de nos sens les contient tous, tout en en privilégiant tel ou tel aspect. L’hiéroglyphe primitif du Yod est une main au bout d’un bras. Très vite le bras va disparaître et nous nous trouvons devant notre Y. Lorsque le Yod est venu se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, Dieu le renvoie à sa place en lui disant qu’il lui suffisait de constituer le Nom Divin, le Tétragramme Yod-Hé-Vov-Hé. Il est intéressant de remarquer que dans la première Genèse c’était Elohim qui était à l’œuvre et que ce n’est que dans la deuxième Genèse que nous voyons apparaître Yod-Hé-Vov-Hé auprès d’Elohim. Ce fait nous dévoile un tout autre aspect de la Genèse, à savoir que Adam est fait non pas par le Verbe, mais par la main. Car Dieu va prendre la terre Adamah pour en pétrir Adam. Et une fois que le potier divin aura façonné l’homme, il soufflera dans ses narines un souffle de vie. Alors qui est Yod-Hé-Vov-Hé par rapport à Elohim ? Je pense qu’il s’agit ici, en commun avec les Elohim, ce que les Pères, de l’Eglise appellent « le Grand Conseil Divin » et Yod-HéVov-Hé est ce Dieu qui est placé au cœur de la Création et qui est appelé à travailler avec Elohim pour que chaque élément de cette Création programme son archétype. Le monde de la Création, la manifestation est une image, un reflet comme dans un miroir, du monde divin qui l’informe constamment. Le mot Dabar va nous aider à saisir la relation entre la manifestation et les archétypes. Il a pour signification le verbe, la parole, mais en hébreu actuel il veut aussi dire : la chose, la même chose ou autre chose. Parole – chose, cela a l’air d’une chute, mais cela n’en est pas une si nous
réalisons que chaque chose, chaque élément de la Création est reliée à la parole qui l’a faite. Et quand nous nous coupons de la parole, de l’archétype, les choses perdent leur sens et sont coupées de tout ce qui les informe. C’est ce qui se passe dans le monde que nous vivons aujourd’hui. On voit dans la Bible une troisième traduction du mot Dabar, Dever, la peste. C’est le même mot prononcé différemment, donc les mêmes énergies. Qu’est-ce que cela veut dire ? Que, avec les mêmes énergies nous allons faire sourdre la vie, remonter toutes les chaînes jusqu’à l’archétype, c’est-à-dire jusqu’à la mort qui est rendue par le mot « peste ». Avec les mêmes énergies nous pouvons faire soit le bien, ou le mal, soit la vie ou la mort. C’est nous qui introduisons le mal. Jérémie dit : « Voici, j’ai mis devant vous le chemin de la vie et le chemin de la mort ». C’est à l’homme de choisir, là se trouve sa redoutable liberté. Yod-Hé-Vov-Hé est le Germe Divin qui travaille au cœur de la Création, il est l’empreinte même du Divin. Nous sommes devant l’image du Verbe, Dabar, qui est la source de chaque son, de chaque objet, de chaque être de la Création et qui porte en lui son empreinte qui est Yod-Hé-VovHé. Même après la chute, même après qu’il se soit coupé du Divin, l’homme reste lié à ce Tétragramme. Et c’est pourquoi Eve dit à la naissance de Caïn, premier homme naissant après la chute : « J’ai acquis un Ish, j’ai acquis un homme et Yod-Hé-Vov-Hé ». La traduction de « et » généralement employée donne « avec l’aide », elle ne signifie rien. Il s’agit ici de l’homme « alpha et oméga », c’est-à-dire d’origine divine et qui doit atteindre le divin. Nous sommes en potentiel Yod-Hé-Vov-Hé, ce nom que les Hébreux ne font qu’épeler, qu’ils remplacent dans leurs prières par Adonaï. C’est un nom d’une telle force qu’il était prononcé une fois par an dans le Saint des Saints par le Grand Prêtre et selon une vibration que nous avons perdue et qui était tellement forte, que les hommes en mourraient quand ils n’étaient pas capables de la soutenir. Donc Yod-Hé-Vov-Hé arrive auprès d’Elohim dans le second chapitre de la Genèse, parce que Dieu, ayant posé sa Création, l’anime, souffle sur elle et donne à chacun son nom. Et ce nom qui est donné, c’est toute la vibration initiale du sous-germe à partir duquel chaque élément de la Création commence à vibrer. L’œuvre elle-même se joue, et c’est le Divin qui se joue dans l’Œuvre. Nous n’avons pas deux Dieux, Yod-Hé-Vov-Hé et Elohim, mais nous avons Dieu qui se donne à travers sa Création pour que celle-ci Le devienne. Tout commence donc à se mettre en mouvement et c’est Yod-Hé-Vov-Hé qui va, à travers la colonne vertébrale de la Création, s’exprimer dans deux Arbres : L’Arbre de Vie et l’Arbre de la
Connaissance de la Dualité, car ce n’est qu’à travers la contradiction que nous allons pouvoir assumer des résurrections successives. Notre humanité actuelle est encore dans un infantilisme dramatique en vivant cette dualité dans les conflits et les guerres, au lieu de les vivre dans les deux Hé qui se rencontrent pour faire la main, c’est-à-dire la connaissance. Si les deux Hé qui font chacun 5, se marient, ils donnent 10. Nous sommes là pour œuvrer avec la main divine dans la connaissance de l’Amour. On ne peut connaître qu’en aimant, on ne peut aimer qu’en connaissant. Voilà, je crois l’essentiel du mot Yod, le Yod qui vient lorsque nous aurons construit tous les étages de notre conscience. Toutes les structures des lettres hébraïques rendront compte de ce devenir intérieur. Nous allons le voir tout au long de ces lettres et notamment avec celle qui veut dire « l’aile ». Ce qui intéresse les Hébreux, ce n’est pas la vision immédiate, mais la vision des profondeurs, le devenir de l’homme qui est la vision de Dieu. Réponses à diverses questions : C’est à partir de Yesod, le chakra fondamental à la base de la colonne vertébrale, que Yod commence à se mettre en mouvement. Dans le songe de l’échelle, Jacob est à la base de la colonne vertébrale cosmique. Il débaptise le lieu qui s’appelle Lud, qui signifie « lumière »; « amande », parce qu’il commence à faire vibrer ce germe de lumière qui, dans les profondeurs, est Yod-Hé-Vov-Hé. Yesod est le fondement de la Création. — Je ne crois pas que l’on peut assimiler Elohim à la Trinité, ni Yod-Hé-Vov-Hé à l’Esprit-Saint. Toute la tradition judéo-chrétienne va parler des deux mains, nous retrouvons toujours dans les psaumes et chez les Prophètes, « la droite et la gauche » qui vont œuvrer dans la Création. Les Pères de l’Eglise disent que Dieu est la Source qui se fait connaître à travers le Fils et l’Esprit, appelés « les deux mains du Père ». L’Esprit-Saint et le Fils sont inséparables. Il est dit : « C’est par son Verbe que Dieu crée le monde et par son souffle qu’il en fait toutes les armées », c’est-àdire toutes les énergies. Dans la perspective juive, il y a les deux mains qui œuvrent toujours ensemble et qui sont inséparables. Tout cela est indissociable du travail manuel, il est la marque extérieure d’une prise de conscience de la nécessité du travail intérieur. — Les énergies divines vont s’exprimer à travers de multiples noms divins, mais le travail qui se fait dans l’homme, se fait selon l’archétype Yod-Hé-Vov-Hé. — Réaliser le Divin, c’est ce que les Hébreux appellent « Le Grand Nom Divin » qui est inconnu et auquel nous participons tous avec les énergies qui nous sont propres, avec le nom qui nous est propre à chacun d’entre nous, et qui fait le mystère de chaque personne.
Lorsque nous aurons totalement réalisé notre nom, que nous le connaîtrons, nous connaîtrons ce « Grand Nom Divin » parce que nous le serons devenus. Je vous propose d’étudier le Kaph qui a pour valeur 20 et qui s’exprime avec un Phé final. C’est une lettre carrée. En supprimant la partie qui va vers la gauche et en prolongeant la partie verticale, on obtient le Phé final. Le Kaph ne doit pas être confondu avec le Qof qui a pour valeur 100. Kaph veut dire la paume de la main, mais aussi grosso modo, un petit contenant que nous retrouverons dans différentes parties du corps, par exemple dans la hanche blessée de Jacob, qui n’est autre que la cupule du fémur, Kaph Yorek. C’est là où se trouve un centre d’énergie très important qui, s’il n’est pas employé pour construire l’homme, est employé à le détruire et c’est ce qui fait la rupture à ce niveau du col du fémur chez beaucoup de vieillards. Kaph, c’est aussi la plante des pieds. Le graphisme de la lettre était autrefois une main qui fut stylisée. Son retournement nous donne la lettre K. Quand la lettre est venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-il, elle fit valoir qu’elle commençait le mot qui signifiait la « gloire », Kabod. Etant l’initiale de la Gloire de Dieu, elle se crut désignée pour commencer la création du monde. Homologue de Beith qui a reçu cet honneur, elle se l’est vu refuser. Kabod est un mot d’une beauté immense: gloire divine, richesse, densité. Quand la Gloire Divine descend dans la Tente d’Assignation, dans le Tabernacle, il y a une telle densité que pas un homme ne peut y entrer. Si nous voulons faire un peu de numérologie, nous voyons que 20 +2 + 4 = 26, le nombre sacré du Tétragramme. Kabod, c’est le Yod-Hé-Vov-Hé en potentiel dans l’homme qui est alors totalement réalisé. Le même mot prononcé Kaved veut dire le foie. Notre foie est aussi un réceptacle de richesses physiques, psychiques et spirituelles. C’est pour cela qu’il est important de libérer le foie des nourritures physiques et psychiques, si nous voulons y faire entrer des nourritures spirituelles. Mais cette libération doit se faire uniquement dans un but de purification spirituelle et non pour des fins de pouvoirs à acquérir. Car à ce moment-là, y pénètrent des forces négatives, causes de maladies et de drames. Donc, quand le Kaph est allé se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, il quitte le Trône (Kisse Hakabod, le trône de la Gloire Divine), et il est dit dans le Zohar : « deux cent mille mondes ainsi que le Trône lui-même furent ébranlés, la secousse était si violente qu’elle menaçait tous les mondes d’écroulement ».
Le Saint-Béni-Soit-Il dit alors : « Kaph, Kaph, pourquoi persistes-tu à rester ici, retournes à ta place, je ne me servirai pas de toi pour commencer la Création, car tu es l’initiale du mot exprimant l’extermination ». Nous nous trouvons là devant le mot Kalah, d’où vient peut-être celui de calamité. Pourquoi s’agit-il d’extermination. Quand la lettre Kaph et la lettre Lamed sont ensemble, elles forment un mot qui veut dire la totalité, donc un achèvement. Et comme pour toute perfection acquise la rupture doit avoir lieu pour pouvoir parvenir à un plus que parfait. Donc il y aura destruction, extermination, des morts nécessaires pour passer à un autre plan. Derrière le discours du Divin, il y a la notion de ce Kaph qui va présider à une totalité, à un achèvement. La première lettre qui était venue se présenter (elles se présentent en sens inverse), était le Mem qui aussi reçut l’ordre de retourner à sa place, car elle formait le mot Melech, le Roi. Mem, Lamed, Kaph final sont les trois lettres qui ne doivent jamais quitter leur place, parce qu’elles forment précisément le mot, Roi, cette royauté que nous avons à devenir. Melech est aussi la racine de Malkout, dans la dernière des Séphiroth, qui signifie le Royaume. Il y a un mot très intéressant qui est formé avec le mot Kabod, c’est Coha, force. Ce n’est que quand nous avons les deux mains réunies que nous avons la force, aussi bien sur un plan vulgaire que par les Hé du Yod-Hé-Vov-Hé, lesquels, totalement réunis, forment le Yod en-haut et c’est finalement ce Yod qui est la force. Koav ou Kaov, plus exactement Kaph-Aleph-Beith, veut dire ruiner. Pourquoi cette notion de ruiner ? Quand nous voulons ramener le mystère à un concept qui nous est propre, nous tuons le concept. L’expérience mystique ne peut être exprimée, elle reste dans le domaine du silence. Un autre mot, Cocav, c’est l’étoile ou cocavim, les étoiles. Ce mot apparaît au quatrième jour de la Genèse et dans l’étude de la quatrième lettre, Daleth, où nous voyons arriver les structures, les luminaires qui éclairent pendant la nuit et pendant le jour. Mais cela est encore bien autre chose et notamment nos structures intérieures, car tout notre corps est un système solaire. Dans l’Apocalypse les étoiles sont comparées aux Anges du monde angélique. Ce sont des énergies divines, ce sont elles qui montent et descendent le long de l’échelle de Jacob. Ce sont les énergies qui président à nos structures et à notre évolution intérieure. Le monde des étoiles est un monde très étrange. Le Kaph est un réservoir d’énergie, le Beith, c’est la maison. Ils sont appelés à s’ouvrir les uns après les autres, en temps voulu, pour réaliser le Divin que nous sommes.
Compte rendu de la rencontre du 8.3.1979 Après avoir étudié le Yod qui a pour valeur 10 et le Kaph qui a pour valeur 20, nous abordons aujourd’hui le Lamed qui a pour valeur 30 et qui est l’homologue du Guimel dont le nombre est 3. Le Guimel est ce chameau tenant en réserve l’eau à l’intérieur de lui, symbole de l’homme en tant qu’il porte en lui ses énergies lui permettant de traverser son désert sans avoir recours aux énergies extérieures. Nous sommes tous une réserve fantastique d’énergies qui sont à découvrir, à exploiter, pour pouvoir nous réaliser totalement. Le Lamed va rendre compte de la même réalité que le Guimel. Si le Kaph signifie la paume de la main, on peut dire que le Lamed est ce que l’homme va tenir dans sa main, symbole de puissance. L’homme a en main l’instrument pour extérioriser cette énergie et vivre la puissance qu’il est. Lamed, c’est aussi l’aiguillon dont se sert le « toucher de bœufs » quand il les mène aux champs ou quand il leur fait pousser la charrue. La forme de la lettre nous le rappelle. Primitivement elle était un aiguillon qui, pendant le premier millénaire s’est retourné d’abord dans un sens, puis entièrement dans l’autre. Notre L est né de cette lettre-là. Lamed, comme Aleph, veut aussi dire enseigner, instruire et c’est la même racine qui rend compte de celui qui enseigne. Aleph signifie aussi la bête cornue. Nous retrouvons ce même symbole avec l’image du « toucheur de bœufs » qui, avec l’aide de l’aiguillon, dirige la bête dans une direction ou dans l’autre. Et c’est ainsi que l’homme, conduit par l’aiguillon divin qui est en lui, dans la profondeur de son être, va être amené à accomplir son destin symbolique de bête cornue qui reçoit l’information par ses cornes, le menant jusqu’à l’auréole finale, là où la corne se transforme en couronne. Ce cheminement de l’homme, aidé par l’aiguillon, à travers les épreuves de sa vie, depuis le début de sa gestation jusqu’à la toute dernière, celle de la naissance de l’Enfant Divin qu’il est lui-même, est signifié par le Lamed qui contient aussi en lui la notion de mettre au monde. Pris dans ce sens l’aiguillon rejoint l’image du bâton, du bâton de celui qui a de l’autorité, qui connaît, qui guide. C’est le sceptre de l’empereur, la crosse de l’évêque, le bâton de maréchal, etc… Ce sont là les aspects extérieurs de l’aiguillon, mais nous les portons aussi intérieurement. Et là s’impose la notion du guide intérieur, de celui que nous voyons parfois apparaître dans nos rêves,
que nous sentons intuitivement, qui nous donne des certitudes profondes desquelles nous avons à être à l’écoute. Lorsque le Lamed rencontre l’Aleph ils forment le mot EL. C’est le plus courant et le plus important des noms divins, celui qui débute Élohim, que nous trouvons en suffixe dans les noms : Gabriel, la force divine, Raphaël, le médecin divin, Daniel, la justice divine, etc…, dans tous les prénoms d’hommes qui rendent compte de l’énergie divine. Dans un sens contraire ces deux lettres forment le mot LO qui est la négation, ne pas. Quel est leur rapport ? C’est que nous ne pouvons approcher le Divin que par le chemin de la négation, le Divin « n’est pas », car il est beaucoup plus, au-delà de toute affirmation et de toute négation, au-delà de l’Etre et du Non-Etre, au-delà de toutes les qualifications opposées, au-delà aussi du singulier et du pluriel, puisque Elohim est le pluriel d’El. C’est encore une négation lorsque le Beith rencontre le Lamed. Ils forment le mot LEB, le cœur, non dans son sens physique, mais en tant que milieu essentiel de l’être qui rejoint le Divin et qui va évoluer dans la même dialectique. Nous ne pouvons approcher l’homme que par la contradiction. Dans la rencontre du Lamed avec le Daleth, celui-ci aura pour mission de faire passer l’aiguillon par des portes, c’est la naissance, c’est le verbe naître, Yalod. La seule naissance qui intéresse les Hébreux est celle du Yod. La naissance de l’enfant est certes une bénédiction, parce qu’elle prolonge l’homme dans le temps jusqu’à ce qu’il soit capable de mettre au monde le Yod. Et c’est pour cela que, vivant sur un plan très concret, chez les Hébreux les femmes doivent se marier, sinon, comme il en est pour les femmes stériles, elles sont refusées par Israël. Espérant la venue du Messie, on attend toujours d’une femme Qu’elle mette au monde l’Enfant Divin. C’est ainsi que le Lamed, l’aiguillon, est formé par la même racine LED, à l’intérieur de laquelle il y a le Mem, valeur 40, la matrice, qui a pour homologue le 4, le Daleth, ce lieu clos et choisi. Dans ce contexte on trouve aussi la racine DAL, un des mots qui signifie pauvreté. En effet, pour passer la porte, l’aiguillon va obliger l’homme à se faire de plus en plus humble, réduit à son essentiel. Toutes les portes à passer seront des purifications non dans l’ordre moral, mais dans l’ordre ontologique et la dernière étape à passer se trouve symbolisée par le chameau passant par le chas d’une aiguille. Lorsque nous avons étudié le Daleth nous avons vu que dans le mot Daleth, le Lamed situé au milieu et qui assure par le mouvement le passage de la vie, avait pour valeur 30, qu’il était
entouré de deux 4 représentant les structures, les chambranles de la porte et que, lorsque le Daleth et le Tav se réunissaient trop, le Lamed se trouvait écrasé et la vie ne pouvait plus passer. Lorsqu’on réunit le Daleth et le Tav et que l’on supprime le Lamed au milieu, on a le mot DATH, la Loi. En effet, lorsque la loi est trop prégnante, elle écrase l’être, le Lamed à l’intérieur de l’être. C’est ce que nous voyons tous les jours. L’homme n’est plus capable de faire naître en lui l’essentiel, il est écrasé, étouffé. Et ceci est à l’origine de toutes les maladies, aussi bien physiques que psychiques. Ce sont toutes les contraintes parentales, professionnelles et autres, qui tuent l’homme intérieurement. LUZ (Lamed-Vav-Zain) est également un mot intéressant. Il signifie l’amande, l’amandier, il est symbole de lumière, de lumière essentielle en tant que symbole d’éternité, d’être éternel, ainsi que le nomme la tradition judéo-chrétienne, et non d’être immortel. L’être sans commencement, ni fin. Nous avons évidemment un commencement historique au moment de notre naissance, mais nous venons de loin et allons loin. Notre passage dans cette expérience entre notre naissance et notre mort, n’est qu’un très court passage. A. de Souzennelle nous rappelle l’importance de Luz dans l’histoire de Jacob, ainsi que les différents symboles de l’amande, de la mandorle qui entoure les corps en gloire des grands Saints et de l’amande symbolique de la montée le long de la colonne vertébrale où, au niveau de la gorge, nous trouvons les amygdales, autres amandes. Luz correspond aussi à un petit os que la tradition situe à la base de la colonne vertébrale et qui est indestructible. Le Lamed avait reçu du Saint-Béni-Soit-Il l’ordre de ne pas bouger et de ne pas se présenter devant lui, parce que, comme le Kaph et le Mem il représente une des trois lettres formant le nom Melech, c’est-à-dire le Roi. Or le Kaph qui avait transgressé cet ordre fut renvoyé, étant avec le Lamed et le Hé, significatif du mot Kalah, la destruction. Mais KAL, formé des deux seuls Lamed et Kaph veut dire la totalité. Il est certain que lorsque tout est achevé, lorsque la totalité est réunie, il y aura destruction pour passer à un autre niveau. C’est dans ce sens que Kaloh, le même verbe, est achever, terminer. Cette notion de totalité, d’achèvement, de perfection dans laquelle il va y avoir rupture pour passer à un autre plan, se retrouve continuellement dans la structure de la langue hébraïque. Le verbe OCHEL veut dire « manger ». C’est un mot d’une grande beauté et profondeur. C’est l’ordre que l’homme reçoit tout de suite après que la Création ait été mise en place : « Tu te nourriras de plantes portant graines et d’arbres portant fruits… ». Cela représente l’intégration de toutes les énergies divines qui se sont manifestées pendant les sept jours de la création. Le Zohar
parle des Anges qui président à toutes ces énergies, que ce soit l’herbe, les fruits, les céréales, etc… Et, chez les Chrétiens, à la limite, cela va donner avec les énergies divines, les mystères de la transformation du pain qui sera le corps même du Christ. Dans l’absorption de l’Eucharistie le Chrétien se retrouve en Eden, dans les conditions d’avant la chute, parce que l’homme en Eden se nourrissait du Divin. Ochel, c’est vraiment le Divin, c’est nourrir, prendre dans un contenant le Divin. Quand le Guimel rencontre le Lamed, nous nous trouvons devant le mot GOL qui exprime la libération et si on ajoute Aleph, ce sera GAOL, le libérateur. Gal, deux fois répété, c’est une roue, GALGAL. Et GALGALIN, ce sont les grandes roues des Chérubins dans le Livre d’Ezéchiel. Golgotha signifie le mont du crâne, c’est la grande roue de la vie et de la résurrection, le Christ va mourir pour ressusciter. GUIL est aussi un très beau mot, c’est la joie et c’est aussi le mot qui rend compte de l’âge. Plus on avance en âge, plus on devrait entrer dans la joie. Car, plus on est « connaissant » (pas dans le sens intellectuel du mot, mais connaissant de l’actualisation de la vie qui se transforme) plus la personne âgée devrait être celle qui est la plus joyeuse. Nous avons aussi le mot LUL, c’est l’escalier en spirale et LULYANI c’est la spirale elle-même. La spirale est le mouvement même de la vie. On la retrouve aussi bien dans les astres que dans les coquillages, dans la cellule, dans les rites initiatiques, enfin dans tout. Par contre LEILAH qui est devenu un prénom féminin, c’est la lutte. Et cela nous fait penser à la spirale qui nous mène dans les profondeurs, dans notre nuit intérieure, dans la Nuit Obscure de Saint Jean de la Croix. Et cette Nuit Obscure si douloureuse, c’est la descente en spirale vers le Yod-Hé-Vov-Hé que nous sommes dans la profondeur. Leilah est un mot très dur, parce qu’il représente la lutte. Mais le Lamed préside aussi à la montée, car on ne la sépare pas de la descente. Et c’est le mot AL qui la signifie Après nous avoir parlé de la lettre Lamed « qui est cette information qui nous montre le chemin », nous abordons l’étude de la lettre MEM avec laquelle nous entrons dans la nécessité de franchir un autre plan de conscience, ce qui implique l’obligation de passer par une matrice. La lettre MEM a pour valeur 40, elle est l’initiale du mot MAIM qui signifie « les eaux » et lorsqu’elle est en position finale, elle se dessine comme un carré.
L’hiéroglyphe primitif était tout simplement les vagues de la mer qui vont, par la suite, prendre des angles un peu plus aigus qui seront à l’origine du Mu grec, notre lettre M. Et, après être passée par différentes formes, environ deux siècles avant Jésus-Christ, elle finira par devenir carrée. Qu’est-ce que Maim, les eaux ? Dans la Genèse il est dit qu’avant le premier jour Dieu planait sur les eaux. Planer est une mauvaise traduction qui ne fait que réduire à une image un mot qui a une profondeur inimaginable. En fait, il y a dans ce mot une activité de mère et de père. C’est un peu le mot qui fait penser à une poule qui couve ses œufs, qui recouvre tout un monde, un chaos primordial qui est l’œuf au départ et qui, couver, va former vraiment le poussin. Ce chaos primordial est en effet gros et lourd de toute la Création et l’Esprit de Dieu est là qui le réchauffe, qui lui apporte vie. En même temps, il y a nettement dans ce mot, le sens de pénétration qui aussi constitue l’œuvre paternelle, l’œuvre mâle. C’est pourquoi l’Esprit ne peut être réduit ni à un rôle féminin, ni à un rôle masculin, il est en deçà. Ces eaux sont essentiellement une matrice. Lorsqu’une mère porte un enfant dans son ventre, elle reconstitue ses eaux primordiales, car le liquide amniotique dans lequel baigne l’enfant, a la même teneur que l’eau de mer. Et celui qui doit être le maître de ces eaux matricielles c’est Yod, les eaux sont grosses de Yod. Dans le deuxième jour (jour symbolique) de la Création, Dieu sépare les eaux d’en haut qui sont appelées le MI, le monde archétypique, principiel, incréé, des eaux d’en bas qui sont appelées le MA, le monde créé, le monde de la manifestation, celui auquel nous appartenons. Et tout aussitôt que Dieu eut séparé ces eaux, Il les relie comme en témoigne le mot « SHAMAIN », l’étendue, c’est-à-dire qu’elles sont séparées et pas séparées, ce qui est encore une de ces contradictions fondamentales. Le mot Shamaïn est fait de ce même Maïm avec en plus la lettre SHIN que nous étudierons plus tard et qui contient, qui symbolise, la réserve énergétique qui se trouve dans les profondeurs de la Création et dans les profondeurs de chacun de nous, réunissant le monde des archétypes et le monde de la manifestation en nous. La lettre SHIN est la charnière du monde d’en haut et du monde d’en bas. Nous avons donc en nous aussi bien le MI que le MA, le Maïm tout entier. Nous sommes constitués d’un germe du monde divin et de cette réalité manifestée, l’un étant gros de l’autre. Voyez le mot Elohim, il contient le Mi et le mot Adam qui contient le Ma. Or IM c’est le MI retourné, c’est Elohim, l’Homme d’en haut, et le MA retourné, AM, c’est ce que les Hébreux appellent l’Homme d’en bas, Adam. C’est cet Adam qui est en nous tous, c’est l’humanité toute entière, cet Adam gros du Divin, du Yod, qu’il doit mettre au monde.
Le tracé du Yin et du Yang du Tao en est une illustration parfaite. Et c’est dans ce sens que chacun des éléments de la manifestation n’a d’être, de couleur, de sens, de forme, d’énergie, qu’en tant qu’il est relié par ce cordon ombilical qu’il porte en lui à partir du germe qu’il est, à son archétype, lequel va lui permettre de le rejoindre. Tout le sens de notre histoire, à partir de notre naissance jusqu’à notre mort, c’est le retour du MA que nous sommes, au MI que nous sommes aussi dans la profondeur de notre être. Pour réaliser cela il va falloir passer par des portes successives, par le Daleth qui est à la fois la porte et la lettre qui correspond au nombre 4, en harmonie avec le 40. Il n’y a de porte que s’il y a matrice, on ne pourra passer de porte que si on a acquis les énergies nécessaires pour la franchir, sans quoi le courant énergétique que nous allons rencontrer de l’autre côté de la porte, si nous ne le sommes pas devenus, si nous n’avons pas les structures nécessaires pour l’appréhender, nous tuera. C’est le rôle qu’assument tous ces Gardiens du Seuil. Dans le mot Adam le Daleth est au milieu entre Aleph et Mem final. Aleph donne l’énergie à la matrice pour que l’homme soit en mesure de passer la porte, et si on enlève le Daleth d’Adam, il reste le mot EM qui veut dire « la mère ». Non pas que l’Adam que nous sommes soit essentiellement féminin, nous sommes tous masculin et féminin, mais sa fonction principale, celle qui est inscrite dans son être et qui constitue et son être et son devenir, c’est sa fonction d’engendrement de lui-même en lui-même, pour passer par les portes successives et pour atteindre à cette croissance à laquelle il est appelé au départ quand Dieu lui dit : « Croissez et multipliez ». Ce sont ces portes par lesquelles il doit passer. Toute notre vie va consister à entrer dans des matrices, en commençant par la première porte que passera l’enfant dans le ventre de sa mère. Puis ce sera celle du foyer de ses parents duquel l’enfant va sortir pour constituer sa propre matrice familière à l’intérieur de laquelle il aura à faire tous ses engendrements intérieurs. L’homme doit prendre conscience de la nécessité de ces enfantements intérieurs et ce ne sera que lorsqu’il acceptera les paliers successifs par lesquels il a à passer, qu’il deviendra vraiment homme. Entrer dans ces matrices successives, c’est entrer dans des matrices d’épreuves, douloureuses ou non, selon que nous ayons pénétré dans des plans de conscience qui nous feront comprendre ce qui se passe. Et même si l’expérience devait être difficile et douloureuse, petit à petit nous accéderons à de nouvelles terres symboliquement, nous entrerons dans une intelligence plus vécue, plus profonde des événements. Nous ne donnerons plus le même poids à nos épreuves, parce que quelque part, en nous, quelqu’un sait ce qui se passe. Ces matrices vont donc être liées à la qualité de notre espace-temps intérieur.
Lorsque la lettre MEM est venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, Celui-ci l’avait renvoyée parce qu’elle préside au mot Melek, le Roi, et qu’il ne fallait surtout pas qu’elle quitte sa place, car elle assumait là une des plus hautes fonctions. En effet, qu’est-ce que le Roi ? C’est atteindre cette royauté que nous sommes, car nous sommes tous des rois dans la profondeur de notre être, la seule royauté juste étant la royauté intérieure. Nous avons actuellement à de rares exceptions près, abattu les rois extérieurs, sans pour autant avoir été capables de chercher le roi intérieur. Nous n’avons plus de structures extérieures et pas encore de structures intérieures. Il est plus que temps que nous mettions au monde ce roi intérieur pour atteindre notre royauté. A ce moment alors nous toucherons la vraie Réalité (Réel = Roi), nous l’expérimenterons et nous la vivrons totalement. En ce moment nous vivons une petite réalité qui n’a rien à voir avec la vraie. Si nous mettons à l’intérieur du mot Maïm la lettre Reich, nous obtenons le nom de Myriam, Marie pour nous, nom d’une très grande beauté parce que formé par le mot Maïm. Myriam est celle qui fait en son nom la jonction du MI et des épousailles du Roi. C’est dans ce sens là que la Vierge est essentiellement mère, ce qui nous aide à comprendre l’apparente opposition de la virginité et de la maternité, notion qui n’a rien d’intellectuel et qu’on ne peut approcher qu’à travers cette réalité là. C’est la Vierge d’Israël, celle qui attend l’époux, le Roi, et qui va pouvoir mettre au monde le Yod. Les épousailles archétypales sont des épousailles du père et de la fille. Epouser le père, c’est épouser la source. Ce n’est que lorsque l’humanité, chacun de nous, hommes ou femmes, aura mis au monde le Yod, qu’elle pourra épouser le père. A ce niveau archétypal l’enfantement précède le mariage. Le nom Adam contient tout une alchimie, puisque ED que nous avons vu avec le Aleph et le Daleth au début de la Genèse, représente la vapeur, l’eau. C’est l’énergie. Et avec le mot DEM, nous avons le sang qui, lui, avec des maternités successives se transforme en esprit, en porteur d’esprit, l’homme doit devenir cet esprit, ce porteur de lumière. C’est l’A profilé dans le nom d’Adam. Prenons à présent le mot DAMAH, la ressemblance. L’homme est créé à la ressemblance et à l’image de Dieu. Le MEM est au milieu de ce mot, il en est le cœur. Or par ces engendrements successifs l’enfant à sa naissance ressemble à son père et à sa mère par la loi même du sang. Mais ce qui nous intéresse, ce n’est pas cette ressemblance, mais celle avec son père et sa mère archétypales. L’homme créé à l’image et à la ressemblance a toutes les énergies nécessaires pour y atteindre, c’est-à-dire pour entrer dans les épousailles intérieures. Et c’est cette loi du sang qui préside au départ, qui est porteur de l’esprit. Ce sang va permettre à l’homme de passer de la famille à la famille de l’esprit, chacune de ces familles ayant un temps différent. Et quand la famille par la chair n’est plus très synchronique, l’être cherche sa famille par l’esprit. Et il va passer par des matrices successives jusqu’à atteindre la ressemblance parfaite.
Au moment où Elie monte sur la montagne — Elie est un des hommes les plus proches de son devenir Yod-Hé-Vov-Hé — il cherche à écouter la voix divine. C’est très important, car celui qui entend, qui écoute, parle. Celui qui entend le Divin devient parole divine, devient Verbe. Et quand Elie monte sur le Mont Horeb il y a d’abord un tremblement de terre. La voix de Dieu n’était pas dans le tremblement de terre. Il y eut alors un grand vent. La voix de Dieu n’était pas dans le grand vent. Puis il y eut des éclairs, l’orage. La voix de Dieu n’était pas dans l’orage. Et enfin, il y eut un « silence parlant » et c’est dans ce silence que Elie entendit la voix de Dieu. Et là il atteignit la ressemblance. Cette immense évolution du prophète Elie se retrouve d’ailleurs très mystérieusement dans la personne de St Jean le Baptiste. Le Christ dit de lui : « Il es cet Elie qui devait venir ». Il est le précurseur, comme l’est Elihu dans le Livre de Job, comme encore dans d’autres passages de la Bible qui sont d’une beauté extraordinaire. Et quand on ne décèle pas cela avec les lettres hébraïques et les nombres, on passe à côté. Ce « silence parlant » est encore la contradiction, car nous sommes là dans une autre dimension, celle du dépassement de la contradiction. Revenons au mot Guimel qui s’écrit Guimel-Mem-Lamed. Le Mem est au milieu. Le chameau (Guimel) va passer par des portes successives dont la dernière est le trou de l’aiguille de l’Evangile, quand le Christ dit : « Il est plus difficile à un riche d’entrer dans le Royaume des Cieux qu’à un chameau de passer par le trou d’une aiguille ». Ce « trou de l’aiguille », est la lettre Tav, la dernière porte avant d’entrer dans le Royaume des Cieux. Le chameau, celui qui traverse le désert, va nous faire passer de matrice en matrice et Lamed signifiant libérateur, le chameau sera celui qui nous libère en nous faisant passer ces portes successives. En même temps Guimel, avec ses deux lettres Mem et Lamed, forme le mot MOUL qui signifie circoncision. Il n’y a pas de plénitude sans circoncision, car entrer dans la matrice, c’est se circoncire, c’est accepter ses limites. Nous reverrons cela avec le nom de Joseph, Youseph. Le verbe Yaphet veut dire augmenter, alors que Soph signifie limite. On ne peut augmenter qu’en entrant dans ses limites. Le Divin se fait limite, Il entre dans la prison du temps et de l’espace pour nous libérer et plus tard Joseph d’Arimathie veillera sur les limites du tombeau. Ne pas vouloir se limiter, c’est ne pas accepter l’engagement qui, par l’ascèse qu’il préconise, produit une maturation un enrichissement, une nourriture. Il y a naissance. Avec le mot DAG nous sommes devant les deux lettres Mem et Lamed, 40 et 30, qui sont les homologues de Daleth, 4, et de Guimel, 3. Dag veut dire le poisson, le germe qui est la toute possibilité. En retourné, c’est le mot Gad, le toit de la maison, le fini, le contrepoint du germe. Le germe peut être comparé à la pierre de fondation qui contient la maison toute entière et qui veut aussi dire « bonheur ». C’est probablement la racine du mot latin « gobis » je me réjouis. Il
n’y a de joie que s’il y a aussi finition de la maison et il n’y a finition de la maison que s’il y a, a priori la circoncision. De même que le 3, la vie, et le 4, les structures, ne doivent jamais se séparer, le 30 et le 40 ont toujours besoin l’un de l’autre. D’ailleurs ils ne se séparent pas puisqu’ils forment le mot Malek. Malo, avec le Aleph final, veut dire « remplir ». Les deux premières lettres rendent compte de la circoncision, la dernière, le Aleph final, du couronnement, du mariage. Si on veut remplir, il faut passer par la circoncision. C’est le mot qui est employé dans la Genèse lorsque Dieu dit à l’homme non pas « Croissez et multipliez », la traduction est mauvaise, mais « croissez, multipliez-vous et remplissez la terre ». C’est le mot Malo, c’est croître, se multiplier dans tous les dons divins dont nous sommes faits, ce craquement de la grenade rouge d’où jaillit l’eau. C’est la plénitude de la connaissance. Il est aussi intéressant de rappeler le mot « Maboul » qui veut dire « déluge », toutes ces énergies qui ne sont plus en rapport avec leurs archétypes et qui n’obéissent pas aux lois principielles. C’est la loi de la jungle. Nous sommes actuellement dans un déluge. C’est à nous de choisir si nous voulons nous laisser engloutir par les eaux ou si nous voulons construire notre arche. Et pour ce faire il faut passer par des tailles, Mem, Lamed, pour donner des fruits. Le mot BOUL, c’est la taille de l’arbre. Dieu dit : « Je ne laisserai pas mon esprit à ne rien faire indéfiniment dans ce monde, je vais commencer à travailler ce monde ». C’est le commencement du grand barattage. Les traducteurs disent : « C’est la fin de toute chair », alors qu’au contraire, c’est « l’accomplissement de toute chair approche ». Cela n’a rien à voir ni avec une fin, ni avec des malédictions. Alors choisissez, ayez confiance. Ou vous faites toutes ces épousailles avec vousmême pour entrer dans cette dimension du Divin que vous êtes appelés à devenir, ou bien vous vous laissez engloutir. En réponse à une question : Il n’y a pas contradiction entre la nécessité d’entrer dans des matrices dans lesquelles il faut rester et le danger que représente l’installation. La notion du temps s’introduit là. Il n’y a pas d’espace sans temps, c’est la même réalité. A chaque niveau de conscience correspond un temps et à chaque niveau de conscience correspond aussi un arrêt qui va permettre d’acquérir les structures du plan de conscience suivant que nous allons avoir à atteindre en passant une porte. Mais la durée de ce temps qui va présider à cette gestation est limitée et tributaire de la qualité du plan de conscience que nous sommes en train de vivre. Il y a un moment où la naissance doit se faire. Le danger de ne pas vivre sa naissance est celui de s’installer. Sur le plan biologique l’enfant, si nous admettons qu’il ait une conscience et qu’il refuse de naître, trouvera la mort. Il est très important qu’il naisse au bout de neuf mois. S’il naît trop tôt il ne sera pas viable. C’est la même chose pour la période d’installation dans le foyer des parents. Il est nécessaire d’y séjourner un certain temps pour que les parents soient là pour aider
leur enfant à passer son adolescence si difficile, et pour l’accompagner pendant cette gestation. Après quoi il devra en sortir pour passer aux gestations intérieures auxquelles va présider cette même loi. On va faire des expériences d’une qualité extraordinaire et on n’aura nullement envie d’en sortir. C’est une tentation terrible. Le temps est la loi la plus fondamentale qui soit. François : La limite elle-même forme un espace. A. de Souzenelle : Donc un temps. On retrouve cela dans beaucoup de mythes. Il faut dix années avant que Thésée aille affronter le Minotaure. Cela représente également une porte à passer. Il en est de même pour le séjour de Noé dans l’Arche. Lorsque la colombe qui indique le temps ne revient pas, Noé sait qu’il doit quitter l’Arche. S’il n’en sort pas, il meurt. Ce n’est que lorsqu’on a obéi à tous ces espace-temps, qu’on dépasse le temps. Et le psalmiste chante alors : « Il n’y aura plus ni jours, ni nuits (symboles de l’espace-temps), car Yod-Hé-Vov-Hé, aura rejoint la lumière à toujours ». L’homme, devenu Yod-Hé-Vov-Hé, aura rejoint les archétypes, il aura complètement dépassé la dualité espace-temps. Compte rendu de la rencontre du 14.6.1979 Nous nous étions arrêtés au NOUN qui s’écrit avec un petit crochet supplémentaire en bas, qui revient sur la gauche, ce qui le distingue du VAV, et qu’il ne faut pas confondre avec le BEITH dont les deux barres horizontales sont beaucoup plus prononcées. Le Noun est l’initiale du mot NOUN qui s’écrit avec un Vav au milieu, servant de voyelle pour exprimer le ou, puis avec le Noun final qui s’écrit comme un Vav prolongé. L’hiéroglyphe primitif est un petit poisson qui se stylise beaucoup et devient un petit ver qui est à l’origine du NU grec et de notre N. Il est alors beaucoup plus le mouvement du poisson que le poisson lui-même. Cette lettre a pour nombre 50, symbole d’une totalité. Le poisson est en effet le germe. Dans le ventre de sa mère l’enfant est encore au stade poisson, mais il contient l’homme tout entier. 50 est un nombre que nous connaissons bien, la Pentecôte n’est autre que la pesta qui se situe cinquante jours après Pâques, c’est la totalité de l’Œuvre alchimique, c’est la descente de l’Esprit-Saint, c’est la puissance du Verbe. Les Apôtres parlent une langue que tous comprennent, la langue mère originelle qui est créatrice. La Pentecôte juive, le Schabouoth, comprend sept semaines, donc 49 jours. Cette fête juive date de la plus haute antiquité, elle aussi est très importante. On retrouve les 52 jours dans le mythe grec des Argonautes partant à la conquête de la Toison d’Or, de leur totalité définitive. 50 + 2 est un nombre, nombre qui se retrouve dans tous les jeux
de cartes. Il nous indique encore la Vérité. D’ailleurs, le mot KAL avec le KAPH et le LAMED a pour valeur respective 30 + 20 = 50. Il veut dire « tout ». Avec le mot « MI » nous avons aussi le 40 + 10, le monde des eaux d’en haut, dont tout procède. C’est l’unité totale qui va s’exprimer dans le MA, les eaux d’en bas, pour l’enrichir en vue d’un retour à l’unité totale. Il est très mystérieux de constater que ce monde divin, totalement riche, va encore s’enrichir. Nous ne pouvons méditer le monde divin qu’à travers cette antinomie qui est mouvement et non-mouvement. Si nous nous arrêtons à un de ces deux pôles, nous le nions, car s’il est mouvement, il est imparfait et s’il est non-mouvement, c’est la mort. Ce sont les deux pôles d’une même réalité. Ce germe, ce poisson, est aussi le symbole du Christ par lequel le représentaient les premiers Chrétiens. Le Christ ouvre aussi l’ère des Poissons. Une question : Y a-t-il un ou deux poissons ? A. de Souzenelle : Cette conception est parfaitement hérétique par rapport à la théologie chrétienne. Elle est chère à Steiner qui voit dans le baptême du Christ la disparition d’un premier poisson qui serait sa nature humaine. Il ne serait devenu Fils de Dieu qu’après son baptême. En astrologie, il y a deux poissons avec le retournement des énergies. C’est une totalité, le dernier signe du zodiaque, celui qui les récapitule tous. Il forme une unité qui va repartir dans un cycle plus grand. Nous nous étions arrêtés l’autre jour au mot NAGOD qui est l’illustration la plus belle de l’idée du poisson. La racine Nagod veut dire « communiquer » et aussi « face à face ». Nous la retrouvons dans le face à face d’Adam et de celle qu’on appelle « ISHA », la femme, au moment où Dieu la lui présente, car il ne s’agit pas du tout de la création de la femme par rapport à l’homme. Adam — et nous le sommes tous — est féminin et masculin à la fois. Cette prise de conscience du féminin en lui sera la prise de conscience de tout son monde intérieur qui n’est pas encore épousé. De même que dans la Genèse chaque jour est mis à la lumière, à la lumière lourde de la ténèbre dont elle procède et qu’elle porte en elle ; chaque jour de la création va être la mise à la lumière de telle ou telle ténèbre et va être lourde de tous les jours précédents qui rentrent dans les ténèbres. De même aussi Adam, au sixième jour, avec les animaux, c’est-à-dire avec ses énergies immédiates, est lourd des jours précédents qu’il porte en ses structures profondes. Et Isha est une perspective de profondeur de son être qu’il va conquérir. Isha est celle qui pourra communiquer avec lui. C’est à ce moment que dans la Genèse le mot Nogod est prononcé.
Si vous coupez ce mot en deux, deux mots sont face à face, d’une part le Noun, le poisson et d’autre part le Gad qui est aussi le poisson. Nous ne pouvons donc communiquer vraiment avec nous-même que de poisson à poisson, de germe à germe, dans les profondeurs de notre être. Ainsi que nous l’avons déjà vu, Gad retourné donne Dag, le bonheur. Gad est aussi le juste rapport du 4 et du 3 (Guimel et Daleth), dont la somme est 7 et la multiplication 12, deux nombres très importants. Nous trouvons tout ce symbolisme dans le voyage de Job dans les ténèbres où il va rencontrer le « crocodile » qui est le Léviathan, et dans le mythe de Tobie et de sa rencontre avec le Dag Hagadol, le grand poisson. Pouvoir communiquer de poisson à poisson, c’est communiquer avec les profondeurs de son être et avec des personnes du même niveau de conscience. Le drame actuel de l’humanité c’est qu’elle n’a plus la communication avec elle-même et ne l’ayant plus, elle ne l’a plus avec les autres. Découvrir cette communication profonde, c’est à la limite, communiquer avec le Divin. Tous ces hommes qui ont fait l’expérience des grandes profondeurs, sont très proches du Noun : Noé qui n’est autre que Noha, c’est-à-dire le Noun et le Heith. Dans le mythe du Déluge la terre a été submergée. Il y a peut-être eu un cataclysme extérieur, nos énergies dont nous sommes tellement inconscients ayant eu pouvoir sur nous et nous ayant submergés. Au sixième jour Adam est identifié à toutes ces énergies que représentent les animaux. C’est-àdire qu’il est sur le même plan de conscience qu’eux. Pour les dominer, les contrôler, il est obligé de se dissocier d’eux et de les nommer. Ce sera là son premier champ de conscience. A partir de ce moment-là il a déjà vaincu, épousé le premier jour. Et puis, après cela, il est mis à l’épreuve du fameux serpent qui vient le tester pour voir s’il peut aller plus loin. Et c’est le drame de la chute, il est renvoyé au sixième jour, avant qu’il n’ait nommé ses énergies. Identifiés à nos énergies, n’en ayant pas conscience, elles ont pouvoir sur nous et c’est le déluge. Si nous voulons recommencer l’opération divine ratée par l’homme à la suite du drame de la chute, nous avons pour tout premier travail à faire venir devant nous ces animaux du sixième jour et de les nommer, de les intégrer. C’est là où nous retournons les énergies. Voilà ce que signifie Noha. Il va affronter toutes les barrières, il va mourir à un état de conscience pour ressusciter à un autre. Retourné, le nom de Noha c’est Hen, la grâce, la miséricorde divine, celui qui console, qui conduit. C’est aussi le nom de Anne, aussi masculin que féminin. Ce sont des femmes qui ont trouvé grâce devant Dieu.
A la naissance de Noé son père prophétise : « C’est celui qui me consolera de tous les maux de la terre ! ». Consoler, c’est le mot « NAHOM ». La consolation c’est le nom de Noé, le nom qui donne l’énergie, la vocation, il est celui qui va conduire l’humanité vers de nouvelles prises de conscience. Et le mot conduire, c’est NAHO, le guide que sera Noé, qui, lorsqu’il sortira de l’Arche, redevient cet Adam d’avant la chute. Un autre personnage important de la Bible, c’est Jonas qui s’écrit Yod, Vav, Noun, Heith. Il entre pendant trois jours et trois nuits dans le ventre du poisson : Dag Hagadol. Il est d’ailleurs comparé au Christ qui reste trois jours et trois nuits dans le ventre du tombeau pour cette immense mutation du corps de chair ressuscitant au corps glorieux. Le nom de Jonas est d’autant plus intéressant qu’il est le nom de Yod-Hé-Vov-Hé dont le deuxième Hé est remplacé par Noun. Jonas veut aussi dire « la colombe » qui est une expérience de lumière. Un des Hé du Tétragramme n’est pas encore complètement accompli et c’est pourquoi il doit faire l’expérience des ténèbres dans le ventre du poisson. Il se refait germe, petit enfant. Si je me souviens bien, Job est le fils de Noun, il a lui aussi dans sa vocation de vivre cette dimension du poisson. Fils de poissons, c’est le poisson lui-même qui doit accomplir un niveau plus haut encore. Le mot Jourdain en hébreu c’est YARDEN. C’est le fleuve qui est véritablement nord-sud. C’est dans le Jourdain que Jean-Baptiste baptisait, que le Christ a été baptisé et les Evangiles disent que le Christ est descendu dans le Jourdain. Et ceci est écrit dans le nom Yared qui signifie descendre. Le Christ descend dans la situation du poisson, il se fait poisson. Nous ne pouvons pas monter dans les hauteurs si nous ne descendons pas dans les profondeurs. La tradition juive dit qu’il y a sept cieux en haut et sept enfers en bas. Ce sont les deux pôles d’une même réalité qui sont les sept jours de la Création. Nous ne pouvons dominer sur, qu’en descendant dans… C’est une réalité que nous allons trouver sous une autre forme avec le nom de Michel. La racine MACHOL en hébreu veut dire : se faire semblable à… C’est un autre aspect de la même réalité. C’est aussi rentrer dans… pénétrer, pour dominer. On ne domine pas en se heurtant. Dans les jeux martiaux des Orientaux, on ne va pas contre l’autre, mais on va prévoir le geste de l’autre pour pouvoir le déséquilibrer ; entrer dans son geste. Il en est de même à tous les niveaux. Un autre mot important est « ANI » qui veut dire « moi », « je ». De quoi ce mot est-il fait ? Il a la puissance de l’Aleph, il y a le poisson et il y a la naissance totale qui est le Yod. Le but de l’humanité, c’est d’entrer dans cette puissance que profile le Yod, c’est-à-dire Yod-Hé-Vov-Hé.
C’est la puissance créatrice divine qui descend dans le poisson que nous sommes chacun de nous. C’est le « Soi » en langage moderne, cette dimension essentielle de l’être, sa programmation. C’est ce germe que j’appelle le « son-germe », car nous sommes créés par le Verbe. C’est aussi l’anagramme d’Ayin, la toute première énergie divine énoncée, mais totalement inconnaissable, insaisissable, « le rien » qui est dans la grande ténèbre du premier jour. Notre moi, notre je, procède de ce Rien divin. L’Ayin, dans l’Arbre des Séphiroth est la première Séphirah, tout en haut, la couronne, nommée, mais pas connue. Lorsque la lettre Noun s’approche du Saint-Béni-Soit-Il, elle fit valoir qu’elle était en tête des mots NORAH, crainte et NAVAH, beauté. Et Dieu répond : « Retournes à ta place, car c’est à cause de toi que le SAMEK est retourné à la sienne et appuies-toi sur lui, car il est dit : Yod-HéVov-Hé soutient tous ceux qui chancellent. Chanceler, tomber, c’est le mot NAPHOL. Ceux qui tombent sont les NAPHELIM, les faibles. Naphol est entièrement constitué par la racine PHOL que nous retrouvons en anglais dans « to fall » et en allemand dans « fallen », parce que le Noun est faible, il est encore un petit garçon. Et souvent nous verrons ce Noun disparaître pour l’arrivée de Yod. Le Samek, la lettre qui suit et que le Noun ne doit pas quitter, le soutient. Mais ce soutien doit un jour disparaître pour que le germe — comme il en est aussi pour les enfants et pour leurs parents — devienne lui-même l’arbre qui soutiendra d’autres. Alors dans la Bible les Nophélim sont appelés « les géants ». Ce sont les faibles qui sont devenus forts, parce que ce sont eux qui commencent l’élaboration du mot « poisson ». Le géant, à l’instar de Goliath, est ce faible qui se croit fort. Nous ne pouvons devenir forts que si nous acceptons d’être faibles. Les forts, ce sont le GEBOURIM, ce sont eux qui acceptent d’être faibles pour devenir forts. Les fils de Dieu qui épousent les filles des hommes, c’est la conscience qui s’éveille et qui épouse le féminin de l’humanité. Cela n’a rien à voir avec les héros de l’humanité. Le SAMEK est une lettre un peu coquine, parce qu’elle ressemble au Mem final. Elle a pour valeur 60 et signifie « l’appui ». Elle s’écrit avec un Mem et un Kaph final. Homologue du Vav, 6, que nous avons rapproché du sixième jour, celui de la création de l’homme. Rappelez-vous que le Vav est une conjonction. C’est la colonne vertébrale et, par rapport au cosmos, c’est l’homme en tant qu’il est la colonne vertébrale cosmique qui le lie à l’horizontale et, par rapport au ciel et à la terre, à la verticale. Il est le rapport. Les anciens l’appelaient le « microthéos » et le « macrothéos ». Notre vocation est d’être le juste rapport entre le haut et le bas, entre la droite et la gauche, c’est-à-dire avec chacun de nos problèmes, avec les événements, avec les choses, avec nous-mêmes, pour commencer.
Le Vav est donc cet « et », cette conjonction, il est celui sur lequel s’appuie la Création. Avec le SAMEK (60) nous allons trouver la même chose. Son graphisme le plus primitif est un arbre, comme un petit arbre de Noël avec trois branches horizontales. Puis la base va disparaître et on distingue très bien les trois branches de l’Arbre des Séphiroth. Se stylisant, ce petit arbre va donner le sigma, le Xi grec et notre lettre X. Le 60 nous met devant l’arbre de notre corps. Ceci n’est pas vraiment dit, il est dit qu’il est notre appui, mais c’est l’Arbre des Séphiroth, notre colonne vertébrale dont les branches, encore faibles, deviendront fortes. Quand le Noun est allé trouver le Saint-Béni-Soit-Il, il a reçu l’ordre de ne pas se séparer du Samek, parce que le Noun a besoin d’un appui. Le Nophelim a besoin de s’appuyer sur le 60 qui représente en quelque sorte l’adulte par rapport à l’enfant. C’est le mât du navire par rapport à la voile, la hampe du drapeau par rapport au drapeau, c’est le mot NES. Dans le mot SOUSSE qui, comme en arabe veut dire cheval, nous nous trouvons devant deux Samek et nous avons le nombre 60 + 6 + 60, très proche du 666 qui est le nombre de l’Apocalypse. Vu de cette manière, le cheval représente le nombre de la Bête. « Mais, dit l’Apocalypse, que celui qui a l’intelligence pour comprendre, comprenne ! ». Si 666 est le nombre de la Bête, il est aussi le nombre de l’Homme. Qu’est-ce que cela signifie ? A mon avis cela exprime que le 6, cet « et » ne veut pas aller au 7. Il est la répétition, ce monde ennuyeux qui se répète toujours. C’est la chaîne du Samsara, c’est la banalité quotidienne. Le cheval est l’animal qui est tout entier dans ses jambes et nous pouvons dire qu’il représente la partie de nous jusqu’aux hanches. Il représente toute notre activité, perpétuellement en déplacement, qui va à droite, à gauche et qui comble le vide intérieur par des activités extérieures, pour acquérir. Acquisitions qui vont de la forme la plus grossière, matérielle, jusqu’aux acquisitions plus subtiles, par exemple celle des diplômes. C’est l’humanité qui est menée par son cheval et qui n’a pas encore fait la démarche lui permettant de le monter et ainsi d’entrer dans le 7. Il y a certainement un autre niveau de lecture pour le 666. Nous le verrons avec le MEM final qui a pour valeur 600. Là nous entrerons dans un autre niveau de lecture, dans la notion de l’Homme qui commence à assumer le cavalier. Donc, si nous ne prenons pas les rênes, nous restons dans le monde de la répétition. Le mot SAKOL est aussi extrêmement important. Il veut dire « fou ». SEKEL signifie le « cerveau ». Que veut dire cette racine ? Si nous reprenons le Samek comme étant l’appui vécu dans sa totalité, c’est-à-dire dans la conquête de notre colonne vertébrale, la folie est en réalité l’acquisition de la plus haute sagesse. Il ne s’agit pas du tout de la folie comprise à notre niveau
de conscience. C’est l’homme totalement réalisé, l’homme total qui est un Dieu. Il est certain qu’il paraît fou à l’homme ordinaire, parce qu’il le gêne, il le dérange, parce qu’il n’agit pas comme tout le monde. C’est un homme qui a fait tomber toutes les barrières par rapport aux conventions sociales. Le mot SOD est le « secret ». C’est l’homme qui dans son Arbre va ouvrir toutes les portes successives, qui va entrer dans son secret successif, dans son sacré successif. Et Yesod, une des Séphiroth qui est tout à fait à la base de la colonne vertébrale, et qui en est le fondement, est le secret du Yod. C’est là où le Yod commence à prendre naissance, c’est là que le germe commence à vivre et où nous allons le porter tout le long de notre colonne vertébrale jusqu’au Yod-Hé-Vov-Hé qui est la tête. Le dernier mot que nous allons étudier est HESSED, la grâce et aussi la Grâce divine. Il s’écrit d’un côté avec le Heith qui est la barrière et le Daleth qui est la porte. La Grâce, c’est cette force qui nous est envoyée et qui va nous faire passer par toutes les barrières. HOD, les deux lettres qui cernent le Hessed, c’est la « fine pointe » par laquelle nous pouvons acquérir la Grâce, la fine pointe qui pénètre dans nos vies. HESSED, c’est aussi le secret qui est caché derrière chaque barrière que nous avons à passer. Nous ne savons pas ce qui est de l’autre côté et nous sommes angoissés. De l’autre côté il y a le secret, le sacré, qui est toute la Grâce divine. Compte rendu de la rencontre du 11.10.1979 On a perdu conscience, en Occident, de la lettre en tant qu’énergie, les lettres sont mortes, dévitalisées. Annick de Souzenelle, en donnant un enseignement sur les lettres hébraïques, a l’impression de contribuer à la revitalisation de la langue et à redonner leur force aux lettres qui sont des énergies vivantes. Quand nous parlons nous émettons des énergies dont les forces sont non seulement reçues par d’autres, mais qui sont des forces cosmiques créatrices en nous et dans le monde. Quoique les Hébreux aient oublié cette tradition, ce qui est le cas un peu partout, il nous est possible de communiquer avec elle en entrant dans le cœur de leur langue et de leurs lettres. NAGOD signifie communiquer. Ce mot est composé de Noun et de Dag. Or Dag retourné donne Gad, le poisson. Nous sommes donc là en présence de deux poissons. La vraie communication se fait de poisson à poisson, dans le silence et dans les profondeurs où nous pouvons atteindre l’autre dans sa propre profondeur. Le travail que nous faisons ici, dit Annick de Souzenelle, n’a rien d’un travail intellectuel, même si notre communication passe par des mots, car ces mots sont pleins de vie, ils nous forgent et nous sculptent.
Lorsque Dieu parle sur le Mont Sinaï, il est dit que les Hébreux voyaient la voix divine. C’est-àdire que cette voix divine sculptait l’air comme elle sculptait leur chair. C’est le Verbe divin qui nous crée à chaque instant dans ce son primordial que nous sommes et qui fait vibrer tout notre être psychique et tout notre être spirituel, et qui vibre dans le monde. Et c’est pour cela que nous sommes co-créateurs. Nous continuons à tailler, à ciseler le monde comme le dit le Sepher Yetzirah lorsqu’il parle des lettres qui sont taillées, ciselées, qui sont de véritables objets d’orfèvrerie. Cet objet de beauté vers lequel nous essayons d’aller, c’est toute la description de la Jérusalem céleste chez les judéo-chrétiens. C’est ce joyau que nous avons à élaborer à l’intérieur de nous, cette ville sainte que nous avons à construire et par laquelle nous ferons le monde. Annick de Souzenelle résume ensuite l’enseignement qu’elle nous a donné depuis octobre 1978 sur les Lettres hébraïques et qui sont résumées dans les précédents comptes-rendus. Néanmoins, nous extrayons quelques passages de ce que nous a rappelé notre animatrice afin, pour les nouveaux venus, de donner les noms, valeurs et symboles des lettres déjà étudiées. ALEPH : la tête cornue, les cornes qui sont les antennes par lesquelles nous recevons l’information. Cela explique qu’Aleph est aussi le chef, quel qu’il soit, l’époux, le prince, etc. Bien qu’elle soit la première lettre, on peut dire qu’elle se situe presque en dehors de l’alphabet, car elle est la charnière entre le créé et l’incréé. Elle est l’alpha et l’oméga. Sa valeur est l’unité, c’est-à-dire qu’on peut la comparer à un point qu’on est obligé de poser sans pouvoir le démontrer. BEITH : valeur 2. Elle est en somme la première lettre de l’alphabet. C’est la maison, la réceptivité, c’est chacun de nous, c’est toute la création. Beith, par son altérité, nous indique que la Création est fondée sur le nombre 2. Nous sommes structurés dans la dualité qui n’a qu’un seul but : recouvrir l’unité d’Aleph. GUIMEL : valeur 3. C’est le chameau. On peut dire que la distance qu’il y a entre Beith et Aleph est un désert. Nous sommes dans des jardins qui sont des déserts. Que sont ces jardins ? Ce sont tous les moments délicieux que nous vivons dans nos rapports humains. Mais ils sont artificiels par rapport au jardin dont ils sont le reflet, ils sont déserts. Pour ne pas être stoppés dans notre évolution, ils devront représenter des marchepieds que nous aurons à quitter afin de monter vers l’ultime jardin. Ce chameau va nous révéler la force que nous avons en nous pour appréhender cette marche, parce qu’il est tout à fait capable de traverser le désert sans aller chercher de l’eau à l’extérieur. Il porte son eau en lui. DALETH : valeur 4, la Porte. C’est la limite, c’est l’épreuve, mais aussi l’invitation à passer cette porte, c’est-à-dire à passer d’un plan de conscience à un autre plan de conscience. Le Guimel (3) étant le mouvement, le Daleth (4) est la porte construite à l’aide de deux chambranles et qui est structurée. Il y a donc un juste rapport entre le 3 et le 4, le mouvement et la structure, l’un ne pouvant se passer de l’autre, ils sont inséparables.
HE : valeur 5, le souffle. C’est le souffle créateur, c’est la vie, c’est aussi le germe. Chaque être se définit selon la qualité de son souffle et du souffle qu’il reçoit. Il lui donne sa spécificité. VAV : valeur 6, le crochet. C’est ce qui relie. Quand le Vav est seul, il est la conjonction « et ». Si Dieu créa l’homme le sixième jour, celui-ci arrivant à la fin de la Création, la récapitule en quelque sorte et représente la conjonction entre le créé et l’incréé. Il est la colonne vertébrale cosmique du monde. A partir de maintenant l’homme est appelé à passer au 7, 8 et 9 pour mettre au monde le Yod qui est le 10. ZAIN : valeur 7, c’est une arme. Le 7 est un achèvement, puisque Dieu contempla son Œuvre le septième jour. Mais qui dit perfection, dit mort, car la perfection est l’immobilité. Elle demande à être rompue pour pouvoir passer à un autre plan, à une perfection supérieure, si l’on peut dire. Le Zain est la flèche qui traverse la tunique de peau pour amener l’homme à recouvrer enfin sa nature première. HEITH : valeur 8, la barrière. Ce sera encore une épreuve. Sortant d’un champ magnétique, énergétique, l’homme va se trouver devant un autre champ. Aura-t-il acquis les structures lui permettant de l’appréhender? Ce nouveau « gardien du seuil » va l’obliger à chercher en lui les énergies nécessaires qui lui permettront de franchir cette barrière. TEITH : valeur 9. C’est un nouvel achèvement, celui du Zain ayant été provisoire. Le Teith indique que tous les échelons de l’échelle de Jacob ont été montés. La fiancée a revêtu sa robe, elle est prête à recevoir l’époux. Teith est le bouclier qui prolonge l’épée, l’épée qui est le Yod, les Chérubins qui gardent l’entrée du Jardin d’Eden avec leur épée flamboyante. L’homme doit rentrer dans cet Eden, il doit se mesurer avec cette épée et devenir le Yod-Hé-Vov-Hé que nous vivons avec le nombre 10, c’est-à-dire avec le retour à l’unité qui est YOD, valeur 10. CAPH : valeur 20 fait écho au Beith (2) étant aussi un contenant. La lettre Caph est comme un chakra, c’est un contenant d’énergie qui va peu à peu s’ouvrir. LAMED : valeur 30, l’aiguillon. C’est l’instrument avec lequel le bouvier divin va conduire l’animal cornu que nous sommes, l’animal autant qu’il ait ses antennes dressées vers le Ciel dont il reçoit l’information. Non pas une information venue de l’extérieur, mais une information venant de l’intérieur. MEM : valeur 40, la matrice qui est en même temps un arrêt, une porte, les eaux matricielles (Maim). Ce sont des eaux d’où l’homme doit sortir pour renaître comme Noé, afin d’entrer dans de nouvelles matrices successives. NOUN : valeur 50, c’est le Poisson, le germe qui contient toute la promesse de son développement. Dans les quelques chromosomes réunis dans le ventre de la mère, il y a déjà
l’homme tout entier. Le 50 implique une totalité. Mais le Noun étant un germe est très fragile et a besoin d’un appui, d’un soutien et ce sera le SAMEK, valeur 60, qui sera le soutien, de même que le Vav, valeur 6, représente la colonne vertébrale. Il est le soutien qui permet d’aller jusqu’à l’Aleph final. Il est aussi le mât du navire, la hampe du drapeau. Compte rendu de la rencontre du 8.11.1979 Nous abordons aujourd’hui, dit Annick de Souzenelle, la lettre AYIN qui a pour valeur 70. Mais avant de vous en parler, je veux rapidement rappeler la lettre qui lui correspond sur le plan des unités, le Zain qui a pour valeur 7 et qui est cette lettre qui a pour forme graphique un éclair, finalement un sabre. Comme je vous l’ai dit, le 7 est toujours lié à une perfection à atteindre et donc à une rupture nécessaire pour que la vie puisse continuer et pour que l’on puisse passer à un autre cycle, à un autre état. Le 7 en hébreu est Sheva qui signifie « rassasié ». Il ressemble au nom du dieu hindou Shiva qui détruit pour reconstruire avec les mêmes matériaux, qui détruit avec son seul regard tout ce qui ne ressortit pas de l’éternité. La même idée fondamentale se retrouve avec le nombre 70, mais cette fois-ci vécue, expérimentée dans le corps de l’homme qui est toujours concerné dans le plan des dizaines. Nous avons vu le Yod qui est la main, qui est la main du potier : « Nous sommes l’argile et tu es le potier. Nous sommes l’ouvrage de Tes mains… » (Isaïe LXIV, 8), le Caph qui est le creux de la main, le Lamed qui est un peu différent, le Noun le germe dans la matrice et le Samek, l’arbre, c’est-à-dire la colonne vertébrale. AYIN veut dire l’œil ou encore la source. Il y a toujours un lien entre deux significations d’un même mot, une même énergie. La valeur commune entre l’œil et la source se trouve dans leur jonction profonde, non pas dans le regard qui voit ce que nous voyons dans l’immédiat, mais celui qui va à la source, qui voit au fond de l’âme, qui va chercher toute cette fameuse réserve d’énergie qui est là en attente. Et allant à sa propre source, l’œil va à celle de l’autre, car nous sommes Un dans la profondeur. Dans les hiéroglyphes égyptiens, le Ayin est représenté par un œil avec une pupille au milieu. Très vite stylisée elle donne un cercle, le O, ainsi que le zéro. Qu’est-ce que le zéro, le mystère du Zéro introduit par les Arabes ? C’est l’abîme de la source ou la source des abîmes, que nous retrouvons dans le Livre de Job. C’est l’œil des grandes profondeurs, l’ultime matrice de mort et de résurrection. Ayin s’écrit avec un Zain, valeur 7, un Yod, valeur 10 et le Noun final, valeur 700. Le Yod est donc saisi entre deux 7. C’est le Yod-Hé-Vov-Hé qui se profile, c’est toute cette potentialité divine que chacun de nous porte en lui et qui est saisie entre deux lettres qui sont très
inconfortables. Car chaque fois que nous voyons apparaître le 7, nous sommes à une plénitude, mais aussi à l’incertitude d’un nouveau plan à aborder, lequel, riche des plans précédents, doit marquer une progression nouvelle. Ayin est un mot qui contient un dynamisme qui ne permet pas de repos, c’est l’œil impitoyable qui perce toutes les profondeurs. De même que la flèche du Zain transperce la tunique de peau, de même l’œil traverse tous les champs de conscience, nous obligeant à voir le monstre que nous sommes quelque part dans les profondeurs. Ce regard, tel celui de Shiva, perce tous les jours de la Création dont nous sommes tissés et toutes les tuniques successives dont nous avons été recouverts, jusqu’à plonger au-delà du premier jour qui est le grand Abîme, la grande ténèbre. C’est terriblement angoissant tant que nous n’avons pas acquis les structures nécessaires et c’est pourquoi il ne faut pas aller trop vite. Il y a une dialectique entre le Ayin et le Aleph, la toute première lettre qui a pour valeur 1. C’est le tout premier jour et c’est pourquoi chaque réalité qui va suivre une descente, va être un nouvel Aleph. La dernière fois nous avons vu la lettre Heith qui a pour valeur 8 et qui est la barrière, et le 9 qui est une autre barrière précédant le 10, l’unité, le nouveau champ absolu de conscience vers lequel va l’homme. Ici nous allons vivre le 80, non pas comme une barrière, mais comme une résurrection. En fait, c’est un nouvel 1. Nous allons maintenant trouver des clefs dans les mots où les deux lettres Ayin et Aleph vont jouer. AV qui s’écrit avec un Aleph et un Beith veut dire « père ». Aleph pose la création et Beith établit la relation entre père et fille. Si nous remplaçons Aleph par Ayin, la prononciation sera la même, sauf que Ayin est une gutturale, mais la signification sera « le nuage ». Le nuage est ce qui nous sépare du Divin. Av écrit avec un Ayin, ce sont tous les champs de conscience qui nous séparent du Père. Ayin doit devenir Aleph. Le mot RA est très important : Reich qui a pour valeur 200 et Ayin. C’est le mot qu’on traduit par « le mal » dans l’Arbre de la Connaissance dit du Bien et du Mal et qui, en réalité, est l’Arbre de ce qui est lumière et de ce qui ne l’est pas encore. Cela correspond dans notre optique à ce qui est conscient et à ce qui est encore inconscient, et que nous ne pouvons pas appréhender, étant encore dans les profondeurs. Ra, c’est tout ce qui est en réserve en chacun de nous, dans l’autre et dans chaque élément de la création. C’est la réalité qui nous est encore cachée.
De même que le médecin devant son écran de radioscopie ne voit qu’un squelette, de même nous ne voyons que le squelette du monde. Et toute l’œuvre d’Ayin consiste à enlever les écrans qui nous séparent de l’ultime vision qui est Av, le Père. Si nous ne nous préoccupons pas de Ra, cette réserve qui est symboliquement le féminin en chacun de nous, comme une femme délaissée se retourne contre l’homme, nos énergies joueront contre nous et nous détruirons petit à petit jusqu’à notre mort qui, dans le cas contraire, ne représente qu’un endormissement. AOR qui est RA renversé avec, reliant les deux lettres, le Vav qui est la conjonction, le symbole de l’homme, signifie la tunique de peau. Dans la Bible il est dit qu’après que l’homme et la femme eurent mangé le fruit de l’Arbre de la Connaissance„ ils furent recouverts de la tunique de peau. Ils ont mangé le fruit qui était encore dans la réserve et leur drame c’est d’avoir cru qu’ils étaient déjà arrivés au Père. Alors là ils ne peuvent plus aller plus loin et ils sont remis au point de départ, réidentifiés à cette réserve d’énergie du sixième jour et ils sont complètement dans la ténèbre. Cela n’a rien à voir avec une punition, c’est une mesure de protection qui leur permet de retrouver leur fécondité, car leur erreur les avait rendus stériles. Ils sortent de leur illusion, c’est la sortie de l’Eden. Nous aussi nous avons à sortir de notre ténèbre et, telle la plante, faire notre percée au soleil. Le même mot écrit avec Aleph au lieu d’Ayin, c’est la Lumière. C’est la réceptivité à la Lumière d’Aleph, mais aussi la résistance, car il n’y a pas de lumière sans qu’il y ait résistance afin de capter les rayons. De même lorsque je parle, il est nécessaire que quelqu’un m’écoute, sinon je parlerais dans le vide. Ce sont les épreuves qui nous permettent d’accéder à la Lumière. Prenons le mot DAATH, écrit avec le Daleth, l’Ayin et le Tav qui est la dernière lettre de l’alphabet. Daleth est construit exactement comme une porte avec deux chambranles qui sont le 4 et le Lamed, le 3, le mouvement qui est au milieu. Daath est construit exactement de la même manière. C’est le mot qui veut dire « connaissance ». Nous avons les deux 4, mais le Lamed est remplacé par le Ayin. L’idée en est la même, parce que la connaissance ne peut s’acquérir qu’en passant par des portes successives. Le Ayin, ici, a pour tâche de traverser tous les champs de conscience, c’est le devenir de nous-mêmes. De même qu’il y a une dialectique entre le 4, la structure et le 3, la vie et que, si les deux chambranles de la porte se resserraient trop ils étoufferaient la vie et il ne resterait plus que le mot Dath, la loi ; il y a la même chose avec Ayin. La loi est au service de la vie, elle n’est pas là pour la contraindre, mais au contraire, pour lui permettre d’accomplir son devenir. Avec Ayin, la loi est ontologique et doit être connue par celui qui veut travailler à son devenir.
Nous avons le mot HET, le temps. Le temps a été donné à l’homme pour arriver jusqu’au Tav ou à l’oméga, la dernière énergie à intégrer pour que Ayin fasse son œuvre. Le temps est différent pour chaque terre et au fur et à mesure que nous allons vers des terres successives, les temps vont être de plus en plus profonds. Cela n’a pas de sens d’employer les expressions « plus vite » et « moins vite », elles n’ont qu’un sens psychique. Avec la lettre Zain je vous avais parlé du mot EZER que l’on trouve dans la Genèse et qui veut dire « aide ». Quand Dieu fait prendre conscience à l’homme des énergies dont est constituée sa première terre sous la forme des animaux qu’il doit nommer le sixième jour, il ne trouve pas « d’aide » capable de communiquer avec lui. Dieu emmène alors Adam dans un « sommeil profond » qui n’est autre que la descente dans le Ayin, descente à la source où il va rencontrer cette aide, c’est-à-dire son féminin qui est sa réserve d’énergies. L’aide n’est pas quelque chose d’extérieur, c’est nous-mêmes, nous sommes notre propre objet de communication. Car le mot qui a suivi Ezer est Nagod, la communication, c’est la rencontre avec nous-mêmes dans les profondeurs. Nous devons nous faire germe, c’est-à-dire manier le Zain pour redescendre dans Ar ou Ra, notre réserve d’énergies. Ayin c’est encore le « troisième œil », car la communication ne peut être qu’une totale information venant de l’intérieur. Ezer, l’aide, et Zera qui est formé des mêmes lettres, c’est permuter. Zera, c’est la semeuse. Nous retrouvons l’idée du germe. Quand Dieu dit : Faisons une aide semblable à lui… », c’est « allons chercher sa semence ». Ezer veut aussi dire « aider », mais c’est plus qu’aider, c’est apporter la vie grâce à ce travail. ABOD qui s’écrit Ayin, Beith et Daleth veut dire « travailler ». Dans ce mot nous trouvons Av, le nuage et Daleth, la porte. Le travail consiste donc à passer la porte de tous ces écrans pour retrouver le Père. Hed, Ayin, Daleth, le temps nous est donné. Le travail extérieur doit faire écho au travail intérieur. Or, à l’heure actuelle, le travail extérieur est devenu un travail destructeur. Lorsque je vous ai parlé de l’Arbre des Séphiroth, je vous ai dit que la toute première Séphirah tout en haut, au-dessus de Kether, n’est pas révélée. C’est le mot Ayin écrit avec un Aleph, c’est Ain Soph qui est le Rien-Lumière, c’est-à-dire l’infini. Nous avons aussi Ain-Soph-Aor qui est l’infiniment Lumière. Ayin qui, en haut, est le Rien, la source qui vient des hauteurs, est en bas la source qui vient des profondeurs. Elles se rejoignent, elles sont les mêmes. Nous avons aussi le mot AZOB, libérer. Regardons le mot EDEN, Ayin, Daleth et Noun final. Ce n’est pas un lieu confortable. Il est construit avec 70, 700 et puis 4. Autrement dit, c’est une porte, ce n’est pas un lieu où l’homme devait rester, mais où il recevait la Lumière avant qu’il n’en reparte. Or il est passé par la
mauvaise porte, c’est là son drame. Il fallait qu’il en sorte pour faire son travail dans les profondeurs. Avant la chute, ce travail se faisait de façon harmonieuse et sans cette souffrance que nous avons, à lutter contre de continuelles pulsions de mort. « Mieux vaut la mort… » va dire Job. C’est cet état l’Eden, ce lieu qui est saisi entre deux 7 et qui nous propulse continuellement pour aller plus loin. Il n’y a pas de vraie descente qui ne soit suivie de montée. Notre péché, c’est de désespérer quand nous sommes au fond de la fosse. C’est là qu’on n’a jamais été aussi près de la hauteur la plus grande. Lorsque la lettre Ayin est venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, elle s’était recommandée du mot ANAVAH qu’elle commençait : Ayin, Noun, Vav, Hé, et qui veut dire « la modestie », « la douceur ». Mais en fait, ce mot va beaucoup plus loin, parce que c’est le Ayin qui nous force à descendre vers le Noun, à nous refaire poisson. C’est cela la vraie modestie. En même temps nous avons le mot NAVAH, la beauté qu’on ne peut réaliser que dans la forge des profondeurs. Et le Saint-Béni-Soit-Il renvoie la lettre en lui disant : « Mais tu es aussi le commencement du mot AVAH, la destruction, tu ne peux pas présider à la création du monde ». En effet, le Ayin nous oblige à détruire pour reconstruire. Ce mot n’est absolument pas traduisible sans être trahi et c’est pourquoi quand la lettre Teith qui préside au mot Tov, le Bien, était venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, Dieu lui avait dit : « Tu es bon, tu es bien, tu es beau, mais tu n’es rien par rapport au Tav que tu seras dans un monde futur ». Ce monde futur, c’est le monde dans lequel ce Tov aura totalement réintégré le Ra, c’est-à-dire lorsque la Lumière aura entièrement intégré la Ténèbre. Et lorsque le Ayin aura été totalement épuisé dans les profondeurs, il deviendra Aleph, c’est la Lumière. Et à ce moment le Tov éclate et devient un tout autre Tov. Question : Les textes anciens n’ont-ils pas été appropriés par les Hébreux ? Ne proviennent-ils pas d’une tradition plus ancienne transmise à travers Moïse ? Réponse : Je fais toujours référence à la tradition historique de Moïse qui reçoit la Révélation sur le Mont Sinaï. Mais cela ne veut pas dire qu’il n’ai pas charrié des connaissances acquises auprès des Égyptiens. L’Égypte était un creuset fantastique où se retrouvaient toutes les traditions les plus anciennes. Le peuple hébreu est quand même un peuple privilégié dans la mesure où il est celui qui doit mettre au monde le Messie, le Yod. Dans la profondeur nous sommes hébreux. Le grand drame
et le péché du Christianisme, c’est d’avoir refusé le monde hébraïque et c’est pour cela que, pour le moment, il n’est pas chrétien. Il faut entrer dans la matrice pour naître. La connaissance, c’est « naître avec ». Le véritable enseignement n’est pas celui qui nous est donné de l’extérieur, c’est ce que Socrate découvrait avec la maïeutique. Nous portons la connaissance en nous, nous sommes des êtres parfaitement connaissants dans les profondeurs de notre être La lettre Ayin que nous avons étudiée la dernière fois, qui est l’œuf et en même temps la vision des profondeurs, est une des plus belles lettres, parce qu’elle rend bien compte de la loi absolue de la nécessité de descendre dans nos profondeurs si nous voulons atteindre les hauteurs. La vision de la Lumière totale est la dernière acquisition de l’homme. « J’avais entendu parler de Toi, maintenant mon œil Te voit », dit Job. Nous étudions aujourd’hui la lettre PHE qui a pour valeur 80. Elle est l’initiale du mot Phé, si nous ajoutons seulement un Hé elle signifie : bouche. Souvenez-vous de la lettre Heith qui vaut 8 et qui est la barrière. Barrière qui se dresse devant l’homme qui a vécu le nombre 7, la plénitude qu’il est obligé de casser pour progresser, pour entrer dans une nouvelle octave, de nouvelles structures, lui permettant d’appréhender un autre champ énergétique, le Heith, le 8, se présentant comme le Gardien du Seuil de ce nouveau champ qu’il ouvrira à l’homme qui aura su dire le mot de passe. Avec Phénous nous retrouvons un peu cette idée. Là aussi il s’agit d’un organe du corps ainsi qu’il en est fréquemment le cas dans le plan des dizaines. Que signifie la bouche pour les Hébreux ? Elle est tout un ensemble vocal. Nous avons été créés par le Verbe Divin et vivre dans ce Verbe Divin, c’est entrer dans une libération. Le Phé, c’est l’idée du Verbe qui nous est donné par la Tradition, du Verbe que nous sommes en devenir. C’est toute la Tradition que nous apporte le Phé et qui en soi est une barrière. Elle est une barrière parce que notre langue est symboliquement liée à l’Épée. L’homme procréateur par le sexe doit devenir créateur par le Verbe dans la dimension duquel nous avons à entrer. Nous ne faisons encore que balbutier, ignorant que notre Verbe est créateur souvent de vie et de mort. Nous sommes des êtres encore coupés de nous-mêmes, ignorant nos possibilités, notre potentiel qui est immense. L’épée est l’archétype qui va s’exprimer d’une part par le sexe masculin et d’autre part par le Verbe. C’est l’épée à double tranchant qui vivifie ou qui tue selon que l’homme en ait acquis les structures ou non. Le graphisme de cette lettre Phé est au départ une bouche qui, par la suite se stylise et qui donnera un peu la forme du Phé et qui sera à l’origine du Phi grec. La lettre Phé est venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, se réclamant du mot PEDOUT qui veut dire délivrance. Et, en effet le Phé est essentiellement liée à la notion de délivrance, de libération, d’ouverture à la Loi qui est un dépassement lorsque celle-ci a été intégrée. Le Christ a dit : « Je ne suis pas venu pour abolir la Loi, mais pour l’accomplir ». L’accomplir, c’est l’ouvrir aux différents octaves auxquels elle se propose à travers un texte. Les Hébreux disent que la
Thora peut être lue sur soixante-dix plans, symboliquement, naturellement. Cela veut dire qu’elle peut être lue à bien des niveaux de lectures qui correspondent à différents niveaux de conscience. C’est cela l’ouverture de la Loi. Mais pour transgresser un niveau pour en aborder un autre, l’homme a besoin de beaucoup de courage. Car pour ceux qui ne peuvent le suivre dans son évolution il va passer pour un être abominable, incroyant. On va le montrer du doigt. Mais lui, il a reçu cette information intérieure qui va lui permettre d’aller plus loin. Et le Saint-Béni-Soit-Il renvoie la lettre en disant : « Non, tu ne présideras pas à la création du monde, parce que tu commences le mot PESHA, le péché. Ce n’est pas possible qu’une lettre qui commence un tel mot préside à la Création. Le mot PESHA actuellement veut dire « une marche, une progression ». Et lorsque ce pas se fait dans les conditions que nous venons de dire, la progression doit passer par la transgression. Le mythe de la chute est une transgression non juste qui a fait le drame de l’humanité en la remettant à zéro pour qu’elle reprenne le chemin. Lorsqu’elle est juste, c’est aussi le mot PESHA. L’Apôtre Paul l’emploie lorsqu’il parle de la Loi. Quand il n’y a plus de loi, il n’y a plus de transgression. C’est la situation dans laquelle nous sommes actuellement. Nous sommes dans un monde de lois morales, sociales, car nous vivons dans une jungle qu’il faut bien ménager ; mais cette loi est faite pour un monde infantile. Quand on prend conscience de cela, un jour vient où on est bien obligé de transgresser en sachant que c’est juste. Sans cela nous sommes dans le PESHA. C’est l’histoire du Christ lorsqu’il transgresse le jour du Shabbath, quand, passant avec ses disciples le long d’un champ il voit un homme qui y travaille. C’est le jour du Shabbath. Les disciples sont scandalisés. Mais le Christ s’adresse à cet homme en lui disant : « Homme, si tu sais ce que tu fais, tu es béni par mon Père. Mais si tu ne sais pas ce que tu fais, tu es transgresseur de la Loi et tu es maudit de mon Père ! ». Ce texte est tellement immense qu’il a été supprimé des Évangiles ! On ne transgresse pas impunément, voilà en quoi le Phé est aussi une barrière. PAH est un mot qui vaut 88, il veut dire « filet ou le piège ». Avec ces deux 8 nous sommes saisis dans le piège ou alors au contraire, nous passons, nous traversons. Mais nous ne pouvons passer que dans un dépassement des contradictions qui sont en nous. Et quand nous avons au milieu de ce mot le Tav qui veut dire « signe » et précisément « signe de la Croix » dans toutes les traditions, cela donne le mot PATOM qui signifie « ouvrir » et aussi « la porte », nous trouvons le symbole de l’incarnation qui est essentiellement la Croix, puisque nous sommes crucifiés entre le chemin vers le Divin, et toutes les énergies dont nous sommes faits à chaque niveau de réalité. L’homme est au centre de la croix. Et le mot PATOH, ainsi formé et qui signifie « ouvrir » et aussi la « porte », nous ramène au Daleth qui a pour valeur 4 et qui aussi veut dire la « porte ». Le 4 est toujours un arrêt, une porte qui est proposée et qu’il faut ouvrir. Le mot PESSAH qui est la Pâque avec un Samek qui a pour valeur 60, c’est le soutien, c’est l’arbre, c’est la hampe du drapeau, le mât du navire. Nous trouvons dans PESSAH un peu la même idée que dans PETAR qui est « le passage ». L’Égypte pour les Hébreux était un piège. Or
il y a un moment où Moïse se dresse, la personne pensante qui est le pôle d’évolution que nous avons tous en nous à partir du moment où nous cherchons la libération. Nous avons tous un Moïse en nous et aussi un Pharaon qui s’oppose. Mais nous sortons de cette servitude, de ce piège et c’est la Pâque. La pâque chrétienne, c’est la même idée, mais à un autre niveau. Nous passons au mot PÉLÉ, le miracle, la chose merveilleuse qui rend compte de notre vraie nature. Nous pourrions le traduire mot à mot par « la bouche de l’impossible », Lo étant la négation du mot divin retourné. El. C’est l’ouverture au niveau du Divin, le dévoilement des mystères. Mais Lo est aussi la négation « pas ». Dans la profondeur le oui et le non sont la même réalité au niveau de ce nom divin qui est au-delà de toutes les contradictions, au-delà de l’être et du non-être. Ce sont les mêmes lettres, donc les mêmes énergies. Lorsque Dieu se révèle à Moïse dans le Buisson Ardent en tant qu’Il Est, Il se limite, car nous ne pouvons l’appréhender que dans une limite. IL EST et IL N’EST PAS, si bien que ces deux mots El et Lo sont une même réalité. Alors PÉLÉ c’est l’ouverture du Divin, de l’impossible, ouverture du « non », « non ce n’est pas cela, c’est bien au-delà de cela ». Et ce miracle, cette chose merveilleuse, c’est tout simplement l’ouverture à notre vraie nature. Le Phé y préside. PETEROM, c’est Pierre, l’Apôtre, celui qui ouvre la lignée. C’est celui qui a été choisi le tout premier avec son frère André. Il y a autour de ce mot un immense malentendu. Lorsque l’Apôtre Pierre répond à la question du Christ : « Et vous, qui dites-vous que je suis ? » — « Tu es le Christ, fils du Dieu vivant ». Le Christ lui dit : « Ce n’est pas par ton intelligence que tu as répondu cela, mais par une lumière de l’esprit en toi. Tu es pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église. » Les mots sont « Tu es EBEN, pierre ». Tu es Eben, tu es une pierre dure, parce que tu participes à la construction du Royaume et sur cette pierre (qui est encore un autre mot : SELA avec un Samek qui nous fait retrouver « le trône divin ») donc sur cette SELA, c’est-à-dire le fondement : « Tu es EBEN et sur cette SELA je bâtirai mon Église ». Ce n’est qu’en français, autour de l’an 1000 que ce jeu de mot a été fait et qui a eu pour résultat que l’Apôtre Pierre et ses successeurs ont été considérés comme la base de l’Église. Ce fut une des causes en 1054, de la séparation de l’Église d’Orient et de l’Église de Rome. Les Apôtres sont à l’image de la Trinité, comme d’ailleurs aussi l’humanité, où l’un n’est pas plus grand que l’autre, mais égalité absolue entre tous. La lettre TSADE que nous approchons maintenant est l’initiale d’un mot qui s’écrit : TsadéDaleth-Yod. Ce mot rend surtout compte d’une racine TSAD que nous allons retrouver dans beaucoup de mots et qui veut dire : « le côté ». Nous la trouvons dans TSOUD, TSADOH, TSODED qui signifient épier, pécher, dresser des embuscades, chasser. C’est la notion de harponner, d’aller chercher une proie, d’aller piéger quelque chose. En général lorsque nous considérons ces significations nous y voyons de la malice, tandis que là nous sommes devant une réalité qui dépasse absolument notre plan de conscience, car il s’agit du harpon divin. Et je pense particulièrement à cette phrase que nous trouvons, je crois, chez Isaï, lorsque Dieu dit en parlant de l’humanité, sa future épouse qu’Il va l’emmener au désert, il va l’épier, la saisir,
pour qu’Il mette en Lui son plaisir et qu’elle devienne Son épouse. C’est cela qui est la racine de cette idée fondamentale du TSADE. C’est vraiment le harponnage de nos derniers éléments dans la profondeur. Dieu va se harponner en nous. Ce n’est pas par hasard que le Christ a cherché ses premiers apôtres parmi les pécheurs, afin qu’ils aillent chercher dans l’homme le divin qui est en lui. Le discours qui s’engage entre la lettre et le Saint-Béni-Soit-Il est très signifiant. La lettre vient se présenter en se réclamant de commencer le mot TSADOCH, c’est le mot qui veut dire : le Juste. Melchitsédech est le Roi de la Justice, c’est-à-dire de la « justesse », de l’harmonie entre les deux opposés. Job est Tsedech, Noé est Tsedech, tous ces êtres qui sont justes. Et Dieu renvoie la lettre en lui disant : « Il ne me convient pas de me servir de toi pour opérer la création du monde, attendu que tu dois être cachée pour ne pas donner prise à l’erreur. Car ta forme primitive est un Noun oblique, principe femelle, sur lequel vient s’ajouter un Yod, principe mâle. » Voilà la forme initiale du Tsadé et tel est le mystère de la création du premier homme : il fut créé à double face, deux figures tournées en sens inverse, dos contre dos. Et c’est pourquoi le Yod est présenté de dos et non de face. « Toi aussi, dit Dieu, tu seras un jour divisé en deux, mais tu vas autre part. Ce qui est à retenir, c’est que le Tsadé est fait de cette rencontre du Noun et du Yod, principe féminin et masculin. Ces deux lettres sont absolument inséparables et constituent ce fameux masculin et féminin d’Adam qui est Yod et Isha (qui n’est appelée Ava qu’après la chute) qui est son Noun, son poisson, sa profondeur et en même temps, le germe du Yod. C’est le mystère de l’ombre que représente le féminin par rapport à l’homme et de l’ombre qui est la Création toute entière par rapport à Dieu. Notre travail c’est d’amener le Noun au Yod pour réaliser la totalité de la Création. Le Tsadé c’est cette lettre au niveau du 80 qui réalise une totalité accomplie, à l’exception de ce dernier germe divin que nous avons à amener au Yod. C’est cette ultime pêche. Rien d’étonnant alors que Tsadé préside à des mots, non seulement comme Tsad qui veut dire « un côté » (qui appelle l’autre côté), mais aussi à la racine TSEL qui veut dire l’« ombre », c’est-à-dire l’ombre à sa source qui est précisément le Noun par rapport au Yod. L’homme, c’est-à-dire homme et femme, est l’ombre de Dieu. Nous sommes comme l’ombre d’un Dieu qui est parfait, mais qui est encore — on peut presque dire — inachevé, tant que nous ne sommes pas retournés à Lui. Dieu se fait mâle, le mot souvenir c’est le mot mâle, pour descendre dans son ombre, principe féminin. Un participant : Quelles sont les voies qui permettent de retrouver son origine, afin d’accéder à Dieu ? A. de Souzenelle : Chacun a sa voie, il n’y a pas une voie unique. Ces voies peuvent être tout à fait différentes, mais elles se retrouvent toutes à un moment. Et puis elles peuvent changer au cours de la vie. Il est important de trouver son guide intérieur, ce Lamed qui va devenir Tsadé. Mme Langevin : La Bhagavad Gîta dit qu’il ne faut jamais emprunter la voie d’un autre, mais qu’il faut trouver la sienne propre.
Le participant : Je pensais particulièrement à l’inconscience… A. de Souzenelle : La descente dans les profondeurs ! Il y a toutes les techniques de descente à l’intérieur de nous-mêmes avec tous les processus analytiques que l’on commence à vivre en occident. Mme Langevin : Je pense qu’il est important de faire taire son mental qui s’oppose à tout parce qu’il est toujours une volonté personnelle, et de laisser venir l’intuition, recevoir l’information. F. Catala : Autrement dit dans la méditation… A. de Souzenelle : Si l’analyse devient mentale, elle est complètement faussée. Il faut casser tout ce cadre mental pour entrer dans l’information des profondeurs. C’est pour cela que le rêve est tellement important. Pour certains une de ces voies de départ sera le chant, le chant grégorien, par exemple. Il casse toute fausse structure et fait jaillir de nous des énergies fantastiques. Une participante : C’est la voie des mantras. A. de Souzenelle : A condition qu’elle ne soit pas mentale. Je voulais encore vous montrer le NETS, c’est le mot qui veut dire « arbre », c’est important parce que notre être tout entier est vraiment structuré sur l’arbre. Le mot ETSEB est le mot employé dans la Genèse quand Dieu dit : « Tu enfanteras dans la douleur ». Le mot douleur est aussi le mot « travail ». Mais attention ! Il ne s’agit pas tellement de mettre des enfants au monde, que de mettre au monde notre Yod. Le Tsadé est ce harpon qui va dans les profondeurs, qui traverse AV, le nuage dont on peut dire ici qu’il est le dernier, l’enfantement, la mise au monde. Et c’est en même temps la construction de l’arbre. C’est vraiment le travail de l’humanité qui construit son arbre. Le mot ETSEM veut dire « l’os, le squelette », tout cet arbre du corps. C’est aussi le mot employé par les Hébreux lorsqu’ils veulent parler de la partie la plus intime d’eux-mêmes, quand ils veulent dire : au cœur de moi-même, ETSMI, c’est-à-dire dans mon os. C’est la moelle de l’os qui est quelque chose de mystérieux même au point de vue physique, puisqu’elle contient toutes les réserves des noyaux des cellules du sang. C’est ce qui est absolument indicible, parce que c’est le Soi. Compte rendu de la rencontre du 10.1.1980 Plus nous avançons, plus les lettres sont chargées et plus nous pouvons appréhender cette langue extraordinaire. Nous approchons aujourd’hui une autre lettre fort importante, le QOF qui a pour valeur 100. Cela nous met évidemment en harmonie avec la lettre qui a pour valeur 1, c’est-à-dire le Aleph, le Yod qui a pour valeur 10 et même le Aleph final qui pour valeur 1000. Nous entrons à nouveau dans l’unité. Entrer dans l’unité avec le 100 est une chose difficile à appréhender parce
que nous pénétrons dans des qualités intérieures qui nous échappent de plus en plus. Si nous n’abordons pas cette lettre avec des mains purifiées, nous pourrons être scandalisés au niveau de notre entendement immédiat. QOF a plusieurs significations. D’une part il veut dire « le singe », le petit animal curieux et très étrange. Et d’autre part il veut dire ou plutôt c’est QOFITS qui veut dire « la hache », « le hachoir », mais aussi « le chas de l’aiguille ». L’hiéroglyphe de la lettre est une hache double, la fameuse hache de Cnossos. Puis la lettre se penchera de côté et elle donnera en français notre lettre Q. C’est pour cela que les mots qui commencent par un QOF en hébreux, ne devraient pas s’écrire avec un K ; comme par exemple Qabale dont l’orthographe devrait être celui-ci. Le K correspond au KAPH, le creux de la main. Même si nous ne nous en rendons pas compte tout de suite, il y a pourtant une correspondance étroite entre les significations du QOF, recouvertes par une seule énergie. Quel est le symbolisme du singe dans les différentes traditions ? Le monde animal est un monde extrêmement signifiant. Or le singe, si nous faisons la synthèse du symbole qu’il représente, c’est la sagesse, mais une sagesse qui nous dépasse tellement, que ce sera sous les facéties du singe que nous allons être obligés de l’appréhender, sous cette espèce de singerie qui aide à faire passer un message. L’humour est un peu le symbole de cette vraie sagesse qui peut être scandaleuse pour nous, parce qu’elle est tellement folie à nos yeux. Comme a dit l’Apôtre Paul : « La sagesse de Dieu est folie pour les hommes. Et si tu crois être sage selon le monde, deviens fou. Alors tu entreras dans la sagesse divine ». L’homme totalement accompli, SAKOL, c’est aussi le mot qui veut dire « le fou ». Le Prophète, celui qui voit les cieux ouverts et non celui qui lit dans l’avenir, commence à être cette folie-là. Là il n’y a plus de temps, on est dans un non-temps aussi bien que dans le passé, le présent et l’avenir. Dans tout l’Orient, ce petit singe représente la sagesse sous forme de trois petits singes dont l’un se bouche les yeux, l’autre la bouche et le troisième les oreilles. C’est le symbole de celui qui ferme ses sens à l’appréhension du monde extérieur pour entrer dans un monde intérieur. C’est cela la vraie sagesse. Il ne s’agit pas de nier le monde extérieur, il nous sert de tremplin, mais il faut que nous allions au-delà, dans un monde beaucoup plus subtil. Chez les Hébreux, qui est le Sage par excellence ? C’est Salomon de réputation mondiale, à tel point que la mystérieuse Reine de Saba va venir non pas pour une visite de royaume à royaume, mais pour vérifier cette sagesse. Et quand elle l’a vérifiée, elle s’incline devant Salomon et elle dit : « Véritablement, celui-là est le plus sage de tous les sages ». Et à partir de ce moment-là, tous les ans elle lui fait envoyer des cadeaux qui consistent en de l’or, de l’encens, de l’ivoire, des singes et des paons. Ce sont les cinq attributs de la sagesse. L’ivoire, c’est la dent de l’éléphant, et l’éléphant est aussi symbole de sagesse. En Inde, Ganesha est ce dieu-éléphant qui monte un rat. D’après notre sagesse ce serait plutôt le rat qui monterait l’éléphant ! Mais là tout est inversé. Le rat est symbole de l’intelligence subtile qui s’immisce partout, qui va prendre connaissance de tout. Or sagesse et intelligence sont inséparables. Ce sont les deux Séphiroth qui sont à la base du triangle supérieur de l’Arbre des Séphiroth. Toute intelligence nous conduit à une sagesse et une intelligence divine nous fait
entrer dans une sagesse divine. Et Ganesha est celui qui pénètre, grâce au rat qui l’accompagne, les éléments les plus subtils du monde et qui incarne cette sagesse qui dépasse tout. Il est intéressant de faire se rejoindre les paons et les Chérubins qui, dans la symbolique chrétienne, sont représentés par de grandes roues avec des yeux tout autour. Le paon est exactement comme cela. Les Chérubins sont des Archanges qui gardent le Jardin d’Éden, la dernière porte. Et tout se retrouve dans le symbole du chas de l’aiguille qui est aussi la dernière porte. C’est grâce à notre énergie intérieure que nous allons passer par les portes successives du QOF qui est le chas de l’aiguille, la dernière porte. Cette lettre aussi est allée trouver le Saint-Béni-Soit-Il pour prétendre commencer la création du Monde, en se basant sur le mot QADOSH qui veut dire « le Saint » et elle a été renvoyée, parce que, dit le Saint-Béni-Soit-Il, « tu fais partie du mot SHEQER qui veut dire « mensonge ». Le QOF est entouré par le SHIN et le REICH qui, réunis, forment le nom de SARAH, SAR étant le prince ou la princesse. Qu’est-ce que cela veut dire par rapport au mensonge ? C’est là que nous pénétrons dans le scandale, car nous ne pouvons appréhender le mensonge que si nous comprenons que la vérité est absolument inappréhendable. Ce n’est qu’à travers des morts et des résurrections successives que nous pouvons aller vers la vérité. Ce qui est vérité pour nous aujourd’hui sera mensonge lorsque nous aurons franchi un nouveau pas vers une autre vérité. La vérité est au-delà de la vérité et du mensonge et pour le comprendre il ne faut pas que nous restions enfermés dans notre petit plan de conscience actuel. C’est dans cette perspective que nous abordons aussi le problème de la ruse. Le Christ Lui-même va louer l’économe infidèle et dire : « Ah ! si les enfants de lumière étaient aussi rusés que les enfants des ténèbres ! » Cette ruse nous pouvons un peu la comprendre grâce au Tsadé, l’hameçon. Quelle ruse qu’un hameçon pour aller chercher un poisson ! Pour nous c’est la même chose : il y a une ruse dans l’hameçon qui nous est tendu pour que nous avancions plus loin. Et la toute première ruse est celle du serpent en Éden. Le mot AROM employé dans la Bible signifie à la fois « la ruse », « la connaissance » et aussi « la nudité ». La nudité, c’est la connaissance totale, c’est le parfait miroir de la connaissance divine. Et le serpent, « le plus rusé de tous les animaux », sait parfaitement le chemin que l’homme et la femme ont à accomplir et il va se faire barrière sur ce chemin. C’est là toute l’histoire de la chute. A. de Souzenelle nous cite quelques exemples de ruses « fécondes » : Jacob et le droit d’aînesse, Tamar qui met au monde l’enfant engendré par son beau-père ou plutôt les jumeaux dont l’un, Peretz, sera l’ancêtre du Christ. Quand on dit que « Dieu sonde les reins et les cœurs », le QOF est encore présent dans le mot HAQOR qui signifie « sonder ». Cette sagesse c’est la sonde divine, c’est elle qui nous alimente qui nous nourrit. Dans HAQOR, les deux lettres qui entourent le QOF forment le mot HOR qui veut dire « caverne ». La sonde, c’est la descente dans la caverne.
On retrouve le QOF dans le mot MAQOM, le « lien » et qui est aussi un des noms de Dieu. Quand après la séparation des eaux du bas et ensuite de ceux d’en-haut, Dieu dit : « Que les eaux se rassemblent dans un lieu UN : EL HAQOM ERAD, quel est ce lieu dans le complexe espacetemps ? C’est le symbole extérieur du lieu intérieur, de notre espace intérieur, de notre champ de conscience, de ce dernier lieu que nous avons à atteindre, le MI divin où il n’y a plus ni temps, ni espace. Dans RAQIA dont il est question le deuxième jour, lorsque Dieu sépare les eaux d’en-haut et qui signifie « étendue » le QOF au milieu est entourée par le Reich et le Ayin qui, en formant le mot Ra que nous traduisons à tort par « le mal », signifie ce qui est encore dans la ténèbre. Toute création a pour but de faire émerger la ténèbre dans la lumière et c’est cette étendue qu’on appelle CHAMAIM où le mot MAIM, les eaux, est reconstitué. Le vrai nom de Jacob est YAAQOV. Ce mot est formé sur le mot AQOB, le talon. Or le talon est un endroit extrêmement important dans le corps, il est symboliquement celui qui contient toutes les énergies. Et c’est pour cela que Jacob à sa naissance et à celle de son frère Esaü, tient dans sa main le talon de ce dernier, c’est-à-dire qu’il va prendre en main toutes les énergies qui sont en réserve dans le talon de son frère. Et pour cela il va passer par la ruse. Dans le mot AQOB, QOF perce le AV, le nuage, c’est-à-dire les voiles qui nous séparent de la lumière, qui nous séparent du Père, lorsqu’on l’écrit non avec un Ayin, mais un Aleph. Un autre mot à connaître est QABALE qui vient du mot QABEL, « recevoir ». QAB veut dire un contenant que nous retrouvons, venu de l’arabe directement de l’hébreu, dans notre mot « Cabas ». C’est le ventre, c’est la matrice et QABEL qui s’écrit avec un Lamed, signifie que tout est mouvement, c’est recevoir. Alors la QABALA des Hébreux, c’est le contenant de la Tradition, qui s’est identifié à la tradition. En supprimant la lettre du milieu, nous obtenons QOL, la voix divine qui va parler et qu’il ne faut pas confondre avec Kal qui est le tout, la totalité. Nous parlerons du mot QEDER, l’Orient et aussi l’éternité, quand nous étudierons le Mem final. Dans Qedam nous avons QOM, le verbe venir dans un sens très fort, qui veut dire se dresser et qui est employé pour exprimer la résurrection. La prochaine fois aussi je vous parlerai lorsque nous étudierons le REICH, d’un mot qui est fait avec le QOF : NIQBA, mot très important qui veut dire « femelle ». Ce soir nous avons touché une lettre de grande importance, une de celles qui commencent à nous dépasser. Nous sommes encore dans une toute petite intelligence des choses. L’intelligence divine dépasse tout, de même que la sagesse à laquelle nous sommes invités à participer. Nous recevons la vérité qu’en tant que nous pouvons la supporter et à chaque fois que nous la supportons, nous allons plus loin, vers d’autres vérités non encore atteintes. Compte rendu de la rencontre du 5.2.1980
Nous parlons aujourd’hui de la lettre REICH qui a pour valeur numérique 200 et qui est l’initiale du mot REICH qui veut dire « la tête », quoiqu’il y ait dans sa signification beaucoup de subtilité, car il s’agit surtout d’une notion de principe, de princeps, de tête essentielle. Une fois de plus il est question d’une partie du corps. Au début le graphisme de la lettre était une tête d’un petit bonhomme barbu qui s’est stylisé par la suite à plusieurs reprises. Puis elle s’est retournée et a donné l’ancêtre de la lettre grecque RO et celle de notre R. Le premier mot de la Bible est « Berechit » qui a donné son nom au Livre que nous appelons la Genèse. Les Hébreux disent que le mot Béréchit contient tout l’enseignement de la Thora et que même sa première lettre contient tout le premier mot. Le centre du mot Béréchit que nous étudierons avec le Shin et le Tav, est REICH. Pourquoi le traduisons-nous par « principe », plutôt que par la formule de la Bible, au commencement ? Parce que dans ce dernier cas nous introduisons une notion de temps, de temps historique et nous sommes alors en plein contre-sens qui nous fait ouvrir le Béréchit sur une notion d’histoire temporelle, alors que les premiers chapitres de la Bible sont à-temporels. Nous sommes dans le monde des principes, au-delà du passé, du présent et de l’avenir, Il Est. C’est une histoire qui rend compte d’une Réalité qui échappe à notre conscience immédiate. Nous sommes davantage dans une notion de principe que de commencement, principalement en ce qui concerne l’homme. Et c’est ce que ne vont pas faire les scolastiques en disant que l’homme a un commencement. Or l’homme n’a pas de commencement, il est créé de toute éternité, sa dimension est éternelle. Notre existence, entre la naissance et la mort n’est qu’une toute petite partie de nos avatars. Cette notion, nous l’avons complètement perdue. Dieu à un certain moment dit à Job : « Où étais-tu lorsque je mettais une racine aux montagnes, où étais-tu lorsque je formais la terre ? Tu étais là, car le nombre de tes jours est incomptable, est infini. » L’homme et la création sont créés de toute éternité, nous plongeons là dans un non-temps. Ce ne sont que nos avatars, à travers nos différents plans de conscience qui sont liés à un temps, à un espace-temps, à un espace intérieur. Mais le jour où nous aurons fait toute l’évolution que nous avons à faire dans les profondeurs de notre être, nous retournerons à ce nontemps. Nous sommes appelés à entrer dans cette dimension d’éternité, dans cette vraie tête. Pour le moment nous avons une tête très limitée sur nos épaules, qui est enfermée dans la petite prison du plan de conscience auquel nous participons. Le travail que nous avons à faire, c’est de mettre successivement de nouvelles têtes sur nos épaules, c’est-à-dire d’acquérir une intelligence qui pénètre de plus en plus le sens du divin et qui va donner un sens à la vie. C’est le symbole de tous les mythes de décapitation, et même d’événements historiques dans leur dimension mythique, comme par exemple Saint Jean-Baptiste. Il est vraiment le vieil homme par rapport à
Saint Jean l’Évangéliste, celui qui mettra sa dernière tête sur ses épaules et qui ne doit plus mourir. Le mot REICH est formé de trois lettres comme la plupart des mots hébreux qui, en général, sont trinitaires: le Reich, l’Aleph et le Shin. La lettre Reich signifie donc principe, mais principe de quoi ? ECH veut dire « feu ». Dans l’Arbre des Séphiroth nous étions au niveau des pieds dans toute la symbolique de la terre, au niveau des reins dans la symbolique de l’eau, au niveau des oreilles dans la symbolique de l’air et au niveau de la tête toute entière, nous sommes dans le feu. Mais, à vrai dire, c’est tout le corps qui est saisi dans cette réalité feu, c’est toute la montée de la sève dans l’Arbre que nous sommes et qui s’épanouit au niveau de la tête. Le niveau feu est aussi dans les talons, voyez l’histoire de la naissance de Jacob qui tient dans sa main le talon de son frère. Le feu est aussi le principe de l’intelligence, non pas de l’intelligence intellectuelle, mais celle qui pénètre par la contemplation, la méditation, la prière, par une ouverture à la vision intérieure dans les mystères divins qui ne sont qu’une autre facette des mystères de l’homme, les deux pôles d’une même réalité. Si l’on supprime le Aleph, les deux lettres qui restent, Reich et Shin indiquent la notion de pauvreté. L’Aleph, les cornes qui captent l’information, se fait pauvre. Pour que l’homme accède à sa dernière réalisation, il faut que lui-même fasse sa dernière circoncision qui est celle de tous les encombrements intellectuels, psychiques, de tous ces plans de référence encore sécurisants, jusqu’à arriver à la non-connaissance absolue. Voilà la pauvreté, c’est la dernière naissance. Une participante fait le parallèle avec la plénitude du vide bouddhiste ou encore avec la Nuit obscure de Saint-Jean de la Croix. Le Roch, le pauvre, retourné donne le mot SAR, la principauté. Les mêmes mots sont donc, selon le rapport des lettres entre elles, soit la pauvreté, soit la principauté, totale réalité, deux pôles en apparence contradictoires, mais qui sont la même réalité. Voilà la beauté de l’hébreu. Dans le mot Or, se rencontrent l’Aleph et le Reich unis par Vav. Nous en avons déjà parlé avec la lettre Ayin, en montrant que Or, écrit avec un Ayin à la place de l’Aleph, signifie la tunique de peau qui est celle revêtue par l’homme après la chute et qui ne fait que cacher la lumière que nous sommes et que nous recouvrerons lorsque nous aurons mis la dernière tête sur nos épaules. Si nous regardons ce mot Or de plus près nous voyons qu’il est fait de la rencontre au niveau du Vav qui est la conjonction et aussi l’homme, avec le Aleph, la puissance divine créatrice et la réceptivité. Dans le Reich, la tête, nous avons la réceptivité de la Création et même la résistance, car il ne peut y avoir de lumière s’il n’y a pas de résistance pour la recevoir. Cela est vécu sur tous les plans et particulièrement au niveau de l’affrontement. On n’avance qu’à travers la contradiction. C’est ainsi que devraient vivre les couples. Ils sont formés d’êtres différents ayant des vues différentes. Si ces couples étaient adultes, au lieu de bagarres qui souvent se terminent par des divorces, les avis contradictoires seraient générateurs d’une évolution, parce que la vérité est toujours au-delà de la contradiction.
Dans le mot AROR qui s’écrit avec deux Reich, nous sommes devant le mot qui veut dire malédiction, en particulier la malédiction après la chute. Elle est dans le redoublement de la résistance. Il n’y a lumière que quand il y a un juste rapport entre l’émicivité et la réceptivité. Nous avons là une ouverture extrêmement importante sur ce qu’il est convenu d’appeler la malédiction après la chute. C’est notre attitude intérieure qui n’est pas juste et non une punition d’un Dieu extérieur. En réalité il s’agit de la résistance opposée à la lumière qui provoque une rupture d’équilibre. Nous entrons dans la ténèbre. Nous avons aujourd’hui encore à revoir notre attitude intérieure. C’est toute la signification et le but de notre vie terrestre de retrouver le rapport juste. Le mot BERERAH veut dire l’élection. Il n’est pas le seul à avoir cette signification, mais il est le plus courant. Le Beith, c’est la Création toute entière, c’est un peu l’image de ces têtes successives que nous mettons sur nos épaules. Dans cette image je vois le signe de l’élection, à savoir : celui qui se met en marche. Que signifie la notion de « peuple élu » ? Il est convenu de penser qu’il y a une élection par Dieu du peuple. Mais ce n’est pas à sens unique, chacun de nous participe de ce peuple et nous aussi nous entrons dans l’élection si nous choisissons les épousailles avec Dieu. Dieu épouse sa Création, c’est le rapport entre le Aleph et le Beith. Et celui qui se met en marche, (BO le mot pénétrer), c’est celui qui choisit l’Aleph final, le couronnement, le mariage de l’incréé et du créé. Et dans ce cas il participe du peuple élu. Le peuple hébreu est le peuple choisi comme prototype de toute l’évolution de l’humanité. Ce qui arrive aux Hébreux est vraiment ce qui arrive à toute l’humanité successive. Nous sommes tous dans la profondeur, des Hébreux et si nous entrons dans ce choix, car l’élection est un choix, nous commençons à mettre sur nos épaules ces têtes successives, jusqu’à celle qui est totalement informée. Nous sommes celui qui passe, EDER, celui qui va traverser son désert jusqu’à passer sa dernière porte qui est le QOF (le chas de l’aiguille) qui correspond à l’intégration à la Sagesse divine, à la déification. Le très beau mort BAR veut dire d’une part « le grain de blé » et d’autre part « la pureté » et encore « le fils ». Quand un Hébreu fait sa « Barmitzva » il entre dans cette dimension de fils qui est encore grain de blé. Il faut qu’il devienne BEN, le vrai mot pour fils. Ce grain de blé va mûrir en terre pour renaître et ceci plusieurs fois, jusqu’à ce qu’il entre dans la dimension de l’homme qui est Fils de Dieu. BAR est un des plus beaux mots, ce sont les deux premières lettres du Béréchit que nous verrons plus tard. Ils ont pour valeur 2 et 200 qui sont justement ce « toi » par rapport à « moi » et c’est aussi toute la notion de purification, non sur le plan de la morale, mais sur le plan de nos têtes successives. Et dans cette perspective il est intéressant d’étudier le nom de BARABBAS qui fut libéré à la place du Christ. C’est le nom qui veut dire : « Fils du Père » (Bar : fils, Abas : mot du vieil hébreu qui veut dire le Père). Il y a là un jeu de balance le Fils du Père doit mourir pour que le fils du père — le malfaiteur qui est Barabbas — soit libéré. Que signifie symboliquement le malfaiteur ? C’est l’humanité qui entre dans la chute. Nous sommes tous prisonniers de nous-mêmes prisonniers de
tout. Et puis, au fur et à mesure que nous allons mourir pour ressusciter, nous allons libérer ce grain de blé. Le Christ en effet doit passer par cette crucifixion, par cette mort et résurrection. Nous allons retrouver cette racine BAR dans un autre mot essentiel de la Genèse, BARA. C’est le verbe qui veut dire « créer ». Nous entrons en plein dans notre Création. Ce BEITH, l’altérité, c’est toute la Création symboliquement qui entre dans la lumière, dans la lumière qui sort de la ténèbre. Et c’est aussi, en même temps cette tête, ce principe, qui va vers l’Aleph final, vers la Terre Promise. Le mot GUER veut dire « l’étranger ». Qu’est-ce que la Création, si ce n’est « de faire autrement », « faire différence ». Et apparemment contradictoirement, c’est aussi le mot qui veut dire : « habiter », le verbe LAGOUR. Au fond nous n’habitons qu’une terre étrangère. Ainsi il n’a jamais été dit que Job habitait la terre de Uts mais il est de la terre d’Uts. Alors qu’est-ce que la Création sinon l’habitation divine ? Dieu par l’altérité pose l’autre, et l’habite. Toute la Création est une séparation jusqu’au dernier jour de la Création où nous avons la séparation de l’homme et de la femme, du féminin et du masculin plus exactement. Et lorsque Abram va être invité à aller vers la Terre Promise — début du départ d’Israël — l’ordre divin sera : « Va, quitte ton pays ! » C’est le commencement de la création de l’homme retournant à Dieu. Il y a un autre mot dans lequel nous retrouvons BAR, c’est le mot DABAR, le verbe. DAVER, c’est le verbe « parler ». Comment est formé le mot DABAR ? BAR, le grain de blé, retourné forme RAV, la multiplication. C’est la racine du mot RABBI, le maître, le supérieur, c’est-à-dire celui qui est entré dans cette multiplication après avoir assumé la croissance, et le RABBIN est celui qui est censé avoir atteint cette multiplication, non pas seulement la connaissance de la Thora, mais par l’intégration dans sa vie personnelle de tout le mystère que contient la Thora. Alors dans le mot DABAR nous retrouvons la racine BAR ou RAB si nous le prenons dans l’autre sens et nous voyons que la lettre centrale est BEITH. Il s’agit toujours de la Création puisque Beith a été la première lettre qui ait reçu du Saint-Béni-Soit-Il, la grâce de présider à la Création. Et cette Création est aussi la racine DOR (Daleith-Reich), c’est la racine qui va exprimer le cycle : la Création est prise dans les cycles. C’est par le Verbe que la Création est faite toute entière. Qu’est-ce que le Verbe créateur ? C’est le son primordial, la vibration sur laquelle tout va être moulé. Chacun de nous aussi est modulé sur un son qui lui est propre et qui est participation au Verbe Divin. Toute notre recherche est la recherche du Nom, c’est-à-dire de cette origine que Job va aller chercher dans les profondeurs des racines de la terre. C’est le Beith qui est posé dans ce mouvement vibratoire qui est le cycle, DOR, qui va faire le mot DOROT, exprimant la notion de « génération » et qui, extrapolé à l’extérieur, signifiera le temps. Chaque élément de notre corps est en même temps sur le plan physique et sur des plans subtils, ce sont des agencements vibratoires. La nature est vibratoire, la lumière aussi en partie.
Nous retrouvons là aussi le mot DAR, l’épine, qui est aussi la notion du temps. Des poètes ont parlé de « l’épine du temps », car le temps est une souffrance, il est dur pour nous. Nous courons toujours après le bonheur, inconsciemment, croyant que l’instant d’après va nous l’apporter. Au lieu d’entrer dans le DOR intérieur, nous sommes dans le DOR extérieur. Le mot « ronce » c’est DAREDAR, c’est l’entrée dans le monde de la répétition absolument contraire à DOR, la spire divine qui nous fait entrer dans le non-temps où nous retrouvons notre nom et où nous entrons dans la déification. La même racine (Daleith-Reich) se trouve dans le mot RADO, dominer sur… C’est l’ordre qui est donné à l’homme « Tu domineras sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel… » C’est-à-dire « tu intégreras toutes ces énergies, tous ces plans de conscience qui sont le substratum même de nos champs de conscience différents. C’est le verbe RADO qui implique d’entrer dans ces cycles, d’assumer les spires successives, de les intégrer. Par dominer sur les poissons de la mer, etc., dans cet impératif, Yiredou nous entrons dans une autre réalité qui est le mot YARED, descendre, de telle sorte que « dominer sur » c’est aussi « descendre dans, aimer, épouser ». Le verbe YARED, ce sont les deux premières lettres de « Jourdain ». Ce n’est pas par hasard, puisque le Jourdain est ce fleuve qui descend implacablement du nord au sud. En descendant dans le Jourdain, le Christ assume ce retournement des énergies qui allaient vers la mort et qui remontent maintenant vers la vie. Pour dominer sur…, il faut descendre dans… Nous ne pouvons dominer que les énergies qui forment nos différents plans de conscience. C’est cela le retournement des énergies. « Quel est Celui-ci qui est monté, si ce n’est Celui qui est descendu » vont dire les Apôtres le soir de l’Ascension. Revenons au mot DABAR, Verbe, au niveau duquel il peut y avoir tant de contradictions. Si vous prononcez DAVAR il voudra dire « la chose ». Or, actuellement le Verbe est « chosifié », on n’entre plus dans sa profondeur, mais on choisit le message. Or la chose, c’est précisément le Verbe qui est le seul objet absolu. En objectivant le Verbe nous le tuons. Mais si nous vivons le Verbe de façon à entrer dans l’archétype même de ce qu’il est, c’est le seul objet, la seule réalité objective. Tout le reste est subjectif. Avec ce même mot DABAR nous avons encore « la parole », DAVAR, « la chose » et DEVER, « la peste ». Ce mot DEVER est employé pour les plaies d’Égypte, mais il ne s’agit pas d’une peste importante, il s’agit de la parole divine qui nous est révélée dans ces plaies. Ce sont bien sûr des épreuves, des fléaux, mais si nous entrons dans l’intelligence de l’événement, c’est la Parole à l’envers, c’est-à-dire que c’est l’homme qui est passé à côté d’elle et que, par conséquence, il va vivre le contraire, la maladie, c’est-à-dire l’épreuve. Donc, avec ces trois mots nous trouvons à chaque fois des retournements d’énergies. DAVAR est la charnière avec d’un côté la Parole et de l’autre la peste. C’est l’épée à deux tranchants qui est vie ou mort selon que nous la vivions ou que nous la refusions. Encore un dernier mot : REGUEL, le pied. Nous retrouvons la racine GAL, la libération. Le pied c’est la libération de la tête. Cela a l’air contradictoire, mais si vous avez étudié le symbolisme
du corps, vous vous souviendrez que Jacob, à leur naissance, tenait en main le talon de son frère, c’est-à-dire qu’il va prendre ses énergies pour un jour poser la vraie tête. L’homme totalement réalisé, c’est celui qui a fait monter toutes ses énergies symboliquement des pieds jusqu’à la tête. C’est l’orobouros des Mexicains, c’est l’homme du tympan de Vézelay dont la tête rejoint les talons, c’est le cercle totalement accompli. Le mot pied veut aussi dire « la fête », parce qu’il contient en potentiel toutes les énergies que nous avons à amener en haut. Et alors, ce sera la fête. Le mot pied est un mot très important, très fondamental. Il signifie beaucoup plus que la simple partie du corps. Dans la description du Char d’Ézéchiel, les Ayoths ont des pieds de veaux. Le veau, c’est ce petit taureau en puissance, le taureau, ce sont les cornes, c’est l’Aleph final. C’est la couronne, le commencement et la fin, l’Alpha et l’Oméga. Compte rendu de la rencontre du 13.3.1980 Nous revenons à la lettre REICH que nous avons étudiée en février, et qui signifie la tête dans sa notion de principe, correspondant au triangle supérieur de l’Arbre des Séphiroth, à la base duquel il y a les deux Séphiroth : l’intelligence et la sagesse. Notre tête est informée par notre degré d’intelligence, d’intelligence non intellectuelle, mais d’intelligence participant à la sagesse divine, capable d’appréhender les éléments les plus subtils, d’entrer dans des champs de conscience de plus en plus profonds. Dans notre démarche essentielle vers la vérité et la lumière nous faisons des expériences fondamentales, mais qui devront être éloignées de nous une fois vécues, car notre grand danger est celui de l’installation. La première partie de notre vie se fait dans des catégories d’honnêteté, de devoir, de vertu morale. Les différents amis qui viennent voir Job pour lui prodiguer des conseils moraux sont éliminés par lui, car il sent que ce n’est pas cela, qu’il y a autre chose. Puis arrive le dernier ami, Elihu, celui qui entre dans une autre dimension de l’esprit. C’est le prophète capable d’entrer dans des perspectives eschatologiques et dans des perspectives divines. La plupart des gens sont encore des êtres morts qui gardent toujours la même petite tête sur leurs épaules, même si, sur le plan de la culture, ils sont intelligents. Car ils n’ont pas atteint l’intelligence essentielle qui est « folie ». C’est quand nous nous trouvons devant ce qu’on appelle l’absurde que nous mettons une autre tête sur nos épaules. Nous étions restés la dernière fois sur le mot DABAR qui signifie « la parole » et sur le mot LANOR qui veut dire « le mâle ». Je vous avais dit lorsque nous avons étudié la lettre QOF, que le mot NEQEVAH était très important. C’est la femelle. Dieu, dans la Genèse, créant Adam, à son image, le crée mâle et femelle. Le mot créer apparaît rarement dans la Genèse, il apparaît au premier jour, au cinquième et au sixième. En dehors de cela Dieu parle et la chose Est. Par contre le sixième jour qui est celui de la création de l’homme, le mot créer, BARA est répété trois fois et la troisième fois c’est pour exprimer sa dualité mâle et femelle. Cette dualité n’est
pas celle que nous ramenons au niveau de notre petite intelligence. Car quand Dieu crée Adam mâle et femelle, Il les crée ZACAR, le mâle, Nequêvah, la femelle. Or la lettre centrale du mot « mâle » est un CAPH, lettre femelle, symbole de réceptivité et que celle du mot « femelle » est un QOF, lettre mâle symbole de la hache qui fend la dernière tête. Nous sommes là devant une dualité, qui est intimement liée, il y a une communion intime entre le masculin et le féminin. C’est un peu comme le Yin et Yang par rapport au TAO. Que signifie le mâle ZACAR ? Les deux lettres qui entourent ce contenu que représente le CAPH, c’est la racine ZER qui va donner des mots forts importants exprimant la lumière, par exemple ZERA, la semence. D’ailleurs le REICH et le ZAIN sont deux lettres qui forment le nombre 207 qui est le nombre de la lumière. C’est un contenant de lumière. Souvenez-vous de la signification de la lettre ZAIN qui est la flèche qui traverse la tunique de peau, cette peau animale qui est notre première terre, notre champ de conscience correspondant au sixième jour. La flèche est appelée à traverser nos plans de conscience successifs, c’est-à-dire à les pénétrer, à les épouser. Voilà le rôle mâle. C’est pourquoi le mot ZANOR, mâle, veut aussi dire « se souvenir ». Être mâle, c’est se souvenir de ce que nous sommes, de toutes nos réserves d’énergies qui ne sont pas encore parvenues à la lumière et que nous devons y amener. Lorsque dans la Genèse Adam reçut l’ordre de labourer, de travailler la terre, c’était pour l’épouser, pour épouser nos terres successives, nos terres intérieures. Et quand nous avons épousé tous les champs de conscience qui sont faits de ces énergies successives, nous devenons le dieu que nous sommes. Par rapport à cela que veut dire le mot NAGOF ? C’est le trou ou le verbe trouer, mais, et nous trouvons là toute la subtilité du mot, c’est aussi le verbe nommer. Un vieil adage dit : La vérité est au fond du puits. Si quelqu’un a le pouvoir de nommer ou d’être nommé, c’est qu’il contient le Nom. Dans NAGOF il y a la racine CAB qui signifie Cabas, c’est un récipient. Le nom en nous, c’est le germe, c’est notre vibration initiale, le son essentiel à partir duquel chacun de nous est modulé. Nous sommes tout un agencement de vibrations liées au Verbe Divin qui nous a créés. Ce nom originel fait que chacun de nous a son nom secret, obéissant à une modulation différente. C’est le grand mystère de l’hypostase, diront les Pères Grecs de l’Eglise, de cette nature en dessous de la nature divine et dont chacun de nous a son unicité. Nous ne pouvons connaître notre nom qu’en faisant œuvre mâle en nous lorsque nous descendons dans ces profondeurs, dans ce « trou » qui contient notre nom, celui que Job va chercher dans le poisson, dans le germe, le NOUN de NAKOF, et qui lui confère une dimension fantastique, vibration participant à la vibration divine. C’est l’accomplissement total. Dans la Genèse Dieu emmène Adam, à la fois mâle et femelle, dans les profondeurs en lui montrant tous ces champs de conscience (son côté femelle) qu’il a épousés et Il lui dit : « Vous êtes deux, vous devez devenir un ».
Le drame d’Adam après la chute, lorsqu’il a mangé le fruit, c’est de croire qu’il est arrivé, qu’il a dépassé toutes les dualités. C’est pour cela que Dieu le remet en bas de l’échelle. Dans le dernier apophtegme de l’Évangile de Saint-Thomas, le Christ dit : « Si la femme ne devient mâle, elle n’entrera pas dans le Royaume des Cieux ! » C’est-à-dire, si le monde femelle ne commence pas son travail intérieur. A la fin du déluge il y a cette phrase extraordinaire : « Et Dieu se souvient de Noé ». C’est le mot ZAHOR et voici ELOHIM ZAHOR, Dieu se souvient et fait œuvre de mâle dans l’humanité, afin que la Terre, devenue divine, puisse être pénétrée par Dieu. « Dieu se souvient… » revient très souvent dans la Bible. Quand nous chantons pour nos morts en demandant pour eux la « mémoire éternelle » nous demandons qu’ils continuent leur vie mâle après la mort — si tant est qu’ils l’aient commencée avant — ou, du moins, qu’ils l’accomplissent après leur mort physique. Cette notion du mâle et de femelle me semble fondamentale, elle transforme notre compréhension de la Genèse. Parlons maintenant de la lettre SHIN. Elle a la forme d’un trident avec, en plus un point ici pour exprimer le son che et un point de l’autre côté lorsqu’elle exprime le son se. Elle a pour valeur 300. Avec le GUIMEL, le chameau nous avons le nombre 3 et avec le LAMED, l’aiguillon, le nombre 30. Avec le SHIN nous trouvons une autre forme d’énergie, car en réalité elle signifie la dent qui contient tout un symbolisme. Après avoir représenté graphiquement un arc tendu, la lettre va se transformer, ses angles vont devenir beaucoup plus aigus, puis elle va se tourner pour devenir le SIGMA grec et pour donner notre petit serpent, le S. Avec la lettre actuelle nous sommes très proches du trident dont restent les trois branches. Quel est le symbolisme de la dent ? Avec le CAPH nous avons vu que la dent de l’éléphant offerte à Salomon était signe de sagesse. Dans mon livre sur le Symbolisme du Corps, je me suis appuyée sur deux mythes, dont l’un, je dirai, est une pseudo-réalisation de l’homme et l’autre, sa totale réalisation : le mythe de Jason qui va voler la Toison d’Or pour qui il n’était pas mûr. La Toison dévoilée, va se retourner contre lui. Dans le deuxième mythe, celui de Cadmos, chargé par les dieux d’aller fonder la ville de Thèbes, les héros doivent prendre les dents du dragon et les planter dans la terre. Et ces dents vont germer et d’elles vont naître des guerriers tout habillés avec leurs armures. L’ordre est donné à Cadmos de jeter des pierres au milieu de ces guerriers qui, se croyant attaqués, vont s’entretuer. Et ce sont les derniers, les plus vaillants, qui ont survécu, qui vont avec Cadmos fonder la ville de Thèbes qui est, pour les Grecs, ce que la Jérusalem céleste est pour les Chrétiens, et même pour les Judéo-Chrétiens. Donc, pour construire cette Théba, il faudra vérifier la qualité des pierres les dents sont des pierres — et la pierre qui est posée au centre, est celle exprimée à travers tous les Psaumes, les Prophètes, c’est la Pierre d’Angle qui, pour le Christianisme, est le Christ. C’est la pierre de finition que, symboliquement, nous devons devenir. Les dents sont donc les pierres de fondation de notre édifice essentiel. Lorsque nous perdons une dent, nous changeons de terre. Il y a d’ailleurs une denture liée à chaque âge physique : la dent de lait du petit enfant, celles de l’adulte censé changer de terre et dont les dents doivent devenir de plus en plus proches
de la qualité de la pierre d’angle, et les personnes très âgées, autour de cent ans, connaissent une nouvelle denture, mais très peu d’entre elles font cette expérience. Dans les rêves, le rôle que jouent les dents est très important. Chaque dent est signifiante. Les Anciens disaient que quand nous rêvons que nous allons perdre une dent, cela signifie que nous allons perdre un membre de notre famille. Ce sont les pierres de fondation de la famille. J’ai vérifié que cela était vrai lorsqu’il s’agissait des dents de dessous, tandis que les dents supérieures sont nos propres fondations. Le symbolisme de la dent, pour moi, est celui de la qualité de l’être, la pierre de finition étant notre dernière terre. Nous verrons cela avec le mot EBEN qui signifie la pierre. Dans la lettre SHIN, c’est notre structure de fonction trinitaire. Nous sommes des êtres trinitaires. Avec la femme ISHA, lorsque dans la Genèse elle voit que l’Arbre de la Connaissance est beau à contempler, bon à manger et désirable pour acquérir des pouvoirs, nous sommes devant les trois énergies fondamentales de notre être : jouissance, possession, puissance. Le SHIN, c’est notre noyau énergétique représenté par un arc tendu, retenu dans tout son potentiel de détente, qui n’a pas encore donné son secret pour que tout éclate. C’est l’ouverture de la boîte de Pandore que nous vivons actuellement avec la guerre, les conflits, avec la fission de l’atome investi dans la bombe atomique. Notre travail à chacun de nous, est de ramasser ces énergies, de fermer la boite et puis d’aller chercher celui qui est capable de l’ouvrir. SHIN forme le mot SHEM qui est notre nom. C’est la matrice de SHIN, le potentiel énergétique de notre noyau, de notre force nucléaire. C’est pour cela que le SHIN est la lettre la plus fondamentale de l’alphabet hébraïque. Lorsqu’elle est venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il pour présider à la création du monde, en se réclamant du très beau mot divin SHADAI, le Tout-Puissant, celui-ci la renvoie en disant : « Tu es digne, tu es bon, tu es vrai, mais les faussaires se serviront de toi pour affirmer leurs mensonges en t’associant les deux lettres QOF et REISH et former le mot SHEQER, le mensonge. Aussi, bien que tu sois vraie, ô lettre SHIN, puisque les trois patriarches seront réunis en toi, il ne me convient pas de me servir de toi pour opérer la création du monde ! ». Qu’est-ce que « les trois patriarches » ? Ce sont Abraham, Isaac et Jacob, les terres de fondation d’Israël, trinité fondamentale de la création d’Israël et co-extensivement, de l’humanité et du monde. De quoi est fait le mot SHADAI ? du SHIN, du DALETH et du YOD. Si nous prenons la racine SHIN qui passe par DALETH, les portes, cela signifie que, recevant de l’énergie divine, nous ne pouvons recevoir que ce que nous pouvons supporter. C’est toute l’économie divine. C’est comme un fleuve qui va passer par des portes et arrivé au moment où il sera tout calme, si nous le retournons — puisque ce sont des énergies qui doivent se retourner — va nous permettre de passer les portes dans l’autre sens et de retourner à nos sources. Dans le baptême du Christ il est dit : « Qu’as-tu Jourdain à retourner en arrière ? ».
SHAD veut dire sein. C’est en se donnant en nourriture à sa Création que Dieu se révèle et, comme une mère donne son lait à ses enfants, Il nous donne ce dont nous avons besoin pour vivre et pour nous accomplir. Et DAI veut dire assez, suffisamment, c’est-à-dire suffisamment à chacun de nos niveaux énergétiques. Pris dans l’autre sens c’est le mot YAD, la main qui est aussi le même mot que YOD, qui profile tout le YOD-HE-VOV-HE. On peut ajouter que dans le mot DASHE, la verdure, nous retrouvons les deux lettres de sein, Dieu dit dans la Genèse : « Que la terre produise de la verdure ». C’est la verdure qui va être notre nourriture et les fruits des arbres oui portent tout leur potentiel de fruits en eux. C’est l’énergie divine, DASHE est la verdure qui nous conduit vers l’ALEPH final. Dans l’autre sens ESHED veut dire chute d’eau, c’est tout le déversement de l’énergie. Nous avons déjà parlé de SHEM qui est le nom et qui a fourni le mot SHEMA qui signifie entendre. C’est le mot fondamental chez les Hébreux puisqu’il figure dans leur prière récitée plusieurs fois par jour : SHEMA ISRAEL… « Écoute Israël le Seigneur ton Dieu, le Seigneur est Un » ; YODHE-VOV-HE justement. C’est l’écoute des profondeurs, c’est est 1’écoute de son nom, la révélation du Nom. Quand l’homme écoute, il y a aussi Dieu qui écoute l’homme. Dans la Bible lorsque Sarah, jalouse d’Agar la servante qui a eu un fils alors qu’elle-même était stérile, exige d’Abraham qu’il la renvoie, Agar est très malheureuse. Elle s’en va emportant une cruche d’eau. Mais voilà que l’eau vient à manquer. Elle met l’enfant derrière un petit monticule de sable afin de ne pas entendre ses cris, car elle pense qu’il va mourir. Et là, elle a la visite de l’Archange Gabriel qui lui dit : « Dieu a entendu l’enfant qui s’appellera Ismaël », c’est-à-dire « vous entendez ». Or tout l’Islam a été entendu de Dieu, tandis qu’Israël doit entendre Dieu. C’est un très beau peuple que celui d’Ismaël. Il a une fonction fondamentale dans le monde, parce que Dieu, après avoir entendu le cri de l’enfant, fait apparaître un fruit pour le désaltérer. Par rapport à Ismaël, Israël est aussi un très beau nom. C’est celui que reçoit Jacob après s’être mesuré avec l’Ange qui, d’ailleurs dans la Bible est un homme ISH, syllabe qui est au début d’Ismaël et d’Israël. Et si la tradition orale en a fait un Ange, c’est qu’il traduit l’homme dans sa dimension d’immense accomplissement. Il ne lui dit pas son nom, mais il lui dit : « Tu t’appelleras désormais Israël, car tu as combattu avec Dieu et avec l’homme ». Le verbe combattre c’est SARO, c’est le combat pour atteindre la Royauté, car nous retrouvons aussi la racine SAR qui a donné le nom de SARAH, la Princesse. Le combat, l’écoute, est au cœur d’Israël, alors que l’ordre du Coran est SAKO, combat ! Ismaël a son nom centré sur la racine SHE-MA, tandis qu’Israël est structuré sur la racine SARO, lutter. Il y a une intimité extraordinaire entre ces deux frères ennemis, enlacés l’un dans l’autre, qui ne peuvent pas se séparer et qui doivent s’accomplir dans l’amour et non dans la haine, les deux noms portant le nom de l’homme ISH et EL, Dieu. Compte rendu de la rencontre du 8.5.1980 Nous étudions aujourd’hui la lettre TAV, la dernière de l’alphabet hébraïque, ayant pour nombre 400, homologue de DALETH (4) et du Mem (40). Elle signifie « la marque », « le signe ». A l’origine elle était représentée par une Croix. Puis, à partir du XII e siècle, elle s’est redressée,
formant le Tau grec et notre T actuel, auquel il s’est identifié, nous ne savons pas par quelle surprenante évolution. Pourquoi le signe de la Croix est-il à la base de la lettre TAV ? C’est peut-être parce que la Croix illustre le mieux ce que nous appelons les « symboles », mot qui signifie « lancé ensemble », c’est-à-dire réunir deux éléments qui étaient séparés. C’est le rapport du signifiant au signifié, dont ce dernier est apparemment séparé, mais qui, en réalité, est l’élément de base qui permettra de remonter à l’archétype dont il procède. Autrement dit, tout ce qui est divin est dans l’Unité, lorsqu’il s’exprime dans la manifestation, il se crucifie, car il entre dans la dualité. Le TAV est le cordon ombilical qui relie le haut au bas, qui est la voie de l’incarnation et, en même temps de la crucifixion. Chaque élément de la Création est relié par le cordon ombilical à son archétype, c’est-à-dire le signifié à son signifiant. A chaque niveau de création, la manifestation implique une crucifixion, parce que celle-là se fige dans l’espace-temps. Il y a un retrait du Divin dans une forme apparente qui cache l’archétype, mais qui non seulement en même temps l’exprime, mais qui porte en soi toute l’énergie nécessaire pour pouvoir remonter jusqu’à lui. Les Hébreux emploient le mot Tsintsoum pour parler de la contraction du Divin qui se cache dans le temps, moteur profond de l’évolution de chaque élément de la Création. Chaque fois que nous avons à franchir un échelon de l’échelle, nous sommes crucifiés à la terre à laquelle nous arrivons. Nous sommes des passagers sur cette terre, mais aussi sur toutes les terres intérieures que nous devons conquérir et qu’il faudra lâcher les unes après les autres, pour finalement les conquérir toutes. L’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal, ou plutôt de la dualité, sera alors totalement intégré. Adam a voulu goûter de cet Arbre avant d’avoir véritablement conquis toutes ses terres intérieures. Le drame a été au bout, c’est-à-dire la crucifixion du Divin qui descend dans le monde et crucifixion du monde qui doit retourner au Divin. Et c’est ce que nous vivons actuellement de façon très douloureuse. Deux aspects vont parfaitement illustrer cette descente et cette remontée. C’est le Shabat qui est l’objet du septième jour de la Création, quand tout a été mis en place et qu’il est dit : « Dieu se retire ». Nous en trouvons l’explication dans la manière dont se construit le mot shabat. Le BEITH se trouve au centre, c’est la Création et les deux lettres qui l’entourent forment le mot CHETH qui donnera le nom de SETH, frère redonné à Caïn à la place d’Abel qu’il a tué et qui est à la base de toute l’humanité, puisque c’est à partir de SETH que nous voyons apparaître tous ces Patriarches qui sont l’humanité en marche. CHETH qui veut dire « le fondement », « la base », est un mot très intéressant, parce qu’il est formé du SHIN qui a pour valeur 300 et du TAV qui a pour valeur 400. Et vous vous souvenez que, par analogie le 3 et le 4 ont reçu l’ordre de ne jamais se séparer, parce que l’un est mouvement et l’autre structure. C’est le GUIMEL et le DALETH qui se réunissent dans un juste rapport, donnant le mot GAD, bonheur, ou encore toit de la maison. Nous les retrouvons tous les deux : le SHIN = 300 qui est cette pierre des profondeurs, notre noyau qui contient toute l’énergie, notre force musculaire, et le TAV qui représente les structures de ce SHIN. C’est donc le fondement de tout être, de toute création et de chacun de nous en particulier.
Ce retrait divin est un fait de base et le fondement même de la Création, Dieu se retire tout en ne se retirant pas, car s’Il se retirait, ce serait la fin de la Création qui n’aurait plus aucun pouvoir de retourner à son archétype. Il y aurait eu cet expire qui est la Création, mais il n’y aurait pas cet inspire qui est notre histoire. C’est cela le Shabat. Nous avons vu que le BEITH est un même mot que le BATH, avec un Yod au milieu et qui est la deuxième lettre de l’alphabet, qui a la valeur 2 et qui signifie « la maison ». Or qu’est-ce que la maison ? C’est la fille grosse du Yod, c’est la Vierge d’Israël qui doit mettre au monde l’Enfant Divin. Elle est cette Vierge construite sur le SHIN, cette force nucléaire à la base de la Création, qui est le noyau central à partir duquel chacun est programmé et duquel chacun de nous participe par le Nom secret que nous ne connaissons pas tant que nous ne le sommes pas devenu, mais vers lequel nous allons. Et ce SHIN en nous qui forme le SHEM, le nom, est cette force nucléaire par laquelle, lorsque nous avons trouvé un tout petit peu notre place dans le monde, nous commençons à être en communication, qui nous module, nous vibre et nous donne la possibilité du retour à l’Unité. Voilà ce qu’est le SHIN pour chacun de nous, pour la rose, pour le moindre brin d’herbe. Il est notre être propre qui, à partir du moment où nous en devenons conscients, est à la base de notre processus d’évolution. L’évolution c’est la mise en rapport avec le SHIN. C’est là encore une manière de lire le mot SHABAT. Le SHABAT, c’est-à-dire Dieu se retirant, tout en restant présent très discrètement, nous rend libres afin que nous puissions « jouer » avec Lui, Le nier ou Le faire vivre ou Le devenir. La véritable liberté est justement de devenir, c’est là que nous nous libérons au lieu d’être enchaînés, l’autre n’est qu’apparente. C’est le mot TSEMAH, la germination, qui illustre le mieux le travail de la création. La germination, c’est le germe qui contient le Tsintsoum divin, la « Kenos » divine, comme l’appellent les Pères de l’Église. Vous voyez la contradiction apparente, il y a retrait divin dans le Tsintsoum et puis, à partir de là, TSEMAH, la germination du Divin en chacun de nous, que nous l’acceptions ou le refusions, l’accomplissions ou non. La Création toute entière, comme notre histoire, est un immense tissu fait d’une trame et d’une chaîne qui sont d’une part le SHAMAÏN — le SHEM, le germe en nous et, d’autre part, notre vie de chaque jour que nous assumons à travers toutes nos terres successives. Et c’est pourquoi le signe de la Croix est fondamental. Il est important de connaître le petit mot ETH, fait de la première et de la dernière lettre de l’alphabet, en grec nous dirions de l’Alpha et de l’Oméga. C’est pour les Chrétiens toute l’Apocalypse qui est basée sur ce travail de l’Alpha et de l’Oméga. C’est d’ailleurs pareil pour les Juifs, puisqu’ils disent que d’aller du Aleph au Tav, c’est accomplir toute la Loi, c’est arriver à l’Unité. Sous des formes différentes nous parlons le même langage. Ce mot ETH est si important qu’il ne se traduit pas. Il ne signifie pas quelque chose de formel, mais il contient tout dans l’informel. Lorsqu’Eve met au monde Caïn, elle dit : « J’ai acquis un
homme » : ISH-ETH-YOD-HE-VAV-HE. On traduit ETH par « à l’aide de ». C’est un non-sens. ETH introduit un complément direct qui est la clef de toute la dimension de YOD-HE-VOV-HE, à savoir que ISH, l’Homme, même après la chute, reste à la ressemblance de YOD-HE-VOV-HE, avec toute la dimension de l’homme dans son devenir. C’est sa structure. Chacun de nous est ce YOD-HE-VOV-HE et chacun de nous participe au Nom sacré. Le drame exprimé par ce mythe de la chute, c’est l’homme qui a perdu le chemin de la ressemblance. Entre ALEPH et TAV il y a tout le dynamisme de notre devenir, c’est toute notre évolution qui se profile. L’Homme reste intact, dit l’Eglise Orthodoxe, ce que nie l’Eglise Romaine. Ce petit ETH, c’est toute la Loi dans sa profondeur signifiante qui est ramassée du ALEPH au TAV, qui recouvre non seulement le Judaïsme, mais aussi le Christianisme qui est contenu dans le Judaïsme, mais à d’autres niveaux de lecture. Les lettres s’étant présentées en commençant par la dernière, devant le Saint-Béni-Soit-Il, le TAV, donc la première à se présenter, avait toutes les raisons pour espérer obtenir de commencer la création du monde, se référant au mot EMETH (Aleph – Mem – Tav) qui veut dire « vérité ». « Terminant ce mot, dit-elle, j’ai droit de présider à la création du monde ». Le Saint-Béni-Soit-Il la renvoie et lui dit : « Tu en es en effet digne, mais il ne convient pas que je me serve de toi pour opérer la création du monde, car tu es destinée à être marquée sur le front des fidèles qui ont observé la Loi du ALEPH au TAV et à être mêlée ainsi à la mort ». C’est le ALEPH qui passe par des morts, c’est-à-dire par des crucifixions, ainsi que nous l’avons déjà dit. Le mot EMETH qui est aussi la Création, qui est l’Homme en particulier, allant de l’ALEPH au TAV, passe par le MEM qui est la matrice dans laquelle se vit évidemment une mort. Non la mort telle que nous l’entendons, mais identifiée à une mutation, c’est-à-dire au début d’une germination fantastique. Le Christ va dire : « Je suis la Voie, la Vérité, la Vie ». Celui qui nous mène de l’ALPHA à l’OMEGA à travers des mutations successives, c’est bien la dimension christique qui est le Chemin, la Vérité et la Vie, parce que la Vie est cette maternité. Les deux premières lettres du mot EMETH, c’est la mère. Et lorsque Pilate demande « Qu’est-ce que la Vérité ? », le Christ ne répond pas, mais Il va se faire crucifier. Il va répondre par son geste, par son être tout entier, accomplissant le mot EMETH. Dans sa réponse, Dieu dit que le TAV est réservé pour être mis sur le front des hommes restés fidèles à l’accomplissement de la Loi. Et le premier qui reçoit ce signe, c’est Caïn et pourtant, il n’a pas commencé par aller de l’ALEPH au TAV. Encore une de ces contradictions de la Bible. Caïn a pris conscience de son immense erreur « Mon sort est dramatique, je vais être errant et vagabond sur la terre et quiconque me rencontrera me tuera ! » Dieu, à ce moment-là met le signe sur son front, afin qu’il soit protégé. C’est aussi ce même signe, le TAV, qui a été mis sur le fronton du portail des Hébreux le soir de Pâques quand, dixième plaie d’Egypte, l’Ange exterminateur va exterminer tous les aînés des fils des Egyptiens. Ce signe va protéger les enfants d’Israël.
C’est la marque de ceux qui sont dans cette grande gestation du ALEPH au TAV, parce qu’ils vivent une mort pour une résurrection. Car, s’il y a naissance, c’est bien ce passage de la Mer Rouge. De même, dans le Livre d’Ezéchiel ou dans l’Apocalypse, sont marqués ceux qui doivent entrer dans le Jérusalem Céleste, donc ceux qui sont arrivés jusqu’au TAV. Caïn, c’est l’homme qui, même s’il a commis un crime des plus dramatiques, reçoit toujours à nouveau la possibilité de son accomplissement. Dieu va aller le rechercher là où il se trouve pour lui reproposer l’alliance et lui permettre de repartir. Car si le crime de Caïn est abominable, le crime contre l’Esprit est pire encore. Tout ce qui est mystère pour les Chrétiens, le mystère de l’incarnation, Dieu qui se fait homme, est dû au fait que nous ne sommes pas encore arrivés au TAV. Notre intelligence actuelle ne peut le comprendre, comme elle ne peut définir Dieu, ni la preuve de Son existence. Nous en parlons intellectuellement, mais nous ne pouvons en parler par expérience. Personne, pour l’instant, ne peut parler du TAV. HET, c’est le non-temps, tandis que ETH, est le temps, la durée qui nous est donnée jusqu’à ce que nous ayons assumé toute la ténèbre et que nous fassions la totale lumière. C’est alors que nous entrerons dans le non-temps ; le HET, que les physiciens nomment « l’ailleurs » et que l’on ne peut encore traduire. Vous trouverez en particulier le ETH dans l’Ecclésiaste où il est dit : « Il y a un temps pour dormir, un temps pour se réveiller, un temps pour vivre, un temps pour mourir, un temps pour semer, un temps pour cueillir, etc… » C’est tout le temps des semailles à la moisson, toute la dualité que nous avons à assumer. Cet aspect du TAV qui me semble très important, je le relie au quatrième jour de la Création, à la mise en place des deux luminaires dans le Ciel, appelés le « Grand » et le « Petit », et que nous traduisons par « Soleil et Lune ». Mais en fait, cela dépasse de beaucoup le soleil et la lune extérieurs. Ce sont nos lumières intérieures présidant à nos montées dans la lumière et à nos descentes dans la ténèbre. Par analogie, le TAV est lié à la mise en place des deux Arbres de l’Eden, dans le deuxième chapitre de la Genèse, l’Arbre de Vie et l’Arbre de la Connaissance de la dualité. Cette dualité dans laquelle nous trouvons toute l’incarnation, les deux branches de la Croix. Ces deux luminaires dans la première Genèse sont aussi symboles de l’Espace-Temps. En hébreu le mot « soleil » est SHEMESH, il contient le SHEM, c’est-à-dire le nom qui est aussi la place, le nom de celui qui a trouvé sa place et vice versa, de celui qui trouve sa place et qui trouve aussi son nom. Tous les textes bibliques lient la lune au temps. C’est pourquoi je fais ce parallèle avec les deux Arbres de la seconde Genèse qui sont liés à l’espace-temps, l’Arbre de la dualité étant lié à l’espace et l’Arbre de Vie au temps qu’on appelle non-temps.
Le temps et l’espace sont la même réalité, car le temps nous est donné en fonction de l’espace que nous vivons, c’est-à-dire de notre champ de conscience du moment. Et selon les différents champs de conscience auxquels nous accédons, le temps sera différent. Nous le voyons sur le plan psychologique, mais c’est encore bien plus vrai sur le plan spirituel, celui de nos espaces intérieurs. Au fur et à mesure que nous nous élevons, nos espaces intérieurs, le temps, est de plus en plus court. Toutefois il est implacable, rigoureux. Si nous voulons aller trop vite, nous nous cassons la figure ! Mme Langevin : Dans la méditation on perd la notion du temps. A. de Souzenelle : Parce qu’on entre dans un non-temps. C’est d’ailleurs la seule façon qui nous fasse rejoindre ce lieu privilégié, ce lieu du MI, ce milieu de nous-mêmes. Une participante : Dans le sommeil aussi on perd la notion du temps. A. de Souzenelle : Dans le sommeil aussi le temps est totalement différent, l’espace aussi. Ce sont des incursions dans nos profondeurs. Avant de nous quitter je voudrais vous montrer le premier mot de la Thora, le mot BERESHIT. Il va couronner notre enseignement du ALEPH et du TAV. Il est absolument inséparable du deuxième mot BARA, BERECHIT BARA ELOHIM. Comment le traduire ? Nous y trouvons la racine REICH qui signifie « la tête », le « principe ». Il reste BEITH, c’est la maison, donc la maison du principe. Le mot est tout entier contenu là, dans ces deux premières lettres. Or qu’est-ce que BAR ? C’est le grain de blé. Nous retrouvons là aussi le Fils, celui qui a à mourir en terre pour renaître, voyez Barabbas. RAB veut dire « la croissance », c’est toute la promesse du fruit, donc toute la vie est contenue là. Si vous prenez les deux premières et les deux dernières lettres, cela donne : BERIT, c’est-à-dire « l’alliance », l’alliance de feu. Et même si nous prenons le Yod, BERIT, est aussi l’alliance avec l’homme, l’alliance de l’époux avec son épouse, puisque le feu c’est tout l’Eros. C’est donc l’alliance de Dieu-Epoux avec sa Création-Epouse. D’autre part nous avons encore la première et la dernière lettre, BATH, « la fille », la Vierge d’Israël qui contient tout le Principe, qui contient le Yod, le feu, la tête, qui contient tout. TESHOUVAH est inséparable de SHABAT retourné. C’est « la pénitence », dans le sens de retournement, prise de conscience. Retournement de ceux qui allaient vers la mort et qui remontent vers la vie. C’est encore un aspect de ce mot. On pourrait en trouver d’autres, ô combien ! ALEPH et REICH qui sont les lettres de la lumière, YOD et REICH qui sont les lettres du sacré, de la crainte et du tremblement. Il y a des Qabbalistes qui sont restés des vies entières sur ce seul mot. Si vous coupez le mot en deux, vous avez d’un côté BARA, créer, et de l’autre SHIT. Créer, c’est mettre en lumière, tandis que le mot SHET, c’est la base, un aspect du repos, du fondement, de l’arrêt, du retour aux Sources, au SHIN. BARA-SHIT-BARA, le rythme à deux temps : créer, se reposer (aller dans les profondeurs), créer à nouveau…
Et puis, il y a ELOHIM, c’est aussi dans les profondeurs ténèbre-lumière-ténèbre. BERESHITBARA-ELOHIM SHAMAÏM (les Cieux) ERETZ (la terre, la base). Vous voyez ces deux temps, ce rythme de la phrase ! C’est extraordinaire ! Un autre aspect encore. Autrefois dans la Bible, il n’y avait pas d’arrêt entre les mots, on pouvait donc les séparer à n’importe quel endroit. On pouvait, par exemple, mettre BERESH – ITBARA – BERESH, c’est le même mot pratiquement, le Principe et ITBARA, c’est la forme pronominale du verbe créer. Dans ce cas on dirait : « Dans ce Principe, se créent les Dieux ». C’est le monde divin qui s’auto-crée. C’est intéressant et cela vous ouvre des perspectives immenses. Un mot hébreu est à prendre comme un joyau, comme un cristal qu’on regarde sous toutes ses facettes et dont on atteint le cœur que lorsqu’on est arrivé intérieurement au TAV. Par la méditation, par la contemplation du mot, c’est-à-dire par le chemin vers le TAV, on arrive à le faire parler, à entrer en communication avec lui, à ce qu’il ouvre une partie de son cœur. Compte rendu de la rencontre du 16.6.1980 C’est aujourd’hui notre dernière étude des lettres hébraïques. Le temps qui nous est imparti ne nous permet pas d’approfondir les lettres finales, ce qui, n’importe comment, exigerait plusieurs mois, sinon des années, cette étude ne se terminant jamais. Nous allons essayer de dire l’essentiel. Les lettres finales ne sont autres que certaines lettres déjà étudiées et qui ont une valeur et un graphisme différent lorsqu’elles se trouvent à la fin d’un mot. Nous avons vu le TAV la dernière fois, il vaut 400. Or entre le TAV et l’achèvement de toute évolution connue qui se termine par le ALEPH final de valeur 1000, il nous reste à voir les 500, 600, 700, 800 et 900. Le CAPH en est la première, elle vaut 20 au début du mot et 500 en finale où elle va prendre la forme d’un DALETH prolongé. Elle est en général accompagnée de deux petits points qui indiquent qu’elle se prononce « che », prononcé à l’allemande, et « cha », lorsqu’il y a une barre. Exemple : le LAMED plus le CAPH final se disent LECH ou LECHA. C’est l’ordre donné par Dieu à Abram de quitter Our, sa ville natale : « Va ! quitte ton pays ! » Pourquoi le CAPH a-t-il pour valeur tantôt 20, tantôt 500 ? Je me suis souvent posée la question. Mon avis personnel qui serait à vérifier par des Qabbalistes, c’est que, lorsqu’on arrive aux centaines, on entre dans un plan cosmique, dans un plan de conscience qui n’est pas commun à tous, mais qui est celui de l’homme arrivant à sa réalisation cosmique, c’est-à-dire, à sa réalité. Qu’est-ce donc que ce CAPH final qui rejoint le 5 par le 500, qui, au début ou à l’intérieur d’un mot a pour valeur 20, et qui signifie « le contenant »? C’est que avec le 5 qui est le souffle et le 50 qui est le poisson, le germe, nous avons le contenu, l’extérieur devient l’intérieur. Dans une certaine mesure cela confirme ce que j’ai dit, car lorsque l’homme est totalement réalisé, l’extérieur devient l’intérieur, l’intérieur devient l’extérieur, la droite devient la gauche, la gauche devient la droite et la droite devient la gauche, etc. Ceci est exprimé dans un très beau logium de l’Evangile de Thomas.
Par ce CAPH essentiellement lié au nombre 2 nous touchons le BEITH, la maison, l’altérité par rapport au 1. Dieu pose un autre que Lui-même. C’est toute la Création, c’est vraiment l’amour de l’autre qui apparaît avec le BEITH. Et, avec le CAPH lié au 20, nous sommes aussi devant ce « Toi », germe de tous les possibles, puisque ce « Toi » est à nouveau là comme une espèce de départ, c’est un germe cosmique. L’homme totalement réalisé n’est encore qu’un germe cosmique qui va réintégrer l’Unité. LAK(ch)A est l’impératif du mot « aller » et LEK(ch) « Va » dont on a fait un pléonasme en disant « Va, quitte ton pays, va vers celui que Je te montrerai… » et qu’on devrait au contraire traduire par « Va vers toi-même, va vers les profondeurs de ton être… » Dieu ordonne à Abram d’aller vers sa totalité. Le mot HEK est ce palais de la bouche qui donne toute la théorie des Hekaloth, les demeures mystiques de la Divinité, toute cette série de Palais qui est une grande contemplation mystique chez les Hébreux, puisque cela représente la traversée de toutes les terres intérieures, de toutes les dernières terres, là où l’épouse va se parer de robes toujours plus somptueuses, jusqu’à revêtir la robe de noce. Faisant suite au HEK, HOSHEK est la ténèbre des grandes profondeurs, c’est ce Palais dans lequel est serti le SHIN, cette pierre précieuse enfouie dans les plus grandes profondeurs de nous-mêmes, que nous ne pouvons atteindre qu’en traversant cette ténèbre. Lorsque le Christ est monté sur le Thabor pour se montrer dans Sa lumière cosmique, Il enjoignit aux Apôtres de n’en rien dire « … jusqu’à ce que le Fils de l’Homme soit descendu aux Enfers est ressuscité. » Le SHIN n’est pas dans la lumière d’en-haut, mais dans les profondeurs dans lesquelles nous avons à descendre pour le trouver. Le mot MELEK est aussi à retenir. C’est à cause de lui que le MEM et le LAMED ne devaient pas quitter leurs places de choix, MELEK signifiant le « Roi ». « Malkouth » c’est le Royaume, la dernière Séphira. Les deux dernières lettres, MEM et LAMED sont celles qui déterminent la circoncision et le Roi n’est encore, après toutes ces circoncisions, que celui qui est capable de passer par le trou d’une aiguille comme le chameau. C’est la dernière réalisation de l’homme qui donc, se fait germe. Le Roi est celui qui se refait germe cosmique, qui se fait tout petit. Nous avons étudié le genou, BEREK, avec le symbolisme du corps. BAR que nous retrouvons là, est le grain de blé et aussi le fils. C’est le grain de blé qui doit mourir en terre pour ressusciter. C’est le même mot qui est prononcé BROUK et qui est « la bénédiction ». Pourquoi ? Parce que les deux genoux sont les deux petites couronnes, les rotules qui déjà au départ, promettent la couronne unique en-haut. Le 2 qui est lié au 1, est aussi lié à la terre, car il n’y a pas de bénédiction, de puissance passée à quelqu’un, sans que celui-ci mette genoux à terre. C’est l’homme qui est essentiellement relié par le genou au Ciel et à la Terre. Le genou est aussi lié à une notion de naissance, car lorsqu’au cours de notre vie, nous avons à faire des naissances, elles entraînent souvent des répercussions dans les genoux. Retenons encore le mot DEREV, « le chemin ». Nous y trouvons la racine DOR qui signifie « le cycle », donc la notion du temps. Ce daredare que nous avons traduit par « vitesse ». C’est aussi le mot qui signifie « épine » le temps qui va devenir pour nous une épine en agissant sur le
vieillissement, l’usure, alors qu’il nous est donné pour traverser tous les champs de conscience. Et lorsque le chemin est accompli, c’est la fin des temps, des « cycles ». Passons à présent au MEM final qui s’écrit en carré et qu’il ne faut pas confondre avec le SAMEK, et qui a pour valeur 60. Le MEM vaut 40 et le MEM final 600. Nous retrouvons dans le 40 la notion de « matrice », alors que le 6 est au contraire l’homme droit, le crochet, le VAV, celui qui relie le Ciel et la Terre en même temps que tous les éléments de la Création, et que le 60 représente l’Arbre, ce sur quoi le monde s’appuie. Nous sommes donc loin de la matrice, nous sommes dans quelque chose qui est déjà formé, déjà réalisé. Ce qui était matrice, devient Arbre complet qui, ayant donné toute sa sève, arrive à son épanouissement et a pour valeur 600. C’est pourquoi toute cette connaissance de 666 qui est le MEM final, nous met devant un nombre d’Homme totalement accompli qui est passé par toutes les phases, qui a fini de naître à lui-même, ayant passé par toutes les maternités, toutes les parties et qui entre à ce moment-là dans le Royaume. Le mot EM, c’est « la mère ». Il peut se prononcer de deux manières : IM qui veut dire « avec » et AM qui veut dire « le peuple ». Le peuple non dans sa signification sociale, mais dans celle de masse indifférenciée. L’un assume la maternité, l’autre le peuple. Nous savons tous que la foule, étant inconsciente, est considérée comme dangereuse. Il suffit qu’il y ait un meneur pour qu’elle le suive. Et quand la peur la prend, elle ne se connaît plus, elle devient folle. La foule est liée a l’inconscient, elle n’a pas encore commencé à faire sa descente dans les profondeurs pour pouvoir se contrôler, pour devenir véritablement mûre. Lorsque l’humanité toute entière sera consciente, elle sera en marche. C’est le conscient lié à l’inconscient, puisque c’est un accouchement successif. L’inconscient par rapport à OLAM « le monde » est encore dans une matrice, est encore dans la ténèbre. En ajoutant un LAMED au milieu de EM nous avons ELEM qui veut dire « la vierge » ou « l’homme vierge » au masculin, c’est-à-dire la jeune fille ou le jeune homme encore nubiles. Pour l’Hébreu il ne s’agit pas dé virginité physique, mais essentiellement de cette descente, de ce mariage avec nous-mêmes, ce LAMED encore prisonnier de AM, c’est-à-dire de son inconscient, n’a pas encore commencé à vibrer. Et quand ce mot est prononcé OLAM, c’est « le monde » extérieur qui est encore vierge parce que encore lié au peuple, il n’a pas encore commencé à faire sa naissance dans les profondeurs. Il indique aussi une notion du temps, d’un temps indéfini, qui n’en finit pas et qu’on traduit d’une façon erronée par « éternellement ». L’éternité est transcendante au temps. Il peut y avoir un temps qui n’en finit pas sans être pour cela éternel. L’éternité est une qualité de non-temps. Lorsqu’après la chute Dieu dit « Voici l’Homme est devenu comme l’un d’entre nous pour la connaissance du bien et de son contraire. Empêchons-le maintenant d’avancer sa main, de prendre l’Arbre de Vie, d’en manger et de vivre éternellement », il serait mieux de dire : « … L’Homme est devenu « comme s’il était Un », empêchons-le maintenant d’avancer sa main, de prendre l’Arbre de Vie, d’en manger, de peur qu’il ne vive éternellement ». C’est-à-dire de vivre OLAM.
Dieu va le protéger et le remettre à zéro pour qu’il recommence le chemin qu’il a pris de travers, croyant qu’il était déjà arrivé. Or s’il mange de l’Arbre de Vie il va se figer dans cette position là et ne pourra jamais prendre conscience de son erreur. Il vivra indéfiniment dans le temps sans passer à l’éternité. Il restera toujours vierge. Ce n’est pas une punition de Dieu, mais une protection. L’homme reste AM au lieu de rentrer dans la fonction de EM. Et lorsque nous avons pris conscience d’être AM, le AYIN se transforme en ALEPH et nous commençons tout le travail de EM. Le monde aussi entre alors en vibration et c’est pourquoi il peut devenir, se transformer. Le monde tout entier peut devenir l’épouse. Je vous rappelle que le nom de la lettre MEM est MAÏM, les Eaux… Les Eaux sont la réunion du monde du MI avec le monde du MA. Qu’est-ce qu’entrer dans le MEM final ? Le mot qui s’impose là, c’est SHEM. On ne peut parler du SHIN sans parler du SHEM, « le nom ». Cette pierre précieuse, le SHIN, n’est autre que le Nom, ce que j’appelle le « son-germe » au profond de chacun de nous, au rythme duquel nous sommes modulés et celui qui retrouve ce son devient Dieu, parce qu’il participe au Verbe. Nous sommes là devant le MEM final qui a pour valeur 600 et le SHIN qui a pour valeur 300, ce qui donne 900, la perfection de la Création, l’entrée dans l’Unité, le mariage. Celui qui retrouve son Nom, entre en épousailles. Au deuxième jour de la Genèse, lorsque les Eaux ont été séparées, Dieu les réunit immédiatement par l’étendue qu’Il appelle SHAMAÏM, que nous traduisons par « Cieux », ce qui ne veut pas dire grand chose. SHAMAÏM est au-dedans de nous, ce sont toutes nos terres intérieures, nos champs de conscience. Si les Eaux sont séparées, elles sont aussi réunies grâce au SHIN qui construit le monde du MA, la charnière entre lui et le monde du MA. Qu’est-ce que le mot SHAMAÏM sinon celui qui contient le MI et le Nom, SHEM, toutes nos terres intérieures qui ont le secret du Nom, de ce nom qui diffère à chaque niveau, c’est-à-dire qui a une autre vibration. C’est ce nom qui a le secret de la participation au monde du MI, grâce à laquelle nous allons monter un échelon de l’échelle. Le mot SHEMA, « écoute » découle aussi bien de SHEM que du MEM. En ajoutant un YOD devant SHEM nous avons VAYASEM et là le SHEM devient SOM qui veut dire « place ». Dieu dit en parlant d’Adam : « VAYASEM SHAM » (Sham = là-bas), « Il a sa place là-bas ». Nous n’avons notre place que quand nous trouvons notre Nom. Or nous cherchons notre place au soleil extérieur pour nous sécuriser. Laissons-nous conduire à notre place en nous désécurisant par rapport à un tas de petites volontés. On veut ceci, on veut cela. Non, laissons-nous conduire et là, tout à coup, tout se met en œuvre et on est en sécurité. La lettre PHE veut dire « bouche », donc aussi « la parole » et « la tradition » et le mot PHO veut dire « ici » et SHAM, « là-bas » : Si vous entrez dans la tradition, vous entrez dans votre Nom : SHAM SHEM. SHEMESH, le soleil, est aussi issu de SHEM. Et n’oublions pas de considérer le mot SHALOM, « la paix ». C’est le LAMED qui se met en mouvement jusqu’à ce qu’il ait trouvé son Nom.
Nous sommes dans des guerres intérieures, dans le monde de la dualité où nous avons à intégrer tous ces conflits intérieurs pour aller jusqu’à notre Nom. C’est la paix qui nous est donnée par le Christ qui a intégré tous ces conflits. Cette paix n’a rien de commun avec celle que conçoit notre monde actuel. Rappelons encore le verbe QOM en rapport avec la lettre QOV, « le cordon divin », qui est cette sagesse qui est folie à nos yeux. QOM veut dire « se redresser ». C’est le mot que nous trouvons dramatiquement traduit par « se venger » à la fin du Livre de Caïn. Il ne s’agit pas de vengeance, mais de redressement, c’est le pardon, la résurrection, la possibilité de repartir dans la juste direction. Avec QOM nous avons MAQOM, « le lieu ». Je vous avais dit avec le GUIMEL qui a pour valeur 3 et que j’avais rapproché du troisième jour de la Création, que, lorsque Dieu donne l’ordre aux Eaux d’en-bas de se réunir en un lieu Un, cet ordre divin était représenté par trois mots différents : EL, le nom de Dieu, EHAD l’Unité et MAQOM le lieu qui, à la limite est aussi un nom divin, parce que le dernier lieu, c’est Dieu Lui-même. Le dernier espace ou temps intérieur, c’est YOD-HE-VOV-HE. On pourrait aussi dire que c’est le lieu de la résurrection, de la renaissance. LEHEM, c’est « le pain » qui nous donne le nom de la ville de BETHLEEM. HAM, c’est « la chaleur », c’est aussi CHAM, un des trois fils, le plus mystérieux, de Noé, celui qui fait l’expérience du mystère de l’intimité du Père. Le père, c’est le mythe de l’inconnaissable. Nous pourrions presque traduire LEHEM dont le LAMED du milieu est toujours la direction en avant, vers le but, par l’énergie que nous donne le pain, en le prenant dans un sens immédiat. Mais on peut aussi le traduire au niveau symbolique par le pain de l’Eucharistie, en particulier pour les Chrétiens, quoique le pain ait été un symbole dès avant le Christ. En inversant un peu le mot, ce n’est plus le MEM final, c’est MELEK et c’est le « sel », le « manioc ». Nous voici maintenant au NOUN final qui a pour valeur 700. Nous retrouvons le 7 qui est une plénitude, mais aussi un changement. Et là s’impose le AYIN qui est « le Rien », avec un point en-haut par rapport à la source, à l’œil qui ont le point en-bas. Les deux se rejoignent. YAYIN avec deux YOD, c’est « le vin ». Tout le symbolisme du Vin, dans toutes les traditions, est « porteur de l’Esprit ». On peut donc dire que le NOUN final, c’est le YOD qui s’incarne. Le nom de QAÏN, frère d’Abel, porte en lui le YOD. Tous ces mots sont liés au AYIN et au ALEPH qui vaut 1, au YOD qui vaut 10 et au QOF qui vaut 100. QAÏN, comme QANO, « acquérir », est construit sur la racine QEN qui veut dire « le Nid ». C’est le Nid qui est appelé à mettre au monde le YOD, c’est la partie la plus noble du groupe Caïn-Abel. Et quand Caïn tue Abel, il ne peut plus accomplir son YOD qui va être investi au niveau de l’intellect, au niveau de toutes les constructions du monde extérieur, au lieu de construire le monde intérieur. C’est l’origine de toutes les civilisations qui ne peuvent pas tenir, parce qu’elles sont l’œuvre d’un YOD investi tout à l’extérieur.
EBEN, c’est « la Pierre » qui s’incarne dans le monde, c’est donc le Fils. L’Homme, en tant que Pierre, c’est celui qui a conscience d’être le Fils du Père. C’est pourquoi la pierre est un symbole si fondamental dans toutes les sociétés traditionnelles où, symboliquement, on travaille la pierre, on la polit, on la taille. C’est-à-dire tailler tout ce petit Moi que nous sommes, pour arriver au vrai Moi essentiel qui sera la pierre qu’il va falloir employer à la place des briques (Labenah) dans la construction du Temple. Toute l’histoire de la Tour de Babel est là : « Ils ont pris des briques à la place de pierres ». Il y a un petit mot qui revient trois fois dans l’histoire de la Tour de Babel, c’est AWAH que l’on traduit par « allons », construisons une Tour, faisons-nous un Nom… mais à l’extérieur ! Le ALEPH a disparu, car si c’était encore AWAHA, ce serait l’amour dans lequel communieraient les hommes. Le mot AMEN est inséparable du mot EVEN. Dans AMEN il y a « Mère ». Certains Evangiles le traduisent par « En vérité, en vérité, je vous le dis… », ce n’est pas une traduction adéquate. AMEN n’est pas un mot, mais une idée, celle d’être en parfaite adéquation avec le plan du mystère. C’est entrer dans le mystère. C’est un mot intraduisible. On le rapproche du OM des Hindous, du Son Primordial qui en est beaucoup plus proche. Nous ne savons plus prononcer le mot AMEN. Il y a des textes qui disent que dans la Synagogue d’Alexandrie qui contenait des milliers de personnes, quand tous prononçaient AMEN (ou OMIN), on avait l’impression que la Synagogue allait s’effondrer, qu’elle entrait elle-même en vibration. Le mot MINE, c’est « la Provenance » et, quand il y a un YOD au milieu, il signifie « l’Espèce ». C’est le moule du MI qui se fait NOUN final, c’est le monde du MI qui se plante en terre, qui s’incarne. Passons au PHE final qui vaut 800. Graphiquement c’est un PHE qui, au lieu de revenir sur luimême, se prolonge par en-bas. Le PHE, c’est « l’ouverture », c’est la bouche et avec le PHE final, c’est l’ouverture en tant que libération, l’ouverture totale. Le premier mot qui s’impose, c’est ALEPH, la première lettre de l’alphabet. Dieu se fait « bouche cosmique », Dieu entre dans la Création par la tradition. ALEPH est la lettre la plus étonnante, puisqu’elle est l’animal cornu qui est toute l’information que nous recevons d’en-haut et cette corne par laquelle arrive toute l’information, c’est la future couronne. Dans ALEPH la corne devient couronne. RAPH, c’est « le médecin » et RAPHO, c’est « je guéris ». RAPHAEL, c’est le « Médecin divin ». C’est aussi la permutation du mot PHAR qui est « le Taureau », qui est cette racine qui exprime la fécondité. Dans nos ports le phare apporte la lumière. RAPH : REICH et PHE final, 200 + 800 = 1000. Le médecin, c’est celui qui amène l’homme à réaliser le 1000 dans lequel il est guéri. Il n’y a qu’un grand problème dans le monde, c’est de résider dans le 1000. Tous les autres sont de faux problèmes. Dans le même sens, le « Séraphin », SARAPH, c’est celui qui « brûle ». Lorsque, dans le désert, les Hébreux sont piqués au palais par ces petits serpents venimeux, sur la demande de Dieu, Moïse construit le Serpent d’Airain qui est le SARAPH. C’est aussi celui qui guérit, c’est
contenu dans son nom. C’est déjà l’ombre de la Croix qui est là tout en profil, puisque le Christ va s’identifier à ce SARAPH. SARAPH contient les deux lettres de SOPH qui est « la limite ». Si nous voulions guérir il faut entrer dans une limite, changer de têtes successivement pour finalement poser la dernière tête sur nos épaules. Et c’est pour cela aussi que le verbe YOSOPH signifie « augmenter ». Si tu veux augmenter, grandir, il faut savoir entrer dans des limites. La Loi dit que si nous voulons évoluer, il faut nous engager, faire des choix, YOSOPH donne aussi le nom de Joseph. C’est celui qui préside à l’augmentation et qui, en même temps, observe une limite. C’est Joseph, l’époux de la Vierge qui surveille la matrice et c’est aussi Joseph d’Armathie qui veille sur le tombeau qui est aussi une matrice et aussi une résurrection. Joseph, fils de Jacob, fait entrer les Hébreux en Egypte où ils sont dans une limite, étant esclave des Égyptiens. Et YAM SOPH, la Mer Rouge, qui est au bout de leur expérience en Egypte, se nomme en hébreu la Mer des Joncs, la Mer de la Fin, c’est aussi le mot que l’on retrouve avec AYIN SOPH, le « Rien » c’est-à-dire l’infini, l’Unique. OPH, « l’oiseau » est un très beau mot. Lorsque vous sortez des grandes profondeurs du AYIN, de la Ténèbre, c’est l’envol, c’est la libération, PHE. Le TSADE final qui, dans la dizaine a la valeur 90, vaut 900 lorsqu’il est final. C’est l’hameçon qui plonge dans les profondeurs pour aller chercher le dernier élément qui va faire l’Unité. C’est un peu comme le 9, la perfection à la veille du 10, l’Unité conquise qui implique la perfection. Avec le TSADE final nous retrouvons la même idée. Le mot qui me vient le plus à l’esprit c’est ERETZ, « la Terre ». Il figure dans le tout premier verset de la Genèse. C’est aussi lui qui, après le second jour de la Création, lorsqu’il y a séparation des Eaux d’en-bas des Eaux d’en-haut, et qu’il y a, le troisième jour, séparation du sec et de l’humide, représente le Sec. La Terre, c’est le sec, mais en même temps elle est inséparable de l’humide ; afin qu’il y ait fécondité. La fécondité naît du mariage de toutes nos Terres intérieures fécondées par nos énergies. Dans ERETZ nous trouvons les deux lettres de la lumière et, avec TSADE, l’opposé, les grandes profondeurs. Ce sont ces Terres encore cachées dans les profondeurs qu’il faut aller chercher à l’aide de l’hameçon, afin de les amener à la lumière. QETZ veut dire « la Fin » dans le sens d’accomplissement. Si d’ailleurs vous mettez un YOD au milieu de QETZ, cela donne GAYITZ, « l’été ». Un autre mot fondamental est ETZ, « l’Arbre ». C’est l’autre côté de la source AYIN, c’est ce qui va sortir des racines, qui va s’élever de la Terre et donner des feuilles, des bourgeons et des fleurs. Nous arrivons à présent à l’ALEPH final qui est vraiment « la Couronne ». Quand RATHO (guérir) qui signifie aussi le destin de l’humanité malade, se termine par un ALEPH, c’est « je guéris ».
Le verbe MAHA, c’est « remplir », c’est la plénitude qui fait suite à toutes ces circoncisions. Car il n’y a pas de plénitude sans circoncisions, sans tailles. MELAK, avec ALEPH, ce n’est plus le Roi, c’est « l’Ange ». C’est celui qui va apporter toutes les énergies pour en fin de compte, « remplir ». BARAN, les trois premières lettres de BERESHIT, c’est « créer ». Ainsi la Création comporte son achèvement. Tout est dit dans le mot « créer ». C’est le grain de blé qui va mûrir en terre, et son achèvement. BA, « pénétrer », est le retour de la Création toute entière à son ALEPH final, qui est aussi l’avenir, le devenir. AV, dans ce sens-là, c’est le Père, c’est-à-dire l’ALEPH qui pose l’altérité, l’autre et l’autre qui retourne vers l’UN, la pénétration, la couronne finale, la Création couronnée
L’arbre de vie – 1 Lundi 21 juin 2010 Par milena
Par Annik de SOUZENELLE (Revue Panharmonie. Le titre est de 3e Millénaire
No
166.
Mars
1977)
1: la symbolique du corps
Compte rendu de la réunion du 13.1.1977 Ce dont nous parle Annik de Souzenelle a des prolongements dans toutes les traditions et évidemment dans la tradition occidentale. Elle nous permet, grâce à une juste traduction des textes hébreux et grâce à une compréhension tout à fait exceptionnelle de leur symbolisme, de découvrir une concordance extraordinaire entre les trois plans de notre existence, physique,
mental„ spirituel, que palier par palier nous avons à franchir pour remplir le rôle qui nous est assigné sur terre. Nous découvrons dans son analyse une métaphysique insoupçonnée de la plupart, et des analogies frappantes entre les différentes traditions qui sont issues les unes des autres et qui enrichissent le champ de notre connaissance. C’est donc l’étude du corps qu’aborde notre animatrice, de ce corps qui, pendant des siècles, a été nié et qui, à présent s’impose et donne lieu à de nombreuses études qui le réhabilitent. Ce sujet, nous dit-elle, s’est en quelque sorte imposé à elle. Après avoir été anesthésiste et s’étant « recyclée », elle étudiait la théologie et la psychologie, lorsqu’elle fut mise en contact avec un professeur d’hébreu qui lui proposa de lui donner un enseignement sur la Qabbale, ce qu’elle accepta avec joie, parce que cela lui permettait de remonter aux sources de notre civilisation. Et, au cours de ses recherches, elle s’aperçut qu’entre les trois disciplines qu’elle étudiait, il y avait un lien, une unité. Elle se mit donc à l’étude de l’Arbre des Séphiroth, l’Arbre traditionnel, mythique des Hébreux, qui trace le rythme très rigoureux de la manifestation des énergies divines. Et un jour, en méditant sur cet Arbre, elle a vu se superposer à lui en filigrane, le corps du Christ en Gloire, tel qu’on le voit dans nos basiliques romanes. Il s’est produit en elle une sorte d’identification de cet Arbre des Séphiroth avec la fresque romane. Cela se confirma par la lecture dans le Sepher Yezira que l’Arbre des Séphiroth était le dessin du « Corps Divin » à l’image duquel est dessiné l’homme. A partir de ce moment, toutes les fois que les organes ou les membres du corps étaient mentionnés dans un mythe, de quelqu’origine qu’il soit, tout prenait un sens, parce qu’elle voyait à quel niveau se situaient ces organes, ces membres et à quoi ils correspondaient par rapport aux énergies divines. Plus tard elle s’aperçut également combien en psychothérapie ce schéma des énergies divines de l’Arbre des Séphiroth avait une résonance étonnante avec les êtres. Avant d’aborder l’étude de cet Arbre, il était nécessaire de mettre bien en évidence ce que Annik de Souzenelle entend par « symbole ». Symbole vient du grec et signifie « lancer ensemble, lancer avec… ». Or, rassembler deux éléments implique qu’ils étaient séparés et c’est cette conception qui a été la clef de toute la base de l’étude des symboles de la Genèse. Dans la Genèse, le deuxième jour il y a séparation : les Elohim que les Chrétiens appellent le « Grand Conseil », séparent les eaux primordiales dont le nom hébreu est Maim. Ces eaux semblent être une énorme matrice contenant en potentialité toute la Création. Et cette Création à partir du premier jour va s’effectuer à travers une série de séparations. Dans le mot « Maim » est contenu « Mi », représentant les eaux d’en-haut, et « Ma », représentant les eaux d’en-bas. Nous trouvons la racine mi dans bon nombre de mots, tels mirage, mystère, etc., et la racine ma dans matière, manifestation, etc.
Nous n’entrerons pas dans les précisions que nous donne A. de Souzenelle, qu’il nous suffise de dire que le monde d’en-bas, Ma, est le reflet du monte d’en-haut, Mi. Chaque élément du monde de Ma est l’image d’un archétype du monde de Mi, il est le symbole de son archétype dont il a été séparé lors de la séparation des eaux. Et cela est si bien exprimé dans la Bible, que nous voyons Dieu, après avoir séparé, relier aussitôt les deux mondes par ce qu’Il appelle « l’étendue », en hébreu : « Shamaïm ». Séparer n’est peut-être pas le mot exact, mieux vaudrait dire « distinguer ». Le monde du Mi qui contient en potentialité toute la Création, va s’exprimer dans un grand expire divin à travers les sept jours de la Création pour former le monde du Ma. Si donc nous touchons un élément de la Création en-bas, nous touchons en-haut à son archétype qui nous répond. Les Hébreux n’hésitent pas à parler du monde divin, des Elohim, nom dans lequel nous retrouvons la racine him c’est-à-dire mi, et qu’ils appellent « l’homme d’en-haut ». Et Adam, dans lequel nous retrouvons la racine ma, est « l’homme d’en-bas », appelé à sa ressemblance avec les Elohim c’est-à-dire à les « rejoindre ». De même qu’Adam est le fond de l’expire divin, étant l’image de Dieu ; de même tous les éléments de la Création ont pour vocation, comme dans un inspire de revenir à leur origine en remontant tous les échelons allant de la base du Ma à la jonction avec le Mi. Et ces échelons ne sont autres que les sept jours de la Création. Avant d’aller plus loin, posons-nous quelques questions. Qu’est-ce que le mythe ? Le mythe est un petit récit à notre niveau de signification plus ou moins satisfaisante, qui, en aucun cas, n’exprime en soi quelque chose, mais qui nous invite dans sa profondeur pour y trouver ce qu’il signifie. Et ce qu’il signifie se passe dans le monde du Mi, qui ne nous est pas immédiatement transmissible. Car si nous étions directement en face de la réalité du monde du Mi, nous ne pourrions pas le supporter, nos catégories mentales n’étant pas faites pour l’appréhender. L’histoire des hommes que nous vivons tous les jours a elle aussi sa profondeur, sa couche mythique, sa signification que nous pouvons déceler si nous pénétrons dans notre être profond, dans le Mi que nous portons en nous. Les exégèses sont d’accord pour dire que les récifs bibliques sont mythiques jusqu’au Déluge et, qu’à partir de ce moment-là ils contiennent une couche historique. Mais celle-ci aussi a sa couche mythique. Annik de Souzenelle nous présente à présent le schéma de l’Arbre des Séphiroth, composé d’un axe central surmonté d’un triangle. Plus bas sur l’axe deux autres triangles renversés. Par des points elle marque l’emplacement de dix Séphiroth (au singulier Séphira).
Qu’est-ce qu’une Séphira ? C’est un contenant dans lequel se déversent les énergies divines, semblables à l’eau s’écoulant dans des vasques successives. Il n’est pas exact de dire énergies divines, car le Divin est énergie. Il se manifeste à travers dix énergies, dix étant le symbole de l’Unité. Il y en a d’ailleurs plus de dix, les Hébreux nous apprenant qu’au-delà de la première Séphira en-haut, il y a en trois qui sont nommées, mais qui ne sont pas connues, qui ne se manifestent pas. Elles correspondent à des noyaux supérieurs de l’homme. La première est nommée l’Ayin, qui signifie « rien ». Tout vient de rien. Après l’Ayin, la seconde s’appelle l’Ayin Soph, soph voulant dire « limite » Ce « rien-limite », c’est l’infini. La troisième, juste au-dessus est l’Ayin Soph Aor, l’infinie Lumière. Aor : lumière. Ces trois Séphiroth restent dans l’inconnaissable. Et c’est ainsi qu’Annik de Souzenelle nous analyse et nous nomme toutes les Séphiroth partant de celle du sommet du triangle supérieur qui s’appelle Kather, la couronne de la triade supérieure avec Hochmah, la sagesse et Binah, l’intelligence. Cette triade se reflète une première fois dans le premier triangle renversé et une seconde fois dans le dernier et toutes les Séphiroth qui ont ici leur siège, sont appelées les Séphiroth de la Création, aux sept jours de laquelle elles correspondent. Et, finalement nous arrivons au bas de l’Arbre où la dernière Séphira, Malkuth, représente le Royaume. Si, au sommet le Roi est couronné, le Royaume, lui, est à l’opposé.
Les Hébreux nomment aussi la Séphira du haut: le Roi, et la dernière en-bas, la Reine, ou la Vierge d’Israël. Pourquoi ? Parce que toutes les énergies se déversent d’en-haut vers le bas. Et toute la Création qui va être contenue dans Malkuth, devra pour épouser le Roi, remonter les degrés énergétiques de l’Arbre, en-haut duquel la Vierge sera couronnée, ainsi que le disent les Mystères Chrétiens. Mais cet Arbre symbolise aussi le corps de l’homme. Les Hébreux ont un dessin traditionnel sur lequel on voit l’homme d’en-haut et l’homme d’en-bas qui sont inversés et dont la tête de l’un est à la place des pieds de l’autre. En effet, si nous prenons cet arbre dont les racines sont enhaut, il va entièrement fleurir en-bas, et cette floraison, c’est toute la Création. L’homme, tel qu’il est, prend ses racines à partir de cette floraison et il va remonter pour s’épanouir en-haut. Nous avons donc bien ces deux hommes renversés. L’Arbre est structuré sur des éléments horizontaux et verticaux, les premiers sont le triangle supérieur qui se reflète par deux fois et fournit à ce niveau un quadrilatère qui tient ensemble la base de l’Arbre. Les structures verticales sont essentiellement dans l’axe central, le « sentier » du milieu et les deux sentiers latéraux que nous pouvons, en pensée, prolonger vers le haut et le bas. Dans le récit biblique l’Arbre a été planté au milieu de l’Eden, qui est un jardin. Or toute terre, jardin ou non, est symbole d’état intérieur. Il nous est dit qu’il est deux arbres, celui de la vie et celui que nous appelons couramment de la dualité ou de la connaissance du bien et du mal. Ce dernier terme est mal traduit car il signifierait que le mal fasse partie de la Création, ce qui serait absurde. La traduction juste est celle de « Connaissance du bien (ce qui est bon) et de son contraire ». Le mot « bon », vient d’ailleurs ponctuer chaque jour de la Création. La perfection est un état qui implique un arrêt, une mort. On ne peut aller plus loin. Or, si nous disons que Dieu est parfait, nous l’arrêtons totalement, nous le limitons même. Ainsi Dieu va-t-il se faire connaître à travers son parfait et son contraire. Il ne peut être ni perfection absolue, ni mouvement absolu, car dans ce dernier cas il serait dans une continuation qui impliquerait une non-perfection. Il est donc à la fois l’immobilité absolue et le mouvement absolu, l’être et le nonêtre, etc. C’est cela l’Arbre de la dualité, que nous avons appelée le « mal » ce qui est un contresens. L’Arbre de vie, c’est la colonne vertébrale, c’est la kundalini, les énergies qui passent et les deux pôles du corps, sont les deux pôles de l’unique Réalité qui va se manifester à travers ; une chose et son contraire. Cette alternance des opposés, nous la trouvons de manière précise dans les deux premiers mots de la Genèse: Berechit et Bara. Berechit : dans le Principe, Bara : qui est créé. En fait Berechit, c’est Barachit : Bara : créé, Schit : s’arrête. Il y a déjà l’annonce de ce mouvement de création et d’arrêt, que nous trouvons aussi dans l’histoire de Loth.
Celui-ci quitte Sodome et Gomorrhe et il est dit que sa femme, regardant en arrière est transformée en statue de sel. En hébreu c’est tout à fait différent. Loth a pour but d’aller sur la montagne, mais il n’a pas la force d’y aller d’un seul trait. Et cet arrêt est traduit par sa femme, le féminin en lui qui, dit la Bible, « ne regarde pas en avant ». Le sel, c’est la sagesse. Elle est un bloc parce qu’elle s’arrête, car il y a une nécessité de s’arrêter pour reprendre des forces, son souffle, pour toute une gestation nouvelle, la gestation est liée au féminin, tandis que la force est liée au masculin. Notre corps aussi, par ses deux côtés, va nous exprimer sa dualité et tout le programme qu’il va nous proposer, consistera de faire de cette dualité une unité. Et pour ce faire, l’être de sa naissance à son apogée, aura à franchir trois étages allant de Malkuth jusqu’au sentier de la Gloire et de la Victoire. La vieillesse alors devient une apothéose. Avec Annik de Souzenelle, nous suivons ce sentier. Elle nous donne les symboles et significations de ces trois étages séparés par des « portes » que nous avons à franchir et qui sont autant de morts et de renaissances. Nous ne pouvons pas ici donner toutes les précisions si intéressantes et si instructives. Nous dirons cependant qu’Annick de Souzenelle nomme le premier étage celui de l’ « Avoir » et le deuxième celui de l’ « Etre », celui par lequel on entre dans la véritable incarnation qui est la véritable naissance. A cet étage l’être cherchera à faire de la dualité une unité. Et puis, ensuite, pour arriver au troisième étage, il faut franchir ce que toutes les traditions nomment : la Porte des Dieux. L’être va mettre au monde l’enfant divin qu’il est en germe. Il va vivre sa vraie fête que, à ce niveau-là, symbolise la Jérusalem Céleste, la Terre Promise. Il n’y a plus de dualité, l’Unité est totalement recouvrée. L’homme ainsi s’élève d’abord, construisant au premier étage les dix premières vertèbres, les cinq lombaires et les cinq sacrées qui nous font retrouver les dix plaies d’Égypte, les dix années des Mystères grecs, etc., puis au deuxième étage il lui faudra structurer les douze vertèbres dorsales (voir les douze travaux d’Hercule, les douze mois de l’année, les douze Apôtres, les douze signes du zodiaque), et enfin, au dernier étage, les sept vertèbres cervicales qui vont correspondre au septénaire apocalyptique. Et à chaque passage d’une vertèbre à l’autre, l’être vivra une petite mort et une petite renaissance, car comme le disait l’Apôtre Saint Paul : « On meurt et on ressuscite je ne sais combien de fois par jour ! » Et pour terminer, Annik de Souzenelle nous parle du pied, du rein et de l’oreille qui ont tous les trois la forme d’un germe et qui sont reliés les uns aux autres par une ligne droite. Il y a entre eux une correspondance étroite, tout est inclus dans chacun de ces organes. Les pieds vont être le point de départ de toutes les énergies. 2: le Tétragramme
Compte rendu de la réunion du 10.2.1977 A. de Souzenelle fait la récapitulation de ce qui avait été dit les fois précédentes. Nous en donnons quelques remarques saillantes : Tout est en nous. Nous avons en nous tous les symboles et tous les mythes, nous sommes habités par la connaissance, mais cette connaissance est en grande partie voilée. Il semblerait que l’embryon, le germe qu’est l’enfant dans le ventre de sa mère, soit totalement connaissant. Et puis cela s’en va. Quand ? C’est difficile à dire. Il y a perte totale de la mémoire et notre vie va consister à nous souvenir. Puis elle passe à l’étude des structures verticales de l’Arbre des Séphiroth. Elles sont au nombre de trois — nous retrouvons toujours le nombre 3, essentiel dans toute structure : la colonne ou le sentier du milieu, selon la dénomination des Hébreux, et les deux sentiers de chaque côté que nous imaginons se prolonger vers le haut et vers le bas. Mais nous allons découvrir autre chose encore, à savoir ce que les Hébreux appellent le Tétragramme divin, c’est-à-dire le nom divin, Yod-Hé-Vov-Hé que nous appelons très mal à propos Yahvé ou Jéhovah, et qu’il est sacrilège d’employer. C’est pourquoi je ne me servirai plus de ces deux noms, moi non plus, dit-elle. Ils l’appellent ou plutôt ils reprennent chacune des lettres ou bien ils les remplacent par un autre nom. La plupart du temps ils disent Adonaï. Et pourquoi ce mystère autour de ce nom ? Nous ne sommes pas capables de l’appréhender entièrement et de connaître la redoutable énergie qu’il contient. Car chaque lettre est une énergie. A chacun de ces sentiers, à chacune de ces séphira correspond une lettre qui est une énergie redoutable. Les Hébreux avaient encore conscience de cela et ils ne prononçaient pas un nom à la légère, de même qu’ils ne donnaient pas à un enfant un nom à la légère. Le Tétragramme mystérieux n’était prononcé qu’une fois seulement par an par le Grand Prêtre dans le Saint des Saints, selon une modulation qui s’est complètement perdue. Et cette qualité vibratoire était telle, que les Hébreux s’enfuyaient au loin en faisant un tintamarre terrible pour ne pas l’entendre, parce qu’ils avaient peur de mourir. Et A. de Souzenelle nous rappelle ce que les Hébreux disaient à Moïse lorsque la parole divine était clamée sur le Mont Sinaï : « Parle-nous toi, mais que Dieu ne parle pas, parce que s’Il parle, nous mourrons. » Si je vous parle de ce Tétragramme, c’est parce que je crois qu’il est infiniment lié à l’homme et que l’Arbre des Séphiroth n’en est que le développement. Le quatre est lié au symbolisme de la Création par rapport au trois qui est lié au Divin. Dans le contexte hébraïque la plupart des mots sont trinitaires. Et voilà ce Yod-Hé-Vov-Hé qui arrive avec quatre lettres pour la première fois, dans ce qui est appelé la « Seconde Genèse », après les
sept jours de la Création que, à la fin de chacun, Elohim regardait en s’exclamant : « Comme cela est beau ! » et à la fin du sixième jour, c’est-à-dire la fin de la Création de l’homme : « C’est vraiment très beau ! » Le septième jour, celui du Sabbath, Dieu se retire au cœur de Sa création et ne s’impose plus : c’est à toi de jouer maintenant. Les artistes ont fait l’expérience que lorsqu’ils commencent une œuvre, celle-ci devient en un certain sens une énergie autonome, elle s’empare de l’artiste et crée avec lui. C’est cela qui se passe au niveau de la Seconde Genèse. Ce ne sont plus les Elohim, les énergies créatrices, mais Yod-Hé-Vov-Hé qui est lié à la Création et plus spécialement à l’homme. A la naissance de Caïn, Ève s’écrit : « J’ai acquis un homme avec l’aide de Dieu ! » il y a un jeu de mot entre acquérir et Caïn, la Bible est constellée de jeux de mots, car « le Saint, bénit soit-Il » comme disent les Hébreux, joue avec les lettres de l’alphabeth. Évidemment les traductions n’en tiennent pas compte. Et c’est une erreur de traduire ce petit mot qui relie Caïn à Dieu par « avec l’aide de » parce que ce petit mot « eth » correspond l’Alpha et a l’Oméga, c’est un mot qui ne se traduit pas. Il faudrait dire : « J’ai acquis un homme qui est alpha de structure (de commencement, si on veut) et qui doit devenir la dernière lettre de l’alphabeth, oméga, tout son devenir, toute sa vocation, qui doit devenir Yod-Hé-Vov-Hé. Il doit atteindre la ressemblance, remonter toute l’échelle, ce cordon ombilical qui sépare et unit en même temps les archétypes et le monde de la manifestation. Le premier homme après la chute est encore l’image de la ressemblance, c’est dans sa conscience seule qu’il est coupé du monde divin. Comme disait Adam dans l’Éden : « J’ai entendu Ta voix, mais je ne Te vois plus. Je suis dans la crainte. » Bientôt il n’entendra même plus, mais il reste fondamentalement à l’image de la ressemblance. Ce Tétragramme s’inscrit dans l’Arbre des Séphiroth. A chaque lettre correspond un nombre qui représente toute son énergie. Le Yod qu’il est tentant de mettre tout en haut, représente 10, chacun des deux Hé de chaque côté 5, et le milieu qui relie les deux côtés ensemble, Vov, de même que le haut et le bas, représente le nombre 6. Le Yod-Hé-Vov-Hé est aussi l’Épée à deux tranchants, qui tue et vivifie, selon qu’on est capable ou non de recevoir la parole. C’est une épée de feu, mais aussi celle de la dualité. Le mot hébreu veut dire contradiction. Nous retrouvons en ramassé dans Yod-Hé-Vov-Hé tout le développement de l’Arbre des Séphiroth. Le Vov qui est le sentier du milieu et qui correspond à 6 — souvenez-vous que l’homme a été créé le sixième jour — est comme l’homme, la conjonction, il réunit en tant que microcosme tous les éléments de la Création en même temps qu’il est aussi le microthéos,
réunissant le haut et le bas. Le Yod, la tête qui est en haut et qui a pour valeur 10, c’est l’unité reconquise et les deux Hé de chaque côté, en hébreu hé veut dire souffle, représentent deux fois cinq, égal 10. Dans le yoga occidental les deux mains se joignent au-dessus de la tête, symbolisant ce deux fois cinq. D’autre part, ces deux Hé, ces deux côtés symboliques du corps, sont notre souffle fait de deux pôles positif et négatif, que nous appelons les pôles de la contradiction ou de l’antinomie et de l’opposition. Tout ce qui va être créé le sera sur un mode binaire : la lumière et les ténèbres, les eaux d’enhaut et les eaux d’en-bas, la séparation du sec et de l’humide, etc. Nous-mêmes nous sommes créés sur un mode binaire, prenez le rythme cardiaque, diastole – systole, inspire – respire, etc. A l’intérieur du Jardin d’Éden — n’oublions pas que ce jardin est notre être intérieur — sont les deux Arbres qui nous structurent : l’Arbre de Vie et l’Arbre de la connaissance du bien et du mal, dont le nom donne lieu à un énorme malentendu, à un malentendu dramatique, qui nous a conduits dans l’impasse où nous sommes actuellement. Comme si le mal était en Éden. Le mot « bien » en hébreu est Tov, la perfection atteinte, elle ne peut aller plus loin. A la limite c’est la mort, l’arrêt. Il faut donc pour continuer la vie briser cette perfection en introduisant un élément nouveau qui va lui faire vivre son contraire pour pouvoir passer à un autre terme qui sera une nouvelle genèse qui, à son tour atteindra une nouvelle perfection, et ainsi de suite. En hébreu nous avons les mêmes lettres, dans les mots perfection et mort, c’est la même énergie. Au bout de chaque perfection acquise il y a un recommencement qui se traduira à chaque étage par l’image d’un germe. Au premier niveau le pied a la forme d’un germe. Puis lorsque le premier étage sera franchi par l’enfant et qu’il se trouvera devant une nouvelle porte, le rein symbolisera le germe dont il a également la forme. Et quand enfin l’homme ira frapper à la Porte des Dieux, il trouvera l’oreille qui a elle aussi la forme d’un germe. L’Arbre de la connaissance du bien et du mal n’a donc rien à voir avec le mal. Il est l’Arbre des deux rôles de la Réalité qui se traduit au niveau de la manifestation et de notre expérience par des contraires qui constituent l’élément dynamique et déifiant de la vie. C’est cela qu’expriment les deux côtés de notre corps. Et l’enfant quand il va naître, va se trouver en face de ces contradictions qu’il va devoir intégrer. Toute sa vie va consister à vivre ces contradictions. Et un jour il prendra conscience que la vie ne consiste pas à s’opposer, à combattre, mais à épouser, à saisir, à vivre avec et ce sera alors son entrée dans le second étage.
Question : Doit-il s’abandonner ou doit-il par une action consciente et volontaire aller vers l’épousailles ? Réponse : Le dynamisme à introduire est beaucoup plus dans une conscience et une attitude intérieure que dans la lutte. Toutes les traditions parleront de l’abandon qui est quelque chose de très conscient, qui n’a rien à voir avec le laisser-aller. Conscience d’être, mais pas volonté. Celleci joue au premier étage, ensuite c’est une vigilance active, une ouverture totale. Nous verrons plus tard que symboliquement le mariage du père et de la mère, de l’homme et de la femme, à ce niveau-là, n’a aucunement pour but la procréation de l’enfant qui lui, est quelque chose de béni et générateur de famille. Mais c’est la construction de chacun pour atteindre à la dimension de l’unité. C’est le véritable but de tout mariage. C’est par leur qualité d’être et non par ce qu’ils vont lui apprendre que les parents auront par identification à aider l’enfant à former ce sentier, sa colonne vertébrale. Et quand il passera la première porte, il va continuer à se structurer, mais non pas dans l’ignorance, mais dans la conscience que c’est un mariage à faire, une intégration de pôles contraires pour, au niveau de la tête, vivre l’unité conquise. Toutes les traditions nous rendent compte de cela. Étant chrétienne, je m’arrêterai à la tradition chrétienne dans laquelle cette trilogie des deux côtés et du sentier du milieu est vraiment vécue. Nous pouvons identifier cette colonne du milieu à la personne du Christ. Diverses personnes vont venir se placer de chaque côté de cette colonne du milieu et nous verrons les deux pôles de la dualité se vivre d’une façon étonnante. Nous verrons d’abord autour du Christ les deux personnages que sont Juda. L’un qui est le quatrième des tribus d’Israël (le Christ est né de la tribu de Juda), et puis le Juda de la main duquel il va mourir. Juda est un nom très proche de Yod-Hé-Vov-Hé avec un daleth en plus. Le daleth a pour nombre 4 et symbolise l’incarnation. Entre ces deux Judas, le Christ qui est vraiment Yod-Hé-Vov-Hé, assume son incarnation. L’un et l’autre sont nécessaires à l’histoire, Juda qui préside à la naissance et Juda qui préside à la mort. Cela n’a absolument rien à voir avec le bien et le mal. Nous aurons après les deux Joseph, l’époux de la Vierge et Joseph d’Arimathie, l’un veillant sur la matrice de l’essence, l’autre sur la matrice du tombeau. Entre les deux la vie du Christ. En hébreu le nom Joseph veut dire augmenter, ajouter. En effet toutes naissance et mort sont une augmentation, une élévation. A chaque moment nous mourons dans une épreuve et nous naissons à la sortie de l’épreuve.
Lorsque le Christ est sur la croix il y a les deux larrons, celui qui dit : « Souviens-toi de moi » et l’autre qui meurt. C’est le symbole de toute l’humanité, les deux pôles de la rigueur et de la miséricorde, l’un qui demande le souvenir et l’autre qui vit les rigueurs de la mort. Au pied de la croix il y a Jean et la Vierge, féminin et masculin. On pourrait citer encore beaucoup d’exemples, mais il y en a un sur lequel il faut revenir. Ce sont les deux Jean, Jean-Baptiste et Jean l’Évangéliste qui vont incarner Janus que les anciens adoraient, qu’ils représentaient avec deux visages sous la forme d’une seule tête, un visage jeune et un visage de vieillard, le passé et l’avenir. La seule tête qui n’était pas représentée était celle du présent, car le présent est insaisissable. Ce troisième visage est incarné par le Christ qui est le non-temps, l’intemporel. Et cela nous remet sur la voie capitale pour la compréhension de notre corps, à savoir que notre colonne vertébrale, ces vertèbres que nous allons construire les unes après les autres, nous obligent à vivre l’instant. Pourquoi ? Parce que nous sommes pétris d’absolu. Le drame c’est que nous sommes toujours à courir après le bonheur. Si nous ne savons pas tout arrêter et vivre la qualité de l’instant en nous greffant au monde du Mi, nous ne trouverons jamais le bonheur. Et A. de Souzenelle cite le mythe de Chronos qui détrôna son père Ouranos, dieu du ciel, ce qui veut dire qu’il coupa l’homme de la conscience divine et le fit vivre dans le temps dont chaque seconde est mangée, comme Chronos mangeait ses enfants, sauf Zeus qui fut sauvé par sa mère Géa (la terre) à l’aide des Cyclopes à l’œil frontal, l’œil de la connaissance, qui vont reconquérir le trône divin. Cela va être admirablement vécu par le Christ et les deux Jean. Jean-Baptiste, le vieil homme, revêtu de la tunique de peau, celui dont la tête va être coupée comme nous aurons à couper toutes nos fausses têtes et Jean l’Évangéliste, dont la vraie tête a reposé sur la poitrine du Christ. Il est l’homme vert, celui qui a revêtu la tête et qui ne doit plus mourir. Une question : D’après tout ce que vous nous dites, il semblerait que les noms aient été dictés par une inspiration « connaissante ». Réponse : Les lettres sont des nœuds d’énergies, des archétypes, des vibrations d’où sortiront les mots. Question : Mais qu’est-ce qu’il y a derrière ces lettres ? Réponse : Le cordon ombilical représenté par le sentier du milieu continue à nous informer, à moins que nous nous coupions du monde des archétypes. Compte rendu de la réunion du 10.3.1977.
Après avoir parlé des structures verticales du corps nous abordons aujourd’hui la base de la colonne verticale, c’est-à-dire le pied. Mais auparavant A. de Souzenelle nous rappelle que le mythe de la chute représente la coupure avec l’information supérieure, avec cette unité qui informe tout le corps. Nous sommes un peu comme un corps sans tête. Notre animatrice insiste beaucoup sur la vie intra-utérine de l’enfant où l’enfant reçoit toutes les vibrations de la mère en même temps que les siennes propres. Il va y avoir une rencontre de ces deux pôles qui vont assurer son équilibre et lui donneront déjà une certaine vie intérieure. Nous avons déjà par ce vécu dans le ventre de la mère, contact avec les archétypes et nous sommes préparés à rentrer petit à petit dans le monde de la création et de la dualité. Tout l’Arbre est contenu dans le germe et selon la formation intérieure de l’enfant, celui-ci va être appelé à pousser, a devenir un arbre de telle ou telle qualité. Il y a évidemment une grande part d’hérédité. Cet arbre qui est appelé à se développer, c’est l’homme. Il y a entre l’homme et l’arbre une complémentarité extraordinaire, ne serait-ce que par l’oxygène et le gaz carbonique. L’homme, en respirant rejette le gaz carbonique qui va être pris en charge par l’arbre qui va lui renvoyer de l’oxygène, etc. De plus la molécule qui donne à l’arbre la couleur verte et celle qui donne au sang la couleur rouge à une nuance près, c’est qu’il y a un élément fer dans le sang et un élément magnésium dans la chlorophylle. Beaucoup de passages dans les Livres Saints d’Orient et d’Occident expriment cette analogie. Lorsque le Christ guérit l’aveugle, celui-ci s’écrit : « Je vois les hommes, ils sont comme des arbres qui marchent ! » Nous allons voir l’homme rouge devenir l’homme vert et cet homme vert est symbolisé par l’arbre vert de la forêt. Ce n’est pas par hasard que lorsque passe le Christ, Zachée est en haut de l’arbre. Les disciples l’expriment : « C’est parce qu’il est de petite taille et qu’il a voulu regarder passer le Christ et qu’il est monté en haut de l’arbre. » Et ce n’est pas non plus par hasard que le soir le Christ a voulu faire sa demeure chez lui. Il symbolise l’homme qui a monté tout son arbre, c’est-a-dire qui est identifié à l’arbre vert. Nous le verrons aussi dans le mythe de Jacob et d’Ésaü. Tout cela met l’accent sur cet homme qui doit devenir l’Arbre tout entier qui est contenu dans le germe, donc symboliquement dans le pied qui contient toutes les énergies en puissance et en particulier dans le talon qui en est la racine. Le nom Jacob signifie d’ailleurs talon. Si le pied est intact, l’arbre est intact. On pourrait citer beaucoup d’exemples, le serpent, après ce qu’il est convenu d’appeler la chute, pique Ève au talon, ce qui a pour conséquence la perte de toutes les énergies situées ce niveau. A. de Souzenelle nous détaille le mythe d’Œdipe qui en est une illustration extraordinaire. Nous en donnerons les étapes et certains commentaires :
— Né d’un couple royal Laïos et Jocaste, la sibylle de Delphes prédit qu’Œdipe tuera son père et épousera sa mère. Épouvantés, ses parents décident de le faire mourir et le confient cet effet a un serviteur. Celui-ci pris de pitié abandonna l’enfant dans une forêt en l’attachant par son pied à un arbre. Le petit homme rouge est donc relié l’arbre vert. — Œdipe est recueilli par des bergers. Il grandit avec sa blessure au pied. Son nom signifie d’ailleurs pied gonflé. Il marche à quatre pattes. Il sent qu’il est appelé à une autre vie, que dans ses veines coule un autre sang, et il décide à son tour de consulter la sibylle qui lui révèle le même verdict. Croyant qu’il s’agit du berger et de sa femme, Œdipe décide de s’enfuir loin de Corinthe et commence une longue marche (le labyrinthe du premier étage de l’arbre) Il est en pleines ténèbres, il n’a pas encore perçu la lumière. C’est le moment peut-être le plus dramatique de l’homme, il cherche qui il est, n’ayant encore aucun contact en profondeur avec lui-même. La plupart des gens sont encore dans cet étage-là. Mais dans ce premier labyrinthe Œdipe est déjà conduit, car il a été pris en charge par l’arbre vert de la forêt et ces énergies vont le conduire sur la route de Thèbes. Thèbes représente pour les Grecs d’alors ce que représente pour les Juifs et les Chrétiens la Jérusalem céleste. Thèbes c’est l’unité. Plus de tohu-bohu de la dualité. Les lettres t et b constituent le fondement même de la dualité. Lorsqu’elles vont être réunies elles symboliseront la Création. Ce sont les mêmes lettres inversées qui forment « bat », la fille, qui n’est autre que la Vierge d’Israël, celle qui attend l’époux après avoir enfanté. — Avant d’arriver à Thèbes Oedipe est bousculé par un char qui lui « écrase le pied ». Furieux — il est encore situé dans des catégories très psychiques, — il tue le conducteur du char qui n’était autre que le Roi. A Thèbes il apprend la mort du souverain et que la Reine promet la couronne à celui qui délivrera la ville du Sphinx, un monstre qui en garde la porte et qui pose une énigme, dévorant tous ceux qui ne peuvent y répondre. On a beaucoup discuté sur le mobile qui a poussé Œdipe à décider d’affronter le Sphinx. Pour A. de Souzenelle, il fut motivé par un désir de dépassement de soi-même, si fréquent chez les jeunes. A ce point de l’histoire, A. de Souzenelle en analyse le symbolisme : Les parents bergers et les parents royaux représentent deux étapes dans les relations parentales, les bergers sont les parents « en tunique de peau », desquels nous naissons. L’essence d’Œdipe était une essence royale, comme notre essence à chacun de nous est royale. Les textes de la Thora disent : « Chacun de nous est Roi et Prêtre ». Le Roi et la Reine de Thèbes sont les archétypes que porte en lui tout homme et Œdipe en particulier. Pour atteindre ce dépassement de lui-même, il lui faut gravir un à un les échelons de l’échelle de l’Arbre qu’il va constituer. Et, en premier lieu il devra passer par
la porte symbolisée par le Sphinx, monstre terrifiant qui a des pieds de taureau, un corps de lion, des ailes d’aigle et un visage de femme. Cela nous rappelle tout de suite les quatre vivants du char d’Ézéchiel, de ce char qui de chaque côté est tiré vers une autre direction et qui avance tout de même. Nous sommes là devant le char des archétypes, au-delà de toutes ces contradictions. Ces vivants représentent les mêmes quatre niveaux que nous retrouvons dans les quatre Évangélistes : l’Aigle de Saint-Jean, le Lion de Saint-Marc, le Taureau de Saint-Luc et le visage d’ange de Saint-Mathieu. Et que signifie le Sphinx ? L’homme qui par ses pieds de taureau est lié à la terre, le taureau est aussi signe de fécondité ; le corps du lion représente le Lion solaire, le soleil de l’être ; l’Aigle est le gardien du seuil d’une des portes, il est la connaissance et le visage de femme, le visage de l’androgynie, symbolise le visage de l’homme qui a épousé son féminin et qui vit l’androgynie. C’est la dernière naissance de l’homme qui a retrouvé l’union totale entre ses deux polarités. Le Sphinx pose la question : « Quel est l’animal qui marche le matin sur quatre pieds, à midi sur deux pieds et le soir sur trois pieds ? » Et Œdipe qui a marché sur quatre pattes dans son enfance et qui n’a pu marcher sur deux pieds, mais comme un vieillard sur trois, cherchant son midi, c’est-à-dire le milieu, les relations avec le monde du Mi, se sent concerné et répond tout de suite : « C’est l’homme ! » Le Sphinx tombe alors du rocher et meurt en laissant sa place à Œdipe, symboliquement il lui laisse le haut de l’Arbre. Ce Sphinx qui est le gardien du seuil, de la porte que nous devons franchir, n’est rien d’autre que nous-mêmes, de notre devenir. Et cette dimension est terrifiante, parce que nous ne l’avons pas encore atteinte et que nous avons peur. C’est en nous mesurant à cette dimension que nous en acquérons la structure. A chaque seuil nouveau nous aurons à nous battre avec le gardien de la porte. Nous le retrouvons aussi dans la lutte de Jacob avec l’Ange, sauf que dans la tradition hébraïque il ne s’agit pas d’un Ange, mais d’un Ich, c’est-à-dire d’un homme total, totalement réalisé. D’un côté de la porte le gardien du seuil nous paraît terrifiant, et l’autre côté il nous apparaît sous forme d’un Ange. — Œdipe épouse la Reine. Il en a quatre enfants symbolisant eux aussi les quatre étages que nous avons trouvés dans le Sphinx. Ismène, la force un peu élémentaire, le taureau ; Polynice : multiple victoire, l’étage du lion ; des douze travaux d’Hercule, des douze vertèbres à structurer, etc. ; Etéocle qui veut dire la vraie clef, les clavicules, les clefs donnant la libération et Antigone, le beau visage de la femme, l’être totalement réalisé qui a retrouvé non la virginité du premier âge, mais celle de la Terre-Mère, de la Terre-Vierge qui va enfanter l’enfant divin. Ce sont les quatre enfants qu’Œdipe a créés et non procréés.
— Thèbes est détruite par la peste qui n’est pas la maladie que nous connaissons, mais un fléau général, c’est-à-dire, Thèbes est frappé de stérilité, que ce soit dans la végétation, chez les animaux ou chez les humains. En réalité il s’agit d’une humanité qui ne s’enfante pas elle-même sur des plans supérieurs. Nous trouverons la même chose lorsque nous étudierons le Déluge. L’humanité est donc stérile à l’exception d’Oedipe et de Jocaste, parce que, en épousant sa mère, Oedipe fait la seule œuvre « mâle » qui soit, qui est de remonter tous les plans dont nous sommes faits et qui sont exprimés dans la genèse de l’homme à travers le mythe hébraïque des six jours de la Création. Et l’homme en étant la récapitulation, va avoir à épouser à l’intérieur de lui chacun de ces plans et à être emmené petit à petit dans ses profondeurs. Tout le drame de la chute consiste en ce qu’il a voulu brûler les étapes. Donc l’homme qui veut atteindre ce qu’il est en potentialité, devra épouser tous les plans de la Création, qui sont des terres, des plans de conscience successifs et à la dernière terre il retrouve cette Mère terrifiante qui est simplement l’abîme qui le sépare de Dieu. Jocaste, lorsqu’elle a la révélation de la vérité va se pendre et Œdipe s’arrache les yeux. Il est désormais l’aveugle, conduit par Antigone et c’est ainsi qu’il arrive à l’étape finale qui est Colonos. Et c’est l’apothéose ! Il est reçu par les Euménides et il entre dans le séjour des dieux. Si Œdipe est aveugle au monde, c’est pour que s’ouvre son œil intérieur. C’est l’aveuglement de l’Apôtre Paul sur le chemin de Damas, c’est la descente du Christ dans le tombeau, c’est la déambulation dans les enfers qui sont la descente dans nos profondeurs. Au niveau de chacune des terres nous aurons à nous libérer de nos démons, c’est-à-dire de nos énergies qui ont été mal investies et qui se sont retournées contre nous, qui nous détruisent au lieu de nous construire. Toute la déambulation d’Œdipe tenant l’épaule d’Antigone, c’est la démarche de tous ceux qui descendent dans les enfers, accompagnés de leur guide. Colonos, c’est le haut de la colonne, c’est la dimension d’Antigone atteinte par Œdipe. Nous avons accompagné Œdipe, pied enflé, d’un bout à l’autre de son évolution. Et par cela même nous avons déjà vu un peu tout l’ensemble de l’Arbre, alors que c’est progressivement que nous devons y arriver. Mais on ne peut pas couper les mythes antiques. Nous ne pouvons pas prendre le symbole de chacun de nos organes, si nous ne le voyons pas dans la totalité de son expression. Qu’est-ce que retourner dans le ventre de sa mère, si ce n’est se faire germe et revivre cet état qui est symbolisé par le pied ? 3: La première porte
Compte rendu de la réunion du 26.4.1977
A. de Souzenelle revient aux « trois portes » qui sont à franchir au cours de la vie, celle de l’Avoir, la première, au niveau du pied dont la forme ressemble à un germe, la deuxième, celle des Hommes, au niveau des reins qui ont également la forme d’un germe, et la troisième celle des Dieux, au niveau de l’oreille qui a encore la forme d’un germe. Ces trois germes dessinés à chacun des étages signifient bien la totalité des énergies dont nous aurons besoin pour franchir un nouvel étage de l’Arbre. Malheureusement nous avons vu que bien peu de forces montent hélas même jusqu’aux reins à cause de cette « blessure du pied » dont parlent toutes les traditions et qui représente une sorte de perte d’énergie au départ. Les différents mythes, déjà étudiés, nous montrent qu’une guérison est possible. Dans le mythe de Chiron, dans celui d’Œdipe et dans les Évangiles où nous voyons le Christ laver les pieds de ses Apôtres, afin qu’ils puissent prendre part au festin, car « il suffit que les pieds soient purs pour que l’être entier soit pur ! » Nous pouvons faire là le rapprochement avec le fait de se déchausser pour entrer dans un lieu saint. Aujourd’hui nous parlerons du genou, parce que nous sommes toujours encore dans la séphira Malkuth qui semble-t-il, rassemble pieds et genoux parce que liée à toute l’expérience de l’incarnation qui, elle, est liée à un symbole de terre. Dans ses recherches sur la signification de Malkuth et celle des genoux, A. de Souzenelle fait la proposition suivante : Malkuth est à la fois les pieds situés astrologiquement dans le signe d’eau des Poissons, et les genoux situés dans le signe de terre du Capricorne. Les pieds sont tout l’Arbre résumé en Malkuth, puisqu’ils sont le germe, la promesse et les genoux sont symboles d’incarnation, de prise de contact avec la terre. Ni les contes, ni les mythes, ni les légendes mettent les genoux en image. A. de Souzenelle s’est donc appuyée sur des gestes rituels ayant trait aux genoux ; s’agenouiller, l’adoubement dans la Chevalerie, dans lequel il y a une prise de terre avec le genou. Dans l’iconographie on voit des sortes de spirales autour des genoux et, en particulier chez le Christ en Gloire de Vezelay, comme si les genoux étaient liés à une sorte de couronne. Lorsqu’un enfant se blesse aux genoux, on dit qu’il est « couronné » et cette expression s’emploie surtout dans le langage hippologique. D’autre part, le genou est constitué par devant par une « rota » la rotule qui est bien une petite roue. On pourrait conclure que dans les genoux, nous voyons un peu la même promesse de couronne au niveau de l’incarnation, dans la dualité, que pour la Couronne située en-haut de la dernière séphira, celle à laquelle l’homme est destiné et qui va couronner ses épousailles avec le Divin. Le genou serait notre point de départ à partir du moment où nous naissons. Dans la Bible une traduction erronée dit que l’homme est né de la poussière de la terre, tandis que la vraie traduction, c’est « l’homme est né poussière de la terre, ce qui est différent, le mot poussière qualifiant l’homme et non la terre. En hébreu le mot poussière se dit APHAR qui est
constitué de PHAR = taureau, symbole de fécondité et qui préside à toutes les croissances de l’être. Lorsqu’au début de la Genèse Dieu dit : « Croissez et multipliez », c’est PHAR qui signifie croître, grandir. Il ne s’agit pas de multiplication selon le nombre, mais comme nous le verrons lorsque nous étudierons la séphira Yesod, de monter notre Arbre et de nous multiplier selon nos puissances essentielles. Les genoux sont donc liés à cette promesse de croissance, de fécondité, symbolisée par le taureau et il est dit que le Pharaon (même mot PHAR), quarante jours après sa mort, doit se mesurer à un taureau avant de devenir dieu. Nous ne pouvons prendre contact avec le Ciel qu’en prenant aussi contact avec la Terre, parce que ce sont deux pôles de « l’aimant cosmique ». Pour revenir au mot APHAR il est intéressant de noter que le mot PHARA signifie chevelure, c’est le haut de la tête qui est conquis. Les Hébreux jouent avec les lettres qui sont toutes des énergies et qui rendent compte beaucoup plus qu’un mot. Ce sont des jeux divins. Il est dit dans le Zohar : « Au commencement, le Saint, béni soit-Il, jouait avec les vingt-deux lettres de l’alphabet et en faisait ses délices ». Toute la force est dans la chevelure, tandis que le fait de se raser la tête, peut parfaitement signifier l’expression la plus haute, la plus noble, un renoncement total à toutes les forces, à toute sexualité. Revenons aux genoux, en hébreu BELEN. C’est le même mot qui, prononcé BERUK, veut dire bénédiction, bénédiction dans la fécondité de la Terre. Baraka vient de là, et si on lit BEKER en retournant le mot, c’est la nouvelle naissance. BOKER est le premier-né des animaux, chez les hommes on dira que ce sont les aînés. Mais nous savons, nous, qu’il s’agit de notre première naissance à nous-mêmes et non selon le nombre, alors que nous allons vivre au niveau des reins une deuxième naissance et au passage de la gorge une troisième. Et cette première naissance, le mot l’indique bien, se fait au niveau des genoux. Un autre retournement du mot est KERUB, les Chérubins avec lesquels nous retrouvons la notion de roue, parce que dans beaucoup d’iconographies, particulièrement la Judéo-chrétienne et la Persane, ceux-ci sont décrits par de grandes roues avec des yeux tout autour, tel le char vivant dans le premier chapitre d’Ézéchiel. Saturne aussi a son anneau, sa roue. Or, il est lié sur le plan des métaux au plomb et le mot PHAR, poussière, avec une lettre de plus, le Tav, la dernière lettre de l’alphabet, est comme l’énergie la plus lourde, la plus condensée. L’homme qui arrive au monde est plomb et toute l’alchimie va se servir de cette image pour que le plomb devienne or.
Le genou est donc lié dès le départ à la Terre extérieure. Mais la Terre est aussi symbole de notre Terre intérieure. Dans tous les mythes, lorsqu’il est question de terre, il s’agit de notre terre intérieure, c’est-à-dire de notre plan de conscience. Car nous ne voyons le cosmos qu’au niveau de notre plan de conscience. Nous la voyons différente selon le niveau auquel nous sommes. Dans l’Apocalypse le fils de l’Homme va dire : « Voici les Cieux nouveaux et la Terre nouvelle ». Il ne s’agit pas de planètes, mais d’une terre intérieure nouvelle qui va amener une nouvelle conscience. Et chaque fois que nous avons un personnage biblique important, le nom de la terre à laquelle il appartient, va toujours être signifié. Le seul enseignement sur les genoux en hébreu et que connaisse A. de Souzenelle est celui où Elie, pour prier, monte au Carmel et « met ses genoux en terre et sa tête entre les genoux ». Autrement dit les genoux, revenant dans la poussière, prennent leur capacité de fécondité et la tête vient rejoindre les genoux. C’est le cycle total qui est accompli. Nous abordons maintenant les jambes, les cuisses et les membres inférieurs en général. Les jambes, dans toutes les traditions, sont symbole de nos activités primaires, de nos énergies les plus archaïques. Elles sont particulièrement symbolisées par le cheval qui est entièrement dans ses jambes et qui, lorsqu’il a une jambe abîmée, est abattu parce qu’il est avant tout coursier. Quels sont les rapports entre le coursier et l’homme ? Quand l’homme, dans la fougue de la jeunesse, dans ses forces les plus primaires n’est pas capable de monter son cheval, c’est lui qui emmène l’homme où bon lui semble, l’homme n’est pas encore devenu homme. Et tout le symbole de la Chevalerie sera d’apprendre à l’homme de monter son cheval et non pas de le tuer. Car celui qui tue ces forces là, ces forces animales qui sont en tout homme et qu’il doit accepter et assumer, les verra se retourner contre lui. Les articulations sont extrêmement importantes, tout est encore à découvrir à ce sujet. Avec la cuisse nous sommes en liaison avec les hanches, parce que en hébreu, c’est le même mot, si ce n’est que la cuisse fait fonction d’organe mâle et la hanche d’organe féminin. La hanche est la coupelle de la cuisse. «Naître de la cuisse de Jupiter » signifie nettement notre seconde naissance au niveau de la Porte des Hommes. Il y a des rites très curieux au sujet de la cuisse : lorsque Abraham envoie son serviteur à la recherche d’une femme pour Isaac, il lui dit : « Mets ta main sous ma cuisse, et jure-moi… ». La main, c’est la connaissance. Il y a là comme une information qui va être liée à ce contact entre la main du serviteur et la cuisse du maître, comme si la transmission passait à travers elle. La cuisse est aussi liée à la sexualité, mais aussi à toutes les énergies qui vont être investies à un passage à un autre plan.
Dans le mythe d’Hercule, la déesse Héra qui est la force germinatrice, introduit deux serpents dans le berceau de l’enfant afin de le faire mourir. Les deux serpents sont les forces de la kundalini qui doivent le faire mourir, parce qu’il faut qu’il vive une mort et ensuite une résurrection. Ce n’est que par les morts et résurrections successives que nous pourront affronter les Gardiens du Seuil de différentes Portes. En hébreu le genou c’est BEREK et la cuisse YAREK avec un Yod à la place d’un Beith. Les lettres du genou ont respectivement pour valeur Reich, 200 et le Kaf, 20, ce qui fait 222, rien que des 2. Voilà le rapport avec la Terre, le genou reçoit toutes les informations de la Terre et le Yod, l’organe mâle, apporte une force divine. Le Yod = 10, est l’unité. C’est le Divin qui va percuter le haut de la cuisse. A chaque rencontre avec l’Unité, se trouve le Divin. Compte rendu de la réunion du 12.5.1977 Nous allons parler de Yesod situé à la base du triangle inférieur renversé et qui correspond à l’énergie, appelée « fondement ». C’est ce personnage mystérieux dont on ne sait pas d’où il vient et où il va, Melchitsedek, qui a illustré le nom de Tsedek, qui veut dire justice. Non pas celle qui récompense le bien et punit le mal, notion due à une erreur de traduction et qui a déformé notre conception, mais la rigueur qui n’a rien à voir avec récompense ou châtiment. Cette justice qui occupe l’axe du milieu correspond au niveau du corps à notre colonne vertébrale qui ponctue toujours le troisième terme des deux pôles de la dualité que nous essayons d’intégrer. Notion d’équilibre et d’harmonie, elle est justesse, juste rapport entre la lumière et les ténèbres, entre le sec et l’humide, entre tous les pôles opposés de la dualité qui font nos contradictions si douloureuses, alors que si nous les vivons en harmonie, nous passons à des plans supérieurs qui nous valorisent. La séphira Yesod, la base, le fondement, correspond au pouvoir créateur divin. Elle précède en partant du haut, Malkuth, le Royaume qui est le même mot que Malekoth, l’Œuvre divine toute entière. Yesod est la séphira de l’Acte Créateur dans laquelle Malkuth va exprimer cette diversité extraordinaire de la Création. Au niveau du corps elle représente la base de la colonne vertébrale et le sexe. Située à la base du second triangle renversé par rapport au triangle archétype, elle est un premier miroir de Kether qui est en-haut et qui est la Couronne. Nous avons dans ce triangle toute une matrice qui va assurer la maturation du germe. Et, de même qu’en-haut l’homme est appelé à assumer sa dernière naissance, nous allons en-bas avoir la naissance de l’enfant. Ce triangle inférieur va assurer la procréation selon le nombre, la perpétuation de l’humanité, tant que celle-ci n’aura pas
pris conscience d’une autre croissance et d’une autre création. L’humanité va se mettre au monde et toutes les naissances successives qu’elle a à accomplir prendront ici leur départ. Nous avons l’impression actuellement de vivre une fin des Temps. Il semblerait que l’humanité doive passer très vite une nouvelle étape très importante, sans quoi elle va y rester. Les événements extérieurs nous forcent à franchir cette Porte et ceux qui ne l’auront pas passée seront ratissés dans des épreuves terribles. Chaque fois que dans les Écritures il est question de « femmes enceintes », c’est de cette procréation qu’il s’agit, car l’humanité est faite pour la procréation selon le Verbe. Il y a une dialectique très importante entre le triangle supérieur et ce triangle inférieur. Or l’homme s’est coupé de cette information essentielle depuis ce qui est censé être appelé la chute, il a oublié ce qu’il était, il ne se multiplie plus selon le Verbe. C’est là tout le drame du Déluge où seul Noé semble avoir pris conscience. Et Dieu lui dit: « Construis ton Arche », c’est-à-dire son quadrilatère qui se trouve au-dessus des eaux. Le Déluge est une anarchie des eaux, une matrice qui ne sait plus comment assumer sa gestation. Noé, en construisant son Arche, construira son triangle supérieur. Yesod est à la base de cela. Sod en hébreu signifie le secret et le Yod qui précède, c’est le Divin. On peut donc traduire Yesod par Secret Divin. A partir de la séphira Yesod, l’adolescent se sent relié à ses véritables structures et veut envoyer promener ses béquilles, toutes les dualités qui l’empêchaient de vivre sa vie. C’est à partir de ce moment là qu’on peut vivre une sexualité qui va s’exprimer par le mariage de deux pôles, de nos déchirantes dualités intérieures. C’est aussi symbole du mariage de l’homme avec la femme, qui seul à ce niveau là se fait de façon « juste », lorsque les deux pôles auront trouvé leur troisième terme qui n’a rien à faire avec l’enfant qui n’en est que le symbole. L’archétype du mariage est de mettre au monde ce troisième terme. Car au fur et à mesure des différents mariages que nous aurons à faire à l’intérieur de nous et qui seront de plus en plus précis, nous aurons à mettre au monde l’enfant divin. Il ne faut pas confondre l’enfant qui assure la continuité de l’espèce avec l’enfant divin. Tout un courant religieux occidental a proposé la procréation comme but du mariage, ce qui a donné lieu à des situations morales dramatiques. Il faut dénoncer l’erreur néfaste d’avoir déclaré tabou tout ce qui touche à la sexualité, alors que le secret est tout à fait autre chose. Or la sexualité fait partie de notre être et nous avons à l’assumer. Et parce que cela a été vécu jusqu’à présent dans le mauvais sens du terme, nous vivons actuellement ce déferlement qui désacralise tout. Reparlons de la signification de « justesse ». Une partie seulement des énergies doivent être vécues au niveau de Yesod, afin qu’il y en ait encore de disponibles pour construire l’Arche. Elles doivent donc être vécues avec « justesse », d’où ce nom de Tsedek.
Melchitsedek est le premier dans l’ordre des sacrificateurs, le sacrifice, faire le sacré, qui n’a rien à voir avec le sens qu’on lui donne communément. On ne sait rien de Melchitsedek sinon qu’Abraham lui donnait la dîme, c’est-à-dire qu’il devait lui consacrer un dixième de ses énergies. Les neuf-dixièmes pouvaient être vécus, mais un dixième devait être consacré pour monter l’Arbre. Le 9 est la perfection féminine, un accomplissement de la Création, avant qu’elle ne rencontre le 10 divin. Il est intéressant, dans cette perspective de voir la signification chez les Juifs de la circoncision. Elle ne fait pas partie de la Loi mosaïque comme il en est de tous les rites auxquels obéissent les Hébreux. Elle leur est bien antérieure. Elle est demandée à Abraham dans le pacte de la « Nouvelle Alliance ». Il y a toujours de nouvelles alliances entre Dieu et l’homme. Parce que Dieu propose, mais l’homme s’obstine à suivre des chemins différents. Alors Dieu va le rechercher là ou il est et lui offre une nouvelle alliance, parce qu’il y a mariage entre Dieu et sa Création. L’épouse s’enfuit. Tous les textes parlent de cette prostituée qui va avec de faux amants. Mais Dieu aime toujours son épouse et lui propose chaque fois un nouveau mariage. Dieu promet à Abraham de devenir père d’une grande nation s’il s’engage à circoncire tous les mâles qui naîtront de lui. Or qu’est-ce que c’est que la circoncision ? C’est la taille du sexe de l’homme au moment où la fécondité lui est promise. Abraham et Sarah étaient stériles avant ce pacte, stériles dans le sens de la stérilité essentielle de l’humanité qui, depuis sa chute est incapable de monter l’Arbre et de donner des fruits. A travers Abraham naîtront les douze tribus d’Israël qui donneront naissance à celui qui va devenir le Messie, le Christ pour les Chrétiens et le Messie encore attendu pour les Juifs. La fécondité promise mettra au monde le Verbe créateur. La circoncision, ainsi comprise, n’est autre que la loi à laquelle obéit toute la création : pour mettre l’arbre à fruit, il faut tailler. Ismaël à ce moment a 12 ans, il est le fils de la servante qui procrée, tandis que Sarah est l’humanité, fille de Dieu. En réalité il n’y a qu’une humanité, mais symboliquement elle est représentée dans ses deux dimensions. Ismaël sera circoncis à 12 ans et toute sa lignée, en particulier le monde arabe va être circoncis au moment de la puberté. L’effet en est extrêmement différent. Celle pratiquée à la naissance par les Juifs, semblerait rassembler toutes les énergies de l’enfant et permettrait de les faire monter, comme la sève monte dans l’arbre lorsqu’il est taillé. Les lettres de la circoncision sont le M et le L et tout ce qui a trait en hébreu à la fécondité contient ces deux lettres.
Au premier Concile tenu par les Chrétiens, saint Pierre voulait continuer cette pratique, mais saint Paul pensant que le Messie étant venu et ayant donné à l’homme sa dimension de créateur, la circoncision devenait inutile. Un autre problème se pose : pourquoi la femme est-elle dite impure au moment de ses règles et après qu’elle ait mis au monde un enfant ? Dans toutes les traditions il y a à ces moments-là, nécessité de Purification. Là encore il ne faut pas prendre pureté dans son sens moral. La pureté ou l’impureté sont liées aux normes d’Adam avant la chute et à ce qu’il est devenu après. Dieu a demandé à Noé d’introduire dans l’Arche « les animaux purs et impurs ». Il semblerait que l’humanité dans son rythme de sexualité est liée à la Lune, comme les règles de la femme le sont au cycle lunaire et que cette sexualité vécue en tant que procréation, en tant que nécessité dans le temps, soit formulée comme impure au sens étymologique du mot et non au sens moral. Adam n’avait pas besoin de procréer. C’est difficile pour nous de le comprendre, d’avoir accès à cette réalité, mais il importe qu’au lieu de ramener la Réalité essentielle à nos petites catégories, nous contemplions quelque chose qui nous dépasse. C’est la femme qui assume cette notion de procréation, mais elle est aussi l’humanité toute entière qui sera impure tant que la femme le sera. L’humanité dans son principe ontologique n’a pas à procréer, mais à réintégrer son humanité, son éternité. C’est la sortie du temps. Depuis cette notion de chute nous avons vers la mort une pulsion qui est terrible. Nous assurons notre descendance au lieu d’assurer notre ascendance. La vraie procréation c’est celle où nous nous mettons au monde nous-mêmes et cela se fera par des épreuves — surtout dans les premiers triangles. Après nous pourrons-nous libérer peu à peu, parce que nous serons dans une harmonie et dans des plans de conscience dans lesquels nous continuerons nous-mêmes ces enfantements. Une autre façon de comprendre le mot Yesod d’après les lettres qui le forment et en ne considérant comme cela se fait en hébreu que les trois consonnes, nous avons la lettre Samech qui forme le milieu et deux lettres, Daleth et Yod qui l’encadrent. Il semblerait que ces trois lettres soient la base, l’appui de toute la conscience divine de l’homme. Cela est confirmé par ce que rapportent toutes les traditions, à savoir que l’homme aurait à la base de la colonne vertébrale une toute petite partie infinitésimale de son squelette, qui serait imputrescible. Même à l’incinération cette partie ne serait pas consumée. Elle est cette partie sacrée de l’être qui va monter peu à peu tout le long de la colonne vertébrale. Chez les Hébreux elle est appelée LUS qui signifie l’amande. Le mot lux en latin en découle probablement. On retrouve ce mot LUS au moment où Jacob a sa vision de l’échelle qui n’est autre que la colonne vertébrale au niveau de chacun de nous. Et la vie de Jacob ne sera que
montée de l’échelle. A travers lui l’humanité va devenir lumière. Et cette lumière sera symbolisée par la Mandorle qui n’est autre que cette amande qui était intérieure et qui devient extérieure par un retournement de toutes les énergies. La notion de l’amande se retrouve aussi dans tout le symbolisme de l’Émeraude qui va devenir la Coupe du Graal. En réponse à une question : Le Daleth, le 4, ce sont les structures. Il n’y a pas de mise au monde sans matrice pour la recevoir. On verra toujours les justes rapports entre le 3 qui est la vie et le 4. Dieu dit au 3 et au 4 : « Ne vous séparez jamais, car vous êtes indispensables l’un à l’autre. » Car que serait le 3, la vie sans les structures, le 4, et que seraient les structures sans la vie ? Nous passons maintenant au mythe du Déluge qui est l’anarchie des eaux, auxquelles manque le juste rapport entre les eaux du haut et les eaux du bas, c’est-à-dire que les énergies de la création ne sont plus à l’image des énergies divines. Lorsqu’il y a « injustesse » intérieure, cela se traduit par des troubles extérieurs. Nous le vivons actuellement. L’homme, donc, se multipliait sur la terre avant d’avoir cru et Dieu dit à Noé qui est juste, qui est tsedek : « Construis l’Arche », en lui donnant toutes les proportions qui se rapprochent de celles de l’Arche d’Alliance, du Temple de Salomon et de la Jérusalem Céleste. Il est intéressant de les étudier et de les comparer. Que sont tous les hommes de la Création qui y seront rassemblés ? Ce sont les vivants, ce sont toutes les énergies. Une chose intéressante, c’est que Noé entre dans l’Arche avec ses fils et sa femme avec ses filles. Mais lorsqu’ils en sortent, Noé sera avec sa femme et ses fils avec leurs femmes. Le mariage s’est accompli dans l’Arche. Nous retrouvons la même chose dans le mythe babylonien, dans l’histoire de Gilgamesh. Parti à la conquête de l’immortalité, il va retrouver dans l’Au-delà son ancêtre Out-Naphishta. Sous beaucoup d’aspects l’histoire d’Out-Naphishta est celle du Déluge de Noé. Lui aussi, reçoit de Dieu l’ordre de construire non une Arche, mais un bateau. Comme Noé, il entre seul dans le bateau et en ressort avec sa femme et il est dit : « Jusque là Out-Naphishta n’était qu’un homme, dorénavant Out-Naphishta et sa femme seront comme les dieux, pareils à nous. Qu’ils aillent habiter l’embouchure des fleuves. » L’un et l’autre sont entrés par la Porte des Hommes et ressortis par la Porte des Dieux. En hébreu le mot Arche symbolise tout mariage, c’est le mot Teba qui reprend les deux lettres de Tohu-va-Bohu de la Genèse qui signifie chaos primordial. Teba va assurer le mariage de toutes les énergies qui sont entrées en elle et cela va être signifié par toute une symbolique alchimiste, par le vol des oiseaux, celui du corbeau et de la colombe qui représentent ce que les alchimistes appellent : l’Œuvre au noir et l’Œuvre au blanc. C’est la séparation du subtil de l’épais. Noé se sépare du reste de la population parce qu’il est devenu le « Juste », ayant vaincu les dualités que chacun de nous a en soi et qui créent nos conflits intérieurs, jusqu’à ce qu’il y ait
irruption hors de l’Arche qui n’est autre à ce moment là que l’homme, appelé Œuvre rouge par les alchimistes, et qui va être symbolisée par l’ivresse de Noé, celle que les Chrétiens appellent ivresse de l’Esprit Saint, au cours de laquelle il découvre la nudité d’Adam avant la chute. L’Œuvre Rouge se retrouve à la Pentecôte avec l’éclatement des langues de feu. Et, avec les trois fils de Noé, nous verrons la démarche des descendants de Noé, celle de l’humanité. Sem, c’est tous les Sémites et en particulier le peuple juif. Sem et Japhet vont recouvrir la nudité de leur père en marchant à reculons c’est-à-dire qu’ils revoilent la Lumière divine qu’ils n’ont pas la force de regarder et Cham qui aura jeté sur elle un regard impur, sera « brulé » et maudit. De lui descendent les Chamites, le peuple noir et en particulier les Éthiopiens. L’Arche va se poser sur le Mont Ararat, mot formé en hébreu de Aror, malédiction, qui est l’injuste rapport établi entre l’homme et la Terre, entre Adam et Adama. Dieu ne dit pas, comme cela a été traduit : « La Terre est maudite à cause de toi », mais : « La Terre est maudite dans sa relation à toi », parce que tu n’es plus juste intérieurement. Ce n’est pas la punition de Dieu, mais c’est ce que l’homme a fait de sa relation avec la Création. Alors avec la dernière lettre ajoutée à Aror, c’est-à-dire Ararat, c’est la malédiction retournée, c’est la bénédiction, la malédiction vaincue. Dans Ma-Boul, Ma est la matrice et Boul, le fruit. C’est ce dont l’humanité aura à prendre conscience par le Déluge qui remettra toutes les énergies à leur place. Et, en même temps, nous retrouvons le mot MOL = circoncision, le Déluge est une circoncision cosmique pour mettre l’Arbre à fruit. Les 40 jours du Déluge nous donnent le nombre 4, la matrice. Il en contient encore d’autres, tous symboliques
4: Le triangle inférieur Compte rendu de la réunion du 9.6.1977 Le problème de la sexualité duquel il fut question lors de notre dernière réunion n’est certes pas celui abordé par la psychologie moderne et qui déferle dans toute la littérature, dans le cinéma, dans les crimes, mais celui des différentes traditions et, en particulier, de la tradition judéochrétienne. Dans cette perspective il évoque toute une montée des énergies telle la montée de la sève d’un arbre et constitue une base importante pour l’évolution de l’être. Prenant comme exemple le film « Emmanuelle » dont on a tant parlé et qui montre à quel point l’humanité est plongée dans la confusion, Annik de Souzenelle arrive à la conclusion que deux blocages s’opposent à cette montée, l’un est le moralisme pieux, le drame de toutes les religions qui ont fait une œuvre néfaste en voulant démontrer que l’évolution consistait uniquement à être moralement bien. Ce blocage de la sexualité a été cause de beaucoup d’empêchements de fuser plus haut. Au lieu de ce refoulement, reconnaissons humblement que nous avons une nature animale qu’il nous
faut accepter. Nous ne sommes pas des dieux. Quelques êtres privilégiés peuvent ne pas la vivre, mais nous, être communs, avons à l’assumer au niveau génital. L’autre blocage, absolu celui-là, est celui où se situe le film en question, celui du soi-disant défoulement sur le plan de la sexualité en investissant toutes les énergies à ce niveau-là, sans avoir conscience d’un dépassement possible. N’oublions pas qu’en investissant toutes nos énergies pour atteindre l’étage supérieur, nous avons à laisser ce dixième symboliquement, cette dîme des biens qu’Abraham donnait à Melchitsédeck pour faire le sacré (voir compte-rendu précédent). Notre propos aujourd’hui c’est de commencer à vivre le triangle inférieur de l’Arbre des Séphiroth qui se situe entre Yesod, Hod et Netzah qui sont Gloire et Victoire. Ce triangle correspond au complexe uro-génital, c’est un centre d’eau. C’est à ce niveau que se passe la gestation de l’enfant que sa mère porte dans son ventre et qu’elle va mettre au monde par en-bas. C’est la venue au monde de Malkuth. Ce qui nous concerne à ce niveau, c’est de nous mettre au monde nous-mêmes. Ce triangle dans lequel va entrer l’adolescent sera la matrice qui assurera sa maturation à un niveau supérieur. Quand il a été dit à Eve : « Tu enfanteras dans la douleur et j’augmenterai le nombre de tes grossesses », c’est de cette gestation qu’il s’agit, c’est-à-dire de la mise en action de toute notre fécondité qui n’a rien à voir avec la fécondité selon le nombre, mais avec toute cette croissance vers le haut. Eve est toute cette humanité dans son rôle féminin, car homme ou femme, nous sommes tous « mère » de nous-mêmes. Le nom Emmanuel ne signifie pas seulement « Dieu est avec nous », mais aussi « Dieu enlève la stérilité », car c’est la naissance de l’Enfant divin. La vraie stérilité est celle qui nous empêche de nous mettre au monde à ces différents niveaux. Lorsque l’enfant atteint l’âge de la puberté il va commencer à entrer en relation par ces deux sentiers avec ses structures prochaines. Il va laisser de côté ses deux béquilles qui étaient ses parents, qu’il va contester, il va contester les valeurs sur lesquelles il a été élevé et il commencera à sentir en lui de nouvelles valeurs qui lui sont propres, qui vont être désormais ses points de repère, ses points de références, pour assurer sa croissance. Il est très important à ce moment-là que les parents soient à l’écoute de ces valeurs inscrites chez leur enfant, même si elles paraissent contraires à tout ce qu’ils avaient cru. C’est un rôle difficile que de savoir s’écarter tout en étant toujours là. Car l’enfant a encore besoin de leur présence pendant un long moment. En entrant dans cette matrice l’enfant entre dans l’épreuve, car toute matrice implique la nuit, le noir, l’expérience de la ténèbre d’où sortira la lumière. Et l’enfant que ses parents, par ignorance, n’ont pas prévenu, se sentira perdu pensant que la vie c’est cela, cette ténèbre et cela peut devenir dramatique. On voit actuellement bien des enfants se suicider, se droguer, etc., parce qu’ils ne peuvent pas supporter cette ténèbre dont personne ne leur a dit qu’elle était absolument nécessaire et qu’elle serait suivie de lumière.
Ces ténèbres vont se manifester de plusieurs façons aussi bien pour l’enfant que pour les personnes se trouvant encore à ce niveau là et qui, hélas, sont nombreuses. Nous parlerons des ténèbres qui nous paraissent essentielles et avant tout de celle du non-sens. On a l’impression que rien n’a de sens, que tout est anarchique au vrai sens du mot, c’est-à-dire d’être coupé de ses archées. C’est effectivement le drame de la « chute » qui a coupé l’humanité de ses archès. Un mythe va nous révéler cette expérience de façon admirable, c’est celui du Déluge. Nous parlerons également plus tard du mythe du Labyrinthe de Cnossos et nous ferons également l’expérience de l’esclavage dans ce triangle inférieur. Nous sommes tous esclaves de nos passions, de nos désirs et de nos peurs. Nous verrons comment nous en sortir. Ce mythe est illustré par le mythe du passage des Hébreux en Egypte où ils sont esclaves. C’est à ce niveau-là que nous allons structurer nos dix vertèbres sacrées et nos dix vertèbres lombaires. C’est un temps d’épreuves qui va nous être décrit bien souvent dans une période de dix ans. Il faudra dix plaies d’Egypte pour en sortir et renaître par la Mer Rouge. Quant au mythe de Cnossos, nous verrons que pendant dix années les Athéniens eurent à apporter au Minotaure le sacrifice de sept jeunes gens et de sept jeunes filles. Le sens en est le même. Déluge signifie avant tout désordre. En hébreux son nom est Maboul, mot qui nous est resté et qui veut dire dérangé, anarchique, manque de connexion du cerveau. Avant le Déluge il fut dit : « A ce moment-là sur la terre des hommes se multipliaient et ils ne mettaient au monde que des filles ». Autrement dit, à l’image du monde actuel, ils ne se multipliaient que selon le nombre et ne mettaient au monde que des êtres qui ne faisaient pas œuvre mâle. Le mot mâle chez les Hébreux veut dire se souvenir, descendre dans ses profondeurs. Or celui qui fait œuvre mâle, descend dans ses profondeurs et épouse au fur et à mesure toutes les stratifications, toutes ces terres et il naîtra à chacun de ces niveaux. Celui qui meurt et renaît toujours fait œuvre mâle. Nous vivons en ce moment une humanité femelle qui se contente de manger, de dormir, de boire, d’aller à son travail, qui s’ennuie et qui cherche à tuer le temps. Et ce faisant, elle se tue elle-même. Et Dieu dit : « J’en ai assez de cette humanité, je me repens de l’avoir conçue et voici, la fin de toutes choses est proche. » En nous penchant sur ces textes qui au premier abord semblent surprenants de la part du Dieu Créateur, nous voyons qu’il ne s’agit pas des Elohim, mais de Yod-Hé-Vov-Hé que l’homme est en potentialité. C’est le dieu en lui qui commence à s’éveiller et qui lui fait prendre conscience qu’il est entrain de perdre sa vie. Et ce dixième de l’humanité, cette dîme, va apparaître sous la forme et dans le personnage de Noé qui est le dixième descendant d’Adam par Seth. Et Dieu envoie le Déluge qui n’est autre que la représentation de ce que l’humanité est, de son anarchie.
Les eaux sont les passions, les énergies à tous les niveaux qui, dans le Déluge, s’investissent n’importe où et qui submergent l’homme. Le Déluge existe dans toutes les traditions. Celui de Babylone est bien antérieur. Nous le retrouvons aussi à l’occasion de mythe grec de Prométhée, Dieu envoyant un Déluge pour punir l’humanité d’avoir dérobé le feu du ciel. Seuls Deucalion et Pyrrha sont sauvés des eaux, ils repeupleront la terre en jetant des pierres par-dessus leur épaule. Au moment de la naissance de Noé, son père Lemeck dit : « Celui-ci nous consolera de toutes nos fatigues et de tous les maux que nous cause la terre que Dieu a maudite ». C’est-à-dire que Noé va être le précurseur de celui qui va retourner toutes les énergies et qui va consoler. Noha signifie consoler, conduire. Dieu dit donc à Noé qui est un homme « juste », de construire une Arche selon des mesures symboliques et d’y faire entrer un couple de chaque espèce d’animaux de la terre. Il faut comprendre par animaux les énergies dont ils rendent compte et que nous portons aussi en nous. La construction de l’Arche, c’est la construction de notre quadrilatère. Noé monte dans l’Arche en ayant ramassé toutes ses énergies et, avec lui, ses fils, ses filles, sa femme, les maris et femmes de ses enfants. Le mythe babylonien du Déluge avec Gilgamesh est parallèle à celui-ci. Nous en avons déjà parlé la dernière fois (voir précédent compte-rendu). Lorsque l’Arche se pose enfin, aussi bien Noé que Out Naphishtim, en sortent avec leur femme. Le mariage s’est accompli dans l’Arche. Qu’est-ce que le mariage ? C’est devenir adulte et capable d’entrer dans notre véritable être, c’est épouser les deux pôles de la dualité qui jusqu’ici étaient vécus dans la discorde et dans la contradiction. Nous renvoyons une fois encore le lecteur au précédent texte sur le site L’arbre de Vie : La première porte, dans laquelle il est question du symbolisme du vol des oiseaux, de leur rapport avec l’alchimie et de la signification du Mont Ararat sur lequel l’Arche a fini par se poser. Ils y trouveront également ce que veut dire l’ivresse de Noé. C’est toute la fécondité de la terre que symbolise la vigne et la nudité de Noé n’a rien à voir avec la nudité corporelle. Elle est le parfait miroir de la lumière divine et c’est pour cela que ses deux fils viennent à reculons pour la recouvrir. Car, n’ayant pas encore atteint cette qualité d’évolution, ils sont incapables de regarder le Divin. Quant à Cham qui le regarde, il est brûlé. Il y a là psychologiquement un profond mystère de l’homme impur qui essaye de scruter les mystères par curiosité et non par amour. La recherche du pouvoir est sous-jacente. Lorsque l’homme investit son ardeur à un niveau pour lequel il n’est pas prêt, les énergies se retournent contre lui et le brûlent. L’Arche s’étant posée sur le Mont Ararat, l’homme retrouve ses normes ontologiques qu’il avait perdues dans la grande aventure qui relate le mythe de la chute. Dieu envoie alors un arc-en-ciel
en signe de la Nouvelle Alliance qui est évidemment le même symbole que celui de l’échelle de Jacob qui relie le monde des archétypes à celui de la Création. Continuons les mythes hébraïques par le passage des Hébreux en Egypte où ils furent esclaves sous le joug des Egyptiens. Et pourtant, en hébreux le mot Egypte est Mistraïm, dans lequel on trouve Maim, les eaux primordiales, c’est-à-dire la matrice. Et à l’intérieur de Mistraim, il y a ce petit TSR qui sert la gorge. Et en effet, gorge qui se dit Tsoar indique un resserrement, presque un écrasement. Nous pouvons y trouver deux choses : oppresseur, mais aussi germe. Car le germe est toutes les énergies comprimées au plus petit et qui se trouve dans le TSR de Mistraïm. Il symbolise alors ce peuple qui vit en esclavage, qui est le peuple élu, la dîme symbolique qui va entraîner toute l’humanité dans son ascension. Et ce peuple esclave qui n’en peut plus est l’image de notre humanité lorsqu’elle prend conscience de tous ses esclavages. Obéissant à Dieu qui est en potentialité en eux, les Hébreux décident de quitter l’Egypte, afin de vivre les autres étages qui les mèneront à la Terre Promise, symbole du triangle supérieur. Cette nouvelle naissance ne pourra s’effectuer que si deux pôles sont en présence. Ils seront représentés par Moïse et Pharaon. Moïse est un personnage extraordinaire, son nom signifie : sauvé des eaux. Il n’est autre symboliquement que Noé, c’est celui qui a construit son Arche d’ailleurs, car à un moment il quitte l’Égypte pour ensuite y revenir sauver son peuple. Et à ce moment du récit nous trouvons cette phrase très curieuse : « Alors Yod-Hé-Vov-Hé se mit sur son chemin pour le faire mourir. » Qu’est-ce que cela veut dire ? Il s’agit du mariage profond avec lui-même. Moïse a dû faire sur lui-même le travail qu’il devra faire faire à son peuple, afin d’être capable de le guider. Alors Yod-Hé-Vov-Hé, sa dimension divine en lui, se met sur son chemin pour l’obliger à une mort et à une résurrection. Et Dieu lui dit : « Je te fais Yod-Hé-Vov-Hé pour Pharaon », c’est-à-dire je te donne la puissance divine par rapport à Pharaon qui lui, va être l’adversaire. S’il n’y avait pas d’adversaire il n’y aurait pas de résistance, il n’y aurait pas de sortie possible. Pharaon se dresse alors. Il porte dans son nom RA, l’adversaire qui est le même nom que le mal dans l’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal. Ce n’est pas le mal en soi, mais la ténèbre qui rendra possible que jaillisse la lumière. Les dix plaies qui sont déclenchées sont comme les dix contradictions de ce gigantesque accouchement. A chaque plaie Pharaon décide de laisser partir les Hébreux et puis, au dernier moment, nous entendons cette phrase curieuse : « Et Dieu durcit le cœur de Pharaon. » Pourquoi ? Parce que les Hébreux ne sont pas prêts, ils n’ont pas encore atteint la dixième vertèbre et il en sera ainsi jusqu’à ce qu’ils l’aient atteinte. Ils doivent trouver les forces nécessaires pour vivre l’expérience du désert. Là nous touchons du doigt combien l’épreuve est bénéfique, elle est le barreau de l’échelle que nous avons à monter et qui nous fait souffrir lorsque nous nous y heurtons. Ce n’est que sous
l’épreuve que nous pouvons promouvoir nos forces, s’il n’y avait pas de résistance il n’y aurait pas de lumière. Il serait extrêmement intéressant de rechercher le symbolisme de toutes ces épreuves, symboles que nous retrouvons chez tous les prophètes. La dernière plaie est la plus importante, elle est comme une espèce de circoncision, elle est la mort de tous les enfants égyptiens premiers-nés, à l’exception de ceux qui auront tracé sur le linteau de leur porte le signe qui est mis sur Caïn sur le sauver. C’est le signe de l’énergie qui préserve celui qui ne doit pas être dévoré, parce qu’il est devenu lui-même cette énergie. Lorsque les Hébreux vont se trouver devant l’Ange Exterminateur, ils vont avoir atteint la qualité de l’Ange qui est le Gardien du Seuil. Et l’Ange ne les touche pas, le feu ne détruit pas le feu. Dans ce signe de l’Agneau nous avons tout le profil de Celui qui va racheter Israël, de l’Agneau qui fait encore toute la symbolique de Pâques. Et tout ce peuple part conduit par Moïse qui a dépassé les lois de la nature. Il commande aux eaux qui s’écartent et nous voyons ce peuple qui passe, qui va entrer dans le désert avec cette colonne de feu qui le guide pendant la nuit et la colonne de nuées qui le guide pendant le jour. Yod-Hé-Vov-Hé, son Roi est à sa tête. L’homme qui entre dans son quadrilatère est guidé par son Yod-Hé-Vov-Hé intérieur dont il reçoit s’il en est conscient, s’il écoute, s’il est attentif, toutes les informations nécessaires pour avancer. La Mer Rouge se referme sur les Egyptiens qu’elle engloutit. Pourquoi la Mer Rouge, puisque, en réalité, elle s’appelle la Mer des Joncs, « Yam Soph ». Rappelons-nous que c’est grâce au drame de Joseph vendu par ses frères qui, après maintes aventures dramatiques, est admis à la cour des Pharaons, que Joseph, Yousoph en hébreux, a pu sauver ses frères de la disette. Soph, c’est la limite, Yousoph et Yam-Soph sont les deux lignes, l’une au départ, l’autre à l’arrivée. C’est-à-dire naissance et mort pour une autre naissance. YamSoph signifie augmenter, passer à un plan supérieur. Toute la tradition parle de la Mer Rouge par analogie avec l’Homme Rouge qui, pour devenir Homme Vert, doit mourir et ressusciter. Et pourquoi le désert ? Le monde que nous vivons est à l’image de notre monde intérieur. Il est un désert tant qu’il n’est pas fécondé par le Divin qui a pris naissance en nous. Dans ce désert les Hébreux qui sont pourtant sensés avoir acquis la force de vivre, vont se retourner contre Moïse en disant : « Tu nous a fait sortir d’Egypte, mais nous préférons servir les Egyptiens que d’aller mourir dans le désert. » L’homme a horreur de la liberté, il en a peur. Et c’est pourquoi nous avons du mal à passer cette porte, nous sommes retenus par toutes nos sécurisations. L’humanité ne peut évoluer qu’en
se désécurisant de tout, sur le plan maternel, sur le plan affectif, sur tous les plans où elle a des épreuves à vivre. Le bonheur que réclament les hommes lorsqu’ils réclament la liberté est en réalité celle des licences, le bonheur extérieur. On ne peut trouver ce bonheur que dans son être profond. Notre drame c’est de toujours tout projeter à l’extérieur au lieu de chercher à l’intérieur. Les bonheurs que nous trouvons à l’extérieur nous aliènent, car nous en devenons esclaves. Le passage dans le triangle supérieur est une nouvelle ténèbre, mais pas du tout de la même qualité que la ténèbre que nous avons en-dessous. Passée la ténèbre de l’ignorance, nous vivons une ténèbre qui correspond à la connaissance, mais à une connaissance qui doit tout de même faire une nouvelle expérience de cette ténèbre, tout en sachant qu’il en naîtra la lumière.
5: initiation (Revue Panharmonie. No 170. Novembre 1978) Compte rendu de la réunion du 13.10.1977 Le livre d’Annik de Souzenelle auquel elle se réfère, qui vient d’être réédité aux Editions Dangles : « De l’Arbre de Vie au Schéma corporel, le symbolisme du corps humain », est une approche de l’anthropologie, une méditation sur le corps, sa forme, les différents organes, les différents membres. Ces réflexions qui sans cesse apportent des révélations nouvelles, ne partent pas tant du corps humain, que de celui de son archétype. D’après la tradition hébraïque et judéo-chrétienne et ses livres sacrés, le monde des archés est le monde divin lui-même et le symbole est représenté par le monde de la manifestation en tant qu’il est reflet du monde des archés. Entre ces deux mondes se trouve ce que la Bible appelle « une étendue », sorte de cordon ombilical qui les relie, ce qui fait que le monde d’en-bas, de la manifestation, est constamment relié à son correspondant qui est le monde d’en-haut. C’est ainsi que la tradition hébraïque appelle les Elohim « les hommes d’en-haut » et Adam « l’homme d’en-bas ». Le monde animal, comme le monde végétal et le monde minéral, sont des symboles des énergies divines. L’homme, au sixième jour de la Création récapitule toute la Création, contenant toutes ses énergies. « Vous êtes des Elohim », disent à l’homme les Hébreux et le Christ le reprendra plus tard. Les Cabalistes ont toujours vu un certain graphisme dans ce qu’ils appellent « le corps divin », lequel dans un schéma très précis, dessine la distribution des énergies divines qu’ils vont appeler « l’Arbre de Vie ». Cet Arbre de Vie est le premier don divin planté au milieu de l’Eden, en réponse du Créateur après que la Création ait poussé et exprimé tout son désir vers Lui. C’est la première manifestation divine au cœur même de la conscience de l’homme, car l’Eden est le jardin intérieur de l’homme.
Au sujet du deuxième étage de l’Arbre des Séphiroth : A cet étage l’être a déjà acquis des structures psychiques et un embryon de vie spirituelle. Les reins vont signaler que toutes les acquisitions du premier étage ne sont que les germes (le rein a la forme d’un germe) de ce second étage. Dans le Livre de Job, Dieu l’invite à prendre sa force, son appui sur les reins : « Ceins tes reins, car je vais t’emmener dans un voyage difficile. » Et l’Ange Gabriel va se présenter à la porte de Tobie avec la ceinture autour de ses reins et va l’emmener dans ce même voyage. Les reins sont une espèce de plate-forme qui doit être solide pour pouvoir construire nos douze vertèbres sur laquelle elles reposent. L’oreille symbolise le passage de la deuxième porte. Elle récapitule le corps tout entier. Le dernier étage, celui de la tête va aussi récapituler tout le corps. Nous reviendrons plus tard à la signification de la bouche, du nez, des yeux, etc. Au sujet de Jacob et de Caïn : La tunique de peau d’Esaü est la future tunique de lumière. Notre nature actuelle, celle de la tunique de peau, est notre sous-nature. Tandis que notre vraie nature est celle qui correspond à Jacob et que nous appelons à tort, surnaturelle. Elle est tellement recouverte de la tunique de peau qu’on n’y croit plus. Jacob va prendre sur lui la tunique de peau de son frère et c’est pour cela qu’il va acheter son droit d’aînesse. En mangeant « le roux », symbole de l’homme rouge, il va aussi hériter des pouvoirs d’Esaü. Dans la profondeur, Jacob et Esaü sont le même homme avec sa nature première animale et avec sa vraie nature. Et lorsque Jacob que nous portons en nous, prend conscience que toutes les énergies doivent être canalisées, nous assumons la tunique de peau, c’est-à-dire que nous prenons tout l’héritage sur nous et nous entrons dans le deuxième quadrilatère. A ce moment-là, Jacob, après avoir passé le torrent de Jabboq, symbole de l’eau, de la gestation, a passé le torrent de ses passions et il rencontre l’Ange. Pourquoi l’Ange ? Dans la Bible c’est le mot Ich qui veut dire homme. A partir du moment où l’homme prend en main sa destinée de dieu en devenir, il va avoir à intégrer en lui les différentes hiérarchies d’énergies. Chaque échelon de l’échelle de Jacob va correspondre à un sommet d’énergies supplémentaires, jusqu’à ce qu’il ne soit plus lui-même, qu’énergie. Notre somme d’énergie correspond à celle que nous allons rencontrer et à laquelle nous aurons à nous opposer. Si nous sommes vainqueurs nous pourrons passer le seuil dont l’Ange est le gardien. Et Jacob est blessé à la hanche. A chaque lutte il y a blessure. Il en est de même dans nos vies personnelles. Notre corps inscrit toujours un passage et celui de la hanche est tellement important, que chez la plupart des êtres les énergies viennent frapper toute la vie à ce niveau là. La plupart des vieillards ont une fracture du col du fémur, qui est une blessure initiatique. Il y a deux barrières fondamentales, celle arrière des reins, la hanche, et celle de l’épaule, les clavicules qui sont les clefs de la porte supérieure. Et ces deux blocages intérieurs réagissent à ces deux niveaux sur notre corps. Nous avons aussi à faire un travail sur notre corps
pour débloquer les résistances musculaires à ces deux endroits. Ce sont les deux grosses barrières de notre évolution. Combattant avec l’Ange, Jacob va assumer les douze tribus d’Israël, il va entrer dans le « douze ». Il va être le fondateur de ce peuple qui symboliquement est toute l’humanité et qui est aussi chacun de nous. Annik de Souzenelle aborde le thème de la circoncision et du but du mariage qui n’est pas la procréation selon le nombre, mais de faire de deux, un. Nous en avons déjà parlé précédemment. Nous verrons dans les mythes que les enfants des héros ne correspondent pas à des enfants de chair, mais à des fruits essentiels de l’être. Le premier Concile chrétien ayant aboli la circoncision, l’Apôtre Paul dira : « Circoncisez vos cœurs, circoncisez vos oreilles ». On va tailler toujours plus haut. Il faut bien prendre conscience que, ce que nous n’avons pas fait dans notre vie actuelle, il faudra le faire après. C’est pourquoi nous avons intérêt à réaliser le plus possible dès maintenant, parce que ce sera certainement beaucoup plus difficile après. A. de Souzenelle a trouvé dans Jung l’écho de sa pensée, à savoir que les personnes qui meurent sans être passées par cette porte, qui donc ont besoin de la tunique de peau qu’ils n’ont plus, parasitent les vivants. C’est certainement à l’origine de beaucoup de difficultés psychiques dont on ne connaît pas la source. Il est indispensable que celui qui est parasité, assume cette possession dont il est l’objet et ne la coupe pas, mais au contraire qu’il aide celui qui le possède et qui, la plupart du temps, est de sa descendance par le sang. Seule la vie spirituelle pourra lui permettre de le faire. A. de Souzenelle a l’impression qu’on est à l’aube d’un réveil, qu’il y a de plus en plus de gens conscients de ces choses. Toutes ces dernières générations ont été parasitées les unes par les autres. Le jour où l’humanité va en être consciente, elle essayera de se libérer et toutes les générations que nous mettons au monde, seront libérées d’emblée. Question : Qu’entendez-vous par énergie et les énergies ? Réponse : Les énergies archétypales sont l’énergie divine. Les Hébreux disaient qu’à travers les dix Séphiroth, il ne s’agissait pas de dix énergies, mais d’une seule qui va se manifester sous dix aspects. Elles sont au nombre de dix sans que pour cela l’unité soit rompue. La toute première phase de la Bible dit déjà : « Les dieux crée le ciel et la terre », le verbe créer est au singulier alors que le sujet est au pluriel. Notre mental doit dépasser quelque chose pour approcher la Réalité. Question : Comment les énergies peuvent-elles se matérialiser ? Réponse : Nous ne pouvons le constater et l’approcher que par analogie. C’est ce que le mythe nous propose, dans l’échelle de Jacob par exemple, qui relie ciel et terre, c’est-à-dire le haut et le bas. Il s’agit de l’intérieur de l’être, de son noyau vital et puis de la superficie que nous sommes et que nous vivons de manière immédiate. Lorsque nous faisons appel dans la méditation ou dans
la prière à ce monde des archétypes à travers quelque chose de très précis, il n’y a aucun doute que les énergies archétypales descendent sous forme d’une information au sens étymologique du mot : formé par l’intérieur, et nous apportent une réponse. C’est le grand mystère du dialogue entre le Divin et nous, entre le monde créé et le monde incréé. Au sujet des Gardiens du Seuil : Ou bien nous sommes vainqueurs et alors nous intégrons leur énergie et nous passons, ou bien le monstre nous mange. Si nous ne sommes pas prêts pour passer, les énergies se retournent contre nous. Nous avons dans notre vie des Gardiens du Seuil sous forme d’événements, ce sont nos maîtres. Toutes nos peurs que nous projetons à l’extérieur décèlent toujours des forces que nous n’avons pas intégrées. Nous possédons toutes ces énergies et devrions en être les maîtres. Dieu a dit aussitôt qu’il eut créé l’homme : « Qu’il domine sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur les animaux des champs… » Il emploie le mot « dominer sur » qui veut aussi dire en hébreux « descendre dans », entrer, pénétrer. Pour dominer sur… il faut pénétrer dans… intégrer. Alors nous devenons. Compte rendu de la réunion du 10.11.1977 Nous allons continuer aujourd’hui l’étude de ce qui se passe au niveau du triangle du plexus urogénital, Hod-Netzah-Yesod, qui est vraiment le symbole de la matrice de l’homme lorsqu’il commence à quitter son père et sa mère et qu’il entre dans sa propre nature. Dans la matrice du foyer maternel et paternel il a acquis pratiquement presque toutes ses structures, physiques, affectives. Il se réveille maintenant à lui-même dans la partie médiane de son corps. Il fait un peu ce que fait Œdipe lorsqu’il se dit « J’appartiens à une autre race ». C’est le moment où les parents ont à se retirer sur la pointe des pieds, pour que l’enfant se prenne en main et fasse sa propre mutation. Il s’agit d’une mutation qui va assurer sa naissance par en-haut, la naissance de l’être essentiel dans l’homme. Tout ce qui contribue à une gestation, est symbolisé par une épreuve dans le noir. Cette traversée est très dure pour les jeunes. Pleins de force ils ne savent comment l’investir, ils ne connaissent pas leur place juste. Et s’ils ne la trouvent pas, ils ne seront pas nourris par le cordon ombilical subtil qui les relie à l’essence de leur être. Les mythes vont rendre compte de ce passage. Nous l’avons déjà vu dans celui du Déluge chez les Hébreux, de même que dans celui de l’esclavage en Égypte et du passage dans la Mer Rouge (se reporter aux précédents comptes-rendus). Tant que l’homme n’est pas entré en contact avec son pôle intérieur qui va lui apporter sa vraie énergie, sa vraie force, sa véritable information et qu’il n’aura pas exprimé cette énergie qui ne demande qu’à être extraite pour devenir lumière, il aura un chemin extrêmement difficile et long à parcourir, il sera dans l’esclavage, il aura à remonter l’échelle de Jacob. Parlons maintenant du mythe du Labyrinthe de Cnossos. C’est un mythe grec qui va nous rendre compte de ce qui va se passer dans le premier quadrilatère. Ce mythe est celui du non-sens, de l’absurde, de l’ignorance, de la non-connaissance. Le drame de l’homme c’est qu’il ignore tout dans ce passage.
La reine de Crète, Pasiphaé, femme de Minos, reçoit la visite du dieu Neptune sous la forme d’un taureau éclatant de blancheur. Ensorcelée par lui et pour accomplir ses amours, elle se fait construire une vache d’airain par l’architecte de la cour, Dédale. Et de ces amours va naître ce fameux Minotaure, le monstre à corps d’homme et à tête de taureau, portant les deux noms de ses deux pères, Minos, l’homme et taureau, le dieu. Minos fait construire par Dédale un labyrinthe au centre duquel il enferme le monstre, en même temps que Dédale et son fils Icare, tous deux légendaires, le premier pour sa sagesse (Hochmah), le, deuxième pour son intelligence (Binah). La réalité du labyrinthe peut être vécue sur deux plans, représentés d’une manière très physiologique par les intestins et, d’autre part, par notre démarche à l’intérieur de nous-mêmes. Sur ordre de Zeus, le roi de Grèce doit livrer tous les ans au Minotaure qui les dévore, sept jeunes gens et sept jeunes filles. Et ces jeunes gens et ces jeunes filles s’embarquent à chaque fois tout joyeux et insouciants sur des bateaux et pourtant ils vont à la mort, car ils ne sont pas capables d’affronter le monstre. Le roi d’Athènes, Égée, eut un fils Thésée, avec une princesse rencontrée dans un pays lointain et au moment de repartir pour rejoindre son épouse en Grèce, il abandonna son fils à la princesse afin qu’elle l’élève. Mais avant de partir il laissa à son fils une épée d’or et des sandales d’or qui furent cachées sous une grosse pierre. Et Égée dit à la mère de l’enfant qu’elle ne devra remettre à son fils l’épée et les sandales qu’au moment où il sera adulte. Mais un beau jour, Thésée comme Œdipe, voulut rechercher son père, ce qui signifie chercher sa véritable nature, sa source, son devenir. Il quitte donc sa mère et par une intuition profonde se dirige vers Athènes. Mais auparavant il a découvert en soulevant la grosse pierre, l’épée et les sandales d’or. Et cette découverte revient à découvrir en lui cette existence divine à la réalisation de laquelle il part, emportant avec lui les moyens qui lui permettront de l’atteindre. Le fait de soulever la pierre est déjà un symbole, celle-ci représentant symboliquement l’homme, la pierre brute que nous sommes au départ et qui, en la soulevant, suscitera une force qui permettra à Thésée de faire le voyage vers sa source. En faisant l’effort de soulever la pierre, il rassemble toutes ses énergies. De nombreuses aventures l’attendent sur son chemin, dont une des plus importantes sera sa rencontre avec le géant Péripétès qui, avec sa massue de cuir, a le pouvoir d’écraser tous ceux qui se trouvent sur son chemin. Thésée s’affronte à lui, l’écrase et s’empare de la massue. Il aura ainsi deux armes, l’épée d’or et la massue de cuir. Thésée arrive au palais du roi Égée et ne se fait pas encore connaître. Or la reine Médée, une magicienne, tombe éperdument amoureuse du jeune homme. Thésée ne cédant pas à ses avances, la reine vexée par son refus, l’accuse auprès du roi d’avoir voulu la séduire. Le roi, pour se venger, décide au cours d’un banquet de verser du poison dans le verre de Thésée. Mais celui-ci voulant porter un toast, levant son bras, le roi aperçoit l’épée d’or sous son manteau et, renversant la coupe, il tombe dans les bras du jeune homme en disant: « Tu es mon fils ». Voilà donc Thésée investi d’un pouvoir royal, aidant son père dans la conduite du royaume. Mais apprenant le sacrifice des jeunes gens exigé par le roi d’Athènes, il décide d’aller affronter le
monstre. Or la durée du sacrifice était fixée à dix ans. Pour bien comprendre sa signification il faut voir dans le mot sacrifice celui de sacré, faire le sacré. Ces jeunes énergies ont à nourrir l’enfant divin caché sous la forme du Minotaure, et qui doit un jour naître de lui. Le roi avertit son fils qu’il n’est pas encore prêt pour cette tâche, mais Thésée n’en tenant pas compte part tout de même. Le roi savait que les dix années complètes devaient être accomplies, et, inquiet, il demande à son fils afin qu’il sache plus rapidement le résultat du combat, de hisser une voile blanche en signe de victoire et de faire hisser une voile noire en signe de défaite. Nous sommes, en vérité, toujours impatients. Un Père de l’Église a dit : « Nous voulons tout de suite être des dieux et nous ne savons pas gravir chacun des échelons avec sagesse ! » Arrivé en Crète, Thésée se présente devant sa mère Pasiphaé et le roi Minos son époux et rencontre leur fille Ariane. Ariane est le même mot qu’araignée. C’est elle qui travaille, qui tisse les fils de la toile de notre vie essentielle. Un amour immense naît dans le cœur des jeunes gens et Ariane va donner à Thésée le fil qui symbolise le fil de la connaissance, et qui lui permettra de se retrouver dans le labyrinthe dont aucun de ceux qui y sont entrés, n’est jamais ressorti. Mais, n’étant pas assez armé intérieurement et ne sachant pas se servir de son épée d’or, tout en ayant la connaissance, Thésée va tuer son être divin en tuant le Minotaure avec sa massue de cuir qui est liée à la tunique de peau. C’est dramatique, car le Minotaure ne devait pas être tué, il devait être intégré, et au lieu de continuer son chemin, Thésée revient en arrière. Revenir en arrière est contre-initiatique. Quelque chose en lui sait cependant qu’il a manqué sa tâche et il hisse la voile noire. Il n’est pas devenu le Minotaure, le Gardien du Seuil. Égée voyant cela, se jette et se noie dans la mer, qui désormais portera son nom. Autre acte dramatique, Thésée dans son amour emmène Ariane avec lui, la laissant dans une île où il l’oubliera. Elle reste seule, mais va être recueillie par Dionysos qu’elle épousera. Elle continuera son chemin. Mais Thésée, rentrant à Athènes, va commencer une vie fatale qui se terminera aussi tragiquement. Les Grecs nous montrent comment on peut avoir l’air de faire du bien et faire finalement du mal, parce qu’on n’obéit pas aux lois rigoureuses de la démarche initiatique. Nos lois ontologiques sont des lois libératrices. Pour affronter le monstre il fallait obéir au temps, aux dix années. A chaque étape correspond un temps, nous n’avons pas le droit de tricher. Annik de Souzenelle parle alors des vertus psychiques, la volonté, le courage, l’héroïsme, le service des autres, qui ne sont efficaces qu’en temps utile et que nous employons souvent à contretemps. Le mythe de Thésée se termine d’une manière très intéressante. Le fait que Dédale et Icare soient enfermés dans le labyrinthe, nous met devant le symbole de la construction continuelle de notre propre labyrinthe. Nous passons notre temps non pas à tisser la toile de notre démarche initiatique, mais du labyrinthe dans lequel nous nous enfermons, autrement dit, de notre prison que nous partageons avec nos enfants. Nous ne pouvons témoigner devant ceux-ci d’une voie de lumière. Par toutes nos sécurisations, par nos machines, par nos systèmes sociaux, notre
civilisation nous enferme de plus en plus. On fait de nous des mineurs qui ne découvrent jamais l’essentiel de leur être. Dédale et Icare veulent sortir du labyrinthe et demandent à Pasiphaé de leur faire apporter des ailes artificielles et de la cire pour les fixer. Comme la chenille va créer son cocon, son labyrinthe, quand arrive le printemps, dans lequel elle va entrer dans une gestation merveilleuse, puis dans lequel elle va mourir pour renaître au stade de papillon, nous sommes tous appelés à devenir un jour symboliquement ce papillon, si nous savons laisser faire cette gestation à l’intérieur de notre cocon. Mais Dédale et Icare n’ont pas fait cette démarche et c’est ainsi qu’ils ont recours à l’artifice. Ce sont tous les masques derrière lesquels nous nous cachons, masques de médecins, d’ingénieurs, de père, de mère de famille, et derrière lesquels nous ne sommes que de pauvres êtres ignorant de notre vocation essentielle. Dédale et Icare vont s’envoler et Dédale qui est la prudence de la sagesse, recommande à son fils : « Ne vole pas trop bas, tu serais aspiré par les vapeurs de la mer ; ne vole pas trop haut, tu serais brûlé par l’ardeur du soleil ». Or Icare est le symbole de cet intellect qui veut toujours aller plus loin, plus près du soleil, qui veut en connaître davantage. Il ira si loin, qu’un jour ce sera l’éclatement, la cire va fondre et Icare est précipité dans l’eau. C’est le sort qui menace toutes les civilisations comme la nôtre. Elles portent en elle le germe de la mort qu’on pourrait appeler prométhéenne. Nous allons être tués par cet atome dont nous allons chercher le secret et dont nous allons tirer l’énergie, car il sera plus fort que nous. La seule énergie qui soit plus forte que l’atome, c’est celle que nous portons en nous, qui nous permettra de traverser les degrés initiatiques, de nous mesurer au Minotaure avec l’épée d’or, et d’accomplir encore tous les étages qui restent à monter. A ce moment nous atteindrons notre noyau. Les explosions nucléaires du monde seront alors recouvertes d’une façon grandiose par l’explosion nucléaire de l’homme, car tout deviendra énergie. Ce sera la transfiguration totale qui est décrite dans la Jérusalem céleste et annoncée par le Prophète. Nous retrouvons dans Dédale et Icare les deux énergies divines Hochmah, la sagesse, et Binah, l’intelligence qui sont la base du triangle supérieur. Or les Prophètes et les Psalmodistes parlent souvent de la sagesse et de l’intelligence divines en comparaison avec la sagesse et l’intelligence des hommes. C’est pourquoi l’Apôtre Paul a dit : « La sagesse de Dieu est folie pour les hommes et la sagesse des hommes est folie pour Dieu ! » Et encore : « Je détruirai la sagesse des sages et j’anéantirai l’intelligence des intelligents! Le Seigneur connaît les pensées des Sages. Il sait qu’elles sont vaines ! » et plus loin : « Que nul ne s’abuse lui-même : si quelqu’un parmi vous pense qu’il est sage selon ce siècle, qu’il devienne fou afin de devenir sage, car la sagesse de ce monde est folie devant Dieu !»
6: traversée du désert (Revue Panharmonie. No 171. Mars 1978) Compte rendu de la réunion du 8.12.1977
Il est curieux de voir dans les mythes grecs une réalité que nous touchons d’une façon tellement concrète dans cet Arbre des Séphiroth et, en particulier, dans la fausse sagesse représentée par Dédale et la fausse intelligence représentée par Icare, dont nous retrouvons l’aspect authentique en haut du deuxième quadrilatère, à la base du triangle supérieur. J’ai trouvé très intéressant le livre d’Arnaud Desjardins : « La Recherche du Soi », sous réserve d’une petite critique de ce qu’il dit de l’acceptation des événements en « entrant dans l’événement et en ne pas nous laisser envahir par l’émotion ». Dans ses exemples, Arnaud Desjardins va très loin, jusqu’à demander à une mère de rester insensible devant la mort de son enfant et de l’accepter. Cela est valable pour des personnes déjà extrêmement évoluées, mais lorsque cela arrive à des personnes n’ayant pas encore trouvé ce chemin, on risque de créer en eux une espèce de refoulement de leurs émotions et, finalement, tout cela est tellement étouffé en eux que ce n’est plus juste. C’est là qu’intervient l’intelligence divine qui permet d’avoir cette véritable attitude d’impassibilité après être entré dans la signification profonde de l’événement. Sans cela c’est la fuite. On ne peut absolument pas séparer sagesse et intelligence, la véritable sagesse implique l’intelligence de la chose. Lorsque saint Paul parle de la circoncision du cœur, cela ne signifie pas durcissement, mais au contraire que le cœur doit entrer dans l’intelligence divine, il doit y avoir reflet, réflexion. Le cœur ne pleure plus pour les mêmes choses parce qu’il reçoit une information. Il peut souffrir, mais l’homme ne souffre pas. Dans les Évangiles, le Christ ne dit pas « Je souffre », mais : « Mon cœur est triste jusqu’à la mort ». Car lui, il est déjà au-delà de la souffrance. Le stoïcisme est un état éthique qui s’établit en dehors de la connaissance du sens de l’événement. Ce n’est pas la sagesse ou l’intelligence divines, mais celles des hommes.
Les nombres qui vont signifier nos mythes correspondent à notre structure corporelle. Nous les retrouvons chez les Hindous
puisque le chakra nabhi palma aux dix pétales, le premier qui va s’ouvrir après la traversée du premier triangle, indique bien qu’il a fallu construire les dix vertèbres. Ensuite nous entrerons dans les douze dorsales correspondant au chakra à douze pétales. Le nouveau triangle que nous allons vivre nous fera rencontrer un nouveau labyrinthe, mais il sera de toute autre nature. Quoique situé dans les ténèbres, il sera informé par le triangle supérieur qui se reflète en lui. L’homme, en passant par cette Porte, a retrouvé la communication avec son triangle supérieur. Il n’avait pas encore ce contact dans le labyrinthe inférieur. Les parents, sortis de leur propre labyrinthe, n’y auront pas enfermé leurs enfants qui pourront, de ce fait, vivre par eux-mêmes ces moments-là. Ils y passeront de toute façon, mais ce sera moins épais, moins lourd, et l’enfant saura qu’il y a une lumière quelque part. Tous les mythes, celui de l’esclavage en Égypte, celui de l’anarchie et du Déluge, caractérisent le triangle inférieur dans lequel l’information fait défaut. Mais avant de le quitter, parlons du mystère chrétien du Baptême, parce que notre corps est lié à l’eau, l’eau matricielle, l’eau dans laquelle nous entrons, symbolisant cette gestation qui permettra de renaître à un autre niveau. C’est aussi l’eau urinaire, l’eau ou liquide séminal, celle des reins, de tout le bloc urogénital. Dans les schémas des temples chrétiens qui sont construits à l’image de l’homme la purification par l’eau bénite se situe à l’entrée du temple. Après vient le baptistère. Et ce n’est qu’ensuite, à la suite de ces deux purifications, que le Chrétien va entrer dans la nef qui correspond à l’étage intermédiaire. Puis viendra l’autre triangle supérieur qui correspond au cœur, au Saint des Saints, au mystère. La liturgie suit ce même cheminement. Le baptême du Christ se situe tout de suite après son enfance. Ce sera la période intermédiaire entre le départ avec ses parents et l’entrée dans son quadrilatère qui va être sa vie publique. Tout de suite après le baptême il va être emmené au désert par l’Esprit-Saint, au désert où le diable le tentera. C’est donc ce même schéma qui se déroule historiquement dans la vie du Christ. Et puis il passera le Jourdain. Celui-ci, qui prend sa source dans la montagne du nord de la Syrie, va descendre presque verticalement vers le sud dans le lac de Tibériade et, encore plus verticalement, il ira se terminer dans la mer Morte. Il est vraiment l’image de nos énergies le long de la colonne verticale, énergies qui vont vers la mort. Jourdain, en hébreux se dit Yarden et signifie descendre, et Noun qui est le poisson-germe, retour à une matrice, à notre source. Car pour monter, il faut descendre. « Quel est celui qui est monté, si ce n’est celui qui est descendu », dit l’Apôtre Paul. On peut trouver, en décomposant de différentes manières le mot hébreu de Jourdain, différentes notions dont celle de « dominer ». Pour dominer, il faut « entrer dedans…, descendre dans… et celle de rigueur, de justice, qui indique que c’est la tête qui commande, qui est « connaissance ». On pourrait donc interpréter le nom Jourdain par « commencement de la rigueur ». Et, en effet, le Christ commence à ce moment-là sa vie publique, son Grand Œuvre. Dans cette optique-là, Il va
se purifier dans le Jourdain et en même temps il purifiera aussi l’eau, ce qui signifie purifier les énergies, les retourner. Les eaux qui allaient vers la mer Morte vont symboliser ce retournement pour aller construire l’être. La blessure au pied sera guérie. Le psalmiste s’écrie : « Qu’as-tu mer pour t’enfuir ? « Jourdain, pour retourner en arrière ? « Qu’avez-vous, montagnes, pour sauter comme des béliers ? « Et vous collines, comme des agneaux ? » Nous avons suffisamment d’éléments à présent pour voir comment nous pouvons à ce niveau passer la Porte des Hommes, à partir de laquelle d’enfant nous devenons homme, au fur et à mesure que nous construirons nos douze vertèbres. Quel est celui qui peut se présenter devant la Porte des Hommes, qui peut se mesurer aux monstres-gardiens du seuil ? Qui a apporté tout son faire extérieur à l’intérieur de lui ? Seul vrai faire, où l’Esprit-Saint va œuvrer tantôt dans le champ de Tod (le bien) ou dans le champ de Ra (le mal), qui n’ont rien à voir avec le bien et le mal, mais avec la phase de lumière et la phase de ténèbre. Nous allons passer de l’obéissance à des lois extérieures à l’obéissance aux lois intérieurs, de soumis que nous sommes, nous devenons obéissants à ce maître intérieur qui peut parfois être vécu à travers un Maître extérieur. Au lieu des lois morales esquissées sous forme de béquilles, nous allons trouver les lois qui nous structureront, qui permettront aux énergies profondes de se retourner et de monter l’Arbre. Elles se trouveront souvent en contradiction avec les lois morales, car à ce moment-là on se trouve devant une redoutable liberté. Tout nous prouve que nous allons de ces lois morales qui représentent les secondes Tables de la Loi du peuple hébraïque, aux premières Tables pour l’observation desquelles le peuple n’était pas encore mûr. Et pour moi, Chrétienne, c’est le Christ qui est venu redonner ces premières Tables, car il a dit : « Je ne suis pas venu pour abolir la Loi, mais pour l’accomplir. » En l’accomplissant il la dépasse, il passe à une autre dimension de la Loi en posant des actes de vie pour le Sabbath. On trouve dans saint Luc un petit verset qui souvent est supprimé, c’est celui qui raconte qu’un jour de Sabbath le Christ voit un paysan en train de labourer. Indignation des Apôtres qu’il calme, et s’approchant du paysan, il lui dit : « Homme, si tu sais ce que tu fais, tu es béni par mon Père. Mais si tu ne sais pas ce que tu fais, alors sois maudit et transgresseur de la Loi. » Tout est résumé là. Nous avons tous, poussés par une certitude intérieure, été contraints à agir en dehors de la morale. Il est important de faire la distinction entre les vertus psychiques et les vertus spirituelles. Les premières ont un temps pour être pratiquées, elles sont le fruit d’une tension. Les secondes sont celles qui permettent de gravir les échelons, l’homme étant tout d’un coup projeté par des circonstances exceptionnelles, dans une action qui le dépasse. Ne nous apitoyons pas davantage sur la souffrance d’autrui, car comme l’a dit le Christ aux Apôtres qui voulaient consoler Marie-Magdeleine : « Laissez-la pleurer et gémir, l’Esprit-Saint travaille en elle. » Ne
nous substituons pas à l’Esprit-Saint. Il faut parfois aller jusqu’au bout de sa souffrance, il faut toucher le fond, car ce n’est qu’au bout de l’expérience qu’on fait son ascension. Question : Que faites-vous dans le cas d’une personne qui veut se suicider ? Réponse : C’est un immense sujet. Notre aide est très limitée, du moins notre aide immédiate. Je crois que par la communion intérieure, par la prière on peut beaucoup plus qu’on ne le pense. Et si alors nous n’empêchons pas le suicide, c’est que nous ne sommes pas devenus des êtres suffisamment purifiés pour aider par l’intérieur. Si mystérieux que soit le sort de l’homme après la mort physique, nous savons, lorsque nous commençons à entrer dans cette connaissance, que rien ne finit et qu’il y a toujours la possibilité de continuer son évolution après, ce qui sera beaucoup plus difficile. La seule chose que je puisse dire, c’est que l’homme qui est mort avant d’avoir passé cette Porte, comme c’est le cas pour la plupart, parasite les vivants au niveau de la famille. La mort survenue avant l’heure de l’accomplissement, je la considère comme une espèce de fausse-couche et je crois que le problème de l’avortement et de la peine de mort est le même problème. On n’arrête pas l’évolution du germe dans l’œuf. Mais je crois aussi que tuer l’âme est une responsabilité beaucoup plus grande et on la tue avec une facilité inimaginable. La mort physique n’est pas très grave, quoiqu’importante, parce qu’on va retrouver le même véhicule d’une autre façon. Nous allons maintenant nous occuper du passage dans le quadrilatère au niveau de ce changement total de catégories. Ce qui va caractériser ce passage, c’est le mariage. Les deux pôles de la dualité, au lieu d’être vécus dans l’opposition, vont être vécus dans la complémentarité, dans un mariage qui n’a rien à voir avec un petit compromis entre deux époux ou entre deux pôles de la dualité, mais véritablement ces deux pôles, qui ne vont rien perdre de leur intégrité profonde, vont être obligés par ce mariage à un dépassement d’eux-mêmes pour atteindre un troisième terme. Dans ce mariage de deux personnes différentes, il va y avoir mariage de chacun avec lui-même. Dans le mariage, la seule fécondité juste est celle de notre croissance. A partir du moment où l’homme gravit l’échelle, l’Esprit-Saint l’informe. (A. de Souzenelle cite certains passages de Jung qui le confirme dans sa manière particulière de s’exprimer.) C’est le travail du Divin en nous. C’est ce Faire en nous, avec un grand F, c’est toute une alchimie intérieure. Au sujet des chakras : Le corps est transmetteur de messages, les chakras qui s’éveillent se manifestent de façon douloureuse au niveau du corps. Il faut être vigilent sur ces informations et savoir ce qu’elles signifient, ne pas aller voir le médecin qui s’y perd. Quand Jacob a été blessé à la hanche, il s’est agit d’une blessure initiatique. Il était un enfant boiteux, nous sommes tous boiteux sans en avoir conscience. Réponse à une question : Nous pouvons lire à deux niveaux toute l’histoire des Hébreux et cela est aussi valable pour celle du Christ : historique et mythique. En tant que Chrétienne, je crois en l’historicité du Christ, mais je n’empêche personne de ne pas y croire. J’ai choisi la tradition judéo-hébraïque parce qu’elle est la base de notre civilisation occidentale. J’aurais pu partir de
n’importe laquelle, par exemple du mythe de la Genèse des Maoris de Nouvelle-Zélande qui est très belle et qui peut compléter la nôtre. Au sujet du dogme : Dans les premiers siècles chrétiens, il n’y avait que deux dogmes qui n’étaient pas exposés dans une forme contraignante, mais libératrice, parce qu’elles proposent tout le dogme trinitaire qui est parfaitement irrationnel et, d’autre part, celui de deux natures du Christ où vous avez les deux dimensions de l’homme Ich et El, la dimension Minos et Tauros. On retrouve cela partout. Ce sont les deux dogmes purs, les autres ont été surajoutés en Occident. Question : Quelle est la différence entre mythe et mystère ? Réponse : Tous deux viennent de la racine MI qui rend compte du Divin. Le mythe est le récit qui nous est proposé au niveau de notre compréhension immédiate, qui va nous permettre de lire avec une nouvelle conscience l’histoire réelle qui, elle, se situe au niveau du mystère. Le mythe est comme l’échelle qui nous permet de pénétrer le mystère. Il est le symbole du mystère. Le symbole et le mythe sont au service l’un de l’autre. Sur l’Ancien Testament : Il a été depuis toujours écrit en hébreux, puis traduit en grec, traduction sur laquelle repose notre texte français. L’hébreu est absolument intraduisible ; sur le plan linéaire, ce sont de perpétuels jeux de mots. Mais si vous entrez dans un travail comme celui que nous faisons ici, vous pouvez rester une vie entière sur un mot comme, par exemple, celui de « Bereschit ». On ne peut l’approcher qu’en entrant dans la contemplation. Les Hébreux disent qu’il y a soixante-dix marches et quand vous trouvez quelque chose de merveilleux, vous savez que c’est encore une toute petite première marche ! Compte rendu de la réunion du 12.1.1978 Nous allons aujourd’hui pénétrer dans le quadrilatère où nous avons rencontré le premier triangle, reflet du triangle supérieur et nous allons vivre la naissance, le passage par cette Porte qui est le col de l’utérus par en haut. Il ne s’agit pas de procréation, mais de création de nousmêmes à nous-mêmes, de croître pour monter l’Arbre. Nos béquilles sont ramassées, mais qu’allons-nous en faire ? C’est l’araignée qui nous l’apprendra par la manière dont elle tisse sa toile et par ce qu’elle fera de ce qui, pour elle, symbolise les béquilles. L’araignée va commencer par prendre son point d’appui et poser ses points de repère dans un endroit où, en général, il y a un courant d’air qui enverra les petits insectes venir se prendre dans sa toile pour lui servir de nourriture. Ces premiers fils posés, ce sera le tour des fils transversaux qui lui permettront de se situer dans son centre. Le centre a une très grande importance. De là, elle va sécréter un fil sec qu’elle va déposer en spirale jusqu’à ce qu’elle arrive sur le bord du fil de soutien qui va lui servir de « béquille ». Il va lui servir à ce que sert un échafaudage dans la construction d’une maison, parce que c’est en s’appuyant sur ce fil qu’elle va construire celui définitif pour revenir à son centre. Et à partir de là, elle va se retourner. Voyez le symbolisme du retournement qui est le mouvement fondamental de toute naissance. Elle va s’appuyer sur ce fil sur une patte et, avec une autre patte elle va rembobiner ce fil, tandis
qu’avec une autre partie de son corps elle va sécréter le fil humide, définitif, sur lequel vont venir se prendre les insectes et qui va prendre la place du fil sec. Nous allons la voir remonter toute cette spirale pour retrouver son centre. Que va-t-elle faire de sa petite bobine devenue inutile ? Elle va l’avaler, elle va l’intégrer, car qui dit avaler, dit intégrer des énergies. Or nos béquilles, il ne s’agit ni de les casser, ni de les jeter, mais d’intégrer le passé qu’elles représentent. Il s’agit d’intégrer toutes ces énergies, de les assimiler, ce sont elles que nous avons préparées et vécues souvent douloureusement dans ce premier étage. Elles seront la base de la nouvelle force que nous allons déployer pour être nous-mêmes cette petite araignée et construire notre toile. Lorsque nous étions dans le premier étage, nous nous sommes appuyés sur nos pieds. Toute notre vie nous nous appuierons sur nos pieds, puisqu’ils sont le germe essentiel qui, symboliquement, contient l’Arbre tout entier. Mais à partir de l’étage suivant, nous allons psychiquement, psychologiquement et spirituellement, prendre aussi appui sur ce nouveau germe que sont nos reins. Tout ce que nous avons vécu à l’étage inférieur, sera le nouveau germe de l’étage supérieur et constituera toute la force que nous allons trouver dans nos reins. Dans le mythe de Job que nous allons étudier, Dieu, s’adressant à lui, dira avant de l’emmener dans l’aventure extraordinaire qu’il va lui faire connaître : « Ceins tes reins », c’est-à-dire prends bien conscience et rassemble toutes tes forces. En hébreux, le mot rein contient les deux lettres qui forment la racine KOL, totalité. Autrement dit, le rein contient tout, comme tout germe contient la totalité du devenir. Et, dans les lettres qui suivent : Yod, HE, nous avons la totalité du devenir de l’homme, puisque ces deux lettres sont les premières de Yod-Hé-Vov-Hé, qui est la dimension divine de l’homme. Nous avons maturé l’être physique et psychique, maintenant nous avons à mettre au monde l’être divin qui naîtra par la Porte dite des Dieu. Pourquoi avons-nous ici la Porte des Hommes ? Parce que seul celui qui est un homme peut y passer. Celui qui n’a pas passé cette Porte n’est pas un homme, même s’il a soixante-dix ou quatre-vingts ans. Il est extrêmement important à l’heure actuelle que nous devenions des adultes pour être plus forts que nos créations, sans quoi elles nous mangeront. Nous créons des monstres qui nous mangent, au lieu que ce soit nous les maîtres ! J’ouvre une parenthèse : je regardais l’autre jour le trident fourni par Yesod qui en est la base et aussi toute cette ouverture vécue au niveau urogénital de la sexualité et je me disais que le passage que nous vivons là correspond à l’expérience de la tentation du Christ par le diable, dans le désert, où l’Esprit-Saint l’a amené. Le diable va lui proposer trois grandes tentations à l’image de cette espèce d’explosion de forces qui sort de Yesod, et qui va s’exprimer à travers trois éléments fondamentaux qui peuvent être vécus sur deux plans : la jouissance, la puissance et la possession. L’homme est appelé à jouir du Divin, d’une puissance dont notre corps rend compte et que nous pouvons tous vivre dans l’orgasme au niveau du corps. La rencontre de l’homme et du Divin se fait dans un orgasme qui dépasse tout ce que nous pouvons imaginer et qui est une extase
extraordinaire que les grands Saints ont vécue. Donc, cette jouissance est juste, elle est une des constituantes de l’homme, à condition toutefois qu’il n’investisse pas tout là et sache que ce n’est qu’un prélude à l’unique rencontre. La puissance : l’homme est appelé à avoir tous les pouvoirs selon la Genèse. Il doit dominer sur la Création toute entière, sur les poissons dans l’eau, sur les oiseaux dans les airs et sur les animaux de la terre. Si cette puissance sert à écraser les autres, elle est à côté de ce à quoi elle est appelée. La possession : « Bienheureux les persécutés pour la justice, car le Royaume des Cieux est à eux ». La terre n’est que le prélude à la possession du Royaume tout entier. Ce sont les trois éléments fondamentaux constitutifs de l’homme. Son drame, c’est quand il les investit de travers. Nous reviendront sur cette notion de tentation, parce que celui qui va entrer dans ce quadrilatère, va entrer dans le désert. C’est le même cas que celui du passage de la mer Rouge, après que les Hébreux aient été esclaves des Égyptiens. Nous sommes tous esclaves en ce monde aussi longtemps que, par une prise de conscience, nous n’en soyons sortis pour entrer dans le monde de la libération. Avant de passer cette Porte, nous étions déjà dans le désert, mais nous ne le savions pas. Alors que celui qui passe cette Porte sait qu’il est dans un désert, c’est-à-dire dans la stérilité. Ce n’est qu’alors que nous pouvons devenir fertiles. Une question est posée sur le symbolisme du pied blessé, à laquelle répond A. de Souzenelle et qui a été traitée au début de ces entretiens. M. Cacacé précise : Le pied qui est touché est le support. Si le pied d’un tabouret a été touché, le tabouret ne peut plus tenir debout. Tout a un support ; si celui-ci est endommagé, le reste s’effondre. A. de Souzenelle : Le temps du désert est très important. Nous le verrons quand l’humanité va passer par la Porte supérieure. Saint Jean dit dans l’Apocalypse : « Quelle est celle qui sort du désert, parée de riches vêtements ? » Symboliquement, c’est toute l’humanité qui sort du désert et qui va se revêtir de vêtements de plus en plus somptueux pour atteindre à l’étage supérieur. Mais nous, nous sommes encore à la traversée du désert, à notre non-fécondité, à l’instar des femmes stériles de la Bible. Qu’est-ce que nous allons faire au désert ? Nous n’allons pas tellement « faire », qu’ « être faits ». C’est par le non-faire extérieur que nous allons assumer ce faire. Le mot faire est très important chez les Hébreux. Il y a dans la Bible, dans la Genèse une phrase très intéressante qui est mal traduite ou pas traduite du tout : « Voici les enfantements des cieux et de la terre, lorsque Dieu les créa pour les faire. » Que signifie « créer pour faire ? » Il ne faut pas confondre faire et parfaire. Parfaire, la perfection, chez les Hébreux, c’est la mort, car on ne peut pas aller plus loin. C’est la brisure nécessaire pour que ce parfait engendre un nouveau germe et renaisse plus loin. Ce « faire » est comme l’argile dans la main du potier ou encore comme le lait qui se caille dans
la main du fermier qui va faire son fromage. Nous avons à être retournés dans tous les sens et pris dans une pâte qui se soulèvera. Notre vocation est bien plus d’être faits que de faire et c’est notre drame d’être continuellement tentés de « faire » à l’extérieur. M. Cacacé : confirme la signification de « parfaire » qui est le propre de Dieu-le-Potier, nousmêmes étant l’argile. A. de Souzenelle : C’est le travail de l’Esprit-Saint en nous. Notre danger c’est de vouloir prendre sa place par un altruisme social, par un sentiment de pitié qui empêche son travail en nous. C’est dur à dire et dur à faire. Voir un enfant qui souffre ! Et pourtant il faut qu’il aille au bout de son expérience. Nous allons dégager les grandes lignes de ce qu’est le « Faire ». La Création dont l’homme fait partie et qu’il récapitule tout entier, puisqu’il est lui-même un cosmos, est d’ordre de séparation. Notre loi fondamentale dans cette incarnation, c’est de vivre la dualité, nous avons à prendre les deux pôles de la dualité non pour créer un troisième terme, mais dans un dépassement des deux, afin de construire nos douze vertèbres qui correspondent sur un plan cosmique aux douze mois de l’année, aux douze signes du zodiaque, à ce dodécaèdre qui est fondamentalement le nombre de l’incarnation, trois fois quatre « qui ne peuvent se séparer, dit le Saint, béni soit-Il, car l’un a constamment besoin de l’autre ! » Si nous voulons vivre ce mariage et construire nos douze vertèbres, nous allons avoir à vivre des montées et des descentes dans la profondeur des ténèbres. Si nous voulons entrer par la Porte des Dieux et vivre cette extase dont je vous parlais tout à l’heure, il faudra que nous descendions dans les profondeurs de nos ténèbres. Cette montée vers la lumière est magnifiquement traduite dans la vie du Christ par la montée au Thabor. Le mot Thabor en hébreu signifie ombilic, c’est l’ombilic cosmique. On est si bien dans cette expérience lumière que l’Apôtre Pierre dira au Christ : « Rabbi, il fait bon demeurer ici, dressons trois tentes… » Et le Christ va non seulement l’en empêcher, mais va l’obliger à descendre de la montagne, liant immédiatement cette expérience à celle des ténèbres qui va suivre. Car, interdisant aux trois Apôtres d’en parler, il dit : « Vous ne parlerez pas de ces choses que lorsque le Fils de l’Homme sera descendu aux Enfers et ressuscité. » Si nous restons uniquement dans l’expérience lumière sans connaître celle des ténèbres, nous sommes dans une impasse ; et si nous restons uniquement dans l’expérience ténèbre sans celle de la lumière, nous allons aussi être bloqués. Dans l’Une par le haut et dans l’autre par le bas. Cette expérience, nous avons à la vivre comme l’ont vécue tous les grands personnages de la Bible : Noé, Job, Tobie. L’homme doit assumer cette descente dans les profondeurs jusqu’à ce qu’il en touche le fond. Et là il rencontre le trident qui lui permettra de retourner et de le retrouver par en haut.
Dans toutes les traditions, cette descente dans les profondeurs est illustrée par le mythe du forgeron. Nous sommes nous-mêmes constitués comme une forge. Le métal vil que nous sommes encore va être éprouvé par le feu et ensuite tous les organes vont à avoir à jouer leur rôle. Ce n’est qu’en passant dans cette forge que nous construirons les forces nécessaires, les structures qui, seules, nous permettrons de passer par la Porte. M. Cacacé : Ne croyez pas que ce que Madame de Souzenelle vient de dire soit à « apprendre » et que cela se situe très loin de nous dans l’espace et dans le temps depuis des milliers d’années. C’est vous qui allez faire l’expérience de la lumière et de la ténèbre, il faut vous y préparer, car peut-être ne le saurez-vous même pas. Ce ne sont pas des expériences simultanées, elles se suivent chronologiquement. Nous ne pouvons pas faire deux choses contraires en même temps. Il faut vous préparer, heureux ceux à qui des preuves sont envoyées. Nous sommes dans un monde qui est le reflet, le miroir de ce qui se passe dans l’univers et qui rend compte à chaque génération de ce que tout est lié dans l’univers. Il n’y a pas de possibilité que les quatre points cardinaux ne soient pas liés à l’homme, aux couleurs et à tout le reste sans exception. L’Univers est un, tout est lié et c’est pourquoi nous sommes liés à Dieu. A. de Souzenelle : C’est uniquement parce que nous n’en avons pas encore conscience que nous vivons des états de séparation. Lorsqu’il a remonté l’Arbre, l’individu acquiert la conscience cosmique et est un avec les autres. Il a la communion totale. M. Cacacé : Les différentes traditions sont aussi toutes liées. Chacune s’est exprimée à sa manière et lorsqu’elles se sont rencontrées, elles ont constaté cette similitude. Comme il en est de même pour les astres, les choses sont telles, que le soleil naît au moment d’une nouvelle mort et que la mort et la renaissance se passent au même moment. C’est difficile à comprendre, mais ce n’est pas difficile à appréhender par la pensée. Question : Comment peut-on être conscient d’avoir franchi une Porte ? A. de Souzenelle : Celui qui a passé cette Porte a trouvé sa place. C’est comme l’enfant dans le ventre de sa mère, s’il ne trouve sa juste place dans l’utérus il ne sera qu’un avorton et cause de fausse-couche. Lorsque nous trouvons notre vraie place dans ce monde, nous commençons à entrer en gestation. Mais nous ne la trouvons que lorsque nous avons cessé de la chercher selon notre petite volonté et nos petits critères de sécurisation. M. Cacacé : Vous demandez la preuve par neuf, le critère, l’étalon par lequel on peut mesurer qu’on est ici ou là. Les personnes qui ont même dépassé ce stade n’en parlent jamais de la même façon. Ce que je peux vous dire, c’est, préparez-vous, travaillez, faites un effort pendant assez longtemps et ne vous occupez pas du reste ! Vous y arriverez sans le savoir. On a l’habitude de dire qu’un niveau ou qu’un plan est plus haut que l’autre. Ce n’est pas cela, il y a la perpendiculaire. Le plan de la matière qui contient beaucoup plus que la matière, même une partie du mental, est horizontal. Et lorsqu’on arrive au centre on a progressé. Le labyrinthe illustre bien ces choses-là, mais il n’est pas uniquement fait pour qu’on en sorte.
A. de Souzenelle : Bien sûr, il y a le labyrinthe sacré, celui du mandala. La nef dans les églises correspond à cet étage-là, c’est là où le peuple « se fait » dans l’église. M. Cacacé : Que veut dire « nef » ? Regardez bien une cathédrale, gotique de préférence, c’est un bateau, l’Arche est renversée. Il faut qu’elle soit renversée, il faut qu’elle soit dans les ténèbres, l’incubation se fait toujours dans le noir
7: l’épreuve du feu Compte rendu de la réunion du 9.2.1978 A. de Souzenelle revient rapidement sur ce qui a été exposé la fois précédente, à savoir qu’à partir des deux centres représentés dans l’Arbre des Séphiroth dans Tiphereth, correspondant chez les Hindous au chakra du cœur, nous allons entrer dans le quadrilatère exprimé si merveilleusement par Noé dans l’Arche où il fait l’expérience du mariage, mariage de la ténèbre et de la lumière, que nous aurons à vivre à cet étage-là. Si les mariages réalisés dans le premier étage sont beaucoup plus liés à des pulsions psychophysiques, le vrai mariage est celui du deuxième étage qui tiendra compte des valeurs mêmes de l’être et qui fait appel à une qualité d’amour bien supérieure, d’un amour qui va passer par l’épreuve du feu. L’eau purificatrice du Déluge devient dans l’Arche un feu purificateur, illustré par la parole de Saint Jean-Baptiste : « Moi, je vous baptise d’eau, mais Celui-ci vous baptisera de feu ». Ce sont deux étages différents qui font que l’homme qui est ici et l’homme qui est là (dans les deux étages), sont d’un ordre différent. Beaucoup d’entre nous ont ressenti combien ils devenaient étrangers à eux-mêmes et étrangers aux autres. C’est la conséquence du passage à un autre plan avec ce qu’il implique de rencontres nouvelles, avec des êtres qu’on a l’impression d’avoir toujours connus, quelle que puisse être la différence d’âge des uns et des autres. Vouloir supprimer les classes sociales est un drame de toutes ces idéologies qui ne peuvent être réalisées en profondeur que lorsque nous aurons rejoint les archès. Pour bien comprendre ce qui se passe au niveau du quadrilatère supérieur, du travail intérieur que nous avons à y faire, nous aurons besoin une fois de plus, de nous appuyer sur des mythes. Les rêves aussi souvent en rendent compte. (A. de Souzenelle cite un exemple). Nous allons aborder le mythe de Job qui rend compte le plus parfaitement de ce passage par la Porte des Hommes. Job est présenté comme appartenant à la terre d’Uts. Il y a un rapport étroit entre nous et la terre où nous sommes nés. Ce n’est pas par hasard. Si nous n’avions pas perdu la connaissance des forces telluriques, nous comprendrions pourquoi nous sommes nés là et pas ailleurs. Les Chinois en tiennent compte. Le mot UTS renferme toute une symbolique et exprime que l’homme se situe entre ciel et terre entre lesquels est toute la création. Il est au centre d’une croix qui unit toute la branche latérale avec la branche verticale. C’est pourquoi il va être crucifié parce qu’il
faut qu’il incarne sa qualité d’homme. Autour de la lettre centrale hébraïque qui signifie l’homme, les deux lettres qui l’encadrent sont le mot « Arbre ». Et nous pouvons traduire UTS par « l’homme dans l’Arbre ». Job est au cœur de son Arbre, dans la moelle de son os. On peut être parfaitement bon, parfaitement gentil et serviable, moralement bien, sans pour autant être au cœur de son Arbre. Job est parfait, il est très riche par ses acquisitions matérielles, mais aussi par l’acquisition de ses énergies. Il a une grande richesse intérieure. Ses nombreux enfants ne sont pas toujours ce qu’il faudrait mais après leurs écarts de conduite, Job les purifie, leur fait faire toutes les ablutions nécessaires, afin qu’ils soient bénis. Job, comme Noé, est parfait entre les parfaits de son temps. Et voici que se produisent des séries de calamités : un ouragan terrible détruit ses champs, ses troupeaux sont décimés, et ses enfants sont passés au fil de l’épée par une peuplade ennemie. Et à chaque fois le serviteur dit : « Et je reviens, moi seul, Seigneur, pour te le dire… ». Quels sont ces serviteurs qui reviennent seuls ? Ce sont ceux qui vont ensuite symboliquement assurer le travail. Pourquoi Job a-t-il perdu tous ses biens ? Parce qu’un dialogue étrange a eu lieu entre YodHé-Vov-Hé et Satan, Yod-Hé-Vov-Hé ayant autorisé ce dernier, afin de lui prouver la sincérité de Job, enlever à celui-ci tous ses biens, sans toutefois toucher à son corps. Si Yod-Hé-Vov-Hé représente la dimension divine que l’homme porte en lui potentiellement, cela ne signifie pas qu’il y ait un Dieu qui est celui que l’homme doit devenir et un autre Dieu extérieur. Notre mentalité actuelle est tellement compartimentée qu’il est difficile pour nous, Occidentaux, d’exprimer et de comprendre ce grand mystère divin. Le Divin se révèle à nous sous plusieurs aspects dont celui de cette dimension à laquelle l’homme est appelé. Toute la tradition orale identifie Satan à l’Ange déchu, au mystère de la chute des Anges. Je ne me permets pas de le contester, mais il faut bien saisir qu’il y a au niveau du « Faire divin » une obligation pour que, à un moment donné, l’homme devienne divin, pour détruire ce qu’il était et pour l’obliger à se refaire germe pour passer à un niveau supérieur. Ce processus de destruction est indispensable, c’est pour les Hindous, ce que représente Shiva qui détruit et qui reconstruit avec les mêmes matériaux qui vont être transmutés. Le mot Satan en hébreux, de par la composition et la signification des lettres qui le désignent, signifie « celui qui nous introduit au cœur de notre être pour trouver la lumière ». Devant cette épreuve de destruction totale Job prononce cette phrase extraordinaire : « Nu je suis sorti du sein de ma mère, nu j’y retournerai, Dieu m’a tout donné, Dieu m’a tout repris, que le nom de Dieu soit béni ». Mais ensuite tout le Livre de Job va être une contestation, il va plaider sa cause. Il est cette double personnalité que nous sommes et qui n’a pas encore atteint à l’unité. Job est celui qui sait et qui ne sait pas et qui fera le mariage entre les deux, entre son pôle de lumière et son pôle de ténèbre. C’est tout le mystère d’Israël qui, sorti du sein de sa mère doit y retourner, qui doit « épouser » sa mère, se refaire germe pour ressusciter. Et les mystères chrétiens contiennent ceux d’Israël. Quand Nicodème demande au Christ comment le suivre, comment entrer dans le Royaume,
Christ lui répond : « Si tu ne te refais pas petit enfant, si tu ne rentres pas dans le sein de ta mère, tu ne pourras pas entrer dans le Royaume » et Nicodème : « Mais comment puis-je entrer dans le sein de ma mère, j’en suis sorti une fois et ne peux pas… » – « Tu es pourtant docteur en Israël, répond le Christ, et tu ne sais pas ces choses… ». Satan retourne auprès de Dieu et lui demande de toucher au corps de Job sans toucher à sa vie, car à ce moment-là : « … il te maudira en face ! ». Et il prononce alors cette phrase étrange : « Peau pour peau ». Il fait une espèce de pari avec Dieu. Or la peau c’est cette fameuse tunique de peau dont l’homme a été revêtu après la chute. Le mot hébreu « peau » signifie aussi « lumière ». Les deux dernières lettres sont les mêmes, seules varient les premières. Aleph, première lettre de l’alphabet représente l’énergie créatrice, la lumière dans la lettre Reich va rencontrer une résistance, car la lumière ne se révèle que s’il y a résistance. Tandis que le mot OR auquel préside la lettre Ayin et qui, par rapport à Aleph est celle qui rencontre les profondeurs, les racines, les sources mêmes de l’être dans les grandes ténèbres, nous fait comprendre que l’homme ne peut trouver Aleph s’il n’est pas passé par Ayin. Adam des origines était déjà un homme de lumière, mais il ne l’avait pas encore en totalité. Après la chute il est recouvert de la ténèbre qu’il a choisie, car le mot tunique de peau est formé des deux lettres Ayin et Reich qui forment le fameux mot « mal » que nous trouvons dans l’Arbre de la Connaissance du bien et du mal. Il a par cela donné une existence, une réalité à ce pôle ténèbre qui n’avait pas d’existence en soi sans le pôle de la lumière de l’Arbre de la Dualité. Le mot bien et mal n’existent pas en hébreux, il s’agit du parfait et de l’imparfait. La lumière et la ténèbre sont inséparables, ils sont l’Arbre de la Dualité, mais qui est recouvert par une unité qui les relie intimement. Lorsque l’homme, dans la Genèse suit le serpent, il donne réalité à un des pôles qu’il coupe de l’autre et, alors, cela devient le bien et le mal. Nous créons le mal de toute pièce par ce mythe de la chute et pour pouvoir le vivre nous sommes recouverts de la tunique de peau. C’est une protection divine extraordinaire que de nous donner les énergies nécessaires à cette expérience, car sans cela nous en serions morts. Question : L’homme avait-il le choix ? Réponse : Non, de toute façon il ne pouvait pas choisir la lumière parce que tout était lumière et, pour qu’il y ait lumière supérieure, il a été éprouvé au niveau des ténèbres. L’homme était loin d’être parfait en Éden, il n’avait pas encore toute sa structure et ne pouvait y atteindre par et dans une évolution harmonieuse, disent les Pères de l’Église ; il va le reconnaître, mais dans la disharmonie, dans la lutte, dans la souffrance. Il a créé des pulsions de mort qui l’entraînent par en-bas et qui vont rendre difficile la montée de l’Arbre. Ce qui nous intéresse, c’est de voir que nous avons été recouverts finalement des vêtements de notre choix pour pouvoir vivre ce choix. Satan a dit : « Peau pour peau » et il va toucher à la peau de Job qui va être remplie d’ulcères malins de la tête aux pieds. Il s’agit là de cette transmutation de la tunique, la peau symbolisant notre nature dite de la chute, notre sous-nature que nous avons à l’heure actuelle par rapport à
notre vraie nature que nous avions avant la chute. Tout ce qui va donc se passer ici va être l’épreuve du feu, l’expérience des ténèbres des profondeurs qui va faire que le Ayin à un certain moment va se transformer en Aleph. C’est tout le mystère de la transmutation de notre corps qui se décompose et qui est symbole de notre nature laquelle dans les épreuves successives après la mort, retrouvera cette expérience lumière qui nous ramènera bien au-delà de notre état avant la chute. Job recouvert de ces ulcères malins, se plaint dramatiquement de ses plaies qui le font souffrir. Mais ce dont il souffre particulièrement, c’est de l’incompréhension, de la totale incommunication avec les autres, même avec sa femme. Les seuls amis qui lui restent ne sont pas sur le même plan que lui. Job conteste ce qui lui arrive, ce n’est pas juste et cette contestation devant Dieu que ne comprennent pas ces amis, c’est très beau. Il a des accents d’un pathétique et d’une beauté extraordinaires. C’est alors qu’il reçoit la visite de trois personnages qui lui reprochent sa contestation : « Tu oses contester Dieu ! ». Job les envoie promener en termes violents, refusant ce genre de sagesse, de morale élémentaire et de sagesse inférieure. Il y a des moments où seuls compte notre discours intérieur, l’information intérieure que nous recevons. Et à ce moment arrive un quatrième personnage d’une sagesse et d’une intelligence qui ressortissent vraiment d’en-haut. Il va le dire : « Vous n’avez que des discours complètement vains, pourtant vous êtes âgés et moi je suis jeune ! Mais ce ne sont pas les ans qui donnent la sagesse aux hommes ! ». Et il va dire encore : « Dieu nous parle par des songes, par songes il nous avertit ! ». Nous avons là toute l’indication de ce monde de l’inconscient qui est porteur de messages divins. C’est un langage qu’emploie Dieu, il est sans limite. Nous sommes aussi avertis par nos souffrances et Job, dans de très beaux versets témoigne de son expérience du noir. « J’espérais la lumière, les ténèbres sont venus… » « … Ah ! je voudrais être étranglé ! … ». « Être étranglé », c’est très intéressant, parce qu’il faut qu’il passe par cette Porte et c’est très pénible. C’est pourquoi il exprime sa souffrance au niveau de la gorge. Les Gardiens du Seuil sont tous là à le presser pour qu’il atteigne à la dimension qui lui permettra ce passage. Alors, ce quatrième personnage, après avoir renvoyé tout le monde, parle, et instruit Job en profondeur. Il porte un nom très significatif, il s’appelle « Elie » ou en hébreux « Elihu ». Elihu à son tour va disparaître et laisser parler Dieu Lui-même. C’est Yod-Hé-Vov-Hé qui va en finir avec l’expérience de Job. Il est curieux de voir qu’Elihu joue dans le drame de Job, auprès de Yod-Hé-Vov-Hé le même rôle que Jean-Baptiste va jouer auprès du Christ dans l’histoire du peuple juif : « Il faut qu’Il croisse et que je diminue… ». Et le Christ confirme très bien que Jean-Baptiste a la même dimension qu’Elfe. Le voyage que Yod-Hé-Vov-Hé va entreprendre avec Job est une descente dans les profondeurs de l’Enfer, c’est-à-dire dans nos lieux inférieurs. Job est déjà descendu dans certains plans de conscience, mais il faut qu’il les pénètre plus profondément encore. Si on compare les plans de conscience aux sept jours de la Genèse, on peut dire qu’il lui reste à traverser l’abîme qui précède même au premier jour et qui fait qu’il va rencontrer le Divin avant même la Création. Dans les sept jours de la Création il y a d’abord l’abîme et puis ensuite l’Esprit de Dieu qui plane
sur cet abîme. Après ces opérations divines symbolisant les six jours de la Création, Dieu se retire le septième jour. L’homme apparaît le sixième jour. Il est fait dans ses structures profondes de tous les jours de la Genèse qui l’ont précédé. C’est-à-dire qu’il contient en lui symboliquement toutes ces énergies et qu’il est un microcosme. Et lorsque l’homme doit redescendre dans ses profondeurs, il passe par tous les jours de la Création dont il est fait. Mais il ne peut traverser l’abîme pour au-delà retrouver le Divin qu’avec Yod-Hé-Vov-Hé, c’est-à-dire qu’avec sa qualité de Dieu. Avec Yod-Hé-Vov-Hé Job va faire des expériences redoutables, entre autres celle des dix animaux en commençant par le Lion et en terminant par l’Aigle. Les Alchimistes disent : « Dans cette opération de transmutation totale (où le plomb doit devenir or, où la ténèbre doit devenir lumière) l’Aigle doit dévorer le Lion ! ». Or le Lion symbolise toute notre partie solaire dont les énergies doivent être intégrées par l’Aigle, par « celui dont le regard est perçant, par celui qui connaît… ». Il est aussi prononcé cette phrase : « Là où sont les cadavres, l’Aigle se trouve ». Les cadavres de toutes nos énergies qui ont été retournées et intégrées. Le Christ va reprendre cette phrase lorsqu’Il parlera de Sa mort et de Sa résurrection : « Là où est le cadavre, les Aigles se trouvent… ». Le cadavre ici symbolise le corps du Christ unique, et les Aigles, ce sont tous les hommes en tant qu’ils sont appelés à devenir des Aigles. Après avoir visité avec Yod-Hé-Vov-Hé tous ces seigneurs de la terre et de l’air, Job va visiter les animaux sous-marins. C’est là où il passe l’abîme, où il entre dans les grandes profondeurs. Et Dieu va lui demander : « Étais-tu là, lorsque je créais tout cela ? « Étais-tu là, quand je créais la terre ? « Oui, tu étais là, car le jour et le nombre des années, est grand ! » Nous sommes là devant le profond mystère de l’éternité, de l’homme qui a été créé, mais qui est de toute éternité. L’homme est un être éternel qui n’a jamais eu de commencement, ni de fin. C’est difficile à concevoir pour nous qui sommes saisis entre les deux pôles de notre naissance et de notre mort (Note de Panharmonie : Pour les Hindous et pour les Bouddhistes, la notion de la réincarnation donne la clef de ce mystère). Nous terminerons le mythe de Job la prochaine fois parce que cette fin est une apothéose et trop belle pour être contée rapidement. Elle est en plus très ardue et très difficile à comprendre dans sa profondeur. Compte rendu de la réunion du 9.3.1978 Nous avons eu pas mal de nouveaux-venus. Pour eux A. de Souzenelle récapitule les réunions précédentes. Puis elle enchaîne sur le mythe de Job :
Il est certain, et cela se retrouve dans les lois psychologiques actuelles, que les énergies qui ne sont pas investies d’une façon juste, se retournent contre l’homme, sinon nous ne connaîtrions pas la mort ou tout au moins nous prolongerions de beaucoup notre vie. Nos maladies ne sont que des chocs en retour d’énergies mal employées. Après avoir étudié le pôle lumière à travers plusieurs mythes, nous allons, avec Job, faire l’expérience du pôle ténèbres. Nous ne pouvons descendre dans nos ténèbres que si nous avons fait l’expérience de la lumière. Job est saisi entre deux pôles : Yod-Hé-Vov-Hé et Satan. Nous sommes dans notre profondeur pris entre ces deux dimensions. L’homme est appelé à devenir Yod-Hé-Vov-Hé et, en même temps il est son propre adversaire n’ayant pas encore intégré toutes les énergies. Nous allons avoir petit-à-petit à les épouser, de manière que tout, un’ jour, devienne lumière. Cet « accouchement » de la lumière ne peut se faire que par une prise de conscience, par une descente dans nos différents plans de conscience inférieurs afin que nous intégrions toutes les énergies qui les constituent. C’est aussi l’image de l’échelle de Jacob qui n’est autre que la colonne vertébrale cosmique. L’homme doit en assumer tous les échelons, c’est-à-dire chacune de ses terres, chacun de ses plans de conscience. Par une descente dans les profondeurs, les énergies ténèbres doivent être retournées afin de devenir lumière. C’est ce qui se passe pour Job qui est atteint dans sa chair, la chair étant le symbole extérieur de notre plan de conscience. Les êtres d’une très grande évolution deviennent en partie lumière. Ce sont eux qui tiennent le monde dans leurs mains. Et Job à aller à la recherche de son nom intérieur. Avec Dieu, Job, dans sa dimension divine, va faire « le grand voyage de l’inconscient » à travers le monde animal, en commençant par les animaux de la terre et des airs. Ensuite il descendra dans la dernière expérience qui sera celle des animaux de l’eau, de l’eau et de la terre d’ailleurs. Les traducteurs parlent à ce sujet de l’hippopotame et du crocodile. En hébreux, on parle d’une part du « bœuf marin » et d’autre part du fameux Léviathan. En fait, ce n’est ni le crocodile, ni le Léviathan. Dans le Livre des Morts Égyptiens qui est très lié à toute cette expérience, l’énergie fondamentale que nous allons trouver dans les eaux des profondeurs est décrite comme ayant une gueule de crocodile, un corps de dragon, des ailes d’aigle, etc. Une de ses parties tient aussi du chacal. Dans le mot Léviathan tan, en hébreu signifie chacal. Et cet animal monstrueux va être le Gardien du Seuil redoutable aussi longtemps que l’homme ne se sera pas mesuré à lui, aussi longtemps qu’il n’aura pas atteint à cette dimension. Il va faire l’ultime expérience des ténèbres, de la dernière terre, de cette Terre-Vierge, cette terre noire qui, dans toutes les traditions est exprimée par une femme redoutable, sorcière, dévoreuse. Et lorsque l’homme l’aura épousée, ce sera l’éclatement de la lumière. Le cœur du Léviathan contient les noms divins, ceux dont nous sommes tissés. Ils sont notre noyau, comparable au noyau de l’atome qui contient toutes les énergies. Et lorsque nous aurons touché ce noyau nous deviendrons totalement énergie et totalement lumière. Nous ne serons pas brisés par cette énergie si nous sommes nous-mêmes devenus énergie. C’est cela toute notre expérience des grandes profondeurs.
Job va donc être intégré dans ses normes primitives, car il a fait l’expérience inverse du départ d’Éden. Et si dans la Genèse Adam dit « J’ai entendu Ta voix dans le Jardin et j’ai craint, je suis dans le tremblement car je suis nu », Job va dire : « Mon oreille entendait jusqu’à présent parler de Toi, mais maintenant mon œil Te voit ! ». C’est l’aventure de la vision. A ce moment-là, lui qui avait tout perdu, toutes ses énergies, il va recevoir le double de ses biens. Il connaît enfin la véritable multiplication après avoir crû, tandis que l’humanité inversement se multiplie dans le plan de l’avoir avant d’avoir pu croître. Par cela même elle se bloque dans son évolution. Cet éclatement de Job va être symbolisé par la naissance également symbolique de ses trois filles. Chez les Grecs la Sphinge a un visage de femme. Car dans les traditions, aussi bien l’homme que la femme sont féminins par rapport au Divin qu’ils vont épouser. Toute la Création est appelé « Vierge d’Israël » et c’est elle qui va épouser Dieu. L’une des filles s’appelle Jemina qui signifie dépassement du temps. Job, en changeant de plan de conscience et même de peau, a aussi changé de temps. A chaque degré de l’échelle nous changeons d’espace et de temps qui sont une unité, l’espace-temps. Extérieurement nous sommes toujours sur terre, mais nous sommes en contact différent avec notre terre intérieure, nous recevons des informations différentes. Le conte du Petit Poucet illustre ce changement de temps lorsqu’ayant dépassé l’épreuve de l’Ogre, il chausse les bottes de sept lieux qui vont lui permettre de traverser le temps et l’espace. C’est aussi cela sa signification de la « Fin des Temps ». La seconde fille s’appelle Ketsia qui est le nom d’une plante aromatique, la casse. Nous en étudierons l’idée profonde lorsque nous nous arrêterons au triangle supérieur. Il s’agit de la notion d’odeur. Le corps de l’homme se transmute, se métamorphose. Il change aussi d’odeur. L’odeur, comme la lumière est une qualité vibratoire et certains hommes, ayant le don de reconnaître les vibrations, qu’elles soient lumineuses, odoriférantes ou autres, voient l’évolution de l’homme d’après elles. La dernière fille, Keren-Haphouc symbolise le fait de retrouver les trois couronnes en Kether, le couronnement des contraires, le dépassement des contradictions, le dépassement de la dualité. l’Advaïta des Hindous. Dans l’épée flamboyante et tournoyante du Chérubin qui garde le Jardin d’Éden nous trouvons le mot Haphouc. Tournoyant ne signifie rien d’autre que les deux tranchants de l’épée, c’est-à-dire l’Arbre de la Contradiction qui est mort pour celui qui n’est pas devenu l’épée et qui est vie pour celui qui a atteint sa qualité. Keren et Kheter sont le même mot, c’est le point de départ de toutes les énergies donné par la Création dans un expire et c’est le point de retour de toutes les énergies qui remontent à leur source et qui vont reconstituer ce point focal où nous connaîtrons la dernière naissance par le chakra coronal. Keren-Haphouc, c’est cette arrivée à ce point final. C’est aussi l’Œuvre Rouge des Alchimistes.
8 : Le dernier étage
Revue Panharmonie. No 174. Novembre 1978) Compte rendu de la rencontre du 8.6.1978 La dernière réunion avant les vacances termine l’étude de l’Arbre des Séphiroth entreprise par Annik de Souzenelle depuis deux ans. Quoique, dit-elle, cette étude ne se termine jamais. Des auditeurs tardifs s’étaient joints aux anciens, obligeant notre oratrice à revenir rapidement sur l’étude du corps tel que nous le révèle l’Arbre des Séphiroth et tout au long de ce « corps divin les étages et les symboles de notre élévation spirituelle. Arrivés à la dernière étape et ayant franchi « la Porte des Dieux », nous commencerons aujourd’hui à analyser le visage qui se situe à ce niveau, et notamment le nez, après avoir parlé la dernière fois de la bouche, de l’oreille et des dents. C’est dans ce troisième étage que nous allons trouver l’unité reconquise. Dans les étages inférieurs nous étions dans la dualité, dans le conflit des structures, résolus par le mariage des deux pôles au sommet du deuxième étage. Au niveau du nez nous pouvons voir l’image d’une sexualité bipolarisée du féminin et du masculin et une reconduction directe de l’organe mâle, reconduction que nous trouvons aussi dans la colonne vertébrale, elle aussi symbole phallique. Nous avons construit cette colonne vertébrale, vertèbre par vertèbre, en prenant soin de n’en sauter aucune, pour petit à petit réaliser un détachement des deux pôles de la dualité, ce qui fait dire à toutes les traditions que deux énergies se contractent, s’opposent et s’épousent. Ce n’est pas par hasard que nous avons deux narines, ce qui fonctionnellement ne serait pas nécessaire. Le pranayama témoigne de leur utilité par des techniques respiratoires qui vont faire état de chaque narine séparément, chacune ayant son rôle particulier. Un passage du Cantique des Cantiques souligne notre propos : « Ton nez est comme la Tour du Liban « qui regarde du côté de Damas. « Ta tête est levée comme le Carmel « et les cheveux de la tête sont comme la pourpre. » La racine Cren du mot Carmel veut dire vigne, cet important symbole, et aussi jardin, ce qui nous ramène dans l’Eden reconquis, faisant contrepoint avec la sortie d’Adam de l’Eden. La Sulamite du Cantique des Cantiques retrouvant son Bien-Aimé, n’est personne d’autre que l’humanité retrouvant son âme perdue, tandis que la pourpre rejoint celle dont nous avons parlé, notamment au sujet du rouge de la gueule.
Tour, en hébreu, se dit Miguedal, mot magnifique dont découle le nom « Madeleine », Marie de Magdala, Magdala étant la tour. Le mot « grandeur » est également tiré de Miguedal, la grandeur, une des énergies reconquises, ainsi que Megued, le meilleur. A l’intérieur de Miguedal, il y a gad, qui correspond aux nombre 3 et 4, auxquels le Saint, béni soit-il, dit : « Vous ne présiderez pas à la création du monde, mais vous avez une vocation plus haute encore, celle de ne jamais vous séparer, parce que, ensemble, vous êtes plus forts que tout. » Et, en effet, le 3 et le 4 sont la réunion symbolique de la loi et des structures. Or le 4, les structures n’est rien sans le 3, la loi et le 3 n’est rien sans les structures. C’est dans leur juste rapport que se trouve la justesse qui va présider à notre accomplissement. Beaucoup d’autres choses pourraient encore être dites de ce mot « Gad ». « Damas » en hébreu Damascheq, contient le mot « Qadosh » , le Saint, et qui, en même temps veut dire « prostituée ». Ces symboles, si intéressants, des mots hébraïques, montrent qu’avec les mêmes énergies (puisque chaque lettre est une énergie) on peut être soit le saint, soit la prostituée. Dans les profondeurs c’est la même réalité. Car, qu’est-ce que le saint ? C’est celui qui rencontre le véritable époux. Et qu’est-ce que la prostituée ? C’est nous tous en tant que nous nous donnons à un fauxépoux, quand nous donnons un absolu à une réalité immédiate qui nous arrange ou qui nous comble. Ce sont les veaux d’or que chacun de nous a caché quelque part en soi. Alors ce nez, cette tour qui regarde du côté de Damas, c’est l’érection de l’être qui regarde du côté de la sainteté, c’est-à-dire du côté du véritable époux. Un autre aspect de ce mot, en retournant les trois lettres, est « Queshed », qui rend compte de l’amande, symbole de la réalisation totale. Nous avions déjà trouvé à la base de la colonne vertébrale ce petit os symbolique, imputrescible qui correspond à la terre sur laquelle repose l’échelle de Jacob, qui s’appelle Luz et qui signifie aussi amande. Lorsque Jacob a vu cette échelle, il a lui aussi commencé à construire sa colonne vertébrale qui, symboliquement représente le peuple d’Israël par rapport au monde. Débaptisant cette terre le lendemain en partant, il l’appelle Bethel. Théoriquement il emporte avec lui le potentiel de lumière et d’immortalité. Nous retrouvons l’amande avec les amygdales, ces deux petites amandes situées au niveau de notre verbe, et nous retrouvons tout ce potentiel divin de notre qualité de verbe au niveau du nez avec la floraison de l’amandier, de la floraison de l’être achevé, quoique rien ne soit vraiment achevé et que d’autres étapes nouvelles, que nous ne connaissons pas, vont toujours plus loin. L’amandier est aussi présent dans le mot Damas et ce n’est pas par hasard que Saint Paul va être saisi par la sainteté sur le chemin de Damas. C’est la ville qui conduit à la sainteté et c’est la ville qui va connaître aussi la plus grande prostitution, puisque c’est la même essence et que tout dépend de la façon dont nous allons le vivre. Nous continuons à citer le Cantique des Cantiques dans la description des jours : « Les jours sont comme un parfum d’aromates,
« comme une couche de plantes odorantes… » Nous sommes là dans ce qui correspond à notre odorat immédiat, mais aussi à l’étage des senteurs. « L’odeur de sainteté » si ridiculisée en Occident, est pourtant une réalité. Nous émanons tous une certaine odeur liée à notre qualité intérieure. Et plus nous nous purifions (au sens ontologique et non au sens moral du terme), plus notre odeur se transforme, de même que nos vibrations gagnent en luminosité. Les hommes très évolués dans leur devenir, savent parfaitement le reconnaître, parce qu’ils captent des plans beaucoup plus subtils. Les animaux aussi le sentent et les petits enfants y sont sensibles. Cette qualité d’odeur nous allons la retrouver, la reconquérir au fur et à mesure de la croissance de notre Arbre. Les Chrétiens parlent de l’odeur de l’homme avant le péché, Saint Isaac le Syrien mentionne l’odeur d’Adam avant la chute. C’est cette odeur que certainement reconnaissaient les animaux sauvages qui venaient lécher les pieds des Chrétiens qui leur étaient livrés dans les arènes. Et certainement, si l’animal percevait cette « odeur de sainteté » il n’aurait plus peur et le plus féroce vivrait à côté de l’animal qu’habituellement il dévore. Parce que nous transfigurons la création en nous transfigurant nous-mêmes. Le monde est très différent de celui que nous croyons voir. Nous n’en apercevons que la carcasse. Nous vivons dans une toute petite mesure de notre réalité et nous nous défendons par la force, par l’agression. Les joues sont donc des parterres d’aromates, ce sont les fleurs de notre être. Passons rapidement au symbolisme des yeux. Ils sont en particulier la répétition des mains. C’est à l’Aigle, au regard perçant qu’ils sont aussi liés, c’est cette vision perçante que nous avons à atteindre pour découvrir les cieux. Le mot hébreu Avin rend admirablement compte de l’œil, il veut aussi dire « la source ». Ce n’est; donc pas la vision immédiate qui intéresse les Hébreux, mais celle des origines, de ce noyau divin que nous sommes. « Si tu ne te refais pas germe, tu n’entreras pas dans le Royaume des Cieux », dit Jésus. Mais pour arriver à cette vision ultime, il va falloir passer par des expériences qu’expriment les mains qui sont la connaissance, non pas intellectuelle, mais celle du vécu, de celui qui va nous obliger à descendre dans les ténèbres de nos profondeurs. Bien des mythes vont reprendre le thème de la cécité, dont celui d’Œdipe dont nous avons déjà parlé et qui, sous la plume de Sophocle est devenu moralisant, perdant sa signification profonde. Nous allons étudier aujourd’hui le mythe de Tobie qui est exactement la même démarche. Tobie en hébreu, c’est Tobihou, c’est le nom de Yod-Hé-Vov-Hé, du Tétragramme, sauf qu’un des Hé est remplacé par Tob. Tov, c’est le bien dans l’arbre de la connaissance de la dualité, faussement appelé le bien et le mal. C’est le parfait qu’il va falloir vivre dans la dualité, et la rupture du parfait pour passer à un plus que parfait. Toujours ces cycles qui vont se détruire les uns les autres, pour aller toujours plus loin dans notre réalité foncière. Et Annik de Souzenelle nous conte l’histoire de Tobie qui, dans son nom inscrit l’expérience déjà conquise, mais qui maintenant doit faire la démarche de la ténèbre. Comme Job il est un homme
parfait et comme Job il va vivre un retournement de ce parfait pour aller plus loin. La ténèbre est symbolisée par sa cécité. Son histoire est liée à celle de Sarah, jeune fille qui vit bien sagement dans sa famille et qui a été fiancée sept fois. Mais chaque fois qu’un de ses fiancés successifs entre dans la chambre nuptiale, il meurt. Sans se connaître, Tobie et Sarah prient Dieu afin d’être délivrés de ces fléaux de la cécité et de ces démons qui tuent les époux et qui ne sont rien d’autre, que les énergies non encore épousées et que l’être va affronter par des épousailles dans la descente des profondeurs de la forge et par la purification par le feu que nous trouvons au niveau de Tiphereth. Tobie a conscience qu’il va mourir, mais il croit que ce sera la mort physique. Et c’est pourquoi il envoie son fils qui s’appelle aussi Tobie, recouvrer une dette contractée envers lui par un certain Gabelus. Tobie, sans qu’il ne le reconnaisse, est guidé dans son voyage par l’Archange Raphaël, accompagné d’un chien. Tobie et l’Archange, c’est Œdipe guidé par Antigone, le Dante accompagné par Virgile, Saint Bernard et Béatrice. La première nuit ils dorment au bord de la mer. Tobie allant se laver les pieds voit surgir ce « Dag Hagadol », ce gros poisson, déjà rencontré avec Job, duquel, sur l’ordre de l’Archange Raphaël (Raphaël en hébreu veut dire : je guéris), il va tirer le foie, le fiel et le cœur, car ces trois organes vont être des remèdes remarquables, en particulier pour guérir la cécité. La deuxième nuit, où vont-ils dormir ? Ils frappent à la porte de Sarah. « C’est une de tes cousines, dit le guide à Tobie, tu vas avoir à l’épouser ». L’Archange lui ayant raconté le sort des sept époux, dit à Tobie de ne pas craindre, car Sarah est sa femme dans les profondeurs, c’est sa féminité en lui, c’est sa ténèbre qui devient lumière. Et pour cela il lui faut affronter les démons. Tobie passe trois nuits dans la chambre de l’épousée, le mariage est consommé car, sur le conseil de l’Archange Raphaël, Tobie avait brûlé le cœur du poisson. Il en était sorti une fumée qui avait emporté les démons de Sarah « que l’Archange avait enchaînés dans le désert d’Egypte. » Ce texte est très mystérieux ! Sont-ils des énergies retournées par le mariage de Sarah et de Tobie ? Ces sept maris symbolisent les sept purifications qui étaient celles de Sarah et de Tobie, dépôts d’une seule réalité, Tobie, le huitième époux porte le nombre huit, celui de la résurrection, et aussi de la barrière, de l’épreuve. Pendant qu’a lieu le mariage, l’Archange Raphaël va recouvrer la dette à la place de Tobie. Ce sont symboliquement les dettes de l’humanité envers le Père et qui sont soldées à ce moment-là. Gabelus, d’ailleurs veut dire en hébreu ce qui est limité et ce qui est limité devient illimité par le mariage du Créateur avec sa Création, par le mariage de l’Aimé avec l’Aimée, la rencontre de chacun de nous avec son centre. Gabelus est invité à partager le repas de noce. Nous retrouvons là le même symbole que celui du repas de noces des Evangiles. Toute la petite équipe retourne alors chez Tobie, le père, et là l’Archange Raphaël invite le jeune Tobie à déposer sur les yeux de son père le fiel du poisson. C’est toute la symbolique du recouvrement de la lumière qui ne peut se faire que quand on a vécu le plus amer. Mais la vue de Tobie recouvrée n’est plus la même que celle d’avant, car il s’agit à présent de la vision du Ciel ouvert et, à ce moment-là, il reconnaît l’Archange Raphaël dont il ne peut supporter l’éclat et devant lequel il se prosterne. L’archange lui dit : « Paix à vous », il les bénit et il part.
Dans l’oreille qui résume le corps tout entier puisqu’elle a la forme d’un germe, il y a un point très précis qui correspond à cette vision du « troisième œil » qui se trouve dans toutes les traditions. Nous pouvons aussi faire le rapprochement avec la Licorne dont la corne unique a sa racine au niveau de cet œil frontal. La Licorne rend compte de la force contenue dans la corne, force que nous allons maintenant retrouver dans les cheveux. C’est cette force qui transperce le ciel, tous les cieux et qui nous y fait pénétrer. Zeus va épouser Métis en l’avalant. Métis c’est la sagesse. Dans l’Arbre des Séphiroth la Sagesse, Hochmah, est la dernière énergie avant la couronne. Ayant ressenti des douleurs au niveau de la tête, le dieu fait appel à Héphaïstos qui va forger la hache d’or avec laquelle il va fendre le crâne de Zeus. Pallas Athénée va naître et sort du front de son père toute casquée de lumière et d’or. Elle symbolise l’androgyne reconquise. Il est intéressant de noter que le Dr Chauchard a fait des coupes du cervelet et que ces coupes donnent l’image frappante de feuilles de chênes. De nos jours encore, le cervelet est appelé par la médecine : « l’Arbre de Vie ». Il semblerait que le cervelet joue par rapport au cerveau tout entier, le rôle que joue la tête par rapport au corps. Il se fait à ce niveau-là un travail que nous ignorons totalement, mais qui, petit à petit, allant vers des temps où nous découvrirons en nous nourrissant de l’Arbre de Vie, toutes nos possibilités, nous allons pouvoir devenir des hommes, des hommes que nous ne sommes pas encore, puis des dieux. Adam, lorsqu’il fut digne de retourner en Eden, reconquit en même temps le chemin de l’Arbre de Vie. Ce que je peux vous dire, c’est que nous avons au niveau du cerveau deux glandes, l’épiphyse et l’hypophyse. On sait que cette dernière préside à la sexualité. L’épiphyse est beaucoup moins connue, mais on est en train de découvrir qu’elle joue un très grand rôle dans les expériences de conquête des plans supérieurs. Nous retrouvons donc là les deux pôles de la sexualité, celui de la sexualité d’origine primaire et la sexualité des hauteurs. Pour terminer nous allons encore parler du couronnement. Nous retrouvons la corne et la couronne, non celle de la Licorne, mais celle double des animaux qui figure aussi les cornes de la Lune et qui s’identifie à la corne d’abondance. La corbeille de l’épousée dans laquelle on venait mettre des cadeaux, n’en est qu’un reflet. Nos cheveux sont le sommet de la sexualité, ils sont nos forces. Souvenez-vous de Samson et Dalila, Dalila représente la ténèbre, il faut que les forces physiques soient coupées, pour que naissent les forces essentielles. Alors les Chinois vont dire : « Les reins fleurissent dans les cheveux », ou encore, « les cheveux prennent leurs racines dans les reins.» Cette force a grandi au fur et à mesure de la construction de nos vertèbres, elle a fleuri dans nos cheveux. Notre système pileux est un pôle d’information au même titre que les cornes chez l’animal sont des antennes. Vous voyez que le corps est beaucoup plus qu’un objet chargé de nous véhiculer de notre naissance jusqu’à notre mort ? En prendre conscience, c’est nous aider d’un outil, dans le sens noble du mot, pour accomplir notre destin
Cerveau droit et cerveau gauche Vendredi 7 octobre 2011 Par milena
Annick de Souzenelle Par Annick de Souzenelle L’ébauche d’un dialogue entre la Science et la Tradition Que celui qui a des oreilles pour entendre entende ! dit Jésus ! « L’Evangile est semé de cette injonction divine que déjà Israël faisait sienne : Ecoute Israël. . . » Quelle est donc l’oreille qui peut entendre ? Quel oeil, capable de voir ? Et quel est le coeur suffisamment ouvert pour comprendre ? Il semble que nos sens épris, du réel immédiat, épris du connu, ferment leurs capacités détectrices de l’essentiel ! Lorsque j’interroge la Bible en portant sur elle le regard que je posais jadis sur l’être aimé dont le mystère me restait scellé, je me vois, femme du XXe siècle obligée de me dépouiller du siècle pour entrer dans la verticalité de mon être et me couler dans l’axe de l’instant-éternité. Je sens que ce n’est pas en m’arrêtant au mot écrit dans sa représentation première que je peux appréhender le texte, mais en le pénétrant, en épousant le souffle qui l’attache au Verbe. Entre le mot et moi le concept fait barrage ; le mot me demande d’entrer dans sa musique et devient alors un face-à-face. Je suis moi-même devant lui comme un Nom écrit dans l’histoire de l’Homme, dont les racines profondes plongent dans l’Image de Dieu, le Verbe que je suis.
Dans cette relation, le mot qui me fait face me regarde à son tour et me fait savoir que je ne peux communiquer avec lui à l’extérieur que dans la mesure ou je communique avec moi-même, audedans de moi. Il me fait savoir qu’il est l’objectivation de la Parole divine inscrite en mon orient, inscrite de l’unique plume qui nous sculpte tous deux en deux vies jumelles. La relation devient l’étreinte de deux mystères dont la révélation ne peut se faire que l’un par l’autre, comme deux amants ne deviennent leur réalité profonde qu’en pénétrant le silence l’un de l’autre, au plus dru de leur être. L’écrit biblique frémit alors comme craque au printemps la terre hivernale pour laisser jaillir la promesse d’une somptueuse récolte nourricière de chaque instant. En tant qu’histoire du passé, la Bible a construit notre civilisation et fondé notre culture ; en tant que vie de l’instant, dans son exigence soudaine de verticalisation elle est en train de bouleverser culture et civilisation, de détruire les schémas de pensée, les structures politiques, religieuses, sociales afférentes à ces schémas, et de dévaster les êtres que l’imminence d’un saut incontournable et vertigineux dans l’inconnu tient figés au bord du Rien. Au coeur du Rien, l’audacieux sent soudain ses reins retenus par la corde divine – la foi (Amen) est cette audace. « Moi je te vois, ça suffit, saute ! » disait un père à son enfant que la fumée aveuglait et qui pourtant n’avait plus que cette issue de vie : sauter par la fenêtre de leur maison embrasée par le feu, sans aucun repère si ce n’est l’affirmation de celui qui dit être là. Le temps du saut n’est plus de ce monde bien qu’il lui appartienne aussi, il a la qualité d’une Epiclèse : il est l’instant lourd de JE SUIS cueilli, au coeur de l’Histoire. Qu’est donc l’Histoire dont le passé n’est Seul l’instant a réalité si nous lui donnons une âme.
plus
et
l’avenir
pas
encore
?
Entendons dans ce mot « âme » la richesse infinie que nous réserve notre retournement vers la Adama-’Ishah : non plus les colorations humanistes de Lilith jouant sur les thèmes chromatiques de l’imaginaire, mais le réel de l’ »imaginal » reçu dans la diversité de ses richesses comme des fruits dûment mûris sur l’Arbre de la connaissance, ceux-là mêmes dont je cueille, émerveillée, une part aux différentes étapes de ma relation d’ »étreinte » avec la Bible. Dans ce sens, peut-être abordons-nous aujourd’hui le rendez-vous de l’Histoire avec son âme. Osera-t-elle saisir la corde qui l’unit à son ontologie et qui, au coeur du Rien, donne à l’instant puissance d’éternité ; à l’impossible, ouverture sur tous les possibles ?
Elle n’ a pas le droit de manquer ce rendez-vous : l’instant lourd de JE SUIS est l’Epée dont le double tranchant, s’ il n’ouvre sur la, vie, donne la mort. L’ontologie de l’Histoire ? L’orient de l’être, là où est parlée la langue une, là où, dans les profondeurs de ‘Ishah, est scellée Basar, la « chair », le Verbe et l’Esprit. Dans l’actualité de la plaine de Shinéar, celle de notre Histoire, l’Homme a dissous dans les eaux de l’inconscience les restes disloqués de la chair une : la raison et le sentiment, avec leur cortège de dualismes (science et foi ; réel et irréel ; sagesse et folie ; etc.). Parmi ces frères ennemis viennent s’insérer le mot dit ou écrit et la résonance à l’écoute de laquelle invite le Christ-Logos mais que tue la logique. Comment cheminer dans ce labyrinthe d’exclusions mutuelles et stérilisantes voire oppressantes, si ce n’est en obéissant au désir fou, irrépressible de la nature qui exige l’au-delà de toute contradiction, de toute frustration, en élargissant nos poumons et en déployant nos ailes, non pas celles tout artificielles de Dédale et Icare, mais les ailes de l’amour que la tradition iconographique prête à Jean-Baptiste. Celles-ci ressortissent aux terres nouvelles nées des cieux nouveaux que conquiert tout être humain se retournant vers son orient et faisant alors l’expérience d’espaces-temps propres à chaque champ de conscience acquis, ceci jusqu’à l’ entrée en « terre promise ». En cette terre-là, choeur du sanctuaire intérieur personnel, orient de l’être gardé par les Chérubins, est l’Epée tournoyante et flamboyante , le Verbe et l’Esprit, la chair. Ce noyau de l’être informe i’Homme depuis la part la plus secrète de ses profondeurs jusqu’à son corps physique le plus concret. Ce corps, dont nous avons vu qu’il n’est symboliquement que cadavre tant que l’Homme n’est pas entré consciemment en résonance avec la chair ontologique, est celui qui la chante le plus divinement lorsqu’il en est l’icône vivante. L’ADN, messager génétique qui a forme d’Epée, porte l’information fondamentale du Verbe et de l’Esprit, du plus subtil au plus immédiatement observable de nos organes. C’ est pourquoi le « corps-cadavre » lui-même peut être, en des moments privilégiés, le vecteur de la chair évangélique (Basorah), celle qui fait l’objet de la « bonne nouvelle » et que j’appelle aussi « ontologique » en tant que fondatrice : le corps devient alors l’éveilleur.
Ces « moments privilégiés », au coeur du temps historique et de l’inconscience de celui (ou celle) qui va rejoindre l’ »instant de grâce », peuvent être ceux d’une grande souffrance ou d’une exceptionnelle émotion ; ils peuvent se vivre au moment du choc libérateur de l’orgasme… Je ne quitte pas le corps, ce temple si précieux, même s’il est en attente d’être consacré (je dirais plus: en demande de l’être, d’où son langage), pour contempler dans ses structures le message génétique de l’ADN porteur du Verbe et de l’Esprit. Les structures qui l’expriment au premier chef sont celles de ce que la Tradition chinoise appelle le « ciel de l’Homme », la tête. De la tête naît le Tao, dit cette même Tradition ; d’elle naît Pallas-Athéna toute casquée d’or après qu’elle a été mûrie derrière le front de Zeus, dit le mythe grec ; enfin, et dans le principe éternel dont ce qui précède est mémoire, c’est du Golgotha, lieu du crâne, que, dans le temps historique et l’instant éternel, le Christ ressuscite dans Son corps de gloire. En image directe des archétypes, cet espace de l’ultime matrice enveloppée de la pieuse-mère et de la dure-mère où l’Homme recouvre son unité et devient son Nom est celui qui détient le secret du Un qui se fait deux et du deux qui revient au Un. Seul Dieu est Un dans le mystère insondable des trois Personnes divines unies sans confusion, distinguées sans séparation. Inconnaissable, retiré dans Son Essence, le Père agit de Ses deux Mains (le Verbe et l’Esprit) dans le Créé. Eux-mêmes inconnus dans leur Essence, le Verbe et l’Esprit se font connaître du Créé qu’ils pétrissent comme une pâte appelée à la transfiguration. Leur puissance amoureuse et opératrice contenue dans le plus secret de la chair s’exprime d’une façon privilégiée dans le « ciel de l’Homme » dont nous avons vu qu’il est baigné de la moelle épinière. A cet étage, la moelle symbolise le Pishon, icône la plus proche de son modèle, les eaux d’en haut. Par rapport aux deux hémisphères cérébraux qu’irrigue la moelle et qui expriment le deux, l’inconnaissable Unité, en tant qu’Elle se fait connaître est symbolisée par le cerveau le plus ancien dit archaïque ou reptilien. Celui-ci gère l’instant il semble traiter les instincts les plus primitifs de l’Homme et les informations fondamentales ; il serait le siège du sensorium Dei qui donnerait source au sensoriel pur, traité pour sa part au niveau des hémisphères cérébraux ; il serait la mémoire de l’orient, en
laquelle viendraient puiser les activités du sommeil paradoxal, les instincts religieux les plus archaïques et les fonctions vitales élémentaires. La prudence me fait parler au conditionnel puisque les derniers travaux de recherche scientifique sur ce délicat sujet ne font qu’avancer ces hypothèses et de plus dans un esprit encore totalement agnostique. Mais l’on sait d’une façon plus objective que le cerveau limbique qui recouvre le reptilien affine le rôle de ce dernier et joue en intermédiaire sensible entre lui et les deux hémisphères cérébraux ; tout particulièrement il gère les émotions et distribue les énergies mobilisées par l’orgasme. LES DEUX HEMISPHERES CEREBRAUX Les deux hémisphères cérébraux obéissent à la loi de formation archétypielle induite par le Tétramme-Epée ; ils sont les aspects dominants des deux hé; je dis « dominants » car à d’autres niveaux du corps nous les retrouvons, en particulier à l’étage de la parole dans les deux poumons que prolongent les deux mains (de cinq doigts chacune, et la lettre hé a pour valeur 5), puis à l’étage de la procréation dans les deux reins et la formation symétrique des organes génitaux que prolongent les deux pieds ornés chacun de leurs cinq doigts. Dans l’Arbre de la connaissance, l’un des deux hé est l’accompli-lumière qui construit peu à peu le Yod, le Saint Nom. L’autre hé est l’inaccompli-ténèbres, espace de tous les possibles. Le premier souffle est celui du Verbe, le second celui de l’Esprit « qui plane sur les eaux » de l’inconscient, mais aussi les pénètre, pour amener la lumière du Verbe ainsi construit à épouser les ténèbres latentes et à les transformer en une lumière plus intense. L’Esprit fait alors éclore un jour nouveau, émerger une terre nouvelle, apparaître du conscient. Dans cette perspective, le hé du Verbe est le souffle construit, • intégré ; la chose sue, connue, assimilée, conceptualisée ; la vérité de telle étape du réel advenu, les lois qui s’y réfèrent, la logique qui lui donne cohérence, l’éthique qu’elle détermine, les valeurs qui la fondent et qui président à toute institution nécessaire pour structurer la vie : ce pôle est mâle. Par rapport à ce hé, souffle du Verbe, l’autre hé, celui de l’Esprit, est une respiration qui fait pressentir toute chose potentielle et qui la fait émerger du confusionnel avec sa cohorte de résonances encore indistinctes mais riches de valeurs promises à la construction d’un Verbe plus densifié de Vérité: ce pôle est femelle. Sur ce schéma traditionnel et encore inconnu jusqu’à aujourd’hui des sciences dites « positives », viennent s’appliquer d’une façon étonnante les récentes données de celles-ci.
Traitant des deux hémisphères cérébraux, elles nous disent ceci : L’hémisphère gauche est surtout verbal, logique, analytique et scientifique, tandis que l’hémisphère droit est muet, spatial, analogique, synthétique et artistique ; l’hémisphère gauche régit l’orientation dans le temps, l’hémisphère droit dans l’espace. . . De son côté le professeur Israël, en conclusion des plus récentes études faites sur l’asymétrie cérébrale, s’exprime ainsi : Il y a bien une asymétrie de fonction entre les hémisphères cérébraux. Le côté gauche tient sous sa dépendance le langage, l’analyse, la mémoire verbale, les aspects numériques du calcul, la dissection logique des problèmes. Le côté droit perçoit et comprend les émotions, les relations visuelles, spatialés, il traite les informations de façon globale, synthétique et a une connaissance plus intuitive qu’analytique ; il est aussi sensible plus que le gauche à la musique ; et toujours au sujet de la musique, l’auteur ajoute : le rythme et la mesure sont perçus par le cerveau gauche, la mélodie, le timbre, le ton, par le cerveau droit. En conclusion de sa très subtile analyse, le professeur Israël propose de penser que la culture se loge plutôt dans le cerveau droit, celui de la perception globale intuitive, de l’imaginaire, des comportements émotifs sans contenu nécessairement verbalisable, tandis que la civilisation, cette entreprise de conquête du monde extérieur et en partie aussi de nous-mêmes, relèverait davantage de la puissance d’analyse, de la rigueur, de la méthode, de l’hémisphère gauche. Cerveau droit : unité avec le monde et son mystère. Cerveau gauche: prise de possession du monde visible en même temps que découverte des lois qui le régissent. Mon cerveau droit se trouve très ému de la concordance du discours de cet éminent médecin avec les données de la Tradition. Le professeur Israël a d’ailleurs l’honnêteté de porter son étude, au-delà des catégories culturelles, vers celles qui relèvent des expériences de « transe-paranormal-surnaturel » ; il ne rejette pas dans le tiroir aux sorcières (facile alibi de tant de scientifiques ! ) la vie mystique et les valeurs spirituelles. Il constate alors que notre civilisation, ayant considérablement privilégié le cerveau gauche, a toujours considéré que ce qui est passé en dehors du centre du langage et qui n’est pas verbalisé, analysé, expliqué, est fou ; il dit encore : la pulsion sexuelle est du système limbique, l’amour qui l’affirme et la sublime est du cerveau droit ; et enfin : C’est par l’hémisphère droit que l’Homme parvient à la perception d’une transcendance.
Tout en proposant cet éclairage, le professeur Israël dit combien ces découvertes sont encore parcellaires et balbutiantes mais aussi combien les activités respectives des deux cerveaux, considérés jusqu’ici comme mutuellement exclusifs devront séparation, affirme la Tradition. Et l’on devine facilement que j’associe le Verbe au cerveau gauche (qui d’ailleurs détient la fonction parolière) et l’Esprit au cerveau droit. Je serais alors tentée de croire que le bouleversement qui saisit aujourd’hui notre civilisation, et qui risque de faire s’effondrer notre culture, est l’oeuvre d’une formidable revendication du cerveau droit à dire le Verbe en passant non pas par la parole qui n’est pas son génie, mais par expérience de l’Esprit. Le savoir acquis par l’extérieur et qui demande un grand effort de mémorisation est oeuvre du cerveau gauche ; la connaissance acquise par l’intérieur et immédiatement mémorisée dans chaque cellule du corps qu’elle illumine est oeuvre du cerveau droit. Je rejoins ici le début de ce texte en disant que le mot en tant que représentation simple d’une chose est du cerveau gauche, mais que la résonance de ce mot au Verbe qui fonde la chose exprimée est du cerveau droit. L’entrée en cette résonance ou s’inscrit toute la musique du Verbe est oeuvre d’amour. Face à elle, le cerveau gauche radicalise à tel point sa primauté (pour ne pas dire son exclusivisme) qu’il récupère cette expérience des profondeurs en y faisant accéder les êtres par des techniques qu’il croit contrôler et dont il explique les bienfaits par une analyse d’ordre matérialiste. Nous avons assez de recul aujourd’hui pour savoir que l’expérience alors atteinte n’est pas pour autant intégrée et qu’elle conduit souvent à des névroses plus graves que celles qu’elle croit éradiquer. Je n’exclurai pas cette même récupération faite par un cerveau droit réactionnel, non moins exclusif et relativement « fou », aujourd’hui répandue dans les zones des milieux New Age les moins contrôlés par le cerveau gauche. Les risques de dégradations ne sont pas moins grands. Mais l’une et l’autre étaient prévisibles face à la sécheresse scientifique, à l’oppression exercée en Occident par une religion qui s’est voulue scientifique et qui, dans une masculinisation outrancière, s’est paradoxalement émasculée ; face aussi à l’exigence irrépressible de l’Esprit de faire croître le Verbe au coeur de l’Homme. Les temps sont venus d’un mariage entre nos deux cerveaux, d’un mariage entre le masculin et le féminin respectivement prépondérant, dans l’hémisphère gauche et l’hémisphère droit…
LA DROITE ET LA GAUCHE A ce moment de ma réflexion sur les deux hémisphères cérébraux, il est important de parler de la droite et de la gauche de l’Homme, côtés qui demandent la qualité d’analyse du cerveau gauche mais la subtilité du cerveau droit pour être distingués l’un de l’autre ! Car, dans la physiologie du corps humain, la perspective ontologique que je viens de préciser au niveau du cerveau subit soudain un croisement ; en effet, lorsque les faisceaux nerveux qui prennent racine dans le crâne passent dans le bulbe rachidien, ils échangent leur direction dans ce que l’on appelle la « décussation des pyramides« . Ainsi les fibres nerveuses venues du cerveau droit vont vers le côté gauche de la moelle pour commander la partie gauche du corps et vice versa. C’est alors que le côté droit du corps exprime le masculin en correspondance avec le Verbe et la fonction parolière ; le côté gauche le féminin en correspondance avec l’Esprit. La tradition chinoise vient confirmer ces données : Le Yang (pôle mâle), dit-elle, est à droite dans le ciel antérieur, à gauche dans le ciel postérieur. Elle parle du passage du ciel antérieur au ciel postérieur comme de celui du non-manifesté au manifesté ou encore du sans forme au ayant-forme. Le non manifesté est alors l’espace de tous les possibles ; le manifesté, dans le ciel postérieur, est celui qui reçoit le mandat donné d’en haut pour nous donner vie et nous permettre de nous accomplir. Sans doute ce mandat est-il contenu dans le Nom sacré qui, dans notre propre Tradition, fonde l’Homme dès sa conception et en lequel la Tradition chinoise rejoint alors la nôtre : en effet, un rituel bien précis fait donner secrètement ce nom symbolique par le père à l’oreille de son enfant dès sa naissance; le « surnom » lui sera donné plus tard. Ce nom secret contient le destin de l’enfant et sa place dans l’univers. Ces deux Traditions se rejoignent à plus d’un titre. J’en ai eu hautement conscience en écrivant Le Symbolisme du corps humain mais plus particulièrement en lisant ce que le docteur Kespi écrit : Ce mandat donné du ciel antérieur au ciel postérieur est nécessaire à l’Homme qui incessamment se crée et se recrée par la lumière et par le verbe. L’Esprit et le Verbe de l’Homme contenus en son Nom – tels sont les termes de notre Tradition – sont ici bien présents ; ils sont l’image de l’Esprit de Dieu et de Son Verbe créateur que la Tradition chinoise ignore mais que symboliquement elle renvoie au « sans-forme » du ciel antérieur, source de l’incontournable mandat de vie de chacun.
Au niveau corporel, le point de passage du ciel antérieur au ciel postérieur, et donc celui de l’entrée de ce mandat, se nomme dans la Tradition chinoise Ming Men ; il se situe en arrière entre les deux reins. Ce pésage bien connu de notre propre Tradition est appelé par elle « porte des Hommes ». En deça de cette porte, l’Homme reste confondu avec le monde parental et les groupes humains auxquels il appartient ; il est donc confondu avec son Ishah, donc inconscient, et n’est tourné que vers l’extérieur, y compris vers un Dieu extérieur s’il a une pratique religieuse. Au-delà de cette porte, il se tourne vers son orient intérieur et entre en résonance avec son Nom secret, divin, lourd de ce que les Chinois appellent le « mandat », en fonction duquel maintenant il vit, choisit, décide, etc.. On ne sera donc pas étonné de voir le Ming Men intimement lié à l’ombilic dans la Tradition chinoise ; tous deux correspondent aux « portes royales » du Temple qui laissent en arrière l’Homme enfant et adolescent matricié par l’eau, pour le faire entrer en adulte dans la matrice de feu où il commence d’assumer son mandat. La lumière du Christ transfiguré que les trois apôtres ont vue sur le mont Tabor (Tabor est « l’ombilic » en hébreu), celle qui a embrasé le Buisson ardent où Moïse a eu la révélation du Saint Nom, l’illumination du Bouddha, etc., sont le Ming Men de ces hommes. Pour les deux Traditions, orientale et occidentale la tête ou le ciel de l’Homme dans le manifesté correspond au « ciel postérieur » ou la droite est féminine et la gauche masculine. La Tradition chinoise suppose donc un premier croisement en amont de la décussation des pyramides ; ou le ciel antérieur livre passage au ciel postérieur. Il semble que la Tradition hebraïque, en d’autres termes nous apporte le même message, lorsqu’elle dit, parlant du « corps divin » vu par Moïse et dessiné par lui dans l’Arbre des Séphirot, que Dieu règne par son bras [ou côté] droit qui renferme sa clémence, par son bras [ou côté] gauche qui détient la mort et la rigueur, et par la colonne du milieu qui équilibre, harmonise et dissout toutes les oppositions dans son unité. Il est bien certain qu’en Dieu il n’est ni gauche, ni droite, ni aucune dualité ; mais en tant que Dieu YHWH s’incarne dans Sa Création et pénètre la dualité du tout autre que le Un, Son bras droit qui est Clémence se révèle masculin et Son bras gauche qui est Rigueur féminin. Sans doute contemplons-nous dans cette vision le Saint Nom de la Tradition hébraïque d’où émanent tous nos Noms secrets. Entre ces deux plans se joue en effet un croisement en miroir, celui dont parle l’apôtre Paul lorsqu’il dit :
« Nous réfléchissons comme en un miroir la splendeur du Seigneur – YHWH – et nous sommes transformés en cette même image de plus en plus radieuse par l’action du Seigneur qui est Esprit ». Le dernier des fils d’Israël, Benjamin, souvenons-nous, est le seul à être nommé par son père ; ses frères ont tous reçu leur nom de leurs mères respectives. A la naissance de Benjamin, sa mère, Rachel, meurt; la « brebis » n’est plus. Elle avait nommé son fils Ben `Oni (« fils de ma douleur »), mais après sa mort Jaqob, lui-même devenu Israël, change le nom de son enfant et l’appelle Ben Yamin (« fils de ma droite »). Rachel qui continue de pleurer sa douleur sur les enfants de l’exil a donné au monde celui qui symboliquement n’appartient plus au monde de l’exil. Benjamin naît d’un père qui a fait le retournement et dont la droite est devenue féminine ; il est le douzième, mais aussi le treizième des enfants d’Israël si l’on compte Dinah, et le nombre 13, ne l’oublions pas, correspond au mot ‘Ehad, « un » ! Benjamin est l’ancêtre de l’apôtre Paul treizième apôtre envoyé par le Christ lui-même au groupe des douze qui s’était empressé de remplacer Judas après la résurrection et l’ascension de leur Maître. Lui le treizième au milieu d’eux, le Un ! « Fils de ma droite » est, dans cette vocation ancestrale, « l’apôtre des nations » qui ne participera de la Pentecôte qu’avec elles toutes encore enchaînées dans la douleur, mais promises à l’unité dans la communion de l’Eglise, Pentecôte éternelle. Dans la suite de l’histoire des Hébreux, le roi Salomon bâtit le Temple de YHWH en faisant placer les deux colonnes Yakin et Bo’az, respectivement masculine et féminine, la première à droite, la seconde à gauche de celui qui s’avance vers le Temple, ce qui veut dire que la colonne masculine est à gauche et la colonne féminine à droite du Saint des Saints. Lors de la Transfiguration du Christ sur le mont Tabor, Elie, le prophète, est à droite du Christ, Moïse, l’homme de la loi, à gauche. De même nos icônes chrétiennes de Déisis placent Marie à droite du Christ en gloire, et saint Jean Baptiste à gauche. Ces trois représentations appartiennent, comme le cerveau de l’Homme, à l’ordre du manifesté. L’ordre archétypiel de la droite et de la gauche et, de ce fait, du féminin et du masculin se complexifie encore lorsque nous découvrons qu’une part féminine est dans le masculin et vice versa.
Nous l’avons vu, le Créé tout entier est féminin par rapport à l’Incréé masculin, mais l’Incréé porte de toute éternité le Créé comme un tout autre potentiel, en son sein, et le Créé n’a vie que par son noyau fondateur, l’Image divine, Germe d’Incréé. A tous les plans nous retrouvons cette union intime du masculin et du féminin qui fonde la dualité du Créé et conditionne sa vie ; elle nous oblige à relativiser considérablement nos afFirmations mais ne justifie aucunement nos confusions. Dans le Livre de Jonas le Seigneur YHWH dit au prophète qui lui tient tête : « Et moi n’aurais je pas pitié de Ninive, la grande ville dans laquelle il y a plus de cent vingt mille être humains gui ne savent pas distinguer la droite de la gauche, et du bétail en grand nombre ? » Autrement dit, l’Homme encore identifié à l’animal est dans la confusion en ce qui concerne ces deux pôles de l’espace, la droite et la gauche. Jonas qui apprend la grande loi de mort-résurrection après être descendu pendant trois jours au fond des mers, dans le ventre du « grand poisson », est l’archétype privilégié de celui qui, ressuscité, entre dans le « discernement » (Habanah, de racine Ben, le « fils »). Celui qui construit le Fils intérieur est capable de discernement, capable d’intelligence (Binah). La Tradition hébraïque dit alors que l’Intelligence est Mère divine et la Sagesse, Père divin, selon l’Arbre des Séphirot, archétype du corps humain. L’Intelligence préside à la Rigueur, la Force et la Gloire ; la Sagesse, à la Miséricorde, la Grandeur et la Puissance. Dans le monde de l’exil où l’Homme s’est détourné de son orient, il a inversé les valeurs : Intelligence, Force, Rigueur et Gloire ont été masculinisées ; Sagesse, Miséricorde, Grandeur et Puissance, femellisées. Dans notre situation d’exil, un même côté du corps voit alors se superposer des caractères contradictoires selon qu’il est vécu au plan ontologique – espace que symbolise le cerveau – ou dans le contexte psychologique ordinaire à l’exil que marque la décussation des pyramides. Ne nous étonnons donc pas, aujourd’hui où le monde a perdu toutes ses valeurs d’exil et tous les repères qui lui permettaient d’y survivre sans avoir pour autant opéré son retournement vers l’orient et retrouvé ses valeurs ontologiques, que les deux pôles masculin et féminin soient si douloureusement confondus : non seulement l’homosexualité règne et, pour se justifier, se réclame d’un ordre ontologique, non seulement l’homme s’amuse à revêtir des vêtements féminins et la femme ceux de l’homme, mais les fonctions de chacun se jouent dans un désordre d’autant plus regrettable qu’il déstructure nos enfants et devient source de nombreuses souffrances, voire de troubles psychiques pouvant dégénérer en pathologies graves.
Pour sortir de la confusion, retrouver l’équilibre et tenter de « faire la terre comme le ciel » afin que les deux s’unissent – et les moindres détails de notre vie concourent, à cela ou en bloquent la réalisation, il nous faut nous poser, nous mettre à l’écoute de la Tradition, des mots qu’elle nous laisse entendre et de ce qu’ils murmurent lorsqu’ils commencent à frémir sous leur coque nécessaire mais insuffisante ; il nous faut ramasser, tel que le fait le Christ pour le banquet méprisé des invités vertueux, tous les estropiés de la rue que nous sommes avec nos misères et nos manques : ceux-là ont droit au festin d’approche de vérité, à condition de revêtir la robe de noces que sont l’authenticité du désir et la transparence, au-delà de toutes les cachettes justificatrices. L’aventure vaut la peine d’être vécue car elle me semble détenir la clef de ce qui peut constituer notre identité d’hommes et de femmes aujourd’hui. © Annick de Souzenelle
rrrrrrrrrrrrrrrrr Nous abordons cette saison l’étude des lettres hébraïques. Il n’était pas coutume il y a vingt ans pour un Chrétien d’apprendre l’hébreu et je crois assez unique qu’un homme, ayant reçu l’initiation de la Qabbale la transmette à un non-Juif. C’est ce cadeau royal que j’ai reçu que je vais essayer de vous transmettre. En même temps que je recevais cette tradition je faisais mes études de théologie dans le Christianisme Orthodoxe et j’avais l’impression extraordinaire de boire aux deux mamelles de la même mère, car les deux disaient la même chose en partant, l’un, de la course qabbalistique hébraïque, et l’autre de la tradition chrétienne. Je crois que le Christianisme qui refuse ces bases hébraïques, se coupe de ses racines et le Judaïsme, tel qu’il est transmis par la Qabbale, pour moi, débouche sur le message chrétien. Vivre ainsi cette coexistence de deux traditions a été pour moi une charnière énorme qui m’a obligée de vivre d’une autre façon et qui m’imposait de transmettre ce que je recevais. Et cela m’incite à vous faire comprendre qu’il ne s’agit pas pour vous de vivre ce message uniquement sur le plan intellectuel, parce que cela « fait bien », mais que nous allons travailler ces lettres hébraïques qui sont des énergies vivantes et qui font écho en nous à des forces fondamentales, nous obligeant à nous transformer. C’est d’autant plus vrai qu’il y a une correspondance étroite entre chacune de ces lettres et chacun des organes et membres de notre corps, dont je ne vous parlerai pas maintenant, mais qui pourrait peut-être constituer un troisième volet de notre étude. Il y a un texte qabbalistique hébreu qui dit que lorsqu’un mystique juif méditait de façon pas juste toute une nuit sur une lettre, il se retrouvait le lendemain matin avec une altération de la
partie correspondante de son corps. Et le Zohar nous dit que lorsque le Saint, béni soit-Il, jouait avec les âmes des lettres de l’alphabet, Il en faisait Ses délices. D’après les Hébreux ces lettres sont de « petites lettres créées par rapport aux « grandes lettres » archétypiques qui sont les énergies divines, incréées. De même qu’il en est pour le corps humain en tant que symbole dont je vous parlais la saison dernière, elles sont reliées à leurs archétypes par ce que j’appelle « un cordon ombilical », un cordon nourricier, qui nous informe constamment. L’écriture hébraïque procède d’écritures très anciennes, comme d’ailleurs toutes ces langues dont on ne connaît pas l’origine. Nous nous rendons de plus en plus compte que c’est la langue qui fait le parlant, que c’est le Verbe qui nous crée, qui nous structure à chaque moment. Prisonniers de nos catégories mentales nous avons l’habitude de penser le contraire. Or le Verbe est vibratoire, il nous informe au sens cybernétique du terme, il nous informe par l’intérieur et notre forme humaine n’en est que le résultat. Nous comprenons alors que chacun de nos organes peut être relié à la vibration de chacune de ces lettres. Nous n’aurons pas le temps de raconter tous les avatars de ces lettres, de leur sculpture, mais nous pouvons dire que du temps d’Esdras, après la déportation de Babylone, au IVe siècle environ avant J.-C. la langue et les lettres ont reçu leur dernière forme. Personnage extrêmement important dans l’histoire de l’écriture hébraïque, il a fait au niveau de la langue, des lettres et des sons, une sorte de circoncision qui leur a donné une densité d’énergies vibratoires que nous ne retrouvons dans aucune autre langue, sinon peut-être dans le sanskrit. Elle se prête à des lectures allant de plus en plus loin, comme si le fruit n’était jamais le dernier. Remarquez que l’écriture est une crucifixion. En figeant le Verbe qui est créateur, nous lui faisons subir une mort. Esdras a formé les lettres au nombre de vingt-deux. Ce ne sont que des consonnes, les voyelles n’existent pas en hébreu. Selon les différents mots la prononciation est autre. Ainsi le mot David dans un autre contexte va se prononcer Dvod et ce sera un tout autre mot qui signifiera l’ainé, le chéri. Et pourtant ce sont les trois mêmes lettres, les trois mêmes énergies qui structurent les deux mots qui, pour nous, sont très différents, mais qui, dans la conscience des Hébreux, ont un lien étroit. Nous trouvons souvent dans la langue hébraïque au niveau du même mot des contradictions qui nous font dresser les cheveux sur la tête. C’est ainsi qu’une même racine donne le mot « Saint » et le mot « prostituée ». Ce sont les mêmes énergies qui font découvrir la clef du message extraordinaire de cette langue.
Bien sûr pour faciliter la lecture on intercale entre les consonnes des lettres qui sont appelées « mères de lecture », « matrices de lecture » mais, alourdissant la langue, elles ne seront pas gardées. Maintenant dans la Thora nous allons trouver sous ou à côté des lettres un petit point ou un tiret qui indiquera la vocalisation. L’écriture hébraïque s’écrit de droite à gauche. Cela n’a pas toujours été le cas. Comme l’écriture chinoise, elle a été verticale. Et puis de façon très curieuse elle devient serpentine, c’est-à-dire qu’on commence par écrire de droite à gauche et, au bout de la ligne, elle repart de gauche à droite, et ainsi de suite. Elle trouvera son orientation définitive au moment d’Esdras, de droite à gauche. On en ignore la raison. Etudions à présent les lettres, leur histoire, leurs avatars, car le graphisme n’a pas toujours été celui d’aujourd’hui. Il remonte à des temps très anciens. Chacune des lettres va correspondre à un nombre. L’un et l’autre sont inséparables. Tous deux sont une énergie, icône de l’énergie divine correspondante. Certaines lettres correspondent aux dix premiers nombres des unités jusqu’à 9 compris. Les dix lettres suivantes vont correspondre non pas au 11, 12, 13, etc., mais à 20, 30, 40, etc., c’est-à-dire aux dizaines et puis, les dernières lettres aux centaines. Quand nous arrivons au Tav, ayant la valeur de 400, nous sommes arrêtés. Comment alors s’expriment le 500, 600, jusqu’à 900 et même 1 000 ? Par certaines lettres déjà vues jusque-là qui arriveront à la fin d’un mot et qui vont prendre cette valeur. Par exemple le Mem a pour nombre 40 et lorsqu’il arrive à la fin d’un mot il aura un graphisme un peu différent et vaudra 600. Et puis la dernière lettre qui est aussi la première, Aleph, par qui tout se termine, vaut en finale 1000. La toute première lettre que je vous présente est Aleph. Les lettres hébraïques ne sont pas monosyllabes comme nos lettres françaises, elles sont l’initiale d’un mot entier. Qu’est-ce que Aleph ? C’est une bête cornue (voir le graphisme de la lettre) ainsi que le montre son dessin primitif. Et puis il subira des avatars, les cornes ne se tiendront plus vers en-haut, mais vers le côté, pour finalement tomber en verticale vers le bas. Nous trouverons là l’alpha grec et enfin l’amorce de notre A. Nous savons maintenant et la graphologie nous l’a confirmé, que l’écriture exprime toute une partie non seulement de notre inconscient, mais de l’inconscient collectif. L’évolution de la lettre se fera en fonction de l’évolution de l’humanité. De même qu’autour du XVIIIe siècle av. J.-C. Abraham, venant d’Ur, ville lumière, conduit tout ce peuple hébreu à vivre une nuit avant d’atteindre une lumière encore plus vive, c’est-à-dire la Terre Promise, de même nous verrons très nettement dans les dessins des lettres une chute du symbole de leur signification profonde. Il est intéressant de voir que le mot Aleph est essentiellement la bête cornue, mais aussi la racine du mot qui veut dire enseigner, instruire et aussi l’époux, le prince, le chef, le général des armées, celui qui va conduire les hommes, les instruire. Quel est le rapport de ces significations avec la bête cornue ? Il est dans le symbolisme des cornes, de celui des
cheveux qui ont la même composition chimique que les cornes et que nos ongles. Ils sont nos racines d’en-haut, nos antennes qui symboliquement sont dressées vers le ciel pour en recevoir l’information, et aussi l’énergie, la nourriture nécessaire pour vivre ce message et pour pouvoir en instruire les autres. Celui qui enseigne est le chef, celui qui sert de charnière entre le monde divin et le monde qui en recevra la connaissance. C’est dramatique que ces cornes qui, au début, étaient orientées vers le haut, vers le monde du MI, ce monde de l’archétype, sont maintenant tendues vers le monde du MA. L’humanité est coupée du monde d’en-haut, coupée de ce noyau divin en nous et au lieu de chercher nos informations dans la conscience aiguë à l’intérieur de nous, nous allons les chercher à l’extérieur. Nous avons perdu le contact avec les lois ontologiques que le monde divin est prêt à nous donner. Déjà le monde grec ne possédait plus la sagesse divine, mais la sagesse du monde et dans le A latin, les cornes sont totalement à l’envers. Le Aleph, en fait, est formé par une autre lettre qui est transversale, le Vav et deux petits Yod enserrés par le Vav, ce qui lui donne le nombre proche du Tétragramme divin, Yod-Hé-Vov-Hé qui a pour valeur arithmologique 26. Le Aleph = 1. D’où vient le 1 ? nous ne le savons pas, de même que pour le point en géométrie, nous ne pouvons lui donner une origine. Et nous verrons que toutes les autres lettres vont procéder de lui. Il semblerait qu’il soit un don divin par excellence. Il est curieux que le point qui est indéfinissable est aussi une négation dans sa signification dialectique. Il est et il n’est pas. Il en est de même pour le 1 et pour le Aleph qui symbolise par ses cornes et leurs transformations, cette énergie divine créatrice. Pour interroger les lettres je m’appuierai beaucoup sur une histoire citée dans le Zohar : Après que le Saint, béni soit-Il, jouait avec les vingt-deux lettres de l’alphabet, les unes et les autres, en commençant par la dernière, comme dans une danse sacrée, sont venues le trouver pour lui demander le privilège de présider à la création du monde. Chacune se réclame de commencer un mot d’une grande beauté. Et le Saint, béni soit-Il, leur répond à chacune : « Tu es belle, tu es bonne, tu es magnifique, mais tu es réservée pour autre chose. Ou bien tu commences tel mot, ou bien tu en fais partie et, en conséquence, tu ne peux absolument pas le quitter et je ne peux pas te donner la présidence. » Et toutes les lettres sont renvoyées les unes après les autres jusqu’à ce que la lettre Beith, venue se présenter à son tour lui dit : « Je commence le mot avec lequel on Te bénit en-haut et en-bas ». Et le Saint, béni soit-Il la retient et lui dit : « Oui, tu es bénie et tu seras à la base de toute la Création. Aleph n’est pas venu se présenter et c’est le Saint, béni soit-Il qui l’appelle. Elle est la seule lettre à avoir été appelée. « Mais Aleph, dit le Saint, pourquoi n’es-tu pas venue ? » Et Aleph répond : « D’abord parce que tu as déjà donné la place au Beith et il ne convient pas que Tu la reprennes pour me la donner. » Et la lettre est louée par Dieu : « Et bien, si tu ne présides pas à la création du monde, tu es réservée pour quelque chose de beaucoup plus grand encore ! » Et l’on sent que la lettre Aleph va émailler la langue hébraïque comme pour la féconder d’une manière
essentielle, car ce sera toujours elle qui va apporter la lumière divine, sans laquelle les autres lettres ne pourraient pas vivre. Aleph va nous poser le problème du pourquoi de la Création. Car, à partir du moment où Aleph va poser le Beith, le 1 posant le 2, où Dieu va poser l’altérité, nous entrons dans le mystère. Pourquoi le Aleph, étant tout le don de l’amour divin, Dieu a-t-Il encore besoin de créer ? Nous verrons, au fur et à mesure que nous entrerons dans l’intelligence des lettres, que le 1 se suffit à lui-même, qu’il n’a pas besoin du 2, tout en en ayant besoin. Dieu a besoin et n’a pas besoin et cependant dans Sa perfection absolue, Il a besoin de cette création qui viendra s’ajouter à sa perfection pour l’amener encore à un plus que parfait. De même, dans notre évolution personnelle, nous devons tendre vers un équilibre parfait qui, à la limite, est la mort et qui devra se rompre un jour pour nous amener encore plus loin. C’est ainsi qu’on arrive à comprendre le Beith qui, en entrant dans le mystère de l’Aleph, qui se donne pour être reçu, rejoint celui-ci et l’enrichit. C’est pourquoi, lorsque ces deux lettres sont posées, tout est dit, le rythme est créé, nous pourrions nous arrêter là. Et si les autres lettres viennent enrichir la danse sacrée, c’est pour poser les lois qui vont permettre à Beth de rejoindre l’Aleph. Qu’est-ce que Beith par rapport à l’Aleph ? C’est une lettre pratiquement carrée dont un côté reste ouvert. Elle est l’initiale du mot Beith qui signifie « maison ». C’est un élément réceptif qui s’ouvre pour recevoir. Cette lettre aussi va se transformer, tourner à la verticalité et vers la gauche, pour, à travers des changements successifs, se retourner et le B va pratiquement se construire. Mais qu’est-ce que cette maison que figure Beith? Elle est construite sur deux lettres, Beith et Tav qui renferment toute la Loi et Aleph est là qui se profile à travers le Yod. Lorsque nous rassemblons le Beith et le Tav en interposant un Yod, nous avons le mot qui veut dire la fille, le mot Bath, ou encore la Vierge d’Israël, celle qui doit mettre au monde l’Enfant divin et qui, ensuite, doit être épousée par Aleph. Toutes les traditions ont une conscience lointaine de cette Vierge qui doit enfanter coexistensivement toute la Création, parce que le Verbe contient la Création qui doit enfanter le Divin. De même chacun de nous en tant que Création toute entière, doit mettre au monde le Divin pour être épousé de Dieu. Dans cette perspective Nous comprenons les mystères chrétiens dans lesquels la virginité est liée à la maternité, celle-ci précédant le mariage. Quand le Aleph pose le Beith, le mot Av, juxtaposition de la lettre A et B (le B se prononce V à la fin d’un mot), rend compte du Père. Et quand nous retournons ce mot, nous obtenons Bo qui rend compte de l’avenir, du Beith allant vers son Aleph final. C’est toute la vocation de l’humanité.
La fille signifiant aussi bien l’homme que la femme, doit être épousée du Père et cette loi est tellement sacrée Que je crois qu’elle fait l’objet de toutes les lois morales concernant l’inceste. Car si un père quelconque biologique s’interpose entre l’homme et le Père divin il l’empêche d’être épousé par lui. La Vierge d’Israël est l’humanité toute entière, nous avons tous la même vocation. Répondant à une question : Je ne connais pas la langue sanskrite, mais certainement elle contient aussi des énergies très denses et qui sont très proches de l’hébreu. Il serait question d’une langue primordiale qui aurait donné naissance à une branche sanskrite d’un côté, hébraïque de l’autre. La Bible en parle au moment de la Tour de Babel. Tous les hommes, dit le texte, avaient à ce moment une langue une, une langue divine, très proche des sons. Chez les Chrétiens il y a aussi au moment de la Pentecôte les langues de feu qui descendent sur les Apôtres et ceux-ci, pénétrés d’une science que nous ne connaissons pas, parlent une langue qui est comprise de tous. Compte rendu de la rencontre du 8.11.1978 Une première partie de la réunion se passe à récapituler pour des nouveaux venus, les sujets de la réunion d’octobre, c’est-à-dire les lettres Aleph et Beith. Nous ne reviendrons pas là-dessus. « J’ai terminé la dernière fois, dit Annik de Souzenelle, en disant que tout pourrait s’arrêter là, le 1 ayant posé le 2 et le 2 devant revenir au 1. Toutes les autres lettres vont raconter ce retour. Déjà dans le Guimel qui est la lettre 3 nous allons trouver l’énergie nécessaire au Beith pour retourner à l’Aleph. Dans chaque lettre qui va suivre, nous verrons le rôle énergétique qu’elle va avoir à jouer dans ce but. La première lettre de Guimel a la valeur 3. Son graphisme est caractérisé par un petit crochet — avec une langue du côté droit et elle est symbolisée par le cou d’un chameau. Si, au sujet d’Aleph je vous ai dit qu’il correspondait au premier jour de la création où Dieu créa la Lumière, que le Beith correspond au deuxième jour pendant lequel Dieu sépara les Eaux d’en-bas et les Eaux d’en-haut, le Guimel correspond au troisième jour au cours duquel nous voyons deux opérations se faire, l’une est au niveau des eaux d’en-bas la séparation du sec et de l’humide. Les Hébreux, dans la Genèse nous disent que Dieu ordonne aux Eaux d’en-bas de se rassembler en un lieu « UN » qui se dit en hébreu : « El Maqom Ehad ». El est un nom divin, le singulier d’Elohim, c’est le suffixe que nous trouvons dans Michel, Emmanuel, etc. et qui indique le Divin. Maqom veut dire le « lieu ». Il est aussi un mot divin, car qu’est-ce que le lieu sinon l’espace, l’espace qui n’a de sens que lorsqu’il correspond à notre espace intérieur, c’est-à-dire à notre plan de conscience, appelé à se transformer continuellement, car nous avons à remonter cette échelle qui nous sépare et nous relie au monde d’en-haut. Et lorsque nous aurons remonté tous ces plans de conscience, nous nous retrouverons dans le lieu divin. Le dernier espace enhaut, en fin de compte, c’est aussi Dieu. Ehad signifie Unité, également mot divin. Autrement dit les eaux qui doivent se rassembler dans un lieu UN ont la vocation d’être divins, d’être
l’ensemble de ces énergies divines qui vont féconder tout ce qui apparaît comme étant le sec séparé de l’humide; mais qui, comme les eaux d’en-bas, ont été séparées des eaux d’en haut. Le sec va continuellement être fécondé par l’humide. Qu’est-ce que le chameau ? C’est celui qui traverse le désert en portant en lui son eau, c’est-àdire toute l’énergie qui lui permettra de traverser le désert. Car à partir du moment où la création est séparée du Créateur, le Beth de l’Aleph, surtout dans notre monde en chute, elle est dans un désert. Mais lorsqu’elle prend la décision de retrouver le Aleph, de revenir à ses origines, elle a besoin de toute son énergie intérieure. Nous ne réalisons pas actuellement que nous sommes dans un désert, parce que nous avons oublié notre objectif qui ne devrait être que le Divin. Nos « jardins » actuels sont des illusions, des prisons, mais lorsque ceux-ci sont icônes du jardin divin, celui-ci nous nourrit et nous donne une certaine force pour aller vers lui. Lorsque le Guimel est venu lui aussi trouver le Saint, béni soit-Il, pour solliciter la première place dans la création du monde, il est renvoyé parce que le Daleth, la lettre suivante, venue elle aussi solliciter, a reçu pour ordre de rester toujours liée au Guimel, ces deux lettres ayant pour valeur 4 et 3, et parce que « le pauvre a besoin du riche ». Nous verrons plus tard le sens de cette histoire qui n’a rien à voir avec la morale. Lorsque les Hébreux quittèrent l’Egypte où ils étaient esclaves et entrèrent dans le désert, ils n’en prirent pas conscience étant encore extrêmement infantiles. Ils se retournèrent vers Moïse et se révoltèrent, car ils avaient faim et soif. Ça c’est le cri de l’humanité qui a horreur d’être libre, qui veut être sécurisée, car la sécurité divine n’est pas évidente. Et Dieu dit à Moïse : « Frappe le rocher et l’eau jaillira ! » Qu’est-ce que le rocher, si ce n’est nous ? Nous sommes pierre vivante, elle est notre noyau, notre énergie nucléaire en nous, car nous sommes construits comme l’atome. Mais, hélas ! nous n’avons pas encore atteint notre noyau qui pourrait libérer l’énergie du dieu que nous sommes en puissance. Et c’est bien pour cela que l’atome pourrait nous tuer tant que nous n’aurons pas atteint cette dimension intérieure nous permettant de fissurer notre atome intérieur pour en dégager l’énergie. « Frappe le rocher et l’eau jaillira », c’est l’ordre que nous recevons tous les jours, voilà le chameau, celui qui porte l’eau. Les Hébreux à nouveau ont soif et Moïse à nouveau se tourne vers Dieu qui lui dit : « Parle au rocher et l’eau jaillira ! » Mais Moïse frappe le rocher et c’est pour cela qu’il n’entrera pas en Terre Promise. Non pas en tant que punition, mais parce qu’il n’était pas encore devenu Verbe. L’eau n’avait pas encore jailli de son front pour qu’il puisse avoir la dimension de Verbe. S’il était malgré cela entré en Terre Promise, il eut été consumé par l’énergie qu’il y rencontrait, car nous ne pouvons entrer dans un plan énergétique qu’en étant devenus nous-mêmes cette énergie. Et Guimel, le chameau va retrouver toute son énergie en lui.
Comment cette lettre si intéressante est-elle construite ? Si nous prenons la première et la dernière lettre nous avons ce qui correspond en français au G. et au L qui donnent le mot Gal, signifiant le libérateur. Gilgal en hébreu veut dire une grande roue. Elle contient aussi la notion de libération. L’invention de la roue a été une chose extraordinaire, tandis que le cercle est une totalité. Le Mem qui est au milieu du mot Guimel signifie la maîtrise, c’est-à-dire que le chameau est maître de la libération. La circoncision dont nous avons déjà parlé longuement est signifiée par le mot Gal. Or si nous voulons que nos énergies nous conduisent jusqu’à la Terre Promise, nous devons circoncire, tailler continuellement l’Arbre que nous sommes. Et si les Hébreux se circoncisent au niveau du sexe, c’est parce qu’il doit y avoir une sexualité vécue de façon juste et non de façon délirante telle que nous le voyons actuellement sous prétexte de libération. C’est comme cela qu’est construit le chameau, il est le porteur d’eau, il est le porteur de libération et, en même temps, il implique la circoncision. Deux opérations se font le troisième jour de la création, d’une part l’eau d’en-bas fait apparaître le sec, appelé terre et, d’autre part, apparaît la verdure. On peut dire que le nombre 3 n’est pas seulement l’énergie qui va nous conduire à notre Aleph-Beith, mais il est aussi symbole de la fécondité essentielle qui nous permettra de mettre au monde l’Enfant Divin. Le Daleth a la valeur 4. Il a la forme d’une petite potence et veut dire : porte. Son histoire est simple. Il est représenté par un triangle, un peu comme la porte d’une tente, d’une maison primitive. Le triangle, comme les autres lettres, va devenir plus ou moins de travers, pencher à droite et à gauche. Il est étrange de voir cette lettre qui a pour valeur 4, représentée par un triangle conformément à ce que le Saint, béni soit-Il lui a ordonné, à savoir de ne jamais se séparer du 3. Alors de quoi s’agit-il ? Le nombre 4, c’est l’équilibre, la stabilité, l’arrêt par rapport au 3 qui est le mouvement, l’énergie. Le 4 rend aussi quelquefois compte d’une épreuve, à la limite d’une quarantaine effective, puisque liée à une maladie contagieuse qui s’incube pendant quarante jours, ou encore à cette coutume mystérieuse de quarante jours après la mort où il se passe toujours quelque chose de très important que nous ignorons. Il est intéressant que ce 4 soit un arrêt, une épreuve et, en même temps une porte. Et Mem, le nombre 40 signifie la matrice, le lieu de la gestation qui se termine par une porte. L’enfant, en naissant, sort de la matrice de sa mère pour entrer dans une autre matrice, celle de son foyer. Nous allons toujours de notre naissance à notre mort de matrice en matrice, dans lesquelles nous avons à assumer notre gestation. Et lorsque le temps sera venu, nous naîtrons à une naissance que nous ignorons. Si nous voyions la mort de l’autre côté, nous nous en réjouirions. La plupart du temps les gens vont vivre ce 4, ce temps de gestation, comme une épreuve. Mais si nous prenons conscience que tout 4 est une porte, à ce moment-là la vie prend un sens. Et lorsque
le Saint, béni soit-Il, dit que les lettres Daleth et Guimel ne doivent jamais se séparer, c’est parce qu’Il demande aux structures que représente ce 4, de contenir la vie, cette énergie qui passe à l’intérieur. Si l’enfant ne la rencontre pas, il ne pourra assumer ses neuf mois de gestation et si le ventre reste stérile, s’il ne contient pas le 3, c’est-à-dire toute l’énergie pour faire cet enfant, celui-ci ne se fera pas non plus. Le mot Daleth correspond donc au 4, la lettre Tav à 400 et le Lamed qui est au milieu, au 30. Encore une fois le Daleth et le Guimel sont réunis. Mais s’ils ne doivent pas se séparer, ils n’en doivent pas davantage s’écraser l’un, l’autre. Ils doivent être ensemble dans un juste rapport. Si le 4 écrase le 3, les structures seront prégnantes, si le 4 prédomine sur le 3; le Lamed, symbole du mouvement, de vie, n’existe plus, il ne reste que la matrice qui se dessèche, devient stérile. Et que reste-t-il ? Le mot Dath fait du Daleth et du Tav, qui veut dire la Loi. Or si cette loi est trop contraignante, elle écrase la vie. Et si la vie n’a pas de loi, elle ne peut grandir. Mais ces lois ne sont pas immuables et au fur et à mesure que l’homme va grandir, les lois aussi se transforment. Annik de Souzenelle fait alors un parallèle entre l’époque que nous vivons et où les générations qui montent font éclater toutes les lois. « Le drame, dit-elle, c’est que la génération actuelle fait sauter la morale, mais qu’elle n’a pas de point de référence pour trouver une autre loi, parce que leurs parents n’ont pu en rendre compte, ne l’ayant pas trouvée en eux-mêmes. Car il n’est qu’en soi que l’on trouve ces lois. C’est le fait d’être adulte. Il est important d’aller à la recherche d’autres lois qui ne soient pas contraignantes, mais libératrices, parce qu’elles nous permettront de grandir. Voici notre 4 qui n’est juste que s’il est au service du 3, du Guimel. La structure est inséparable de la vie. Si on trace sur deux triangles homologues les jours de la création on s’aperçoit que le jour un correspond au jour quatre, que le jour deux correspond au jour cinq et que le jour trois correspond au jour six. Donc le premier jour fut celui de la révélation de la Lumière et le jour quatre furent créés les luminaires dans le ciel. Le jour deux il y eut séparation des eaux d’en-bas et des eaux d’en-haut, tandis que le jour cinq furent créés les oiseaux dans le ciel et les poissons dans l’eau. Le troisième jour fut celui de la séparation du sec et de l’humide et de l’apparition de la verdure, des arbres, de toute cette fécondité. Deux opérations se font aussi le sixième jour, la création des animaux et de l’homme. Le septième jour Dieu se retire afin que toute sa création puisse librement retrouver le chemin, la remontée de ses énergies. Ainsi, lorsque l’homme arrive le dernier, il récapitule le tout, il est tout cela dans ses structures intérieures, il est le MI et le MA, la ténèbre et la lumière, le soleil et la lune. Retourner au Aleph, c’est-à-dire au Père, c’est remonter tous ces niveaux énergétiques que nous portons à l’intérieur de nous-mêmes.
Donc, le quatrième jour, création des luminaires, le grand pour éclairer le jour et le petit pour éclairer la nuit et un petit troisième, les étoiles qui sont le Lamed entre les deux colonnes du quatre, colonnes du Daleth, sortes de chambranles symbolisant ses structures. Dans l’Apocalypse l’Apôtre Jean dit « Les sept étoiles sont les sept Anges des sept Eglises ». Ce sont ces Anges qui parcourent l’échelle en montant et en descendant. Ce sont ces énergies qui viennent d’en-haut pour nous nourrir et nos énergies qui viennent d’en-bas et qui vont à la rencontre des autres. Dans l’étude des autres lettres nous verrons encore que le soleil et la lune correspondent aux structures espace/temps. La lune va marquer le temps et le soleil l’espace. Mais en haut de l’échelle « il n’y a plus ni espace, ni temps, ni soleil, ni lune, car Yod-Hé-Vov-Hé sera ta lumière à toujours. » Tant que nous ne sommes pas reliés au Divin que nous sommes, nous traverserons des espaces liés au temps. C’est pour cela que quand nous mourrons, nous ne serons pas tout de suite dans l’éternité Nous entrerons dans un nouveau temps. Ces quarante jours après la mort; à quel temps, correspondent-ils ? Nous ne le savons pas. Et ce n’est qu’après la mort qu’il y aura évolution à travers des espaces/temps, à travers ces « terres nouvelles » dont parle l’Apôtre Jean dans l’Apocalypse, et que nous entrons dans de nouveaux plans de conscience. Quand selon l’ordre du Saint, béni soit-Il, le Guimel rencontre le Daleth c’est dans le mot Gad qui signifie « bonheur ». C’est-à-dire que le 3 et le 4 réunis, donnent le nombre 7, si important. Lorsque nous retournons le mot Gab, nous avons Dag le poisson. C’est le germe de tout le bonheur en perspective, le poisson étant un germe renfermant la totalité. Chaque terre conquise n’est que le germe d’une terre nouvelle à atteindre. Et au septième jour, il y a totalité, tout est accompli. Dieu se retire, Il se fait germe à l’intérieur de nous pour que nous devenions Lui. Nous abordons aujourd’hui la cinquième lettre de l’alphabet hébraïque, le HE qui a pour valeur 5 et qu’il ne faut pas confondre avec celle qui a pour valeur 8, la lettre HEITH qui, elle, n’a pas la petite ouverture en haut à gauche. La lettre HE ne correspond pas à un mot, elle est une des rares lettres monosyllabiques. Elle signifie « le souffle ». Au début de son histoire elle représente un petit homme qui souffle et qui prend toutes ses forces d’en haut. Elle symbolise essentiellement les poumons. La lettre étant entièrement signifiée par le haut du corps ou verra très vite disparaître le bas de son graphisme pour ne plus avoir que le dessin stylisé d’une barre verticale avec trois branches horizontales. Et comme les autres lettres, celle-ci se retournera et formera E constitué par la tête et les deux bras du petit bonhomme. Le symbolisme de cette lettre nous est aussi donné par le cinquième jour de la Création, celui des oiseaux du ciel et des poissons dans l’eau. Tandis qu’au deuxième jour, dont la lettre symbolique est l’homologue du HE, il y avait eu séparation des eaux, le Maïm s’étant séparé en deux formant
le monde du MI, celui d’en haut et du MA, celui d’en bas. Nous voyons donc que les oiseaux symbolisent toute l’évolution vers le monde d’en haut et que les poissons sont le germe d’en bas. Lorsque la lettre HE alla trouver le Saint-béni-Soit-Il pour lui demander de présider à la création du monde, le Saint-béni-Soit-Il la renvoie en lui disant qu’elle était avec le VAV et le YOD chargée de former le Tétragramme Divin, Yod-He-Vov-He, et que consacrée à une si importante fonction, elle n’avait pas à en réclamer une autre. Nous allons donc faire l’étude des trois lettres composant la Tétragramme sacré. Annik de Souzenelle en modifie le graphisme dont l’opportunité lui a été confirmée par une phrase du Zohar : le Tétragramme est une épée, le Yod en est le pommeau, le Vov la lame et les deux He, les deux tranchants. Que viennent faire là nos germes, nos oiseaux et nos poissons ? L’explication nous en est déjà donnée dans le premier livre d’Annik de Souzenelle : « L’Arbre de Vie et le Schéma corporel » : tout notre travail essentiel, lorsque nous sommes vraiment entrés dans notre incarnation — pas celle de l’enfance, mais à partir du moment où nous allons vraiment entrer dans notre corps symboliquement — nous avons à vivre les contradictions des deux HE, pôles de la dualité, dans un mariage, c’est-à-dire à un niveau supérieur, où les rapports entre les êtres ne sont plus des rapports de force, mais d’amour. Ces deux pôles de la contradiction vont être vécus d’une part par une expérience de la lumière et d’autre part par une redescente dans les ténèbres, dans toute la somme énergétique que nous sommes, mais que nous n’avons pas encore extraite de sa gangue afin de l’amener à nouveau à la lumière, avant de redescendre encore un peu plus loin dans encore plus de ténèbres et de remonter à encore plus de lumière. Et ainsi de suite jusqu’à ce que la totalité des énergies soient ramenée à la lumière et fasse de nous des êtres totalement réalisés, car nous sommes appelés a devenir divins. Le mythe de Noé symbolise merveilleusement ces montées et ces descentes, le vol des oiseaux nous renseignant sur le travail qui se fait à l’intérieur de l’Arche, la colombe signifiant la montée dans les hauteurs et le corbeau la descente dans les profondeurs. Ce même symbolisme est présent dans le cinquième jour de la Genèse, le germe poisson étant symbole des énergies des profondeurs. Il se retrouve également dans la dernière descente de Job dans les eaux souterraines, ou il est accompagné par Yod-He-Vov-He Lui-même, pour en extraire les énergies que nous sommes et les ramener à la lumière. Au contraire tous les symboles des oiseaux vont être ceux de la montée dans la lumière depuis le plus petit des oiseaux jusqu’au plus grand, l’aigle, dont il est question aussi bien dans les mythes grecs que dans l’Apocalypse.
Voici donc les deux souffles ascendant et descendant. C’est la vie humaine. Le souffle nous est donné dans les deux narines qui sont les prolongements des poumons. Le jour où Adam a été créé, Dieu souffle un souffle de vie dans ses narines, l’âme étant don du souffle divin. La lettre HE représente l’article défini. Ainsi si Adam est le nom d’Adam, HA-ADAM est « Le » Adam. Autrement dit, chaque personne et chaque nom en hébreu est défini par la qualité de son souffle. Les deux HE prolongent les deux poumons. D’autre part ce n’est pas un hasard que nous ayons cinq doigts à chaque main, lesquelles réunies vont faire le Yod (valeur 10), mariant ainsi toutes nos contradictions, les intégrant totalement. Le Yod qui est censé être situé à la base de la colonne vertébrale, commence alors à vibrer et à remonter le long de l’épine dorsale et lorsqu’il aura atteint son sommet, l’homme sera devenu Yod-He-Vov-He Lui-même. Il entrera dans la dimension du Dieu qu’il est en puissance. Symboliquement nos deux mains sont extrêmement importantes. Elles sont inséparables l’une de l’autre et font l’œuvre du Yod. Comme on parle d’un troisième œil par rapport aux yeux, on pourrait dire que le Yod est la troisième main. Yod veut dire « main ». Cette troisième main représente ce « faire » intérieur que nous sommes enjoints d’accomplir dans notre vie et qui est symbolisé par le « faire » extérieur, en particulier par le travail manuel qui joue un grand rôle dans la constitution de notre être. Un des mots les plus intéressants illustrés par le He, est AHAVAH qui s’écrit He-Beith-He et qui veut dire l’amour, dans lequel les deux He, les deux poumons, les deux mains, pétrissent les deux lettres Aleph et Beith qui sont les relations entre Créateur et créé. Et comme Aleph et Beith réunis forment le mot AV, le Père, toute la relation du Père et de sa Fille, la Création, représente de même que l’amour, un échange de souffle entre le Père et la Fille. Si nous prenons conscience de cela et si nous relevons la polarisation de nos désirs et de nos échanges de souffle avec le Divin, nous aurons des rapports bien plus justes avec les autres. Généralement nous n’aimons pas véritablement l’autre, parce que cela ne passe pas par le Divin et que la plupart du temps c’est nous que nous aimons dans l’autre. Je veux encore vous faire remarquer qu’en hébreu il n’y a pas de présent, il n’y a qu’un participe qui sert de présent, sauf pour le verbe « être ». Toute la Bible va être écrite pour signifier le présent au futur en rajoutant une petite lettre qui va rendre le futur passé et qu’on appelle « conversif ». Si bien que par exemple en lisant la Genèse, on se trouve devant un futur qui est aussi un passé, c’est-à-dire ni futur, ni passé, donc présent. La forme verbale va rendre compte d’un verbe qui est de tous les temps, qui est de l’instant, mais qui s’incarne aussi bien dans le passé que dans le présent et le futur. Le verbe être est pourtant employé une fois au présent dans l’Exode IX, un peu avant que Moïse va se mesurer avec le Pharaon. Dieu dit à Moïse : « Tu diras à Pharaon que s’il ne laisse pas sortir les Hébreux d’Egypte, la main de Yod-He-Vov-He est sur
Pharaon, sur son troupeau, sur son peuple, sur tout le pays, etc. » Cette phrase si grave contient deux fois Yod-He-Vov-He une fois par la main et une fois par lui-même. Adaptée à notre temps elle signifie : Si nous ne laissons pas sortir d’Egypte, c’est-à-dire du monde de la servitude, nos énergies consacrées à faire le Yod en nous, alors la main de Yod-HeVov-He est sur nous et toutes ces énergies se retourneront contre nous, créant des maladies, des cancers, des dépressions nerveuses, etc…, etc… Le mot AVAH, c’est le désir, il renferme aussi la notion du Père. Annik de Souzenelle nous cite encore plusieurs mots intéressants dérivés de la lettre HE, que nos lecteurs trouveront dans son livre : « La Lettre, chemin de vie. » Nous passons à présent à la lettre VAV qui a pour valeur 6 et qui signifie le crochet, le clou, ce qui relie un objet à un autre objet ou à une chose. Et c’est en effet le VAV qui est la conjonction ; donc encore ce qui lie. Son histoire est simple, c’est un crochet qui comme il en est de toutes les lettres, évolue et va très vite devenir non pas le véritable Ypsilon, mais une lettre qui a disparu, le digamma, lettre grecque. Elle s’est confondue avec Ypsilon pour donner notre Y à nous. De même que le HE et le YOD, le VAV fait partie de Tétragramme Yod-He-Vov-He. Elle est la conjonction « et ». Symbole du sixième jour de la Création au cours duquel apparaissent les animaux des champs, la terre et l’homme, deux opérations divines comme au troisième jour où il y eut séparation du sec et de l’humide et la création de la verdure et de l’arbre. Car à de différents niveaux l’homme et l’arbre dans la profondeur sont une même réalité. L’homme est un arbre, l’arbre est un homme en devenir. L’homme est aussi l’animal, puisqu’il est la répétition de toute la Création, de toutes ces énergies qu’il a à redevenir dans un expire. Dans l’inspire il est appelé à remonter tous ces niveaux énergétiques et à redevenir la lumière du premier jour. Le VAV, c’est l’homme, la colonne vertébrale cosmique de l’univers, il est microthéos, un petit univers, et macrothéos, reliant le cosmos tout entier au Divin. Il est la « RAQYA-SHAMAIM » qui unit le monde du MA au monde du MI et lorsque l’homme est total, il est à l’image du Christ. La posture de l’homme sur la terre est quelque chose d’immense, comme le dit le premier des psaumes : « Heureux l’homme qui est dans le Conseil des Justes, il est comme un arbre planté à la rupture des eaux ». « La rupture des eaux » est la référence au second jour de la Genèse, c’està-dire qu’il a les pieds dans le MA et la tête dans le MI. Annik alors nous cite les mots intéressants en rapport avec le VAV, comme BO formé par la rencontre d’Aleph et Beith à travers la conjonction « et », qui signifie le devenir, mais aussi pénétrer, c’est-à-dire que c’est toute la création qui entre dans la Terre Promise, dans la dernière terre.
David signifie le « bien aimé ». Ecrit en lettres hébraïques, le VAV est saisi entre deux portes : le Bien aimé est celui qui est, en marche, qui sort d’une structure pour aller dans une autre, qui passe des portes successives, les échelons de l’échelle. C’est celui-là qui est aimé. Le mot AOR que nous étudierons avec la lettre Reish est la lumière. Ayant pour valeur 200 il est comme un autre Beith. Si Beith est la maison, Reish est la maison au niveau cosmique. Nous sommes renvoyés à l’idée non seulement de réceptivité, mais aussi de résistance. Car nous touchons là aussi bien aux structures physiques, que psychologiques, et que spirituelles du monde, car il n’y a lumière que si il y a réceptivité, voire résistance à la lumière, résistance qui, en même temps, la révèle. Sur le plan psychologique je ne peux donner toute ma tendresse que si la personne qui en est l’objet ne la fuit pas. Sur le plan spirituel, c’est la grande aventure de l’humanité avec son Dieu. Nous pouvons dire que toute l’aventure du peuple hébreu va être une histoire de résistance avec son Dieu. Job par exemple, n’accepte ses épreuves que s’il les comprend et c’est un peu la même histoire avec Jean-Baptiste par rapport au Christ. Malgré sa résistance il conduira l’humanité à la dimension chrétienne. Il y a lumière que quand cette résistance se fait réceptivité. Nous allons encore parler de la lettre ZAIN, elle est comme une espèce de tremblement, un éclair, c’est l’épée en forme de flamme. Elle a pour valeur 7 et s’écrit avec un Yod et un Noun final. Le Noun fait une espèce de crochet, mais quand il est final il est comme un Vav prolongé. Après le 6, donc après le Vav et jusqu’au Yod, le 10, nous allons avoir le Zain, le Heith et le Teith qui vont comprendre en leur milieu le Yod, comme si l’homme, à partir du Vav, était gros du Yod. Et ces trois lettres vont symboliquement réaliser, avant de mettre au monde le Yod, trois étapes essentielles de l’humanité et de chacun de nous en particulier. La première image du Zain est celle d’une flèche qui traverse une peau d’animal. Très vite elle va se styliser en ne gardant plus que deux plans horizontaux qui nous amènera à notre Z en sens contraire pour commencer. Pour comprendre cette évolution de la lettre, rapportons-nous à son histoire auprès du SaintBéni-Soit-Il. Se référant au psaume : « Souviens-toi du Sabbath », elle prétend elle aussi à présider à la Création, premièrement parce que « Souviens-toi » en hébreu commence par la lettre Zain et, deuxièmement, parce que le Sabbath a lieu le septième jour. Mais le Saint-bénisoit-Il, la renvoie en disant: « Non, tu ne présideras pas à la Création puisque tu es comme le Noun final, tu as la forme d’un sabre effilé, tu présides donc à la mort, à la destruction. Et, en effet, le mot Zain veut dire une arme, plus précisément une flèche. Le jour du Sabbath, Dieu qui se retire se fait arc, le Père laisse partir l’enfant qui est la flèche, c’est-à-dire toute la Création. Tout en se retirant, Dieu est toujours là discrètement, laissant la Création jouer son rôle, chanter son chant, vivre sa vie. Et si l’on peut comparer la Création à un expire, la flèche va être tout le mouvement de l’inspire, du retour au Divin qui va nous obliger à passer à travers nos états de conscience successifs.
La lettre Zain va œuvrer pour nous obliger à mourir à un plan pour rentrer dans un autre. Elle est redoutable parce qu’elle va détruire quelque chose pour nous contraindre à reconstruire. Ce qui est intéressant, c’est que le chiffre 7 en hébreu s’appelle SCHEVA, ce qui est très proche de Shiva, le dieu des Hindous et cela nous incite à penser qu’il y a une origine commune à ces deux mots, car ils ont la même fonction, Shiva détruisant tout ce qui ne ressortit pas à l’unité, tout ce qui rend compte de la dualité. Or le Zain va œuvrer pour que les deux HE, ces deux pôles de la contradiction, fassent le Yod. Annik mentionne alors le mot ZAKOR qui signifie à la fois souviens-toi et mâle. C’est faire œuvre mâle de se souvenir. Lorsqu’on dit : « Dieu se souvient des hommes », Dieu se fait mâle et descend dans l’homme. Lorsque nous descendons en nous pour trouver le Soi qui est le germe divin, nous trouvons Dieu qui descend dans l’homme pour « se souvenir de lui ». Le mot EZER est aussi très important. On y retrouve le Reish qui vaut 70 et qui est donc dans la même note que le Zain qui est 7. C’est un mot que nous trouvons au moment de la création de la femme, de ce pôle féminin dans l’homme, qui est « l’aide ». Dieu dit : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul, faisons une « aide » semblable à lui. » Généralement les traducteurs mettent « semblable » au lieu d’ « aide ». C’est faux, c’est NAGOD, c’est-à-dire face à face. C’est tout le mystère du féminin par rapport à nous tous. Les deux mots ZAKOR et EZER se complètent. On pourrait aussi dire : Il n’est pas bon que l’homme soit séparé (composé des mêmes lettres) de lui-même, faisons-lui prendre conscience de ses profondeurs. Nous analysons encore les mots AR ou Ra signifiant l’ennemi, mais aussi l’ami, le mot ZOV ou ZOBOV qui s’écrivent Zain, Beith ou Zain, He et Beith. Là le Zain œuvre dans le Beith qui lui, œuvre dans la Création et qui alors veut dire « écouler ». C’est l’écoulement des énergies que l’homme va réaliser. Et quand le HE se trouve au milieu et que cela passe par le souffle, nous avons le mot ZAHAV qui est l’or. Donc l’écoulement de toutes nos énergies donne l’or. C’est aussi l’écoulement divin que les Hébreux appellent « le sperme divin » qui descend dans l’Arbre de Vie et qui va féconder tous les mondes, c’est le pays de HAVILAH, là où coule l’or. Le Zain est la toute première lettre qui nous sépare du Yod après que l’homme ait vécu le 6. Le passage du 6 au 7 est fantastique, parce que l’homme qui reste dans le 6, reste dans la répétition, dans la chaîne du Samsâra. Le 7, ce sont les terres nouvelles, les cieux nouveaux que nous trouvons aussi dans l’Apocalypse. C’est très important de passer ce 6, de vivre le Shabbath qui est la Fille qui touche à la dernière terre et qui donc s’accomplit. Nous verrons la prochaine fois le HEITH, la première barrière où nous allons être testés : sommes-nous oui ou non capables d’aller plus loin ? Les Lois sont implacables.
Compte rendu de la rencontre du 11.1.1979 De nouveaux venus incitèrent Annik de Souzenelle à reparler du VAV, la lettre qui tient le centre du Tétragramme Yod-He-Vov-He. Nous renvoyons nos lecteurs au précédent compte rendu. Le Zain, le Heith et le Teith sont comme les matrices du Yod, la dernière lettre. Elles vont être écrites de telle façon que le Yod se trouvera au milieu d’elles. Le Yod ne pourra naître que quand les énergies, après avoir joué dans le Zain et le Heith, seront présentes au niveau du Teith. Le Zain, lié au nombre 7, est symbole de la plénitude acquise et chaque fois qu’il y a une perfection, il y a nécessairement une rupture de cette perfection pour passer à un autre cycle. Le Shabbath, lié au Zain, le septième jour, c’est le retournement du Divin qui n’est pas autre chose qu’un retournement de la conscience pour passer à un autre plan de conscience. Dieu va être parfaitement insaisissable, Il va laisser jouer la Création afin de se faire connaître. Et, à partir du HEITH, cela va être toute cette aventure de la conquête du Divin par la Création. La lettre HEITH a pour valeur 8, elle est l’initiale du mot Heith. Elle est comme un petit rectangle ouvert à la base. A ne pas confondre avec le HE. HEITH, qui exprime une idée de barrière, va évoluer tout au long des deux millénaires qui précèdent notre ère chrétienne, jusqu’à faire le ETA grec qui va donner notre H, sans en avoir le son guttural. Pourquoi cette barrière ? Parce que suivant l’évolution que je vous ai proposée, nous venons de vivre un plan de réalité où tout a été vécu en plénitude. Le ZAIN a fait son œuvre de rupture pour nous faire passer à un plan supérieur et nous amener à un champ énergétique bien supérieur à celui vécu dans notre dernière expérience. Dans cette qualité de vie qui nous est maintenant dévolue, il est indispensable que nous soyons testés. Car si nous n’avons pas acquis les structures nécessaires pour y pénétrer, nous risquons d’être brûlés, anéantis. Cette barrière est semblable à tous les Gardiens du Seuil des différents mythes. Il nous faut donner le mot de passe qui ne signifie pas seulement une reconnaissance entre frères, comme il en est le cas dans les sociétés initiatiques, mais il représente la vibration qui correspond à un champ énergétique nouveau et si nous ne sommes pas capables de le prononcer, de le vivre, donc de l’être, nous ne pouvons pas entrer. Ce ne sera pas le fait d’une punition, mais une mesure de prudence. La barrière est là pour le vérifier. La lettre HEITH est faite du Yod qu’entourent le Heith et le Tav. Si nous supprimons le Yod, nous lisons Hath, c’est-à-dire le mot : « terreur », lié à l’idée du Grand Œuvre alchimique où l’esprit dépendant d’un nouveau champ de conscience est terrifié. Il est certain que quand nous entrons dans une nouvelle terre, il y a crainte et tremblement. Nous sommes devant l’inconnu et cet inconnu fait peur. En hébreu le mot TERA qui est « la crainte », donne naissance au Hieros grec, qui est le sacré.
Dieu, le sixième jour demande à l’homme de nommer les animaux des champs, c’est-à-dire d’avoir sur eux le pouvoir qui lui fait conquérir son premier champ de conscience. Puis Adam est plongé dans le sommeil, TARDEMA (même racine que Thora), qui est la descente dans la profondeur, c’est-à-dire qu’il doit faire tout ce cheminement à partir de l’image de Dieu que nous sommes, jusqu’à aller vers sa parfaite ressemblance (DEMA) et devenir Yod-He-Vov-He. Après que l’homme eut nommé les animaux, Dieu lui fait connaître son féminin, c’est-à-dire la profondeur de son être, son puits profond dans lequel sont toutes ses énergies. L’homme nu de la Bible, c’est l’homme tout à fait connaissant qui connaît le chemin. La notion de honte est fausse, c’est le verbe « attarder », il ne s’attarde pas, mais va tout de suite plus loin. Il sait ce qui lui reste à faire. Le serpent qui est « connaissant » se fait barrière. C’est lui qui va nous tester, car nous avons à devenir les énergies qu’il représente. Dans le mot HACHEDEN, les animaux des champs, les deux HE sont réunis. Ils ont chacun la valeur 5. Remplacés par le Yod (10) nous trouvons le nom divin SHADAI qui est le ToutPuissant. Le serpent, instrument du Divin a pour nom en hébreu, NAHASH avec au centre le Heith entre le Noun (germe) et le Shin qui est l’explosion de toutes les énergies, l’explosion nucléaire. Et lorsque nous vivons notre Shin, nous sommes des êtres totalement réalisés. Le serpent nous offre ce fameux fruit, c’est-à-dire une nourriture que nous ne sommes pas encore capables d’intégrer. N’étant pas capables de vivre les lois sans les enfreindre, les événements se retournent contre nous. C’est ce que nous vivons aujourd’hui encore au lieu d’avoir, après le Heith, pu atteindre le Yod dans l’harmonie et non dans la douleur. Quand le Heith est vu se présenter devant le Saint-Béni-soit-Il, il a été renvoyé, car il commence le mot HATA qui veut dire « pêché ». HATA est le mot que nous rencontrons pour la première fois dans l’histoire de Caïn et d’Abel. On parle beaucoup du « péché originel », terme extrêmement mauvais, car qu’avons-nous à faire avec quelqu’un qui a commis un péché dans la nuit des temps ? La Genèse est un présent et chacun de nous participe d’une erreur. Je suis convaincue que la rédemption est davantage liée à l’histoire de Caïn et d’Abel qu’à cette faute ontologique, parce qu’il y a tout le drame du sang qui y coule et que la terre boit. Et nous allons voir que le Christ a donné son sang pour purifier cette terre du sang d’Abel. Le mot « péché » n’apparaît qu’avec le mythe de Caïn et d’Abel. Il signifie d’ailleurs le fait de « mal viser » plus que de pécher. Lorsque Caïn jalouse son frère parce que son offrande n’a pas été reçue, Dieu lui dit : « Si tu relèves ton visage (symboliquement), si tu vis cet événement au plus haut niveau de ton être, avec l’intelligence des choses divines, « Tov » ! c’est bien ! Mais si tu regardes en-bas, le péché,
HATA, se couche à ta porte et il porte ses désirs sur toi. Domine-le ». Et nous voyons que quand l’homme est pris dans des événements passionnels, ce n’est pas lui qui désire faire le mal, mais c’est le mal qui désire l’homme. Celui qui désire est toujours en état d’infériorité par rapport a celui qui est désiré, il est esclave de l’objet désiré et celui-ci a une puissance sur lui. Donc si Caïn entre dans l’intelligence divine des événements, il ne donnera pas prise à ses désirs. Mais « visant mal », il a donné à l’événement une puissance sur lui, puissance que seul Dieu doit avoir. Il y a transfert de puissance et les énergies alors se retournent. L’homme est intervenu et a transgressé toutes les barrières. HATA ontologiquement est un garde-fou. AR, Aleph et Heith, signifie « frère » et c’est par lui que Aleph, le Divin, se fait barrière. Qu’il est bon pour des frères de vivre ensemble à condition que cette fraternité soit vécue vraiment par le dépassement de cette barrière qui se présente à nous pour trouver le Divin au travers de tous les écrans psychiques. Et si nous trouvons le Divin dans l’autre, nous le trouvons aussi en nous, parce qu’il y a résonnance. C’est pour cette raison que les communautés sont l’épreuve la plus difficile. On ne peut vivre ces barrières successives que sont tous les autres dans une communauté, que si on a conscience du Divin. Très proche du AR il y a le nombre 1 qui est un des noms divins, EHAD, dans lequel il y a surtout cette notion de frère. Dans le tétragramme le frère, c’est chaque HE qui a pour frère l’autre HE, et chaque HE doit épouser l’autre, doit passer la barrière et structurer toute cette colonne vertébrale, cette échelle de Jacob que nous avons à vivre pour construire le sommet de notre temple. La lettre TEITH ne correspond pas à un mot. L’hiéroglyphe primitif c’est l’écu, le bouclier, donc encore une barrière. Tout au long de la Bible nous retrouvons cette notion. Ainsi Dieu, avant que Moïse ne revienne en Egypte pour libérer les Hébreux, se met sur son chemin pour le faire mourir. Dieu se fait barrière, afin que Moise puisse se mesurer à Pharaon et permettre aux Hébreux de sortir d’Égypte, de leur matrice, d’assumer leur naissance lorsqu’ils passeront pas la Pâque, la Mer Rouge, etc. Dieu va le tester. C’est une mort initiatique. Lorsque se fait le dépassement des barrières, il y a libération. Si le 7, le Zain, est une mort, le 8, Heith, est une barrière et la résurrection au-delà de la barrière. Les baptistères primitifs étaient octogonaux. Le nombre 8 est bien le symbole de la résurrection. Il est juste qu’avant de rencontrer le Yod nous avions à nous mesurer au Teith, au bouclier, le Yod-He-Vov-He étant le profil de l’épée. La rencontre de l’épée et du bouclier se retrouve dans toutes les guerres saintes, la guerre sainte que nous devrions mener à l’intérieur de nous-mêmes et non à l’extérieur. C’est là que se rencontrent l’épée et le bouclier. L’homme, avec le nombre 9, va symboliser la dernière perfection. Le 7, la perfection acquise impliquait une rupture de cette plénitude pour passer à un autre plan. Arrivés au 9, l’homme et la
Création toute entière se revêtent d’une perfection totale. Et lorsque le bouclier a pu vérifier la possibilité de la personne de mettre au monde le Yod, donc de rencontrer l’épée, il se retourne et se fait coupe. Il reçoit alors l’épée. Ce 9, symbole de perfection se retrouve chez Pythagore, Platon, avec les neuf Muses, les neuf Prophétesses de l’Ile de Sein chez les Druides, les neuf Béatitudes qui contiennent toute la dimension de l’évolution de l’homme dans la perspective chrétienne. C’est tout le Grand Œuvre Alchimique qui s’accomplit. Le Teith va se présenter devant de Saint-Béni-soit-Il, se réclamant d’être l’initiale du mot TOV. Son graphisme est intéressant, nous le verrons souvent sous la forme du serpent qui se mord la queue. C’est l’homme qui enfante le Divin, c’est aussi la naissance de l’Enfant Divin. Tov signifie le bien dans l’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal que le serpent va proposer à Adam et à la femme. C’est aussi le mot qui va ponctuer chaque jour de la Création. Il sera répété sept fois et le dernier jour par Tov Meod, l’ensemble. Le Saint-Béni-soit-Il renvoie la lettre en disant : « Tu est Tov, mais tu n’est que la graine du véritable Tov. Tu ne salueras pas la création du monde, car tu es réservé pour le monde futur. Tu n’as rien de commun avec le monde que je veux créer maintenant. Le bien que tu représentes est enfermé et caché en toi, ainsi qu’il est écrit : « Grande est l’abondance de ta bonté que tu as cachée pour ceux qui te craignent ». C’est précisément à cause du bien que tu caches en toi, que les Portes du Temple seront enfoncées dans la terre, ainsi qu’il est écrit dans les Lamentations de Jérémie : « Ses portes sont enfoncées dans la terre ». Tov ne sera véritablement le Tov que lorsqu’il aura intégré tout ce qui est encore dans la ténèbre. Si dans la Bible RA, qui se rapproche de la notion de ténèbre, est considéré dans certains cas comme l’esprit des Elohim, on pourrait en déduire que Dieu est l’esprit du mal. Mais il ne s’agit pas de Dieu en tant qu’Il se fait mal, mais en tant qu’Il se fait barrière. Quand tout ce RA (le mal) sera intégré au Tov, le Tov sera véritablement le Tov. Ce n’est que quand nous serons devenus entièrement lumière, étant allés dans nos profondeurs chercher toute la somme des énergies qui nous constituent, que nous serons Tov. Celui-ci n’a rien à voir avec le petit Tov du départ, c’està-dire avec l’élément lumière élémentaire du départ, Les Portes du Temple enfoncées dans la terre sont tout le symbolisme du grain de blé, du Tov du départ qui deviendra toute lumière. Lorsque toute cette ténèbre est intégrée, naît le Yod, la dixième lettre qui est le retour à l’Unité. Les HE, 5 + 5, se sont épousés, la colonne vertébrale aura été construite, l’homme met vraiment au monde le Yod qu’il est, ce Yod-He-Vov-He à venir. Si nous sommes ici réunis, c’est parce qu’il y a en nous un appel au dépassement de l’absurde extérieur pour entrer dans une compréhension profonde de ce que nous sommes. C’est Yod-HeVov-He qui travaille en nous pour que les HE se marient et que nous devenions véritablement Yod-He-Vov-He.
Yod, cette petite virgule, c’est la main, la réunion des deux mains qui n’ont pas par hasard cinq doigts. Elles sont le prolongement du souffle et quand les deux mains se rejoignent, elles sont aussi la connaissance. Toute la main est symbole de connaissance, d’expérience. La toute dernière expérience, c’est celle qui a intégré la dualité et qui vit la réalisation du Divin total. C’est pourquoi Isaï, parlant de cette arrivée de l’humanité à la réalisation de son unité, dit : « Il n’y aura plus ni soleil, ni lune, car Yod-He-Vov-He sera ta lumière à toujours ». Soleil et Lune, symboles des terres de l’espace-temps que nous vivons jusqu’à ce que nous entrions dans le Divin qui est notre dernier espace-temps, l’éternité même. Réponse à une question : Ce qui est important, c’est de bien connaître au départ les neuf premiers nombres, puis le dix. Ce sont les nombres des principes. Le dix sera l’actualisation et le départ d’un autre plan. Les unités sont aux dizaines ce qu’est le premier chapitre de la Genèse par rapport à l’autre. Les structures du monde sont mises en place et dans ce qu’il est, convenu d’appeler la seconde Genèse, Yod-He-Vov-He qui n’apparaît qu’à ce moment, va commencer à travailler. Dans le premier chapitre ce sont uniquement les Elohim. Tout ce faire divin va commencer à jouer dans le second chapitre, Yod-He-Vov-He va travailler avec Elohim. Lorsqu’après la création des Lois, les principes sont posés, nous entrons dans l’Univers. Après chaque dizaine il y a un cycle complet supérieur, c’est pourquoi le Saint-Béni-soit-Il dit au 9 : « Tu seras le 900 et, à ce moment là, beaucoup plus que le 9, parce que sera accompli tout ce monde des principes ». A la fin de la Genèse il y a cette phrase que je cite de mémoire : « Les cieux et la terre sont achevés dans le jour où Dieu a créé le ciel et la terre pour les faire ». La Création est loin d’être faite, elle n’a pas encore joué avec Yod-He-Vov-He qui est l’homme lui-même, qui entre en travail avec le Créateur. Comme il en est dans une œuvre artistique, l’artiste commence à créer, il pose le principe de son œuvre, mais après il n’en est plus le maître, c’est l’œuvre qui a une personnalité. Elle s’empare du créateur et se fait avec lui. Annick de Souzenelle nous rappelle que les trois lettres qui vont séparer la Vav du Yod contiennent le Yod dans leur ventre. Le Zain, le Heith et le Teith oeuvrant à sa mise au monde. Le Zain qui a pour valeur 7 est le symbole de l’arme qui traverse notre tunique de peau, c’est-àdire nos différents plans de conscience et qui nous oblige à mourir à ceux-ci pour renaître aux plans supérieurs. Nous allons aller vers de nouveaux cieux et de nouvelles terres. Avec le Heith qui a pour nombre 8, nous avons à traverser une barrière qui nous obligera à vérifier si nous avons les structures nécessaires pour entrer dans une nouvelle terre, dans un nouveau champ d’expérience. Le Teith, lui, nombre 9, est encore une barrière, celle du bouclier se présentant devant l’épée. Le guerrier va à la rencontre de l’épée, le Yod se protégeant avec le bouclier. Derrière cette barrière nos structures sont à nouveau vérifiées, afin que nous puissions atteindre
l’énergie des énergies que nous allons rencontrer maintenant et qui est le Yod. Et alors le bouclier devient la coupe qui reçoit l’épée. Le Yod naît, il a la valeur 10 et rejoint l’unité. Chaque fois que nous rencontrons l’unité, soit par le 1 (Aleph), le Yod jusqu’au Aleph final qui vaut 1.000, nous aurons accès à des plans d’expériences différents, tout en retournant à l’unité, symbole du Divin. Le Yod se compose de deux lettres, le Yod et le Daleth. Prononcé Yad, il signifie la main. Quel mystère que la main ! Nous verrons que beaucoup de lettres signifiant des dizaines, expriment une partie du corps et nous feront quitter le monde des Principes pour entrer dans celui de l’expérience vécue. On parle de deux créations du monde qui paraissent contradictoires mais qui, en fait, se complètent : Dans la première Genèse nous sommes dans le monde des Principes, des grandes Lois que pose Dieu et qui structurent le monde et chacun de nous. La seconde Genèse qui est la même, mais vécue autrement, va s’exprimer par les lettres que nous étudierons maintenant et qui expriment les dizaines et nous allons voir comment l’humanité va vivre ces dizaines. Ce n’est pas par hasard que l’expérience vécue arrive avec le mot Yad — la main — car elle est « toucher » de la vie. Yad est la structure même du mot Yado qui veut dire : « je connais », non d’une connaissance intellectuelle, mais ce sont tous nos sens qui sont contenus au bout de nos doigts. Les mains et les yeux sont intimement liés comme si nous avions des cellules visuelles au bout de nos doigts. La parapsychologie est en train de le découvrir. Chacun de nos sens les contient tous, tout en en privilégiant tel ou tel aspect. L’hiéroglyphe primitif du Yod est une main au bout d’un bras. Très vite le bras va disparaître et nous nous trouvons devant notre Y. Lorsque le Yod est venu se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, Dieu le renvoie à sa place en lui disant qu’il lui suffisait de constituer le Nom Divin, le Tétragramme Yod-Hé-Vov-Hé. Il est intéressant de remarquer que dans la première Genèse c’était Elohim qui était à l’œuvre et que ce n’est que dans la deuxième Genèse que nous voyons apparaître Yod-Hé-Vov-Hé auprès d’Elohim. Ce fait nous dévoile un tout autre aspect de la Genèse, à savoir que Adam est fait non pas par le Verbe, mais par la main. Car Dieu va prendre la terre Adamah pour en pétrir Adam. Et une fois que le potier divin aura façonné l’homme, il soufflera dans ses narines un souffle de vie. Alors qui est Yod-Hé-Vov-Hé par rapport à Elohim ? Je pense qu’il s’agit ici, en commun avec les Elohim, ce que les Pères, de l’Eglise appellent « le Grand Conseil Divin » et Yod-Hé-Vov-Hé est ce Dieu qui est placé au cœur de la Création et qui est appelé à travailler avec Elohim pour que chaque élément de cette Création programme son archétype.
Le monde de la Création, la manifestation est une image, un reflet comme dans un miroir, du monde divin qui l’informe constamment. Le mot Dabar va nous aider à saisir la relation entre la manifestation et les archétypes. Il a pour signification le verbe, la parole, mais en hébreu actuel il veut aussi dire : la chose, la même chose ou autre chose. Parole – chose, cela a l’air d’une chute, mais cela n’en est pas une si nous réalisons que chaque chose, chaque élément de la Création est reliée à la parole qui l’a faite. Et quand nous nous coupons de la parole, de l’archétype, les choses perdent leur sens et sont coupées de tout ce qui les informe. C’est ce qui se passe dans le monde que nous vivons aujourd’hui. On voit dans la Bible une troisième traduction du mot Dabar, Dever, la peste. C’est le même mot prononcé différemment, donc les mêmes énergies. Qu’est-ce que cela veut dire? Que, avec les mêmes énergies nous allons faire sourdre la vie, remonter toutes les chaînes jusqu’à l’archétype, c’est-à-dire jusqu’à la mort qui est rendue par le mot « peste ». Avec les mêmes énergies nous pouvons faire soit le bien, ou le mal, soit la vie ou la mort. C’est nous qui introduisons le mal. Jérémie dit : « Voici, j’ai mis devant vous le chemin de la vie et le chemin de la mort ». C’est à l’homme de choisir, là se trouve sa redoutable liberté. Yod-Hé-Vov-Hé est le Germe Divin qui travaille au cœur de la Création, il est l’empreinte même du Divin. Nous sommes devant l’image du Verbe, Dabar, qui est la source de chaque son, de chaque objet, de chaque être de la Création et qui porte en lui son empreinte qui est Yod-Hé-VovHé. Même après la chute, même après qu’il se soit coupé du Divin, l’homme reste lié à ce Tétragramme. Et c’est pourquoi Eve dit à la naissance de Caïn, premier homme naissant après la chute : « J’ai acquis un Ish, j’ai acquis un homme et Yod-Hé-Vov-Hé ». La traduction de « et » généralement employée donne « avec l’aide », elle ne signifie rien. Il s’agit ici de l’homme « alpha et oméga », c’est-à-dire d’origine divine et qui doit atteindre le divin. Nous sommes en potentiel Yod-Hé-Vov-Hé, ce nom que les Hébreux ne font qu’épeler, qu’ils remplacent dans leurs prières par Adonaï. C’est un nom d’une telle force qu’il était prononcé une fois par an dans le Saint des Saints par le Grand Prêtre et selon une vibration que nous avons perdue et qui était tellement forte, que les hommes en mourraient quand ils n’étaient pas capables de la soutenir. Donc Yod-Hé-Vov-Hé arrive auprès d’Elohim dans le second chapitre de la Genèse, parce que Dieu, ayant posé sa Création, l’anime, souffle sur elle et donne à chacun son nom. Et ce nom qui est donné, c’est toute la vibration initiale du sous-germe à partir duquel chaque élément de la Création commence à vibrer. L’œuvre elle-même se joue, et c’est le Divin qui se joue dans l’Œuvre. Nous n’avons pas deux Dieux, Yod-Hé-Vov-Hé et Elohim, mais nous avons Dieu qui se donne à travers sa Création pour que celle-ci Le devienne. Tout commence donc à se mettre en mouvement et c’est Yod-Hé-Vov-Hé qui va, à travers la colonne vertébrale de la Création, s’exprimer dans deux Arbres : L’Arbre de Vie et l’Arbre de la Connaissance de la Dualité, car ce n’est qu’à travers la contradiction que nous allons pouvoir assumer des résurrections successives.
Notre humanité actuelle est encore dans un infantilisme dramatique en vivant cette dualité dans les conflits et les guerres, au lieu de les vivre dans les deux Hé qui se rencontrent pour faire la main, c’est-à-dire la connaissance. Si les deux Hé qui font chacun 5, se marient, ils donnent 10. Nous sommes là pour œuvrer avec la main divine dans la connaissance de l’Amour. On ne peut connaître qu’en aimant, on ne peut aimer qu’en connaissant. Voilà, je crois l’essentiel du mot Yod, le Yod qui vient lorsque nous aurons construit tous les étages de notre conscience. Toutes les structures des lettres hébraïques rendront compte de ce devenir intérieur. Nous allons le voir tout au long de ces lettres et notamment avec celle qui veut dire « l’aile ». Ce qui intéresse les Hébreux, ce n’est pas la vision immédiate, mais la vision des profondeurs, le devenir de l’homme qui est la vision de Dieu. Réponses à diverses questions : C’est à partir de Yesod, le chakra fondamental à la base de la colonne vertébrale, que Yod commence à se mettre en mouvement. Dans le songe de l’échelle, Jacob est à la base de la colonne vertébrale cosmique. Il débaptise le lieu qui s’appelle Lud, qui signifie « lumière »; « amande », parce qu’il commence à faire vibrer ce germe de lumière qui, dans les profondeurs, est Yod-Hé-Vov-Hé. Yesod est le fondement de la Création. — Je ne crois pas que l’on peut assimiler Elohim à la Trinité, ni Yod-Hé-Vov-Hé à l’Esprit-Saint. Toute la tradition judéo-chrétienne va parler des deux mains, nous retrouvons toujours dans les psaumes et chez les Prophètes, « la droite et la gauche » qui vont œuvrer dans la Création. Les Pères de l’Eglise disent que Dieu est la Source qui se fait connaître à travers le Fils et l’Esprit, appelés « les deux mains du Père ». L’Esprit-Saint et le Fils sont inséparables. Il est dit : « C’est par son Verbe que Dieu crée le monde et par son souffle qu’il en fait toutes les armées », c’est-àdire toutes les énergies. Dans la perspective juive, il y a les deux mains qui œuvrent toujours ensemble et qui sont inséparables. Tout cela est indissociable du travail manuel, il est la marque extérieure d’une prise de conscience de la nécessité du travail intérieur. — Les énergies divines vont s’exprimer à travers de multiples noms divins, mais le travail qui se fait dans l’homme, se fait selon l’archétype Yod-Hé-Vov-Hé. — Réaliser le Divin, c’est ce que les Hébreux appellent « Le Grand Nom Divin » qui est inconnu et auquel nous participons tous avec les énergies qui nous sont propres, avec le nom qui nous est propre à chacun d’entre nous, et qui fait le mystère de chaque personne. Lorsque nous aurons totalement réalisé notre nom, que nous le connaîtrons, nous connaîtrons ce « Grand Nom Divin » parce que nous le serons devenus.
Je vous propose d’étudier le Kaph qui a pour valeur 20 et qui s’exprime avec un Phé final. C’est une lettre carrée. En supprimant la partie qui va vers la gauche et en prolongeant la partie verticale, on obtient le Phé final. Le Kaph ne doit pas être confondu avec le Qof qui a pour valeur 100. Kaph veut dire la paume de la main, mais aussi grosso modo, un petit contenant que nous retrouverons dans différentes parties du corps, par exemple dans la hanche blessée de Jacob, qui n’est autre que la cupule du fémur, Kaph Yorek. C’est là où se trouve un centre d’énergie très important qui, s’il n’est pas employé pour construire l’homme, est employé à le détruire et c’est ce qui fait la rupture à ce niveau du col du fémur chez beaucoup de vieillards. Kaph, c’est aussi la plante des pieds. Le graphisme de la lettre était autrefois une main qui fut stylisée. Son retournement nous donne la lettre K. Quand la lettre est venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-il, elle fit valoir qu’elle commençait le mot qui signifiait la « gloire », Kabod. Etant l’initiale de la Gloire de Dieu, elle se crut désignée pour commencer la création du monde. Homologue de Beith qui a reçu cet honneur, elle se l’est vu refuser. Kabod est un mot d’une beauté immense : gloire divine, richesse, densité. Quand la Gloire Divine descend dans la Tente d’Assignation, dans le Tabernacle, il y a une telle densité que pas un homme ne peut y entrer. Si nous voulons faire un peu de numérologie, nous voyons que 20 +2 + 4 = 26, le nombre sacré du Tétragramme. Kabod, c’est le Yod-Hé-Vov-Hé en potentiel dans l’homme qui est alors totalement réalisé. Le même mot prononcé Kaved veut dire le foie. Notre foie est aussi un réceptacle de richesses physiques, psychiques et spirituelles. C’est pour cela qu’il est important de libérer le foie des nourritures physiques et psychiques, si nous voulons y faire entrer des nourritures spirituelles. Mais cette libération doit se faire uniquement dans un but de purification spirituelle et non pour des fins de pouvoirs à acquérir. Car à ce moment-là, y pénètrent des forces négatives, causes de maladies et de drames. Donc, quand le Kaph est allé se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, il quitte le Trône (Kisse Hakabod, le trône de la Gloire Divine), et il est dit dans le Zohar : « deux cent mille mondes ainsi que le Trône lui-même furent ébranlés, la secousse était si violente qu’elle menaçait tous les mondes d’écroulement ». Le Saint-Béni-Soit-Il dit alors : « Kaph, Kaph, pourquoi persistes-tu à rester ici, retournes à ta place, je ne me servirai pas de toi pour commencer la Création, car tu es l’initiale du mot exprimant l’extermination ». Nous nous trouvons là devant le mot Kalah, d’où vient peut-être celui de calamité. Pourquoi s’agit-il d’extermination. Quand la lettre Kaph et la lettre Lamed sont ensemble, elles forment un mot qui veut dire la totalité, donc un achèvement. Et comme pour toute perfection acquise la rupture doit avoir lieu pour pouvoir parvenir à un plus
que parfait. Donc il y aura destruction, extermination, des morts nécessaires pour passer à un autre plan. Derrière le discours du Divin, il y a la notion de ce Kaph qui va présider à une totalité, à un achèvement. La première lettre qui était venue se présenter (elles se présentent en sens inverse), était le Mem qui aussi reçut l’ordre de retourner à sa place, car elle formait le mot Melech, le Roi. Mem, Lamed, Kaph final sont les trois lettres qui ne doivent jamais quitter leur place, parce qu’elles forment précisément le mot, Roi, cette royauté que nous avons à devenir. Melech est aussi la racine de Malkout, dans la dernière des Séphiroth, qui signifie le Royaume. Il y a un mot très intéressant qui est formé avec le mot Kabod, c’est Coha, force. Ce n’est que quand nous avons les deux mains réunies que nous avons la force, aussi bien sur un plan vulgaire que par les Hé du Yod-Hé-Vov-Hé, lesquels, totalement réunis, forment le Yod en-haut et c’est finalement ce Yod qui est la force. Koav ou Kaov, plus exactement Kaph-Aleph-Beith, veut dire ruiner. Pourquoi cette notion de ruiner ? Quand nous voulons ramener le mystère à un concept qui nous est propre, nous tuons le concept. L’expérience mystique ne peut être exprimée, elle reste dans le domaine du silence. Un autre mot, Cocav, c’est l’étoile ou cocavim, les étoiles. Ce mot apparaît au quatrième jour de la Genèse et dans l’étude de la quatrième lettre, Daleth, où nous voyons arriver les structures, les luminaires qui éclairent pendant la nuit et pendant le jour. Mais cela est encore bien autre chose et notamment nos structures intérieures, car tout notre corps est un système solaire. Dans l’Apocalypse les étoiles sont comparées aux Anges du monde angélique. Ce sont des énergies divines, ce sont elles qui montent et descendent le long de l’échelle de Jacob. Ce sont les énergies qui président à nos structures et à notre évolution intérieure. Le monde des étoiles est un monde très étrange. Le Kaph est un réservoir d’énergie, le Beith, c’est la maison. Ils sont appelés à s’ouvrir les uns après les autres, en temps voulu, pour réaliser le Divin que nous sommes. Compte rendu de la rencontre du 8.3.1979 Après avoir étudié le Yod qui a pour valeur 10 et le Kaph qui a pour valeur 20, nous abordons aujourd’hui le Lamed qui a pour valeur 30 et qui est l’homologue du Guimel dont le nombre est 3. Le Guimel est ce chameau tenant en réserve l’eau à l’intérieur de lui, symbole de l’homme en tant qu’il porte en lui ses énergies lui permettant de traverser son désert sans avoir recours aux énergies extérieures. Nous sommes tous une réserve fantastique d’énergies qui sont à découvrir, à exploiter, pour pouvoir nous réaliser totalement.
Le Lamed va rendre compte de la même réalité que le Guimel. Si le Kaph signifie la paume de la main, on peut dire que le Lamed est ce que l’homme va tenir dans sa main, symbole de puissance. L’homme a en main l’instrument pour extérioriser cette énergie et vivre la puissance qu’il est. Lamed, c’est aussi l’aiguillon dont se sert le « toucher de bœufs » quand il les mène aux champs ou quand il leur fait pousser la charrue. La forme de la lettre nous le rappelle. Primitivement elle était un aiguillon qui, pendant le premier millénaire s’est retourné d’abord dans un sens, puis entièrement dans l’autre. Notre L est né de cette lettre-là. Lamed, comme Aleph, veut aussi dire enseigner, instruire et c’est la même racine qui rend compte de celui qui enseigne. Aleph signifie aussi la bête cornue. Nous retrouvons ce même symbole avec l’image du « toucheur de bœufs » qui, avec l’aide de l’aiguillon, dirige la bête dans une direction ou dans l’autre. Et c’est ainsi que l’homme, conduit par l’aiguillon divin qui est en lui, dans la profondeur de son être, va être amené à accomplir son destin symbolique de bête cornue qui reçoit l’information par ses cornes, le menant jusqu’à l’auréole finale, là où la corne se transforme en couronne. Ce cheminement de l’homme, aidé par l’aiguillon, à travers les épreuves de sa vie, depuis le début de sa gestation jusqu’à la toute dernière, celle de la naissance de l’Enfant Divin qu’il est lui-même, est signifié par le Lamed qui contient aussi en lui la notion de mettre au monde. Pris dans ce sens l’aiguillon rejoint l’image du bâton, du bâton de celui qui a de l’autorité, qui connaît, qui guide. C’est le sceptre de l’empereur, la crosse de l’évêque, le bâton de maréchal, etc… Ce sont là les aspects extérieurs de l’aiguillon, mais nous les portons aussi intérieurement. Et là s’impose la notion du guide intérieur, de celui que nous voyons parfois apparaître dans nos rêves, que nous sentons intuitivement, qui nous donne des certitudes profondes desquelles nous avons à être à l’écoute. Lorsque le Lamed rencontre l’Aleph ils forment le mot EL. C’est le plus courant et le plus important des noms divins, celui qui débute Élohim, que nous trouvons en suffixe dans les noms : Gabriel, la force divine, Raphaël, le médecin divin, Daniel, la justice divine, etc…, dans tous les prénoms d’hommes qui rendent compte de l’énergie divine. Dans un sens contraire ces deux lettres forment le mot LO qui est la négation, ne pas. Quel est leur rapport ? C’est que nous ne pouvons approcher le Divin que par le chemin de la négation, le Divin « n’est pas », car il est beaucoup plus, au-delà de toute affirmation et de toute négation, au-delà de l’Etre et du NonEtre, au-delà de toutes les qualifications opposées, au-delà aussi du singulier et du pluriel, puisque Elohim est le pluriel d’El.
C’est encore une négation lorsque le Beith rencontre le Lamed. Ils forment le mot LEB, le cœur, non dans son sens physique, mais en tant que milieu essentiel de l’être qui rejoint le Divin et qui va évoluer dans la même dialectique. Nous ne pouvons approcher l’homme que par la contradiction. Dans la rencontre du Lamed avec le Daleth, celui-ci aura pour mission de faire passer l’aiguillon par des portes, c’est la naissance, c’est le verbe naître, Yalod. La seule naissance qui intéresse les Hébreux est celle du Yod. La naissance de l’enfant est certes une bénédiction, parce qu’elle prolonge l’homme dans le temps jusqu’à ce qu’il soit capable de mettre au monde le Yod. Et c’est pour cela que, vivant sur un plan très concret, chez les Hébreux les femmes doivent se marier, sinon, comme il en est pour les femmes stériles, elles sont refusées par Israël. Espérant la venue du Messie, on attend toujours d’une femme Qu’elle mette au monde l’Enfant Divin. C’est ainsi que le Lamed, l’aiguillon, est formé par la même racine LED, à l’intérieur de laquelle il y a le Mem, valeur 40, la matrice, qui a pour homologue le 4, le Daleth, ce lieu clos et choisi. Dans ce contexte on trouve aussi la racine DAL, un des mots qui signifie pauvreté. En effet, pour passer la porte, l’aiguillon va obliger l’homme à se faire de plus en plus humble, réduit à son essentiel. Toutes les portes à passer seront des purifications non dans l’ordre moral, mais dans l’ordre ontologique et la dernière étape à passer se trouve symbolisée par le chameau passant par le chas d’une aiguille. Lorsque nous avons étudié le Daleth nous avons vu que dans le mot Daleth, le Lamed situé au milieu et qui assure par le mouvement le passage de la vie, avait pour valeur 30, qu’il était entouré de deux 4 représentant les structures, les chambranles de la porte et que, lorsque le Daleth et la Tav se réunissaient trop, le Lamed se trouvait écrasé et la vie ne pouvait plus passer. Lorsqu’on réunit le Daleth et la Tav et que l’on supprime le Lamed au milieu, on a le mot DATH, la Loi. En effet, lorsque la loi est trop prégnante, elle écrase l’être, le Lamed à l’intérieur de l’être. C’est ce que nous voyons tous les jours. L’homme n’est plus capable de faire naître en lui l’essentiel, il est écrasé, étouffé. Et ceci est à l’origine de toutes les maladies, aussi bien physiques que psychiques. Ce sont toutes les contraintes parentales, professionnelles et autres, qui tuent l’homme intérieurement. LUZ (Lamed-Vav-Zain) est également un mot intéressant. Il signifie l’amande, l’amandier, il est symbole de lumière, de lumière essentielle en tant que symbole d’éternité, d’être éternel, ainsi que le nomme la tradition judéo-chrétienne, et non d’être immortel. L’être sans commencement, ni fin. Nous avons évidemment un commencement historique au moment de notre naissance, mais nous venons de loin et allons loin. Notre passage dans cette expérience entre notre naissance et notre mort, n’est qu’un très court passage. A. de Souzennelle nous rappelle l’importance de Luz dans l’histoire de Jacob, ainsi que les différents symboles de l’amande, de la mandorle qui entoure les corps en gloire des grands Saints
et de l’amande symbolique de la montée le long de la colonne vertébrale où, au niveau de la gorge, nous trouvons les amygdales, autres amandes. Luz correspond aussi à un petit os que la tradition situe à la base de la colonne vertébrale et qui est indestructible. Le Lamed avait reçu du Saint-Béni-Soit-Il l’ordre de ne pas bouger et de ne pas se présenter devant lui, parce que, comme le Kaph et le Mem il représente une des trois lettres formant le nom Melech, c’est-à-dire le Roi. Or le Kaph qui avait transgressé cet ordre fut renvoyé, étant avec le Lameth et le Hé, significatif du mot Kalah, la destruction. Mais KAL, formé des deux seuls Lamed et Kaph veut dire la totalité. Il est certain que lorsque tout est achevé, lorsque la totalité est réunie, il y aura destruction pour passer à un autre niveau. C’est dans ce sens que Kaloh, le même verbe, est achever, terminer. Cette notion de totalité, d’achèvement, de perfection dans laquelle il va y avoir rupture pour passer à un autre plan, se retrouve continuellement dans la structure de la langue hébraïque. Le verbe OCHEL veut dire « manger ». C’est un mot d’une grande beauté et profondeur. C’est l’ordre que l’homme reçoit tout de suite après que la Création ait été mise en place : « Tu te nourriras de plantes portant graines et d’arbres portant fruits… ». Cela représente l’intégration de toutes les énergies divines qui se sont manifestées pendant les sept jours de la création. Le Zohar parle des Anges qui président à toutes ces énergies, que ce soit l’herbe, les fruits, les céréales, etc… Et, chez les Chrétiens, à la limite, cela va donner avec les énergies divines, les mystères de la transformation du pain qui sera le corps même du Christ. Dans l’absorption de l’Eucharistie le Chrétien se retrouve en Eden, dans les conditions d’avant la chute, parce que l’homme en Eden se nourrissait du Divin. Ochel, c’est vraiment le Divin, c’est nourrir, prendre dans un contenant le Divin. Quand le Guimel rencontre le Lamed, nous nous trouvons devant le mot GOL qui exprime la libération et si on ajoute Aleph, ce sera GAOL, le libérateur. Gal, deux fois répété, c’est une roue, GALGAL. Et GALGALIN, ce sont les grandes roues des Chérubins dans le Livre d’Ezéchiel. Golgotha signifie le mont du crâne, c’est la grande roue de la vie et de la résurrection, le Christ va mourir pour ressusciter. GUIL est aussi un très beau mot, c’est la joie et c’est aussi le mot qui rend compte de l’âge. Plus on avance en âge, plus on devrait entrer dans la joie. Car, plus on est « connaissant » (pas dans le sens intellectuel du mot, mais connaissant de l’actualisation de la vie qui se transforme) plus la personne âgée devrait être celle qui est la plus joyeuse.
Nous avons aussi le mot LUL, c’est l’escalier en spirale et LULYANI c’est la spirale elle-même. La spirale est le mouvement même de la vie. On la retrouve aussi bien dans les astres que dans les coquillages, dans la cellule, dans les rites initiatiques, enfin dans tout. Par contre LEILAH qui est devenu un prénom féminin, c’est la lutte. Et cela nous fait penser à la spirale qui nous mène dans les profondeurs, dans notre nuit intérieure, dans la Nuit Obscure de Saint Jean de la Croix. Et cette Nuit Obscure si douloureuse, c’est la descente en spirale vers le Yod-Hé-Vov-Hé que nous sommes dans la profondeur. Leilah est un mot très dur, parce qu’il représente la lutte. Mais le Lamed préside aussi à la montée, car on ne la sépare pas de la descente. Et c’est le mot AL qui la signifie. Après nous avoir parlé de la lettre Lamed « qui est cette information qui nous montre le chemin », nous abordons l’étude de la lettre MEM avec laquelle nous entrons dans la nécessité de franchir un autre plan de conscience, ce qui implique l’obligation de passer par une matrice. La lettre MEM a pour valeur 40, elle est l’initiale du mot MAIM qui signifie « les eaux » et lorsqu’elle est en position finale, elle se dessine comme un carré. L’hiéroglyphe primitif était tout simplement les vagues de la mer qui vont, par la suite, prendre des angles un peu plus aigus qui seront à l’origine du Mu grec, notre lettre M. Et, après être passée par différentes formes, environ deux siècles avant Jésus-Christ, elle finira par devenir carrée. Qu’est-ce que Maim, les eaux ? Dans la Genèse il est dit qu’avant le premier jour Dieu planait sur les eaux. Planer est une mauvaise traduction qui ne fait que réduire à une image un mot qui a une profondeur inimaginable. En fait, il y a dans ce mot une activité de mère et de père. C’est un peu le mot qui fait penser à une poule qui couve ses œufs, qui recouvre tout un monde, un chaos primordial qui est l’œuf au départ et qui, couver, va former vraiment le poussin. Ce chaos primordial est en effet gros et lourd de toute la Création et l’Esprit de Dieu est là qui le réchauffe, qui lui apporte vie. En même temps, il y a nettement dans ce mot, le sens de pénétration qui aussi constitue l’œuvre paternelle, l’œuvre mâle. C’est pourquoi l’Esprit ne peut être réduit ni à un rôle féminin, ni à un rôle masculin, il est en deçà. Ces eaux sont essentiellement une matrice. Lorsqu’une mère porte un enfant dans son ventre, elle reconstitue ses eaux primordiales, car le liquide amniotique dans lequel baigne l’enfant, a la même teneur que l’eau de mer. Et celui qui doit être le maître de ces eaux matricielles c’est Yod, les eaux sont grosses de Yod.
Dans le deuxième jour (jour symbolique) de la Création, Dieu sépare les eaux d’en haut qui sont appelées le MI, le monde archétypique, principiel, incréé, des eaux d’en bas qui sont appelées le MA, le monde créé, le monde de la manifestation, celui auquel nous appartenons. Et tout aussitôt que Dieu eut séparé ces eaux, Il les relie comme en témoigne le mot « SHAMAIN », l’étendue, c’est-à-dire qu’elles sont séparées et pas séparées, ce qui est encore une de ces contradictions fondamentales. Le mot Shamaïn est fait de ce même Maïm avec en plus la lettre SHIN que nous étudierons plus tard et qui contient, qui symbolise, la réserve énergétique qui se trouve dans les profondeurs de la Création et dans les profondeurs de chacun de nous, réunissant le monde des archétypes et le monde de la manifestation en nous. La lettre SHIN est la charnière du monde d’en haut et du monde d’en bas. Nous avons donc en nous aussi bien le MI que le MA, le Maïm tout entier. Nous sommes constitués d’un germe du monde divin et de cette réalité manifestée, l’un étant gros de l’autre. Voyez le mot Elohim, il contient le Mi et le mot Adam qui contient le Ma. Or IM c’est le MI retourné, c’est Elohim, l’Homme d’en haut, et le MA retourné, AM, c’est ce que les Hébreux appellent l’Homme d’en bas, Adam. C’est cet Adam qui est en nous tous, c’est l’humanité toute entière, cet Adam gros du Divin, du Yod, qu’il doit mettre au monde. Le tracé du Yin et du Yang du Tao en est une illustration parfaite. Et c’est dans ce sens que chacun des éléments de la manifestation n’a d’être, de couleur, de sens, de forme, d’énergie, qu’en tant qu’il est relié par ce cordon ombilical qu’il porte en lui à partir du germe qu’il est, à son archétype, lequel va lui permettre de le rejoindre. Tout le sens de notre histoire, à partir de notre naissance jusqu’à notre mort, c’est le retour du MA que nous sommes, au MI que nous sommes aussi dans la profondeur de notre être. Pour réaliser cela il va falloir passer par des portes successives, par le Daleth qui est à la fois la porte et la lettre qui correspond au nombre 4, en harmonie avec le 40. Il n’y a de porte que s’il y a matrice, on ne pourra passer de porte que si on a acquis les énergies nécessaires pour la franchir, sans quoi le courant énergétique que nous allons rencontrer de l’autre côté de la porte, si nous ne le sommes pas devenus, si nous n’avons pas les structures nécessaires pour l’appréhender, nous tuera. C’est le rôle qu’assument tous ces Gardiens du Seuil. Dans le mot Adam le Daleth est au milieu entre Aleph et Mem final. Aleph donne l’énergie à la matrice pour que l’homme soit en mesure de passer la porte, et si on enlève le Daleth d’Adam, il reste le mot EM qui veut dire « la mère ». Non pas que l’Adam que nous sommes soit essentiellement féminin, nous sommes tous masculin et féminin, mais sa fonction principale, celle qui est inscrite dans son être et qui constitue et son être et son devenir, c’est sa fonction d’engendrement de lui-même en lui-même, pour passer par les portes successives et pour
atteindre à cette croissance à laquelle il est appelé au départ quand Dieu lui dit : « Croissez et multipliez ». Ce sont ces portes par lesquelles il doit passer. Toute notre vie va consister à entrer dans des matrices, en commençant par la première porte que passera l’enfant dans le ventre de sa mère. Puis ce sera celle du foyer de ses parents duquel l’enfant va sortir pour constituer sa propre matrice familière à l’intérieur de laquelle il aura à faire tous ses engendrements intérieurs. L’homme doit prendre conscience de la nécessité de ces enfantements intérieurs et ce ne sera que lorsqu’il acceptera les paliers successifs par lesquels il a à passer, qu’il deviendra vraiment homme. Entrer dans ces matrices successives, c’est entrer dans des matrices d’épreuves, douloureuses ou non, selon que nous ayons pénétré dans des plans de conscience qui nous feront comprendre ce qui se passe. Et même si l’expérience devait être difficile et douloureuse, petit à petit nous accéderons à de nouvelles terres symboliquement, nous entrerons dans une intelligence plus vécue, plus profonde des événements. Nous ne donnerons plus le même poids à nos épreuves, parce que quelque part, en nous, quelqu’un sait ce qui se passe. Ces matrices vont donc être liées à la qualité de notre espace-temps intérieur. Lorsque la lettre MEM est venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, Celui-ci l’avait renvoyée parce qu’elle préside au mot Melek, le Roi, et qu’il ne fallait surtout pas qu’elle quitte sa place, car elle assumait là une des plus hautes fonctions. En effet, qu’est-ce que le Roi ? C’est atteindre cette royauté que nous sommes, car nous sommes tous des rois dans la profondeur de notre être, la seule royauté juste étant la royauté intérieure. Nous avons actuellement à de rares exceptions près, abattu les rois extérieurs, sans pour autant avoir été capables de chercher le roi intérieur. Nous n’avons plus de structures extérieures et pas encore de structures intérieures. Il est plus que temps que nous mettions au monde ce roi intérieur pour atteindre notre royauté. A ce moment alors nous toucherons la vraie Réalité (Réel = Roi), nous l’expérimenterons et nous la vivrons totalement. En ce moment nous vivons une petite réalité qui n’a rien à voir avec la vraie. Si nous mettons à l’intérieur du mot Maïm la lettre Reich, nous obtenons le nom de Myriam, Marie pour nous, nom d’une très grande beauté parce que formé par le mot Maïm. Myriam est celle qui fait en son nom la jonction du MI et des épousailles du Roi. C’est dans ce sens là que la Vierge est essentiellement mère, ce qui nous aide à comprendre l’apparente opposition de la virginité et de la maternité, notion qui n’a rien d’intellectuel et qu’on ne peut approcher qu’à travers cette réalité là. C’est la Vierge d’Israël, celle qui attend l’époux, le Roi, et qui va pouvoir mettre au monde le Yod. Les épousailles archétypales sont des épousailles du père et de la fille. Epouser le père, c’est épouser la source. Ce n’est que lorsque l’humanité, chacun de nous, hommes ou femmes, aura mis au monde le Yod, qu’elle pourra épouser le père. A ce niveau archétypal l’enfantement précède le mariage.
Le nom Adam contient tout une alchimie, puisque ED que nous avons vu avec le Aleph et le Daleth au début de la Genèse, représente la vapeur, l’eau. C’est l’énergie. Et avec le mot DEM, nous avons le sang qui, lui, avec des maternités successives se transforme en esprit, en porteur d’esprit, l’homme doit devenir cet esprit, ce porteur de lumière. C’est l’A profilé dans le nom d’Adam. Prenons à présent le mot DAMAH, la ressemblance. L’homme est créé à la ressemblance et à l’image de Dieu. Le MEM est au milieu de ce mot, il en est le cœur. Or par ces engendrements successifs l’enfant à sa naissance ressemble à son père et à sa mère par la loi même du sang. Mais ce qui nous intéresse, ce n’est pas cette ressemblance, mais celle avec son père et sa mère archétypales. L’homme créé à l’image et à la ressemblance a toutes les énergies nécessaires pour y atteindre, c’est-à-dire pour entrer dans les épousailles intérieures. Et c’est cette loi du sang qui préside au départ, qui est porteur de l’esprit. Ce sang va permettre à l’homme de passer de la famille à la famille de l’esprit, chacune de ces familles ayant un temps différent. Et quand la famille par la chair n’est plus très synchronique, l’être cherche sa famille par l’esprit. Et il va passer par des matrices successives jusqu’à atteindre la ressemblance parfaite. Au moment où Elie monte sur la montagne — Elie est un des hommes les plus proches de son devenir Yod-Hé-Vov-Hé — il cherche à écouter la voix divine. C’est très important, car celui qui entend, qui écoute, parle. Celui qui entend le Divin devient parole divine, devient Verbe. Et quand Elie monte sur le Mont Horeb il y a d’abord un tremblement de terre. La voix de Dieu n’était pas dans le tremblement de terre. Il y eut alors un grand vent. La voix de Dieu n’était pas dans le grand vent. Puis il y eut des éclairs, l’orage. La voix de Dieu n’était pas dans l’orage. Et enfin, il y eut un « silence parlant » et c’est dans ce silence que Elie entendit la voix de Dieu. Et là il atteignit la ressemblance. Cette immense évolution du prophète Elie se retrouve d’ailleurs très mystérieusement dans la personne de St Jean le Baptiste. Le Christ dit de lui : « Il es cet Elie qui devait venir ». Il est le précurseur, comme l’est Elihu dans le Livre de Job, comme encore dans d’autres passages de la Bible qui sont d’une beauté extraordinaire. Et quand on ne décèle pas cela avec les lettres hébraïques et les nombres, on passe à côté. Ce « silence parlant » est encore la contradiction, car nous sommes là dans une autre dimension, celle du dépassement de la contradiction. Revenons au mot Guimel qui s’écrit Guimel-Mem-Lamed. Le Mem est au milieu. Le chameau (Guimel) va passer par des portes successives dont la dernière est le trou de l’aiguille de l’Evangile, quand le Christ dit : « Il est plus difficile à un riche d’entrer dans le Royaume des Cieux qu’à un chameau de passer par le trou d’une aiguille ». Ce « trou de l’aiguille », est la lettre Tav, la dernière porte avant d’entrer dans le Royaume des Cieux. Le chameau, celui qui traverse le désert, va nous faire passer de matrice en matrice et Lamed signifiant libérateur, le chameau sera celui qui nous libère en nous faisant passer ces portes successives. En même temps Guimel, avec ses deux lettres Mem et Lamed, forme le mot MOUL
qui signifie circoncision. Il n’y a pas de plénitude sans circoncision, car entrer dans la matrice, c’est se circoncire, c’est accepter ses limites. Nous reverrons cela avec le nom de Joseph, Youseph. Le verbe Yaphet veut dire augmenter, alors que Soph signifie limite. On ne peut augmenter qu’en entrant dans ses limites. Le Divin se fait limite, Il entre dans la prison du temps et de l’espace pour nous libérer et plus tard Joseph d’Arimathie veillera sur les limites du tombeau. Ne pas vouloir se limiter, c’est ne pas accepter l’engagement qui, par l’ascèse qu’il préconise, produit une maturation un enrichissement, une nourriture. Il y a naissance. Avec le mot DAG nous sommes devant les deux lettres Mem et Lamed, 40 et 30, qui sont les homologues de Daleth, 4, et de Guimel, 3. Dag veut dire le poisson, le germe qui est la toute possibilité. En retourné, c’est le mot Gad, le toit de la maison, le fini, le contrepoint du germe. Le germe peut être comparé à la pierre de fondation qui contient la maison toute entière et qui veut aussi dire « bonheur ». C’est probablement la racine du mot latin « gobis » je me réjouis. Il n’y a de joie que s’il y a aussi finition de la maison et il n’y a finition de la maison que s’il y a, a priori la circoncision. De même que le 3, la vie, et le 4, les structures, ne doivent jamais se séparer, le 30 et le 40 ont toujours besoin l’un de l’autre. D’ailleurs ils ne se séparent pas puisqu’ils forment le mot Malek. Malo, avec le Aleph final, veut dire « remplir ». Les deux premières lettres rendent compte de la circoncision, la dernière, le Aleph final, du couronnement, du mariage. Si on veut remplir, il faut passer par la circoncision. C’est le mot qui est employé dans la Genèse lorsque Dieu dit à l’homme non pas « Croissez et multipliez », la traduction est mauvaise, mais « croissez, multipliez-vous et remplissez la terre ». C’est le mot Malo, c’est croître, se multiplier dans tous les dons divins dont nous sommes faits, ce craquement de la grenade rouge d’où jaillit l’eau. C’est la plénitude de la connaissance. Il est aussi intéressant de rappeler le mot « Maboul » qui veut dire « déluge », toutes ces énergies qui ne sont plus en rapport avec leurs archétypes et qui n’obéissent pas aux lois principielles. C’est la loi de la jungle. Nous sommes actuellement dans un déluge. C’est à nous de choisir si nous voulons nous laisser engloutir par les eaux ou si nous voulons construire notre arche. Et pour ce faire il faut passer par des tailles, Mem, Lamed, pour donner des fruits. Le mot BOUL, c’est la taille de l’arbre. Dieu dit : « Je ne laisserai pas mon esprit à ne rien faire indéfiniment dans ce monde, je vais commencer à travailler ce monde ». C’est le commencement du grand barattage. Les traducteurs disent : « C’est la fin de toute chair », alors qu’au contraire, c’est « l’accomplissement de toute chair approche ». Cela n’a rien à voir ni avec une fin, ni avec des malédictions. Alors choisissez, ayez confiance. Ou vous faites toutes ces épousailles avec vousmême pour entrer dans cette dimension du Divin que vous êtes appelés à devenir, ou bien vous vous laissez engloutir.
En réponse à une question : Il n’y a pas contradiction entre la nécessité d’entrer dans des matrices dans lesquelles il faut rester et le danger que représente l’installation. La notion du temps s’introduit là. Il n’y a pas d’espace sans temps, c’est la même réalité. A chaque niveau de conscience correspond un temps et à chaque niveau de conscience correspond aussi un arrêt qui va permettre d’acquérir les structures du plan de conscience suivant que nous allons avoir à atteindre en passant une porte. Mais la durée de ce temps qui va présider à cette gestation est limitée et tributaire de la qualité du plan de conscience que nous sommes en train de vivre. Il y a un moment où la naissance doit se faire. Le danger de ne pas vivre sa naissance est celui de s’installer. Sur le plan biologique l’enfant, si nous admettons qu’il ait une conscience et qu’il refuse de naître, trouvera la mort. Il est très important qu’il naisse au bout de neuf mois. S’il naît trop tôt il ne sera pas viable. C’est la même chose pour la période d’installation dans le foyer des parents. Il est nécessaire d’y séjourner un certain temps pour que les parents soient là pour aider leur enfant à passer son adolescence si difficile, et pour l’accompagner pendant cette gestation. Après quoi il devra en sortir pour passer aux gestations intérieures auxquelles va présider cette même loi. On va faire des expériences d’une qualité extraordinaire et on n’aura nullement envie d’en sortir. C’est une tentation terrible. Le temps est la loi la plus fondamentale qui soit. François : La limite elle-même forme un espace. A. de Souzenelle : Donc un temps. On retrouve cela dans beaucoup de mythes. Il faut dix années avant que Thésée aille affronter le Minotaure. Cela représente également une porte à passer. Il en est de même pour le séjour de Noé dans l’Arche. Lorsque la colombe qui indique le temps ne revient pas, Noé sait qu’il doit quitter l’Arche. S’il n’en sort pas, il meurt. Ce n’est que lorsqu’on a obéi à tous ces espace-temps, qu’on dépasse le temps. Et le psalmiste chante alors : « Il n’y aura plus ni jours, ni nuits (symboles de l’espace-temps), car Yod-Hé-Vov-Hé, aura rejoint la lumière à toujours ». L’homme, devenu Yod-Hé-Vov-Hé, aura rejoint les archétypes, il aura complètement dépassé la dualité espace-temps. Il faut entrer dans la matrice pour naître. La connaissance, c’est « naître avec ». Le véritable enseignement n’est pas celui qui nous est donné de l’extérieur, c’est ce que Socrate découvrait avec la maïeutique. Nous portons la connaissance en nous, nous sommes des êtres parfaitement connaissants dans les profondeurs de notre être. Nous nous étions arrêtés au NOUN qui s’écrit avec un petit crochet supplémentaire en bas, qui revient sur la gauche, ce qui le distingue du VAV, et qu’il ne faut pas confondre avec le BEITH dont les deux barres horizontales sont beaucoup plus prononcées. Le Noun est l’initiale du mot NOUN qui s’écrit avec un Vav au milieu, servant de voyelle pour exprimer le ou, puis avec le Noun final qui s’écrit comme un Vav prolongé.
L’hiéroglyphe primitif est un petit poisson qui se stylise beaucoup et devient un petit ver qui est à l’origine du NU grec et de notre N. Il est alors beaucoup plus le mouvement du poisson que le poisson lui-même. Cette lettre a pour nombre 50, symbole d’une totalité. Le poisson est en effet le germe. Dans le ventre de sa mère l’enfant est encore au stade poisson, mais il contient l’homme tout entier. 50 est un nombre que nous connaissons bien, la Pentecôte n’est autre que la pesta qui se situe cinquante jours après Pâques, c’est la totalité de l’Œuvre alchimique, c’est la descente de l’Esprit-Saint, c’est la puissance du Verbe. Les Apôtres parlent une langue que tous comprennent, la langue mère originelle qui est créatrice. La Pentecôte juive, le Schabouoth, comprend sept semaines, donc 49 jours. Cette fête juive date de la plus haute antiquité, elle aussi est très importante. On retrouve les 52 jours dans le mythe grec des Argonautes partant à la conquête de la Toison d’Or, de leur totalité définitive. 50 + 2 est un nombre, nombre qui se retrouve dans tous les jeux de cartes. Il nous indique encore la Vérité. D’ailleurs, le mot KAL avec le RAPH et le LAMED a pour valeur respective 30 + 20 = 50. Il veut dire « tout ». Avec le mot « MI » nous avons aussi le 40 + 10, le monde des eaux d’en haut, dont tout procède. C’est l’unité totale qui va s’exprimer dans le MA, les eaux d’en bas, pour l’enrichir en vue d’un retour à l’unité totale. Il est très mystérieux de constater que ce monde divin, totalement riche, va encore s’enrichir. Nous ne pouvons méditer le monde divin qu’à travers cette antinomie qui est mouvement et nonmouvement. Si nous nous arrêtons à un de ces deux pôles, nous le nions, car s’il est mouvement, il est imparfait et s’il est non-mouvement, c’est la mort. Ce sont les deux pôles d’une même réalité. Ce germe, ce poisson, est aussi le symbole du Christ par lequel le représentaient les premiers Chrétiens. Le Christ ouvre aussi l’ère des Poissons. Une question : Y a-t-il un ou deux poissons ? A. de Souzenelle : Cette conception est parfaitement hérétique par rapport à la théologie chrétienne. Elle est chère à Steiner qui voit dans le baptême du Christ la disparition d’un premier poisson qui serait sa nature humaine. Il ne serait devenu Fils de Dieu qu’après son baptême. En astrologie, il y a deux poissons avec le retournement des énergies. C’est une totalité, le dernier signe du zodiaque, celui qui les récapitule tous. Il forme une unité qui va repartir dans un cycle plus grand.
Nous nous étions arrêtés l’autre jour au mot NAGOD qui est l’illustration la plus belle de l’idée du poisson. La racine Nagod veut dire « communiquer » et aussi « face à face ». Nous la retrouvons dans le face à face d’Adam et de celle qu’on appelle « ISHA », la femme, au moment où Dieu la lui présente, car il ne s’agit pas du tout de la création de la femme par rapport à l’homme. Adam — et nous le sommes tous — est féminin et masculin à la fois. Cette prise de conscience du féminin en lui sera la prise de conscience de tout son monde intérieur qui n’est pas encore épousé. De même que dans la Genèse chaque jour est mis à la lumière, à la lumière lourde de la ténèbre dont elle procède et qu’elle porte en elle ; chaque jour de la création va être la mise à la lumière de telle ou telle ténèbre et va être lourde de tous les jours précédents qui rentrent dans les ténèbres. De même aussi Adam, au sixième jour, avec les animaux, c’est-à-dire avec ses énergies immédiates, est lourd des jours précédents qu’il porte en ses structures profondes. Et Isha est une perspective de profondeur de son être qu’il va conquérir. Isha est celle qui pourra communiquer avec lui. C’est à ce moment que dans la Genèse le mot Nogod est prononcé. Si vous coupez ce mot en deux, deux mots sont face à face, d’une part le Noun, le poisson et d’autre part le Gad qui est aussi le poisson. Nous ne pouvons donc communiquer vraiment avec nous-même que de poisson à poisson, de germe à germe, dans les profondeurs de notre être. Ainsi que nous l’avons déjà vu, Gad retourné donne Dag, le bonheur. Gad est aussi le juste rapport du 4 et du 3 (Guimel et Daleth), dont la somme est 7 et la multiplication 12, deux nombres très importants. Nous trouvons tout ce symbolisme dans le voyage de Job dans les ténèbres où il va rencontrer le « crocodile » qui est le Léviathan, et dans le mythe de Tobie et de sa rencontre avec le Dag Hagadol, le grand poisson. Pouvoir communiquer de poisson à poisson, c’est communiquer avec les profondeurs de son être et avec des personnes du même niveau de conscience. Le drame actuel de l’humanité c’est qu’elle n’a plus la communication avec elle-même et ne l’ayant plus, elle ne l’a plus avec les autres. Découvrir cette communication profonde, c’est à la limite, communiquer avec le Divin. Tous ces hommes qui ont fait l’expérience des grandes profondeurs, sont très proches du Noun : Noé qui n’est autre que Noha, c’est-à-dire le Noun et le Heith. Dans le mythe du Déluge la terre a été submergée. Il y a peut-être eu un cataclysme extérieur, nos énergies dont nous sommes tellement inconscients ayant eu pouvoir sur nous et nous ayant submergés. Au sixième jour Adam est identifié à toutes ces énergies que représentent les animaux. C’est-àdire qu’il est sur le même plan de conscience qu’eux. Pour les dominer, les contrôler, il est obligé de se dissocier d’eux et de les nommer. Ce sera là son premier champ de conscience. A partir de ce moment-là il a déjà vaincu, épousé le premier jour. Et puis, après cela, il est mis à l’épreuve
du fameux serpent qui vient le tester pour voir s’il peut aller plus loin. Et c’est le drame de la chute, il est renvoyé au sixième jour, avant qu’il n’ait nommé ses énergies. Identifiés à nos énergies, n’en ayant pas conscience, elles ont pouvoir sur nous et c’est le déluge. Si nous voulons recommencer l’opération divine ratée par l’homme à la suite du drame de la chute, nous avons pour tout premier travail à faire venir devant nous ces animaux du sixième jour et de les nommer, de les intégrer. C’est là où nous retournons les énergies. Voilà ce que signifie Noha. Il va affronter toutes les barrières, il va mourir à un état de conscience pour ressusciter à un autre. Retourné, le nom de Noha c’est Hen, la grâce, la miséricorde divine, celui qui console, qui conduit. C’est aussi le nom de Anne, aussi masculin que féminin. Ce sont des femmes qui ont trouvé grâce devant Dieu. A la naissance de Noé son père prophétise : « C’est celui qui me consolera de tous les maux de la terre ! ». Consoler, c’est le mot « NAHOM ». La consolation c’est le nom de Noé, le nom qui donne l’énergie, la vocation, il est celui qui va conduire l’humanité vers de nouvelles prises de conscience. Et le mot conduire, c’est NAHO, le guide que sera Noé, qui, lorsqu’il sortira de l’Arche, redevient cet Adam d’avant la chute. Un autre personnage important de la Bible, c’est Jonas qui s’écrit Yod, Vav, Noun, Heith. Il entre pendant trois jours et trois nuits dans le ventre du poisson : Dag Hagadol. Il est d’ailleurs comparé au Christ qui reste trois jours et trois nuits dans le ventre du tombeau pour cette immense mutation du corps de chair ressuscitant au corps glorieux. Le nom de Jonas est d’autant plus intéressant qu’il est le nom de Yod-Hé-Vov-Hé dont le deuxième Hé est remplacé par Noun. Jonas veut aussi dire « la colombe » qui est une expérience de lumière. Un des Hé du Tétragramme n’est pas encore complètement accompli et c’est pourquoi il doit faire l’expérience des ténèbres dans le ventre du poisson. Il se refait germe, petit enfant. Si je me souviens bien, Job est le fils de Noun, il a lui aussi dans sa vocation de vivre cette dimension du poisson. Fils de poissons, c’est le poisson lui-même qui doit accomplir un niveau plus haut encore. Le mot Jourdain en hébreu c’est YARDEN. C’est le fleuve qui est véritablement nord-sud. C’est dans le Jourdain que Jean-Baptiste baptisait, que le Christ a été baptisé et les Evangiles disent que le Christ est descendu dans le Jourdain. Et ceci est écrit dans le nom Yared qui signifie descendre. Le Christ descend dans la situation du poisson, il se fait poisson. Nous ne pouvons pas monter dans les hauteurs si nous ne descendons pas dans les profondeurs. La tradition juive dit qu’il y a sept cieux en haut et sept enfers en bas. Ce sont les deux pôles
d’une même réalité qui sont les sept jours de la Création. Nous ne pouvons dominer sur, qu’en descendant dans… C’est une réalité que nous allons trouver sous une autre forme avec le nom de Michel. La racine MACHOL en hébreu veut dire : se faire semblable à… C’est un autre aspect de la même réalité. C’est aussi rentrer dans… pénétrer, pour dominer. On ne domine pas en se heurtant. Dans les jeux martiaux des Orientaux, on ne va pas contre l’autre, mais on va prévoir le geste de l’autre pour pouvoir le déséquilibrer ; entrer dans son geste. Il en est de même à tous les niveaux. Un autre mot important est « ANI » qui veut dire « moi », « je ». De quoi ce mot est-il fait ? Il a la puissance de l’Aleph, il y a le poisson et il y a la naissance totale qui est le Yod. Le but de l’humanité, c’est d’entrer dans cette puissance que profile le Yod, c’est-à-dire Yod-Hé-Vov-Hé. C’est la puissance créatrice divine qui descend dans le poisson que nous sommes chacun de nous. C’est le « Soi » en langage moderne, cette dimension essentielle de l’être, sa programmation. C’est ce germe que j’appelle le « son-germe », car nous sommes créés par le Verbe. C’est aussi l’anagramme d’Ayin, la toute première énergie divine énoncée, mais totalement inconnaissable, insaisissable, « le rien » qui est dans la grande ténèbre du premier jour. Notre moi, notre je, procède de ce Rien divin. L’Ayin, dans l’Arbre des Séphiroth est la première Séphirah, tout en haut, la couronne, nommée, mais pas connue. Lorsque la lettre Noun s’approche du Saint-Béni-Soit-Il, elle fit valoir qu’elle était en tête des mots NORAH, crainte et NAVAH, beauté. Et Dieu répond : « Retournes à ta place, car c’est à cause de toi que le SAMEK est retourné à la sienne et appuies-toi sur lui, car il est dit : Yod-HéVov-Hé soutient tous ceux qui chancellent. Chanceler, tomber, c’est le mot NAPHOL. Ceux qui tombent sont les NAPHELIM, les faibles. Naphol est entièrement constitué par la racine PHOL que nous retrouvons en anglais dans « to fall » et en allemand dans « fallen », parce que le Noun est faible, il est encore un petit garçon. Et souvent nous verrons ce Noun disparaître pour l’arrivée de Yod. Le Samek, la lettre qui suit et que le Noun ne doit pas quitter, le soutient. Mais ce soutien doit un jour disparaître pour que le germe — comme il en est aussi pour les enfants et pour leurs parents — devienne lui-même l’arbre qui soutiendra d’autres. Alors dans la Bible les Nophélim sont appelés « les géants ». Ce sont les faibles qui sont devenus forts, parce que ce sont eux qui commencent l’élaboration du mot « poisson ». Le géant, à l’instar de Goliath, est ce faible qui se croit fort. Nous ne pouvons devenir forts que si nous acceptons d’être faibles. Les forts, ce sont le GEBOURIM, ce sont eux qui acceptent d’être faibles pour devenir forts. Les fils de Dieu qui épousent les filles des hommes, c’est la conscience qui s’éveille et qui épouse le féminin de l’humanité. Cela n’a rien à voir avec les héros de l’humanité. Le SAMEK est une lettre un peu coquine, parce qu’elle ressemble au Mem final. Elle a pour valeur 60 et signifie « l’appui ». Elle s’écrit avec un Mem et un Kaph final. Homologue du Vav,
6, que nous avons rapproché du sixième jour, celui de la création de l’homme. Rappelez-vous que le Vav est une conjonction. C’est la colonne vertébrale et, par rapport au cosmos, c’est l’homme en tant qu’il est la colonne vertébrale cosmique qui le lie à l’horizontale et, par rapport au ciel et à la terre, à la verticale. Il est le rapport. Les anciens l’appelaient le « microthéos » et le « macrothéos ». Notre vocation est d’être le juste rapport entre le haut et le bas, entre la droite et la gauche, c’est-à-dire avec chacun de nos problèmes, avec les événements, avec les choses, avec nous-mêmes, pour commencer. Le Vav est donc cet « et », cette conjonction, il est celui sur lequel s’appuie la Création. Avec le SAMEK (60) nous allons trouver la même chose. Son graphisme le plus primitif est un arbre, comme un petit arbre de Noël avec trois branches horizontales. Puis la base va disparaître et on distingue très bien les trois branches de l’Arbre des Séphiroth. Se stylisant, ce petit arbre va donner le sigma, le Xi grec et notre lettre X. Le 60 nous met devant l’arbre de notre corps. Ceci n’est pas vraiment dit, il est dit qu’il est notre appui, mais c’est l’Arbre des Séphiroth, notre colonne vertébrale dont les branches, encore faibles, deviendront fortes. Quand le Noun est allé trouver le Saint-Béni-Soit-Il, il a reçu l’ordre de ne pas se séparer du Samek, parce que le Noun a besoin d’un appui. Le Nophelim a besoin de s’appuyer sur le 60 qui représente en quelque sorte l’adulte par rapport à l’enfant. C’est le mât du navire par rapport à la voile, la hampe du drapeau par rapport au drapeau, c’est le mot NES. Dans le mot SOUSSE qui, comme en arabe veut dire cheval, nous nous trouvons devant deux Samek et nous avons le nombre 60 + 6 + 60, très proche du 666 qui est le nombre de l’Apocalypse. Vu de cette manière, le cheval représente le nombre de la Bête. « Mais, dit l’Apocalypse, que celui qui a l’intelligence pour comprendre, comprenne ! ». Si 666 est le nombre de la Bête, il est aussi le nombre de l’Homme. Qu’est-ce que cela signifie ? A mon avis cela exprime que le 6, cet « et » ne veut pas aller au 7. Il est la répétition, ce monde ennuyeux qui se répète toujours. C’est la chaîne du Samsara, c’est la banalité quotidienne. Le cheval est l’animal qui est tout entier dans ses jambes et nous pouvons dire qu’il représente la partie de nous jusqu’aux hanches. Il représente toute notre activité, perpétuellement en déplacement, qui va à droite, à gauche et qui comble le vide intérieur par des activités extérieures, pour acquérir. Acquisitions qui vont de la forme la plus grossière, matérielle, jusqu’aux acquisitions plus subtiles, par exemple celle des diplômes. C’est l’humanité qui est menée par son cheval et qui n’a pas encore fait la démarche lui permettant de le monter et ainsi d’entrer dans le 7. Il y a certainement un autre niveau de lecture pour le 666. Nous le verrons avec le MEM final qui a pour valeur 600. Là nous entrerons dans un autre niveau de lecture, dans la notion de l’Homme qui commence à assumer le cavalier. Donc, si nous ne prenons pas les rênes, nous restons dans le monde de la répétition.
Le mot SAKOL est aussi extrêmement important. Il veut dire « fou ». SEKEL signifie le « cerveau ». Que veut dire cette racine ? Si nous reprenons le Samek comme étant l’appui vécu dans sa totalité, c’est-à-dire dans la conquête de notre colonne vertébrale, la folie est en réalité l’acquisition de la plus haute sagesse. Il ne s’agit pas du tout de la folie comprise à notre niveau de conscience. C’est l’homme totalement réalisé, l’homme total qui est un Dieu. Il est certain qu’il paraît fou à l’homme ordinaire, parce qu’il le gêne, il le dérange, parce qu’il n’agit pas comme tout le monde. C’est un homme qui a fait tomber toutes les barrières par rapport aux conventions sociales. Le mot SOD est le « secret ». C’est l’homme qui dans son Arbre va ouvrir toutes les portes successives, qui va entrer dans son secret successif, dans son sacré successif. Et Yesod, une des Séphiroth qui est tout à fait à la base de la colonne vertébrale, et qui en est le fondement, est le secret du Yod. C’est là où le Yod commence à prendre naissance, c’est là que le germe commence à vivre et où nous allons le porter tout le long de notre colonne vertébrale jusqu’au Yod-Hé-Vov-Hé qui est la tête. Le dernier mot que nous allons étudier est HESSED, la grâce et aussi la Grâce divine. Il s’écrit d’un côté avec le Heith qui est la barrière et le Daleth qui est la porte. La Grâce, c’est cette force qui nous est envoyée et qui va nous faire passer par toutes les barrières. HOD, les deux lettres qui cernent le Hessed, c’est la « fine pointe » par laquelle nous pouvons acquérir la Grâce, la fine pointe qui pénètre dans nos vies. HESSED, c’est aussi le secret qui est caché derrière chaque barrière que nous avons à passer. Nous ne savons pas ce qui est de l’autre côté et nous sommes angoissés. De l’autre côté il y a le secret, le sacré, qui est toute la Grâce divine.
On a perdu conscience, en Occident, de la lettre en tant qu’énergie, les lettres sont mortes, dévitalisées. Annick de Souzenelle, en donnant un enseignement sur les lettres hébraïques, a l’impression de contribuer à la revitalisation de la langue et à redonner leur force aux lettres qui sont des énergies vivantes. Quand nous parlons nous émettons des énergies dont les forces sont non seulement reçues par d’autres, mais qui sont des forces cosmiques créatrices en nous et dans le monde. Quoique les Hébreux aient oublié cette tradition, ce qui est le cas un peu partout, il nous est possible de communiquer avec elle en entrant dans le cœur de leur langue et de leurs lettres. NAGOD signifie communiquer. Ce mot est composé de Noun et de Dag. Or Dag retourné donne Gad, le poisson. Nous sommes donc là en présence de deux poissons. La vraie communication se fait de poisson à poisson, dans le silence et dans les profondeurs où nous pouvons atteindre l’autre dans sa propre profondeur.
Le travail que nous faisons ici, dit Annick de Souzenelle, n’a rien d’un travail intellectuel, même si notre communication passe par des mots, car ces mots sont pleins de vie, ils nous forgent et nous sculptent. Lorsque Dieu parle sur le Mont Sinaï, il est dit que les Hébreux voyaient la voix divine. C’est-àdire que cette voix divine sculptait l’air comme elle sculptait leur chair. C’est le Verbe divin qui nous crée à chaque instant dans ce son primordial que nous sommes et qui fait vibrer tout notre être psychique et tout notre être spirituel, et qui vibre dans le monde. Et c’est pour cela que nous sommes co-créateurs. Nous continuons à tailler, à ciseler le monde comme le dit le Sepher Yetzirah lorsqu’il parle des lettres qui sont taillées, ciselées, qui sont de véritables objets d’orfèvrerie. Cet objet de beauté vers lequel nous essayons d’aller, c’est toute la description de la Jérusalem céleste chez les judéo-chrétiens. C’est ce joyau que nous avons à élaborer à l’intérieur de nous, cette ville sainte que nous avons à construire et par laquelle nous ferons le monde. Annick de Souzenelle résume ensuite l’enseignement qu’elle nous a donné depuis octobre 1978 sur les Lettres hébraïques et qui sont résumées dans les précédents comptes-rendus. Néanmoins, nous extrayons quelques passages de ce que nous a rappelé notre animatrice afin, pour les nouveaux venus, de donner les noms, valeurs et symboles des lettres déjà étudiées. ALEPH : la tête cornue, les cornes qui sont les antennes par lesquelles nous recevons l’information. Cela explique qu’Aleph est aussi le chef, quel qu’il soit, l’époux, le prince, etc. Bien qu’elle soit la première lettre, on peut dire qu’elle se situe presque en dehors de l’alphabet, car elle est la charnière entre le créé et l’incréé. Elle est l’alpha et l’oméga. Sa valeur est l’unité, c’est-à-dire qu’on peut la comparer à un point qu’on est obligé de poser sans pouvoir le démontrer. BEITH : valeur 2. Elle est en somme la première lettre de l’alphabet. C’est la maison, la réceptivité, c’est chacun de nous, c’est toute la création. Beith, par son altérité, nous indique que la Création est fondée sur le nombre 2. Nous sommes structurés dans la dualité qui n’a qu’un seul but : recouvrir l’unité d’Aleph. GUIMEL : valeur 3. C’est le chameau. On peut dire que la distance qu’il y a entre Beith et Aleph est un désert. Nous sommes dans des jardins qui sont des déserts. Que sont ces jardins ? Ce sont tous les moments délicieux que nous vivons dans nos rapports humains. Mais ils sont artificiels par rapport au jardin dont ils sont le reflet, ils sont déserts. Pour ne pas être stoppés dans notre évolution, ils devront représenter des marchepieds que nous aurons à quitter afin de monter vers l’ultime jardin. Ce chameau va nous révéler la force que nous avons en nous pour appréhender cette marche, parce qu’il est tout à fait capable de traverser le désert sans aller chercher de l’eau à l’extérieur. Il porte son eau en lui.
DALETH : valeur 4, la Porte. C’est la limite, c’est l’épreuve, mais aussi l’invitation à passer cette porte, c’est-à-dire à passer d’un plan de conscience à un autre plan de conscience. Le Guimel (3) étant le mouvement, le Daleth (4) est la porte construite à l’aide de deux chambranles et qui est structurée. Il y a donc un juste rapport entre le 3 et le 4, le mouvement et la structure, l’un ne pouvant se passer de l’autre, ils sont inséparables. HE : valeur 5, le souffle. C’est le souffle créateur, c’est la vie, c’est aussi le germe. Chaque être se définit selon la qualité de son souffle et du souffle qu’il reçoit. Il lui donne sa spécificité. VAV : valeur 6, le crochet. C’est ce qui relie. Quand le Vav est seul, il est la conjonction « et ». Si Dieu créa l’homme le sixième jour, celui-ci arrivant à la fin de la Création, la récapitule en quelque sorte et représente la conjonction entre le créé et l’incréé. Il est la colonne vertébrale cosmique du monde. A partir de maintenant l’homme est appelé à passer au 7, 8 et 9 pour mettre au monde le Yod qui est le 10. ZAIN : valeur 7, c’est une arme. Le 7 est un achèvement, puisque Dieu contempla son Œuvre le septième jour. Mais qui dit perfection, dit mort, car la perfection est l’immobilité. Elle demande à être rompue pour pouvoir passer à un autre plan, à une perfection supérieure, si l’on peut dire. Le Zain est la flèche qui traverse la tunique de peau pour amener l’homme à recouvrer enfin sa nature première. HEITH : valeur 8, la barrière. Ce sera encore une épreuve. Sortant d’un champ magnétique, énergétique, l’homme va se trouver devant un autre champ. Aura-t-il acquis les structures lui permettant de l’appréhender ? Ce nouveau « gardien du seuil » va l’obliger à chercher en lui les énergies nécessaires qui lui permettront de franchir cette barrière. TEITH : valeur 9. C’est un nouvel achèvement, celui du Zain ayant été provisoire. Le Teith indique que tous les échelons de l’échelle de Jacob ont été montés. La fiancée a revêtu sa robe, elle est prête à recevoir l’époux. Teith est le bouclier qui prolonge l’épée, l’épée qui est le Yod, les Chérubins qui gardent l’entrée du Jardin d’Eden avec leur épée flamboyante. L’homme doit rentrer dans cet Eden, il doit se mesurer avec cette épée et devenir le Yod-Hé-Vov-Hé que nous vivons avec le nombre 10, c’est-à-dire avec le retour à l’unité qui est YOD, valeur 10. CAPH : valeur 20 fait écho au Beith (2) étant aussi un contenant. La lettre Caph est comme un chakra, c’est un contenant d’énergie qui va peu à peu s’ouvrir. LAMED : valeur 30, l’aiguillon. C’est l’instrument avec lequel le bouvier divin va conduire l’animal cornu que nous sommes, l’animal autant qu’il ait ses antennes dressées vers le Ciel dont il reçoit l’information. Non pas une information venue de l’extérieur, mais une information venant de l’intérieur.
MEM : valeur 40, la matrice qui est en même temps un arrêt, une porte, les eaux matricielles (Maim). Ce sont des eaux d’où l’homme doit sortir pour renaître comme Noé, afin d’entrer dans de nouvelles matrices successives. NOUN : valeur 50, c’est le Poisson, le germe qui contient toute la promesse de son développement. Dans les quelques chromosomes réunis dans le ventre de la mère, il y a déjà l’homme tout entier. Le 50 implique une totalité. Mais le Noun étant un germe est très fragile et a besoin d’un appui, d’un soutien et ce sera le SAMEK, valeur 60, qui sera le soutien, de même que le Vav, valeur 6, représente la colonne vertébrale. Il est le soutien qui permet d’aller jusqu’à l’Aleph final. Il est aussi le mât du navire, la hampe du drapeau. Compte rendu de la rencontre du 8.11.1979 Nous abordons aujourd’hui, dit Annick de Souzenelle, la lettre AYIN qui a pour valeur 70. Mais avant de vous en parler, je veux rapidement rappeler la lettre qui lui correspond sur le plan des unités, le Zain qui a pour valeur 7 et qui est cette lettre qui a pour forme graphique un éclair, finalement un sabre. Comme je vous l’ai dit, le 7 est toujours lié à une perfection à atteindre et donc à une rupture nécessaire pour que la vie puisse continuer et pour que l’on puisse passer à un autre cycle, à un autre état. Le 7 en hébreu est Sheva qui signifie « rassasié ». Il ressemble au nom du dieu hindou Shiva qui détruit pour reconstruire avec les mêmes matériaux, qui détruit avec son seul regard tout ce qui ne ressortit pas de l’éternité. La même idée fondamentale se retrouve avec le nombre 70, mais cette fois-ci vécue, expérimentée dans le corps de l’homme qui est toujours concerné dans le plan des dizaines. Nous avons vu le Yod qui est la main, qui est la main du potier : « Nous sommes l’argile et tu es le potier. Nous sommes l’ouvrage de Tes mains… » (Isaïe LXIV, 8), le Caph qui est le creux de la main, le Lamed qui est un peu différent, le Noun le germe dans la matrice et le Samek, l’arbre, c’est-à-dire la colonne vertébrale. AYIN veut dire l’œil ou encore la source. Il y a toujours un lien entre deux significations d’un même mot, une même énergie. La valeur commune entre l’œil et la source se trouve dans leur jonction profonde, non pas dans le regard qui voit ce que nous voyons dans l’immédiat, mais celui qui va à la source, qui voit au fond de l’âme, qui va chercher toute cette fameuse réserve d’énergie qui est là en attente. Et allant à sa propre source, l’œil va à celle de l’autre, car nous sommes Un dans la profondeur. Dans les hiéroglyphes égyptiens, le Ayin est représenté par un œil avec une pupille au milieu. Très vite stylisée elle donne un cercle, le O, ainsi que le zéro. Qu’est-ce que le zéro, le mystère du Zéro introduit par les Arabes ? C’est l’abîme de la source ou la source des abîmes, que nous
retrouvons dans le Livre de Job. C’est l’œil des grandes profondeurs, l’ultime matrice de mort et de résurrection. Ayin s’écrit avec un Zain, valeur 7, un Yod, valeur 10 et le Noun final, valeur 700. Le Yod est donc saisi entre deux 7. C’est le Yod-Hé-Vov-Hé qui se profile, c’est toute cette potentialité divine que chacun de nous porte en lui et qui est saisie entre deux lettres qui sont très inconfortables. Car chaque fois que nous voyons apparaître le 7, nous sommes à une plénitude, mais aussi à l’incertitude d’un nouveau plan à aborder, lequel, riche des plans précédents, doit marquer une progression nouvelle. Ayin est un mot qui contient un dynamisme qui ne permet pas de repos, c’est l’œil impitoyable qui perce toutes les profondeurs. De même que la flèche du Zain transperce la tunique de peau, de même l’œil traverse tous les champs de conscience, nous obligeant à voir le monstre que nous sommes quelque part dans les profondeurs. Ce regard, tel celui de Shiva, perce tous les jours de la Création dont nous sommes tissés et toutes les tuniques successives dont nous avons été recouverts, jusqu’à plonger au-delà du premier jour qui est le grand Abîme, la grande ténèbre. C’est terriblement angoissant tant que nous n’avons pas acquis les structures nécessaires et c’est pourquoi il ne faut pas aller trop vite. Il y a une dialectique entre le Ayin et le Aleph, la toute première lettre qui a pour valeur 1. C’est le tout premier jour et c’est pourquoi chaque réalité qui va suivre une descente, va être un nouvel Aleph. La dernière fois nous avons vu la lettre Heith qui a pour valeur 8 et qui est la barrière, et le 9 qui est une autre barrière précédant le 10, l’unité, le nouveau champ absolu de conscience vers lequel va l’homme. Ici nous allons vivre le 80, non pas comme une barrière, mais comme une résurrection. En fait, c’est un nouvel 1. Nous allons maintenant trouver des clefs dans les mots où les deux lettres Ayin et Aleph vont jouer. AV qui s’écrit avec un Aleph et un Beith veut dire « père ». Aleph pose la création et Beith établit la relation entre père et fille. Si nous remplaçons Aleph par Ayin, la prononciation sera la même, sauf que Ayin est une gutturale, mais la signification sera « le nuage ». Le nuage est ce qui nous sépare du Divin. Av écrit avec un Ayin, ce sont tous les champs de conscience qui nous séparent du Père. Ayin doit devenir Aleph. Le mot RA est très important : Reich qui a pour valeur 200 et Ayin. C’est le mot qu’on traduit par « le mal » dans l’Arbre de la Connaissance dit du Bien et du Mal et qui, en réalité, est l’Arbre de ce qui est lumière et de ce qui ne l’est pas encore. Cela correspond dans notre optique à ce qui est conscient et à ce qui est encore inconscient, et que nous ne pouvons pas appréhender, étant encore dans les profondeurs. Ra, c’est tout ce qui est en réserve en chacun de nous, dans l’autre et dans chaque élément de la création. C’est la réalité qui nous est encore cachée. De même que le médecin devant son écran de radioscopie ne voit qu’un squelette, de même nous ne voyons
que le squelette du monde. Et toute l’œuvre d’Ayin consiste à enlever les écrans qui nous séparent de l’ultime vision qui est Av, le Père. Si nous ne nous préoccupons pas de Ra, cette réserve qui est symboliquement le féminin en chacun de nous, comme une femme délaissée se retourne contre l’homme, nos énergies joueront contre nous et nous détruirons petit à petit jusqu’à notre mort qui, dans le cas contraire, ne représente qu’un endormissement. AOR qui est RA renversé avec, reliant les deux lettres, le Vav qui est la conjonction, le symbole de l’homme, signifie la tunique de peau. Dans la Bible il est dit qu’après que l’homme et la femme eurent mangé le fruit de l’Arbre de la Connaissance„ ils furent recouverts de la tunique de peau. Ils ont mangé le fruit qui était encore dans la réserve et leur drame c’est d’avoir cru qu’ils étaient déjà arrivés au Père. Alors là ils ne peuvent plus aller plus loin et ils sont remis au point de départ, réidentifiés à cette réserve d’énergie du sixième jour et ils sont complètement dans la ténèbre. Cela n’a rien à voir avec une punition, c’est une mesure de protection qui leur permet de retrouver leur fécondité, car leur erreur les avait rendus stériles. Ils sortent de leur illusion, c’est la sortie de l’Eden. Nous aussi nous avons à sortir de notre ténèbre et, telle la plante, faire notre percée au soleil. Le même mot écrit avec Aleph au lieu d’Ayin, c’est la Lumière. C’est la réceptivité à la Lumière d’Aleph, mais aussi la résistance, car il n’y a pas de lumière sans qu’il y ait résistance afin de capter les rayons. De même lorsque je parle, il est nécessaire que quelqu’un m’écoute, sinon je parlerais dans le vide. Ce sont les épreuves qui nous permettent d’accéder à la Lumière. Prenons le mot DAATH, écrit avec le Daleth, l’Ayin et le Tav qui est la dernière lettre de l’alphabet. Daleth est construit exactement comme une porte avec deux chambranles qui sont le 4 et le Lamed, le 3, le mouvement qui est au milieu. Daath est construit exactement de la même manière. C’est le mot qui veut dire « connaissance ». Nous avons les deux 4, mais le Lamed est remplacé par le Ayin. L’idée en est la même, parce que la connaissance ne peut s’acquérir qu’en passant par des portes successives. Le Ayin, ici, a pour tâche de traverser tous les champs de conscience, c’est le devenir de nous-mêmes. De même qu’il y a une dialectique entre le 4, la structure et le 3, la vie et que, si les deux chambranles de la porte se resserraient trop ils étoufferaient la vie et il ne resterait plus que le mot Dath, la loi ; il y a la même chose avec Ayin. La loi est au service de la vie, elle n’est pas là pour la contraindre, mais au contraire, pour lui permettre d’accomplir son devenir. Avec Ayin, la loi est ontologique et doit être connue par celui qui veut travailler à son devenir. Nous avons le mot HET, le temps. Le temps a été donné à l’homme pour arriver jusqu’au Tav ou à l’oméga, la dernière énergie à intégrer pour que Ayin fasse son œuvre. Le temps est différent pour chaque terre et au fur et à mesure que nous allons vers des terres successives, les temps vont
être de plus en plus profonds. Cela n’a pas de sens d’employer les expressions « plus vite » et « moins vite », elles n’ont qu’un sens psychique. Avec la lettre Zain je vous avais parlé du mot EZER que l’on trouve dans la Genèse et qui veut dire « aide ». Quand Dieu fait prendre conscience à l’homme des énergies dont est constituée sa première terre sous la forme des animaux qu’il doit nommer le sixième jour, il ne trouve pas « d’aide » capable de communiquer avec lui. Dieu emmène alors Adam dans un « sommeil profond » qui n’est autre que la descente dans le Ayin, descente à la source où il va rencontrer cette aide, c’est-à-dire son féminin qui est sa réserve d’énergies. L’aide n’est pas quelque chose d’extérieur, c’est nous-mêmes, nous sommes notre propre objet de communication. Car le mot qui a suivi Ezer est Nagod, la communication, c’est la rencontre avec nous-mêmes dans les profondeurs. Nous devons nous faire germe, c’est-à-dire manier le Zain pour redescendre dans Ar ou Ra, notre réserve d’énergies. Ayin c’est encore le « troisième œil », car la communication ne peut être qu’une totale information venant de l’intérieur. Ezer, l’aide, et Zera qui est formé des mêmes lettres, c’est permuter. Zera, c’est la semeuse. Nous retrouvons l’idée du germe. Quand Dieu dit : Faisons une aide semblable à lui… », c’est « allons chercher sa semence ». Ezer veut aussi dire « aider », mais c’est plus qu’aider, c’est apporter la vie grâce à ce travail. ABOD qui s’écrit Ayin, Beith et Daleth veut dire « travailler ». Dans ce mot nous trouvons Av, le nuage et Daleth, la porte. Le travail consiste donc à passer la porte de tous ces écrans pour retrouver le Père. Hed, Ayin, Daleth, le temps nous est donné. Le travail extérieur doit faire écho au travail intérieur. Or, à l’heure actuelle, le travail extérieur est devenu un travail destructeur. Lorsque je vous ai parlé de l’Arbre des Séphiroth, je vous ai dit que la toute première Séphirah tout en haut, au-dessus de Kether, n’est pas révélée. C’est le mot Ayin écrit avec un Aleph, c’est Ain Soph qui est le Rien-Lumière, c’est-à-dire l’infini. Nous avons aussi Ain-Soph-Aor qui est l’infiniment Lumière. Ayin qui, en haut, est le Rien, la source qui vient des hauteurs, est en bas la source qui vient des profondeurs. Elles se rejoignent, elles sont les mêmes. Nous avons aussi le mot AZOB, libérer. Regardons le mot EDEN, Ayin, Daleth et Noun final. Ce n’est pas un lieu confortable. Il est construit avec 70, 700 et puis 4. Autrement dit, c’est une porte, ce n’est pas un lieu où l’homme devait rester, mais où il recevait la Lumière avant qu’il n’en reparte. Or il est passé par la mauvaise porte, c’est là son drame. Il fallait qu’il en sorte pour faire son travail dans les profondeurs. Avant la chute, ce travail se faisait de façon harmonieuse et sans cette souffrance que nous avons, à lutter contre de continuelles pulsions de mort. « Mieux vaut la mort… » va dire Job. C’est cet état l’Eden, ce lieu qui est saisi entre deux 7 et qui nous propulse continuellement pour aller plus loin.
Il n’y a pas de vraie descente qui ne soit suivie de montée. Notre péché, c’est de désespérer quand nous sommes au fond de la fosse. C’est là qu’on n’a jamais été aussi près de la hauteur la plus grande. Lorsque la lettre Ayin est venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, elle s’était recommandée du mot ANAVAH qu’elle commençait : Ayin, Noun, Vav, Hé, et qui veut dire « la modestie », « la douceur ». Mais en fait, ce mot va beaucoup plus loin, parce que c’est le Ayin qui nous force à descendre vers le Noun, à nous refaire poisson. C’est cela la vraie modestie. En même temps nous avons le mot NAVAH, la beauté qu’on ne peut réaliser que dans la forge des profondeurs. Et le Saint-Béni-Soit-Il renvoie la lettre en lui disant : « Mais tu es aussi le commencement du mot AVAH, la destruction, tu ne peux pas présider à la création du monde ». En effet, le Ayin nous oblige à détruire pour reconstruire. Ce mot n’est absolument pas traduisible sans être trahi et c’est pourquoi quand la lettre Teith qui préside au mot Tov, le Bien, était venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, Dieu lui avait dit : « Tu es bon, tu es bien, tu es beau, mais tu n’es rien par rapport au Tav que tu seras dans un monde futur ». Ce monde futur, c’est le monde dans lequel ce Tov aura totalement réintégré le Ra, c’est-à-dire lorsque la Lumière aura entièrement intégré la Ténèbre. Et lorsque le Ayin aura été totalement épuisé dans les profondeurs, il deviendra Aleph, c’est la Lumière. Et à ce moment le Tov éclate et devient un tout autre Tov. Question : Les textes anciens n’ont-ils pas été appropriés par les Hébreux ? Ne proviennent-ils pas d’une tradition plus ancienne transmise à travers Moïse ? Réponse : Je fais toujours référence à la tradition historique de Moïse qui reçoit la Révélation sur le Mont Sinaï. Mais cela ne veut pas dire qu’il n’ai pas charrié des connaissances acquises auprès des Égyptiens. L’Égypte était un creuset fantastique où se retrouvaient toutes les traditions les plus anciennes. Le peuple hébreu est quand même un peuple privilégié dans la mesure où il est celui qui doit mettre au monde le Messie, le Yod. Dans la profondeur nous sommes hébreux. Le grand drame et le péché du Christianisme, c’est d’avoir refusé le monde hébraïque et c’est pour cela que, pour le moment, il n’est pas chrétien La lettre Ayin que nous avons étudiée la dernière fois, qui est l’œuf et en même temps la vision des profondeurs, est une des plus belles lettres, parce qu’elle rend bien compte de la loi absolue de la nécessité de descendre dans nos profondeurs si nous voulons atteindre les hauteurs. La vision de la Lumière totale est la dernière acquisition de l’homme. « J’avais entendu parler de Toi, maintenant mon œil Te voit », dit Job.
Nous étudions aujourd’hui la lettre PHE qui a pour valeur 80. Elle est l’initiale du mot Phé, si nous ajoutons seulement un Hé elle signifie : bouche. Souvenez-vous de la lettre Heith qui vaut 8 et qui est la barrière. Barrière qui se dresse devant l’homme qui a vécu le nombre 7, la plénitude qu’il est obligé de casser pour progresser, pour entrer dans une nouvelle octave, de nouvelles structures, lui permettant d’appréhender un autre champ énergétique, le Heith, le 8, se présentant comme le Gardien du Seuil de ce nouveau champ qu’il ouvrira à l’homme qui aura su dire le mot de passe. Avec Phénous nous retrouvons un peu cette idée. Là aussi il s’agit d’un organe du corps ainsi qu’il en est fréquemment le cas dans le plan des dizaines. Que signifie la bouche pour les Hébreux ? Elle est tout un ensemble vocal. Nous avons été créés par le Verbe Divin et vivre dans ce Verbe Divin, c’est entrer dans une libération. Le Phé, c’est l’idée du Verbe qui nous est donné par la Tradition, du Verbe que nous sommes en devenir. C’est toute la Tradition que nous apporte le Phé et qui en soi est une barrière. Elle est une barrière parce que notre langue est symboliquement liée à l’Épée. L’homme procréateur par le sexe doit devenir créateur par le Verbe dans la dimension duquel nous avons à entrer. Nous ne faisons encore que balbutier, ignorant que notre Verbe est créateur souvent de vie et de mort. Nous sommes des êtres encore coupés de nous-mêmes, ignorant nos possibilités, notre potentiel qui est immense. L’épée est l’archétype qui va s’exprimer d’une part par le sexe masculin et d’autre part par le Verbe. C’est l’épée à double tranchant qui vivifie ou qui tue selon que l’homme en ait acquis les structures ou non. Le graphisme de cette lettre Phé est au départ une bouche qui, par la suite se stylise et qui donnera un peu la forme du Phé et qui sera à l’origine du Phi grec. La lettre Phé est venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il, se réclamant du mot PEDOUT qui veut dire délivrance. Et, en effet le Phé est essentiellement liée à la notion de délivrance, de libération, d’ouverture à la Loi qui est un dépassement lorsque celle-ci a été intégrée. Le Christ a dit : « Je ne suis pas venu pour abolir la Loi, mais pour l’accomplir ». L’accomplir, c’est l’ouvrir aux différents octaves auxquels elle se propose à travers un texte. Les Hébreux disent que la Thora peut être lue sur soixante-dix plans, symboliquement, naturellement. Cela veut dire qu’elle peut être lue à bien des niveaux de lectures qui correspondent à différents niveaux de conscience. C’est cela l’ouverture de la Loi. Mais pour transgresser un niveau pour en aborder un autre, l’homme a besoin de beaucoup de courage. Car pour ceux qui ne peuvent le suivre dans son évolution il va passer pour un être abominable, incroyant. On va le montrer du doigt. Mais lui, il a reçu cette information intérieure qui va lui permettre d’aller plus loin.
Et le Saint-Béni-Soit-Il renvoie la lettre en disant : « Non, tu ne présideras pas à la création du monde, parce que tu commences le mot PESHA, le péché. Ce n’est pas possible qu’une lettre qui commence un tel mot préside à la Création. Le mot PESHA actuellement veut dire « une marche, une progression ». Et lorsque ce pas se fait dans les conditions que nous venons de dire, la progression doit passer par la transgression. Le mythe de la chute est une transgression non juste qui a fait le drame de l’humanité en la remettant à zéro pour qu’elle reprenne le chemin. Lorsqu’elle est juste, c’est aussi le mot PESHA. L’Apôtre Paul l’emploie lorsqu’il parle de la Loi. Quand il n’y a plus de loi, il n’y a plus de transgression. C’est la situation dans laquelle nous sommes actuellement. Nous sommes dans un monde de lois morales, sociales, car nous vivons dans une jungle qu’il faut bien ménager ; mais cette loi est faite pour un monde infantile. Quand on prend conscience de cela, un jour vient où on est bien obligé de transgresser en sachant que c’est juste. Sans cela nous sommes dans le PESHA. C’est l’histoire du Christ lorsqu’il transgresse le jour du Shabbath, quand, passant avec ses disciples le long d’un champ il voit un homme qui y travaille. C’est le jour du Shabbath. Les disciples sont scandalisés. Mais le Christ s’adresse à cet homme en lui disant : « Homme, si tu sais ce que tu fais, tu es béni par mon Père. Mais si tu ne sais pas ce que tu fais, tu es transgresseur de la Loi et tu es maudit de mon Père ! ». Ce texte est tellement immense qu’il a été supprimé des Évangiles ! On ne transgresse pas impunément, voilà en quoi le Phé est aussi une barrière. PAH est un mot qui vaut 88, il veut dire « filet ou le piège ». Avec ces deux 8 nous sommes saisis dans le piège ou alors au contraire, nous passons, nous traversons. Mais nous ne pouvons passer que dans un dépassement des contradictions qui sont en nous. Et quand nous avons au milieu de ce mot le Tav qui veut dire « signe » et précisément « signe de la Croix » dans toutes les traditions, cela donne le mot PATOM qui signifie « ouvrir » et aussi « la porte », nous trouvons le symbole de l’incarnation qui est essentiellement la Croix, puisque nous sommes crucifiés entre le chemin vers le Divin, et toutes les énergies dont nous sommes faits à chaque niveau de réalité. L’homme est au centre de la croix. Et le mot PATOH, ainsi formé et qui signifie « ouvrir » et aussi la « porte », nous ramène au Daleth qui a pour valeur 4 et qui aussi veut dire la « porte ». Le 4 est toujours un arrêt, une porte qui est proposée et qu’il faut ouvrir. Le mot PESSAH qui est la Pâque avec un Samek qui a pour valeur 60, c’est le soutien, c’est l’arbre, c’est la hampe du drapeau, le mât du navire. Nous trouvons dans PESSAH un peu la même idée que dans PETAR qui est « le passage ». L’Égypte pour les Hébreux était un piège. Or il y a un moment où Moïse se dresse, la personne pensante qui est le pôle d’évolution que nous avons tous en nous à partir du moment où nous cherchons la libération. Nous avons tous un Moïse en nous et aussi un Pharaon qui s’oppose. Mais nous sortons de cette servitude, de ce piège et c’est la Pâque. La pâque chrétienne, c’est la même idée, mais à un autre niveau.
Nous passons au mot PÉLÉ, le miracle, la chose merveilleuse qui rend compte de notre vraie nature. Nous pourrions le traduire mot à mot par « la bouche de l’impossible », Lo étant la négation du mot divin retourné. El. C’est l’ouverture au niveau du Divin, le dévoilement des mystères. Mais Lo est aussi la négation « pas ». Dans la profondeur le oui et le non sont la même réalité au niveau de ce nom divin qui est au-delà de toutes les contradictions, au-delà de l’être et du non-être. Ce sont les mêmes lettres, donc les mêmes énergies. Lorsque Dieu se révèle à Moïse dans le Buisson Ardent en tant qu’Il Est, Il se limite, car nous ne pouvons l’appréhender que dans une limite. IL EST et IL N’EST PAS, si bien que ces deux mots El et Lo sont une même réalité. Alors PÉLÉ c’est l’ouverture du Divin, de l’impossible, ouverture du « non », « non ce n’est pas cela, c’est bien au-delà de cela ». Et ce miracle, cette chose merveilleuse, c’est tout simplement l’ouverture à notre vraie nature. Le Phé y préside. PETEROM, c’est Pierre, l’Apôtre, celui qui ouvre la lignée. C’est celui qui a été choisi le tout premier avec son frère André. Il y a autour de ce mot un immense malentendu. Lorsque l’Apôtre Pierre répond à la question du Christ : « Et vous, qui dites-vous que je suis ? » — « Tu es le Christ, fils du Dieu vivant ». Le Christ lui dit : « Ce n’est pas par ton intelligence que tu as répondu cela, mais par une lumière de l’esprit en toi. Tu es pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église. » Les mots sont « Tu es EBEN, pierre ». Tu es Eben, tu es une pierre dure, parce que tu participes à la construction du Royaume et sur cette pierre (qui est encore un autre mot : SELA avec un Samek qui nous fait retrouver « le trône divin ») donc sur cette SELA, c’est-à-dire le fondement : « Tu es EBEN et sur cette SELA je bâtirai mon Église ». Ce n’est qu’en français, autour de l’an 1000 que ce jeu de mot a été fait et qui a eu pour résultat que l’Apôtre Pierre et ses successeurs ont été considérés comme la base de l’Église. Ce fut une des causes en 1054, de la séparation de l’Église d’Orient et de l’Église de Rome. Les Apôtres sont à l’image de la Trinité, comme d’ailleurs aussi l’humanité, où l’un n’est pas plus grand que l’autre, mais égalité absolue entre tous. La lettre TSADE que nous approchons maintenant est l’initiale d’un mot qui s’écrit : TsadéDaleth-Yod. Ce mot rend surtout compte d’une racine TSAD que nous allons retrouver dans beaucoup de mots et qui veut dire : « le côté ». Nous la trouvons dans TSOUD, TSADOH, TSODED qui signifient épier, pécher, dresser des embuscades, chasser. C’est la notion de harponner, d’aller chercher une proie, d’aller piéger quelque chose. En général lorsque nous considérons ces significations nous y voyons de la malice, tandis que là nous sommes devant une réalité qui dépasse absolument notre plan de conscience, car il s’agit du harpon divin. Et je pense particulièrement à cette phrase que nous trouvons, je crois, chez Isaï, lorsque Dieu dit en parlant de l’humanité, sa future épouse qu’Il va l’emmener au désert, il va l’épier, la saisir, pour qu’Il mette en Lui son plaisir et qu’elle devienne Son épouse. C’est cela qui est la racine de cette idée fondamentale du TSADE. C’est vraiment le harponnage de nos derniers éléments dans la profondeur. Dieu va se harponner en nous. Ce n’est pas par hasard que le Christ a cherché ses
premiers apôtres parmi les pécheurs, afin qu’ils aillent chercher dans l’homme le divin qui est en lui. Le discours qui s’engage entre la lettre et le Saint-Béni-Soit-Il est très signifiant. La lettre vient se présenter en se réclamant de commencer le mot TSADOCH, c’est le mot qui veut dire : le Juste. Melchitsédech est le Roi de la Justice, c’est-à-dire de la « justesse », de l’harmonie entre les deux opposés. Job est Tsedech, Noé est Tsedech, tous ces êtres qui sont justes. Et Dieu renvoie la lettre en lui disant : « Il ne me convient pas de me servir de toi pour opérer la création du monde, attendu que tu dois être cachée pour ne pas donner prise à l’erreur. Car ta forme primitive est un Noun oblique, principe femelle, sur lequel vient s’ajouter un Yod, principe mâle. » Voilà la forme initiale du Tsadé et tel est le mystère de la création du premier homme : il fut créé à double face, deux figures tournées en sens inverse, dos contre dos. Et c’est pourquoi le Yod est présenté de dos et non de face. « Toi aussi, dit Dieu, tu seras un jour divisé en deux, mais tu vas autre part. Ce qui est à retenir, c’est que le Tsadé est fait de cette rencontre du Noun et du Yod, principe féminin et masculin. Ces deux lettres sont absolument inséparables et constituent ce fameux masculin et féminin d’Adam qui est Yod et Isha (qui n’est appelée Ava qu’après la chute) qui est son Noun, son poisson, sa profondeur et en même temps, le germe du Yod. C’est le mystère de l’ombre que représente le féminin par rapport à l’homme et de l’ombre qui est la Création toute entière par rapport à Dieu. Notre travail c’est d’amener le Noun au Yod pour réaliser la totalité de la Création. Le Tsadé c’est cette lettre au niveau du 80 qui réalise une totalité accomplie, à l’exception de ce dernier germe divin que nous avons à amener au Yod. C’est cette ultime pêche. Rien d’étonnant alors que Tsadé préside à des mots, non seulement comme Tsad qui veut dire « un côté » (qui appelle l’autre côté), mais aussi à la racine TSEL qui veut dire l’« ombre », c’est-à-dire l’ombre à sa source qui est précisément le Noun par rapport au Yod. L’homme, c’est-à-dire homme et femme, est l’ombre de Dieu. Nous sommes comme l’ombre d’un Dieu qui est parfait, mais qui est encore — on peut presque dire — inachevé, tant que nous ne sommes pas retournés à Lui. Dieu se fait mâle, le mot souvenir c’est le mot mâle, pour descendre dans son ombre, principe féminin. Un participant : Quelles sont les voies qui permettent de retrouver son origine, afin d’accéder à Dieu ? A. de Souzenelle : Chacun a sa voie, il n’y a pas une voie unique. Ces voies peuvent être tout à fait différentes, mais elles se retrouvent toutes à un moment. Et puis elles peuvent changer au cours de la vie. Il est important de trouver son guide intérieur, ce Lamed qui va devenir Tsadé.
Mme Langevin : La Bhagavad Gîta dit qu’il ne faut jamais emprunter la voie d’un autre, mais qu’il faut trouver la sienne propre. Le participant : Je pensais particulièrement à l’inconscience… A. de Souzenelle : La descente dans les profondeurs ! Il y a toutes les techniques de descente à l’intérieur de nous-mêmes avec tous les processus analytiques que l’on commence à vivre en occident. Mme Langevin : Je pense qu’il est important de faire taire son mental qui s’oppose à tout parce qu’il est toujours une volonté personnelle, et de laisser venir l’intuition, recevoir l’information. F. Catala : Autrement dit dans la méditation… A. de Souzenelle : Si l’analyse devient mentale, elle est complètement faussée. Il faut casser tout ce cadre mental pour entrer dans l’information des profondeurs. C’est pour cela que le rêve est tellement important. Pour certains une de ces voies de départ sera le chant, le chant grégorien, par exemple. Il casse toute fausse structure et fait jaillir de nous des énergies fantastiques. Une participante : C’est la voie des mantras. A. de Souzenelle : A condition qu’elle ne soit pas mentale. Je voulais encore vous montrer le NETS, c’est le mot qui veut dire « arbre », c’est important parce que notre être tout entier est vraiment structuré sur l’arbre. Le mot ETSEB est le mot employé dans la Genèse quand Dieu dit : « Tu enfanteras dans la douleur ». Le mot douleur est aussi le mot « travail ». Mais attention ! Il ne s’agit pas tellement de mettre des enfants au monde, que de mettre au monde notre Yod. Le Tsadé est ce harpon qui va dans les profondeurs, qui traverse AV, le nuage dont on peut dire ici qu’il est le dernier, l’enfantement, la mise au monde. Et c’est en même temps la construction de l’arbre. C’est vraiment le travail de l’humanité qui construit son arbre. Le mot ETSEM veut dire « l’os, le squelette », tout cet arbre du corps. C’est aussi le mot employé par les Hébreux lorsqu’ils veulent parler de la partie la plus intime d’eux-mêmes, quand ils veulent dire : au cœur de moi-même, ETSMI, c’est-à-dire dans mon os. C’est la moelle de l’os qui est quelque chose de mystérieux même au point de vue physique, puisqu’elle contient toutes les réserves des noyaux des cellules du sang. C’est ce qui est absolument indicible, parce que c’est le Soi. Compte rendu de la rencontre du 10.1.1980
Plus nous avançons, plus les lettres sont chargées et plus nous pouvons appréhender cette langue extraordinaire. Nous approchons aujourd’hui une autre lettre fort importante, le QOF qui a pour valeur 100. Cela nous met évidemment en harmonie avec la lettre qui a pour valeur 1, c’est-à-dire le Aleph, le Yod qui a pour valeur 10 et même le Aleph final qui pour valeur 1000. Nous entrons à nouveau dans l’unité. Entrer dans l’unité avec le 100 est une chose difficile à appréhender parce que nous pénétrons dans des qualités intérieures qui nous échappent de plus en plus. Si nous n’abordons pas cette lettre avec des mains purifiées, nous pourrons être scandalisés au niveau de notre entendement immédiat. QOF a plusieurs significations. D’une part il veut dire « le singe », le petit animal curieux et très étrange. Et d’autre part il veut dire ou plutôt c’est QOFITS qui veut dire « la hache », « le hachoir », mais aussi « le chas de l’aiguille ». L’hiéroglyphe de la lettre est une hache double, la fameuse hache de Cnossos. Puis la lettre se penchera de côté et elle donnera en français notre lettre Q. C’est pour cela que les mots qui commencent par un QOF en hébreux, ne devraient pas s’écrire avec un K ; comme par exemple Qabale dont l’orthographe devrait être celui-ci. Le K correspond au KAPH, le creux de la main. Même si nous ne nous en rendons pas compte tout de suite, il y a pourtant une correspondance étroite entre les significations du QOF, recouvertes par une seule énergie. Quel est le symbolisme du singe dans les différentes traditions ? Le monde animal est un monde extrêmement signifiant. Or le singe, si nous faisons la synthèse du symbole qu’il représente, c’est la sagesse, mais une sagesse qui nous dépasse tellement, que ce sera sous les facéties du singe que nous allons être obligés de l’appréhender, sous cette espèce de singerie qui aide à faire passer un message. L’humour est un peu le symbole de cette vraie sagesse qui peut être scandaleuse pour nous, parce qu’elle est tellement folie à nos yeux. Comme a dit l’Apôtre Paul : « La sagesse de Dieu est folie pour les hommes. Et si tu crois être sage selon le monde, deviens fou. Alors tu entreras dans la sagesse divine ». L’homme totalement accompli, SAKOL, c’est aussi le mot qui veut dire « le fou ». Le Prophète, celui qui voit les cieux ouverts et non celui qui lit dans l’avenir, commence à être cette folie-là. Là il n’y a plus de temps, on est dans un non-temps aussi bien que dans le passé, le présent et l’avenir. Dans tout l’Orient, ce petit singe représente la sagesse sous forme de trois petits singes dont l’un se bouche les yeux, l’autre la bouche et le troisième les oreilles. C’est le symbole de celui qui ferme ses sens à l’appréhension du monde extérieur pour entrer dans un monde intérieur. C’est cela la vraie sagesse. Il ne s’agit pas de nier le monde extérieur, il nous sert de tremplin, mais il faut que nous allions au-delà, dans un monde beaucoup plus subtil. Chez les Hébreux, qui est le Sage par excellence ? C’est Salomon de réputation mondiale, à tel point que la mystérieuse Reine de Saba va venir non pas pour une visite de royaume à royaume,
mais pour vérifier cette sagesse. Et quand elle l’a vérifiée, elle s’incline devant Salomon et elle dit : « Véritablement, celui-là est le plus sage de tous les sages ». Et à partir de ce moment-là, tous les ans elle lui fait envoyer des cadeaux qui consistent en de l’or, de l’encens, de l’ivoire, des singes et des paons. Ce sont les cinq attributs de la sagesse. L’ivoire, c’est la dent de l’éléphant, et l’éléphant est aussi symbole de sagesse. En Inde, Ganesha est ce dieu-éléphant qui monte un rat. D’après notre sagesse ce serait plutôt le rat qui monterait l’éléphant ! Mais là tout est inversé. Le rat est symbole de l’intelligence subtile qui s’immisce partout, qui va prendre connaissance de tout. Or sagesse et intelligence sont inséparables. Ce sont les deux Séphiroth qui sont à la base du triangle supérieur de l’Arbre des Séphiroth. Toute intelligence nous conduit à une sagesse et une intelligence divine nous fait entrer dans une sagesse divine. Et Ganesha est celui qui pénètre, grâce au rat qui l’accompagne, les éléments les plus subtils du monde et qui incarne cette sagesse qui dépasse tout. Il est intéressant de faire se rejoindre les paons et les Chérubins qui, dans la symbolique chrétienne, sont représentés par de grandes roues avec des yeux tout autour. Le paon est exactement comme cela. Les Chérubins sont des Archanges qui gardent le Jardin d’Éden, la dernière porte. Et tout se retrouve dans le symbole du chas de l’aiguille qui est aussi la dernière porte. C’est grâce à notre énergie intérieure que nous allons passer par les portes successives du QOF qui est le chas de l’aiguille, la dernière porte. Cette lettre aussi est allée trouver le Saint-Béni-Soit-Il pour prétendre commencer la création du Monde, en se basant sur le mot QADOSH qui veut dire « le Saint » et elle a été renvoyée, parce que, dit le Saint-Béni-Soit-Il, « tu fais partie du mot SHEQER qui veut dire « mensonge ». Le QOF est entouré par le SHIN et le REICH qui, réunis, forment le nom de SARAH, SAR étant le prince ou la princesse. Qu’est-ce que cela veut dire par rapport au mensonge ? C’est là que nous pénétrons dans le scandale, car nous ne pouvons appréhender le mensonge que si nous comprenons que la vérité est absolument inappréhendable. Ce n’est qu’à travers des morts et des résurrections successives que nous pouvons aller vers la vérité. Ce qui est vérité pour nous aujourd’hui sera mensonge lorsque nous aurons franchi un nouveau pas vers une autre vérité. La vérité est au-delà de la vérité et du mensonge et pour le comprendre il ne faut pas que nous restions enfermés dans notre petit plan de conscience actuel. C’est dans cette perspective que nous abordons aussi le problème de la ruse. Le Christ Lui-même va louer l’économe infidèle et dire : « Ah ! si les enfants de lumière étaient aussi rusés que les enfants des ténèbres ! » Cette ruse nous pouvons un peu la comprendre grâce au Tsadé, l’hameçon. Quelle ruse qu’un hameçon pour aller chercher un poisson ! Pour nous c’est la même chose : il y a une ruse dans l’hameçon qui nous est tendu pour que nous avancions plus loin. Et la toute première ruse est celle du serpent en Éden. Le mot AROM employé dans la Bible signifie à la fois « la ruse », « la connaissance » et aussi « la nudité ». La nudité, c’est la connaissance
totale, c’est le parfait miroir de la connaissance divine. Et le serpent, « le plus rusé de tous les animaux », sait parfaitement le chemin que l’homme et la femme ont à accomplir et il va se faire barrière sur ce chemin. C’est là toute l’histoire de la chute. A. de Souzenelle nous cite quelques exemples de ruses « fécondes » : Jacob et le droit d’aînesse, Tamar qui met au monde l’enfant engendré par son beau-père ou plutôt les jumeaux dont l’un, Peretz, sera l’ancêtre du Christ. Quand on dit que « Dieu sonde les reins et les cœurs », le QOF est encore présent dans le mot HAQOR qui signifie « sonder ». Cette sagesse c’est la sonde divine, c’est elle qui nous alimente qui nous nourrit. Dans HAQOR, les deux lettres qui entourent le QOF forment le mot HOR qui veut dire « caverne ». La sonde, c’est la descente dans la caverne. On retrouve le QOF dans le mot MAQOM, le « lien » et qui est aussi un des noms de Dieu. Quand après la séparation des eaux du bas et ensuite de ceux d’en-haut, Dieu dit : « Que les eaux se rassemblent dans un lieu UN : EL HAQOM ERAD, quel est ce lieu dans le complexe espacetemps ? C’est le symbole extérieur du lieu intérieur, de notre espace intérieur, de notre champ de conscience, de ce dernier lieu que nous avons à atteindre, le MI divin où il n’y a plus ni temps, ni espace. Dans RAQIA dont il est question le deuxième jour, lorsque Dieu sépare les eaux d’en-haut et qui signifie « étendue » le QOF au milieu est entourée par le Reich et le Ayin qui, en formant le mot Ra que nous traduisons à tort par « le mal », signifie ce qui est encore dans la ténèbre. Toute création a pour but de faire émerger la ténèbre dans la lumière et c’est cette étendue qu’on appelle CHAMAIM où le mot MAIM, les eaux, est reconstitué. Le vrai nom de Jacob est YAAQOV. Ce mot est formé sur le mot AQOB, le talon. Or le talon est un endroit extrêmement important dans le corps, il est symboliquement celui qui contient toutes les énergies. Et c’est pour cela que Jacob à sa naissance et à celle de son frère Esaü, tient dans sa main le talon de ce dernier, c’est-à-dire qu’il va prendre en main toutes les énergies qui sont en réserve dans le talon de son frère. Et pour cela il va passer par la ruse. Dans le mot AQOB, QOF perce le AV, le nuage, c’est-à-dire les voiles qui nous séparent de la lumière, qui nous séparent du Père, lorsqu’on l’écrit non avec un Ayin, mais un Aleph. Un autre mot à connaître est QABALE qui vient du mot QABEL, « recevoir ». QAB veut dire un contenant que nous retrouvons, venu de l’arabe directement de l’hébreu, dans notre mot « Cabas ». C’est le ventre, c’est la matrice et QABEL qui s’écrit avec un Lamed, signifie que tout est mouvement, c’est recevoir. Alors la QABALA des Hébreux, c’est le contenant de la Tradition, qui s’est identifié à la tradition.
En supprimant la lettre du milieu, nous obtenons QOL, la voix divine qui va parler et qu’il ne faut pas confondre avec Kal qui est le tout, la totalité. Nous parlerons du mot QEDER, l’Orient et aussi l’éternité, quand nous étudierons le Mem final. Dans Qedam nous avons QOM, le verbe venir dans un sens très fort, qui veut dire se dresser et qui est employé pour exprimer la résurrection. La prochaine fois aussi je vous parlerai lorsque nous étudierons le REICH, d’un mot qui est fait avec le QOF : NIQBA, mot très important qui veut dire « femelle ». Ce soir nous avons touché une lettre de grande importance, une de celles qui commencent à nous dépasser. Nous sommes encore dans une toute petite intelligence des choses. L’intelligence divine dépasse tout, de même que la sagesse à laquelle nous sommes invités à participer. Nous recevons la vérité qu’en tant que nous pouvons la supporter et à chaque fois que nous la supportons, nous allons plus loin, vers d’autres vérités non encore atteintes. Nous parlons aujourd’hui de la lettre REICH qui a pour valeur numérique 200 et qui est l’initiale du mot REICH qui veut dire « la tête », quoiqu’il y ait dans sa signification beaucoup de subtilité, car il s’agit surtout d’une notion de principe, de princeps, de tête essentielle. Une fois de plus il est question d’une partie du corps. Au début le graphisme de la lettre était une tête d’un petit bonhomme barbu qui s’est stylisé par la suite à plusieurs reprises. Puis elle s’est retournée et a donné l’ancêtre de la lettre grecque RO et celle de notre R. Le premier mot de la Bible est « Berechit » qui a donné son nom au Livre que nous appelons la Genèse. Les Hébreux disent que le mot Béréchit contient tout l’enseignement de la Thora et que même sa première lettre contient tout le premier mot. Le centre du mot Béréchit que nous étudierons avec le Shin et le Tav, est REICH. Pourquoi le traduisons-nous par « principe », plutôt que par la formule de la Bible, au commencement ? Parce que dans ce dernier cas nous introduisons une notion de temps, de temps historique et nous sommes alors en plein contre-sens qui nous fait ouvrir le Béréchit sur une notion d’histoire temporelle, alors que les premiers chapitres de la Bible sont à-temporels. Nous sommes dans le monde des principes, au-delà du passé, du présent et de l’avenir, Il Est. C’est une histoire qui rend compte d’une Réalité qui échappe à notre conscience immédiate. Nous sommes davantage dans une notion de principe que de commencement, principalement en ce qui concerne l’homme. Et c’est ce que ne vont pas faire les scolastiques en disant que l’homme a un commencement. Or l’homme n’a pas de commencement, il est créé de toute éternité, sa dimension est éternelle. Notre existence, entre la naissance et la mort n’est qu’une toute petite partie de nos avatars. Cette notion, nous l’avons complètement perdue. Dieu à un certain moment dit à Job : « Où étais-tu
lorsque je mettais une racine aux montagnes, où étais-tu lorsque je formais la terre ? Tu étais là, car le nombre de tes jours est incomptable, est infini. » L’homme et la création sont créés de toute éternité, nous plongeons là dans un non-temps. Ce ne sont que nos avatars, à travers nos différents plans de conscience qui sont liés à un temps, à un espace-temps, à un espace intérieur. Mais le jour où nous aurons fait toute l’évolution que nous avons à faire dans les profondeurs de notre être, nous retournerons à ce non-temps. Nous sommes appelés à entrer dans cette dimension d’éternité, dans cette vraie tête. Pour le moment nous avons une tête très limitée sur nos épaules, qui est enfermée dans la petite prison du plan de conscience auquel nous participons. Le travail que nous avons à faire, c’est de mettre successivement de nouvelles têtes sur nos épaules, c’est-à-dire d’acquérir une intelligence qui pénètre de plus en plus le sens du divin et qui va donner un sens à la vie. C’est le symbole de tous les mythes de décapitation, et même d’événements historiques dans leur dimension mythique, comme par exemple Saint Jean-Baptiste. Il est vraiment le vieil homme par rapport à Saint Jean l’Évangéliste, celui qui mettra sa dernière tête sur ses épaules et qui ne doit plus mourir. Le mot REICH est formé de trois lettres comme la plupart des mots hébreux qui, en général, sont trinitaires : le Reich, l’Aleph et le Shin. La lettre Reich signifie donc principe, mais principe de quoi ? ECH veut dire « feu ». Dans l’Arbre des Séphiroth nous étions au niveau des pieds dans toute la symbolique de la terre, au niveau des reins dans la symbolique de l’eau, au niveau des oreilles dans la symbolique de l’air et au niveau de la tête toute entière, nous sommes dans le feu. Mais, à vrai dire, c’est tout le corps qui est saisi dans cette réalité feu, c’est toute la montée de la sève dans l’Arbre que nous sommes et qui s’épanouit au niveau de la tête. Le niveau feu est aussi dans les talons, voyez l’histoire de la naissance de Jacob qui tient dans sa main le talon de son frère. Le feu est aussi le principe de l’intelligence, non pas de l’intelligence intellectuelle, mais celle qui pénètre par la contemplation, la méditation, la prière, par une ouverture à la vision intérieure dans les mystères divins qui ne sont qu’une autre facette des mystères de l’homme, les deux pôles d’une même réalité. Si l’on supprime le Aleph, les deux lettres qui restent, Reich et Shin indiquent la notion de pauvreté. L’Aleph, les cornes qui captent l’information, se fait pauvre. Pour que l’homme accède à sa dernière réalisation, il faut que lui-même fasse sa dernière circoncision qui est celle de tous les encombrements intellectuels, psychiques, de tous ces plans de référence encore sécurisants, jusqu’à arriver à la non-connaissance absolue. Voilà la pauvreté, c’est la dernière naissance. Une participante fait le parallèle avec la plénitude du vide bouddhiste ou encore avec la Nuit obscure de Saint-Jean de la Croix.
Le Roch, le pauvre, retourné donne le mot SAR, la principauté. Les mêmes mots sont donc, selon le rapport des lettres entre elles, soit la pauvreté, soit la principauté, totale réalité, deux pôles en apparence contradictoires, mais qui sont la même réalité. Voilà la beauté de l’hébreu. Dans le mot Or, se rencontrent l’Aleph et le Reich unis par Vav. Nous en avons déjà parlé avec la lettre Ayin, en montrant que Or, écrit avec un Ayin à la place de l’Aleph, signifie la tunique de peau qui est celle revêtue par l’homme après la chute et qui ne fait que cacher la lumière que nous sommes et que nous recouvrerons lorsque nous aurons mis la dernière tête sur nos épaules. Si nous regardons ce mot Or de plus près nous voyons qu’il est fait de la rencontre au niveau du Vav qui est la conjonction et aussi l’homme, avec le Aleph, la puissance divine créatrice et la réceptivité. Dans le Reich, la tête, nous avons la réceptivité de la Création et même la résistance, car il ne peut y avoir de lumière s’il n’y a pas de résistance pour la recevoir. Cela est vécu sur tous les plans et particulièrement au niveau de l’affrontement. On n’avance qu’à travers la contradiction. C’est ainsi que devraient vivre les couples. Ils sont formés d’êtres différents ayant des vues différentes. Si ces couples étaient adultes, au lieu de bagarres qui souvent se terminent par des divorces, les avis contradictoires seraient générateurs d’une évolution, parce que la vérité est toujours au-delà de la contradiction. Dans le mot AROR qui s’écrit avec deux Reich, nous sommes devant le mot qui veut dire malédiction, en particulier la malédiction après la chute. Elle est dans le redoublement de la résistance. Il n’y a lumière que quand il y a un juste rapport entre l’émicivité et la réceptivité. Nous avons là une ouverture extrêmement importante sur ce qu’il est convenu d’appeler la malédiction après la chute. C’est notre attitude intérieure qui n’est pas juste et non une punition d’un Dieu extérieur. En réalité il s’agit de la résistance opposée à la lumière qui provoque une rupture d’équilibre. Nous entrons dans la ténèbre. Nous avons aujourd’hui encore à revoir notre attitude intérieure. C’est toute la signification et le but de notre vie terrestre de retrouver le rapport juste. Le mot BERERAH veut dire l’élection. Il n’est pas le seul à avoir cette signification, mais il est le plus courant. Le Beith, c’est la Création toute entière, c’est un peu l’image de ces têtes successives que nous mettons sur nos épaules. Dans cette image je vois le signe de l’élection, à savoir : celui qui se met en marche. Que signifie la notion de « peuple élu » ? Il est convenu de penser qu’il y a une élection par Dieu du peuple. Mais ce n’est pas à sens unique, chacun de nous participe de ce peuple et nous aussi nous entrons dans l’élection si nous choisissons les épousailles avec Dieu. Dieu épouse sa Création, c’est le rapport entre le Aleph et le Beith. Et celui qui se met en marche, (BO le mot pénétrer), c’est celui qui choisit l’Aleph final, le couronnement, le mariage de l’incréé et du créé. Et dans ce cas il participe du peuple élu. Le peuple hébreu est le peuple choisi comme prototype de toute l’évolution de l’humanité. Ce qui arrive aux Hébreux est vraiment ce qui arrive à toute l’humanité successive. Nous sommes tous dans la profondeur, des Hébreux et si nous entrons dans ce choix, car l’élection est un choix,
nous commençons à mettre sur nos épaules ces têtes successives, jusqu’à celle qui est totalement informée. Nous sommes celui qui passe, EDER, celui qui va traverser son désert jusqu’à passer sa dernière porte qui est le QOF (le chas de l’aiguille) qui correspond à l’intégration à la Sagesse divine, à la déification. Le très beau mort BAR veut dire d’une part « le grain de blé » et d’autre part « la pureté » et encore « le fils ». Quand un Hébreu fait sa « Barmitzva » il entre dans cette dimension de fils qui est encore grain de blé. Il faut qu’il devienne BEN, le vrai mot pour fils. Ce grain de blé va mûrir en terre pour renaître et ceci plusieurs fois, jusqu’à ce qu’il entre dans la dimension de l’homme qui est Fils de Dieu. BAR est un des plus beaux mots, ce sont les deux premières lettres du Béréchit que nous verrons plus tard. Ils ont pour valeur 2 et 200 qui sont justement ce « toi » par rapport à « moi » et c’est aussi toute la notion de purification, non sur le plan de la morale, mais sur le plan de nos têtes successives. Et dans cette perspective il est intéressant d’étudier le nom de BARABBAS qui fut libéré à la place du Christ. C’est le nom qui veut dire : « Fils du Père » (Bar : fils, Abas : mot du vieil hébreu qui veut dire le Père). Il y a là un jeu de balance le Fils du Père doit mourir pour que le fils du père — le malfaiteur qui est Barabbas — soit libéré. Que signifie symboliquement le malfaiteur ? C’est l’humanité qui entre dans la chute. Nous sommes tous prisonniers de nous-mêmes prisonniers de tout. Et puis, au fur et à mesure que nous allons mourir pour ressusciter, nous allons libérer ce grain de blé. Le Christ en effet doit passer par cette crucifixion, par cette mort et résurrection. Nous allons retrouver cette racine BAR dans un autre mot essentiel de la Genèse, BARA. C’est le verbe qui veut dire « créer ». Nous entrons en plein dans notre Création. Ce BEITH, l’altérité, c’est toute la Création symboliquement qui entre dans la lumière, dans la lumière qui sort de la ténèbre. Et c’est aussi, en même temps cette tête, ce principe, qui va vers l’Aleph final, vers la Terre Promise. Le mot GUER veut dire « l’étranger ». Qu’est-ce que la Création, si ce n’est « de faire autrement », « faire différence ». Et apparemment contradictoirement, c’est aussi le mot qui veut dire : « habiter », le verbe LAGOUR. Au fond nous n’habitons qu’une terre étrangère. Ainsi il n’a jamais été dit que Job habitait la terre de Uts mais il est de la terre d’Uts. Alors qu’est-ce que la Création sinon l’habitation divine ? Dieu par l’altérité pose l’autre, et l’habite. Toute la Création est une séparation jusqu’au dernier jour de la Création où nous avons la séparation de l’homme et de la femme, du féminin et du masculin plus exactement. Et lorsque Abram va être invité à aller vers la Terre Promise — début du départ d’Israël — l’ordre divin sera : « Va, quitte ton pays ! » C’est le commencement de la création de l’homme retournant à Dieu. Il y a un autre mot dans lequel nous retrouvons BAR, c’est le mot DABAR, le verbe. DAVER, c’est le verbe « parler ». Comment est formé le mot DABAR ? BAR, le grain de blé, retourné forme RAV, la multiplication. C’est la racine du mot RABBI, le maître, le supérieur, c’est-à-dire
celui qui est entré dans cette multiplication après avoir assumé la croissance, et le RABBIN est celui qui est censé avoir atteint cette multiplication, non pas seulement la connaissance de la Thora, mais par l’intégration dans sa vie personnelle de tout le mystère que contient la Thora. Alors dans le mot DABAR nous retrouvons la racine BAR ou RAB si nous le prenons dans l’autre sens et nous voyons que la lettre centrale est BEITH. Il s’agit toujours de la Création puisque Beith a été la première lettre qui ait reçu du Saint-Béni-Soit-Il, la grâce de présider à la Création. Et cette Création est aussi la racine DOR (Daleith-Reich), c’est la racine qui va exprimer le cycle : la Création est prise dans les cycles. C’est par le Verbe que la Création est faite toute entière. Qu’est-ce que le Verbe créateur ? C’est le son primordial, la vibration sur laquelle tout va être moulé. Chacun de nous aussi est modulé sur un son qui lui est propre et qui est participation au Verbe Divin. Toute notre recherche est la recherche du Nom, c’est-à-dire de cette origine que Job va aller chercher dans les profondeurs des racines de la terre. C’est le Beith qui est posé dans ce mouvement vibratoire qui est le cycle, DOR, qui va faire le mot DOROT, exprimant la notion de « génération » et qui, extrapolé à l’extérieur, signifiera le temps. Chaque élément de notre corps est en même temps sur le plan physique et sur des plans subtils, ce sont des agencements vibratoires. La nature est vibratoire, la lumière aussi en partie. Nous retrouvons là aussi le mot DAR, l’épine, qui est aussi la notion du temps. Des poètes ont parlé de « l’épine du temps », car le temps est une souffrance, il est dur pour nous. Nous courons toujours après le bonheur, inconsciemment, croyant que l’instant d’après va nous l’apporter. Au lieu d’entrer dans le DOR intérieur, nous sommes dans le DOR extérieur. Le mot « ronce » c’est DAREDAR, c’est l’entrée dans le monde de la répétition absolument contraire à DOR, la spire divine qui nous fait entrer dans le non-temps où nous retrouvons notre nom et où nous entrons dans la déification. La même racine (Daleith-Reich) se trouve dans le mot RADO, dominer sur… C’est l’ordre qui est donné à l’homme « Tu domineras sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel… » C’est-à-dire « tu intégreras toutes ces énergies, tous ces plans de conscience qui sont le substratum même de nos champs de conscience différents. C’est le verbe RADO qui implique d’entrer dans ces cycles, d’assumer les spires successives, de les intégrer. Par dominer sur les poissons de la mer, etc., dans cet impératif, Yiredou nous entrons dans une autre réalité qui est le mot YARED, descendre, de telle sorte que « dominer sur » c’est aussi « descendre dans, aimer, épouser ». Le verbe YARED, ce sont les deux premières lettres de « Jourdain ». Ce n’est pas par hasard, puisque le Jourdain est ce fleuve qui descend implacablement du nord au sud. En descendant dans le Jourdain, le Christ assume ce
retournement des énergies qui allaient vers la mort et qui remontent maintenant vers la vie. Pour dominer sur…, il faut descendre dans… Nous ne pouvons dominer que les énergies qui forment nos différents plans de conscience. C’est cela le retournement des énergies. « Quel est Celui-ci qui est monté, si ce n’est Celui qui est descendu » vont dire les Apôtres le soir de l’Ascension. Revenons au mot DABAR, Verbe, au niveau duquel il peut y avoir tant de contradictions. Si vous prononcez DAVAR il voudra dire « la chose ». Or, actuellement le Verbe est « chosifié », on n’entre plus dans sa profondeur, mais on choisit le message. Or la chose, c’est précisément le Verbe qui est le seul objet absolu. En objectivant le Verbe nous le tuons. Mais si nous vivons le Verbe de façon à entrer dans l’archétype même de ce qu’il est, c’est le seul objet, la seule réalité objective. Tout le reste est subjectif. Avec ce même mot DABAR nous avons encore « la parole », DAVAR, « la chose » et DEVER, « la peste ». Ce mot DEVER est employé pour les plaies d’Égypte, mais il ne s’agit pas d’une peste importante, il s’agit de la parole divine qui nous est révélée dans ces plaies. Ce sont bien sûr des épreuves, des fléaux, mais si nous entrons dans l’intelligence de l’événement, c’est la Parole à l’envers, c’est-à-dire que c’est l’homme qui est passé à côté d’elle et que, par conséquence, il va vivre le contraire, la maladie, c’est-à-dire l’épreuve. Donc, avec ces trois mots nous trouvons à chaque fois des retournements d’énergies. DAVAR est la charnière avec d’un côté la Parole et de l’autre la peste. C’est l’épée à deux tranchants qui est vie ou mort selon que nous la vivions ou que nous la refusions. Encore un dernier mot : REGUEL, le pied. Nous retrouvons la racine GAL, la libération. Le pied c’est la libération de la tête. Cela a l’air contradictoire, mais si vous avez étudié le symbolisme du corps, vous vous souviendrez que Jacob, à leur naissance, tenait en main le talon de son frère, c’est-à-dire qu’il va prendre ses énergies pour un jour poser la vraie tête. L’homme totalement réalisé, c’est celui qui a fait monter toutes ses énergies symboliquement des pieds jusqu’à la tête. C’est l’orobouros des Mexicains, c’est l’homme du tympan de Vézelay dont la tête rejoint les talons, c’est le cercle totalement accompli. Le mot pied veut aussi dire « la fête », parce qu’il contient en potentiel toutes les énergies que nous avons à amener en haut. Et alors, ce sera la fête. Le mot pied est un mot très important, très fondamental. Il signifie beaucoup plus que la simple partie du corps. Dans la description du Char d’Ézéchiel, les Ayoths ont des pieds de veaux. Le veau, c’est ce petit taureau en puissance, le taureau, ce sont les cornes, c’est l’Aleph final. C’est la couronne, le commencement et la fin, l’Alpha et l’Oméga. Nous revenons à la lettre REICH que nous avons étudiée en février, et qui signifie la tête dans sa notion de principe, correspondant au triangle supérieur de l’Arbre des Séphiroth, à la base duquel
il y a les deux Séphiroth : l’intelligence et la sagesse. Notre tête est informée par notre degré d’intelligence, d’intelligence non intellectuelle, mais d’intelligence participant à la sagesse divine, capable d’appréhender les éléments les plus subtils, d’entrer dans des champs de conscience de plus en plus profonds. Dans notre démarche essentielle vers la vérité et la lumière nous faisons des expériences fondamentales, mais qui devront être éloignées de nous une fois vécues, car notre grand danger est celui de l’installation. La première partie de notre vie se fait dans des catégories d’honnêteté, de devoir, de vertu morale. Les différents amis qui viennent voir Job pour lui prodiguer des conseils moraux sont éliminés par lui, car il sent que ce n’est pas cela, qu’il y a autre chose. Puis arrive le dernier ami, Elihu, celui qui entre dans une autre dimension de l’esprit. C’est le prophète capable d’entrer dans des perspectives eschatologiques et dans des perspectives divines. La plupart des gens sont encore des êtres morts qui gardent toujours la même petite tête sur leurs épaules, même si, sur le plan de la culture, ils sont intelligents. Car ils n’ont pas atteint l’intelligence essentielle qui est « folie ». C’est quand nous nous trouvons devant ce qu’on appelle l’absurde que nous mettons une autre tête sur nos épaules. Nous étions restés la dernière fois sur le mot DABAR qui signifie « la parole » et sur le mot LANOR qui veut dire « le mâle ». Je vous avais dit lorsque nous avons étudié la lettre QOF, que le mot NEQEVAH était très important. C’est la femelle. Dieu, dans la Genèse, créant Adam, à son image, le crée mâle et femelle. Le mot créer apparaît rarement dans la Genèse, il apparaît au premier jour, au cinquième et au sixième. En dehors de cela Dieu parle et la chose Est. Par contre le sixième jour qui est celui de la création de l’homme, le mot créer, BARA est répété trois fois et la troisième fois c’est pour exprimer sa dualité mâle et femelle. Cette dualité n’est pas celle que nous ramenons au niveau de notre petite intelligence. Car quand Dieu crée Adam mâle et femelle, Il les crée ZACAR, le mâle, Nequêvah, la femelle. Or la lettre centrale du mot « mâle » est un CAPH, lettre femelle, symbole de réceptivité et que celle du mot « femelle » est un QOF, lettre mâle symbole de la hache qui fend la dernière tête. Nous sommes là devant une dualité, qui est intimement liée, il y a une communion intime entre le masculin et le féminin. C’est un peu comme le Yin et Yang par rapport au TAO. Que signifie le mâle ZACAR ? Les deux lettres qui entourent ce contenu que représente le CAPH, c’est la racine ZER qui va donner des mots forts importants exprimant la lumière, par exemple ZERA, la semence. D’ailleurs le REICH et le ZAIN sont deux lettres qui forment le nombre 207 qui est le nombre de la lumière. C’est un contenant de lumière. Souvenez-vous de la signification de la lettre ZAIN qui est la flèche qui traverse la tunique de peau, cette peau animale qui est notre première terre, notre champ de conscience correspondant
au sixième jour. La flèche est appelée à traverser nos plans de conscience successifs, c’est-à-dire à les pénétrer, à les épouser. Voilà le rôle mâle. C’est pourquoi le mot ZANOR, mâle, veut aussi dire « se souvenir ». Être mâle, c’est se souvenir de ce que nous sommes, de toutes nos réserves d’énergies qui ne sont pas encore parvenues à la lumière et que nous devons y amener. Lorsque dans la Genèse Adam reçut l’ordre de labourer, de travailler la terre, c’était pour l’épouser, pour épouser nos terres successives, nos terres intérieures. Et quand nous avons épousé tous les champs de conscience qui sont faits de ces énergies successives, nous devenons le dieu que nous sommes. Par rapport à cela que veut dire le mot NAGOF ? C’est le trou ou le verbe trouer, mais, et nous trouvons là toute la subtilité du mot, c’est aussi le verbe nommer. Un vieil adage dit : La vérité est au fond du puits. Si quelqu’un a le pouvoir de nommer ou d’être nommé, c’est qu’il contient le Nom. Dans NAGOF il y a la racine CAB qui signifie Cabas, c’est un récipient. Le nom en nous, c’est le germe, c’est notre vibration initiale, le son essentiel à partir duquel chacun de nous est modulé. Nous sommes tout un agencement de vibrations liées au Verbe Divin qui nous a créés. Ce nom originel fait que chacun de nous a son nom secret, obéissant à une modulation différente. C’est le grand mystère de l’hypostase, diront les Pères Grecs de l’Eglise, de cette nature en dessous de la nature divine et dont chacun de nous a son unicité. Nous ne pouvons connaître notre nom qu’en faisant œuvre mâle en nous lorsque nous descendons dans ces profondeurs, dans ce « trou » qui contient notre nom, celui que Job va chercher dans le poisson, dans le germe, le NOUN de NAKOF, et qui lui confère une dimension fantastique, vibration participant à la vibration divine. C’est l’accomplissement total. Dans la Genèse Dieu emmène Adam, à la fois mâle et femelle, dans les profondeurs en lui montrant tous ces champs de conscience (son côté femelle) qu’il a épousés et Il lui dit : « Vous êtes deux, vous devez devenir un ». Le drame d’Adam après la chute, lorsqu’il a mangé le fruit, c’est de croire qu’il est arrivé, qu’il a dépassé toutes les dualités. C’est pour cela que Dieu le remet en bas de l’échelle. Dans le dernier apophtegme de l’Évangile de Saint-Thomas, le Christ dit : « Si la femme ne devient mâle, elle n’entrera pas dans le Royaume des Cieux ! » C’est-àdire, si le monde femelle ne commence pas son travail intérieur. A la fin du déluge il y a cette phrase extraordinaire : « Et Dieu se souvient de Noé ». C’est le mot ZAHOR et voici ELOHIM ZAHOR, Dieu se souvient et fait œuvre de mâle dans l’humanité, afin que la Terre, devenue divine, puisse être pénétrée par Dieu. « Dieu se souvient… » revient très souvent dans la Bible. Quand nous chantons pour nos morts en demandant pour eux la « mémoire éternelle » nous demandons qu’ils continuent leur vie mâle après la mort — si tant est qu’ils l’aient commencée avant — ou, du moins, qu’ils l’accomplissent après leur mort physique. Cette notion du mâle et de femelle me semble fondamentale, elle transforme notre compréhension de la Genèse.
Parlons maintenant de la lettre SHIN. Elle a la forme d’un trident avec, en plus un point ici pour exprimer le son che et un point de l’autre côté lorsqu’elle exprime le son se. Elle a pour valeur 300. Avec le GUIMEL, le chameau nous avons le nombre 3 et avec le LAMED, l’aiguillon, le nombre 30. Avec le SHIN nous trouvons une autre forme d’énergie, car en réalité elle signifie la dent qui contient tout un symbolisme. Après avoir représenté graphiquement un arc tendu, la lettre va se transformer, ses angles vont devenir beaucoup plus aigus, puis elle va se tourner pour devenir le SIGMA grec et pour donner notre petit serpent, le S. Avec la lettre actuelle nous sommes très proches du trident dont restent les trois branches. Quel est le symbolisme de la dent ? Avec le CAPH nous avons vu que la dent de l’éléphant offerte à Salomon était signe de sagesse. Dans mon livre sur le Symbolisme du Corps, je me suis appuyée sur deux mythes, dont l’un, je dirai, est une pseudo-réalisation de l’homme et l’autre, sa totale réalisation : le mythe de Jason qui va voler la Toison d’Or pour qui il n’était pas mûr. La Toison dévoilée, va se retourner contre lui. Dans le deuxième mythe, celui de Cadmos, chargé par les dieux d’aller fonder la ville de Thèbes, les héros doivent prendre les dents du dragon et les planter dans la terre. Et ces dents vont germer et d’elles vont naître des guerriers tout habillés avec leurs armures. L’ordre est donné à Cadmos de jeter des pierres au milieu de ces guerriers qui, se croyant attaqués, vont s’entretuer. Et ce sont les derniers, les plus vaillants, qui ont survécu, qui vont avec Cadmos fonder la ville de Thèbes qui est, pour les Grecs, ce que la Jérusalem céleste est pour les Chrétiens, et même pour les Judéo-Chrétiens. Donc, pour construire cette Théba, il faudra vérifier la qualité des pierres les dents sont des pierres — et la pierre qui est posée au centre, est celle exprimée à travers tous les Psaumes, les Prophètes, c’est la Pierre d’Angle qui, pour le Christianisme, est le Christ. C’est la pierre de finition que, symboliquement, nous devons devenir. Les dents sont donc les pierres de fondation de notre édifice essentiel. Lorsque nous perdons une dent, nous changeons de terre. Il y a d’ailleurs une denture liée à chaque âge physique : la dent de lait du petit enfant, celles de l’adulte censé changer de terre et dont les dents doivent devenir de plus en plus proches de la qualité de la pierre d’angle, et les personnes très âgées, autour de cent ans, connaissent une nouvelle denture, mais très peu d’entre elles font cette expérience. Dans les rêves, le rôle que jouent les dents est très important. Chaque dent est signifiante. Les Anciens disaient que quand nous rêvons que nous allons perdre une dent, cela signifie que nous allons perdre un membre de notre famille. Ce sont les pierres de fondation de la famille. J’ai vérifié que cela était vrai lorsqu’il s’agissait des dents de dessous, tandis que les dents supérieures sont nos propres fondations. Le symbolisme de la dent, pour moi, est celui de la qualité de l’être, la pierre de finition étant notre dernière terre. Nous verrons cela avec le mot EBEN qui signifie la pierre. Dans la lettre SHIN, c’est notre structure de fonction trinitaire. Nous sommes des êtres trinitaires. Avec la
femme ISHA, lorsque dans la Genèse elle voit que l’Arbre de la Connaissance est beau à contempler, bon à manger et désirable pour acquérir des pouvoirs, nous sommes devant les trois énergies fondamentales de notre être : jouissance, possession, puissance. Le SHIN, c’est notre noyau énergétique représenté par un arc tendu, retenu dans tout son potentiel de détente, qui n’a pas encore donné son secret pour que tout éclate. C’est l’ouverture de la boîte de Pandore que nous vivons actuellement avec la guerre, les conflits, avec la fission de l’atome investi dans la bombe atomique. Notre travail à chacun de nous, est de ramasser ces énergies, de fermer la boite et puis d’aller chercher celui qui est capable de l’ouvrir. SHIN forme le mot SHEM qui est notre nom. C’est la matrice de SHIN, le potentiel énergétique de notre noyau, de notre force nucléaire. C’est pour cela que le SHIN est la lettre la plus fondamentale de l’alphabet hébraïque. Lorsqu’elle est venue se présenter devant le Saint-Béni-Soit-Il pour présider à la création du monde, en se réclamant du très beau mot divin SHADAI, le Tout-Puissant, celui-ci la renvoie en disant : « Tu es digne, tu es bon, tu es vrai, mais les faussaires se serviront de toi pour affirmer leurs mensonges en t’associant les deux lettres QOF et REISH et former le mot SHEQER, le mensonge. Aussi, bien que tu sois vraie, ô lettre SHIN, puisque les trois patriarches seront réunis en toi, il ne me convient pas de me servir de toi pour opérer la création du monde ! ». Qu’est-ce que « les trois patriarches » ? Ce sont Abraham, Isaac et Jacob, les terres de fondation d’Israël, trinité fondamentale de la création d’Israël et co-extensivement, de l’humanité et du monde. De quoi est fait le mot SHADAI ? du SHIN, du DALETH et du YOD. Si nous prenons la racine SHIN qui passe par DALETH, les portes, cela signifie que, recevant de l’énergie divine, nous ne pouvons recevoir que ce que nous pouvons supporter. C’est toute l’économie divine. C’est comme un fleuve qui va passer par des portes et arrivé au moment où il sera tout calme, si nous le retournons — puisque ce sont des énergies qui doivent se retourner — va nous permettre de passer les portes dans l’autre sens et de retourner à nos sources. Dans le baptême du Christ il est dit : « Qu’as-tu Jourdain à retourner en arrière ? ». SHAD veut dire sein. C’est en se donnant en nourriture à sa Création que Dieu se révèle et, comme une mère donne son lait à ses enfants, Il nous donne ce dont nous avons besoin pour vivre et pour nous accomplir. Et DAI veut dire assez, suffisamment, c’est-à-dire suffisamment à chacun de nos niveaux énergétiques. Pris dans l’autre sens c’est le mot YAD, la main qui est aussi le même mot que YOD, qui profile tout le YOD-HE-VOV-HE. On peut ajouter que dans le mot DASHE, la verdure, nous retrouvons les deux lettres de sein, Dieu dit dans la Genèse : « Que la terre produise de la verdure ». C’est la verdure qui va être notre nourriture et les fruits des arbres oui portent tout leur potentiel de fruits en eux. C’est l’énergie divine, DASHE est la verdure qui nous conduit vers l’ALEPH final.
Dans l’autre sens ESHED veut dire chute d’eau, c’est tout le déversement de l’énergie. Nous avons déjà parlé de SHEM qui est le nom et qui a fourni le mot SHEMA qui signifie entendre. C’est le mot fondamental chez les Hébreux puisqu’il figure dans leur prière récitée plusieurs fois par jour : SHEMA ISRAEL… « Écoute Israël le Seigneur ton Dieu, le Seigneur est Un » ; YODHE-VOV-HE justement. C’est l’écoute des profondeurs, c’est est 1’écoute de son nom, la révélation du Nom. Quand l’homme écoute, il y a aussi Dieu qui écoute l’homme. Dans la Bible lorsque Sarah, jalouse d’Agar la servante qui a eu un fils alors qu’elle-même était stérile, exige d’Abraham qu’il la renvoie, Agar est très malheureuse. Elle s’en va emportant une cruche d’eau. Mais voilà que l’eau vient à manquer. Elle met l’enfant derrière un petit monticule de sable afin de ne pas entendre ses cris, car elle pense qu’il va mourir. Et là, elle a la visite de l’Archange Gabriel qui lui dit : « Dieu a entendu l’enfant qui s’appellera Ismaël », c’est-à-dire « vous entendez ». Or tout l’Islam a été entendu de Dieu, tandis qu’Israël doit entendre Dieu. C’est un très beau peuple que celui d’Ismaël. Il a une fonction fondamentale dans le monde, parce que Dieu, après avoir entendu le cri de l’enfant, fait apparaître un fruit pour le désaltérer. Par rapport à Ismaël, Israël est aussi un très beau nom. C’est celui que reçoit Jacob après s’être mesuré avec l’Ange qui, d’ailleurs dans la Bible est un homme ISH, syllabe qui est au début d’Ismaël et d’Israël. Et si la tradition orale en a fait un Ange, c’est qu’il traduit l’homme dans sa dimension d’immense accomplissement. Il ne lui dit pas son nom, mais il lui dit : « Tu t’appelleras désormais Israël, car tu as combattu avec Dieu et avec l’homme ». Le verbe combattre c’est SARO, c’est le combat pour atteindre la Royauté, car nous retrouvons aussi la racine SAR qui a donné le nom de SARAH, la Princesse. Le combat, l’écoute, est au cœur d’Israël, alors que l’ordre du Coran est SAKO, combat ! Ismaël a son nom centré sur la racine SHE-MA, tandis qu’Israël est structuré sur la racine SARO, lutter. Il y a une intimité extraordinaire entre ces deux frères ennemis, enlacés l’un dans l’autre, qui ne peuvent pas se séparer et qui doivent s’accomplir dans l’amour et non dans la haine, les deux noms portant le nom de l’homme ISH et EL, Dieu Nous étudions aujourd’hui la lettre TAV, la dernière de l’alphabet hébraïque, ayant pour nombre 400, homologue de DALETH (4) et du Mem (40). Elle signifie « la marque », « le signe ». A l’origine elle était représentée par une Croix. Puis, à partir du XII e siècle, elle s’est redressée, formant le Tau grec et notre T actuel, auquel il s’est identifié, nous ne savons pas par quelle surprenante évolution. Pourquoi le signe de la Croix est-il à la base de la lettre TAV ? C’est peut-être parce que la Croix illustre le mieux ce que nous appelons les « symboles », mot qui signifie « lancé ensemble », c’est-à-dire réunir deux éléments qui étaient séparés. C’est le rapport du signifiant au signifié, dont ce dernier est apparemment séparé, mais qui, en réalité, est l’élément de base qui permettra de remonter à l’archétype dont il procède. Autrement dit, tout ce qui est divin est dans l’Unité,
lorsqu’il s’exprime dans la manifestation, il se crucifie, car il entre dans la dualité. Le TAV est le cordon ombilical qui relie le haut au bas, qui est la voie de l’incarnation et, en même temps de la crucifixion. Chaque élément de la Création est relié par le cordon ombilical à son archétype, c’est-à-dire le signifié à son signifiant. A chaque niveau de création, la manifestation implique une crucifixion, parce que celle-là se fige dans l’espace-temps. Il y a un retrait du Divin dans une forme apparente qui cache l’archétype, mais qui non seulement en même temps l’exprime, mais qui porte en soi toute l’énergie nécessaire pour pouvoir remonter jusqu’à lui. Les Hébreux emploient le mot Tsintsoum pour parler de la contraction du Divin qui se cache dans le temps, moteur profond de l’évolution de chaque élément de la Création. Chaque fois que nous avons à franchir un échelon de l’échelle, nous sommes crucifiés à la terre à laquelle nous arrivons. Nous sommes des passagers sur cette terre, mais aussi sur toutes les terres intérieures que nous devons conquérir et qu’il faudra lâcher les unes après les autres, pour finalement les conquérir toutes. L’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal, ou plutôt de la dualité, sera alors totalement intégré. Adam a voulu goûter de cet Arbre avant d’avoir véritablement conquis toutes ses terres intérieures. Le drame a été au bout, c’est-à-dire la crucifixion du Divin qui descend dans le monde et crucifixion du monde qui doit retourner au Divin. Et c’est ce que nous vivons actuellement de façon très douloureuse. Deux aspects vont parfaitement illustrer cette descente et cette remontée. C’est le Shabat qui est l’objet du septième jour de la Création, quand tout a été mis en place et qu’il est dit : « Dieu se retire ». Nous en trouvons l’explication dans la manière dont se construit le mot shabat. Le BEITH se trouve au centre, c’est la Création et les deux lettres qui l’entourent forment le mot CHETH qui donnera le nom de SETH, frère redonné à Caïn à la place d’Abel qu’il a tué et qui est à la base de toute l’humanité, puisque c’est à partir de SETH que nous voyons apparaître tous ces Patriarches qui sont l’humanité en marche. CHETH qui veut dire « le fondement », « la base », est un mot très intéressant, parce qu’il est formé du SHIN qui a pour valeur 300 et du TAV qui a pour valeur 400. Et vous vous souvenez que, par analogie le 3 et le 4 ont reçu l’ordre de ne jamais se séparer, parce que l’un est mouvement et l’autre structure. C’est le GUIMEL et le DALETH qui se réunissent dans un juste rapport, donnant le mot GAD, bonheur, ou encore toit de la maison. Nous les retrouvons tous les deux : le SHIN = 300 qui est cette pierre des profondeurs, notre noyau qui contient toute l’énergie, notre force musculaire, et le TAV qui représente les structures de ce SHIN. C’est donc le fondement de tout être, de toute création et de chacun de nous en particulier. Ce retrait divin est un fait de base et le fondement même de la Création, Dieu se retire tout en ne se retirant pas, car s’Il se retirait, ce serait la fin de la Création qui n’aurait plus aucun pouvoir de
retourner à son archétype. Il y aurait eu cet expire qui est la Création, mais il n’y aurait pas cet inspire qui est notre histoire. C’est cela le Shabat. Nous avons vu que le BEITH est un même mot que le BATH, avec un Yod au milieu et qui est la deuxième lettre de l’alphabet, qui a la valeur 2 et qui signifie « la maison ». Or qu’est-ce que la maison ? C’est la fille grosse du Yod, c’est la Vierge d’Israël qui doit mettre au monde l’Enfant Divin. Elle est cette Vierge construite sur le SHIN, cette force nucléaire à la base de la Création, qui est le noyau central à partir duquel chacun est programmé et duquel chacun de nous participe par le Nom secret que nous ne connaissons pas tant que nous ne le sommes pas devenu, mais vers lequel nous allons. Et ce SHIN en nous qui forme le SHEM, le nom, est cette force nucléaire par laquelle, lorsque nous avons trouvé un tout petit peu notre place dans le monde, nous commençons à être en communication, qui nous module, nous vibre et nous donne la possibilité du retour à l’Unité. Voilà ce qu’est le SHIN pour chacun de nous, pour la rose, pour le moindre brin d’herbe. Il est notre être propre qui, à partir du moment où nous en devenons conscients, est à la base de notre processus d’évolution. L’évolution c’est la mise en rapport avec le SHIN. C’est là encore une manière de lire le mot SHABAT. Le SHABAT, c’est-à-dire Dieu se retirant, tout en restant présent très discrètement, nous rend libres afin que nous puissions « jouer » avec Lui, Le nier ou Le faire vivre ou Le devenir. La véritable liberté est justement de devenir, c’est là que nous nous libérons au lieu d’être enchaînés, l’autre n’est qu’apparente. C’est le mot TSEMAH, la germination, qui illustre le mieux le travail de la création. La germination, c’est le germe qui contient le Tsintsoum divin, la « Kenos » divine, comme l’appellent les Pères de l’Église. Vous voyez la contradiction apparente, il y a retrait divin dans le Tsintsoum et puis, à partir de là, TSEMAH, la germination du Divin en chacun de nous, que nous l’acceptions ou le refusions, l’accomplissions ou non. La Création toute entière, comme notre histoire, est un immense tissu fait d’une trame et d’une chaîne qui sont d’une part le SHAMAÏN — le SHEM, le germe en nous et, d’autre part, notre vie de chaque jour que nous assumons à travers toutes nos terres successives. Et c’est pourquoi le signe de la Croix est fondamental. Il est important de connaître le petit mot ETH, fait de la première et de la dernière lettre de l’alphabet, en grec nous dirions de l’Alpha et de l’Oméga. C’est pour les Chrétiens toute l’Apocalypse qui est basée sur ce travail de l’Alpha et de l’Oméga. C’est d’ailleurs pareil pour les Juifs, puisqu’ils disent que d’aller du Aleph au Tav, c’est accomplir toute la Loi, c’est arriver à l’Unité. Sous des formes différentes nous parlons le même langage. Ce mot ETH est si important qu’il ne se traduit pas. Il ne signifie pas quelque chose de formel, mais il contient tout dans l’informel. Lorsqu’Eve met au monde Caïn, elle dit : « J’ai acquis un homme » : ISH-ETH-YOD-HE-VAV-HE. On traduit ETH par « à l’aide de ». C’est un non-sens. ETH introduit un complément direct qui est la clef de toute la dimension de YOD-HE-VOV-HE,
à savoir que ISH, l’Homme, même après la chute, reste à la ressemblance de YOD-HE-VOV-HE, avec toute la dimension de l’homme dans son devenir. C’est sa structure. Chacun de nous est ce YOD-HE-VOV-HE et chacun de nous participe au Nom sacré. Le drame exprimé par ce mythe de la chute, c’est l’homme qui a perdu le chemin de la ressemblance. Entre ALEPH et TAV il y a tout le dynamisme de notre devenir, c’est toute notre évolution qui se profile. L’Homme reste intact, dit l’Eglise Orthodoxe, ce que nie l’Eglise Romaine. Ce petit ETH, c’est toute la Loi dans sa profondeur signifiante qui est ramassée du ALEPH au TAV, qui recouvre non seulement le Judaïsme, mais aussi le Christianisme qui est contenu dans le Judaïsme, mais à d’autres niveaux de lecture. Les lettres s’étant présentées en commençant par la dernière, devant le Saint-Béni-Soit-Il, le TAV, donc la première à se présenter, avait toutes les raisons pour espérer obtenir de commencer la création du monde, se référant au mot EMETH (Aleph – Mem – Tav) qui veut dire « vérité ». « Terminant ce mot, dit-elle, j’ai droit de présider à la création du monde ». Le Saint-Béni-Soit-Il la renvoie et lui dit : « Tu en es en effet digne, mais il ne convient pas que je me serve de toi pour opérer la création du monde, car tu es destinée à être marquée sur le front des fidèles qui ont observé la Loi du ALEPH au TAV et à être mêlée ainsi à la mort ». C’est le ALEPH qui passe par des morts, c’est-à-dire par des crucifixions, ainsi que nous l’avons déjà dit. Le mot EMETH qui est aussi la Création, qui est l’Homme en particulier, allant de l’ALEPH au TAV, passe par le MEM qui est la matrice dans laquelle se vit évidemment une mort. Non la mort telle que nous l’entendons, mais identifiée à une mutation, c’est-à-dire au début d’une germination fantastique. Le Christ va dire : « Je suis la Voie, la Vérité, la Vie ». Celui qui nous mène de l’ALPHA à l’OMEGA à travers des mutations successives, c’est bien la dimension christique qui est le Chemin, la Vérité et la Vie, parce que la Vie est cette maternité. Les deux premières lettres du mot EMETH, c’est la mère. Et lorsque Pilate demande « Qu’est-ce que la Vérité ? », le Christ ne répond pas, mais Il va se faire crucifier. Il va répondre par son geste, par son être tout entier, accomplissant le mot EMETH. Dans sa réponse, Dieu dit que le TAV est réservé pour être mis sur le front des hommes restés fidèles à l’accomplissement de la Loi. Et le premier qui reçoit ce signe, c’est Caïn et pourtant, il n’a pas commencé par aller de l’ALEPH au TAV. Encore une de ces contradictions de la Bible. Caïn a pris conscience de son immense erreur « Mon sort est dramatique, je vais être errant et vagabond sur la terre et quiconque me rencontrera me tuera ! » Dieu, à ce moment-là met le signe sur son front, afin qu’il soit protégé. C’est aussi ce même signe, le TAV, qui a été mis sur le fronton du portail des Hébreux le soir de Pâques quand, dixième plaie d’Egypte, l’Ange exterminateur va exterminer tous les aînés des fils des Egyptiens. Ce signe va protéger les enfants d’Israël. C’est la marque de ceux qui sont dans cette grande gestation du ALEPH au TAV, parce qu’ils vivent une mort pour une résurrection. Car, s’il y a naissance, c’est bien ce passage de la Mer Rouge.
De même, dans le Livre d’Ezéchiel ou dans l’Apocalypse, sont marqués ceux qui doivent entrer dans le Jérusalem Céleste, donc ceux qui sont arrivés jusqu’au TAV. Caïn, c’est l’homme qui, même s’il a commis un crime des plus dramatiques, reçoit toujours à nouveau la possibilité de son accomplissement. Dieu va aller le rechercher là où il se trouve pour lui reproposer l’alliance et lui permettre de repartir. Car si le crime de Caïn est abominable, le crime contre l’Esprit est pire encore. Tout ce qui est mystère pour les Chrétiens, le mystère de l’incarnation, Dieu qui se fait homme, est dû au fait que nous ne sommes pas encore arrivés au TAV. Notre intelligence actuelle ne peut le comprendre, comme elle ne peut définir Dieu, ni la preuve de Son existence. Nous en parlons intellectuellement, mais nous ne pouvons en parler par expérience. Personne, pour l’instant, ne peut parler du TAV. HET, c’est le non-temps, tandis que ETH, est le temps, la durée qui nous est donnée jusqu’à ce que nous ayons assumé toute la ténèbre et que nous fassions la totale lumière. C’est alors que nous entrerons dans le non-temps ; le HET, que les physiciens nomment « l’ailleurs » et que l’on ne peut encore traduire. Vous trouverez en particulier le ETH dans l’Ecclésiaste où il est dit : « Il y a un temps pour dormir, un temps pour se réveiller, un temps pour vivre, un temps pour mourir, un temps pour semer, un temps pour cueillir, etc… » C’est tout le temps des semailles à la moisson, toute la dualité que nous avons à assumer. Cet aspect du TAV qui me semble très important, je le relie au quatrième jour de la Création, à la mise en place des deux luminaires dans le Ciel, appelés le « Grand » et le « Petit », et que nous traduisons par « Soleil et Lune ». Mais en fait, cela dépasse de beaucoup le soleil et la lune extérieurs. Ce sont nos lumières intérieures présidant à nos montées dans la lumière et à nos descentes dans la ténèbre. Par analogie, le TAV est lié à la mise en place des deux Arbres de l’Eden, dans le deuxième chapitre de la Genèse, l’Arbre de Vie et l’Arbre de la Connaissance de la dualité. Cette dualité dans laquelle nous trouvons toute l’incarnation, les deux branches de la Croix. Ces deux luminaires dans la première Genèse sont aussi symboles de l’Espace-Temps. En hébreu le mot « soleil » est SHEMESH, il contient le SHEM, c’est-à-dire le nom qui est aussi la place, le nom de celui qui a trouvé sa place et vice versa, de celui qui trouve sa place et qui trouve aussi son nom. Tous les textes bibliques lient la lune au temps. C’est pourquoi je fais ce parallèle avec les deux Arbres de la seconde Genèse qui sont liés à l’espace-temps, l’Arbre de la dualité étant lié à l’espace et l’Arbre de Vie au temps qu’on appelle non-temps. Le temps et l’espace sont la même réalité, car le temps nous est donné en fonction de l’espace que nous vivons, c’est-à-dire de notre champ de conscience du moment. Et selon les différents champs de conscience auxquels nous accédons, le temps sera différent. Nous le voyons sur le plan psychologique, mais c’est encore
bien plus vrai sur le plan spirituel, celui de nos espaces intérieurs. Au fur et à mesure que nous nous élevons, nos espaces intérieurs, le temps, est de plus en plus court. Toutefois il est implacable, rigoureux. Si nous voulons aller trop vite, nous nous cassons la figure ! Mme Langevin : Dans la méditation on perd la notion du temps. A. de Souzenelle : Parce qu’on entre dans un non-temps. C’est d’ailleurs la seule façon qui nous fasse rejoindre ce lieu privilégié, ce lieu du MI, ce milieu de nous-mêmes. Une participante : Dans le sommeil aussi on perd la notion du temps. A. de Souzenelle : Dans le sommeil aussi le temps est totalement différent, l’espace aussi. Ce sont des incursions dans nos profondeurs. Avant de nous quitter je voudrais vous montrer le premier mot de la Thora, le mot BERESHIT. Il va couronner notre enseignement du ALEPH et du TAV. Il est absolument inséparable du deuxième mot BARA, BERECHIT BARA ELOHIM. Comment le traduire ? Nous y trouvons la racine REICH qui signifie « la tête », le « principe ». Il reste BEITH, c’est la maison, donc la maison du principe. Le mot est tout entier contenu là, dans ces deux premières lettres. Or qu’estce que BAR ? C’est le grain de blé. Nous retrouvons là aussi le Fils, celui qui a à mourir en terre pour renaître, voyez Barabbas. RAB veut dire « la croissance », c’est toute la promesse du fruit, donc toute la vie est contenue là. Si vous prenez les deux premières et les deux dernières lettres, cela donne : BERIT, c’est-à-dire « l’alliance », l’alliance de feu. Et même si nous prenons le Yod, BERIT, est aussi l’alliance avec l’homme, l’alliance de l’époux avec son épouse, puisque le feu c’est tout l’Eros. C’est donc l’alliance de Dieu-Epoux avec sa Création-Epouse. D’autre part nous avons encore la première et la dernière lettre, BATH, « la fille », la Vierge d’Israël qui contient tout le Principe, qui contient le Yod, le feu, la tête, qui contient tout. TESHOUVAH est inséparable de SHABAT retourné. C’est « la pénitence », dans le sens de retournement, prise de conscience. Retournement de ceux qui allaient vers la mort et qui remontent vers la vie. C’est encore un aspect de ce mot. On pourrait en trouver d’autres, ô combien ! ALEPH et REICH qui sont les lettres de la lumière, YOD et REICH qui sont les lettres du sacré, de la crainte et du tremblement. Il y a des Qabbalistes qui sont restés des vies entières sur ce seul mot. Si vous coupez le mot en deux, vous avez d’un côté BARA, créer, et de l’autre SHIT. Créer, c’est mettre en lumière, tandis que le mot SHET, c’est la base, un aspect du repos, du fondement, de l’arrêt, du retour aux Sources, au SHIN. BARA-SHIT-BARA, le rythme à deux temps : créer, se reposer (aller dans les profondeurs), créer à nouveau…
Et puis, il y a ELOHIM, c’est aussi dans les profondeurs ténèbre-lumière-ténèbre. BERESHITBARA-ELOHIM (les Cieux) ERETZ (la terre, la base). Vous voyez ces deux temps, ce rythme de la phrase ! C’est extraordinaire ! Un autre aspect encore. Autrefois dans la Bible, il n’y avait pas d’arrêt entre les mots, on pouvait donc les séparer à n’importe quel endroit. On pouvait, par exemple, mettre BERESH – ITBARA – BERESH, c’est le même mot pratiquement, le Principe et ITBARA, c’est la forme pronominale du verbe créer. Dans ce cas on dirait : « Dans ce Principe, se créent les Dieux ». C’est le monde divin qui s’auto-crée. C’est intéressant et cela vous ouvre des perspectives immenses. Un mot hébreu est à prendre comme un joyau, comme un cristal qu’on regarde sous toutes ses facettes et dont on atteint le cœur que lorsqu’on est arrivé intérieurement au TAV. Par la méditation, par la contemplation du mot, c’est-à-dire par le chemin vers le TAV, on arrive à le faire parler, à entrer en communication avec lui, à ce qu’il ouvre une partie de son cœur. Compte rendu de la rencontre du 16.6.1980 C’est aujourd’hui notre dernière étude des lettres hébraïques. Le temps qui nous est imparti ne nous permet pas d’approfondir les lettres finales, ce qui, n’importe comment, exigerait plusieurs mois, sinon des années, cette étude ne se terminant jamais. Nous allons essayer de dire l’essentiel. Les lettres finales ne sont autres que certaines lettres déjà étudiées et qui ont une valeur et un graphisme différent lorsqu’elles se trouvent à la fin d’un mot. Nous avons vu le TAV la dernière fois, il vaut 400. Or entre le TAV et l’achèvement de toute évolution connue qui se termine par le ALEPH final de valeur 1000, il nous reste à voir les 500, 600, 700, 800 et 900. Le CAPH en est la première, elle vaut 20 au début du mot et 500 en finale où elle va prendre la forme d’un DALETH prolongé. Elle est en général accompagnée de deux petits points qui indiquent qu’elle se prononce « che », prononcé à l’allemande, et « cha », lorsqu’il y a une barre. Exemple : le LAMED plus le CAPH final se disent LECH ou LECHA. C’est l’ordre donné par Dieu à Abram de quitter Our, sa ville natale : « Va ! quitte ton pays ! » Pourquoi le CAPH a-t-il pour valeur tantôt 20, tantôt 500 ? Je me suis souvent posée la question. Mon avis personnel qui serait à vérifier par des Qabbalistes, c’est que, lorsqu’on arrive aux centaines, on entre dans un plan cosmique, dans un plan de conscience qui n’est pas commun à tous, mais qui est celui de l’homme arrivant à sa réalisation cosmique, c’est-à-dire, à sa réalité. Qu’est-ce donc que ce CAPH final qui rejoint le 5 par le 500, qui, au début ou à l’intérieur d’un mot a pour valeur 20, et qui signifie « le contenant »? C’est que avec le 5 qui est le souffle et le 50 qui est le poisson, le germe, nous avons le contenu, l’extérieur devient l’intérieur. Dans une
certaine mesure cela confirme ce que j’ai dit, car lorsque l’homme est totalement réalisé, l’extérieur devient l’intérieur, l’intérieur devient l’extérieur, la droite devient la gauche, la gauche devient la droite et la droite devient la gauche, etc. Ceci est exprimé dans un très beau logium de l’Evangile de Thomas. Par ce CAPH essentiellement lié au nombre 2 nous touchons le BEITH, la maison, l’altérité par rapport au 1. Dieu pose un autre que Lui-même. C’est toute la Création, c’est vraiment l’amour de l’autre qui apparaît avec le BEITH. Et, avec le CAPH lié au 20, nous sommes aussi devant ce « Toi », germe de tous les possibles, puisque ce « Toi » est à nouveau là comme une espèce de départ, c’est un germe cosmique. L’homme totalement réalisé n’est encore qu’un germe cosmique qui va réintégrer l’Unité. LAK(ch)A est l’impératif du mot « aller » et LEK(ch) « Va » dont on a fait un pléonasme en disant « Va, quitte ton pays, va vers celui que Je te montrerai… » et qu’on devrait au contraire traduire par « Va vers toi-même, va vers les profondeurs de ton être… » Dieu ordonne à Abram d’aller vers sa totalité. Le mot HEK est ce palais de la bouche qui donne toute la théorie des Hekaloth, les demeures mystiques de la Divinité, toute cette série de Palais qui est une grande contemplation mystique chez les Hébreux, puisque cela représente la traversée de toutes les terres intérieures, de toutes les dernières terres, là où l’épouse va se parer de robes toujours plus somptueuses, jusqu’à revêtir la robe de noce. Faisant suite au HEK, HOSHEK est la ténèbre des grandes profondeurs, c’est ce Palais dans lequel est serti le SHIN, cette pierre précieuse enfouie dans les plus grandes profondeurs de nous-mêmes, que nous ne pouvons atteindre qu’en traversant cette ténèbre. Lorsque le Christ est monté sur le Thabor pour se montrer dans Sa lumière cosmique, Il enjoignit aux Apôtres de n’en rien dire « … jusqu’à ce que le Fils de l’Homme soit descendu aux Enfers est ressuscité. » Le SHIN n’est pas dans la lumière d’en-haut, mais dans les profondeurs dans lesquelles nous avons à descendre pour le trouver. Le mot MELEK est aussi à retenir. C’est à cause de lui que le MEM et le LAMED ne devaient pas quitter leurs places de choix, MELEK signifiant le « Roi ». « Malkouth » c’est le Royaume, la dernière Séphira. Les deux dernières lettres, MEM et LAMED sont celles qui déterminent la circoncision et le Roi n’est encore, après toutes ces circoncisions, que celui qui est capable de passer par le trou d’une aiguille comme le chameau. C’est la dernière réalisation de l’homme qui donc, se fait germe. Le Roi est celui qui se refait germe cosmique, qui se fait tout petit. Nous avons étudié le genou, BEREK, avec le symbolisme du corps. BAR que nous retrouvons là, est le grain de blé et aussi le fils. C’est le grain de blé qui doit mourir en terre pour ressusciter. C’est le même mot qui est prononcé BROUK et qui est « la bénédiction ». Pourquoi ? Parce que
les deux genoux sont les deux petites couronnes, les rotules qui déjà au départ, promettent la couronne unique en-haut. Le 2 qui est lié au 1, est aussi lié à la terre, car il n’y a pas de bénédiction, de puissance passée à quelqu’un, sans que celui-ci mette genoux à terre. C’est l’homme qui est essentiellement relié par le genou au Ciel et à la Terre. Le genou est aussi lié à une notion de naissance, car lorsqu’au cours de notre vie, nous avons à faire des naissances, elles entraînent souvent des répercussions dans les genoux. Retenons encore le mot DEREV, « le chemin ». Nous y trouvons la racine DOR qui signifie « le cycle », donc la notion du temps. Ce daredare que nous avons traduit par « vitesse ». C’est aussi le mot qui signifie « épine » le temps qui va devenir pour nous une épine en agissant sur le vieillissement, l’usure, alors qu’il nous est donné pour traverser tous les champs de conscience. Et lorsque le chemin est accompli, c’est la fin des temps, des « cycles ». Passons à présent au MEM final qui s’écrit en carré et qu’il ne faut pas confondre avec le SAMEK, et qui a pour valeur 60. Le MEM vaut 40 et le MEM final 600. Nous retrouvons dans le 40 la notion de « matrice », alors que le 6 est au contraire l’homme droit, le crochet, le VAV, celui qui relie le Ciel et la Terre en même temps que tous les éléments de la Création, et que le 60 représente l’Arbre, ce sur quoi le monde s’appuie. Nous sommes donc loin de la matrice, nous sommes dans quelque chose qui est déjà formé, déjà réalisé. Ce qui était matrice, devient Arbre complet qui, ayant donné toute sa sève, arrive à son épanouissement et a pour valeur 600. C’est pourquoi toute cette connaissance de 666 qui est le MEM final, nous met devant un nombre d’Homme totalement accompli qui est passé par toutes les phases, qui a fini de naître à luimême, ayant passé par toutes les maternités, toutes les parties et qui entre à ce moment-là dans le Royaume. Le mot EM, c’est « la mère ». Il peut se prononcer de deux manières : IM qui veut dire « avec » et AM qui veut dire « le peuple ». Le peuple non dans sa signification sociale, mais dans celle de masse indifférenciée. L’un assume la maternité, l’autre le peuple. Nous savons tous que la foule, étant inconsciente, est considérée comme dangereuse. Il suffit qu’il y ait un meneur pour qu’elle le suive. Et quand la peur la prend, elle ne se connaît plus, elle devient folle. La foule est liée a l’inconscient, elle n’a pas encore commencé à faire sa descente dans les profondeurs pour pouvoir se contrôler, pour devenir véritablement mûre. Lorsque l’humanité toute entière sera consciente, elle sera en marche. C’est le conscient lié à l’inconscient, puisque c’est un accouchement successif. L’inconscient par rapport à OLAM « le monde » est encore dans une matrice, est encore dans la ténèbre. En ajoutant un LAMED au milieu de EM nous avons ELEM qui veut dire « la vierge » ou « l’homme vierge » au masculin, c’est-à-dire la jeune fille ou le jeune homme encore nubiles. Pour l’Hébreu il ne s’agit pas dé virginité physique, mais essentiellement de cette descente, de ce mariage avec nous-mêmes, ce LAMED encore prisonnier de AM, c’est-à-dire de son inconscient, n’a pas encore commencé à vibrer.
Et quand ce mot est prononcé OLAM, c’est « le monde » extérieur qui est encore vierge parce que encore lié au peuple, il n’a pas encore commencé à faire sa naissance dans les profondeurs. Il indique aussi une notion du temps, d’un temps indéfini, qui n’en finit pas et qu’on traduit d’une façon erronée par « éternellement ». L’éternité est transcendante au temps. Il peut y avoir un temps qui n’en finit pas sans être pour cela éternel. L’éternité est une qualité de non-temps. Lorsqu’après la chute Dieu dit « Voici l’Homme est devenu comme l’un d’entre nous pour la connaissance du bien et de son contraire. Empêchons-le maintenant d’avancer sa main, de prendre l’Arbre de Vie, d’en manger et de vivre éternellement », il serait mieux de dire : « … L’Homme est devenu « comme s’il était Un », empêchons-le maintenant d’avancer sa main, de prendre l’Arbre de Vie, d’en manger, de peur qu’il ne vive éternellement ». C’est-à-dire de vivre OLAM. Dieu va le protéger et le remettre à zéro pour qu’il recommence le chemin qu’il a pris de travers, croyant qu’il était déjà arrivé. Or s’il mange de l’Arbre de Vie il va se figer dans cette position là et ne pourra jamais prendre conscience de son erreur. Il vivra indéfiniment dans le temps sans passer à l’éternité. Il restera toujours vierge. Ce n’est pas une punition de Dieu, mais une protection. L’homme reste AM au lieu de rentrer dans la fonction de EM. Et lorsque nous avons pris conscience d’être AM, le AYIN se transforme en ALEPH et nous commençons tout le travail de EM. Le monde aussi entre alors en vibration et c’est pourquoi il peut devenir, se transformer. Le monde tout entier peut devenir l’épouse. Je vous rappelle que le nom de la lettre MEM est MAÏN, les Eaux… Les Eaux sont la réunion du monde du MI avec le monde du MA. Qu’est-ce qu’entrer dans le MEM final ? Le mot qui s’impose là, c’est SHEM. On ne peut parler du SHIN sans parler du SHEM, « le nom ». Cette pierre précieuse, le SHIN, n’est autre que le Nom, ce que j’appelle le « son-germe » au profond de chacun de nous, au rythme duquel nous sommes modulés et celui qui retrouve ce son devient Dieu, parce qu’il participe au Verbe. Nous sommes là devant le MEM final qui a pour valeur 600 et le SHIN qui a pour valeur 300, ce qui donne 900, la perfection de la Création, l’entrée dans l’Unité, le mariage. Celui qui retrouve son Nom, entre en épousailles. Au deuxième jour de la Genèse, lorsque les Eaux ont été séparées, Dieu les réunit immédiatement par l’étendue qu’Il appelle SHAMAÏN, que nous traduisons par « Cieux », ce qui ne veut pas dire grand chose. SHAMAÏN est au-dedans de nous, ce sont toutes nos terres intérieures, nos champs de conscience. Si les Eaux sont séparées, elles sont aussi réunies grâce au SHIN qui construit le monde du MA, la charnière entre lui et le monde du MA. Qu’est-ce que le mot SHAMAÏN sinon celui qui contient le MI et le Nom, SHEM, toutes nos terres intérieures qui ont le secret du Nom, de ce nom qui diffère à chaque niveau, c’est-à-dire qui a une autre vibration. C’est ce nom qui a le secret de la participation au monde du MI, grâce à laquelle nous allons monter un échelon de l’échelle.
Le mot SHEMA, « écoute » découle aussi bien de SHEM que du MEM. En ajoutant un YOD devant SHEM nous avons VAYASEM et là le SHEM devient SOM qui veut dire « place ». Dieu dit en parlant d’Adam : « VAYASEM SHAM » (Sham = là-bas), « Il a sa place là-bas ». Nous n’avons notre place que quand nous trouvons notre Nom. Or nous cherchons notre place au soleil extérieur pour nous sécuriser. Laissons-nous conduire à notre place en nous désécurisant par rapport à un tas de petites volontés. On veut ceci, on veut cela. Non, laissons-nous conduire et là, tout à coup, tout se met en œuvre et on est en sécurité. La lettre PHE veut dire « bouche », donc aussi « la parole » et « la tradition » et le mot PHO veut dire « ici » et SHAM, « là-bas » : Si vous entrez dans la tradition, vous entrez dans votre Nom : SHAM SHEM. SHEMESH, le soleil, est aussi issu de SHEM. Et n’oublions pas de considérer le mot SHALOM, « la paix ». C’est le LAMED qui se met en mouvement jusqu’à ce qu’il ait trouvé son Nom. Nous sommes dans des guerres intérieures, dans le monde de la dualité où nous avons à intégrer tous ces conflits intérieurs pour aller jusqu’à notre Nom. C’est la paix qui nous est donnée par le Christ qui a intégré tous ces conflits. Cette paix n’a rien de commun avec celle que conçoit notre monde actuel. Rappelons encore le verbe QOM en rapport avec la lettre QOV, « le cordon divin », qui est cette sagesse qui est folie à nos yeux. QOM veut dire « se redresser ». C’est le mot que nous trouvons dramatiquement traduit par « se venger » à la fin du Livre de Caïn. Il ne s’agit pas de vengeance, mais de redressement, c’est le pardon, la résurrection, la possibilité de repartir dans la juste direction. Avec QOM nous avons MAQOM, « le lieu ». Je vous avais dit avec le GUIMEL qui a pour valeur 3 et que j’avais rapproché du troisième jour de la Création, que, lorsque Dieu donne l’ordre aux Eaux d’en-bas de se réunir en un lieu Un, cet ordre divin était représenté par trois mots différents : EL, le nom de Dieu, EHAD l’Unité et MAQOM le lieu qui, à la limite est aussi un nom divin, parce que le dernier lieu, c’est Dieu Lui-même. Le dernier espace ou temps intérieur, c’est YOD-HE-VOV-HE. On pourrait aussi dire que c’est le lieu de la résurrection, de la renaissance. LEHEM, c’est « le pain » qui nous donne le nom de la ville de BETHLEEM. HAM, c’est « la chaleur », c’est aussi CHAM, un des trois fils, le plus mystérieux, de Noé, celui qui fait l’expérience du mystère de l’intimité du Père. Le père, c’est le mythe de l’inconnaissable. Nous pourrions presque traduire LEHEM dont le LAMED du milieu est toujours la direction en avant, vers le but, par l’énergie que nous donne le pain, en le prenant dans un sens immédiat. Mais on peut aussi le traduire au niveau symbolique par le pain de l’Eucharistie, en particulier pour les Chrétiens, quoique le pain ait été un symbole dès avant le Christ. En inversant un peu le mot, ce n’est plus le MEM final, c’est MELEK et c’est le « sel », le « manioc ».
Nous voici maintenant au NOUN final qui a pour valeur 700. Nous retrouvons le 7 qui est une plénitude, mais aussi un changement. Et là s’impose le AYIN qui est « le Rien », avec un point en-haut par rapport à la source, à l’œil qui ont le point en-bas. Les deux se rejoignent. YAYIN avec deux YOD, c’est « le vin ». Tout le symbolisme du Vin, dans toutes les traditions, est « porteur de l’Esprit ». On peut donc dire que le NOUN final, c’est le YOD qui s’incarne. Le nom de QAÏN, frère d’Abel, porte en lui le YOD. Tous ces mots sont liés au AYIN et au ALEPH qui vaut 1, au YOD qui vaut 10 et au QOF qui vaut 100. QAÏN, comme QANO, « acquérir », est construit sur la racine QEN qui veut dire « le Nid ». C’est le Nid qui est appelé à mettre au monde le YOD, c’est la partie la plus noble du groupe Caïn-Abel. Et quand Caïn tue Abel, il ne peut plus accomplir son YOD qui va être investi au niveau de l’intellect, au niveau de toutes les constructions du monde extérieur, au lieu de construire le monde intérieur. C’est l’origine de toutes les civilisations qui ne peuvent pas tenir, parce qu’elles sont l’œuvre d’un YOD investi tout à l’extérieur. EBEN, c’est « la Pierre » qui s’incarne dans le monde, c’est donc le Fils. L’Homme, en tant que Pierre, c’est celui qui a conscience d’être le Fils du Père. C’est pourquoi la pierre est un symbole si fondamental dans toutes les sociétés traditionnelles où, symboliquement, on travaille la pierre, on la polit, on la taille. C’est-à-dire tailler tout ce petit Moi que nous sommes, pour arriver au vrai Moi essentiel qui sera la pierre qu’il va falloir employer à la place des briques (Labenah) dans la construction du Temple. Toute l’histoire de la Tour de Babel est là : « Ils ont pris des briques à la place de pierres ». Il y a un petit mot qui revient trois fois dans l’histoire de la Tour de Babel, c’est AWAH que l’on traduit par « allons », construisons une Tour, faisons-nous un Nom… mais à l’extérieur ! Le ALEPH a disparu, car si c’était encore AWAHA, ce serait l’amour dans lequel communieraient les hommes. Le mot AMEN est inséparable du mot EVEN. Dans AMEN il y a « Mère ». Certains Evangiles le traduisent par « En vérité, en vérité, je vous le dis… », ce n’est pas une traduction adéquate. AMEN n’est pas un mot, mais une idée, celle d’être en parfaite adéquation avec le plan du mystère. C’est entrer dans le mystère. C’est un mot intraduisible. On le rapproche du OM des Hindous, du Son Primordial qui en est beaucoup plus proche. Nous ne savons plus prononcer le mot AMEN. Il y a des textes qui disent que dans la Synagogue d’Alexandrie qui contenait des milliers de personnes, quand tous prononçaient AMEN (ou OMIN), on avait l’impression que la Synagogue allait s’effondrer, qu’elle entrait elle-même en vibration. Le mot MINE, c’est « la Provenance » et, quand il y a un YOD au milieu, il signifie « l’Espèce ». C’est le moule du MI qui se fait NOUN final, c’est le monde du MI qui se plante en terre, qui s’incarne.
Passons au PHE final qui vaut 800. Graphiquement c’est un PHE qui, au lieu de revenir sur luimême, se prolonge par en-bas. Le PHE, c’est « l’ouverture », c’est la bouche et avec le PHE final, c’est l’ouverture en tant que libération, l’ouverture totale. Le premier mot qui s’impose, c’est ALEPH, la première lettre de l’alphabet. Dieu se fait « bouche cosmique », Dieu entre dans la Création par la tradition. ALEPH est la lettre la plus étonnante, puisqu’elle est l’animal cornu qui est toute l’information que nous recevons d’en-haut et cette corne par laquelle arrive toute l’information, c’est la future couronne. Dans ALEPH la corne devient couronne. RAPH, c’est « le médecin » et RAPHO, c’est « je guéris ». RAPHAEL, c’est le « Médecin divin ». C’est aussi la permutation du mot PHAR qui est « le Taureau », qui est cette racine qui exprime la fécondité. Dans nos ports le phare apporte la lumière. RAPH : REICH et PHE final, 200 + 800 = 1000. Le médecin, c’est celui qui amène l’homme à réaliser le 1000 dans lequel il est guéri. Il n’y a qu’un grand problème dans le monde, c’est de résider dans le 1000. Tous les autres sont de faux problèmes. Dans le même sens, le « Séraphin », SARAPH, c’est celui qui « brûle ». Lorsque, dans le désert, les Hébreux sont piqués au palais par ces petits serpents venimeux, sur la demande de Dieu, Moïse construit le Serpent d’Airain qui est le SARAPH. C’est aussi celui qui guérit, c’est contenu dans son nom. C’est déjà l’ombre de la Croix qui est là tout en profil, puisque le Christ va s’identifier à ce SARAPH. SARAPH contient les deux lettres de SOPH qui est « la limite ». Si nous voulions guérir il faut entrer dans une limite, changer de têtes successivement pour finalement poser la dernière tête sur nos épaules. Et c’est pour cela aussi que le verbe YOSOPH signifie « augmenter ». Si tu veux augmenter, grandir, il faut savoir entrer dans des limites. La Loi dit que si nous voulons évoluer, il faut nous engager, faire des choix, YOSOPH donne aussi le nom de Joseph. C’est celui qui préside à l’augmentation et qui, en même temps, observe une limite. C’est Joseph, l’époux de la Vierge qui surveille la matrice et c’est aussi Joseph d’Armathie qui veille sur le tombeau qui est aussi une matrice et aussi une résurrection. Joseph, fils de Jacob, fait entrer les Hébreux en Egypte où ils sont dans une limite, étant esclave des Égyptiens. Et YAM SOPH, la Mer Rouge, qui est au bout de leur expérience en Egypte, se nomme en hébreu la Mer des Joncs, la Mer de la Fin, c’est aussi le mot que l’on retrouve avec AYIN SOPH, le « Rien » c’est-à-dire l’infini, l’Unique. OPH, « l’oiseau » est un très beau mot. Lorsque vous sortez des grandes profondeurs du AYIN, de la Ténèbre, c’est l’envol, c’est la libération, PHE.
Le TSADE final qui, dans la dizaine a la valeur 90, vaut 900 lorsqu’il est final. C’est l’hameçon qui plonge dans les profondeurs pour aller chercher le dernier élément qui va faire l’Unité. C’est un peu comme le 9, la perfection à la veille du 10, l’Unité conquise qui implique la perfection. Avec le TSADE final nous retrouvons la même idée. Le mot qui me vient le plus à l’esprit c’est ERETZ, « la Terre ». Il figure dans le tout premier verset de la Genèse. C’est aussi lui qui, après le second jour de la Création, lorsqu’il y a séparation des Eaux d’en-bas des Eaux d’en-haut, et qu’il y a, le troisième jour, séparation du sec et de l’humide, représente le Sec. La Terre, c’est le sec, mais en même temps elle est inséparable de l’humide ; afin qu’il y ait fécondité. La fécondité naît du mariage de toutes nos Terres intérieures fécondées par nos énergies. Dans ERETZ nous trouvons les deux lettres de la lumière et, avec TSADE, l’opposé, les grandes profondeurs. Ce sont ces Terres encore cachées dans les profondeurs qu’il faut aller chercher à l’aide de l’hameçon, afin de les amener à la lumière. QETZ veut dire « la Fin » dans le sens d’accomplissement. Si d’ailleurs vous mettez un YOD au milieu de QETZ, cela donne GAYITZ, « l’été ». Un autre mot fondamental est ETZ, « l’Arbre ». C’est l’autre côté de la source AYIN, c’est ce qui va sortir des racines, qui va s’élever de la Terre et donner des feuilles, des bourgeons et des fleurs. Nous arrivons à présent à l’ALEPH final qui est vraiment « la Couronne ». Quand RATHO (guérir) qui signifie aussi le destin de l’humanité malade, se termine par un ALEPH, c’est « je guéris ». Le verbe MAHA, c’est « remplir », c’est la plénitude qui fait suite à toutes ces circoncisions. Car il n’y a pas de plénitude sans circoncisions, sans tailles. MELAK, avec ALEPH, ce n’est plus le Roi, c’est « l’Ange ». C’est celui qui va apporter toutes les énergies pour en fin de compte, « remplir ». BARAN, les trois premières lettres de BERESHIT, c’est « créer ». Ainsi la Création comporte son achèvement. Tout est dit dans le mot « créer ». C’est le grain de blé qui va mûrir en terre, et son achèvement. BA, « pénétrer », est le retour de la Création toute entière à son ALEPH final, qui est aussi l’avenir, le devenir. AV, dans ce sens-là, c’est le Père, c’est-à-dire l’ALEPH qui pose l’altérité, l’autre et l’autre qui retourne vers l’UN, la pénétration, la couronne finale, la Création couronnée. L’expir, Verbe créateur par Annick de Souzenelle
S’il ignore ce qu’il est, l’homme est aliéné, par rapport à son potentiel vital ; il ne vit qu’à la superficie de lui-même, ne respire donc qu’à la superficie de lui-même, survit en redoutant la mort qu’il crée d’autant plus et plus vite qu’elle devient en fin de compte, inconsciemment, son seul objectif. Je ne pense pas que nous puissions prendre délibérément et consciemment pour objectif la vie sans l’objectiver au plus haut niveau de conscience, c’est-à-dire sans avoir l’audace de plonger dans son mystère oublié, mais dont nos mythes traditionnels sont la mémoire. Je vous invite à cette audace en ouvrant ensemble le livre de la Genèse dont la tradition hébraïque nous dit qu’il est tout entier contenu dans le premier chapitre, lui-même dans le premier verset, celui-là dans le premier mot — Bereshit — et ce premier mot dans la première lettre, le Beith. Obtenant du « Saint-Béni-Soit-Il », selon le Zohar, de présider à la création du monde, la lettre Beith fait présider avec elle le nombre 2, l’altérité, le « toi ». Dieu crie : « Toi, ma bien-aimée » dans un dire-expir-orgasme archétypiel, et la Création est. « Dire-expir-orgasme » sont inséparables l’un de l’autre. Les sept jours de la Création sont une coulée de cet expir-verbe divin. Les six premiers jours, un ordonnancement de l’énergie ainsi écoulée. Le septième jour, le Shabat, fond de l’expir, rétention du souffle créateur, préparation de l’inspir divin dans lequel toute la création est emportée. Cet inspir est l’histoire, notre histoire, celle de l’humanité, celle de chacun de nous. Dans le Shabat, l’étincelle de vie est déposée au cœur de chacun de nous, amorçant notre propre respiration dont le rythme à deux temps à l’image du rythme divin, s’inscrit dans l’inspir archétypiel. C’est l’histoire du 2 dans son retour à l’un. Bereshit, le premier mot de la Genèse, en contient deux : Bara – crée ; Shit, se pose dans un fondement. Dans le premier verset : « Bara shit Bara Elohim eth Hashamaim Veet Ha-aretz », le rythme à 2 temps saisit toute l’œuvre ; tout respire : diastole, systole ; le jour, la nuit ; lumière, ténèbre ; été, hiver ; flux et reflux des mers ; le rire et les larmes ; la naissance et la mort. Un immense cœur bat. Mais avant même que le premier jour fasse éclater la lumière, « le souffle de Dieu plane sur la face des eaux » – « Ve Roua’h Elohim Mera’hephet al Pne Hamaïm ». Une pneumatologie grandiose s’instaure. Le verbe « planer » ne rend pas compte de la force pénétrante en même temps que réchauffante et ouvrante du terme « Méra’hephet » : le souffle de Dieu, en même temps qu’un expir, est verbe. Il est une pénétration mâle et amoureuse des eaux qui alors éclatent et se séparent. C’est à la rupture des eaux que naît le Beith. Et le Beith lui-même est constitué, dit le 1er verset, de « Shamaîm » et « Aretz », « cieux et terre » qui plus tard seront appelés « humide et sec ». Je dirai aussi « inaccompli et accompli » qui sont les deux seuls réels temps du verbe hébraïque, car il
appert que la respiration de l’homme lui est donnée pour s’accomplir et que son accomplissement constitue l’inspir divin. Dans cette perspective, à l’image archétypielle, l’expir de l’homme est verbe, verbe créateur. Mais depuis le drame de la chute, il se diversifie en verbe créateur, sa fonction ontologique, et organe procréateur, fonction temporaire qui lui est donnée en attente de son retour aux normes ontologiques. Ce qui fait que le bloc urogénital de l’homme n’est qu’une diversification du bloc cardiorespiratoire et phonatoire. Nous en reparlerons plus loin. Dans l’immédiat considérons le schéma du 1er chapitre de la Genèse : Au sommet le « Roua’h Elohim » accomplit le verbe et fait éclater le Beith qui s’écoule dans les 6 jours. Nous pouvons représenter ceux-ci par deux triangles homologues dont chaque jour occupe un sommet.
1er jour : séparation de la Lumière des Ténèbres. 2e jour : séparation des Eaux-d’en-haut des Eaux-d’en-bas. Mi et Ma, aussitôt réunis dans la Shamaïm. 3e jour : double opération : séparation, au niveau des Eaux-d’en-bas, du sec et de l’humide ET mariage du sec et de l’humide pour la naissance de la verdure et de l’arbre. 4e jour : formation des luminaires dans la Shamaïm.
5e jour : création des oiseaux et des poissons. 6e jour : double opération : formation des animaux de la Adamah ET création de l’Adam. Le 7e jour, au fond de l’expir, Elohim se retire au cœur de la création dans le Nom Tétragramme que profile la lettre YOD. C’est cette lettre que nous retrouvons au cœur du mot Beith qui forment le mot Yod,
le
entouré des deux lettres
Bath – la fille. La création est la fille, vierge d’Israël lourde du
, qu’elle a pour vocation de mettre au monde.
Il importe que nous nous arrêtions un moment sur le Nom de HaShem — le NOM, disent les Hébreux —, si nous voulons saisir le message biblique de la respiration. HaShem n’est pas un dieu extérieur à l’homme. Il est le nom secret, la programmation même de l’Adam, l’établissement de ses structures soutenant le développement de son devenir. La promesse de son accomplissement est contenue dans l’énergie du NOM, énergie dans laquelle l’Adam aura à venir puiser pour la réaliser et donc se réaliser. Entre Adam, que nous sommes tous, et , que nous sommes tous appelés à devenir, est le dynamisme de l’image à la ressemblance, qui constitue la vie. Notre nom propre immédiat est participation à l’Adam. Notre nom secret qui constitue l’unicité de la personne, non encore accompli, est ce noyau, pierre des profondeurs désignée dans l’Apocalypse, participation à . (Apo II.17). Lorsque nous relisons le 1er verset du Bereshit : « Bara-shit Bara Elohim eth HaShamaïm ve eth HaAretz », nous pouvons entendre : Bara-shit Bara Elohim eth HaShem… Dans le principe Dieu crée le NOM et les deux lettres que nous laissons en suspens forment le nom de la mer, Yam ou du jour, Yom. Ce qui signifie qu’au départ est le nom, qu’il est caché au fond des eaux et que les jours, le temps nous est donné pour assécher les eaux et accomplir le nom. Ceci est précisé au second chapitre de la Genèse lorsque Dieu souffle dans les narines d’Adam le Nishemot ‘Haim. Mot à mot, Dieu souffle les Noms-germes, et l’Adam devient âme vivante. Nishemot est composé de Shemot, pluriel de Shem, et la première lettre, le Noun, est le « Germe ».
Dieu souffle dans les narines de l’Adam tous nos noms en germes qui accomplis, accompliront
.
Nous sommes soufflés dans notre Nom – l’Atman des Hindous sans doute. Et c’est lui, ce nom encore germe qui fait de nous des soufflants, des respirants et des parlants. Nishemot contient aussi le verbe Nashom – respirer. Il est dit aussitôt après, au verset 8 : « Dieu plante un jardin en Éden et Il place là l’Adam qu’Il a formé ». Vous ne serez pas étonnés si je vous dis que « placer » et « là » sont deux mots construits sur la racine Shem. Le jardin d’Éden n’est autre que l’état d’Adam placé dans son nom et lancé sur l’axe de son nom. C’est de lui qu’il est nourri, de lui que jaillit un fleuve – circulation de l’énergie. Je dirai — en employant un mot qui vous paraîtra vulgaire, mais n’est vulgaire qu’au vulgaire — qu’à partir de ce moment, l’homme est « pompé » par son nom-germe et pour devenir son nom HaShem
. La respiration est la vie même de cette pompe assurant l’accomplissement de .
Quand le drame de la chute arrive — dont il n’est pas temps de parler ici — l’homme quitte le jardin d’Éden, c’est-à-dire qu’il perd l’axe de son nom. Il reste cependant le nom qu’il est en puissance, sa personne profonde, participation à , — cela est signifié très fortement à la naissance de Caïn, premier homme né après la chute — mais il oublie qu’il l’est. Aliéné par rapport à sa personne, il n’a plus conscience d’avoir à pomper son nom. Tout est vide et néant. Sa respiration lui assure une vie existentielle, dans le sens étymologique du mot « hors de l’être », car hors de son axe. Et pourtant son nom-germe, son noyau continue de lui envoyer des énergies qu’il investit alors à la construction du monde extérieur, à l’acquisition de la « renommée » laissant peu à peu mourir son germe au lieu de le construire, construire . Ce nom, toutes les traditions en parlent, la nôtre plus particulièrement le révèle et le Christianisme l’incarne dans la personne du Christ — non pas le personnage défiguré, moralisateur et réducteur de l’homme qu’en a fait l’Occident, mais l’homme-Dieu qui vient redonner à l’Adam le Roua’h Elohim, comme dans une seconde Genèse, afin qu’il retrouve le chemin d’Éden, l’axe de son nom et qu’il redevienne souffle et verbe.
D’ailleurs le Christ lui-même, né de la tribu de Yéhouda et mort de la main de Yéhouda, est
s’incarnant dans l’histoire entre les deux portes de la naissance et de la mort. Car est
plus un Daleth, lettre qui signifie la « porte ». (à suivre)
L’EXPIR, Verbe créateur par Annick de SOUZENELLE (Revue Énergie Vital. No 12. Juillet-Août 1982) Le Shem archétype appelé encore « Tétragramme » va nous guider dans la compréhension de nos structures. Le Livre du Zohar (Livre de la Splendeur) dit : « Le Tétragramme est une Épée, le Yod est le pommeau, le Vav la lamme, les deux Hé les deux tranchants ». (Zohar III 274b). Le nom est l’Épée à deux tranchants où l’Épée tournoyante et flamboyante qui court dans toute la Bible, qui tue ou vivifie selon que nous restons hors de son axe ou que nous le retrouvons pour devenir l’Épée, le Verbe. Si nous regardons bien ce dessin que nous propose le Zohar, à côté de celui qui trace les sept jours de la Création et encore à côté de celui du « Corps divin » — appellation que les Hébreux emploient pour désigner l’Arbre des Séphiroth, symbole du corps humain, nous ne pouvons nier l’unité structurelle qui préside à ces Tracés.
La forme même de notre corps, la disposition de nos organes sont définis par le NOM-Germe dont nous sommes soufflés.
Si nous sommes attentifs : le Yod est la Tête, le Vav la colonne vertébrale, les deux Hé les deux côtés du corps. Et si nous savons que la lettre Hé est le souffle, les deux côtés du corps sont signifiés par nos deux poumons. La lettre (hé) a sa source dans cet hiéroglyphe égyptien : tracé qui évoluera au cours des deux millénaires précédents notre ère en supprimant d’abord la partie basse du corps de l’homme moins directement concernée pour ne garder que la partie haute qui, retournée sera à l’origine de notre lettre E. Mais notre petit bonhomme ne tend plus ses poumons, ses bras et ses mains qui les prolongent, vers la verticale, mais vers l’horizontale, ce qui rend compte d’un inconscient collectif désaxé, au sens que nous venons de dire. C’est pourquoi, réidentifié après la chute au monde animal du sixième jour, dans sa tunique de peau, Adam reçoit la partie basse du corps pour s’assumer dans le temps, dans la procréation. Cette partie basse est homologue de la partie haute — nous pourrions la dessiner ainsi, le sexe mâle étant homologue du Verbe et notre système urogénital, comme nous le disions tout à l’heure, un système respiratoire supplémentaire pour accomplir les temps, ou encore accomplir
les eaux — nous y reviendrons. Jetons encore un regard sur la lettre font 10, nombre du Yod.
(hé). Elle est énergie correspondant au nombre 5. 5 et 5
Ce n’est pas par hasard que nous avons 5 doigts à chaque main, comme à chaque pied, et que nos poumons sont distribués en 3 + 2 = 5 lobes. Venant confirmer cette arithmologie anatomique, le cœur est constitué de 3 valvules tricuspides à droite et 2 valvules mitrales à gauche. Je pense que nous pourrions trouver d’autres confirmations. Cinq est le nombre de la vie.
Ce n’est pas par hasard non plus que le premier souffle apparaisse au cinquième jour de la Genèse, lié à la création des poissons qui sont Nephesh ‘Haïa traduit par « âme vivante ». Le mot « âme » est plus qu’imprécis en français, l’arabe a gardé le verbe Nephesh pour exprimer la respiration. Ce 5e jour dans la Genèse est Yom ‘hamishi dont les letttes-énergies sont les mêmes que celles qui composent le Mashia’h — le messie, mot qui se décompose encore en Shem — le Nom, et ‘Haï – la Vie. Tout cela est en germe, dans ce que symbolise le poisson. Chez l’homme, qui récapitule les 6 jours de la Genèse, le souffle lui est donné dans l’embryon
des eaux matricielles. Déjà tout replié sur lui-même, comme une fleur tout humide qui ne s’est pas encore déployée, il reçoit de l’inspir-expir maternel les éléments qui assurent son oxydoréduction. La mère est son « arbre-vert ». Je m’explique : Né au 6e jour, l’Homme est déjà symbolisé et nourri par l’arbre érigé en son jour homologue, le 3e. Lui-même, cet arbre tire son origine d’avant le 1 er jour, directement dans le Rouah’ Elohim qui est source. L’Arbre est relais, physiologiquement et symboliquement, entre l’Homme et le Roua’h Elohim, ou entre l’Homme et sa source et son achèvement (cf. guérison d’un aveugle à Bethsaida. Marc VIII, 22-26). Chacun connaît cette respiration Homme-Arbre, admirable ballet de vie auquel président ces deux complémentaires respiratoires que sont l’hémoglobine-fer et la chlorophylle-magnésium.
Si la rencontre amoureuse et compénétrante de l’homme et de la femme a joué le rôle de Roua’hSouffle-Verbe créateur adombrant les eaux avant le 1 er jour, la femme joue le rôle d’arbre-vert magnésium du 3e jour pour former l’embryon fer-rouge (le nom d’Adam veut dire le « rouge ») du 6e jour. La mère assure le Bara-Shit-Bara de l’enfant entretenant le souffle de son Nom jusqu’à ce que, au jour de la naissance, se retirant dans un shabat, elle fasse jaillir son fruit et crie à son tour : « Toi, mon bien-aimé » Tandis que se déploie l’arbre respiratoire et phonatoire de celui qui désormais devra faire son nom et devenir Verbe. L’arbre pulmonaire se substitue alors à l’arbre-mère. Il est un arbre inversé (à moins que ce ne soit lui l’arbre droit ?) qui se nourrit par sa racine en haut, et se déploie sous le rayonnement du soleil-cœur dans la voûte cœliaque. Le ganglion stellaire n’est pas loin. Tout un cosmos en réduction est là.
Cet arbre pulmonaire en hébreu porte le nom de Réa qui, prononcé Rohé, est le verbe « voir », mot fait de 3 lettres que nous pourrions lire « la lumière dans le souffle ». Au niveau du visage qui récapitule le corps tout entier, les yeux sont homologues des poumons et des mains.
Les yeux sont aussi sources. Ayin est le mot qui veut dire « source », mais aussi « l’œil ». Le souffle divin, le Roua’h Elohim — source de vie, est aussi œil divin, source de lumière. Et nos mains sont lumières. Elles émanent la lumière et voient. Antennes, radars, prolongement de nos poumons qui, étymologiquement « voient ». Dans la perspective du symbolisme du corps, je serais tentée de dire que nos reins entendent et que nos poumons voient. L’expression populaire fait sortir la descendance de l’Homme de ses reins. Il est aussi juste de faire jaillir l’enfant divin, le NOM monde, de nos poumons.
— Verbe, que nous avons maintenant à mettre au
La première étape de la vie de l’Homme consiste à mettre au monde l’enfant extérieur et à écouter, la seconde à mettre au monde le Verbe. Toute la vie d’Israël est rythmée sur sa prière Shema Israël — écoule Israël, dans laquelle l’écoute « Shema » est en profondeur l’écoute du Shem qui déjà nous informe si nous savons tendre l’oreille, ou nos reins…
Le Christianisme qui s’enracine en lui fait jaillir le Verbe. De l’écoute au Verbe, d’innombrables respirations vont se scander. Pour ce faire, elles se scanderont chez tous les peuples dans la prière psalmodiée, prière mantra, prière hésychasme, le chant. La respiration prend alors sa racine dans les reins et jusque dans les profondeurs du pelvis. Elle devient une mémorisation rythmo-mélodique obéissant à un balancement exact du corps. Je vous renvoie pour ce travail aux remarquables travaux de l’anthropologue Marcel JOUSSE. Lorsque je prononce le mot « mémorisation », je l’emploi consciemment à deux niveaux. Au premier niveau, il est certain que cette grande respiration-prière du corps nourrit la mémoire qui devient vive. N’oublions pas que dans cette scance les hébreux apprenaient par cœur la Torah tout entière en quatre ans, et qu’aujourd’hui encore nos enfants retrouvent ce mouvement naturel pour mémoriser des chiffres ou des textes. Ce balancement, retour aux sources de la vie, redonne force et vigueur au cerveau primitif appelé rhinencéphale qui ne porte certainement pas par hasard ce nom, l’olfaction de l’homme liée donc à la respiration étant son sens le plus primitif et le ramenant à une quasi végétalisation — à l’Arbre, au bois. Le second niveau auquel j’entends le mot « mémorisation » nous ramène à ce que j’ai laissé volontairement en arrière pour faciliter l’ordre de cet exposé, mais qui est le centre même de la respiration. Je veux rappeler ici que la mémoire est en hébreu le même mot « Zo’karque », le « mâle ». Lorsque l’Adam au 6e jour est créé « mâle et femelle », il est créé « puissance de souvenir et Nom en puissance ». Le féminin est gardien du Nom. Que nous soyons hommes ou femmes, nous sommes l’Adam ayant à nous souvenir de notre NOM. Et ce NOM, nous l’avons vu, est enfoui dans la mère – mer. Mère, en tant qu’Adam est appelé à être mère de lui-même à lui-même pour passer les portes de son devenir.
Adam
mère et
porte
Et mer, parce que les eaux sont la réserve d’énergie dont Adam est structuré — le « non encore accompli ». Les eaux porteuses du Nom sont énoncées dès le premier verset de la Genèse, ce sont les Shamaïm — Shem et Maïm — que nous appelons cieux, qui sont à l’intérieur de nous. Et ceci nous permet de faire le dessin suivant, archétype de la respiration :
L’Homme du 6e jour, c’est-à-dire l’homme à son premier niveau de conscience, première terre intérieure, l’homme banal d’aujourd’hui doit descendre dans ses cieux intérieurs, dans la ténèbre, au 2e niveau énergétique non encore accompli pour l’épouser. (Le mâle doit épouser la femelle, Adam son Isha).
Ce ciel devient alors terre nouvelle, nouvelle lumière, un accomplissement. Puis il faudra continuer le chemin autant de fois qu’il sera nécessaire, descendre dans un nouveau ciel, expir, pour faire émerger une nouvelle terre, inspir. Et ainsi de suite, jusqu’à ce que nous ayons épousé tous les cieux, fait émerger toutes les terres, tous les niveaux de conscience, jusqu’à atteindre au noyau de l’Énergie, notre NOM.
Ce dessin est encore l’échelle de Jacob, colonne vertébrale cosmique, le Vav de
, qui,
totalement accomplie, met au monde le Shem . Nos poumons qui sont encore nos ailes intérieures, non encore déployées, sont là pour assurer cette respiration essentielle : montée dans la lumière, descente dans la ténèbre. Dans le mythe de Noé, la colombe et le corbeau sont ces deux oiseaux, deux poumons de l’Arche dans laquelle s’opère le Grand Œuvre Alchimique. Montée — inspir dans la lumière — colombe ; descente — expir dans la ténèbre — corbeau, jusqu’à ce que toutes les Eaux soient asséchées, jusqu’à la fin des temps, jusqu’au dernier souffle. Le Christ sur le bois, à l’extrémité de l’Arbre, s’écrie : « Tout est accompli » dernier expir jusqu’à l’ultime inspir de la Résurrection.
L’Esprit — Roua’h — Souffle a accompli le Verbe. Et le Verbe s’efface car, dit-Il : « Il est nécessaire que je m’en aille… Si je m’en vais, je vous enverrai le Paraclet. Quand viendra le Paraclet, le Roua’h de Vérité, Il vous conduira vers la connaissance totale ». (Jean XIV, 267). Le Christ-Verbe remet l’homme dans l’axe de son Nom, dans le Roua’h — Souffle qui le spire et le pompe pour qu’il devienne à son tour Verbe
.
La Tradition chrétienne chante pendant les dix jours qui séparent l’ascension de la descente du Roua’h Souffle-feu la traversée des 9 hiérarchies angéliques. Les poumons deviennent alors les ailes du grand aigle qui, sortant du temps, perce dans l’Éternité. L’intérieur est devenu l’extérieur. L’Homme est devenu son NOM L’homme du XXème siècle, coupé de ses profondeurs, aliéné par rapport à son être, est atteint de « la maladie », dont nos maladies physiques et psychiques sont les symptômes. Guérir, c’est aller au cœur de « la maladie », c’est « relier l’homme à lui-même ». « Va vers toi… » ordonne Dieu à Abraham[1]. Aller vers notre terre des profondeurs, tel est l’ordre que nous recevons tous pour réaliser la vocation finale : atteindre à l’unité. Quel est cet homme promis à ce royal destin ? L’Adam[2], chacun de nous. Les Hébreux appellent le Dieu Créateur, Élohim, « l’homme d’en haut », et Adam, « L’homme d’en bas ». Adam est symbole d’Élohim en tant qu’il est son image, et qu’il est appelé à sa ressemblance. La fonction d’Adam est essentiellement reconductrice à Celui qu’il symbolise et dont il reçoit pour ce faire la totale information, la totale énergie. Le moindre élément de la création est symbole, en tant qu’il est l’image de son homologue « en haut », énergie divine ainsi manifestée ; il est aussi appelé à rejoindre cette énergie dans la marche vers la ressemblance. L’Adam récapitule toute la création : il contient, il « est », totalité des énergies créées. Il est appelé à intégrer celles-ci, peu à peu, au fur et à mesure de son évolution, de sa marche vers la ressemblance. C’est cela, « se relier à lui-même », là est le sens de sa vie, de son histoire. Le temps lui est donné pour intégrer ses espaces intérieurs. Entre sa naissance et sa mort, ces deux pôles connus de la vie, les temps diffèrent selon les qualités des espaces intérieurs — champs de conscience — qu’il aborde.
La montée de ces « espaces-temps » est symbolisée chez l’Adam total (humanité) par l’échelle de Jacob ; chez l’Adam qui est chacun de nous, par sa colonne vertébrale. L’arbre des énergies divines L’évolution de l’humanité s’inscrit sur sa colonne cosmique. Les événements sociaux et politiques qui remuent l’histoire ponctuent cette évolution qu’il est certainement possible de déchiffrer sur le grand corps de l’humanité si nous savons extrapoler ce qui se passe au niveau de notre propre corps. Car chaque instant de notre vie s’inscrit sur lui. Sachons le lire. Le corps est un langage Il tient sa forme de son archétype même qui l’« informe », de celui que les Hébreux appellent le « corps divin ». Dans la douleur ou dans le plaisir, dans la moindre de nos sensations, il nous envoie des messages à côté desquels nous passons, sourds et aveugles au monde des réalités profondes qui déjà s’expriment et nous sollicitent bien avant que nous ayons pris conscience d’elles. Ce monde encore inconnu de celui qui s’ignore est analogue au féminin qui tend ses charmes et ses exigences jusqu’à ce que le masculin le prenne en considération. Notre corps se rappelle-t-il à nous dans la douleur ? Nous effaçons son langage au plus vite sans savoir que cela en est un. (Le dieu Hasard est tout-puissant). Nous sollicite-t-il dans le plaisir ? Un code moral en vigueur jusqu’ici, mais ayant encore, hélas ! quelque autorité, le tient alors pour Mal en personne ! Et si nous y prenons réellement du plaisir, nous ne soupçonnons pas pour autant sa dimension signifiante. Si, usant de la langue verte, nous disons « c’est le pied », nous ne savons pas ce que cette partie du corps vient faire dans l’histoire. Et pourtant, elle y est intimement liée. Qu’est ce « corps divin » dont les hébreux, dans leur courant mystique le plus ancien, nous transmettent le destin ? Il est l’Arbre des Énergies Divines, ou plus exactement « Arbre des récipients » de ces Énergies. Tel est l’Arbre des Séphiroth.
« L’homme d’en haut » selon cette tradition est fait des énergies se distribuant selon un tracé rigoureux à partir de ces « récipients », eux-mêmes rigoureusement décrits. L’« homme d’en bas » créé à son image, est un arbre. Il est construit sur trois triangles, dont le premier constitue la tête, et dont les deux autres sont la réflexion de ce premier, l’un au niveau de la poitrine, l’autre au niveau du complexe urogénital. Ces trois triangles déterminent trois étages de notre corps, et aussi trois étapes de notre vie. Les trois germes Nous arrivons au monde symboliquement au niveau des pieds. Ceux-ci ont la forme d’un germe. L’enfant est un germe riche de promesses. Il se développe jusqu’à l’âge adulte, symboliquement jusqu’à la base du premier triangle inversé que sont les hanches. Devenu adulte, il passe la porte dite « porte des hommes » et assume alors la seconde étape de sa vie en s’appuyant sur ses reins. Les reins ont la forme d’un germe. L’homme adulte est le germe du dieu en devenir. La véritable incarnation commence au seuil de cette porte. Auparavant, l’enfant a construit dix vertèbres (cinq sacrées, cinq lombaires). Maintenant, l’adulte construit ses douze vertèbres dorsales. Le nombre douze est celui des structures cosmiques. Douze mois de l’année, douze heures du jour et de la nuit, etc… Les douze travaux d’Hercule rendent compte de cette construction. Quand elle est achevée, l’homme passe la « porte des dieux », fermée par les clavicules (clefs) et que nul ne peut passer s’il n’a atteint cette dimension. La tête est le lieu de nos différents champs de conscience. La montée progressive de l’Arbre nous oblige à « changer de tête », jusqu’à mettre finalement sur nos épaules celle qui est totalement connaissante. C’est en ce sens que l’écoute est la base de cet étage, et que nos oreilles s’ouvrent peu à peu à la totale information. Elles ont la forme d’un germe, dernière promesse de l’homme qui, à cette dimension, devient verbe. L’écoute et la parole sont inséparables. La croissance de l’arbre La « poussée de sève » de notre arbre, se fait à partir du contradictoire, à partir de ces deux pôles de la dualité que comporte tout élément du monde créé. Ces deux pôles sont représentés par les deux axes latéraux du corps. L’axe central, notre colonne vertébrale, se constitue selon la façon dont nous intégrons nos dualités, ce contradictoire. Milieu de l’être, « lieu du Mi »[3], la colonne vertébrale est le chemin du retour de l’Adam à l’Élohim. Dans la première étape de la vie, l’enfant est modelé par cette dualité. Il vient au monde entre le père et la mère, se rythme dans l’alternance des jours et des nuits, des hivers et des étés, etc…, et prend peu à peu conscience de lui-même par rapport à l’autre. Lorsque les parents rendent compte dans leur comportement d’une unité vers laquelle ils tendent, lorsque les structures parentales (scolaires, religieuses, etc…) savent être au service de la vie qui leur est confiée au lieu de l’asservir, comme cela a lieu hélas ! couramment, l’enfant a quelque chance d’entrer — à l’âge de l’adolescence — dans l’expérience du premier triangle, avec les atouts nécessaires pour affronter le grand jeu de sa première « gestation ». Il entre en contact avec ses futures structures
d’adulte (par les deux côtés de ce triangle) et commence alors à contester, voire rejeter les structures parentales, ses béquilles. Il construit ses deux premières vertèbres en affrontant ses contradictions dans le désordre le plus douloureux, l’ignorance la plus désécurisante, l’absurdité, la servitude, l’angoisse. Le monde extérieur qui, aujourd’hui, ne lui renvoie qu’une image encore infantile, contribue peu à faire de lui un adulte. Toutes les structures sociales confortent ses béquilles ; le monde s’entredéchire dans des rapports de force, ayant oublié l’unité qui le constitue et qui forgerait sa vraie sécurité s’il y donnait foi. Quel drame s’est-il passé qui ait inscrit l’oubli au cœur des êtres ? La mémoire des peuples transmet, sous des formes différentes, l’histoire d’une « chute » qui, dans notre tradition judéochrétienne, se traduit par une blessure. Ève, l’humanité dans ses fonctions féminines (et non la femme par rapport à l’homme), donc toute l’humanité, arrive au monde blessée au pied. A la racine même de l’Arbre, dans son germe, les énergies s’écoulent et se perdent, compromettant la croissance. Une nature aliénée, en chacun de nous, obéit à des pulsions de mort. Une autre, écrasée derrière celle-ci, oubliée, fait connaître ses exigences de croissance comme elle le peut. Jacob, dans le mythe biblique, sera celle-ci par rapport à Ésaü, nature en chute qui joue le rôle d’aînesse, il confirmera sa volonté d’assumer les énergies dans le sens de la croissance de l’Arbre. Jacob se souvient. Nombreux sont ceux qui, parmi nous, ne se souviendront jamais. La Tradition est la mémoire collective, remplaçant notre mémoire personnelle. Il est urgent de l’interroger. Dans son mystère elle se révèle. Lorsque notre « Jacob » est trop faible et qu’Ésaü, l’hommeanimal en nous, l’homme identifié à ses énergies inconscientes est fort — et nos civilisations déploient tous les moyens de ne faire appel qu’à celui-là — l’exigence de la croissance ne se fera pas sentir. Comment l’adolescent peut-il émerger de ce triangle et naître ? La plupart meurent « in-utero », s’identifiant au monde extérieur et à ses valeurs. Seul celui qui prend conscience de la relativité de ces dernières et qui cherche s’il n’y a pas une lumière, un sens quelque part, après une longue déambulation labyrinthique, trouve une issue : le « col de l’utérus ». Auparavant, il a économisé une somme d’énergie en ne la dissipant pas inutilement à cet étage. Alors une somme d’énergie inconnue jusque-là se révèle. Dans le mythe, Jacob rencontre l’Ange avec lequel il se bat toute une nuit. A l’aube, l’Ange le quitte ; Jacob est vainqueur de lui-même. Son nom (somme d’énergie) change. Il est appelé Israël[4]. Mais il est aussi blessé à la hanche, blessure initiatique en regard de laquelle on peut se demander si la fracture du col du fémur de nos vieillards n’est pas la sollicitation à une montée de sève urgente avant la mort. L’homme (homme ou femme) qui, avec Jacob, est vainqueur de ce premier seuil et passe la « porte des hommes » devient alors un homme. Il va construire douze vertèbres. Ramassant ses énergies autour de ses reins (le ceinturon du guerrier) l’homme se fait guerrier de lui-même, pour conquérir la totalité de sa réserve d’énergies intérieures — sa « femme intérieure » — encore inconnue.
A cet étage, les deux pôles de la contradiction ne sont plus constitués par le bien et le mal, mais par ce qui est lumière et ce qui est encore dans les ténèbres. L’adulte ne grandit que dans ces épousailles (nécessaires) successives de lui-même avec lui-même, épousailles de la lumière et de la ténèbre. L’ombilic est le pôle lumière. Le cœur est le pôle ténèbre. En hébreu, l’ombilic est le mot Thabor. Et les mystères chrétiens nous révèlent que sur le mont Thabor s’est expérimenté le principe même de la lumière. Comme les disciples témoins voulaient s’y installer, Jésus lia immédiatement cette expérience à celle des ténèbres qui allaient suivre. Symboliquement, c’est le fond d’une forge qui assume ce travail de transformation de lumière en ténèbre, ou encore de plomb en or, disent les alchimistes. Le corps humain à cet étage est une petite forge, dont l’estomac est le fourneau, les poumons le soufflet, le cœur, le centre vital qui actionne le soufflet. Le foie engrange l’énergie devenue lumière, et chacun des autres organes assure un maillon de la chaîne opérative de cette grande alchimie. C’est une épreuve de feu. Si le premier triangle rencontré à l’âge de l’adolescence oblige à un baptême d’eau, ce triangle centré sur le cœur oblige au baptême de feu. C’est le mystère des épousailles. Mystère accompli par Noé dans l’arche, par Job sur son lit de douleur, par tout homme qui aborde ses enfers et descend dans les profondeurs de lui-même avant de monter dans les plus grandes hauteurs. Il montera autant de fois qu’il sera descendu. Symboliquement douze fois. Lorsque la ténèbre est totalement devenue lumière, que l’homme est devenu énergie pure, il passe la porte appelée « porte des dieux », après avoir été vérifié par l’aigle, qui seul a les clefs de la connaissance. Nos « clavicules » (petites clefs) le confirment. Nos mains sont connaissantes. Autant de fois qu’il sera descendu, l’homme aura mis sur ses épaules, symboliquement aussi, une nouvelle tête. Une tête à chaque fois plus connaissante, ouverte à la conscience d’une plus totale information. Ce sont les oreilles qui prennent en charge cette écoute. Elles sont les pieds et les reins de ce nouvel étage. Leur force déterminera la qualité du verbe émis, car l’homme ne parle qu’en tant qu’il entend. Il n’est aussi procréateur par le sexe qu’en attendant de devenir créateur par le verbe. Devenir verbe est toute sa vocation. La langue est le symbole de cette épée-verbe, pierre d’angle de l’édifice dont les dents sont les pierres de fondation. Le nez répète à cet étage la colonne vertébrale. Les yeux répètent les poumons et les mains. Entre les deux yeux, un centre de connaissance, troisième œil, s’ouvre sur les plus grands mystères. Nos cheveux, rayons de lumière, racines célestes, sont notre force. (Histoire de Samson, Juges, chap. 14, 15, 16). Les Chinois disent que « les reins fleurissent dans les cheveux ». Lorsque l’homme met sur ses épaules sa « dernière tête », celle qui est totalement informée, l’homme est totalement unifié. Il est totalement dieu, l’Élohim promis par Isaïe et dont le Christ vient confirmer la vérité.
« J’ai dit, vous êtes des Élohim ». (Jean X, 34)
[1] Genèse, 11, 1, traduit par le pléonasme : « Va, quitte… » [2] Le « premier homme » est un langage symbolique. Chacun de nous est Adam. [3] La tradition orale désigne par la racine « Mi » le monde divin. [4] Dieu-Homme Ce dont nous parle Annik de Souzenelle a des prolongements dans toutes les traditions et évidemment dans la tradition occidentale. Elle nous permet, grâce à une juste traduction des textes hébreux et grâce à une compréhension tout à fait exceptionnelle de leur symbolisme, de découvrir une concordance extraordinaire entre les trois plans de notre existence, physique, mental„ spirituel, que palier par palier nous avons à franchir pour remplir le rôle qui nous est assigné sur terre. Nous découvrons dans son analyse une métaphysique insoupçonnée de la plupart, et des analogies frappantes entre les différentes traditions qui sont issues les unes des autres et qui enrichissent le champ de notre connaissance. C’est donc l’étude du corps qu’aborde notre animatrice, de ce corps qui, pendant des siècles, a été nié et qui, à présent s’impose et donne lieu à de nombreuses études qui le réhabilitent. Ce sujet, nous dit-elle, s’est en quelque sorte imposé à elle. Après avoir été anesthésiste et s’étant « recyclée », elle étudiait la théologie et la psychologie, lorsqu’elle fut mise en contact avec un professeur d’hébreu qui lui proposa de lui donner un enseignement sur la Qabbale, ce qu’elle accepta avec joie, parce que cela lui permettait de remonter aux sources de notre civilisation. Et, au cours de ses recherches, elle s’aperçut qu’entre les trois disciplines qu’elle étudiait, il y avait un lien, une unité. Elle se mit donc à l’étude de l’Arbre des Séphiroth, l’Arbre traditionnel, mythique des Hébreux, qui trace le rythme très rigoureux de la manifestation des énergies divines. Et un jour, en méditant sur cet Arbre, elle a vu se superposer à lui en filigrane, le corps du Christ en Gloire, tel qu’on le voit dans nos basiliques romanes. Il s’est produit en elle une sorte d’identification de cet Arbre des Séphiroth avec la fresque romane. Cela se confirma par la lecture dans le Sepher Yezira que l’Arbre des Séphiroth était le dessin du « Corps Divin » à l’image duquel est dessiné l’homme. A partir de ce moment, toutes les fois que les organes ou les membres du corps étaient mentionnés dans un mythe, de quelqu’origine qu’il soit, tout prenait un sens, parce qu’elle voyait à quel niveau se situaient ces organes, ces membres et à quoi ils correspondaient par rapport aux énergies divines.
Plus tard elle s’aperçut également combien en psychothérapie ce schéma des énergies divines de l’Arbre des Séphiroth avait une résonance étonnante avec les êtres. Avant d’aborder l’étude de cet Arbre, il était nécessaire de mettre bien en évidence ce que Annik de Souzenelle entend par « symbole ». Symbole vient du grec et signifie « lancer ensemble, lancer avec… ». Or, rassembler deux éléments implique qu’ils étaient séparés et c’est cette conception qui a été la clef de toute la base de l’étude des symboles de la Genèse. Dans la Genèse, le deuxième jour il y a séparation : les Elohim que les Chrétiens appellent le « Grand Conseil », séparent les eaux primordiales dont le nom hébreu est Maim. Ces eaux semblent être une énorme matrice contenant en potentialité toute la Création. Et cette Création à partir du premier jour va s’effectuer à travers une série de séparations. Dans le mot « Maim » est contenu « Mi », représentant les eaux d’en-haut, et « Ma », représentant les eaux d’en-bas. Nous trouvons la racine mi dans bon nombre de mots, tels mirage, mystère, etc., et la racine ma dans matière, manifestation, etc. Nous n’entrerons pas dans les précisions que nous donne A. de Souzenelle, qu’il nous suffise de dire que le monde d’en-bas, Ma, est le reflet du monte d’en-haut, Mi. Chaque élément du monde de Ma est l’image d’un archétype du monde de Mi, il est le symbole de son archétype dont il a été séparé lors de la séparation des eaux. Et cela est si bien exprimé dans la Bible, que nous voyons Dieu, après avoir séparé, relier aussitôt les deux mondes par ce qu’Il appelle « l’étendue », en hébreu : « Shamaïm ». Séparer n’est peut-être pas le mot exact, mieux vaudrait dire « distinguer ». Le monde du Mi qui contient en potentialité toute la Création, va s’exprimer dans un grand expire divin à travers les sept jours de la Création pour former le monde du Ma. Si donc nous touchons un élément de la Création en-bas, nous touchons en-haut à son archétype qui nous répond. Les Hébreux n’hésitent pas à parler du monde divin, des Elohim, nom dans lequel nous retrouvons la racine him c’est-àdire mi, et qu’ils appellent « l’homme d’en-haut ». Et Adam, dans lequel nous retrouvons la racine ma, est « l’homme d’en-bas », appelé à sa ressemblance avec les Elohim c’est-à-dire à les « rejoindre ». De même qu’Adam est le fond de l’expire divin, étant l’image de Dieu ; de même tous les éléments de la Création ont pour vocation, comme dans un inspire de revenir à leur origine en remontant tous les échelons allant de la base du Ma à la jonction avec le Mi. Et ces échelons ne sont autres que les sept jours de la Création. Avant d’aller plus loin, posons-nous quelques questions. Qu’est-ce que le mythe ? Le mythe est un petit récit à notre niveau de signification plus ou moins satisfaisante, qui, en aucun cas, n’exprime en soi quelque chose, mais qui nous invite dans sa profondeur pour y trouver ce qu’il signifie. Et ce qu’il signifie se passe dans le monde du Mi, qui ne nous est pas immédiatement transmissible. Car si nous étions directement en face de la réalité du monde du Mi, nous ne pourrions pas le supporter, nos catégories mentales n’étant pas faites pour l’appréhender.
L’histoire des hommes que nous vivons tous les jours a elle aussi sa profondeur, sa couche mythique, sa signification que nous pouvons déceler si nous pénétrons dans notre être profond, dans le Mi que nous portons en nous. Les exégèses sont d’accord pour dire que les récifs bibliques sont mythiques jusqu’au Déluge et, qu’à partir de ce moment-là ils contiennent une couche historique. Mais celle-ci aussi a sa couche mythique. Annik de Souzenelle nous présente à présent le schéma de l’Arbre des Séphiroth, composé d’un axe central surmonté d’un triangle. Plus bas sur l’axe deux autres triangles renversés. Par des points elle marque l’emplacement de dix Séphiroth (au singulier Séphira). Qu’est-ce qu’une Séphira ? C’est un contenant dans lequel se déversent les énergies divines, semblables à l’eau s’écoulant dans des vasques successives. Il n’est pas exact de dire énergies divines, car le Divin est énergie. Il se manifeste à travers dix énergies, dix étant le symbole de l’Unité. Il y en a d’ailleurs plus de dix, les Hébreux nous apprenant qu’au-delà de la première Séphira en-haut, il y a en trois qui sont nommées, mais qui ne sont pas connues, qui ne se manifestent pas. Elles correspondent à des noyaux supérieurs de l’homme. La première est nommée l’Ayin, qui signifie « rien ». Tout vient de rien. Après l’Ayin, la seconde s’appelle l’Ayin Soph, soph voulant dire « limite » Ce « rien-limite », c’est l’infini. La troisième, juste au-dessus est l’Ayin Soph Aor, l’infinie Lumière. Aor : lumière. Ces trois Séphiroth restent dans l’inconnaissable. Et c’est ainsi qu’Annik de Souzenelle nous analyse et nous nomme toutes les Séphiroth partant de celle du sommet du triangle supérieur qui s’appelle Kather, la couronne de la triade supérieure avec Hochmah, la sagesse et Binah, l’intelligence. Cette triade se reflète une première fois dans le premier triangle renversé et une seconde fois dans le dernier et toutes les Séphiroth qui ont ici leur siège, sont appelées les Séphiroth de la Création, aux sept jours de laquelle elles correspondent. Et, finalement nous arrivons au bas de l’Arbre où la dernière Séphira, Malkuth, représente le Royaume. Si, au sommet le Roi est couronné, le Royaume, lui, est à l’opposé. Les Hébreux nomment aussi la Séphira du haut: le Roi, et la dernière en-bas, la Reine, ou la Vierge d’Israël. Pourquoi ? Parce que toutes les énergies se déversent d’en-haut vers le bas. Et toute la Création qui va être contenue dans Malkuth, devra pour épouser le Roi, remonter les degrés énergétiques de l’Arbre, en-haut duquel la Vierge sera couronnée, ainsi que le disent les Mystères Chrétiens. Mais cet Arbre symbolise aussi le corps de l’homme. Les Hébreux ont un dessin traditionnel sur lequel on voit l’homme d’en-haut et l’homme d’en-bas qui sont inversés et dont la tête de l’un est à la place des pieds de l’autre. En effet, si nous prenons cet arbre dont les racines sont enhaut, il va entièrement fleurir en-bas, et cette floraison, c’est toute la Création. L’homme, tel qu’il est, prend ses racines à partir de cette floraison et il va remonter pour s’épanouir en-haut. Nous avons donc bien ces deux hommes renversés. L’Arbre est structuré sur des éléments horizontaux et verticaux, les premiers sont le triangle supérieur qui se reflète par deux fois et fournit à ce niveau un quadrilatère qui tient ensemble la
base de l’Arbre. Les structures verticales sont essentiellement dans l’axe central, le « sentier » du milieu et les deux sentiers latéraux que nous pouvons, en pensée, prolonger vers le haut et le bas. Dans le récit biblique l’Arbre a été planté au milieu de l’Eden, qui est un jardin. Or toute terre, jardin ou non, est symbole d’état intérieur. Il nous est dit qu’il est deux arbres, celui de la vie et celui que nous appelons couramment de la dualité ou de la connaissance du bien et du mal. Ce dernier terme est mal traduit car il signifierait que le mal fasse partie de la Création, ce qui serait absurde. La traduction juste est celle de « Connaissance du bien (ce qui est bon) et de son contraire ». Le mot « bon », vient d’ailleurs ponctuer chaque jour de la Création. La perfection est un état qui implique un arrêt, une mort. On ne peut aller plus loin. Or, si nous disons que Dieu est parfait, nous l’arrêtons totalement, nous le limitons même. Ainsi Dieu va-t-il se faire connaître à travers son parfait et son contraire. Il ne peut être ni perfection absolue, ni mouvement absolu, car dans ce dernier cas il serait dans une continuation qui impliquerait une non-perfection. Il est donc à la fois l’immobilité absolue et le mouvement absolu, l’être et le nonêtre, etc. C’est cela l’Arbre de la dualité, que nous avons appelée le « mal » ce qui est un contresens. L’Arbre de vie, c’est la colonne vertébrale, c’est la kundalini, les énergies qui passent et les deux pôles du corps, sont les deux pôles de l’unique Réalité qui va se manifester à travers ; une chose et son contraire. Cette alternance des opposés, nous la trouvons de manière précise dans les deux premiers mots de la Genèse : Berechit et Bara. Berechit : dans le Principe, Bara : qui est créé. En fait Berechit, c’est Barachit : Bara : créé, Schit : s’arrête. Il y a déjà l’annonce de ce mouvement de création et d’arrêt, que nous trouvons aussi dans l’histoire de Loth. Celui-ci quitte Sodome et Gomorrhe et il est dit que sa femme, regardant en arrière est transformée en statue de sel. En hébreu c’est tout à fait différent. Loth a pour but d’aller sur la montagne, mais il n’a pas la force d’y aller d’un seul trait. Et cet arrêt est traduit par sa femme, le féminin en lui qui, dit la Bible, « ne regarde pas en avant ». Le sel, c’est la sagesse. Elle est un bloc parce qu’elle s’arrête, car il y a une nécessité de s’arrêter pour reprendre des forces, son souffle, pour toute une gestation nouvelle, la gestation est liée au féminin, tandis que la force est liée au masculin. Notre corps aussi, par ses deux côtés, va nous exprimer sa dualité et tout le programme qu’il va nous proposer, consistera de faire de cette dualité une unité. Et pour ce faire, l’être de sa naissance à son apogée, aura à franchir trois étages allant de Malkuth jusqu’au sentier de la Gloire et de la Victoire. La vieillesse alors devient une apothéose. Avec Annik de Souzenelle, nous suivons ce sentier. Elle nous donne les symboles et significations de ces trois étages séparés par des « portes » que nous avons à franchir et qui sont autant de morts et de renaissances. Nous ne pouvons pas ici donner toutes les précisions si
intéressantes et si instructives. Nous dirons cependant qu’Annick de Souzenelle nomme le premier étage celui de l’ « Avoir » et le deuxième celui de l’ « Etre », celui par lequel on entre dans la véritable incarnation qui est la véritable naissance. A cet étage l’être cherchera à faire de la dualité une unité. Et puis, ensuite, pour arriver au troisième étage, il faut franchir ce que toutes les traditions nomment : la Porte des Dieux. L’être va mettre au monde l’enfant divin qu’il est en germe. Il va vivre sa vraie fête que, à ce niveau-là, symbolise la Jérusalem Céleste, la Terre Promise. Il n’y a plus de dualité, l’Unité est totalement recouvrée. L’homme ainsi s’élève d’abord, construisant au premier étage les dix premières vertèbres, les cinq lombaires et les cinq sacrées qui nous font retrouver les dix plaies d’Égypte, les dix années des Mystères grecs, etc., puis au deuxième étage il lui faudra structurer les douze vertèbres dorsales (voir les douze travaux d’Hercule, les douze mois de l’année, les douze Apôtres, les douze signes du zodiaque), et enfin, au dernier étage, les sept vertèbres cervicales qui vont correspondre au septénaire apocalyptique. Et à chaque passage d’une vertèbre à l’autre, l’être vivra une petite mort et une petite renaissance, car comme le disait l’Apôtre Saint Paul : « On meurt et on ressuscite je ne sais combien de fois par jour ! » Et pour terminer, Annik de Souzenelle nous parle du pied, du rein et de l’oreille qui ont tous les trois la forme d’un germe et qui sont reliés les uns aux autres par une ligne droite. Il y a entre eux une correspondance étroite, tout est inclus dans chacun de ces organes. Les pieds vont être le point de départ de toutes les énergies. A. de Souzenelle fait la récapitulation de ce qui avait été dit les fois précédentes. Nous en donnons quelques remarques saillantes : Tout est en nous. Nous avons en nous tous les symboles et tous les mythes, nous sommes habités par la connaissance, mais cette connaissance est en grande partie voilée. Il semblerait que l’embryon, le germe qu’est l’enfant dans le ventre de sa mère, soit totalement connaissant. Et puis cela s’en va. Quand ? C’est difficile à dire. Il y a perte totale de la mémoire et notre vie va consister à nous souvenir. Puis elle passe à l’étude des structures verticales de l’Arbre des Séphiroth. Elles sont au nombre de trois — nous retrouvons toujours le nombre 3, essentiel dans toute structure : la colonne ou le sentier du milieu, selon la dénomination des Hébreux, et les deux sentiers de chaque côté que nous imaginons se prolonger vers le haut et vers le bas. Mais nous allons découvrir autre chose encore, à savoir ce que les Hébreux appellent le Tétragramme divin, c’est-à-dire le nom divin, Yod-Hé-Vov-Hé que nous appelons très mal à propos Yahvé ou Jéhovah, et qu’il est sacrilège d’employer. C’est pourquoi je ne me servirai plus de ces deux noms, moi non plus, dit-elle. Ils l’appellent ou plutôt ils reprennent chacune des lettres ou bien ils les remplacent par un autre nom. La plupart du temps ils disent Adonaï.
Et pourquoi ce mystère autour de ce nom ? Nous ne sommes pas capables de l’appréhender entièrement et de connaître la redoutable énergie qu’il contient. Car chaque lettre est une énergie. A chacun de ces sentiers, à chacune de ces séphira correspond une lettre qui est une énergie redoutable. Les Hébreux avaient encore conscience de cela et ils ne prononçaient pas un nom à la légère, de même qu’ils ne donnaient pas à un enfant un nom à la légère. Le Tétragramme mystérieux n’était prononcé qu’une fois seulement par an par le Grand Prêtre dans le Saint des Saints, selon une modulation qui s’est complètement perdue. Et cette qualité vibratoire était telle, que les Hébreux s’enfuyaient au loin en faisant un tintamarre terrible pour ne pas l’entendre, parce qu’ils avaient peur de mourir. Et A. de Souzenelle nous rappelle ce que les Hébreux disaient à Moïse lorsque la parole divine était clamée sur le Mont Sinaï : « Parle-nous toi, mais que Dieu ne parle pas, parce que s’Il parle, nous mourrons. » Si je vous parle de ce Tétragramme, c’est parce que je crois qu’il est infiniment lié à l’homme et que l’Arbre des Séphiroth n’en est que le développement. Le quatre est lié au symbolisme de la Création par rapport au trois qui est lié au Divin. Dans le contexte hébraïque la plupart des mots sont trinitaires. Et voilà ce Yod-Hé-Vov-Hé qui arrive avec quatre lettres pour la première fois, dans ce qui est appelé la « Seconde Genèse », après les sept jours de la Création que, à la fin de chacun, Elohim regardait en s’exclamant : « Comme cela est beau ! » et à la fin du sixième jour, c’est-à-dire la fin de la Création de l’homme : « C’est vraiment très beau ! » Le septième jour, celui du Sabbath, Dieu se retire au cœur de Sa création et ne s’impose plus : c’est à toi de jouer maintenant. Les artistes ont fait l’expérience que lorsqu’ils commencent une œuvre, celle-ci devient en un certain sens une énergie autonome, elle s’empare de l’artiste et crée avec lui. C’est cela qui se passe au niveau de la Seconde Genèse. Ce ne sont plus les Elohim, les énergies créatrices, mais Yod-Hé-Vov-Hé qui est lié à la Création et plus spécialement à l’homme. A la naissance de Caïn, Ève s’écrit : « J’ai acquis un homme avec l’aide de Dieu ! » il y a un jeu de mot entre acquérir et Caïn, la Bible est constellée de jeux de mots, car « le Saint, bénit soit-Il » comme disent les Hébreux, joue avec les lettres de l’alphabeth. Évidemment les traductions n’en tiennent pas compte. Et c’est une erreur de traduire ce petit mot qui relie Caïn à Dieu par « avec l’aide de » parce que ce petit mot « eth » correspond l’Alpha et a l’Oméga, c’est un mot qui ne se traduit pas. Il faudrait dire : « J’ai acquis un homme qui est alpha de structure (de commencement, si on veut) et qui doit devenir la dernière lettre de l’alphabeth, oméga, tout son devenir, toute sa vocation, qui doit devenir Yod-Hé-Vov-Hé. Il doit atteindre la ressemblance, remonter toute l’échelle, ce cordon ombilical qui sépare et unit en même temps les archétypes et
le monde de la manifestation. Le premier homme après la chute est encore l’image de la ressemblance, c’est dans sa conscience seule qu’il est coupé du monde divin. Comme disait Adam dans l’Éden : « J’ai entendu Ta voix, mais je ne Te vois plus. Je suis dans la crainte. » Bientôt il n’entendra même plus, mais il reste fondamentalement à l’image de la ressemblance. Ce Tétragramme s’inscrit dans l’Arbre des Séphiroth. A chaque lettre correspond un nombre qui représente toute son énergie. Le Yod qu’il est tentant de mettre tout en haut, représente 10, chacun des deux Hé de chaque côté 5, et le milieu qui relie les deux côtés ensemble, Vov, de même que le haut et le bas, représente le nombre 6. Le Yod-Hé-Vov-Hé est aussi l’Épée à deux tranchants, qui tue et vivifie, selon qu’on est capable ou non de recevoir la parole. C’est une épée de feu, mais aussi celle de la dualité. Le mot hébreu veut dire contradiction. Nous retrouvons en ramassé dans Yod-Hé-Vov-Hé tout le développement de l’Arbre des Séphiroth. Le Vov qui est le sentier du milieu et qui correspond à 6 — souvenez-vous que l’homme a été créé le sixième jour — est comme l’homme, la conjonction, il réunit en tant que microcosme tous les éléments de la Création en même temps qu’il est aussi le microthéos, réunissant le haut et le bas. Le Yod, la tête qui est en haut et qui a pour valeur 10, c’est l’unité reconquise et les deux Hé de chaque côté, en hébreu hé veut dire souffle, représentent deux fois cinq, égal 10. Dans le yoga occidental les deux mains se joignent au-dessus de la tête, symbolisant ce deux fois cinq. D’autre part, ces deux Hé, ces deux côtés symboliques du corps, sont notre souffle fait de deux pôles positif et négatif, que nous appelons les pôles de la contradiction ou de l’antinomie et de l’opposition. Tout ce qui va être créé le sera sur un mode binaire : la lumière et les ténèbres, les eaux d’en-haut et les eaux d’en-bas, la séparation du sec et de l’humide, etc. Nous-mêmes nous sommes créés sur un mode binaire, prenez le rythme cardiaque, diastole – systole, inspire – respire, etc. A l’intérieur du Jardin d’Éden — n’oublions pas que ce jardin est notre être intérieur — sont les deux Arbres qui nous structurent : l’Arbre de Vie et l’Arbre de la connaissance du bien et du mal, dont le nom donne lieu à un énorme malentendu, à un malentendu dramatique, qui nous a conduits dans l’impasse où nous sommes actuellement. Comme si le mal était en Éden. Le mot « bien » en hébreu est Tov, la perfection atteinte, elle ne peut aller plus loin. A la limite c’est la mort, l’arrêt. Il faut donc pour continuer la vie briser cette perfection en introduisant un élément nouveau qui va lui faire vivre son contraire pour pouvoir passer à un autre terme qui sera une nouvelle genèse qui, à son tour atteindra une nouvelle perfection, et ainsi de suite. En hébreu nous avons les mêmes lettres, dans les mots perfection et mort, c’est la même énergie.
Au bout de chaque perfection acquise il y a un recommencement qui se traduira à chaque étage par l’image d’un germe. Au premier niveau le pied a la forme d’un germe. Puis lorsque le premier étage sera franchi par l’enfant et qu’il se trouvera devant une nouvelle porte, le rein symbolisera le germe dont il a également la forme. Et quand enfin l’homme ira frapper à la Porte des Dieux, il trouvera l’oreille qui a elle aussi la forme d’un germe. L’Arbre de la connaissance du bien et du mal n’a donc rien à voir avec le mal. Il est l’Arbre des deux rôles de la Réalité qui se traduit au niveau de la manifestation et de notre expérience par des contraires qui constituent l’élément dynamique et déifiant de la vie. C’est cela qu’expriment les deux côtés de notre corps. Et l’enfant quand il va naître, va se trouver en face de ces contradictions qu’il va devoir intégrer. Toute sa vie va consister à vivre ces contradictions. Et un jour il prendra conscience que la vie ne consiste pas à s’opposer, à combattre, mais à épouser, à saisir, à vivre avec et ce sera alors son entrée dans le second étage. Question : Doit-il s’abandonner ou doit-il par une action consciente et volontaire aller vers l’épousailles ? Réponse : Le dynamisme à introduire est beaucoup plus dans une conscience et une attitude intérieure que dans la lutte. Toutes les traditions parleront de l’abandon qui est quelque chose de très conscient, qui n’a rien à voir avec le laisser-aller. Conscience d’être, mais pas volonté. Celleci joue au premier étage, ensuite c’est une vigilance active, une ouverture totale. Nous verrons plus tard que symboliquement le mariage du père et de la mère, de l’homme et de la femme, à ce niveau-là, n’a aucunement pour but la procréation de l’enfant qui lui, est quelque chose de béni et générateur de famille. Mais c’est la construction de chacun pour atteindre à la dimension de l’unité. C’est le véritable but de tout mariage. C’est par leur qualité d’être et non par ce qu’ils vont lui apprendre que les parents auront par identification à aider l’enfant à former ce sentier, sa colonne vertébrale. Et quand il passera la première porte, il va continuer à se structurer, mais non pas dans l’ignorance, mais dans la conscience que c’est un mariage à faire, une intégration de pôles contraires pour, au niveau de la tête, vivre l’unité conquise. Toutes les traditions nous rendent compte de cela. Étant chrétienne, je m’arrêterai à la tradition chrétienne dans laquelle cette trilogie des deux côtés et du sentier du milieu est vraiment vécue. Nous pouvons identifier cette colonne du milieu à la personne du Christ. Diverses personnes vont venir se placer de chaque côté de cette colonne du milieu et nous verrons les deux pôles de la dualité se vivre d’une façon étonnante. Nous verrons d’abord autour du Christ les deux personnages que sont Juda. L’un qui est le quatrième des tribus d’Israël (le Christ est né de la tribu de Juda), et puis le Juda de la main duquel il va mourir. Juda est un nom très proche de Yod-
Hé-Vov-Hé avec un daleth en plus. Le daleth a pour nombre 4 et symbolise l’incarnation. Entre ces deux Judas, le Christ qui est vraiment Yod-Hé-Vov-Hé, assume son incarnation. L’un et l’autre sont nécessaires à l’histoire, Juda qui préside à la naissance et Juda qui préside à la mort. Cela n’a absolument rien à voir avec le bien et le mal. Nous aurons après les deux Joseph, l’époux de la Vierge et Joseph d’Arimathie, l’un veillant sur la matrice de l’essence, l’autre sur la matrice du tombeau. Entre les deux la vie du Christ. En hébreu le nom Joseph veut dire augmenter, ajouter. En effet toutes naissance et mort sont une augmentation, une élévation. A chaque moment nous mourons dans une épreuve et nous naissons à la sortie de l’épreuve. Lorsque le Christ est sur la croix il y a les deux larrons, celui qui dit : « Souviens-toi de moi » et l’autre qui meurt. C’est le symbole de toute l’humanité, les deux pôles de la rigueur et de la miséricorde, l’un qui demande le souvenir et l’autre qui vit les rigueurs de la mort. Au pied de la croix il y a Jean et la Vierge, féminin et masculin. On pourrait citer encore beaucoup d’exemples, mais il y en a un sur lequel il faut revenir. Ce sont les deux Jean, Jean-Baptiste et Jean l’Évangéliste qui vont incarner Janus que les anciens adoraient, qu’ils représentaient avec deux visages sous la forme d’une seule tête, un visage jeune et un visage de vieillard, le passé et l’avenir. La seule tête qui n’était pas représentée était celle du présent, car le présent est insaisissable. Ce troisième visage est incarné par le Christ qui est le non-temps, l’intemporel. Et cela nous remet sur la voie capitale pour la compréhension de notre corps, à savoir que notre colonne vertébrale, ces vertèbres que nous allons construire les unes après les autres, nous obligent à vivre l’instant. Pourquoi ? Parce que nous sommes pétris d’absolu. Le drame c’est que nous sommes toujours à courir après le bonheur. Si nous ne savons pas tout arrêter et vivre la qualité de l’instant en nous greffant au monde du Mi, nous ne trouverons jamais le bonheur. Et A. de Souzenelle cite le mythe de Chronos qui détrôna son père Ouranos, dieu du ciel, ce qui veut dire qu’il coupa l’homme de la conscience divine et le fit vivre dans le temps dont chaque seconde est mangée, comme Chronos mangeait ses enfants, sauf Zeus qui fut sauvé par sa mère Géa (la terre) à l’aide des Cyclopes à l’œil frontal, l’œil de la connaissance, qui vont reconquérir le trône divin. Cela va être admirablement vécu par le Christ et les deux Jean. Jean-Baptiste, le vieil homme, revêtu de la tunique de peau, celui dont la tête va être coupée comme nous aurons à couper toutes nos fausses têtes et Jean l’Évangéliste, dont la vraie tête a reposé sur la poitrine du Christ. Il est l’homme vert, celui qui a revêtu la tête et qui ne doit plus mourir.
Une question : D’après tout ce que vous nous dites, il semblerait que les noms aient été dictés par une inspiration « connaissante ». Réponse : Les lettres sont des nœuds d’énergies, des archétypes, des vibrations d’où sortiront les mots. Question : Mais qu’est-ce qu’il y a derrière ces lettres ? Réponse : Le cordon ombilical représenté par le sentier du milieu continue à nous informer, à moins que nous nous coupions du monde des archétypes. Compte rendu de la réunion du 10.3.1977. Après avoir parlé des structures verticales du corps nous abordons aujourd’hui la base de la colonne verticale, c’est-à-dire le pied. Mais auparavant A. de Souzenelle nous rappelle que le mythe de la chute représente la coupure avec l’information supérieure, avec cette unité qui informe tout le corps. Nous sommes un peu comme un corps sans tête. Notre animatrice insiste beaucoup sur la vie intra-utérine de l’enfant où l’enfant reçoit toutes les vibrations de la mère en même temps que les siennes propres. Il va y avoir une rencontre de ces deux pôles qui vont assurer son équilibre et lui donneront déjà une certaine vie intérieure. Nous avons déjà par ce vécu dans le ventre de la mère, contact avec les archétypes et nous sommes préparés à rentrer petit à petit dans le monde de la création et de la dualité. Tout l’Arbre est contenu dans le germe et selon la formation intérieure de l’enfant, celui-ci va être appelé à pousser, a devenir un arbre de telle ou telle qualité. Il y a évidemment une grande part d’hérédité. Cet arbre qui est appelé à se développer, c’est l’homme. Il y a entre l’homme et l’arbre une complémentarité extraordinaire, ne serait-ce que par l’oxygène et le gaz carbonique. L’homme, en respirant rejette le gaz carbonique qui va être pris en charge par l’arbre qui va lui renvoyer de l’oxygène, etc. De plus la molécule qui donne à l’arbre la couleur verte et celle qui donne au sang la couleur rouge à une nuance près, c’est qu’il y a un élément fer dans le sang et un élément magnésium dans la chlorophylle. Beaucoup de passages dans les Livres Saints d’Orient et d’Occident expriment cette analogie. Lorsque le Christ guérit l’aveugle, celui-ci s’écrit : « Je vois les hommes, ils sont comme des arbres qui marchent ! » Nous allons voir l’homme rouge devenir l’homme vert et cet homme vert est symbolisé par l’arbre vert de la forêt. Ce n’est pas par hasard que lorsque passe le Christ, Zachée est en haut de l’arbre. Les disciples l’expriment : « C’est parce qu’il est de petite taille et qu’il a voulu regarder passer le Christ et qu’il est monté en haut de l’arbre. » Et ce n’est pas non plus par hasard que le soir le Christ a voulu faire sa demeure chez lui. Il symbolise l’homme qui a monté tout son arbre, c’est-a-dire qui est identifié à l’arbre vert.
Nous le verrons aussi dans le mythe de Jacob et d’Ésaü. Tout cela met l’accent sur cet homme qui doit devenir l’Arbre tout entier qui est contenu dans le germe, donc symboliquement dans le pied qui contient toutes les énergies en puissance et en particulier dans le talon qui en est la racine. Le nom Jacob signifie d’ailleurs talon. Si le pied est intact, l’arbre est intact. On pourrait citer beaucoup d’exemples, le serpent, après ce qu’il est convenu d’appeler la chute, pique Ève au talon, ce qui a pour conséquence la perte de toutes les énergies situées ce niveau. A. de Souzenelle nous détaille le mythe d’Œdipe qui en est une illustration extraordinaire. Nous en donnerons les étapes et certains commentaires : — Né d’un couple royal Laïos et Jocaste, la sibylle de Delphes prédit qu’Œdipe tuera son père et épousera sa mère. Épouvantés, ses parents décident de le faire mourir et le confient cet effet a un serviteur. Celui-ci pris de pitié abandonna l’enfant dans une forêt en l’attachant par son pied à un arbre. Le petit homme rouge est donc relié l’arbre vert. — Œdipe est recueilli par des bergers. Il grandit avec sa blessure au pied. Son nom signifie d’ailleurs pied gonflé. Il marche à quatre pattes. Il sent qu’il est appelé à une autre vie, que dans ses veines coule un autre sang, et il décide à son tour de consulter la sibylle qui lui révèle le même verdict. Croyant qu’il s’agit du berger et de sa femme, Œdipe décide de s’enfuir loin de Corinthe et commence une longue marche (le labyrinthe du premier étage de l’arbre) Il est en pleines ténèbres, il n’a pas encore perçu la lumière. C’est le moment peut-être le plus dramatique de l’homme, il cherche qui il est, n’ayant encore aucun contact en profondeur avec lui-même. La plupart des gens sont encore dans cet étage-là. Mais dans ce premier labyrinthe Œdipe est déjà conduit, car il a été pris en charge par l’arbre vert de la forêt et ces énergies vont le conduire sur la route de Thèbes. Thèbes représente pour les Grecs d’alors ce que représente pour les Juifs et les Chrétiens la Jérusalem céleste. Thèbes c’est l’unité. Plus de tohu-bohu de la dualité. Les lettres t et b constituent le fondement même de la dualité. Lorsqu’elles vont être réunies elles symboliseront la Création. Ce sont les mêmes lettres inversées qui forment « bat », la fille, qui n’est autre que la Vierge d’Israël, celle qui attend l’époux après avoir enfanté. — Avant d’arriver à Thèbes Oedipe est bousculé par un char qui lui « écrase le pied ». Furieux — il est encore situé dans des catégories très psychiques, — il tue le conducteur du char qui n’était autre que le Roi. A Thèbes il apprend la mort du souverain et que la Reine promet la couronne à celui qui délivrera la ville du Sphinx, un monstre qui en garde la porte et qui pose une énigme, dévorant tous ceux qui ne peuvent y répondre.
On a beaucoup discuté sur le mobile qui a poussé Œdipe à décider d’affronter le Sphinx. Pour A. de Souzenelle, il fut motivé par un désir de dépassement de soi-même, si fréquent chez les jeunes. A ce point de l’histoire, A. de Souzenelle en analyse le symbolisme : Les parents bergers et les parents royaux représentent deux étapes dans les relations parentales, les bergers sont les parents « en tunique de peau », desquels nous naissons. L’essence d’Œdipe était une essence royale, comme notre essence à chacun de nous est royale. Les textes de la Thora disent : « Chacun de nous est Roi et Prêtre ». Le Roi et la Reine de Thèbes sont les archétypes que porte en lui tout homme et Œdipe en particulier. Pour atteindre ce dépassement de lui-même, il lui faut gravir un à un les échelons de l’échelle de l’Arbre qu’il va constituer. Et, en premier lieu il devra passer par la porte symbolisée par le Sphinx, monstre terrifiant qui a des pieds de taureau, un corps de lion, des ailes d’aigle et un visage de femme. Cela nous rappelle tout de suite les quatre vivants du char d’Ézéchiel, de ce char qui de chaque côté est tiré vers une autre direction et qui avance tout de même. Nous sommes là devant le char des archétypes, au-delà de toutes ces contradictions. Ces vivants représentent les mêmes quatre niveaux que nous retrouvons dans les quatre Évangélistes : l’Aigle de Saint-Jean, le Lion de Saint-Marc, le Taureau de Saint-Luc et le visage d’ange de Saint-Mathieu. Et que signifie le Sphinx ? L’homme qui par ses pieds de taureau est lié à la terre, le taureau est aussi signe de fécondité ; le corps du lion représente le Lion solaire, le soleil de l’être ; l’Aigle est le gardien du seuil d’une des portes, il est la connaissance et le visage de femme, le visage de l’androgynie, symbolise le visage de l’homme qui a épousé son féminin et qui vit l’androgynie. C’est la dernière naissance de l’homme qui a retrouvé l’union totale entre ses deux polarités. Le Sphinx pose la question : « Quel est l’animal qui marche le matin sur quatre pieds, à midi sur deux pieds et le soir sur trois pieds ? » Et Œdipe qui a marché sur quatre pattes dans son enfance et qui n’a pu marcher sur deux pieds, mais comme un vieillard sur trois, cherchant son midi, c’est-à-dire le milieu, les relations avec le monde du Mi, se sent concerné et répond tout de suite : « C’est l’homme ! » Le Sphinx tombe alors du rocher et meurt en laissant sa place à Œdipe, symboliquement il lui laisse le haut de l’Arbre. Ce Sphinx qui est le gardien du seuil, de la porte que nous devons franchir, n’est rien d’autre que nous-mêmes, de notre devenir. Et cette dimension est terrifiante, parce que nous ne l’avons pas encore atteinte et que nous avons peur. C’est en nous mesurant à cette dimension que nous en acquérons la structure. A chaque seuil nouveau nous aurons à nous battre avec le gardien de la porte. Nous le retrouvons aussi dans la lutte de Jacob avec l’Ange, sauf que dans la tradition hébraïque il ne s’agit pas d’un
Ange, mais d’un Ich, c’est-à-dire d’un homme total, totalement réalisé. D’un côté de la porte le gardien du seuil nous paraît terrifiant, et l’autre côté il nous apparaît sous forme d’un Ange. — Œdipe épouse la Reine. Il en a quatre enfants symbolisant eux aussi les quatre étages que nous avons trouvés dans le Sphinx. Ismène, la force un peu élémentaire, le taureau ; Polynice : multiple victoire, l’étage du lion ; des douze travaux d’Hercule, des douze vertèbres à structurer, etc. ; Etéocle qui veut dire la vraie clef, les clavicules, les clefs donnant la libération et Antigone, le beau visage de la femme, l’être totalement réalisé qui a retrouvé non la virginité du premier âge, mais celle de la Terre-Mère, de la Terre-Vierge qui va enfanter l’enfant divin. Ce sont les quatre enfants qu’Œdipe a créés et non procréés. — Thèbes est détruite par la peste qui n’est pas la maladie que nous connaissons, mais un fléau général, c’est-à-dire, Thèbes est frappé de stérilité, que ce soit dans la végétation, chez les animaux ou chez les humains. En réalité il s’agit d’une humanité qui ne s’enfante pas elle-même sur des plans supérieurs. Nous trouverons la même chose lorsque nous étudierons le Déluge. L’humanité est donc stérile à l’exception d’Oedipe et de Jocaste, parce que, en épousant sa mère, Oedipe fait la seule œuvre « mâle » qui soit, qui est de remonter tous les plans dont nous sommes faits et qui sont exprimés dans la genèse de l’homme à travers le mythe hébraïque des six jours de la Création. Et l’homme en étant la récapitulation, va avoir à épouser à l’intérieur de lui chacun de ces plans et à être emmené petit à petit dans ses profondeurs. Tout le drame de la chute consiste en ce qu’il a voulu brûler les étapes. Donc l’homme qui veut atteindre ce qu’il est en potentialité, devra épouser tous les plans de la Création, qui sont des terres, des plans de conscience successifs et à la dernière terre il retrouve cette Mère terrifiante qui est simplement l’abîme qui le sépare de Dieu. Jocaste, lorsqu’elle a la révélation de la vérité va se pendre et Œdipe s’arrache les yeux. Il est désormais l’aveugle, conduit par Antigone et c’est ainsi qu’il arrive à l’étape finale qui est Colonos. Et c’est l’apothéose ! Il est reçu par les Euménides et il entre dans le séjour des dieux. Si Œdipe est aveugle au monde, c’est pour que s’ouvre son œil intérieur. C’est l’aveuglement de l’Apôtre Paul sur le chemin de Damas, c’est la descente du Christ dans le tombeau, c’est la déambulation dans les enfers qui sont la descente dans nos profondeurs. Au niveau de chacune des terres nous aurons à nous libérer de nos démons, c’est-à-dire de nos énergies qui ont été mal investies et qui se sont retournées contre nous, qui nous détruisent au lieu de nous construire. Toute la déambulation d’Œdipe tenant l’épaule d’Antigone, c’est la démarche de tous ceux qui descendent dans les enfers, accompagnés de leur guide. Colonos, c’est le haut de la colonne, c’est la dimension d’Antigone atteinte par Œdipe. Nous avons accompagné Œdipe, pied enflé, d’un bout à l’autre de son évolution. Et par cela même nous avons déjà vu un peu tout l’ensemble de l’Arbre, alors que c’est progressivement que
nous devons y arriver. Mais on ne peut pas couper les mythes antiques. Nous ne pouvons pas prendre le symbole de chacun de nos organes, si nous ne le voyons pas dans la totalité de son expression. Qu’est-ce que retourner dans le ventre de sa mère, si ce n’est se faire germe et revivre cet état qui est symbolisé par le pied ? A. de Souzenelle revient aux « trois portes » qui sont à franchir au cours de la vie, celle de l’Avoir, la première, au niveau du pied dont la forme ressemble à un germe, la deuxième, celle des Hommes, au niveau des reins qui ont également la forme d’un germe, et la troisième celle des Dieux, au niveau de l’oreille qui a encore la forme d’un germe. Ces trois germes dessinés à chacun des étages signifient bien la totalité des énergies dont nous aurons besoin pour franchir un nouvel étage de l’Arbre. Malheureusement nous avons vu que bien peu de forces montent hélas même jusqu’aux reins à cause de cette « blessure du pied » dont parlent toutes les traditions et qui représente une sorte de perte d’énergie au départ. Les différents mythes, déjà étudiés, nous montrent qu’une guérison est possible. Dans le mythe de Chiron, dans celui d’Œdipe et dans les Évangiles où nous voyons le Christ laver les pieds de ses Apôtres, afin qu’ils puissent prendre part au festin, car « il suffit que les pieds soient purs pour que l’être entier soit pur ! » Nous pouvons faire là le rapprochement avec le fait de se déchausser pour entrer dans un lieu saint. Aujourd’hui nous parlerons du genou, parce que nous sommes toujours encore dans la séphira Malkuth qui semble-t-il, rassemble pieds et genoux parce que liée à toute l’expérience de l’incarnation qui, elle, est liée à un symbole de terre. Dans ses recherches sur la signification de Malkuth et celle des genoux, A. de Souzenelle fait la proposition suivante : Malkuth est à la fois les pieds situés astrologiquement dans le signe d’eau des Poissons, et les genoux situés dans le signe de terre du Capricorne. Les pieds sont tout l’Arbre résumé en Malkuth, puisqu’ils sont le germe, la promesse et les genoux sont symboles d’incarnation, de prise de contact avec la terre. Ni les contes, ni les mythes, ni les légendes mettent les genoux en image. A. de Souzenelle s’est donc appuyée sur des gestes rituels ayant trait aux genoux ; s’agenouiller, l’adoubement dans la Chevalerie, dans lequel il y a une prise de terre avec le genou. Dans l’iconographie on voit des sortes de spirales autour des genoux et, en particulier chez le Christ en Gloire de Vezelay, comme si les genoux étaient liés à une sorte de couronne. Lorsqu’un enfant se blesse aux genoux, on dit qu’il est « couronné » et cette expression s’emploie surtout dans le langage hippologique. D’autre part, le genou est constitué par devant par une « rota » la rotule qui est bien une petite roue. On pourrait conclure que dans les genoux, nous voyons un peu la même promesse de couronne au niveau de l’incarnation, dans la dualité, que pour la Couronne située en-haut de la dernière séphira, celle à laquelle l’homme est destiné et qui va couronner ses épousailles avec le Divin. Le genou serait notre point de départ à partir du moment où nous naissons. Dans la Bible une traduction erronée dit que l’homme est né de la poussière de la terre, tandis que la vraie traduction, c’est « l’homme est né poussière de la terre, ce qui est différent, le mot
poussière qualifiant l’homme et non la terre. En hébreu le mot poussière se dit APHAR qui est constitué de PHAR = taureau, symbole de fécondité et qui préside à toutes les croissances de l’être. Lorsqu’au début de la Genèse Dieu dit : « Croissez et multipliez », c’est PHAR qui signifie croître, grandir. Il ne s’agit pas de multiplication selon le nombre, mais comme nous le verrons lorsque nous étudierons la séphira Yesod, de monter notre Arbre et de nous multiplier selon nos puissances essentielles. Les genoux sont donc liés à cette promesse de croissance, de fécondité, symbolisée par le taureau et il est dit que le Pharaon (même mot PHAR), quarante jours après sa mort, doit se mesurer à un taureau avant de devenir dieu. Nous ne pouvons prendre contact avec le Ciel qu’en prenant aussi contact avec la Terre, parce que ce sont deux pôles de « l’aimant cosmique ». Pour revenir au mot APHAR il est intéressant de noter que le mot PHARA signifie chevelure, c’est le haut de la tête qui est conquis. Les Hébreux jouent avec les lettres qui sont toutes des énergies et qui rendent compte beaucoup plus qu’un mot. Ce sont des jeux divins. Il est dit dans le Zohar : « Au commencement, le Saint, béni soit-Il, jouait avec les vingt-deux lettres de l’alphabet et en faisait ses délices ». Toute la force est dans la chevelure, tandis que le fait de se raser la tête, peut parfaitement signifier l’expression la plus haute, la plus noble, un renoncement total à toutes les forces, à toute sexualité. Revenons aux genoux, en hébreu BELEN. C’est le même mot qui, prononcé BERUK, veut dire bénédiction, bénédiction dans la fécondité de la Terre. Baraka vient de là, et si on lit BEKER en retournant le mot, c’est la nouvelle naissance. BOKER est le premier-né des animaux, chez les hommes on dira que ce sont les aînés. Mais nous savons, nous, qu’il s’agit de notre première naissance à nous-mêmes et non selon le nombre, alors que nous allons vivre au niveau des reins une deuxième naissance et au passage de la gorge une troisième. Et cette première naissance, le mot l’indique bien, se fait au niveau des genoux. Un autre retournement du mot est KERUB, les Chérubins avec lesquels nous retrouvons la notion de roue, parce que dans beaucoup d’iconographies, particulièrement la Judéo-chrétienne et la Persane, ceux-ci sont décrits par de grandes roues avec des yeux tout autour, tel le char vivant dans le premier chapitre d’Ézéchiel. Saturne aussi a son anneau, sa roue. Or, il est lié sur le plan des métaux au plomb et le mot PHAR, poussière, avec une lettre de plus, le Tav, la dernière lettre de l’alphabet, est comme l’énergie la plus lourde, la plus condensée. L’homme qui arrive au monde est plomb et toute l’alchimie va se servir de cette image pour que le plomb devienne or.
Le genou est donc lié dès le départ à la Terre extérieure. Mais la Terre est aussi symbole de notre Terre intérieure. Dans tous les mythes, lorsqu’il est question de terre, il s’agit de notre terre intérieure, c’est-à-dire de notre plan de conscience. Car nous ne voyons le cosmos qu’au niveau de notre plan de conscience. Nous la voyons différente selon le niveau auquel nous sommes. Dans l’Apocalypse le fils de l’Homme va dire : « Voici les Cieux nouveaux et la Terre nouvelle ». Il ne s’agit pas de planètes, mais d’une terre intérieure nouvelle qui va amener une nouvelle conscience. Et chaque fois que nous avons un personnage biblique important, le nom de la terre à laquelle il appartient, va toujours être signifié. Le seul enseignement sur les genoux en hébreu et que connaisse A. de Souzenelle est celui où Elie, pour prier, monte au Carmel et « met ses genoux en terre et sa tête entre les genoux ». Autrement dit les genoux, revenant dans la poussière, prennent leur capacité de fécondité et la tête vient rejoindre les genoux. C’est le cycle total qui est accompli. Nous abordons maintenant les jambes, les cuisses et les membres inférieurs en général. Les jambes, dans toutes les traditions, sont symbole de nos activités primaires, de nos énergies les plus archaïques. Elles sont particulièrement symbolisées par le cheval qui est entièrement dans ses jambes et qui, lorsqu’il a une jambe abîmée, est abattu parce qu’il est avant tout coursier. Quels sont les rapports entre le coursier et l’homme ? Quand l’homme, dans la fougue de la jeunesse, dans ses forces les plus primaires n’est pas capable de monter son cheval, c’est lui qui emmène l’homme où bon lui semble, l’homme n’est pas encore devenu homme. Et tout le symbole de la Chevalerie sera d’apprendre à l’homme de monter son cheval et non pas de le tuer. Car celui qui tue ces forces là, ces forces animales qui sont en tout homme et qu’il doit accepter et assumer, les verra se retourner contre lui. Les articulations sont extrêmement importantes, tout est encore à découvrir à ce sujet. Avec la cuisse nous sommes en liaison avec les hanches, parce que en hébreu, c’est le même mot, si ce n’est que la cuisse fait fonction d’organe mâle et la hanche d’organe féminin. La hanche est la coupelle de la cuisse. «Naître de la cuisse de Jupiter » signifie nettement notre seconde naissance au niveau de la Porte des Hommes. Il y a des rites très curieux au sujet de la cuisse : lorsque Abraham envoie son serviteur à la recherche d’une femme pour Isaac, il lui dit : « Mets ta main sous ma cuisse, et jure-moi… ». La main, c’est la connaissance. Il y a là comme une information qui va être liée à ce contact entre la main du serviteur et la cuisse du maître, comme si la transmission passait à travers elle. La cuisse est aussi liée à la sexualité, mais aussi à toutes les énergies qui vont être investies à un passage à un autre plan.
Dans le mythe d’Hercule, la déesse Héra qui est la force germinatrice, introduit deux serpents dans le berceau de l’enfant afin de le faire mourir. Les deux serpents sont les forces de la kundalini qui doivent le faire mourir, parce qu’il faut qu’il vive une mort et ensuite une résurrection. Ce n’est que par les morts et résurrections successives que nous pourront affronter les Gardiens du Seuil de différentes Portes. En hébreu le genou c’est BEREK et la cuisse YAREK avec un Yod à la place d’un Beith. Les lettres du genou ont respectivement pour valeur Reich, 200 et le Kaf, 20, ce qui fait 222, rien que des 2. Voilà le rapport avec la Terre, le genou reçoit toutes les informations de la Terre et le Yod, l’organe mâle, apporte une force divine. Le Yod = 10, est l’unité. C’est le Divin qui va percuter le haut de la cuisse. A chaque rencontre avec l’Unité, se trouve le Divin. Compte rendu de la réunion du 12.5.1977 Nous allons parler de Yesod situé à la base du triangle inférieur renversé et qui correspond à l’énergie, appelée « fondement ». C’est ce personnage mystérieux dont on ne sait pas d’où il vient et où il va, Melchitsedek, qui a illustré le nom de Tsedek, qui veut dire justice. Non pas celle qui récompense le bien et punit le mal, notion due à une erreur de traduction et qui a déformé notre conception, mais la rigueur qui n’a rien à voir avec récompense ou châtiment. Cette justice qui occupe l’axe du milieu correspond au niveau du corps à notre colonne vertébrale qui ponctue toujours le troisième terme des deux pôles de la dualité que nous essayons d’intégrer. Notion d’équilibre et d’harmonie, elle est justesse, juste rapport entre la lumière et les ténèbres, entre le sec et l’humide, entre tous les pôles opposés de la dualité qui font nos contradictions si douloureuses, alors que si nous les vivons en harmonie, nous passons à des plans supérieurs qui nous valorisent. La séphira Yesod, la base, le fondement, correspond au pouvoir créateur divin. Elle précède en partant du haut, Malkuth, le Royaume qui est le même mot que Malekoth, l’Œuvre divine toute entière. Yesod est la séphira de l’Acte Créateur dans laquelle Malkuth va exprimer cette diversité extraordinaire de la Création. Au niveau du corps elle représente la base de la colonne vertébrale et le sexe. Située à la base du second triangle renversé par rapport au triangle archétype, elle est un premier miroir de Kether qui est en-haut et qui est la Couronne. Nous avons dans ce triangle toute une matrice qui va assurer la maturation du germe. Et, de même qu’en-haut l’homme est appelé à assumer sa dernière naissance, nous allons en-bas avoir la naissance de l’enfant. Ce triangle inférieur va assurer la procréation selon le nombre, la perpétuation de l’humanité, tant que celle-ci n’aura pas pris conscience d’une autre croissance et d’une autre création. L’humanité va se mettre au monde et toutes les naissances successives qu’elle a à accomplir prendront ici leur départ.
Nous avons l’impression actuellement de vivre une fin des Temps. Il semblerait que l’humanité doive passer très vite une nouvelle étape très importante, sans quoi elle va y rester. Les événements extérieurs nous forcent à franchir cette Porte et ceux qui ne l’auront pas passée seront ratissés dans des épreuves terribles. Chaque fois que dans les Écritures il est question de « femmes enceintes », c’est de cette procréation qu’il s’agit, car l’humanité est faite pour la procréation selon le Verbe. Il y a une dialectique très importante entre le triangle supérieur et ce triangle inférieur. Or l’homme s’est coupé de cette information essentielle depuis ce qui est censé être appelé la chute, il a oublié ce qu’il était, il ne se multiplie plus selon le Verbe. C’est là tout le drame du Déluge où seul Noé semble avoir pris conscience. Et Dieu lui dit: « Construis ton Arche », c’est-à-dire son quadrilatère qui se trouve au-dessus des eaux. Le Déluge est une anarchie des eaux, une matrice qui ne sait plus comment assumer sa gestation. Noé, en construisant son Arche, construira son triangle supérieur. Yesod est à la base de cela. Sod en hébreu signifie le secret et le Yod qui précède, c’est le Divin. On peut donc traduire Yesod par Secret Divin. A partir de la séphira Yesod, l’adolescent se sent relié à ses véritables structures et veut envoyer promener ses béquilles, toutes les dualités qui l’empêchaient de vivre sa vie. C’est à partir de ce moment là qu’on peut vivre une sexualité qui va s’exprimer par le mariage de deux pôles, de nos déchirantes dualités intérieures. C’est aussi symbole du mariage de l’homme avec la femme, qui seul à ce niveau là se fait de façon « juste », lorsque les deux pôles auront trouvé leur troisième terme qui n’a rien à faire avec l’enfant qui n’en est que le symbole. L’archétype du mariage est de mettre au monde ce troisième terme. Car au fur et à mesure des différents mariages que nous aurons à faire à l’intérieur de nous et qui seront de plus en plus précis, nous aurons à mettre au monde l’enfant divin. Il ne faut pas confondre l’enfant qui assure la continuité de l’espèce avec l’enfant divin. Tout un courant religieux occidental a proposé la procréation comme but du mariage, ce qui a donné lieu à des situations morales dramatiques. Il faut dénoncer l’erreur néfaste d’avoir déclaré tabou tout ce qui touche à la sexualité, alors que le secret est tout à fait autre chose. Or la sexualité fait partie de notre être et nous avons à l’assumer. Et parce que cela a été vécu jusqu’à présent dans le mauvais sens du terme, nous vivons actuellement ce déferlement qui désacralise tout. Reparlons de la signification de « justesse ». Une partie seulement des énergies doivent être vécues au niveau de Yesod, afin qu’il y en ait encore de disponibles pour construire l’Arche. Elles doivent donc être vécues avec « justesse », d’où ce nom de Tsedek. Melchitsedek est le premier dans l’ordre des sacrificateurs, le sacrifice, faire le sacré, qui n’a rien à voir avec le sens qu’on lui donne communément. On ne sait rien de Melchitsedek sinon
qu’Abraham lui donnait la dîme, c’est-à-dire qu’il devait lui consacrer un dixième de ses énergies. Les neuf-dixièmes pouvaient être vécus, mais un dixième devait être consacré pour monter l’Arbre. Le 9 est la perfection féminine, un accomplissement de la Création, avant qu’elle ne rencontre le 10 divin. Il est intéressant, dans cette perspective de voir la signification chez les Juifs de la circoncision. Elle ne fait pas partie de la Loi mosaïque comme il en est de tous les rites auxquels obéissent les Hébreux. Elle leur est bien antérieure. Elle est demandée à Abraham dans le pacte de la « Nouvelle Alliance ». Il y a toujours de nouvelles alliances entre Dieu et l’homme. Parce que Dieu propose, mais l’homme s’obstine à suivre des chemins différents. Alors Dieu va le rechercher là ou il est et lui offre une nouvelle alliance, parce qu’il y a mariage entre Dieu et sa Création. L’épouse s’enfuit. Tous les textes parlent de cette prostituée qui va avec de faux amants. Mais Dieu aime toujours son épouse et lui propose chaque fois un nouveau mariage. Dieu promet à Abraham de devenir père d’une grande nation s’il s’engage à circoncire tous les mâles qui naîtront de lui. Or qu’est-ce que c’est que la circoncision ? C’est la taille du sexe de l’homme au moment où la fécondité lui est promise. Abraham et Sarah étaient stériles avant ce pacte, stériles dans le sens de la stérilité essentielle de l’humanité qui, depuis sa chute est incapable de monter l’Arbre et de donner des fruits. A travers Abraham naîtront les douze tribus d’Israël qui donneront naissance à celui qui va devenir le Messie, le Christ pour les Chrétiens et le Messie encore attendu pour les Juifs. La fécondité promise mettra au monde le Verbe créateur. La circoncision, ainsi comprise, n’est autre que la loi à laquelle obéit toute la création : pour mettre l’arbre à fruit, il faut tailler. Ismaël à ce moment a 12 ans, il est le fils de la servante qui procrée, tandis que Sarah est l’humanité, fille de Dieu. En réalité il n’y a qu’une humanité, mais symboliquement elle est représentée dans ses deux dimensions. Ismaël sera circoncis à 12 ans et toute sa lignée, en particulier le monde arabe va être circoncis au moment de la puberté. L’effet en est extrêmement différent. Celle pratiquée à la naissance par les Juifs, semblerait rassembler toutes les énergies de l’enfant et permettrait de les faire monter, comme la sève monte dans l’arbre lorsqu’il est taillé. Les lettres de la circoncision sont le M et le L et tout ce qui a trait en hébreu à la fécondité contient ces deux lettres. Au premier Concile tenu par les Chrétiens, saint Pierre voulait continuer cette pratique, mais saint Paul pensant que le Messie étant venu et ayant donné à l’homme sa dimension de créateur, la circoncision devenait inutile. Un autre problème se pose : pourquoi la femme est-elle dite impure au moment de ses règles et après qu’elle ait mis au monde un enfant ? Dans toutes les traditions il y a à ces moments-là, nécessité de Purification. Là encore il ne faut pas prendre pureté dans son sens moral. La pureté ou l’impureté sont liées aux normes d’Adam avant la chute et à ce qu’il est devenu après. Dieu a
demandé à Noé d’introduire dans l’Arche « les animaux purs et impurs ». Il semblerait que l’humanité dans son rythme de sexualité est liée à la Lune, comme les règles de la femme le sont au cycle lunaire et que cette sexualité vécue en tant que procréation, en tant que nécessité dans le temps, soit formulée comme impure au sens étymologique du mot et non au sens moral. Adam n’avait pas besoin de procréer. C’est difficile pour nous de le comprendre, d’avoir accès à cette réalité, mais il importe qu’au lieu de ramener la Réalité essentielle à nos petites catégories, nous contemplions quelque chose qui nous dépasse. C’est la femme qui assume cette notion de procréation, mais elle est aussi l’humanité toute entière qui sera impure tant que la femme le sera. L’humanité dans son principe ontologique n’a pas à procréer, mais à réintégrer son humanité, son éternité. C’est la sortie du temps. Depuis cette notion de chute nous avons vers la mort une pulsion qui est terrible. Nous assurons notre descendance au lieu d’assurer notre ascendance. La vraie procréation c’est celle où nous nous mettons au monde nous-mêmes et cela se fera par des épreuves — surtout dans les premiers triangles. Après nous pourrons-nous libérer peu à peu, parce que nous serons dans une harmonie et dans des plans de conscience dans lesquels nous continuerons nous-mêmes ces enfantements. Une autre façon de comprendre le mot Yesod d’après les lettres qui le forment et en ne considérant comme cela se fait en hébreu que les trois consonnes, nous avons la lettre Samech qui forme le milieu et deux lettres, Daleth et Yod qui l’encadrent. Il semblerait que ces trois lettres soient la base, l’appui de toute la conscience divine de l’homme. Cela est confirmé par ce que rapportent toutes les traditions, à savoir que l’homme aurait à la base de la colonne vertébrale une toute petite partie infinitésimale de son squelette, qui serait imputrescible. Même à l’incinération cette partie ne serait pas consumée. Elle est cette partie sacrée de l’être qui va monter peu à peu tout le long de la colonne vertébrale. Chez les Hébreux elle est appelée LUS qui signifie l’amande. Le mot lux en latin en découle probablement. On retrouve ce mot LUS au moment où Jacob a sa vision de l’échelle qui n’est autre que la colonne vertébrale au niveau de chacun de nous. Et la vie de Jacob ne sera que montée de l’échelle. A travers lui l’humanité va devenir lumière. Et cette lumière sera symbolisée par la Mandorle qui n’est autre que cette amande qui était intérieure et qui devient extérieure par un retournement de toutes les énergies. La notion de l’amande se retrouve aussi dans tout le symbolisme de l’Émeraude qui va devenir la Coupe du Graal. En réponse à une question : Le Daleth, le 4, ce sont les structures. Il n’y a pas de mise au monde sans matrice pour la recevoir. On verra toujours les justes rapports entre le 3 qui est la vie et le 4. Dieu dit au 3 et au 4 : « Ne vous séparez jamais, car vous êtes indispensables l’un à l’autre. » Car que serait le 3, la vie sans les structures, le 4, et que seraient les structures sans la vie ? Nous passons maintenant au mythe du Déluge qui est l’anarchie des eaux, auxquelles manque le juste rapport entre les eaux du haut et les eaux du bas, c’est-à-dire que les énergies de la création
ne sont plus à l’image des énergies divines. Lorsqu’il y a « injustesse » intérieure, cela se traduit par des troubles extérieurs. Nous le vivons actuellement. L’homme, donc, se multipliait sur la terre avant d’avoir cru et Dieu dit à Noé qui est juste, qui est tsedek : « Construis l’Arche », en lui donnant toutes les proportions qui se rapprochent de celles de l’Arche d’Alliance, du Temple de Salomon et de la Jérusalem Céleste. Il est intéressant de les étudier et de les comparer. Que sont tous les hommes de la Création qui y seront rassemblés ? Ce sont les vivants, ce sont toutes les énergies. Une chose intéressante, c’est que Noé entre dans l’Arche avec ses fils et sa femme avec ses filles. Mais lorsqu’ils en sortent, Noé sera avec sa femme et ses fils avec leurs femmes. Le mariage s’est accompli dans l’Arche. Nous retrouvons la même chose dans le mythe babylonien, dans l’histoire de Gilgamesh. Parti à la conquête de l’immortalité, il va retrouver dans l’Au-delà son ancêtre Out-Naphishta. Sous beaucoup d’aspects l’histoire d’Out-Naphishta est celle du Déluge de Noé. Lui aussi, reçoit de Dieu l’ordre de construire non une Arche, mais un bateau. Comme Noé, il entre seul dans le bateau et en ressort avec sa femme et il est dit : « Jusque là Out-Naphishta n’était qu’un homme, dorénavant Out-Naphishta et sa femme seront comme les dieux, pareils à nous. Qu’ils aillent habiter l’embouchure des fleuves. » L’un et l’autre sont entrés par la Porte des Hommes et ressortis par la Porte des Dieux. En hébreu le mot Arche symbolise tout mariage, c’est le mot Teba qui reprend les deux lettres de Tohu-va-Bohu de la Genèse qui signifie chaos primordial. Teba va assurer le mariage de toutes les énergies qui sont entrées en elle et cela va être signifié par toute une symbolique alchimiste, par le vol des oiseaux, celui du corbeau et de la colombe qui représentent ce que les alchimistes appellent : l’Œuvre au noir et l’Œuvre au blanc. C’est la séparation du subtil de l’épais. Noé se sépare du reste de la population parce qu’il est devenu le « Juste », ayant vaincu les dualités que chacun de nous a en soi et qui créent nos conflits intérieurs, jusqu’à ce qu’il y ait irruption hors de l’Arche qui n’est autre à ce moment là que l’homme, appelé Œuvre rouge par les alchimistes, et qui va être symbolisée par l’ivresse de Noé, celle que les Chrétiens appellent ivresse de l’Esprit Saint, au cours de laquelle il découvre la nudité d’Adam avant la chute. L’Œuvre Rouge se retrouve à la Pentecôte avec l’éclatement des langues de feu. Et, avec les trois fils de Noé, nous verrons la démarche des descendants de Noé, celle de l’humanité. Sem, c’est tous les Sémites et en particulier le peuple juif. Sem et Japhet vont recouvrir la nudité de leur père en marchant à reculons c’est-à-dire qu’ils revoilent la Lumière divine qu’ils n’ont pas la force de regarder et Cham qui aura jeté sur elle un regard impur, sera « brulé » et maudit. De lui descendent les Chamites, le peuple noir et en particulier les Éthiopiens. L’Arche va se poser sur le Mont Ararat, mot formé en hébreu de Aror, malédiction, qui est l’injuste rapport établi entre l’homme et la Terre, entre Adam et Adama. Dieu ne dit pas, comme cela a été traduit : « La Terre est maudite à cause de toi », mais : « La Terre est maudite dans sa
relation à toi », parce que tu n’es plus juste intérieurement. Ce n’est pas la punition de Dieu, mais c’est ce que l’homme a fait de sa relation avec la Création. Alors avec la dernière lettre ajoutée à Aror, c’est-à-dire Ararat, c’est la malédiction retournée, c’est la bénédiction, la malédiction vaincue. Dans Ma-Boul, Ma est la matrice et Boul, le fruit. C’est ce dont l’humanité aura à prendre conscience par le Déluge qui remettra toutes les énergies à leur place. Et, en même temps, nous retrouvons le mot MOL = circoncision, le Déluge est une circoncision cosmique pour mettre l’Arbre à fruit. Les 40 jours du Déluge nous donnent le nombre 4, la matrice. Il en contient encore d’autres, tous symboliques. Le problème de la sexualité duquel il fut question lors de notre dernière réunion n’est certes pas celui abordé par la psychologie moderne et qui déferle dans toute la littérature, dans le cinéma, dans les crimes, mais celui des différentes traditions et, en particulier, de la tradition judéochrétienne. Dans cette perspective il évoque toute une montée des énergies telle la montée de la sève d’un arbre et constitue une base importante pour l’évolution de l’être. Prenant comme exemple le film « Emmanuelle » dont on a tant parlé et qui montre à quel point l’humanité est plongée dans la confusion, Annik de Souzenelle arrive à la conclusion que deux blocages s’opposent à cette montée, l’un est le moralisme pieux, le drame de toutes les religions qui ont fait une œuvre néfaste en voulant démontrer que l’évolution consistait uniquement à être moralement bien. Ce blocage de la sexualité a été cause de beaucoup d’empêchements de fuser plus haut. Au lieu de ce refoulement, reconnaissons humblement que nous avons une nature animale qu’il nous faut accepter. Nous ne sommes pas des dieux. Quelques êtres privilégiés peuvent ne pas la vivre, mais nous, être communs, avons à l’assumer au niveau génital. L’autre blocage, absolu celui-là, est celui où se situe le film en question, celui du soi-disant défoulement sur le plan de la sexualité en investissant toutes les énergies à ce niveau-là, sans avoir conscience d’un dépassement possible. N’oublions pas qu’en investissant toutes nos énergies pour atteindre l’étage supérieur, nous avons à laisser ce dixième symboliquement, cette dîme des biens qu’Abraham donnait à Melchitsédeck pour faire le sacré (voir compte-rendu précédent). Notre propos aujourd’hui c’est de commencer à vivre le triangle inférieur de l’Arbre des Séphiroth qui se situe entre Yesod, Hod et Netzah qui sont Gloire et Victoire. Ce triangle correspond au complexe uro-génital, c’est un centre d’eau. C’est à ce niveau que se passe la gestation de l’enfant que sa mère porte dans son ventre et qu’elle va mettre au monde par en-bas. C’est la venue au monde de Malkuth.
Ce qui nous concerne à ce niveau, c’est de nous mettre au monde nous-mêmes. Ce triangle dans lequel va entrer l’adolescent sera la matrice qui assurera sa maturation à un niveau supérieur. Quand il a été dit à Eve : « Tu enfanteras dans la douleur et j’augmenterai le nombre de tes grossesses », c’est de cette gestation qu’il s’agit, c’est-à-dire de la mise en action de toute notre fécondité qui n’a rien à voir avec la fécondité selon le nombre, mais avec toute cette croissance vers le haut. Eve est toute cette humanité dans son rôle féminin, car homme ou femme, nous sommes tous « mère » de nous-mêmes. Le nom Emmanuel ne signifie pas seulement « Dieu est avec nous », mais aussi « Dieu enlève la stérilité », car c’est la naissance de l’Enfant divin. La vraie stérilité est celle qui nous empêche de nous mettre au monde à ces différents niveaux. Lorsque l’enfant atteint l’âge de la puberté il va commencer à entrer en relation par ces deux sentiers avec ses structures prochaines. Il va laisser de côté ses deux béquilles qui étaient ses parents, qu’il va contester, il va contester les valeurs sur lesquelles il a été élevé et il commencera à sentir en lui de nouvelles valeurs qui lui sont propres, qui vont être désormais ses points de repère, ses points de références, pour assurer sa croissance. Il est très important à ce moment-là que les parents soient à l’écoute de ces valeurs inscrites chez leur enfant, même si elles paraissent contraires à tout ce qu’ils avaient cru. C’est un rôle difficile que de savoir s’écarter tout en étant toujours là. Car l’enfant a encore besoin de leur présence pendant un long moment. En entrant dans cette matrice l’enfant entre dans l’épreuve, car toute matrice implique la nuit, le noir, l’expérience de la ténèbre d’où sortira la lumière. Et l’enfant que ses parents, par ignorance, n’ont pas prévenu, se sentira perdu pensant que la vie c’est cela, cette ténèbre et cela peut devenir dramatique. On voit actuellement bien des enfants se suicider, se droguer, etc., parce qu’ils ne peuvent pas supporter cette ténèbre dont personne ne leur a dit qu’elle était absolument nécessaire et qu’elle serait suivie de lumière. Ces ténèbres vont se manifester de plusieurs façons aussi bien pour l’enfant que pour les personnes se trouvant encore à ce niveau là et qui, hélas, sont nombreuses. Nous parlerons des ténèbres qui nous paraissent essentielles et avant tout de celle du non-sens. On a l’impression que rien n’a de sens, que tout est anarchique au vrai sens du mot, c’est-à-dire d’être coupé de ses archées. C’est effectivement le drame de la « chute » qui a coupé l’humanité de ses archès. Un mythe va nous révéler cette expérience de façon admirable, c’est celui du Déluge. Nous parlerons également plus tard du mythe du Labyrinthe de Cnossos et nous ferons également l’expérience de l’esclavage dans ce triangle inférieur. Nous sommes tous esclaves de nos passions, de nos désirs et de nos peurs. Nous verrons comment nous en sortir. Ce mythe est illustré par le mythe du passage des Hébreux en Egypte où ils sont esclaves.
C’est à ce niveau-là que nous allons structurer nos dix vertèbres sacrées et nos dix vertèbres lombaires. C’est un temps d’épreuves qui va nous être décrit bien souvent dans une période de dix ans. Il faudra dix plaies d’Egypte pour en sortir et renaître par la Mer Rouge. Quant au mythe de Cnossos, nous verrons que pendant dix années les Athéniens eurent à apporter au Minotaure le sacrifice de sept jeunes gens et de sept jeunes filles. Le sens en est le même. Déluge signifie avant tout désordre. En hébreux son nom est Maboul, mot qui nous est resté et qui veut dire dérangé, anarchique, manque de connexion du cerveau. Avant le Déluge il fut dit : « A ce moment-là sur la terre des hommes se multipliaient et ils ne mettaient au monde que des filles ». Autrement dit, à l’image du monde actuel, ils ne se multipliaient que selon le nombre et ne mettaient au monde que des êtres qui ne faisaient pas œuvre mâle. Le mot mâle chez les Hébreux veut dire se souvenir, descendre dans ses profondeurs. Or celui qui fait œuvre mâle, descend dans ses profondeurs et épouse au fur et à mesure toutes les stratifications, toutes ces terres et il naîtra à chacun de ces niveaux. Celui qui meurt et renaît toujours fait œuvre mâle. Nous vivons en ce moment une humanité femelle qui se contente de manger, de dormir, de boire, d’aller à son travail, qui s’ennuie et qui cherche à tuer le temps. Et ce faisant, elle se tue ellemême. Et Dieu dit : « J’en ai assez de cette humanité, je me repens de l’avoir conçue et voici, la fin de toutes choses est proche. » En nous penchant sur ces textes qui au premier abord semblent surprenants de la part du Dieu Créateur, nous voyons qu’il ne s’agit pas des Elohim, mais de Yod-Hé-Vov-Hé que l’homme est en potentialité. C’est le dieu en lui qui commence à s’éveiller et qui lui fait prendre conscience qu’il est entrain de perdre sa vie. Et ce dixième de l’humanité, cette dîme, va apparaître sous la forme et dans le personnage de Noé qui est le dixième descendant d’Adam par Seth. Et Dieu envoie le Déluge qui n’est autre que la représentation de ce que l’humanité est, de son anarchie. Les eaux sont les passions, les énergies à tous les niveaux qui, dans le Déluge, s’investissent n’importe où et qui submergent l’homme. Le Déluge existe dans toutes les traditions. Celui de Babylone est bien antérieur. Nous le retrouvons aussi à l’occasion de mythe grec de Prométhée, Dieu envoyant un Déluge pour punir l’humanité d’avoir dérobé le feu du ciel. Seuls Deucalion et Pyrrha sont sauvés des eaux, ils repeupleront la terre en jetant des pierres par-dessus leur épaule. Au moment de la naissance de Noé, son père Lemeck dit : « Celui-ci nous consolera de toutes nos fatigues et de tous les maux que nous cause la terre que Dieu a maudite ». C’est-à-dire que
Noé va être le précurseur de celui qui va retourner toutes les énergies et qui va consoler. Noha signifie consoler, conduire. Dieu dit donc à Noé qui est un homme « juste », de construire une Arche selon des mesures symboliques et d’y faire entrer un couple de chaque espèce d’animaux de la terre. I1 faut comprendre par animaux les énergies dont ils rendent compte et que nous portons aussi en nous. La construction de l’Arche, c’est la construction de notre quadrilatère. Noé monte dans l’Arche en ayant ramassé toutes ses énergies et, avec lui, ses fils, ses filles, sa femme, les maris et femmes de ses enfants. Le mythe babylonien du Déluge avec Gilgamesh est parallèle à celui-ci. Nous en avons déjà parlé la dernière fois (voir précédent compte-rendu). Lorsque l’Arche se pose enfin, aussi bien Noé que Out Naphishtim, en sortent avec leur femme. Le mariage s’est accompli dans l’Arche. Qu’est-ce que le mariage ? C’est devenir adulte et capable d’entrer dans notre véritable être, c’est épouser les deux pôles de la dualité qui jusqu’ici étaient vécus dans la discorde et dans la contradiction. Nous renvoyons une fois encore le lecteur au précédent texte sur le site L’arbre de Vie : La première porte, dans laquelle il est question du symbolisme du vol des oiseaux, de leur rapport avec l’alchimie et de la signification du Mont Ararat sur lequel l’Arche a fini par se poser. Ils y trouveront également ce que veut dire l’ivresse de Noé. C’est toute la fécondité de la terre que symbolise la vigne et la nudité de Noé n’a rien à voir avec la nudité corporelle. Elle est le parfait miroir de la lumière divine et c’est pour cela que ses deux fils viennent à reculons pour la recouvrir. Car, n’ayant pas encore atteint cette qualité d’évolution, ils sont incapables de regarder le Divin. Quant à Cham qui le regarde, il est brûlé. Il y a là psychologiquement un profond mystère de l’homme impur qui essaye de scruter les mystères par curiosité et non par amour. La recherche du pouvoir est sous-jacente. Lorsque l’homme investit son ardeur à un niveau pour lequel il n’est pas prêt, les énergies se retournent contre lui et le brûlent. L’Arche s’étant posée sur le Mont Ararat, l’homme retrouve ses normes ontologiques qu’il avait perdues dans la grande aventure qui relate le mythe de la chute. Dieu envoie alors un arc-en-ciel en signe de la Nouvelle Alliance qui est évidemment le même symbole que celui de l’échelle de Jacob qui relie le monde des archétypes à celui de la Création. Continuons les mythes hébraïques par le passage des Hébreux en Egypte où ils furent esclaves sous le joug des Egyptiens. Et pourtant, en hébreux le mot Egypte est Mistraïm, dans lequel on trouve Maim, les eaux primordiales, c’est-à-dire la matrice. Et à l’intérieur de Mistraim, il y a ce petit TSR qui sert la gorge. Et en effet, gorge qui se dit Tsoar indique un resserrement, presque
un écrasement. Nous pouvons y trouver deux choses : oppresseur, mais aussi germe. Car le germe est toutes les énergies comprimées au plus petit et qui se trouve dans le TSR de Mistraïm. Il symbolise alors ce peuple qui vit en esclavage, qui est le peuple élu, la dîme symbolique qui va entraîner toute l’humanité dans son ascension. Et ce peuple esclave qui n’en peut plus est l’image de notre humanité lorsqu’elle prend conscience de tous ses esclavages. Obéissant à Dieu qui est en potentialité en eux, les Hébreux décident de quitter l’Egypte, afin de vivre les autres étages qui les mèneront à la Terre Promise, symbole du triangle supérieur. Cette nouvelle naissance ne pourra s’effectuer que si deux pôles sont en présence. Ils seront représentés par Moïse et Pharaon. Moïse est un personnage extraordinaire, son nom signifie : sauvé des eaux. Il n’est autre symboliquement que Noé, c’est celui qui a construit son Arche d’ailleurs, car à un moment il quitte l’Égypte pour ensuite y revenir sauver son peuple. Et à ce moment du récit nous trouvons cette phrase très curieuse : « Alors Yod-Hé-Vov-Hé se mit sur son chemin pour le faire mourir. » Qu’est-ce que cela veut dire ? Il s’agit du mariage profond avec lui-même. Moïse a dû faire sur lui-même le travail qu’il devra faire faire à son peuple, afin d’être capable de le guider. Alors Yod-Hé-Vov-Hé, sa dimension divine en lui, se met sur son chemin pour l’obliger à une mort et à une résurrection. Et Dieu lui dit : « Je te fais Yod-Hé-Vov-Hé pour Pharaon », c’est-à-dire je te donne la puissance divine par rapport à Pharaon qui lui, va être l’adversaire. S’il n’y avait pas d’adversaire il n’y aurait pas de résistance, il n’y aurait pas de sortie possible. Pharaon se dresse alors. Il porte dans son nom RA, l’adversaire qui est le même nom que le mal dans l’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal. Ce n’est pas le mal en soi, mais la ténèbre qui rendra possible que jaillisse la lumière. Les dix plaies qui sont déclenchées sont comme les dix contradictions de ce gigantesque accouchement. A chaque plaie Pharaon décide de laisser partir les Hébreux et puis, au dernier moment, nous entendons cette phrase curieuse : « Et Dieu durcit le cœur de Pharaon. » Pourquoi? Parce que les Hébreux ne sont pas prêts, ils n’ont pas encore atteint la dixième vertèbre et il en sera ainsi jusqu’à ce qu’ils l’aient atteinte. Ils doivent trouver les forces nécessaires pour vivre l’expérience du désert. Là nous touchons du doigt combien l’épreuve est bénéfique, elle est le barreau de l’échelle que nous avons à monter et qui nous fait souffrir lorsque nous nous y heurtons. Ce n’est que sous l’épreuve que nous pouvons promouvoir nos forces, s’il n’y avait pas de résistance il n’y aurait pas de lumière. Il serait extrêmement intéressant de rechercher le symbolisme de toutes ces épreuves, symboles que nous retrouvons chez tous les prophètes. La dernière plaie est la plus importante, elle est
comme une espèce de circoncision, elle est la mort de tous les enfants égyptiens premiers-nés, à l’exception de ceux qui auront tracé sur le linteau de leur porte le signe qui est mis sur Caïn sur le sauver. C’est le signe de l’énergie qui préserve celui qui ne doit pas être dévoré, parce qu’il est devenu lui-même cette énergie. Lorsque les Hébreux vont se trouver devant l’Ange Exterminateur, ils vont avoir atteint la qualité de l’Ange qui est le Gardien du Seuil. Et l’Ange ne les touche pas, le feu ne détruit pas le feu. Dans ce signe de l’Agneau nous avons tout le profil de Celui qui va racheter Israël, de l’Agneau qui fait encore toute la symbolique de Pâques. Et tout ce peuple part conduit par Moïse qui a dépassé les lois de la nature. I1 commande aux eaux qui s’écartent et nous voyons ce peuple qui passe, qui va entrer dans le désert avec cette colonne de feu qui le guide pendant la nuit et la colonne de nuées qui le guide pendant le jour. Yod-Hé-Vov-Hé, son Roi est à sa tête. L’homme qui entre dans son quadrilatère est guidé par son Yod-Hé-Vov-Hé intérieur dont il reçoit s’il en est conscient, s’il écoute, s’il est attentif, toutes les informations nécessaires pour avancer. La Mer Rouge se referme sur les Egyptiens qu’elle engloutit. Pourquoi la Mer Rouge, puisque, en réalité, elle s’appelle la Mer des Joncs, « Yam Soph ». Rappelons-nous que c’est grâce au drame de Joseph vendu par ses frères qui, après maintes aventures dramatiques, est admis à la cour des Pharaons, que Joseph, Yousoph en hébreux, a pu sauver ses frères de la disette. Soph, c’est la limite, Yousoph et Yam-Soph sont les deux lignes, l’une au départ, l’autre à l’arrivée. C’est-à-dire naissance et mort pour une autre naissance. YamSoph signifie augmenter, passer à un plan supérieur. Toute la tradition parle de la Mer Rouge par analogie avec l’Homme Rouge qui, pour devenir Homme Vert, doit mourir et ressusciter. Et pourquoi le désert ? Le monde que nous vivons est à l’image de notre monde intérieur. Il est un désert tant qu’il n’est pas fécondé par le Divin qui a pris naissance en nous. Dans ce désert les Hébreux qui sont pourtant sensés avoir acquis la force de vivre, vont se retourner contre Moïse en disant : « Tu nous a fait sortir d’Egypte, mais nous préférons servir les Egyptiens que d’aller mourir dans le désert. » L’homme a horreur de la liberté, il en a peur. Et c’est pourquoi nous avons du mal à passer cette porte, nous sommes retenus par toutes nos sécurisations. L’humanité ne peut évoluer qu’en se désécurisant de tout, sur le plan maternel, sur le plan affectif, sur tous les plans où elle a des épreuves à vivre.
Le bonheur que réclament les hommes lorsqu’ils réclament la liberté est en réalité celle des licences, le bonheur extérieur. On ne peut trouver ce bonheur que dans son être profond. Notre drame c’est de toujours tout projeter à l’extérieur au lieu de chercher à l’intérieur. Les bonheurs que nous trouvons à l’extérieur nous aliènent, car nous en devenons esclaves. Le passage dans le triangle supérieur est une nouvelle ténèbre, mais pas du tout de la même qualité que la ténèbre que nous avons en-dessous. Passée la ténèbre de l’ignorance, nous vivons une ténèbre qui correspond à la connaissance, mais à une connaissance qui doit tout de même faire une nouvelle expérience de cette ténèbre, tout en sachant qu’il en naîtra la lumière Le livre d’Annik de Souzenelle auquel elle se réfère, qui vient d’être réédité aux Editions Dangles : « De l’Arbre de Vie au Schéma corporel, le symbolisme du corps humain », est une approche de l’anthropologie, une méditation sur le corps, sa forme, les différents organes, les différents membres. Ces réflexions qui sans cesse apportent des révélations nouvelles, ne partent pas tant du corps humain, que de celui de son archétype. D’après la tradition hébraïque et judéochrétienne et ses livres sacrés, le monde des archés est le monde divin lui-même et le symbole est représenté par le monde de la manifestation en tant qu’il est reflet du monde des archés. Entre ces deux mondes se trouve ce que la Bible appelle « une étendue », sorte de cordon ombilical qui les relie, ce qui fait que le monde d’en-bas, de la manifestation, est constamment relié à son correspondant qui est le monde d’en-haut. C’est ainsi que la tradition hébraïque appelle les Elohim « les hommes d’en-haut » et Adam « l’homme d’en-bas ». Le monde animal, comme le monde végétal et le monde minéral, sont des symboles des énergies divines. L’homme, au sixième jour de la Création récapitule toute la Création, contenant toutes ses énergies. « Vous êtes des Elohim », disent à l’homme les Hébreux et le Christ le reprendra plus tard. Les Cabalistes ont toujours vu un certain graphisme dans ce qu’ils appellent « le corps divin », lequel dans un schéma très précis, dessine la distribution des énergies divines qu’ils vont appeler « l’Arbre de Vie ». Cet Arbre de Vie est le premier don divin planté au milieu de l’Eden, en réponse du Créateur après que la Création ait poussé et exprimé tout son désir vers Lui. C’est la première manifestation divine au cœur même de la conscience de l’homme, car l’Eden est le jardin intérieur de l’homme. Au sujet du deuxième étage de l’Arbre des Séphiroth : A cet étage l’être a déjà acquis des structures psychiques et un embryon de vie spirituelle. Les reins vont signaler que toutes les acquisitions du premier étage ne sont que les germes (le rein a la forme d’un germe) de ce second étage. Dans le Livre de Job, Dieu l’invite à prendre sa force, son appui sur les reins : « Ceins tes reins, car je vais t’emmener dans un voyage difficile. » Et l’Ange Gabriel va se présenter à la porte de Tobie avec la ceinture autour de ses reins et va
l’emmener dans ce même voyage. Les reins sont une espèce de plate-forme qui doit être solide pour pouvoir construire nos douze vertèbres sur laquelle elles reposent. L’oreille symbolise le passage de la deuxième porte. Elle récapitule le corps tout entier. Le dernier étage, celui de la tête va aussi récapituler tout le corps. Nous reviendrons plus tard à la signification de la bouche, du nez, des yeux, etc. Au sujet de Jacob et de Caïn : La tunique de peau d’Esaü est la future tunique de lumière. Notre nature actuelle, celle de la tunique de peau, est notre sous-nature. Tandis que notre vraie nature est celle qui correspond à Jacob et que nous appelons à tort, surnaturelle. Elle est tellement recouverte de la tunique de peau qu’on n’y croit plus. Jacob va prendre sur lui la tunique de peau de son frère et c’est pour cela qu’il va acheter son droit d’aînesse. En mangeant « le roux », symbole de l’homme rouge, il va aussi hériter des pouvoirs d’Esaü. Dans la profondeur, Jacob et Esaü sont le même homme avec sa nature première animale et avec sa vraie nature. Et lorsque Jacob que nous portons en nous, prend conscience que toutes les énergies doivent être canalisées, nous assumons la tunique de peau, c’est-à-dire que nous prenons tout l’héritage sur nous et nous entrons dans le deuxième quadrilatère. A ce moment-là, Jacob, après avoir passé le torrent de Jabboq, symbole de l’eau, de la gestation, a passé le torrent de ses passions et il rencontre l’Ange. Pourquoi l’Ange ? Dans la Bible c’est le mot Ich qui veut dire homme. A partir du moment où l’homme prend en main sa destinée de dieu en devenir, il va avoir à intégrer en lui les différentes hiérarchies d’énergies. Chaque échelon de l’échelle de Jacob va correspondre à un sommet d’énergies supplémentaires, jusqu’à ce qu’il ne soit plus lui-même, qu’énergie. Notre somme d’énergie correspond à celle que nous allons rencontrer et à laquelle nous aurons à nous opposer. Si nous sommes vainqueurs nous pourrons passer le seuil dont l’Ange est le gardien. Et Jacob est blessé à la hanche. A chaque lutte il y a blessure. Il en est de même dans nos vies personnelles. Notre corps inscrit toujours un passage et celui de la hanche est tellement important, que chez la plupart des êtres les énergies viennent frapper toute la vie à ce niveau là. La plupart des vieillards ont une fracture du col du fémur, qui est une blessure initiatique. Il y a deux barrières fondamentales, celle arrière des reins, la hanche, et celle de l’épaule, les clavicules qui sont les clefs de la porte supérieure. Et ces deux blocages intérieurs réagissent à ces deux niveaux sur notre corps. Nous avons aussi à faire un travail sur notre corps pour débloquer les résistances musculaires à ces deux endroits. Ce sont les deux grosses barrières de notre évolution. Combattant avec l’Ange, Jacob va assumer les douze tribus d’Israël, il va entrer dans le « douze ». Il va être le fondateur de ce peuple qui symboliquement est toute l’humanité et qui est aussi chacun de nous.
Annik de Souzenelle aborde le thème de la circoncision et du but du mariage qui n’est pas la procréation selon le nombre, mais de faire de deux, un. Nous en avons déjà parlé précédemment. Nous verrons dans les mythes que les enfants des héros ne correspondent pas à des enfants de chair, mais à des fruits essentiels de l’être. Le premier Concile chrétien ayant aboli la circoncision, l’Apôtre Paul dira : « Circoncisez vos cœurs, circoncisez vos oreilles ». On va tailler toujours plus haut. Il faut bien prendre conscience que, ce que nous n’avons pas fait dans notre vie actuelle, il faudra le faire après. C’est pourquoi nous avons intérêt à réaliser le plus possible dès maintenant, parce que ce sera certainement beaucoup plus difficile après. A. de Souzenelle a trouvé dans Jung l’écho de sa pensée, à savoir que les personnes qui meurent sans être passées par cette porte, qui donc ont besoin de la tunique de peau qu’ils n’ont plus, parasitent les vivants. C’est certainement à l’origine de beaucoup de difficultés psychiques dont on ne connaît pas la source. Il est indispensable que celui qui est parasité, assume cette possession dont il est l’objet et ne la coupe pas, mais au contraire qu’il aide celui qui le possède et qui, la plupart du temps, est de sa descendance par le sang. Seule la vie spirituelle pourra lui permettre de le faire. A. de Souzenelle a l’impression qu’on est à l’aube d’un réveil, qu’il y a de plus en plus de gens conscients de ces choses. Toutes ces dernières générations ont été parasitées les unes par les autres. Le jour où l’humanité va en être consciente, elle essayera de se libérer et toutes les générations que nous mettons au monde, seront libérées d’emblée. Question : Qu’entendez-vous par énergie et les énergies ? Réponse : Les énergies archétypales sont l’énergie divine. Les Hébreux disaient qu’à travers les dix Séphiroth, il ne s’agissait pas de dix énergies, mais d’une seule qui va se manifester sous dix aspects. Elles sont au nombre de dix sans que pour cela l’unité soit rompue. La toute première phase de la Bible dit déjà : « Les dieux crée le ciel et la terre », le verbe créer est au singulier alors que le sujet est au pluriel. Notre mental doit dépasser quelque chose pour approcher la Réalité. Question : Comment les énergies peuvent-elles se matérialiser ? Réponse : Nous ne pouvons le constater et l’approcher que par analogie. C’est ce que le mythe nous propose, dans l’échelle de Jacob par exemple, qui relie ciel et terre, c’est-à-dire le haut et le bas. Il s’agit de l’intérieur de l’être, de son noyau vital et puis de la superficie que nous sommes et que nous vivons de manière immédiate. Lorsque nous faisons appel dans la méditation ou dans la prière à ce monde des archétypes à travers quelque chose de très précis, il n’y a aucun doute que les énergies archétypales descendent sous forme d’une information au sens étymologique du
mot : formé par l’intérieur, et nous apportent une réponse. C’est le grand mystère du dialogue entre le Divin et nous, entre le monde créé et le monde incréé. Au sujet des Gardiens du Seuil : Ou bien nous sommes vainqueurs et alors nous intégrons leur énergie et nous passons, ou bien le monstre nous mange. Si nous ne sommes pas prêts pour passer, les énergies se retournent contre nous. Nous avons dans notre vie des Gardiens du Seuil sous forme d’événements, ce sont nos maîtres. Toutes nos peurs que nous projetons à l’extérieur décèlent toujours des forces que nous n’avons pas intégrées. Nous possédons toutes ces énergies et devrions en être les maîtres. Dieu a dit aussitôt qu’il eut créé l’homme : « Qu’il domine sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur les animaux des champs… » Il emploie le mot « dominer sur » qui veut aussi dire en hébreux « descendre dans », entrer, pénétrer. Pour dominer sur… il faut pénétrer dans… intégrer. Alors nous devenons. Compte rendu de la réunion du 10.11.1977 Nous allons continuer aujourd’hui l’étude de ce qui se passe au niveau du triangle du plexus urogénital, Hod-Netzah-Yesod, qui est vraiment le symbole de la matrice de l’homme lorsqu’il commence à quitter son père et sa mère et qu’il entre dans sa propre nature. Dans la matrice du foyer maternel et paternel il a acquis pratiquement presque toutes ses structures, physiques, affectives. Il se réveille maintenant à lui-même dans la partie médiane de son corps. Il fait un peu ce que fait Œdipe lorsqu’il se dit « J’appartiens à une autre race ». C’est le moment où les parents ont à se retirer sur la pointe des pieds, pour que l’enfant se prenne en main et fasse sa propre mutation. Il s’agit d’une mutation qui va assurer sa naissance par en-haut, la naissance de l’être essentiel dans l’homme. Tout ce qui contribue à une gestation, est symbolisé par une épreuve dans le noir. Cette traversée est très dure pour les jeunes. Pleins de force ils ne savent comment l’investir, ils ne connaissent pas leur place juste. Et s’ils ne la trouvent pas, ils ne seront pas nourris par le cordon ombilical subtil qui les relie à l’essence de leur être. Les mythes vont rendre compte de ce passage. Nous l’avons déjà vu dans celui du Déluge chez les Hébreux, de même que dans celui de l’esclavage en Égypte et du passage dans la Mer Rouge (se reporter aux précédents comptes-rendus). Tant que l’homme n’est pas entré en contact avec son pôle intérieur qui va lui apporter sa vraie énergie, sa vraie force, sa véritable information et qu’il n’aura pas exprimé cette énergie qui ne demande qu’à être extraite pour devenir lumière, il aura un chemin extrêmement difficile et long à parcourir, il sera dans l’esclavage, il aura à remonter l’échelle de Jacob. Parlons maintenant du mythe du Labyrinthe de Cnossos. C’est un mythe grec qui va nous rendre compte de ce qui va se passer dans le premier quadrilatère. Ce mythe est celui du non-sens, de
l’absurde, de l’ignorance, de la non-connaissance. Le drame de l’homme c’est qu’il ignore tout dans ce passage. La reine de Crète, Pasiphaé, femme de Minos, reçoit la visite du dieu Neptune sous la forme d’un taureau éclatant de blancheur. Ensorcelée par lui et pour accomplir ses amours, elle se fait construire une vache d’airain par l’architecte de la cour, Dédale. Et de ces amours va naître ce fameux Minotaure, le monstre à corps d’homme et à tête de taureau, portant les deux noms de ses deux pères, Minos, l’homme et taureau, le dieu. Minos fait construire par Dédale un labyrinthe au centre duquel il enferme le monstre, en même temps que Dédale et son fils Icare, tous deux légendaires, le premier pour sa sagesse (Hochmah), le, deuxième pour son intelligence (Binah). La réalité du labyrinthe peut être vécue sur deux plans, représentés d’une manière très physiologique par les intestins et, d’autre part, par notre démarche à l’intérieur de nous-mêmes. Sur ordre de Zeus, le roi de Grèce doit livrer tous les ans au Minotaure qui les dévore, sept jeunes gens et sept jeunes filles. Et ces jeunes gens et ces jeunes filles s’embarquent à chaque fois tout joyeux et insouciants sur des bateaux et pourtant ils vont à la mort, car ils ne sont pas capables d’affronter le monstre. Le roi d’Athènes, Égée, eut un fils Thésée, avec une princesse rencontrée dans un pays lointain et au moment de repartir pour rejoindre son épouse en Grèce, il abandonna son fils à la princesse afin qu’elle l’élève. Mais avant de partir il laissa à son fils une épée d’or et des sandales d’or qui furent cachées sous une grosse pierre. Et Égée dit à la mère de l’enfant qu’elle ne devra remettre à son fils l’épée et les sandales qu’au moment où il sera adulte. Mais un beau jour, Thésée comme Œdipe, voulut rechercher son père, ce qui signifie chercher sa véritable nature, sa source, son devenir. Il quitte donc sa mère et par une intuition profonde se dirige vers Athènes. Mais auparavant il a découvert en soulevant la grosse pierre, l’épée et les sandales d’or. Et cette découverte revient à découvrir en lui cette existence divine à la réalisation de laquelle il part, emportant avec lui les moyens qui lui permettront de l’atteindre. Le fait de soulever la pierre est déjà un symbole, celle-ci représentant symboliquement l’homme, la pierre brute que nous sommes au départ et qui, en la soulevant, suscitera une force qui permettra à Thésée de faire le voyage vers sa source. En faisant l’effort de soulever la pierre, il rassemble toutes ses énergies. De nombreuses aventures l’attendent sur son chemin, dont une des plus importantes sera sa rencontre avec le géant Péripétès qui, avec sa massue de cuir, a le pouvoir d’écraser tous ceux qui se trouvent sur son chemin. Thésée s’affronte à lui, l’écrase et s’empare de la massue. Il aura ainsi deux armes, l’épée d’or et la massue de cuir.
Thésée arrive au palais du roi Égée et ne se fait pas encore connaître. Or la reine Médée, une magicienne, tombe éperdument amoureuse du jeune homme. Thésée ne cédant pas à ses avances, la reine vexée par son refus, l’accuse auprès du roi d’avoir voulu la séduire. Le roi, pour se venger, décide au cours d’un banquet de verser du poison dans le verre de Thésée. Mais celui-ci voulant porter un toast, levant son bras, le roi aperçoit l’épée d’or sous son manteau et, renversant la coupe, il tombe dans les bras du jeune homme en disant: « Tu es mon fils ». Voilà donc Thésée investi d’un pouvoir royal, aidant son père dans la conduite du royaume. Mais apprenant le sacrifice des jeunes gens exigé par le roi d’Athènes, il décide d’aller affronter le monstre. Or la durée du sacrifice était fixée à dix ans. Pour bien comprendre sa signification il faut voir dans le mot sacrifice celui de sacré, faire le sacré. Ces jeunes énergies ont à nourrir l’enfant divin caché sous la forme du Minotaure, et qui doit un jour naître de lui. Le roi avertit son fils qu’il n’est pas encore prêt pour cette tâche, mais Thésée n’en tenant pas compte part tout de même. Le roi savait que les dix années complètes devaient être accomplies, et, inquiet, il demande à son fils afin qu’il sache plus rapidement le résultat du combat, de hisser une voile blanche en signe de victoire et de faire hisser une voile noire en signe de défaite. Nous sommes, en vérité, toujours impatients. Un Père de l’Église a dit : « Nous voulons tout de suite être des dieux et nous ne savons pas gravir chacun des échelons avec sagesse ! » Arrivé en Crète, Thésée se présente devant sa mère Pasiphaé et le roi Minos son époux et rencontre leur fille Ariane. Ariane est le même mot qu’araignée. C’est elle qui travaille, qui tisse les fils de la toile de notre vie essentielle. Un amour immense naît dans le cœur des jeunes gens et Ariane va donner à Thésée le fil qui symbolise le fil de la connaissance, et qui lui permettra de se retrouver dans le labyrinthe dont aucun de ceux qui y sont entrés, n’est jamais ressorti. Mais, n’étant pas assez armé intérieurement et ne sachant pas se servir de son épée d’or, tout en ayant la connaissance, Thésée va tuer son être divin en tuant le Minotaure avec sa massue de cuir qui est liée à la tunique de peau. C’est dramatique, car le Minotaure ne devait pas être tué, il devait être intégré, et au lieu de continuer son chemin, Thésée revient en arrière. Revenir en arrière est contre-initiatique. Quelque chose en lui sait cependant qu’il a manqué sa tâche et il hisse la voile noire. Il n’est pas devenu le Minotaure, le Gardien du Seuil. Égée voyant cela, se jette et se noie dans la mer, qui désormais portera son nom. Autre acte dramatique, Thésée dans son amour emmène Ariane avec lui, la laissant dans une île où il l’oubliera. Elle reste seule, mais va être recueillie par Dionysos qu’elle épousera. Elle continuera son chemin. Mais Thésée, rentrant à Athènes, va commencer une vie fatale qui se terminera aussi tragiquement. Les Grecs nous montrent comment on peut avoir l’air de faire du bien et faire finalement du mal, parce qu’on n’obéit pas aux lois rigoureuses de la démarche initiatique. Nos lois ontologiques
sont des lois libératrices. Pour affronter le monstre il fallait obéir au temps, aux dix années. A chaque étape correspond un temps, nous n’avons pas le droit de tricher. Annik de Souzenelle parle alors des vertus psychiques, la volonté, le courage, l’héroïsme, le service des autres, qui ne sont efficaces qu’en temps utile et que nous employons souvent à contretemps. Le mythe de Thésée se termine d’une manière très intéressante. Le fait que Dédale et Icare soient enfermés dans le labyrinthe, nous met devant le symbole de la construction continuelle de notre propre labyrinthe. Nous passons notre temps non pas à tisser la toile de notre démarche initiatique, mais du labyrinthe dans lequel nous nous enfermons, autrement dit, de notre prison que nous partageons avec nos enfants. Nous ne pouvons témoigner devant ceux-ci d’une voie de lumière. Par toutes nos sécurisations, par nos machines, par nos systèmes sociaux, notre civilisation nous enferme de plus en plus. On fait de nous des mineurs qui ne découvrent jamais l’essentiel de leur être. Dédale et Icare veulent sortir du labyrinthe et demandent à Pasiphaé de leur faire apporter des ailes artificielles et de la cire pour les fixer. Comme la chenille va créer son cocon, son labyrinthe, quand arrive le printemps, dans lequel elle va entrer dans une gestation merveilleuse, puis dans lequel elle va mourir pour renaître au stade de papillon, nous sommes tous appelés à devenir un jour symboliquement ce papillon, si nous savons laisser faire cette gestation à l’intérieur de notre cocon. Mais Dédale et Icare n’ont pas fait cette démarche et c’est ainsi qu’ils ont recours à l’artifice. Ce sont tous les masques derrière lesquels nous nous cachons, masques de médecins, d’ingénieurs, de père, de mère de famille, et derrière lesquels nous ne sommes que de pauvres êtres ignorant de notre vocation essentielle. Dédale et Icare vont s’envoler et Dédale qui est la prudence de la sagesse, recommande à son fils : « Ne vole pas trop bas, tu serais aspiré par les vapeurs de la mer ; ne vole pas trop haut, tu serais brûlé par l’ardeur du soleil ». Or Icare est le symbole de cet intellect qui veut toujours aller plus loin, plus près du soleil, qui veut en connaître davantage. Il ira si loin, qu’un jour ce sera l’éclatement, la cire va fondre et Icare est précipité dans l’eau. C’est le sort qui menace toutes les civilisations comme la nôtre. Elles portent en elle le germe de la mort qu’on pourrait appeler prométhéenne. Nous allons être tués par cet atome dont nous allons chercher le secret et dont nous allons tirer l’énergie, car il sera plus fort que nous. La seule énergie qui soit plus forte que l’atome, c’est celle que nous portons en nous, qui nous permettra de traverser les degrés initiatiques, de nous mesurer au Minotaure avec l’épée d’or, et d’accomplir encore tous les étages qui restent à monter. A ce moment nous atteindrons notre noyau. Les explosions nucléaires du monde seront alors recouvertes d’une façon grandiose par l’explosion nucléaire de l’homme, car tout deviendra énergie. Ce sera la transfiguration totale qui est décrite dans la Jérusalem céleste et annoncée par le Prophète. Nous retrouvons dans Dédale et Icare les deux énergies divines Hochmah, la sagesse, et Binah, l’intelligence qui sont la base du triangle supérieur. Or les Prophètes et les Psalmodistes parlent
souvent de la sagesse et de l’intelligence divines en comparaison avec la sagesse et l’intelligence des hommes. C’est pourquoi l’Apôtre Paul a dit : « La sagesse de Dieu est folie pour les hommes et la sagesse des hommes est folie pour Dieu ! » Et encore : « Je détruirai la sagesse des sages et j’anéantirai l’intelligence des intelligents! Le Seigneur connaît les pensées des Sages. Il sait qu’elles sont vaines ! » et plus loin : « Que nul ne s’abuse lui-même : si quelqu’un parmi vous pense qu’il est sage selon ce siècle, qu’il devienne fou afin de devenir sage, car la sagesse de ce monde est folie devant Dieu !» Il est curieux de voir dans les mythes grecs une réalité que nous touchons d’une façon tellement concrète dans cet Arbre des Séphiroth et, en particulier, dans la fausse sagesse représentée par Dédale et la fausse intelligence représentée par Icare, dont nous retrouvons l’aspect authentique en haut du deuxième quadrilatère, à la base du triangle supérieur. J’ai trouvé très intéressant le livre d’Arnaud Desjardins : « La Recherche du Soi », sous réserve d’une petite critique de ce qu’il dit de l’acceptation des événements en « entrant dans l’événement et en ne pas nous laisser envahir par l’émotion ». Dans ses exemples, Arnaud Desjardins va très loin, jusqu’à demander à une mère de rester insensible devant la mort de son enfant et de l’accepter. Cela est valable pour des personnes déjà extrêmement évoluées, mais lorsque cela arrive à des personnes n’ayant pas encore trouvé ce chemin, on risque de créer en eux une espèce de refoulement de leurs émotions et, finalement, tout cela est tellement étouffé en eux que ce n’est plus juste. C’est là qu’intervient l’intelligence divine qui permet d’avoir cette véritable attitude d’impassibilité après être entré dans la signification profonde de l’événement. Sans cela c’est la fuite. On ne peut absolument pas séparer sagesse et intelligence, la véritable sagesse implique l’intelligence de la chose. Lorsque saint Paul parle de la circoncision du cœur, cela ne signifie pas durcissement, mais au contraire que le cœur doit entrer dans l’intelligence divine, il doit y avoir reflet, réflexion. Le cœur ne pleure plus pour les mêmes choses parce qu’il reçoit une information. Il peut souffrir, mais l’homme ne souffre pas. Dans les Évangiles, le Christ ne dit pas « Je souffre », mais : « Mon cœur est triste jusqu’à la mort ». Car lui, il est déjà au-delà de la souffrance. Le stoïcisme est un état éthique qui s’établit en dehors de la connaissance du sens de l’événement. Ce n’est pas la sagesse ou l’intelligence divines, mais celles des hommes. Les nombres qui vont signifier nos mythes correspondent à notre structure corporelle. Nous les retrouvons chez les Hindous puisque le chakra nabhi palma aux dix pétales, le premier qui va s’ouvrir après la traversée du premier triangle, indique bien qu’il a fallu construire les dix vertèbres. Ensuite nous entrerons dans les douze dorsales correspondant au chakra à douze pétales. Le nouveau triangle que nous allons vivre nous fera rencontrer un nouveau labyrinthe, mais il sera de toute autre nature. Quoique situé dans les ténèbres, il sera informé par le triangle
supérieur qui se reflète en lui. L’homme, en passant par cette Porte, a retrouvé la communication avec son triangle supérieur. Il n’avait pas encore ce contact dans le labyrinthe inférieur. Les parents, sortis de leur propre labyrinthe, n’y auront pas enfermé leurs enfants qui pourront, de ce fait, vivre par eux-mêmes ces moments-là. Ils y passeront de toute façon, mais ce sera moins épais, moins lourd, et l’enfant saura qu’il y a une lumière quelque part. Tous les mythes, celui de l’esclavage en Égypte, celui de l’anarchie et du Déluge, caractérisent le triangle inférieur dans lequel l’information fait défaut. Mais avant de le quitter, parlons du mystère chrétien du Baptême, parce que notre corps est lié à l’eau, l’eau matricielle, l’eau dans laquelle nous entrons, symbolisant cette gestation qui permettra de renaître à un autre niveau. C’est aussi l’eau urinaire, l’eau ou liquide séminal, celle des reins, de tout le bloc urogénital. Dans les schémas des temples chrétiens qui sont construits à l’image de l’homme la purification par l’eau bénite se situe à l’entrée du temple. Après vient le baptistère. Et ce n’est qu’ensuite, à la suite de ces deux purifications, que le Chrétien va entrer dans la nef qui correspond à l’étage intermédiaire. Puis viendra l’autre triangle supérieur qui correspond au cœur, au Saint des Saints, au mystère. La liturgie suit ce même cheminement. Le baptême du Christ se situe tout de suite après son enfance. Ce sera la période intermédiaire entre le départ avec ses parents et l’entrée dans son quadrilatère qui va être sa vie publique. Tout de suite après le baptême il va être emmené au désert par l’Esprit-Saint, au désert où le diable le tentera. C’est donc ce même schéma qui se déroule historiquement dans la vie du Christ. Et puis il passera le Jourdain. Celui-ci, qui prend sa source dans la montagne du nord de la Syrie, va descendre presque verticalement vers le sud dans le lac de Tibériade et, encore plus verticalement, il ira se terminer dans la mer Morte. Il est vraiment l’image de nos énergies le long de la colonne verticale, énergies qui vont vers la mort. Jourdain, en hébreux se dit Yarden et signifie descendre, et Noun qui est le poisson-germe, retour à une matrice, à notre source. Car pour monter, il faut descendre. « Quel est celui qui est monté, si ce n’est celui qui est descendu », dit l’Apôtre Paul. On peut trouver, en décomposant de différentes manières le mot hébreu de Jourdain, différentes notions dont celle de « dominer ». Pour dominer, il faut « entrer dedans…, descendre dans… et celle de rigueur, de justice, qui indique que c’est la tête qui commande, qui est « connaissance ». On pourrait donc interpréter le nom Jourdain par « commencement de la rigueur ». Et, en effet, le Christ commence à ce moment-là sa vie publique, son Grand Œuvre. Dans cette optique-là, Il va se purifier dans le Jourdain et en même temps il purifiera aussi l’eau, ce qui signifie purifier les
énergies, les retourner. Les eaux qui allaient vers la mer Morte vont symboliser ce retournement pour aller construire l’être. La blessure au pied sera guérie. Le psalmiste s’écrie : « Qu’as-tu mer pour t’enfuir ? « Jourdain, pour retourner en arrière ? « Qu’avez-vous, montagnes, pour sauter comme des béliers ? « Et vous collines, comme des agneaux ? » Nous avons suffisamment d’éléments à présent pour voir comment nous pouvons à ce niveau passer la Porte des Hommes, à partir de laquelle d’enfant nous devenons homme, au fur et à mesure que nous construirons nos douze vertèbres. Quel est celui qui peut se présenter devant la Porte des Hommes, qui peut se mesurer aux monstres-gardiens du seuil ? Qui a apporté tout son faire extérieur à l’intérieur de lui ? Seul vrai faire, où l’Esprit-Saint va œuvrer tantôt dans le champ de Tod (le bien) ou dans le champ de Ra (le mal), qui n’ont rien à voir avec le bien et le mal, mais avec la phase de lumière et la phase de ténèbre. Nous allons passer de l’obéissance à des lois extérieures à l’obéissance aux lois intérieurs, de soumis que nous sommes, nous devenons obéissants à ce maître intérieur qui peut parfois être vécu à travers un Maître extérieur. Au lieu des lois morales esquissées sous forme de béquilles, nous allons trouver les lois qui nous structureront, qui permettront aux énergies profondes de se retourner et de monter l’Arbre. Elles se trouveront souvent en contradiction avec les lois morales, car à ce moment-là on se trouve devant une redoutable liberté. Tout nous prouve que nous allons de ces lois morales qui représentent les secondes Tables de la Loi du peuple hébraïque, aux premières Tables pour l’observation desquelles le peuple n’était pas encore mûr. Et pour moi, Chrétienne, c’est le Christ qui est venu redonner ces premières Tables, car il a dit : « Je ne suis pas venu pour abolir la Loi, mais pour l’accomplir. » En l’accomplissant il la dépasse, il passe à une autre dimension de la Loi en posant des actes de vie pour le Sabbath. On trouve dans saint Luc un petit verset qui souvent est supprimé, c’est celui qui raconte qu’un jour de Sabbath le Christ voit un paysan en train de labourer. Indignation des Apôtres qu’il calme, et s’approchant du paysan, il lui dit : « Homme, si tu sais ce que tu fais, tu es béni par mon Père. Mais si tu ne sais pas ce que tu fais, alors sois maudit et transgresseur de la Loi. » Tout est résumé là. Nous avons tous, poussés par une certitude intérieure, été contraints à agir en dehors de la morale. Il est important de faire la distinction entre les vertus psychiques et les vertus spirituelles. Les premières ont un temps pour être pratiquées, elles sont le fruit d’une tension. Les secondes sont celles qui permettent de gravir les échelons, l’homme étant tout d’un coup projeté par des circonstances exceptionnelles, dans une action qui le dépasse. Ne nous apitoyons pas davantage
sur la souffrance d’autrui, car comme l’a dit le Christ aux Apôtres qui voulaient consoler MarieMagdeleine : « Laissez-la pleurer et gémir, l’Esprit-Saint travaille en elle. » Ne nous substituons pas à l’Esprit-Saint. Il faut parfois aller jusqu’au bout de sa souffrance, il faut toucher le fond, car ce n’est qu’au bout de l’expérience qu’on fait son ascension. Question : Que faites-vous dans le cas d’une personne qui veut se suicider ? Réponse : C’est un immense sujet. Notre aide est très limitée, du moins notre aide immédiate. Je crois que par la communion intérieure, par la prière on peut beaucoup plus qu’on ne le pense. Et si alors nous n’empêchons pas le suicide, c’est que nous ne sommes pas devenus des êtres suffisamment purifiés pour aider par l’intérieur. Si mystérieux que soit le sort de l’homme après la mort physique, nous savons, lorsque nous commençons à entrer dans cette connaissance, que rien ne finit et qu’il y a toujours la possibilité de continuer son évolution après, ce qui sera beaucoup plus difficile. La seule chose que je puisse dire, c’est que l’homme qui est mort avant d’avoir passé cette Porte, comme c’est le cas pour la plupart, parasite les vivants au niveau de la famille. La mort survenue avant l’heure de l’accomplissement, je la considère comme une espèce de fausse-couche et je crois que le problème de l’avortement et de la peine de mort est le même problème. On n’arrête pas l’évolution du germe dans l’œuf. Mais je crois aussi que tuer l’âme est une responsabilité beaucoup plus grande et on la tue avec une facilité inimaginable. La mort physique n’est pas très grave, quoiqu’importante, parce qu’on va retrouver le même véhicule d’une autre façon. Nous allons maintenant nous occuper du passage dans le quadrilatère au niveau de ce changement total de catégories. Ce qui va caractériser ce passage, c’est le mariage. Les deux pôles de la dualité, au lieu d’être vécus dans l’opposition, vont être vécus dans la complémentarité, dans un mariage qui n’a rien à voir avec un petit compromis entre deux époux ou entre deux pôles de la dualité, mais véritablement ces deux pôles, qui ne vont rien perdre de leur intégrité profonde, vont être obligés par ce mariage à un dépassement d’eux-mêmes pour atteindre un troisième terme. Dans ce mariage de deux personnes différentes, il va y avoir mariage de chacun avec lui-même. Dans le mariage, la seule fécondité juste est celle de notre croissance. A partir du moment où l’homme gravit l’échelle, l’Esprit-Saint l’informe. (A. de Souzenelle cite certains passages de Jung qui le confirme dans sa manière particulière de s’exprimer.) C’est le travail du Divin en nous. C’est ce Faire en nous, avec un grand F, c’est toute une alchimie intérieure. Au sujet des chakras : Le corps est transmetteur de messages, les chakras qui s’éveillent se manifestent de façon douloureuse au niveau du corps. Il faut être vigilent sur ces informations et savoir ce qu’elles signifient, ne pas aller voir le médecin qui s’y perd. Quand Jacob a été blessé à
la hanche, il s’est agit d’une blessure initiatique. Il était un enfant boiteux, nous sommes tous boiteux sans en avoir conscience. Réponse à une question : Nous pouvons lire à deux niveaux toute l’histoire des Hébreux et cela est aussi valable pour celle du Christ : historique et mythique. En tant que Chrétienne, je crois en l’historicité du Christ, mais je n’empêche personne de ne pas y croire. J’ai choisi la tradition judéo-hébraïque parce qu’elle est la base de notre civilisation occidentale. J’aurais pu partir de n’importe laquelle, par exemple du mythe de la Genèse des Maoris de Nouvelle-Zélande qui est très belle et qui peut compléter la nôtre. Au sujet du dogme : Dans les premiers siècles chrétiens, il n’y avait que deux dogmes qui n’étaient pas exposés dans une forme contraignante, mais libératrice, parce qu’elles proposent tout le dogme trinitaire qui est parfaitement irrationnel et, d’autre part, celui de deux natures du Christ où vous avez les deux dimensions de l’homme Ich et El, la dimension Minos et Tauros. On retrouve cela partout. Ce sont les deux dogmes purs, les autres ont été surajoutés en Occident. Question : Quelle est la différence entre mythe et mystère ? Réponse : Tous deux viennent de la racine MI qui rend compte du Divin. Le mythe est le récit qui nous est proposé au niveau de notre compréhension immédiate, qui va nous permettre de lire avec une nouvelle conscience l’histoire réelle qui, elle, se situe au niveau du mystère. Le mythe est comme l’échelle qui nous permet de pénétrer le mystère. Il est le symbole du mystère. Le symbole et le mythe sont au service l’un de l’autre. Sur l’Ancien Testament : Il a été depuis toujours écrit en hébreux, puis traduit en grec, traduction sur laquelle repose notre texte français. L’hébreu est absolument intraduisible ; sur le plan linéaire, ce sont de perpétuels jeux de mots. Mais si vous entrez dans un travail comme celui que nous faisons ici, vous pouvez rester une vie entière sur un mot comme, par exemple, celui de « Bereschit ». On ne peut l’approcher qu’en entrant dans la contemplation. Les Hébreux disent qu’il y a soixante-dix marches et quand vous trouvez quelque chose de merveilleux, vous savez que c’est encore une toute petite première marche ! Compte rendu de la réunion du 12.1.1978 Nous allons aujourd’hui pénétrer dans le quadrilatère où nous avons rencontré le premier triangle, reflet du triangle supérieur et nous allons vivre la naissance, le passage par cette Porte qui est le col de l’utérus par en haut. Il ne s’agit pas de procréation, mais de création de nousmêmes à nous-mêmes, de croître pour monter l’Arbre. Nos béquilles sont ramassées, mais qu’allons-nous en faire ? C’est l’araignée qui nous l’apprendra par la manière dont elle tisse sa toile et par ce qu’elle fera de ce qui, pour elle, symbolise les béquilles.
L’araignée va commencer par prendre son point d’appui et poser ses points de repère dans un endroit où, en général, il y a un courant d’air qui enverra les petits insectes venir se prendre dans sa toile pour lui servir de nourriture. Ces premiers fils posés, ce sera le tour des fils transversaux qui lui permettront de se situer dans son centre. Le centre a une très grande importance. De là, elle va sécréter un fil sec qu’elle va déposer en spirale jusqu’à ce qu’elle arrive sur le bord du fil de soutien qui va lui servir de « béquille ». Il va lui servir à ce que sert un échafaudage dans la construction d’une maison, parce que c’est en s’appuyant sur ce fil qu’elle va construire celui définitif pour revenir à son centre. Et à partir de là, elle va se retourner. Voyez le symbolisme du retournement qui est le mouvement fondamental de toute naissance. Elle va s’appuyer sur ce fil sur une patte et, avec une autre patte elle va rembobiner ce fil, tandis qu’avec une autre partie de son corps elle va sécréter le fil humide, définitif, sur lequel vont venir se prendre les insectes et qui va prendre la place du fil sec. Nous allons la voir remonter toute cette spirale pour retrouver son centre. Que va-t-elle faire de sa petite bobine devenue inutile ? Elle va l’avaler, elle va l’intégrer, car qui dit avaler, dit intégrer des énergies. Or nos béquilles, il ne s’agit ni de les casser, ni de les jeter, mais d’intégrer le passé qu’elles représentent. Il s’agit d’intégrer toutes ces énergies, de les assimiler, ce sont elles que nous avons préparées et vécues souvent douloureusement dans ce premier étage. Elles seront la base de la nouvelle force que nous allons déployer pour être nous-mêmes cette petite araignée et construire notre toile. Lorsque nous étions dans le premier étage, nous nous sommes appuyés sur nos pieds. Toute notre vie nous nous appuierons sur nos pieds, puisqu’ils sont le germe essentiel qui, symboliquement, contient l’Arbre tout entier. Mais à partir de l’étage suivant, nous allons psychiquement, psychologiquement et spirituellement, prendre aussi appui sur ce nouveau germe que sont nos reins. Tout ce que nous avons vécu à l’étage inférieur, sera le nouveau germe de l’étage supérieur et constituera toute la force que nous allons trouver dans nos reins. Dans le mythe de Job que nous allons étudier, Dieu, s’adressant à lui, dira avant de l’emmener dans l’aventure extraordinaire qu’il va lui faire connaître : « Ceins tes reins », c’est-à-dire prends bien conscience et rassemble toutes tes forces. En hébreux, le mot rein contient les deux lettres qui forment la racine KOL, totalité. Autrement dit, le rein contient tout, comme tout germe contient la totalité du devenir. Et, dans les lettres qui suivent : Yod, HE, nous avons la totalité du devenir de l’homme, puisque ces deux lettres sont les premières de Yod-Hé-Vov-Hé, qui est la dimension divine de l’homme. Nous avons maturé l’être physique et psychique, maintenant nous avons à mettre au monde l’être divin qui naîtra par la Porte dite des Dieu. Pourquoi avons-nous ici la Porte des Hommes ? Parce que seul celui qui est un homme peut y passer. Celui qui n’a pas passé cette Porte n’est pas un homme, même s’il a soixante-dix ou
quatre-vingts ans. Il est extrêmement important à l’heure actuelle que nous devenions des adultes pour être plus forts que nos créations, sans quoi elles nous mangeront. Nous créons des monstres qui nous mangent, au lieu que ce soit nous les maîtres ! J’ouvre une parenthèse : je regardais l’autre jour le trident fourni par Yesod qui en est la base et aussi toute cette ouverture vécue au niveau urogénital de la sexualité et je me disais que le passage que nous vivons là correspond à l’expérience de la tentation du Christ par le diable, dans le désert, où l’Esprit-Saint l’a amené. Le diable va lui proposer trois grandes tentations à l’image de cette espèce d’explosion de forces qui sort de Yesod, et qui va s’exprimer à travers trois éléments fondamentaux qui peuvent être vécus sur deux plans : la jouissance, la puissance et la possession. L’homme est appelé à jouir du Divin, d’une puissance dont notre corps rend compte et que nous pouvons tous vivre dans l’orgasme au niveau du corps. La rencontre de l’homme et du Divin se fait dans un orgasme qui dépasse tout ce que nous pouvons imaginer et qui est une extase extraordinaire que les grands Saints ont vécue. Donc, cette jouissance est juste, elle est une des constituantes de l’homme, à condition toutefois qu’il n’investisse pas tout là et sache que ce n’est qu’un prélude à l’unique rencontre. La puissance : l’homme est appelé à avoir tous les pouvoirs selon la Genèse. Il doit dominer sur la Création toute entière, sur les poissons dans l’eau, sur les oiseaux dans les airs et sur les animaux de la terre. Si cette puissance sert à écraser les autres, elle est à côté de ce à quoi elle est appelée. La possession : « Bienheureux les persécutés pour la justice, car le Royaume des Cieux est à eux ». La terre n’est que le prélude à la possession du Royaume tout entier. Ce sont les trois éléments fondamentaux constitutifs de l’homme. Son drame, c’est quand il les investit de travers. Nous reviendront sur cette notion de tentation, parce que celui qui va entrer dans ce quadrilatère, va entrer dans le désert. C’est le même cas que celui du passage de la mer Rouge, après que les Hébreux aient été esclaves des Égyptiens. Nous sommes tous esclaves en ce monde aussi longtemps que, par une prise de conscience, nous n’en soyons sortis pour entrer dans le monde de la libération. Avant de passer cette Porte, nous étions déjà dans le désert, mais nous ne le savions pas. Alors que celui qui passe cette Porte sait qu’il est dans un désert, c’est-à-dire dans la stérilité. Ce n’est qu’alors que nous pouvons devenir fertiles. Une question est posée sur le symbolisme du pied blessé, à laquelle répond A. de Souzenelle et qui a été traitée au début de ces entretiens.
M. Cacacé précise : Le pied qui est touché est le support. Si le pied d’un tabouret a été touché, le tabouret ne peut plus tenir debout. Tout a un support ; si celui-ci est endommagé, le reste s’effondre. A. de Souzenelle : Le temps du désert est très important. Nous le verrons quand l’humanité va passer par la Porte supérieure. Saint Jean dit dans l’Apocalypse : « Quelle est celle qui sort du désert, parée de riches vêtements ? » Symboliquement, c’est toute l’humanité qui sort du désert et qui va se revêtir de vêtements de plus en plus somptueux pour atteindre à l’étage supérieur. Mais nous, nous sommes encore à la traversée du désert, à notre non-fécondité, à l’instar des femmes stériles de la Bible. Qu’est-ce que nous allons faire au désert ? Nous n’allons pas tellement « faire », qu’ « être faits ». C’est par le non-faire extérieur que nous allons assumer ce faire. Le mot faire est très important chez les Hébreux. Il y a dans la Bible, dans la Genèse une phrase très intéressante qui est mal traduite ou pas traduite du tout : « Voici les enfantements des cieux et de la terre, lorsque Dieu les créa pour les faire. » Que signifie « créer pour faire ? » Il ne faut pas confondre faire et parfaire. Parfaire, la perfection, chez les Hébreux, c’est la mort, car on ne peut pas aller plus loin. C’est la brisure nécessaire pour que ce parfait engendre un nouveau germe et renaisse plus loin. Ce « faire » est comme l’argile dans la main du potier ou encore comme le lait qui se caille dans la main du fermier qui va faire son fromage. Nous avons à être retournés dans tous les sens et pris dans une pâte qui se soulèvera. Notre vocation est bien plus d’être faits que de faire et c’est notre drame d’être continuellement tentés de « faire » à l’extérieur. M. Cacacé : confirme la signification de « parfaire » qui est le propre de Dieu-le-Potier, nousmêmes étant l’argile. A. de Souzenelle : C’est le travail de l’Esprit-Saint en nous. Notre danger c’est de vouloir prendre sa place par un altruisme social, par un sentiment de pitié qui empêche son travail en nous. C’est dur à dire et dur à faire. Voir un enfant qui souffre ! Et pourtant il faut qu’il aille au bout de son expérience. Nous allons dégager les grandes lignes de ce qu’est le « Faire ». La Création dont l’homme fait partie et qu’il récapitule tout entier, puisqu’il est lui-même un cosmos, est d’ordre de séparation. Notre loi fondamentale dans cette incarnation, c’est de vivre la dualité, nous avons à prendre les deux pôles de la dualité non pour créer un troisième terme, mais dans un dépassement des deux, afin de construire nos douze vertèbres qui correspondent sur un plan cosmique aux douze mois de l’année, aux douze signes du zodiaque, à ce dodécaèdre qui est fondamentalement le nombre de l’incarnation, trois fois quatre « qui ne peuvent se séparer, dit le Saint, béni soit-Il, car l’un a constamment besoin de l’autre ! »
Si nous voulons vivre ce mariage et construire nos douze vertèbres, nous allons avoir à vivre des montées et des descentes dans la profondeur des ténèbres. Si nous voulons entrer par la Porte des Dieux et vivre cette extase dont je vous parlais tout à l’heure, il faudra que nous descendions dans les profondeurs de nos ténèbres. Cette montée vers la lumière est magnifiquement traduite dans la vie du Christ par la montée au Thabor. Le mot Thabor en hébreu signifie ombilic, c’est l’ombilic cosmique. On est si bien dans cette expérience lumière que l’Apôtre Pierre dira au Christ : « Rabbi, il fait bon demeurer ici, dressons trois tentes… » Et le Christ va non seulement l’en empêcher, mais va l’obliger à descendre de la montagne, liant immédiatement cette expérience à celle des ténèbres qui va suivre. Car, interdisant aux trois Apôtres d’en parler, il dit : « Vous ne parlerez pas de ces choses que lorsque le Fils de l’Homme sera descendu aux Enfers et ressuscité. » Si nous restons uniquement dans l’expérience lumière sans connaître celle des ténèbres, nous sommes dans une impasse ; et si nous restons uniquement dans l’expérience ténèbre sans celle de la lumière, nous allons aussi être bloqués. Dans l’Une par le haut et dans l’autre par le bas. Cette expérience, nous avons à la vivre comme l’ont vécue tous les grands personnages de la Bible : Noé, Job, Tobie. L’homme doit assumer cette descente dans les profondeurs jusqu’à ce qu’il en touche le fond. Et là il rencontre le trident qui lui permettra de retourner et de le retrouver par en haut. Dans toutes les traditions, cette descente dans les profondeurs est illustrée par le mythe du forgeron. Nous sommes nous-mêmes constitués comme une forge. Le métal vil que nous sommes encore va être éprouvé par le feu et ensuite tous les organes vont à avoir à jouer leur rôle. Ce n’est qu’en passant dans cette forge que nous construirons les forces nécessaires, les structures qui, seules, nous permettrons de passer par la Porte. M. Cacacé : Ne croyez pas que ce que Madame de Souzenelle vient de dire soit à « apprendre » et que cela se situe très loin de nous dans l’espace et dans le temps depuis des milliers d’années. C’est vous qui allez faire l’expérience de la lumière et de la ténèbre, il faut vous y préparer, car peut-être ne le saurez-vous même pas. Ce ne sont pas des expériences simultanées, elles se suivent chronologiquement. Nous ne pouvons pas faire deux choses contraires en même temps. Il faut vous préparer, heureux ceux à qui des preuves sont envoyées. Nous sommes dans un monde qui est le reflet, le miroir de ce qui se passe dans l’univers et qui rend compte à chaque génération de ce que tout est lié dans l’univers. Il n’y a pas de possibilité que les quatre points cardinaux ne soient pas liés à l’homme, aux couleurs et à tout le reste sans exception. L’Univers est un, tout est lié et c’est pourquoi nous sommes liés à Dieu.
A. de Souzenelle : C’est uniquement parce que nous n’en avons pas encore conscience que nous vivons des états de séparation. Lorsqu’il a remonté l’Arbre, l’individu acquiert la conscience cosmique et est un avec les autres. Il a la communion totale. M. Cacacé : Les différentes traditions sont aussi toutes liées. Chacune s’est exprimée à sa manière et lorsqu’elles se sont rencontrées, elles ont constaté cette similitude. Comme il en est de même pour les astres, les choses sont telles, que le soleil naît au moment d’une nouvelle mort et que la mort et la renaissance se passent au même moment. C’est difficile à comprendre, mais ce n’est pas difficile à appréhender par la pensée. Question : Comment peut-on être conscient d’avoir franchi une Porte ? A. de Souzenelle : Celui qui a passé cette Porte a trouvé sa place. C’est comme l’enfant dans le ventre de sa mère, s’il ne trouve sa juste place dans l’utérus il ne sera qu’un avorton et cause de fausse-couche. Lorsque nous trouvons notre vraie place dans ce monde, nous commençons à entrer en gestation. Mais nous ne la trouvons que lorsque nous avons cessé de la chercher selon notre petite volonté et nos petits critères de sécurisation. M. Cacacé : Vous demandez la preuve par neuf, le critère, l’étalon par lequel on peut mesurer qu’on est ici ou là. Les personnes qui ont même dépassé ce stade n’en parlent jamais de la même façon. Ce que je peux vous dire, c’est, préparez-vous, travaillez, faites un effort pendant assez longtemps et ne vous occupez pas du reste ! Vous y arriverez sans le savoir. On a l’habitude de dire qu’un niveau ou qu’un plan est plus haut que l’autre. Ce n’est pas cela, il y a la perpendiculaire. Le plan de la matière qui contient beaucoup plus que la matière, même une partie du mental, est horizontal. Et lorsqu’on arrive au centre on a progressé. Le labyrinthe illustre bien ces choses-là, mais il n’est pas uniquement fait pour qu’on en sorte. A. de Souzenelle : Bien sûr, il y a le labyrinthe sacré, celui du mandala. La nef dans les églises correspond à cet étage-là, c’est là où le peuple « se fait » dans l’église. M. Cacacé : Que veut dire « nef » ? Regardez bien une cathédrale, gotique de préférence, c’est un bateau, l’Arche est renversée. Il faut qu’elle soit renversée, il faut qu’elle soit dans les ténèbres, l’incubation se fait toujours dans le noir. A. de Souzenelle revient rapidement sur ce qui a été exposé la fois précédente, à savoir qu’à partir des deux centres représentés dans l’Arbre des Séphiroth dans Tiphereth, correspondant chez les Hindous au chakra du cœur, nous allons entrer dans le quadrilatère exprimé si merveilleusement par Noé dans l’Arche où il fait l’expérience du mariage, mariage de la ténèbre et de la lumière, que nous aurons à vivre à cet étage-là. Si les mariages réalisés dans le premier étage sont beaucoup plus liés à des pulsions psychophysiques, le vrai mariage est celui du
deuxième étage qui tiendra compte des valeurs mêmes de l’être et qui fait appel à une qualité d’amour bien supérieure, d’un amour qui va passer par l’épreuve du feu. L’eau purificatrice du Déluge devient dans l’Arche un feu purificateur, illustré par la parole de Saint Jean-Baptiste : « Moi, je vous baptise d’eau, mais Celui-ci vous baptisera de feu ». Ce sont deux étages différents qui font que l’homme qui est ici et l’homme qui est là (dans les deux étages), sont d’un ordre différent. Beaucoup d’entre nous ont ressenti combien ils devenaient étrangers à eux-mêmes et étrangers aux autres. C’est la conséquence du passage à un autre plan avec ce qu’il implique de rencontres nouvelles, avec des êtres qu’on a l’impression d’avoir toujours connus, quelle que puisse être la différence d’âge des uns et des autres. Vouloir supprimer les classes sociales est un drame de toutes ces idéologies qui ne peuvent être réalisées en profondeur que lorsque nous aurons rejoint les archès. Pour bien comprendre ce qui se passe au niveau du quadrilatère supérieur, du travail intérieur que nous avons à y faire, nous aurons besoin une fois de plus, de nous appuyer sur des mythes. Les rêves aussi souvent en rendent compte. (A. de Souzenelle cite un exemple). Nous allons aborder le mythe de Job qui rend compte le plus parfaitement de ce passage par la Porte des Hommes. Job est présenté comme appartenant à la terre d’Uts. Il y a un rapport étroit entre nous et la terre où nous sommes nés. Ce n’est pas par hasard. Si nous n’avions pas perdu la connaissance des forces telluriques, nous comprendrions pourquoi nous sommes nés là et pas ailleurs. Les Chinois en tiennent compte. Le mot UTS renferme toute une symbolique et exprime que l’homme se situe entre ciel et terre entre lesquels est toute la création. Il est au centre d’une croix qui unit toute la branche latérale avec la branche verticale. C’est pourquoi il va être crucifié parce qu’il faut qu’il incarne sa qualité d’homme. Autour de la lettre centrale hébraïque qui signifie l’homme, les deux lettres qui l’encadrent sont le mot « Arbre ». Et nous pouvons traduire UTS par « l’homme dans l’Arbre ». Job est au cœur de son Arbre, dans la moelle de son os. On peut être parfaitement bon, parfaitement gentil et serviable, moralement bien, sans pour autant être au cœur de son Arbre. Job est parfait, il est très riche par ses acquisitions matérielles, mais aussi par l’acquisition de ses énergies. Il a une grande richesse intérieure. Ses nombreux enfants ne sont pas toujours ce qu’il faudrait mais après leurs écarts de conduite, Job les purifie, leur fait faire toutes les ablutions nécessaires, afin qu’ils soient bénis. Job, comme Noé, est parfait entre les parfaits de son temps. Et voici que se produisent des séries de calamités : un ouragan terrible détruit ses champs, ses troupeaux sont décimés, et ses enfants sont passés au fil de l’épée par une peuplade ennemie. Et
à chaque fois le serviteur dit : « Et je reviens, moi seul, Seigneur, pour te le dire… ». Quels sont ces serviteurs qui reviennent seuls ? Ce sont ceux qui vont ensuite symboliquement assurer le travail. Pourquoi Job a-t-il perdu tous ses biens ? Parce qu’un dialogue étrange a eu lieu entre Yod-HéVov-Hé et Satan, Yod-Hé-Vov-Hé ayant autorisé ce dernier, afin de lui prouver la sincérité de Job, enlever à celui-ci tous ses biens, sans toutefois toucher à son corps. Si Yod-Hé-Vov-Hé représente la dimension divine que l’homme porte en lui potentiellement, cela ne signifie pas qu’il y ait un Dieu qui est celui que l’homme doit devenir et un autre Dieu extérieur. Notre mentalité actuelle est tellement compartimentée qu’il est difficile pour nous, Occidentaux, d’exprimer et de comprendre ce grand mystère divin. Le Divin se révèle à nous sous plusieurs aspects dont celui de cette dimension à laquelle l’homme est appelé. Toute la tradition orale identifie Satan à l’Ange déchu, au mystère de la chute des Anges. Je ne me permets pas de le contester, mais il faut bien saisir qu’il y a au niveau du « Faire divin » une obligation pour que, à un moment donné, l’homme devienne divin, pour détruire ce qu’il était et pour l’obliger à se refaire germe pour passer à un niveau supérieur. Ce processus de destruction est indispensable, c’est pour les Hindous, ce que représente Shiva qui détruit et qui reconstruit avec les mêmes matériaux qui vont être transmutés. Le mot Satan en hébreux, de par la composition et la signification des lettres qui le désignent, signifie « celui qui nous introduit au cœur de notre être pour trouver la lumière ». Devant cette épreuve de destruction totale Job prononce cette phrase extraordinaire : « Nu je suis sorti du sein de ma mère, nu j’y retournerai, Dieu m’a tout donné, Dieu m’a tout repris, que le nom de Dieu soit béni ». Mais ensuite tout le Livre de Job va être une contestation, il va plaider sa cause. Il est cette double personnalité que nous sommes et qui n’a pas encore atteint à l’unité. Job est celui qui sait et qui ne sait pas et qui fera le mariage entre les deux, entre son pôle de lumière et son pôle de ténèbre. C’est tout le mystère d’Israël qui, sorti du sein de sa mère doit y retourner, qui doit « épouser » sa mère, se refaire germe pour ressusciter. Et les mystères chrétiens contiennent ceux d’Israël. Quand Nicodème demande au Christ comment le suivre, comment entrer dans le Royaume, Christ lui répond : « Si tu ne te refais pas petit enfant, si tu ne rentres pas dans le sein de ta mère, tu ne pourras pas entrer dans le Royaume » et Nicodème : « Mais comment puis-je entrer dans le sein de ma mère, j’en suis sorti une fois et ne peux pas… » – « Tu es pourtant docteur en Israël, répond le Christ, et tu ne sais pas ces choses… ». Satan retourne auprès de Dieu et lui demande de toucher au corps de Job sans toucher à sa vie, car à ce moment-là : « … il te maudira en face ! ». Et il prononce alors cette phrase étrange : « Peau pour peau ». Il fait une espèce de pari avec Dieu. Or la peau c’est cette fameuse tunique de peau dont l’homme a été revêtu après la chute. Le mot hébreu « peau » signifie aussi « lumière ». Les deux dernières lettres sont les mêmes, seules varient les premières. Aleph, première lettre de
l’alphabet représente l’énergie créatrice, la lumière dans la lettre Reich va rencontrer une résistance, car la lumière ne se révèle que s’il y a résistance. Tandis que le mot OR auquel préside la lettre Ayin et qui, par rapport à Aleph est celle qui rencontre les profondeurs, les racines, les sources mêmes de l’être dans les grandes ténèbres, nous fait comprendre que l’homme ne peut trouver Aleph s’il n’est pas passé par Ayin. Adam des origines était déjà un homme de lumière, mais il ne l’avait pas encore en totalité. Après la chute il est recouvert de la ténèbre qu’il a choisie, car le mot tunique de peau est formé des deux lettres Ayin et Reich qui forment le fameux mot « mal » que nous trouvons dans l’Arbre de la Connaissance du bien et du mal. Il a par cela donné une existence, une réalité à ce pôle ténèbre qui n’avait pas d’existence en soi sans le pôle de la lumière de l’Arbre de la Dualité. Le mot bien et mal n’existent pas en hébreux, il s’agit du parfait et de l’imparfait. La lumière et la ténèbre sont inséparables, ils sont l’Arbre de la Dualité, mais qui est recouvert par une unité qui les relie intimement. Lorsque l’homme, dans la Genèse suit le serpent, il donne réalité à un des pôles qu’il coupe de l’autre et, alors, cela devient le bien et le mal. Nous créons le mal de toute pièce par ce mythe de la chute et pour pouvoir le vivre nous sommes recouverts de la tunique de peau. C’est une protection divine extraordinaire que de nous donner les énergies nécessaires à cette expérience, car sans cela nous en serions morts. Question : L’homme avait-il le choix ? Réponse : Non, de toute façon il ne pouvait pas choisir la lumière parce que tout était lumière et, pour qu’il y ait lumière supérieure, il a été éprouvé au niveau des ténèbres. L’homme était loin d’être parfait en Éden, il n’avait pas encore toute sa structure et ne pouvait y atteindre par et dans une évolution harmonieuse, disent les Pères de l’Église ; il va le reconnaître, mais dans la disharmonie, dans la lutte, dans la souffrance. Il a créé des pulsions de mort qui l’entraînent par en-bas et qui vont rendre difficile la montée de l’Arbre. Ce qui nous intéresse, c’est de voir que nous avons été recouverts finalement des vêtements de notre choix pour pouvoir vivre ce choix. Satan a dit : « Peau pour peau » et il va toucher à la peau de Job qui va être remplie d’ulcères malins de la tête aux pieds. Il s’agit là de cette transmutation de la tunique, la peau symbolisant notre nature dite de la chute, notre sous-nature que nous avons à l’heure actuelle par rapport à notre vraie nature que nous avions avant la chute. Tout ce qui va donc se passer ici va être l’épreuve du feu, l’expérience des ténèbres des profondeurs qui va faire que le Ayin à un certain moment va se transformer en Aleph. C’est tout le mystère de la transmutation de notre corps qui se décompose et qui est symbole de notre nature laquelle dans les épreuves successives après la
mort, retrouvera cette expérience lumière qui nous ramènera bien au-delà de notre état avant la chute. Job recouvert de ces ulcères malins, se plaint dramatiquement de ses plaies qui le font souffrir. Mais ce dont il souffre particulièrement, c’est de l’incompréhension, de la totale incommunication avec les autres, même avec sa femme. Les seuls amis qui lui restent ne sont pas sur le même plan que lui. Job conteste ce qui lui arrive, ce n’est pas juste et cette contestation devant Dieu que ne comprennent pas ces amis, c’est très beau. Il a des accents d’un pathétique et d’une beauté extraordinaires. C’est alors qu’il reçoit la visite de trois personnages qui lui reprochent sa contestation : « Tu oses contester Dieu ! ». Job les envoie promener en termes violents, refusant ce genre de sagesse, de morale élémentaire et de sagesse inférieure. Il y a des moments où seuls compte notre discours intérieur, l’information intérieure que nous recevons. Et à ce moment arrive un quatrième personnage d’une sagesse et d’une intelligence qui ressortissent vraiment d’en-haut. Il va le dire : « Vous n’avez que des discours complètement vains, pourtant vous êtes âgés et moi je suis jeune ! Mais ce ne sont pas les ans qui donnent la sagesse aux hommes ! ». Et il va dire encore : « Dieu nous parle par des songes, par songes il nous avertit ! ». Nous avons là toute l’indication de ce monde de l’inconscient qui est porteur de messages divins. C’est un langage qu’emploie Dieu, il est sans limite. Nous sommes aussi avertis par nos souffrances et Job, dans de très beaux versets témoigne de son expérience du noir. « J’espérais la lumière, les ténèbres sont venus… » « … Ah ! je voudrais être étranglé ! … ». « Être étranglé », c’est très intéressant, parce qu’il faut qu’il passe par cette Porte et c’est très pénible. C’est pourquoi il exprime sa souffrance au niveau de la gorge. Les Gardiens du Seuil sont tous là à le presser pour qu’il atteigne à la dimension qui lui permettra ce passage. Alors, ce quatrième personnage, après avoir renvoyé tout le monde, parle, et instruit Job en profondeur. Il porte un nom très significatif, il s’appelle « Elie » ou en hébreux « Elihu ». Elihu à son tour va disparaître et laisser parler Dieu Lui-même. C’est Yod-Hé-Vov-Hé qui va en finir avec l’expérience de Job. Il est curieux de voir qu’Elihu joue dans le drame de Job, auprès de Yod-Hé-Vov-Hé le même rôle que Jean-Baptiste va jouer auprès du Christ dans l’histoire du peuple juif : « Il faut qu’Il croisse et que je diminue… ». Et le Christ confirme très bien que Jean-Baptiste a la même dimension qu’Elfe. Le voyage que Yod-Hé-Vov-Hé va entreprendre avec Job est une descente dans les profondeurs de l’Enfer, c’est-à-dire dans nos lieux inférieurs. Job est déjà descendu dans certains plans de conscience, mais il faut qu’il les pénètre plus profondément encore. Si on compare les plans de conscience aux sept jours de la Genèse, on peut dire qu’il lui reste à traverser l’abîme qui précède même au premier jour et qui fait qu’il va rencontrer le Divin avant même la Création. Dans les sept jours de la Création il y a d’abord l’abîme et puis ensuite l’Esprit de Dieu qui plane
sur cet abîme. Après ces opérations divines symbolisant les six jours de la Création, Dieu se retire le septième jour. L’homme apparaît le sixième jour. Il est fait dans ses structures profondes de tous les jours de la Genèse qui l’ont précédé. C’est-à-dire qu’il contient en lui symboliquement toutes ces énergies et qu’il est un microcosme. Et lorsque l’homme doit redescendre dans ses profondeurs, il passe par tous les jours de la Création dont il est fait. Mais il ne peut traverser l’abîme pour au-delà retrouver le Divin qu’avec Yod-Hé-Vov-Hé, c’est-à-dire qu’avec sa qualité de Dieu. Avec Yod-Hé-Vov-Hé Job va faire des expériences redoutables, entre autres celle des dix animaux en commençant par le Lion et en terminant par l’Aigle. Les Alchimistes disent : « Dans cette opération de transmutation totale (où le plomb doit devenir or, où la ténèbre doit devenir lumière) l’Aigle doit dévorer le Lion ! ». Or le Lion symbolise toute notre partie solaire dont les énergies doivent être intégrées par l’Aigle, par « celui dont le regard est perçant, par celui qui connaît… ». Il est aussi prononcé cette phrase : « Là où sont les cadavres, l’Aigle se trouve ». Les cadavres de toutes nos énergies qui ont été retournées et intégrées. Le Christ va reprendre cette phrase lorsqu’Il parlera de Sa mort et de Sa résurrection : « Là où est le cadavre, les Aigles se trouvent… ». Le cadavre ici symbolise le corps du Christ unique, et les Aigles, ce sont tous les hommes en tant qu’ils sont appelés à devenir des Aigles. Après avoir visité avec Yod-Hé-Vov-Hé tous ces seigneurs de la terre et de l’air, Job va visiter les animaux sous-marins. C’est là où il passe l’abîme, où il entre dans les grandes profondeurs. Et Dieu va lui demander : « Étais-tu là, lorsque je créais tout cela ? « Étais-tu là, quand je créais la terre ? « Oui, tu étais là, car le jour et le nombre des années, est grand ! » Nous sommes là devant le profond mystère de l’éternité, de l’homme qui a été créé, mais qui est de toute éternité. L’homme est un être éternel qui n’a jamais eu de commencement, ni de fin. C’est difficile à concevoir pour nous qui sommes saisis entre les deux pôles de notre naissance et de notre mort (Note de Panharmonie : Pour les Hindous et pour les Bouddhistes, la notion de la réincarnation donne la clef de ce mystère). Nous terminerons le mythe de Job la prochaine fois parce que cette fin est une apothéose et trop belle pour être contée rapidement. Elle est en plus très ardue et très difficile à comprendre dans sa profondeur. Compte rendu de la réunion du 9.3.1978
Nous avons eu pas mal de nouveaux-venus. Pour eux A. de Souzenelle récapitule les réunions précédentes. Puis elle enchaîne sur le mythe de Job : Il est certain, et cela se retrouve dans les lois psychologiques actuelles, que les énergies qui ne sont pas investies d’une façon juste, se retournent contre l’homme, sinon nous ne connaîtrions pas la mort ou tout au moins nous prolongerions de beaucoup notre vie. Nos maladies ne sont que des chocs en retour d’énergies mal employées. Après avoir étudié le pôle lumière à travers plusieurs mythes, nous allons, avec Job, faire l’expérience du pôle ténèbres. Nous ne pouvons descendre dans nos ténèbres que si nous avons fait l’expérience de la lumière. Job est saisi entre deux pôles : Yod-Hé-Vov-Hé et Satan. Nous sommes dans notre profondeur pris entre ces deux dimensions. L’homme est appelé à devenir Yod-Hé-Vov-Hé et, en même temps il est son propre adversaire n’ayant pas encore intégré toutes les énergies. Nous allons avoir petit-à-petit à les épouser, de manière que tout, un’ jour, devienne lumière. Cet « accouchement » de la lumière ne peut se faire que par une prise de conscience, par une descente dans nos différents plans de conscience inférieurs afin que nous intégrions toutes les énergies qui les constituent. C’est aussi l’image de l’échelle de Jacob qui n’est autre que la colonne vertébrale cosmique. L’homme doit en assumer tous les échelons, c’est-à-dire chacune de ses terres, chacun de ses plans de conscience. Par une descente dans les profondeurs, les énergies ténèbres doivent être retournées afin de devenir lumière. C’est ce qui se passe pour Job qui est atteint dans sa chair, la chair étant le symbole extérieur de notre plan de conscience. Les êtres d’une très grande évolution deviennent en partie lumière. Ce sont eux qui tiennent le monde dans leurs mains. Et Job à aller à la recherche de son nom intérieur. Avec Dieu, Job, dans sa dimension divine, va faire « le grand voyage de l’inconscient » à travers le monde animal, en commençant par les animaux de la terre et des airs. Ensuite il descendra dans la dernière expérience qui sera celle des animaux de l’eau, de l’eau et de la terre d’ailleurs. Les traducteurs parlent à ce sujet de l’hippopotame et du crocodile. En hébreux, on parle d’une part du « bœuf marin » et d’autre part du fameux Léviathan. En fait, ce n’est ni le crocodile, ni le Léviathan. Dans le Livre des Morts Égyptiens qui est très lié à toute cette expérience, l’énergie fondamentale que nous allons trouver dans les eaux des profondeurs est décrite comme ayant une gueule de crocodile, un corps de dragon, des ailes d’aigle, etc. Une de ses parties tient aussi du chacal. Dans le mot Léviathan tan, en hébreu signifie chacal. Et cet animal monstrueux va être le Gardien du Seuil redoutable aussi longtemps que l’homme ne se sera pas mesuré à lui, aussi longtemps qu’il n’aura pas atteint à cette dimension. Il va faire l’ultime expérience des ténèbres, de la dernière terre, de cette Terre-Vierge, cette terre noire qui, dans toutes les traditions est exprimée par une femme redoutable, sorcière, dévoreuse. Et lorsque l’homme l’aura épousée, ce sera l’éclatement de la lumière.
Le cœur du Léviathan contient les noms divins, ceux dont nous sommes tissés. Ils sont notre noyau, comparable au noyau de l’atome qui contient toutes les énergies. Et lorsque nous aurons touché ce noyau nous deviendrons totalement énergie et totalement lumière. Nous ne serons pas brisés par cette énergie si nous sommes nous-mêmes devenus énergie. C’est cela toute notre expérience des grandes profondeurs. Job va donc être intégré dans ses normes primitives, car il a fait l’expérience inverse du départ d’Éden. Et si dans la Genèse Adam dit « J’ai entendu Ta voix dans le Jardin et j’ai craint, je suis dans le tremblement car je suis nu », Job va dire : « Mon oreille entendait jusqu’à présent parler de Toi, mais maintenant mon œil Te voit ! ». C’est l’aventure de la vision. A ce moment-là, lui qui avait tout perdu, toutes ses énergies, il va recevoir le double de ses biens. Il connaît enfin la véritable multiplication après avoir crû, tandis que l’humanité inversement se multiplie dans le plan de l’avoir avant d’avoir pu croître. Par cela même elle se bloque dans son évolution. Cet éclatement de Job va être symbolisé par la naissance également symbolique de ses trois filles. Chez les Grecs la Sphinge a un visage de femme. Car dans les traditions, aussi bien l’homme que la femme sont féminins par rapport au Divin qu’ils vont épouser. Toute la Création est appelé « Vierge d’Israël » et c’est elle qui va épouser Dieu. L’une des filles s’appelle Jemina qui signifie dépassement du temps. Job, en changeant de plan de conscience et même de peau, a aussi changé de temps. A chaque degré de l’échelle nous changeons d’espace et de temps qui sont une unité, l’espace-temps. Extérieurement nous sommes toujours sur terre, mais nous sommes en contact différent avec notre terre intérieure, nous recevons des informations différentes. Le conte du Petit Poucet illustre ce changement de temps lorsqu’ayant dépassé l’épreuve de l’Ogre, il chausse les bottes de sept lieux qui vont lui permettre de traverser le temps et l’espace. C’est aussi cela sa signification de la « Fin des Temps ». La seconde fille s’appelle Ketsia qui est le nom d’une plante aromatique, la casse. Nous en étudierons l’idée profonde lorsque nous nous arrêterons au triangle supérieur. Il s’agit de la notion d’odeur. Le corps de l’homme se transmute, se métamorphose. Il change aussi d’odeur. L’odeur, comme la lumière est une qualité vibratoire et certains hommes, ayant le don de reconnaître les vibrations, qu’elles soient lumineuses, odoriférantes ou autres, voient l’évolution de l’homme d’après elles. La dernière fille, Keren-Haphouc symbolise le fait de retrouver les trois couronnes en Kether, le couronnement des contraires, le dépassement des contradictions, le dépassement de la dualité. l’Advaïta des Hindous. Dans l’épée flamboyante et tournoyante du Chérubin qui garde le Jardin d’Éden nous trouvons le mot Haphouc. Tournoyant ne signifie rien d’autre que les deux tranchants de l’épée, c’est-à-dire l’Arbre de la Contradiction qui est mort pour celui qui n’est pas devenu l’épée et qui est vie pour celui qui a atteint sa qualité.
Keren et Kheter sont le même mot, c’est le point de départ de toutes les énergies donné par la Création dans un expire et c’est le point de retour de toutes les énergies qui remontent à leur source et qui vont reconstituer ce point focal où nous connaîtrons la dernière naissance par le chakra coronal. Keren-Haphouc, c’est cette arrivée à ce point final. C’est aussi l’Œuvre Rouge des Alchimistes. La dernière réunion avant les vacances termine l’étude de l’Arbre des Séphiroth entreprise par Annik de Souzenelle depuis deux ans. Quoique, dit-elle, cette étude ne se termine jamais. Des auditeurs tardifs s’étaient joints aux anciens, obligeant notre oratrice à revenir rapidement sur l’étude du corps tel que nous le révèle l’Arbre des Séphiroth et tout au long de ce « corps divin les étages et les symboles de notre élévation spirituelle. Arrivés à la dernière étape et ayant franchi « la Porte des Dieux », nous commencerons aujourd’hui à analyser le visage qui se situe à ce niveau, et notamment le nez, après avoir parlé la dernière fois de la bouche, de l’oreille et des dents. C’est dans ce troisième étage que nous allons trouver l’unité reconquise. Dans les étages inférieurs nous étions dans la dualité, dans le conflit des structures, résolus par le mariage des deux pôles au sommet du deuxième étage. Au niveau du nez nous pouvons voir l’image d’une sexualité bipolarisée du féminin et du masculin et une reconduction directe de l’organe mâle, reconduction que nous trouvons aussi dans la colonne vertébrale, elle aussi symbole phallique. Nous avons construit cette colonne vertébrale, vertèbre par vertèbre, en prenant soin de n’en sauter aucune, pour petit à petit réaliser un détachement des deux pôles de la dualité, ce qui fait dire à toutes les traditions que deux énergies se contractent, s’opposent et s’épousent. Ce n’est pas par hasard que nous avons deux narines, ce qui fonctionnellement ne serait pas nécessaire. Le pranayama témoigne de leur utilité par des techniques respiratoires qui vont faire état de chaque narine séparément, chacune ayant son rôle particulier. Un passage du Cantique des Cantiques souligne notre propos : « Ton nez est comme la Tour du Liban « qui regarde du côté de Damas. « Ta tête est levée comme le Carmel « et les cheveux de la tête sont comme la pourpre. »
La racine Cren du mot Carmel veut dire vigne, cet important symbole, et aussi jardin, ce qui nous ramène dans l’Eden reconquis, faisant contrepoint avec la sortie d’Adam de l’Eden. La Sulamite du Cantique des Cantiques retrouvant son Bien-Aimé, n’est personne d’autre que l’humanité retrouvant son âme perdue, tandis que la pourpre rejoint celle dont nous avons parlé, notamment au sujet du rouge de la gueule. Tour, en hébreu, se dit Miguedal, mot magnifique dont découle le nom « Madeleine », Marie de Magdala, Magdala étant la tour. Le mot « grandeur » est également tiré de Miguedal, la grandeur, une des énergies reconquises, ainsi que Megued, le meilleur. A l’intérieur de Miguedal, il y a gad, qui correspond aux nombre 3 et 4, auxquels le Saint, béni soit-il, dit : « Vous ne présiderez pas à la création du monde, mais vous avez une vocation plus haute encore, celle de ne jamais vous séparer, parce que, ensemble, vous êtes plus forts que tout. » Et, en effet, le 3 et le 4 sont la réunion symbolique de la loi et des structures. Or le 4, les structures n’est rien sans le 3, la loi et le 3 n’est rien sans les structures. C’est dans leur juste rapport que se trouve la justesse qui va présider à notre accomplissement. Beaucoup d’autres choses pourraient encore être dites de ce mot « Gad ». « Damas » en hébreu Damascheq, contient le mot « Qadosh » , le Saint, et qui, en même temps veut dire « prostituée ». Ces symboles, si intéressants, des mots hébraïques, montrent qu’avec les mêmes énergies (puisque chaque lettre est une énergie) on peut être soit le saint, soit la prostituée. Dans les profondeurs c’est la même réalité. Car, qu’est-ce que le saint ? C’est celui qui rencontre le véritable époux. Et qu’est-ce que la prostituée ? C’est nous tous en tant que nous nous donnons à un faux-époux, quand nous donnons un absolu à une réalité immédiate qui nous arrange ou qui nous comble. Ce sont les veaux d’or que chacun de nous a caché quelque part en soi. Alors ce nez, cette tour qui regarde du côté de Damas, c’est l’érection de l’être qui regarde du côté de la sainteté, c’est-à-dire du côté du véritable époux. Un autre aspect de ce mot, en retournant les trois lettres, est « Queshed », qui rend compte de l’amande, symbole de la réalisation totale. Nous avions déjà trouvé à la base de la colonne vertébrale ce petit os symbolique, imputrescible qui correspond à la terre sur laquelle repose l’échelle de Jacob, qui s’appelle Luz et qui signifie aussi amande. Lorsque Jacob a vu cette échelle, il a lui aussi commencé à construire sa colonne vertébrale qui, symboliquement représente le peuple d’Israël par rapport au monde. Débaptisant cette terre le lendemain en partant, il l’appelle Bethel. Théoriquement il emporte avec lui le potentiel de lumière et d’immortalité. Nous retrouvons l’amande avec les amygdales, ces deux petites amandes situées au niveau de notre verbe, et nous retrouvons tout ce potentiel divin de notre qualité de verbe au niveau du nez avec la floraison de l’amandier, de la floraison de l’être achevé, quoique rien ne soit vraiment achevé et que d’autres étapes nouvelles, que nous ne connaissons pas, vont toujours plus loin. L’amandier est aussi présent dans le mot Damas et ce n’est pas par hasard que Saint Paul va être saisi par la sainteté sur le chemin de Damas. C’est la ville qui conduit à la sainteté et c’est la ville
qui va connaître aussi la plus grande prostitution, puisque c’est la même essence et que tout dépend de la façon dont nous allons le vivre. Nous continuons à citer le Cantique des Cantiques dans la description des jours : « Les jours sont comme un parfum d’aromates, « comme une couche de plantes odorantes… » Nous sommes là dans ce qui correspond à notre odorat immédiat, mais aussi à l’étage des senteurs. « L’odeur de sainteté » si ridiculisée en Occident, est pourtant une réalité. Nous émanons tous une certaine odeur liée à notre qualité intérieure. Et plus nous nous purifions (au sens ontologique et non au sens moral du terme), plus notre odeur se transforme, de même que nos vibrations gagnent en luminosité. Les hommes très évolués dans leur devenir, savent parfaitement le reconnaître, parce qu’ils captent des plans beaucoup plus subtils. Les animaux aussi le sentent et les petits enfants y sont sensibles. Cette qualité d’odeur nous allons la retrouver, la reconquérir au fur et à mesure de la croissance de notre Arbre. Les Chrétiens parlent de l’odeur de l’homme avant le péché, Saint Isaac le Syrien mentionne l’odeur d’Adam avant la chute. C’est cette odeur que certainement reconnaissaient les animaux sauvages qui venaient lécher les pieds des Chrétiens qui leur étaient livrés dans les arènes. Et certainement, si l’animal percevait cette « odeur de sainteté » il n’aurait plus peur et le plus féroce vivrait à côté de l’animal qu’habituellement il dévore. Parce que nous transfigurons la création en nous transfigurant nous-mêmes. Le monde est très différent de celui que nous croyons voir. Nous n’en apercevons que la carcasse. Nous vivons dans une toute petite mesure de notre réalité et nous nous défendons par la force, par l’agression. Les joues sont donc des parterres d’aromates, ce sont les fleurs de notre être. Passons rapidement au symbolisme des yeux. Ils sont en particulier la répétition des mains. C’est à l’Aigle, au regard perçant qu’ils sont aussi liés, c’est cette vision perçante que nous avons à atteindre pour découvrir les cieux. Le mot hébreu Avin rend admirablement compte de l’œil, il veut aussi dire « la source ». Ce n’est; donc pas la vision immédiate qui intéresse les Hébreux, mais celle des origines, de ce noyau divin que nous sommes. « Si tu ne te refais pas germe, tu n’entreras pas dans le Royaume des Cieux », dit Jésus. Mais pour arriver à cette vision ultime, il va falloir passer par des expériences qu’expriment les mains qui sont la connaissance, non pas intellectuelle, mais celle du vécu, de celui qui va nous obliger à descendre dans les ténèbres de nos profondeurs. Bien des mythes vont reprendre le thème de la cécité, dont celui d’Œdipe dont
nous avons déjà parlé et qui, sous la plume de Sophocle est devenu moralisant, perdant sa signification profonde. Nous allons étudier aujourd’hui le mythe de Tobie qui est exactement la même démarche. Tobie en hébreu, c’est Tobihou, c’est le nom de Yod-Hé-Vov-Hé, du Tétragramme, sauf qu’un des Hé est remplacé par Tob. Tov, c’est le bien dans l’arbre de la connaissance de la dualité, faussement appelé le bien et le mal. C’est le parfait qu’il va falloir vivre dans la dualité, et la rupture du parfait pour passer à un plus que parfait. Toujours ces cycles qui vont se détruire les uns les autres, pour aller toujours plus loin dans notre réalité foncière. Et Annik de Souzenelle nous conte l’histoire de Tobie qui, dans son nom inscrit l’expérience déjà conquise, mais qui maintenant doit faire la démarche de la ténèbre. Comme Job il est un homme parfait et comme Job il va vivre un retournement de ce parfait pour aller plus loin. La ténèbre est symbolisée par sa cécité. Son histoire est liée à celle de Sarah, jeune fille qui vit bien sagement dans sa famille et qui a été fiancée sept fois. Mais chaque fois qu’un de ses fiancés successifs entre dans la chambre nuptiale, il meurt. Sans se connaître, Tobie et Sarah prient Dieu afin d’être délivrés de ces fléaux de la cécité et de ces démons qui tuent les époux et qui ne sont rien d’autre, que les énergies non encore épousées et que l’être va affronter par des épousailles dans la descente des profondeurs de la forge et par la purification par le feu que nous trouvons au niveau de Tiphereth. Tobie a conscience qu’il va mourir, mais il croit que ce sera la mort physique. Et c’est pourquoi il envoie son fils qui s’appelle aussi Tobie, recouvrer une dette contractée envers lui par un certain Gabelus. Tobie, sans qu’il ne le reconnaisse, est guidé dans son voyage par l’Archange Raphaël, accompagné d’un chien. Tobie et l’Archange, c’est Œdipe guidé par Antigone, le Dante accompagné par Virgile, Saint Bernard et Béatrice. La première nuit ils dorment au bord de la mer. Tobie allant se laver les pieds voit surgir ce « Dag Hagadol », ce gros poisson, déjà rencontré avec Job, duquel, sur l’ordre de l’Archange Raphaël (Raphaël en hébreu veut dire : je guéris), il va tirer le foie, le fiel et le cœur, car ces trois organes vont être des remèdes remarquables, en particulier pour guérir la cécité. La deuxième nuit, où vont-ils dormir ? Ils frappent à la porte de Sarah. « C’est une de tes cousines, dit le guide à Tobie, tu vas avoir à l’épouser ». L’Archange lui ayant raconté le sort des sept époux, dit à Tobie de ne pas craindre, car Sarah est sa femme dans les profondeurs, c’est sa féminité en lui, c’est sa ténèbre qui devient lumière. Et pour cela il lui faut affronter les démons. Tobie passe trois nuits dans la chambre de l’épousée, le mariage est consommé car, sur le conseil de l’Archange Raphaël, Tobie avait brûlé le cœur du poisson. Il en était sorti une fumée qui avait emporté les démons de Sarah « que l’Archange avait enchaînés dans le désert d’Egypte. » Ce texte est très mystérieux ! Sont-ils des énergies retournées par le mariage de Sarah et de Tobie ? Ces sept maris symbolisent les sept purifications qui étaient celles de Sarah et de Tobie, dépôts
d’une seule réalité, Tobie, le huitième époux porte le nombre huit, celui de la résurrection, et aussi de la barrière, de l’épreuve. Pendant qu’a lieu le mariage, l’Archange Raphaël va recouvrer la dette à la place de Tobie. Ce sont symboliquement les dettes de l’humanité envers le Père et qui sont soldées à ce moment-là. Gabelus, d’ailleurs veut dire en hébreu ce qui est limité et ce qui est limité devient illimité par le mariage du Créateur avec sa Création, par le mariage de l’Aimé avec l’Aimée, la rencontre de chacun de nous avec son centre. Gabelus est invité à partager le repas de noce. Nous retrouvons là le même symbole que celui du repas de noces des Evangiles. Toute la petite équipe retourne alors chez Tobie, le père, et là l’Archange Raphaël invite le jeune Tobie à déposer sur les yeux de son père le fiel du poisson. C’est toute la symbolique du recouvrement de la lumière qui ne peut se faire que quand on a vécu le plus amer. Mais la vue de Tobie recouvrée n’est plus la même que celle d’avant, car il s’agit à présent de la vision du Ciel ouvert et, à ce moment-là, il reconnaît l’Archange Raphaël dont il ne peut supporter l’éclat et devant lequel il se prosterne. L’archange lui dit : « Paix à vous », il les bénit et il part. Dans l’oreille qui résume le corps tout entier puisqu’elle a la forme d’un germe, il y a un point très précis qui correspond à cette vision du « troisième œil » qui se trouve dans toutes les traditions. Nous pouvons aussi faire le rapprochement avec la Licorne dont la corne unique a sa racine au niveau de cet œil frontal. La Licorne rend compte de la force contenue dans la corne, force que nous allons maintenant retrouver dans les cheveux. C’est cette force qui transperce le ciel, tous les cieux et qui nous y fait pénétrer. Zeus va épouser Métis en l’avalant. Métis c’est la sagesse. Dans l’Arbre des Séphiroth la Sagesse, Hochmah, est la dernière énergie avant la couronne. Ayant ressenti des douleurs au niveau de la tête, le dieu fait appel à Héphaïstos qui va forger la hache d’or avec laquelle il va fendre le crâne de Zeus. Pallas Athénée va naître et sort du front de son père toute casquée de lumière et d’or. Elle symbolise l’androgyne reconquise. Il est intéressant de noter que le Dr Chauchard a fait des coupes du cervelet et que ces coupes donnent l’image frappante de feuilles de chênes. De nos jours encore, le cervelet est appelé par la médecine : « l’Arbre de Vie ». Il semblerait que le cervelet joue par rapport au cerveau tout entier, le rôle que joue la tête par rapport au corps. Il se fait à ce niveau-là un travail que nous ignorons totalement, mais qui, petit à petit, allant vers des temps où nous découvrirons en nous nourrissant de l’Arbre de Vie, toutes nos possibilités, nous allons pouvoir devenir des hommes, des hommes que nous ne sommes pas encore, puis des dieux. Adam, lorsqu’il fut digne de retourner en Eden, reconquit en même temps le chemin de l’Arbre de Vie.
Ce que je peux vous dire, c’est que nous avons au niveau du cerveau deux glandes, l’épiphyse et l’hypophyse. On sait que cette dernière préside à la sexualité. L’épiphyse est beaucoup moins connue, mais on est en train de découvrir qu’elle joue un très grand rôle dans les expériences de conquête des plans supérieurs. Nous retrouvons donc là les deux pôles de la sexualité, celui de la sexualité d’origine primaire et la sexualité des hauteurs. Pour terminer nous allons encore parler du couronnement. Nous retrouvons la corne et la couronne, non celle de la Licorne, mais celle double des animaux qui figure aussi les cornes de la Lune et qui s’identifie à la corne d’abondance. La corbeille de l’épousée dans laquelle on venait mettre des cadeaux, n’en est qu’un reflet. Nos cheveux sont le sommet de la sexualité, ils sont nos forces. Souvenez-vous de Samson et Dalila, Dalila représente la ténèbre, il faut que les forces physiques soient coupées, pour que naissent les forces essentielles. Alors les Chinois vont dire : « Les reins fleurissent dans les cheveux », ou encore, « les cheveux prennent leurs racines dans les reins.» Cette force a grandi au fur et à mesure de la construction de nos vertèbres, elle a fleuri dans nos cheveux. Notre système pileux est un pôle d’information au même titre que les cornes chez l’animal sont des antennes. Vous voyez que le corps est beaucoup plus qu’un objet chargé de nous véhiculer de notre naissance jusqu’à notre mort ? En prendre conscience, c’est nous aider d’un outil, dans le sens noble du mot, pour accomplir notre destin
Alliance de feu Regard nouveau sur un être aimé, immuable et vivant. Le livre de la Genèse est cet être. II est Verbe de Dieu. Un, absolu, inchangeable en soi, il rend compte de la création qui, d'une part s'inscrit dans les espaces et les temps essentiellement changeants, mais qui, d'autre part s'enracine dans l'immuabilité du Verbe créateur. Chaque instant du temps la fait participer de l'éternité. Chaque instant est lourd d'éternité !
C'est au coeur de la croix que dessinent l'horizontalité du temps verticalité de l'éternité que se situe l'Homme dont nous verrons qu'il récapitule toute la création. En cela il participe lui aussi du temps et de l'éternité. Il participe du temps dans le quotidien de son être imparfait, inaccompli, lancé sur le chemin de son histoire qui devrait être la de son accomplissement. Sur ce chemin son oeil change. Il participe de l'éternité dans le potentiel divin qu'il est et dont porte, en tant qu'image du Verbe, le germe inaliénable en lui dans son principe. Dans ce principe, il lui est donné d'accéder à l'immuable. Lorsque l'Homme se coule dans l'axe de son instant-éternité, dans la moelle de son os, dans la sève de l'Arbre de Vie qu'il est, il se fait résonance du Verbe, il est la Tradition vivante. Moïse, sur le Sinaï, recevant le message de la Torah est la Tradition vivante. Dieu lui parle "bouche à bouche" (Nombres XII, 8). Ouvert aux profondeurs divines de son être, en lui jaillit le flux du Verbe qu'à son tour il transmet jusqu'à nous. Nous, hommes sur le chemin, sourds, aveugles, boiteux, défaillants, tombant et nous redressant et puis tombant encore, savons-nous à notre tour recevoir et transmettre ? Et si nous y parvenons, y a-t-il encore dans notre monde défait une oreille pour recevoir, un coeur pour comprendre, une bouche pour transmettre ? Nous n'avons pas, me semble-t-il, à nous poser cette question, mais nous avons à ETRE. A ETRE la Tradition vivante, l'Homme de l'instant, ancré tout à la fois dans les racines intemporelles de son être et dans l'actualisation quotidienne de l'information qu'il y puise et qui rend possible la transfiguration du plus banal apparent.
C'est, je crois, dans cette attitude transformante que se résoudra le problème de la désaffection contemporaine pour nos livres sacrés. Ne les avons-nous pas abordés intellectuellement, les rendant étrangers à notre problématique quotidienne, donc liés plus à un passé historique qu'à une permanence ontologique ? N'est-ce pas dans cette même attitude transformante que nous pourrons commencer de comprendre ce qui nous a si dramatiquement séparés, tout au moins en Occident, de l'homme du haut moyen-âge qui puisait encore à la source de ces livres la flamme de son génie ?
Une dichotomie latente s'insinua dans la vie de l'Occident, à partir du XII° siècle, pour laisser un jour d'un côté à des érudits, en général ecclésiastiques - l'Eglise enseignante -, le soin de garder la Tradition, d'un autre côté à des ignorants le soin d'apprendre quelque chose qui ne les concernait plus, quelque chose de dévitalisé qui laissa ces derniers - l'Eglise enseignée - devant la béance de l'absurde. Ce vide appela l'irruption des sciences dites exactes dont l'apogée, au XIX° siècle, magnifia la quasidivinisation de l'immédiateté de la nature. La Tradition fut alors considérée comme objet d'un passé, donc d'un temps ressortissant à l'Histoire, et non plus à un espace intérieur - une conscience - enfouie dans les profondeurs de l'instant-éternité de l'Homme. La conscience transcendante céda la place à la bonne conscience morale. L'Homme de Tradition fut confondu avec celui d'un passé périmé et la Tradition elle-même, ressentie comme une entrave à l'actualisation du présent immédiat. Telle une béquille parentale dont il convient de se séparer pour trouver la vraie personne de ces temps nouveaux, elle fut rejetée par l'Homme qui se voulait de son époque. Quant à celui qui se voulait encore Homme de Tradition, sous l'inexorable poussée à la divinisation de la nature palpable, il défigura peu à peu les données traditionnelles, les infléchissant aux impératifs de ce monde restreint, les réduisant à sa dimension aliénante et rendant détestable leur message ainsi infantilisé. Mais aujourd'hui leur message ne fait plus le poids. Ces mêmes sciences, au nom desquelles l'Homme renversait jadis la Tradition, ont explosé et fait éclater le mur de l'univers restreint dans lequel lui-même reste cependant encore intérieurement confiné, le laissant impuissant à faire face au monde prométhéen qu'elles engendrent. L'angoisse moderne en témoigne. Car c'est en pénétrant les profondeurs de la nature, celles de la matière immédiate, tangible, saisissable, que l'Homme d'aujourd'hui se heurte à l'insaisissable des réalités médiates et qu'il redécouvre la conscience au plus vif du concret. C'est en interrogeant le secret de la matière qu'il reçoit la réponse de l'Esprit. C'est au coeur du fini qu'il touche à l'infini. C'est alors dans la réalité quotidienne que la Tradition s'actualise et que nous nous trouvons crucifiés au point de rencontre de la contradiction du fini qui contient l'infini, au centre de l'axe horizontal du temps que vient briser l'axe vertical de l'éternité. Nous ne pouvons plus échapper à son exigence. Dans cette brisure, le Christ mort ressuscite !
Il sort victorieux du tombeau. C'est en brisant le noyau de l'insécable que la matière devient énergie. Rien de nouveau ne pourra naître hors de l'obéissance à la loi ontologique de mort et résurrection. Comment mourir ? Redevenir Homme de Tradition c'est apprendre à mourir pour vivre. C'est réapprendre à épouser nos espaces intérieurs sur la nature desquels la Genèse nous éclaire cieux nouveaux, terres nouvelles -, pour aller vers le dernier espace, celui du noyau de notre être... L'Homme qui a atteint à son noyau n'a pas à craindre le "nucléaire"... il est beaucoup plus que cela ! Faux problèmes que ceux de notre monde actuel au regard des lois qui régissent le devenir de l'Homme et que ce livre tente, à partir du texte hébreu, de mettre en lumière. Ils ne sont problèmes que dans l'inextricable labyrinthe où nous nous maintenons aliénés par notre coupure d'avec les zones profondes de nous-mêmes, par notre abandon de ce que Dieu transmettait à Moïse, par notre idolatrie des veaux d'or... Nous connaissons l'histoire des Tables que dans sa colère Moïse brisa ! L'histoire est toujours actuelle. Elle raconte que Dieu donna à Moïse de nouvelles Tables, mais la Tradition ajoute qu'en celles-ci est inscrit le même message, plus voilé. Ce voile fut enlevé par le Christ : le message est là, intact ; saisissons-le. Ce livre n'a d'autre but que de nous permettre de redevenir avec le Christ ce peuple d'Israël qui, au Sinaï, "regardait la voix divine". Nouveau regard sur l'immuable
J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter à présent. Quand viendra l'Esprit de Vérité, Il vous guidera vers la Vérité entière ..." (Jean XVI, 12-13). disait à ses disciples Celui qui allait monter sur la croix et y mourir, Lui, Dieu et Homme, Eternel accomplissant les temps.
L'Esprit est venu dans le monde ; mais savons-nous Le recevoir ? C'est en acceptant de mourir, de faire le vide, que nous nous ouvrons à Lui, et qu'Il nous guide vers une nouvelle lumière, nouvelle vérité, jusqu'au Christ qui est La Vérité.
Cette loi préside à l'évolution du monde comme à celle de chacun de nous en particulier. L'humanité vit aujourd'hui l'aube d'une nouvelle naissance. Elle ne pourra "porter ces choses nouvelles", recevoir une nouvelle vérité, que si elle accepte de mourir à ce qu'elle croyait jusqu'à maintenant être la vérité. Est-ce à dire que ce qui a été enseigné jusqu'ici était faux ! - Non. C'était ce que nous pouvions supporter. Est-ce à dire que malgré leur sainteté les Pères n'ont pas eu accès à la totalité de la lumière ? - Pierre, Jacques et Jean, sur la montagne du Tabor, ont vu plus que la totalité de la lumière créée, la Lumière incréée !
Et cependant le Christ leur ordonne impérativement : "Vous ne raconterez ces choses à personne jusqu'à ce que le Fils de l'Homme soit ressuscité des morts". (Matthieu XVII, 9)
Christ est ressuscité des morts et les trois apôtres ont annoncé l'Evangile. Mais l'Evangile, comme la Genèse, ne se laisse saisir qu'au cours des temps, au fur et à mesure qu'avec le Christ, l'Homme, à son tour, ressuscite de ses morts intérieures, au fur et à mesure qu'avec Lui il descend dans ses propres ténèbres et qu'il renaît. Les Pères nous ont fait monter sur une montagne. Pas plus que les apôtres au Tabor nous n'avons à nous y installer. Le Moyen- Orient en général, et plus particulièrement la Grèce d'où presque tous les Pères sont originaires, a une vocation de lumière. La Grèce, Yawan, en hébreu, est le même mot que Yon ou Yonah, la colombe, oiseau symbole de lumière, et que Jonas le prophète qui pour monter dans la lumière dut mourir dans les entrailles ténébreuses du monstre marin. Avec lui, il nous faut aussi aujourd'hui aller puiser plus profondément dans nos ténèbres, dans la réserve d'énergies-informations que détiennent ceux que j'appelle les "gardiens du Trésor", nos frères hébreux. Nous verrons au cours de ce travail que l'Homme créé au sixième jour, "mâle et femelle", est celui (hommes ou femmes) qui, en tant que "mâle", "se souvient" de son "féminin", lequel est réserve d'énergies-informations contenues en lui. Etre mâle c'est, participant d'une lumière-force, être conscient qu'elle n'est pas la totale lumière, être conscient de sa faiblesse, se "souvenir" de la réserve de force-lumière contenue dans les ténèbres pour
la pénétrer et faire une plus grande lumière, acquérir une nouvelle force. Celle-ci à son tour permettra de descendre plus profondément encore…,.jusqu'au noyau, Germe divin, dont est lourd le féminin ! Le monde féminin est lié au mystère des ténèbres. II est porteur de l'information, il est gravide de Dieu ! L'Homme coupé de la profondeur de son féminin s'exclut de l'expérience divine qui l'informe dans l'instant. L'Homme que je dénonçais tout à l'heure comme s'étant coupé de lui-même, de ses mondes intérieurs, en se séparant de la Tradition, est devenu peu à peu le faux mâle fort de ses seules forces extérieures. Celui-là d'ailleurs a peu à peu aussi relégué au second plan le monde féminin d'un premier niveau, car tout se tient, et ce n'est pas par hasard non plus que ce même monde féminin se réveille aujourd'hui en même temps que se redécouvre l'inconscient... Le début de l'ère chrétienne, qui a vécu un acmé dans la lumière patristique de la Grèce, a inscrit dans sa chair son expérience taborique à la Sainte Montagne de l'Athos. Là, encore aujourd'hui, aucune femme n'a le droit de venir troubler la contemplation des moines car seule Marie, la Mère de Dieu, est reine. J'espère de tout mon coeur que les moines vivent, avec l'aide de la reine des cieux, la descente dans leurs ténèbres intérieures et qu'ils pénètrent leur féminin essentiel, faute de quoi leur démarche serait illusoire. Mais il est bien signifiant qu'au coeur de la Grèce où le Christianisme a vécu sa première expérience lumière, l'Athos ne s'ouvre qu'à la femme devenue elle-même totalement lumière. C'est peut-être aujourd'hui le rôle d'une femme consciente de ses propres ténèbres, de venir rappeler que le Christ ne dévoilera sa plénitude de la Lumière Taborique qu'à une humanité qui avec Lui, et certaine de la résurrection, redescendra de la montagne et pénétrera dans les ténèbres de la Tradition.
Le monde hébreu est, à mes yeux, le féminin du monde chrétien. Il n'est pas étonnant que dans son évolution historique, le Chrétien ait lui aussi rejeté son féminin hébreu. Il est plus que temps qu'il vienne l'épouser. Les raisons historiques, voire psychologiques, qui ont présidé à ce phénomène n'ont aucun poids face aux lois spirituelles qui y président. Le monde féminin fait toujours résistance nécessaire à l'évolution, comme les ténèbres font résistance à la Lumière et la limitent utilement un temps.
Ce n'est pas par hasard que ce fut la femme de Lot qui ne voulut pas poursuivre le voyage... elle fut transformée en statue, mais en statue de sel. Le sel est symbole de sagesse. La "mer de sel", aujourd'hui "mer morte", marquait la limite entre les terres d'Abram et celles de Lot avant la purification par le feu de Sodome et Gomorrhe. Le féminin de Lot, nouvelle "mer de sel", pose la nouvelle limite entre Abram (lumière), et Lot ("le voilé", ténèbres), entre l'accompli et l'inaccompli d'Israël. "Tu poses une limite que les eaux (inaccompli) ne doivent pas franchir pour ne pas venir recouvrir la terre (accompli)". (Psaumes 103) chante le psalmiste qui rappelle la confusion du déluge. Les Hébreux eux aussi ont fait oeuvre de Sagesse divine et ont posé une limite nécessaire à la lumière du Christ. Il nous faut aujourd'hui entrer dans cette nouvelle intelligence de l'Histoire : la résistance à Dieu vient de Dieu ! Moïse, investi de la puissance divine pour affronter Pharaon et délivrer de l'esclavage le peuple d'Israël, ne fut-il pas arrêté sur le chemin par le Seigneur lui-même "qui voulut le faire mourir" (Exode IV, 24) ? Et lorsque, sortant vainqueur de l'épreuve, Moïse rencontra Pharaon et obtint de lui la promesse de la libération d'Israël, alors autant de fois qu'il fut nécessaire, après chacune des plaies répandues sur l'Egypte : "Le Seigneur durcit le coeur de Pharaon" (Exode IX, 12- x, 1 & 20-- etc), et Pharaon retint encore le peuple prisonnier. Que signifie cette résistance divine si ce n'est qu'elle forgeait Israël à une autre dimension de lui-même pour qu'il devienne capable de sortir de l'esclavage d'assumer la liberté et de vivre le désert qui allait suivre ? Isaï ne dénonce-t-il pas cette résistance comme faisant partie intégrante de la Sagesse divine (Isaï VI, 810) ? "Va, dit le Seigneur, et dis à ce peuple : Ecoutant, écoute et ne comprends pas, Voyant, vois et ne connais pas, appesantis le coeur de ce peuple, alourdis ses oreilles, et ses yeux ferme-les, de peur qu'il ne voit de ses yeux, que de ses oreilles il n'écoutent que de son coeur il ne comprenne et qu'il ne se convertisse, et qu'il ne soit guéri !" Et l'apôtre Jean "au secret divin" ne rappelle-t-il pas Isaï pour confirmer la cause profonde du refus de la plus grande part du peuple juif à reconnaître Jésus pour Messie ? "Quoiqu'il eût fait de si grands miracles en leur présence, ils ne croyaient pas en lui afin que fût accomplie la parole qu'avait dite le prophète Isaï..." (Jean XII, 37-41)
L'apôtre Paul explique : "C'est un endurcissement partiel qui est arrivé à Israël jusqu'à ce que les Gentils soient entrés au complet (dans la foi en Jésus-Christ)" (Romains XI, 25). La lumière puise sa source dans la justesse du rapport qui unit l'émissivité énergétique et la réceptivité. La réceptivité se fait alors pour partie lumière, pour partie résistance à elle. Cette résistance, par rapport à la lumière, est ténèbres qui, sollicitées plus tard par une nouvelle force émissive, se feront pour partie encore nouvelle lumière, pour partie ténèbres qui sont réserve de lumière ultérieure. Les ténèbres obéissent à la loi de dispersion, la lumière à celle de l'unification. Dans sa dispersion le peuple juif a fécondé le monde de sa lumière cachée. Le Chrétien de sa lumière révélée a baptisé lumière les nations. Mais privés l'un de l'autre aujourd'hui, ils sont devenus stériles. L'heure de leur mariage a sonné. C'est le trésor d'Israël que le Christ est venu accomplir. C'est en revenant puiser dans le trésor d'Israël que le Chrétien, à l'image de son Maître, s'accomplira. Il n'y a lumière plus grande que fruit du mariage de la lumière et des ténèbres. Les ténèbres ne dévoilent ainsi la lumière dont elles sont le gardien que peu à peu autant que porter, voire l'épouser, l'Homme peut la la devenir. Qu'il n'y ait aucune ambiguïté : la relation que dans une dialectique j'établis entre Judaïsme et Christianisme ténèbres- lumière ne signifie à la lumière ; l'un et aucunement que j'identifie le Judaïsme aux ténèbres et le Christianisme l'autre l'un à l'autre que je ont respectivement leur dialectique interne ténèbres-lumière, ce n'est que dans leur rapport ressens le Christianisme lié à la lumière de Noël, le Judaïsme aux ténèbres du l'Homme nouveau, Golgotha d'où jaillira totalement autre, l'Homme ressuscité. Un seul Messie les en gloire à la unit ; celui de la sixième heure qui reviendra neuvième heure. Je m'explique : Méditant, à la lumière des sept jours de la Genèse, sur les lois qui président au développement de l'enfant dans le ventre de sa mère, je proposais de penser dans un récent ouvrage (Le Symbolisme du Corps Humain) - et je le rappelle dans celui-ci - qu'au sixième mois de la vie intra-utérine l'enfant devient viable car il acquiert - comme au sixième jour de la Genèse - sa dimension "d'image de Dieu". Son sang est alors porteur de son Nom secret, sa "personne" ; l'enfant est lourd du germe divin qu'il doit devenir. Pourquoi ne nait-il pas encore ?
Qu'est-ce qui fait résistance pendant encore trois mois ? Tout porte à croire que cette force de résistance permet la mise en place de structures beaucoup plus subtiles que les structures biologiques, et relatives au mystère de la personne unique qu'est chaque enfant venant au monde. Il semble que ces trois d'attente soient, en raccourci, le symbole de ce que sera la vie de cet être, de l'âge adulte à la fin de l'accomplissement total de sa personne, depuis l'image jusqu'à la ressemblance divine à laquelle il est appelé. L'enfant venant au monde à neuf mois n'est que dans le sixième mois de son essentiel. II y restera durant son enfance et son adolescence. Devenir véritablement un homme, c'est entrer dans le septième mois de la vie intra-utérine cosmique. Ce septième mois voit alors une mutation grandiose qui devraitêtre l'âge adulte, mais que l'humanité actuelle ne connaît guère encore, car le développement de chaque être, bien qu'autonome, est aussi intimement lié à celui de l'Homme total qu'est l'humanité dans son ensemble. Et, à de rares exceptions près que tous les temps ont connues, peu d'hommes ont dépassé le stade animal du sixième mois. Dans cette perspective, je proposais aussi de penser que le Christ, né il y a deux mille ans dans le tissu animal du sixième mois de l'humanité, a fait entrer celle-ci dans sa dimension "d'image de Dieu". La rencontre de Marie, enceinte du Christ, avec Elisabeth dont les Evangiles nous précisent qu'elle était dans son sixième mois de grossesse, en serait un témoignage car Jean-Baptiste dans l'esprit de la tradition symbolise l'humanité de l'ancienne alliance... Qu'elle le veuille ou non l'humanité, il y a deux mille ans, a entendu battre le coeur de son NOM. Qu'elle le veuille ou non aussi, elle est entrée avec le Christ révélant la Trinité des Personnes divines dans la révélation de la personne humaine. Aujourd'hui elle n'est plus à l'écoute de ce coeur qui cependant ne cesse de battre ! II ne bat que pour nous conduire de l'image à la ressemblance, du sixième au neuvième mois de notre gestation cosmique où tout sera accompli. Sur la croix, Christ ne s'écrie-t-il pas avant de mourir : "Tout est accompli", c'était la neuvième heure. De la sixième heure à la neuvième heure les ténèbres recouvrent la terre. A la dixième heure c'est la résurrection. Au dixième mois de la gestation de l'Homme, ce même Christ né dans le tissu animal de la création reviendra en gloire. C'est Lui ce Messie qu'attendent les ténèbres-trésor de l'humanité, Israël, celui-là même qu'une faible lumière de son peuple a reconnu dans l'enfant de Bethléem.
Il semble que l'humanité ait à gérer aujourd'hui son passage au septième mois de sa vie intra-utérine cosmique. Elle ne passera du six au sept que dans des noces dont je pense qu'elles concernent essentiellement Juifs et Chrétiens, le peuple du "Livre". Commenté par les Juifs, traduit par les Chrétiens, dans l'un et l'autre cas le Livre, la Bible, ne l'a été qu'à la lumière du niveau de conscience des hommes de l'époque. Une information essentielle reste encore dans les Ténèbres, c'est la langue hébraïque qui la garde. Disposerions-nous aujourd'hui du texte hébreu de la Bible si le peuple juif tout entier avait reconnu Jésus de Nazareth pour Messie ? Cette question m'a pénétré le coeur un jour que je marchais dans les pas du Christ à Jérusalem. Et la réponse vint tout aussitôt ; il fallait qu'ils restent les gardiens du Trésor. C'est à partir de là que je méditais longuement sur le sens profond du phénomène de la résistance, celui que j'exposais plus haut. La Bible hébraïque est devenue historiquement la seule identité réelle d'un peuple rejeté qui a sauvé le Livre avec sa peau. Il s'est enrichi du sang de ses martyrs. C'est en accédant à sa langue qu'il nous sera donné de vivre la Pentecôte de son message. Là, deux voies s'ouvrent, distinguées l'une de l'autre, mais inséparables en profondeur : - Une voie directe, mystique, celle du verbe du Dieu vivant, archétype de toute langue, accessible à tous, du plus illettré au plus grand savant. Elle se suffit à elle-même. C'est une voie personnelle. Elle est par contre indispensable en grande partie à celui qui chemine sur la seconde voie, mais celle-ci s'ouvre au collectif. - Cette voie est indirecte ; elle passe par une étude ; celle de la langue hébraïque en tant qu'icône la plus précieuse du Verbe est par excellence. L'icône ne parlera qu'à celui qui fait le premier chemin, mais elle peut être le relais magistral sur le chemin. Elle le fut et le reste chaque jour pour moi. L'icône contient la puissance de l'archétype, son modèle, et le pouvoir d'y reconduire. L'hébreu conduit au Verbe divin.
Sur le chemin de l'image au modèle, de nombreux niveaux de lecture peuvent s'ouvrir : soixante-dix-sept, disent les Hébreux pour qui le nombre sept est celui qui conduit à l'infini ! Mais dans une autre optique ils parlent aussi de quatre niveaux, selon les quatre lettres qui composent le mot Pardès, lequel est le "Paradis" ou encore la "science divine". - Le premier niveau, tout "simple", est celui du Peshat, qui est celui dans lequel nous avons jusqu'ici confiné les traductions. Nouvelles statues de sel, les traductions ont arrêté le Verbe à une toute première intelligence du texte où les contradictions sont irréductibles et où le message, plus secret, incompris, a été détourné pour être ramené à ce premier niveau, en écorchant souvent tout "simplement" aussi la grammaire ! Revenir à la source des traductions, le texte hébreu lui-même, est la seule façon de retrouver le chemin des profondeurs qui attendent de nous que nous fassions "oeuvre mâle" en elles en même temps qu'en nous. - Le deuxième niveau, Remez, est celui qui "clignote" derrière le premier. Il est plus subtil, lié à la dimension symbolique de ce qui apparaît statufié au premier niveau. C'est une vie qui palpite derrière les apparences ; elle cache le pouvoir qu'elle a de reconduire les objets du premier niveau à leurs archétypes respectifs. Cette reconduction est exprimée par la possibilité dont jouit ce qui rampe de se redresser, exactement comme le serpent peut être l'animal qui "mange la poussière" mais qui, verticalisé, peut devenir l'Arbre de Vie auquel le Christ s'identifie (Jean III, 14). C'est à ce niveau que les Pères nous ont admirablement conduits, nous introduisant ainsi au Darash. - Le troisième niveau, Darash, s'offre à notre "recherche". Il porte en lui une "exigence" de rencontre, de l'Homme avec son Nom. Ce troisième niveau s'étage sur tous les plans de redressement du Remez, sur tous les plans de verticalisation de l'Homme. On peut le comparer à l'échelle de Jacob qui, reposant sur la terre de Peshat-Remez, dresse tous ses échelons dans le Darash. Chacun des échelons est une lumière nouvelle qui implique - nous le verrons - un mariage avec les ténèbres. N'y accède que celui qui accomplit en lui ses mariages intérieurs et qui accepte donc d'être et de pénétrer ses ténèbres. La montée dans la lumière d'une nouvelle intelligence des Ecritures se fera dans la mesure où l'Homme sera descendu dans ses propres ténèbres. Cette étape ne fait aucunement appel à une intelligence intellectuelle mais elle se construit en même temps que sourd du cceur circoncis de l'Homme la lumière d'une intelligence neuve. - Le quatrième niveau dont on peut dire aussi, dans cette perspective de l'échelle, qu'il est un sommet jamais atteint, infini, est Sod, le "secret".
Le secret plonge ses racines dans la pensée divine qui relève de Sagesse et Intelligence auxquelles on n'atteint que par la croix. La Bible hébraïque et le Christ Verbe incarné, pour celui qui fait le chemin direct, sont gardiens du secret. Si le Christ conduit au Tabor jusqu'à sa lumière incréée, l'hébreu conduit au Verbe dans sa lumière créée. Une légende juive raconte que Rabbi Aqiba réputé pour sa sainteté introduisit dans le secret trois de ses disciples. L'un mourut, le deuxième revint fou et le troisième perdit la foi. Seul Rabbi Aqiba entra dans le mystère du Verbe. L'hébreu conduit au Verbe. Les lettres de son alphabet sont des énergies créées, elles- mêmes icônes des Energies divines incréées. Le jeu des figures qu'elles forment pour constituer un mot, une phrase, un discours est un jeu divin, jeu mobile et rigoureux comme celui d'un ballet dont le maïtre est caché dans le secret. Trois lettres nous saluent d'un mot qu'immédiatement nous figeons dans un concept du Peshat. Alors miséricordieuses, nos trois amies se présentent à nous d'une autre manière. Et la forme qu'elles se donnent, différente de la précédente, joue avec elles un langage si subtil que tout à coup un relief apparaît qui arrache la phrase du Peshat devenu Remez et la fait danser dans le Darash, sur un niveau de l'échelle où nous nous sentons nous-mêmes arrachés. Le poète, par une voie intuitive, tend vers cette même expérience dans le livre de la nature, autre Bible à laquelle le Christ fait si souvent référence, comme venant jouer en stéréophonie avec les Ecritures. La nature est une autre icône du Verbe à laquelle toutes les Traditions viennent puiser, son langage est universel. Le prophète vit cette expérience par connaissance. Participant de l'un et de l'autre, chacun de nous attentif au langage de l'inconscient peut entrer dans l'écoute du Verbe... Le texte original de la Bible était écrit d'un seul tenant, sans coupure entre les mots. Si nos Pères, sous l'inspiration de l'Esprit-Saint, ont établi les césures que nous connaissons, la possibilité d'autres césures reste ouverte, dont le nouveau souffle qu'elles déterminent n'est pas étranger aux dimensions du "Pardes" que l'Esprit-Saint a jusqu'ici gardé cachées. L'Apôtre Paul ne termine-t-il pas son épître théologique par excellence en disant : "A celui qui peut vous affermir... Selon la révélation du mystère qui, tenu secret de toute éternité, est maintenant dévoilé..." (Romains XVI, 25) Le dévoilement s'étage sur les siècles de nos mois d'enfantement dont celui que nous semblons entamer nous branche à une nouvelle respiration. Ne croyons pas que nous puissions alors, ivres de cet air des hauteurs, danser avec notre corps de ballet
alphabétique la figure qui convient à nos délires : Les lettres sont des énergies vivantes, légères de beauté et lourdes du sens de l'incréé qui fait leur beauté; elles irradient, pénètrent, sculptent et taillent leur contemplateur avec la précision du burin divin au point exact où se joue leur rencontre avec leur homologue en lui, l'Homme, autre aspect encore insoupçonné du Verbe. Chaque lettre en lui trouve son écho et le vérifie. Celui qui ne résonne pas juste est atteint dans son être. Chaque lettre est feu, feu de l'amour de Dieu qui est Rigueur et Tendresse feu qui pénètre l'aimé et le transforme au fil de l'Epée. Chaque lettre du Verbe est un aspect de l'Epée à deux tranchants, qui tue ou vivifie celui qui s'avance sur son chemin ! La grammaire hébraïque joue dans cette même foulée créatrice, son rôle structurant, rigoureux et libérant. Elle non plus ne reste pas vissée au temps linéaire passé- présent-futur dont la physique quantique nous apprend aujourd'hui qu'il est illusion. A l'aube des temps on le savait. Passé-présent-futur n'appartiennent qu'à un seul échelon de notre échelle, encore que le présent, car il est insaisissable et brise le temps, appartient à la transcendante éternité dont je parlais au début de cette introduction. C'est pourquoi il n'y a pas de présent en hébreu. Celui du verbe être serait YHWH, le Verbe divin ! Chaque instant, lourd de la totale potentialité de l'échelle, est tu, car c'est lui seul qui importe en profondeur à l'hébreu. En lui le Verbe se fait silence. Dans ce sens le temps de la grammaire est, je dirais, vertical. Un échelon émergé des ténèbres, devenu lumière, est un champ de conscience intégré, il est accompli. Les échelons qui restent à gravir sont encore dans les ténèbres. Ce sont des terres intérieures encore inexplorées, des champs de conscience fermés, inaccomplis. En profondeur, seuls "accompli" et "inaccompli" sont les deux formes verbales qui président à la langue hébraïque parce qu'elles président à la vie du Verbe divin en nous. La vie est essentiellement potentiel à accomplir. Nous verrons que l'Arbre de la Connaissance planté en Eden est celui non du bien et du mal - qui l'un et
l'autre n'ont pas d'ontologie -, mais celui de la connaissance accomplie et non- encore-accomplie ; il est celui de la lumière révélée, intégrée et de celle qui reste encore en potentialité dans les ténèbres. Le dernier fruit de cet arbre est celui de la connaissance- information totale, atteinte lorsque la lumière aura "épousé" la totalité des ténèbres. Notre histoire saisie entre les deux "portes" que sont naissance et mort pour chacun de nous, ou l'histoire de l'humanité saisie entre l'aube de ses origines et la fin des temps, n'est que celle de l'accomplissement de nos terres, espaces intérieurs, dont l'histoire des Hébreux est le prototype. Certaines lettres de l'alphabet hébreu ont disparu de notre alphabet ; il serait d'ailleurs intéressant de connaître le sens de leur occultation puisqu'elles sont icônes d'une Energie divine que nous semblons vouloir faire ainsi disparaître de notre conscience... Nous pallions pour l'instant ce manque par des signes conventionnels qui sont de valeur quasi internationale bien que rien dans ce domaine ne soit véritablement arrêté ! L'hébreu ne comportant pas de voyelles dans le corpus de son alphabet, on a senti la nécessité d'indiquer les sons vocaliques par une notification dite de "points-voyelles" dont il est aussi convenu de rendre compte en français par d'autres signes. Pour translitèrer l'hébreu, j'utiliserai donc l'ensemble de ces signes avec lesquels le lecteur pourra se familiariser en se rapportant au tableau que j'en dresse à la suite de cette introduction, il est légèrement simplifié par rapport au code généralement utilisé, d'une part pour faciliter la tâche du lecteur de langue française, d'autre part pour garder au coeur de certains mots la présence du Yod, sans distinction de sa qualité de voyelle ou de consonne. Je n'ai pas tenu compte de l'accentuation. J'ai gardé la plupart des noms propres tels qu'ils sont généralement connus en français lorsque le nom hébreu en est trop éloigné (exemple : Sodome et Gomorrhe qui littéralement sont Sedom et 'Amorah ; Jonas qui est Yonah; Job qui est 'Iyob... etc.). De la même manière, j'ai continué d'écrire en français, en obéissant à l'habitude prise par les translitérations phonétiques qui n'obéissaient encore à aucun code, des mots hébreux courants tels "Mi" et "Ma" qui, selon le code devraient être "Mî" et "Mâ" ou "My" et "Mah". Je renvoie souvent le lecteur à un de mes deux ouvrages : - "Le Symbolisme du Corps Humain" (Editions Albin Michel). - "La Lettre, Chemin de Vie" (Editions Albin Michel). Enfin, pour tenter de rendre la lecture de ce travail moins ardue, j'ai choisi de le diviser en deux parties : La page de droite de ce livre consigne le travail chorégraphique, et la mathématique de ma "danse" avec le texte hébreu, telle que je la vis dans mon expérience de chaque jour.
Elle exige que le lecteur connaisse un peu mon partenaire hébreu, sa sensibilité, sa réserve, son
exigence, son audace, pour comprendre dans quelles profondeurs il me saisit et m'oblige à mourir pour renaître. La page de gauche offre le fruit de ce qui semble n'être qu'une réflexion. On n'y voit couler ni la sueur ni les larmes, mais la joie seule du travail accompli, à peine la consciente certitude de ce qui reste à accomplir ! J'invite maintenant le lecteur à se "déchausser" avec moi pour pénétrer le sanctuaire de la Genèse. "Ote tes sandales de tes pieds car le lieu sur lequel tu te dresses est une terre sainte". (Exode III,5) dit Dieu à Moïse devant le Buisson ardent, Verbe en puissance.
Le texte comporte aussi le verbe "se dresser". Nous ne pouvons entrer dans le sanctuaire dans l'état de rampant mais dans l'exigence de la verticalisation. II faut nous laisser saisir par l'Esprit, nous laisser arracher par lui à nos conformismes profanes et sécurisants et nous abandonner à Celui qui nous conduit au coeur du mystère, au coeur de nous-mêmes, faute de quoi la lettre, telle une épouse bafouée, se fermera à notre viol ou nous brisera. Otons nos chaussures et redressons-nous au seuil du sanctuaire de la Genèse, "Beré 'shît" en hébreu, dont la Tradition dit qu'il contient la totalité de la Torah. Elle ajoute que le livre entier est contenu dans ce premier chapitre que je tente ici d'approcher ; elle ajoute encore que tout le premier chapitre est contenu dans le premier verset, que ce premier verset est contenu dans le premier mot dont la première lettre, le B, le contient tout entier. La lettre B, Beit en hébreu, symbolise à elle seule toute la création. Elle est chacun de nous, qui récapitule la création. Elle signifie la "Maison". Elle est la "Maison de Dieu" ; voici son histoire :
Résonances bibliques
- INTRODUCTION Beaucoup de nos frères juifs s'interrogent aujourd'hui sur la personne de Jésus et se penchent sur les Évangiles : Jésus rendu aux siens, En vérité je vous le dis, Une lecture juive des Évangiles, Shalom Jésus, d'autres ouvrages encore en sont le témoignage. De leur côté, de nombreux chrétiens se tournent vers la Tradition juive et apprennent l'hébreu pour mieux lire la Bible dont la traduction n'échappe pas - et moins que d'autres ! - à la "trahison"... Un indéniable désir de rencontre s'exprime, quï veut non seulement mettre fin à des siècles de rejets, de méconnaissance et d'anathèmes, mais aussi nous réenraciner et nous épanouir dans nos Traditions respectives dont nous avons l'intuition que Ieur séparation les altère ; intuition qui devient certitude lorsque nous faisons l'expérience de les unir. En réponse à la lecture juive des Évangiles, je propose dans tous mes ouvrages une lecture chrérienne de la Torah, accompagnée d'ailleurs en cela par beaucoup d'amoureux de la langue hébraïque.
Nous ne pouvons aller vers les Évangiles pour les uns, vers la Torah pour les autres, qu'en revêtant "des oreilles pour entendre". Il s'agit bien sûr des oreilles du coeur qui s'ouvrent à l'insoupçonnable, au tout nouveau, dans "les coupures du prépuce" de ce centre de l'Homme, si refermé, voire bloqué sur les idées du mental, qui font loi. Il s'agit de retrouver le chemin du Pardes, celui qu'exige la lecture de tout texte sacré, depuis le niveau du
Pshat, de ce qui est "simple", jusqu'à celui du Sod, du "secret". Car, ne nous faisons pas d'illusion, ce ne sera qu'au coeur du Sod - du "secret" - que nous nous rencontrerons en vérité. Faire le chemin du Pardes implique - le niveau du Darash nous le dit en clair - qu'il soit parcouru audedans de nous, dans les mutations qu'exigent de nous les messages que délivre le texte à chaque niveau de lecture, chacun étant lui-même le fruit d'un champ de conscience ouvert en nous par une précédente mutation de l'être. Aucun ordinateur ne le fera à notre place. Les qualités intellectuelles et les plus hauts degrés de culture acquis n'ont pas accès à cette qualité d'intelligence neuve née au-dedans de nous, avec la croissance de l'Arbre de la Connaissance dont nous sommes appelés à devenir le fruit. Aller vers ces textes en restant au niveau du Pshat, c'est exercer sur eux une réduction telle qu'elle les anéantit ; et vouloir justifier cette lecture à coups d'arguments historiques, si savants soient-ils, place la critique historique au-dessus du sacré qui relève d'une autre logique ; le danger est si grand de toujours ériger nos idées en idoles ! Mourir à nous-mêmes dans ces chères idées acquises, nos vérités tenues pour immuables et nos sagesses, c'est de cela qu'il s'agit pour naître à de nouvelles lumières, jour après jour, inlassablement, et chez nous tous, juifs et chrétiens ; il nous faut alors entrer en résonance en nous-mêmes avec l'Image divine fondatrice de notre être, notre véritable identité qui est "Fils de l'Homme", stérile en nous tant que nous sommes dans l'oubli de lui, mais qui devient vivant si nous nous souvenons de lui et de son exigence de croissance. Ce n'est certes pas en nous installant sur nos positions respectives, ce qui obéirait à une logique de mort, que nous pourrons nous rencontrer, mais dans l'obéissance au "Va vers toi" ordonné par Dieu à Abraham comme à la Bien-aimée du Cantique des Cantiques et à nous-mêmes, dans l'amoureuse tension de vie, qui peut nous conduire jusqu'au bout de nous-mêmes, c'est-à-dire jusqu'au Sod. A cette étape du chemin, un même flux de vie, bien audelà de toute volonté humaine, voire des meilleures bonnes volontés oecuméniques, réunira tout d'abord entre eux les chrétiens séparés, comme il réunira les différents courants du judaïsme qui s'opposent les uns aux autres aujourd'hui. Je disais il y a déjà quinze ans en écrïvant Alliance de Feu que le texte hébreu du Livre était une réserve d'information incalculable, un "ïnaccompli" attendant dans les ténèbres de notre propre "inaccompli" que nous émergions avec luï dans la lumière. Dans cette double et unique démarche, ce texte se révèle être l'ïcône du Verbe de Dïeu inscrite dans la Bible comme en nous, tracée de la même Plume. Lorsque je me fais coupe devant cette icône du Verbe, elle vient vers moi et ne vient que parce que je la porte en moi ; elle m'instruit aiors de ces textes en même temps que de moi-même. Que le lecteur n'en déduise pas que je fais fi de ce que nos Pères dans la foi ont dit de nos Lïvres sacrés. Eux-mêmes ont contemplé l'icône et vécu ce dialogue intime et personnel.
Il me serait facile d'orner mon texte de citations de leurs oeuvres - mon ordinateur pourrait le faire -, mais elles seraient ornements et non le corps authentique de mon travail. De leurs écrits, les Pères ont nourri ma foi ; de son enseignement oral, l'évêque Jean (Kovalevsky) qui fut mon maître a illuminé ma foi. Tous m'ont ouvert le coeur à la nécessité de transformations intérieures et m'en ont donné l'élan. Mais aucun d'eux n'est l'icône qui m'a saisie. La connaissance est éros ; elle jaillit de la source de l'être ; elle est expérience. Dans cette expérience mon cheminement a pris la voie du texte hébreu. Jésus est le chemin, et le Chemin irradie tant de voies ! La langue sacrée qui a porté la montée messianique du peuple hébreu et que le Messie lui-même a parlée et chantée est l'icône que je contemple et qui ne comporte entre elle et moi que l'écran de mon impureté, parfois aussi celui d'une sagesse qui impose le silence. Les mots que la langue hébraïque propose à notre regard, si impur soit-il encore et s'il est saisi dans cet élan de purification, ces mots enlèvent peu à peu leurs voiles et dessillent nos yeux. A cette lumière, ils ne sont pas, comme dans nos langues vulgaires, les outils dont on se sert pour exprimer des idées, ils sont en eux-mêmes informateurs et générateurs d'idées ; chacun d'eux est un aspect du Verbe de Dieu nous révélant les lois immuables, fondatrices du Créé. Images de l'Incréé, ils nous reconduisent à l'Incréé... La Brit Milah, "l'Alliance de la circoncision", est aussi "l'Alliance du mot". Le mot est une circoncision du Verbe et nous oblige à nos propres circoncisions du coeur pour atteindre au Verbe ! Écrire Résonances bibligues m'oblige à vivre cette Alliance. Alliance et résonance fondent le dialogue. Le dialogue est alors non seulement celui que tentent d'établir entre eux juifs et chrétiens, mais celui qui s'offre à l'écoute de nos oreilles circoncises et que ne cessent de chanter à voix basse premier et second Testaments. Depuis les premiers siècles de l'Église, l'ordre des célébrations liturgiques chrétiennes met en résonance ces deux Testaments. En cet échange amoureux, une immense richesse nourrit nos coeurs, devrait nourrir nos coeurs ! Mais force nous est de constater aujourd'hui la désaffection massive du monde chrétien pour ce festin.
L'un va vers la fascination de l'individualisme qui se veut fondement d'une éthique nouvelle et libérente, mais qui, meurtrier de la "personne", est non-sens fondamentalement aliénant et source de désespoir ; l'autre, véritablement en quête de spiritualité, mais dans une exigence d'expérience numineuse immédiate, va vers les techniques qui amènent l'être à rompre avec la banalisation de sa vie pour entrer dans un état non ordinaire de conscience, subtilement plus nourricier de son ego que de sa personne, la plupart du temps, sans parler du risque de dérapage pathologique parfois !
De cet état de fait une déduction s'impose : le besoin absolu que manifeste l'Homme moderne d'aller vers "l'unique" qu'il est, chacun dans sa personne dont nul ne lui a appris vraiment à distinguer celle-ci de son premier moi-ego individualiste et paradoxalement grégaire, illusoirement unique.
L'humanité est dans une étape de croissance semblable à celle d'un adolescent qui, après avoir rejeté les béquilles parentales, cherche sa propre colonne vertébrale. Le monde parental dans son ensemble, n'ayant pas trouvé la sienne et n'ayant jusqu'ici même pas éprouvé le besoin de la chercher, n'a pu induire le chemin de cette rencontre essentielle chez son enfant ; celui-ci erre donc douloureusement dans un labyrinthe aux inextricables voies. Ses énergies ne pouvant plus s'investir selon les schémas passés se traduisent en violences meurtrières ou bien répondent comme des alouettes aux miroirs qui leur sont offerts pour cultiver le narcissisme du premier "moi". Les Églises, dont on peut se demander parfois si les hiérarques eux-mêmes vivent ce qu'ils enseignent, sont profondément responsables de cette errance. Les célébrations dévitalisées en Occident, vécues trop souvent de leur seule beauté extérieure en Orient, ne s'accordent au mieux dans les âmes qu'à la résonance d'un transcendant égaré au niveau communautèrement individualiste. Individualisme en chacun ou en chaque communauté, dont l'ensemble se vit en rapports de forces, il caractérise une dimension de l'humanité qui n'a pas encore atteint à la dimension d'Homme. Cette dernière est cependant celle-là seule à laquelle la Bible nous convoque. Si je prends la plume pour parler de ces choses, c'est dans l'espoir de révéler davantage le pouvoir osmotique de nos textes sacrés dont le premier et le second Testament, unis sans confusion, sont détenteurs. Leur sel dilué dans l'eau de notre inconscience doit devenir aujourd'hui, de toute urgence, agent de transmutation de l'individu vers la personne. Il est symbole de sagesse divine, structurante, inséparable de cette dynamique de vie restée palpitante mais encore endormie sur l'oreiller d'un éros interdit. Menacés de mort, osons éveiller l'éros !
Car c'est en amoureux épris de ces textes que nous irons vers eux ; tel le juif pieux accueillant le Shabbat comme une fiancée, allons vers la Bible qui n'ôtera ses voiles que sous la pression du désir et dans le secret du coeur. Car "(seul) l'amour est force capable de mutation". Que l'Esprit-Saint nous donne cette force. L'Esprit-Saint nous conduit alors â entendre le passage de l'individu à la personne comme étant celui d'un premier "moi" à l'identité réelle de l'être. Le livre de la Genèse décrit ce passage ; il est présidé par le Shabbat en lequel, par son "retrait", DieuElohim laisse place à son Image, celle du Verbe-YHWH qui fonde l'Homme dans sa Personne unique. Dans cette béance, le Shabbat détermine une dynamique interne irrépressible qui invite l'Homme à naître à lui-même depuis la situation de sixième jour où l'Adam (l'Homme) est créé mais encore totalement confondu avec sa Adamah (espace matriciel intérieur, riche en énergies potentielles polarisées autour de l'Image divine) à la situation de septième jour où, différencié de sa Adamah, il entre en résonance avec sa personne ; il peut alors intégrer les énergies dont le potentiel réalisé deviendra information et assumer la dynamique de l'image à la ressemblance, la croissance du Germe divin fondateur de sa personne. Dans ses naissances successives, l'Homme devient "âme vivante". La situation de sixième jour, celle du premier "moi", est confusionnelle ; l'Homme n'y est "âme vivante" qu'à travers l'âme-groupe de ses "animaux" intérieurs avec lesquels il est identifié. La situation de septième jour, celle de sa réelle identité, liée au processus de différenciation d'avec sa Adamah, que Dieu opère en lui, le fait devenir "âme vivante" personnelle. L'âme psychique devient peu à peu âme spirituelle. Dans cette même dialectique, le premier Testament identifie "les peuples", les Goïm, et en particulier les descendants de Lot (le voilé) ainsi que tous les "ennemis" d'Israël, à l'Homme du sixième jour, totalement inconscient (âme-groupe animale), et Israël lui-même, peuple de Dieu, à l'Homme du septième jour, devenu "âme vivante". Dans la dynamique de cette métaphore, "tous les peuples" sont le potentiel de l'humanité ; ils sont appelés à venir enrichir Israël ; les Goïm face à Israël forment respectivement le pôle ténèbre et le pôle lumière de l'humanité, dont ce dernier, intégrant les ténèbres, deviendra totale lumière.
C'est en ce sens que le prophète Zacharie annonce l'accomplissement de l'humanité ; il dit : "Ainsi parle le Seigneur - YHWH - des Armées. En ces jours-là, les hommes de toutes les langues des nations tiendront fermement, oui fermement, le pan du manteau d'un homme juif en disant : Nous irons avec vous car nous avons entendu que Dieu est avec vous".
De même le psalmiste parlant de Sion, la cité de Dieu : "On dira de Sion, tout homme y est né, c'est le Très-Haut qui l'a bâtie. Le Seigneur inscrira sur le registre des peuples : C'est là le lieu de leur naissance".
Car un homme, une nation, l'humanité tout entière ne peut être dit "né" que s'il est entré dans le souffle d'accomplissement du septième jour au coeur de sa Adamah, que la cité de Sion symbolise dans la géographie extérieure.
Il est aussi à noter que Zacharie désigne "les hommes de toutes les langues des nations" comme étant ceux qui sont appelés à entrer dans le peuple de Dieu, celui du Verbe : Les langues bavardent chez les individus - elles babillent en Babel -, le Verbe parle en la personne de l'Homme, en Sion Jérusalem.
L'humanité tout entière est appelée à devenir Verbe. Elle gémit aujourd'hui dans les douleurs d'une "naissance en Sion" qui sera passage du sixième au septième mois de sa grandiose gestation. Ce passage ne pourra s'accomplir que dans un face-à-face nuptial des Hébreux et des Goïm d'aujourd'hui. Aujourd'hui les Goïm sont l'humanité tout entière ; les Hébreux sont alors ceux qui, au milieu d'elle, vivent leurs traditions respectives dans leur commun message parce qu'étant allés vers les plus grandes profondeurs de leur personne, ils ont approché le secret universel de ce message. Les Evangiles nous conduisent avec d'autant plus de force vers le secret de ces choses, que nous en entendons la voix en résonance avec celle du premier Testament. Les Évangiles nous ont été transmis écrits en grec ; Jésus a sans doute parlé en araméen ; la langue de la synagogue, celle des textes sacrés, a toujours été l'hébreu. Il peut paraître audacieux, voire peu scientifique, que j'aie recours à l'hébreu pour entendre les paroles évangéliques. Je ne suis pas philologue et n'ai aucune prétention à en faire oeuvre. Je m'attache seulement à l'unique esprit qui préside aux discours divins, celui de YHWH dans le premier Testament, celui de Jésus dans le second, Jésus étant YHWH, "Je suis" : "avant qu'Abraham fût, Je suis", dit-il.
D'autre part cette démarche emboîte le pas à celle d'André Chouraqui dont la traduction des Évangiles en hébreu à partir du texte grec s'inspire - il l'a dit dans de nombreuses conférences - de l'indiscutable enracinement de Jésus dans le verbe biblique; auquel les paroles du Verbe font constamment référence. C'est donc à cet esprit du Verbe que je tente d'être fidèle en rapprochant dans ce même face-à-face nuptial les deux Testaments. L'esprit du Verbe est intimement lié à l'absence de voyelles de la langue hébraïque et à la personnalité vibrante des consonnes sur lesquelles les sons jouent librement à différentes octaves dont rend compte le Pardes. La trame de mon travail sera celle qui programme la vie de l'Homme depuis l'Image de Dieu en laquelle il est créé jusqu'à la Ressemblance en laquelle il est fait, façonné, sculpté tout au long de son chemin. Lorsque j'emploie le verbe "programmer", je fais référence à mon tout premier livre, Le Symbolisme du corps humain, où je mets en lumière les trois "matrices" dont est structuré le corps et qui sont chargées de porter l'Homme aux trois naissances essentielles qu'il a à vivre dans la grande dynamique de sa vie depuis l'Image jusqu'à la Ressemblance : matrice d'eau tout d'abord au niveau du ventre, matrice de feu au niveau de la poitrine, et enfin matrice du crâne dont la matière symbolisée par la moelle épinière est celle des "eaux d'en haut".
On ne nous a fait entendre l'existence de cette matrice de feu, la Géhenne, qu'en l'identifiant à l'enfer dont le feu éternel brûle les méchants pour leur plus grande punition alors que les bons qui en sont préservés sont récompensés dans le ciel. Cette simplification n'est plus de mise. La fresque grandiose que dessinent ces trois matrices est reconnue de toutes les traditions mais la mystique juive la met somptueusement en lumière dans la "forme" du corps divin qu'a vue Moïse ; cette fresque structure mon travail, car c'est avec une infinie discrétion que Jésus obéit à ces trois étapes de croissance du Fils de l'Homme.
Job sur le chemin de la lumière
- INTRODUCTION -
Aller vers Job, n'est-ce pas risquer d'ajouter un bavardage à celui de ses trois amis venus le visiter, auxquels on ne peut pourtant reprocher d'avoir manqué de compassion envers lui ?
... Approcher l'Homme de douleur hors du silence me semble relever d'une insolence aussi intolérable que celle que je ressentais (et que je devais cependant surmonter) lorsque je me penchais, pleine de santé, vers les malades que je soignais autrefois. ... Quelle impuissance devant la douleur ! C'est elle qui m'empoigne encore en abordant ce livre. ... J'y suis poussée par la demande de ceux avec qui j'ai partagé cette réflexion sur le livre de Job, et qui se sont même donné la peine de transcrire les cassettes enregistrées de cette étude. ... C'est aussi peut-être parce que je n'ai jamais été satisfaite de ce que j'ai lu sur ce sujet, tout en n'ignorant pas que ce livre-ci ne contentera personne ; il traite d'un mystère dont le voile que je soulève laisse apparaître un autre voile que quelqu'un à son tour écartera... jusqu'à ce que de proche en proche, nous entrions dans le secret. ... Mais, heureusement, le guide divin peut aussi nous donner accès à ce qui n'est pas encore le secret, et nous permettre de parler. Il transporte mon coeur et me fait m'écrier : "L'Homme est un tout possible divin !" ... Tout entier féminin devant son Dieu, qu'il soit homme ou femme, l'Homme est appelé par Lui et pour Lui à croître, afin d'atteindre à une dimension d'épouse. ... Le guide en nous est donc cette Semence de divin, cette Présence, JE SUIS - YHWH en hébreu - qui se révèle à nous comme à Moïse au "Buisson ardent", sous la forme inaccomplie de Son NOM : JE SERAI ou encore "Je suis en devenir d'être", mais avec l'exigence de le réaliser et d'atteindre à JE SUIS ! Lui nous fait connaître la Bible inscrite en nous, et dont nous ne savons pas que nous la contenons. Il s'adresse à nous comme à Job, en disant :
"Je t'interrogerai, tu m'instruiras... car tu connais... " ... Je me retrouve alors placée en Adam, à la source de moi-même, en amont de la Chute, dans cet espace sacré qui m'habite avant que le "mal" n'apparaisse. Je suis dans le jardin de la rencontre de tout homme aimé de Dieu avec son Dieu. ... La puissance créatrice de l'amour de YHWH, en moi conjuguée avec celle de Dieu Elohim, va transformer mes ténèbres en lumière, l'humide en sec l'inaccompli en accompli l'inconscience en conscience la multitude en unité... ... Ce Grand-Oeuvre ne pourra cependant se faire que dans l'expérience d'une rencontre du Fils en moi, avec l'Adversaire, le Satan de la Bible. ... L'Homme créé libre est maître du jeu. Notre liberté de choix, que nous appelons d'un mot inapproprié, "libre arbitre", est très limitée : on est en droit de se demander quel choix faire quand on ignore tout du jeu ! La connaissance de ce jeu a été donnée à Adam dès le départ. Le livre de la Genèse ne fait que nous rappeler ce que nous portons inscrit dans les profondeurs de nous-mêmes, en amont de la Chute. Notre liberté de choix s'analyse en fait en une liberté de connaissance ; celle-ci est ontologique... mais oubliée ! C'est en effet dans l'oubli que le drame de la Chute fait basculer l'ordre ontologique ; dans cet exil de nous-mêmes et de Dieu, l'Adversaire devient l'Ennemi ; et la douleur fait son entrée sur la scène du monde ; dans la douleur nous tentons de nous souvenir ; elle seule donne sens à la souffrance du "juste", de l'homme à qui la loi, dans la situation d'exil, a donné une colonne vertébrale, sans pour autant donner son axe au souffle de l'éros alors maintenu suspect dans les limites réductrices de la procréation.
Job est ce "juste" multiplié par la loi qui le fait juste ; mais Dieu l'accouchera à lui-même. ... Nul ne peut dire à quelle époque exacte le livre de Job a été écrit ; sans doute après l'exil du peuple hébreu à Babylone, dont la littérature aura peut-être inspiré les auteurs, ce qui veut dire autour du IV ème siècle avant notre ère. On ne peut communiquer avec le texte biblique dans la mesure où l'on assume l'exigence de son message : Moïse a dû retourner dans les ténèbres de l'Egypte après s'être différencié d'elles, pour y travailler, faire la pâque, et commencer de cheminer vers le Verbe de Dieu. ... L'histoire de Job est une grande histoire d'amour.
Cheminer avec l'Ange
Cet ouvrage majeur se décompose en trois parties : dans la première Annick de Souzenelle explique pourquoi elle a voulu s'attaquer à ce que qu'Henry Corbin appelait une « tâche démesurée » : l'angéologie. Elle décrypte donc tous les mythes faisant état de la présence de l'ange dans la tradition judéo-chrétienne et dans la vie d'Abraham, d'Ismaël, d'Isaac, de Jacob, de Moïse jusqu'aux visions du prophète d'Ezéchiel des Quatres Vivants sans oublier celles de Daniel et de Tobie ; puis sont analysés les mondes angéliques dans le Nouveau Testament et la vie de Jésus. Cette partie se termine sur une profonde méditation consacrée à l'ange gardien. Dans la seconde partie, Pierre-Yves Albrecht nous invite à étudier avec lui les philosophes de la Grèce Antique, les néo-platoniciens ainsi que les zoroastriens de la Perse jusqu'aux mystiques de l'islam soufi : il met en valeur la forte tradition angélique de ces courants et l'explique. Enfin dans la troisième partie un dialogue réunit les deux auteurs autour de leurs expériences intimes et explicite leur intérêt pour le symbolisme de l'ange vécu dans le monde de l'imaginal, qui est comme un reflet métaphysique de notre réalité et éclaire notre aventure humaine.
Sollicité en 1977 par les organisateurs d’un colloque portant sur l’angélologie, Henry Corbin, philosophe spécialiste de l’Islam soufi, avoua « se sentir coupable d’avoir proposé pour thème la nécessité de l’angélologie, tant la tâche est démesurée ! » Que dirais-je de mon audace à soulever un voile sur ce thème ? Bien que consciente de mes limites, je ne me sens cependant pas coupable de poursuivre l’effort de mes aînés à tenter de pénétrer le monde des anges tant occulté par notre tradition occidentale qui s’anémie graduellement de son absence ! Or, je ne peux, ni ne veux, la laisser mourir tant elle m’émerveille dans son souffle universel et prophétique relié à celui de l’ange, mais en effet, la tâche est démesurée ! Henry Corbin vivait ce qu'il disait, et c'est parce que je vis ces choses que j'ose les dire. Pierre-Yves Albrecht qui m'accompagne en ce livre, philosophe et docteur en ethnologie, possède la science d’un Corbin, mais est surtout lancé dans une expérience fondamentale dont je parlerai plus loin. Le monde des anges m'a visitée dès mon enfance et je ne peux en dire que ce que je connais de sa grandeur redoutable et de son infinie tendresse. Je m'appuie sur les textes bibliques. Or, qu'ils soient mythiques ou historiques, de ces textes s'élève le chant de la grande aventure humaine, celle de l'intériorité de l'Homme, de l'Adam pour la Bible, celle qui conduit ce dernier à aller vers la totalité de lui-même : « Lek Leka », « Va vers toi », dit le Seigneur à Abram (Genèse 12,1), l'invitant à quitter l'enfantillage des valeurs de l'exil pour se retourner vers l'orient de lui-même et y atteindre, en traversant un « réel voilé », la «terre promise ». Et c'est ce « réel voilé », caché derrière la coque des choses, derrière la « pelure » de nos âmes, ces « cieux » au-dedans de nous, que notre « terre» observable occulte. Ce réel de nos « cieux » intérieur est celui de l'ange. Il est aussi celui du féminin de tout être, lourd d'informations scellées au-dedans de lui-même. Henry Corbin le nomme le monde de l'imaginal, entendant par là celui qui s'échelonne dans une intensité de lumière de plus en plus grande, lorsque l'on va vers lui, au-dedans du cosmos qui est aussi en nous, dans le déploiement d'une verticalisation admirable ; l'imaginaire en est sa projection sur l'horizontalité de notre champ d'expérience immédiate, en terre d'exil. Ce champ de l'exil si restreint, tragiquement privé de la respiration qui pourrait l'unir à l'imaginal et en recevoir le sens est, à lui seul, absurde et source de souffrances ; il est celui de l'exil que le Dieu d'Abram. invite le patriarche fondateur d'Israël, à quitter. Il est celui que l'humanité tout entière est aujourd'hui invitée à quitter. Ce livre voudrait se faire l'écho d'un « va vers toi » cosmique, entendu de ceux « qui ont des oreilles pour entendre » (Marc 4, 28). Je n'insiste pas sur la présentation de la première partie de cet ouvrage. Le lecteur occidental n'est pas étranger aux textes bibliques qui chantent l'œuvre théophanique des messagers de Dieu, œuvre merveilleuse, innombrable dans laquelle je puise pour en glaner ce qui me semble être essentiel. J'entends par « essentiel » ce qui nous reconduit, sur les ailes de l'ange, à notre identité perdue, c'est-à-dire à une anthropologie qui retrouve son âme, sa dynamique de conquête divine, dans la traversée des voiles de l'imaginal.
Cependant, aller vers l'imaginal, c'est aussi être à l'écoute d'autres textes fondateurs de l'angéologie. Et c'est pourquoi Pierre-Yves Albrecht nous invite à étudier les philosophes de la Grèce antique et les néo-platoniciens dont aucun n'a ignoré les Védas, pas plus que l'Avesta de la Perse antique, autrement dit, ces traditions essentiellement angéliques. Celles-ci ont trouvé l'acmé de leur expression dans l'Islam soufi dont Pierre-Yves nous livre aussi la richesse ; il vit avec bonheur cette tradition soufie qui, complétée par sa formation universitaire, a fait de lui le thérapeute de nombreux jeunes détruits par le non-sens de notre modernité. Cherchant une ivresse à vivre dans un ailleurs, mais ignorant bien sûr l'aventure d'une escalade de l'imaginal, ces jeunes mènent leur quête dans les cieux fallacieux de la drogue, du sexe et de l'alcool ; c'est alors dans la dégringolade de l'échelle démoniaque qu'ils sombrent. Et c'est là que Pierre-Yves va les chercher, travaillant sur leur noblesse bafouée mais rarement éteinte, car c'est de tissu divin qu'elle est constituée. Redresser l'échelle angélique en ces êtres puissamment abîmés est donc l'œuvre, le grand'œuvre, oseraisje dire, de cet orfèvre des âmes ; il est plus autorisé que beaucoup d'entre nous à parler de ces mondes angéliques avec lesquels il vit et de ceux souvent démoniaques qu'il combat. Pierre-Yves Albrecht est l'auteur de la deuxième partie de cet ouvrage. En l'abordant, le lecteur sera peut-être dérouté. Le style en est très différent : il reprend le langage des dieux, cher aux philosophes grecs. Or, ce langage, celui de l'Olympe, est teinté de mille couleurs allant de la plus pure lumière au plus sombre des enfers ; il est construit de ce multiple apparemment bien étranger à la langue UNE, divine, enfouie dans la profondeur des textes bibliques et révélée par leur sobriété. Chaque lettre hébraïque reconduit le lecteur au Verbe divin par la fonction symbolique qu'assurent les mondes angéliques ; ces mondes sont des transformateurs d'énergies qui vont et viennent du ciel à la terre et de la terre au ciel ; ils invitent le lecteur à conquérir une dimension royale pour entendre le Verbe divin qui se cache derrière l'écrit. Alors que, du côté de l'Olympe, les dieux grecs usent de mille ruses pour distraire leurs adorateurs en les menant dans les méandres rocambolesques de leurs demeures où ils se perdent, ne permettant qu'au véritable amoureux, quêteur de sens, de se laisser saisir par l'ange guide et gardien des lieux. Prenons l'exemple d'une information capitale, exprimée par l'une et l'autre de ces traditions, celle qui nous révèle la présence en l'Homme de deux identités qu'il est appelé à conquérir successivement en ce monde, l'une d'ordre animal, l'autre d'essence divine La Genèse biblique en rend compte par le passage du sixième au septième jour de l'œuvre créatrice ; elle se vérifie au niveau de notre réalité immédiate dans l’histoire de la gestation de tout fœtus humain : au sixième mois de la vie intra-utérine, l'enfant est anatomiquement et physiologiquement achevé ; son être animal est construit ; à la limite, il peut naître viable. Mais dans les trois derniers mois de sa vie fœtale il reçoit de son noyau fondateur l'information concernant son origine et son devenir divins ; cette information présente en filigrane pendant les six premiers mois du tissage corporel, devient alors le fil d'or du travail des trois derniers mois.
De leur côté, les mythes grecs nous racontent par exemple, avec saveur, les amours de Zeus, dieu du ciel, avec Sémélé - la lune. De cette union est conçu dans le ventre de Sémélé, celui qui naîtra sous le nom de Dionysos. Mais Héra, épouse de Zeus apprend la trahison de son Seigneur et, folle de jalousie, ordonne le meurtre de Sémélé. Enceinte de six mois, Sémélé meurt. A ce moment précis, Hermès, messager des dieux, vient arracher l'enfant à sa matrice lunaire pour le déposer dans la matrice solaire, la cuisse de Zeus, qui assurera les trois derniers mois de la gestation de l'enfant. Ces deux étapes physiologiquement décrites dans la vie intra-utérine de tout fœtus préludent d'une façon très significative à l'acquisition de l'identité divine de tout être qui, au cours de sa vie, se cherche au-delà de sa filiation parentale et de son identification au collectif. Pour exprimer cette même loi, le mythe biblique déclinant l'identité des cinq premiers descendants de l'Adam par Qaïn le tueur, introduit soudain dans le nom du cinquième, Mehouyaël « celui qui oublie Dieu », la petite lettre Yod, lorsqu'il est nommé pour engendrer son fils, le sixième descendant ; à cette étape son nom devient alors Mehiyaël « celui qui donne la vie divine », la lettre Yod ramassant en elle seule la totalité du Saint Nom, celle du Seigneur Yod-Hé-Waw-Hé. Le septième descendant se retourne en lui-même et prend le départ de sa conquête divine. Dans ce sobre discours biblique, la simple introduction de la lettre Yod dans le nom de l'Homme, en dit tout autant que le plus merveilleux roman des mythes grecs. On trouvera cette même sobriété plus tard dans les Évangiles. Jean-Baptiste vivait le sixième mois de sa vie intra-utérine lorsqu'il reçut la visite de son Seigneur alors présent dans le ventre de Marie ; il bondit, nous dit le texte, dans le sein d'Elisabeth, d'un bond de reconnaissance de celui qui est aussi sa propre semence. De même, la lettre Shin présente au cœur du premier mot de la Genèse « Bereshit », met-elle à feu, dès son « principe » la création tout entière ; elle est l'Amour. Son idéogramme primitif est le dessin d'une flèche saisie par un arc tendu à l'extrême, prêt à lâcher sa prise, celle qui, dans la traversée des mondes angéliques, donnera ivresse à l'Homme et le conduira jusqu'à la cible divine. Chez les Grecs, la belle histoire de la naissance d'Éros nous est contée par Pierre-Yves Albrecht lorsqu'il nous convie au Banquet de Platon, nous faisant compagnons du dieu, « qui est un ange, avec ceux des anges qui inclinent l'âme humaine vers l'opaque, mais aussi avec ceux qui l'invitent au plus subtil et à la contemplation ». Il nous promène chez les néo-platoniciens qui, soucieux de remonter à la source de l'être, sont aidés de l’ange Éros, « celui qui nous parvient du Dieu suprême, et sans lequel le délire mystérique se réduit alors aux superstitions des croyances et de la religion ». Mais c'est Avicenne, philosophe du Xe siècle, médecin des corps et des âmes, qui retient au premier chef son attention. Animé du même souci que les anciens, Avicenne propose à son disciple de « libérer son âme de l'occident de la matière et de la reconduire à son orient ». Il l'accompagne dans ses passages « de l'épais au subtil, de l'apparent au caché » dans des
dévoilements successifs qui sont revêtement de l'ange ; son langage est celui de l'herméneute que n'hésiteront pas à employer plus tard d'autres médecins de l'âme tel Paracelse pour qui l'Alchimie « participe à l'épiphanie de la nature, séparant l'inutile de l'utile et conduisant l'utile à son essence dernière ». Je pense aussi à Carl-Gustav Jung et à son œuvre remarquable Psychologie et Alchimie ; sans compter Mircea Eliade avec Forgerons et Alchimistes, ou encore Gaston Bachelard La psychanalyse du feu et bien sûr Henry Corbin lui-même et son: Alchimie et Archétype. Et l'on ne peut être que profondément touché par le poète, Rilke, qui, se voulant « âprement vrai » devant son Seigneur lui fait cette prière « Voici les métaux dont je suis fait... il s'agit d'obtenir l'alliage voulu pour la cloche que tu tireras de moi [...]. Persuade-moi, Seigneur, qu'une affinité sacrée lie ces métaux [...] et que leur alliage peut vibrer au plus haut de tes beaux ciels, sans choisir entre oiseaux et anges ». Balayant toutes les époques et tous les pays, de la Chine à l'Occident, ce langage alchimique a chanté le chemin des transformations de l'Homme jusqu'à l'obtention de l'or, son corps de gloire, celui de l'ange. Au cours de ce « balayage », le zoroastrisme mazdéen de l'ancienne Perse, nous dit Pierre-Yves Albrecht, fut l'un des premiers à apporter sa richesse à la mystique de l'ange sous le langage des « sept métaux rassemblés pour restaurer l'or pur du héros mazdéen ». Malgré la grande différence d'écriture entre les deux premières parties de ce livre, l'ange conduira le lecteur occidental à entendre l'écho dans lequel elles conversent ; il découvrira par exemple les « daïmons » des philosophes et les « Haïot », les « Vivants » qui peuplent l'âme humaine chez les Hébreux, s'entendre pour devenir anges ou démons selon que l'Homme les sublime ou se prostitue à eux, dans chacune des Traditions. Il ne pourra qu'être frappé par la ressemblance des noms des trois énergies archétypielles, Jouissance-Possession-Puissance, qui fondent le Saint Nom de la Bible et qu'ont sublimées après leur avoir tordu le cou les trois mages venus visiter l'Enfant de la crèche, avec « les trois lascars », Fausse Imagination-Concupiscence et Irascibilité, qu'Avicenne, par le biais du héros de son récit initiatique et, guidé par son maître, conduit vers le pays du « Non où » vers l'ange. Le lecteur découvrira bien d'autres résonances, au-delà des différences que le christianisme tout particulièrement éclaire, cette Tradition mettant l'accent sur la distinction qu'il convient de faire entre les mondes angéliques et les Personnes de la divine Trinité ; l'archange Gabriel ne pouvant être confondu avec l'Esprit Saint, par exemple. Cela ne veut pas dire que nous ayons à craindre le blasphème en répondant à l'invitation que nous fait Pierre-Yves, de participer au banquet des dieux. Un troisième volet de ce livre nous réunit, Pierre-Yves Albrecht et moi, dans un dialogue plus intime, un échange qui touche à la confidence sur nos expériences respectives de vie en communion avec les mondes angéliques Un saint soufi, voyant apparaitre deux anges, leur demande : « Mais qui êtes-vous ? »
Il répondirent : « Nous sommes les deux larmes que tu as versées hier en priant ». Les Anges n’ont en soi strictement rien à voir avec l’image mièvre et doucereuse des petits chérubins potelés qui encombrent les étalages des magasins et qui ornent coussins, nappes, tapisseries et autres bibelots. Il est bien malheureux que l’Occident moderne n’ait retenu d’eux que cette guimauve puérile et infantilisante pour esprits crédules en mal d’icônes réconfortantes. C’est la Perse ancienne la première (mazdéisme ou zoroastrisme), puis le Soufisme et le néoplatonisme avec Plotin et Denys l’Aréopagite, qui témoignent de cette présence que l’on retrouve dans les trois religions du Livre. Sans parler du daïmon du grand Socrate qui en quelque sorte en est la préfiguration philosophique. Les Anges sont à l’évidence des créatures célestes, des manifestations du divin qui permettent à Dieu de communiquer avec les Hommes, incarnés de manière tangible et palpable dans une corporéité plus réelle encore que ce « réel » auquel nos sens nous donnent quotidiennement et imparfaitement accès. Ce sont à la fois des compagnons, voire des accompagnants, en ce sens qu’ils protègent les humains, non pas tant de se faire renverser par une voiture en traversant la rue que d’eux-mêmes … Certes messagers privilégiés de la parole divine (dans l’Ancien et le Nouveau Testament), mais leur principale fonction est aussi d’être les révélateurs du divin que chacun porte à l’intérieur de soi. Oui, les Anges ouvrent la porte du Soi, pour peu que nous trouvions la clé déposée au seuil de l’Être. Il y a chez les Anges un paradoxe propre à leur nature, puisqu’ils nous habitent de la même manière qu’ils habitent une réalité extérieure. Voilà qui est pour nous très difficile à comprendre car nous concevons l’intérieur et l’extérieur en termes de dualité, or les Anges échappent bel et bien à cette perception. Il sont la manifestation de la présence divine, à la fois immanente et transcendante, comparables d’une certaine manière à des transformateurs électriques : ils nous apportent la lumière divine autant que nous pouvons le supporter et à la mesure de notre progression dans les différents niveaux de conscience. Ils participent ainsi de la relation à l’Être intérieur, ce qui explique leurs ailes, représentation iconographique, artistique mais surtout symbolique faisant d’elles (d’ailes !) des extrapolations des poumons, figurant de la sorte les espaces intérieurs que l’on peut conquérir en soi. La Bible fait état d’une hiérarchie angélique bien précise que l’on retrouve sublimement décrite chez Dante dans Le Paradis, soit trois groupes composés chacun de trois catégories : les Chérubins, les Séraphins, et les Trônes constituent le groupe le plus proche de Dieu ; puis viennent les Puissances, les Vertus et les Dominations ; et enfin les Anges, les Archanges et les Principautés. Chaque catégorie est liée à une fonction, mais surtout, chacun d’entre-nous serait lié à un Ange (le fameux Ange-gardien), qui nous appelle à devenir ce Nom qui dort en nous et qui procède du Saint-Nom YHWH dont l’Ange est le gardien.
Il y a chez les Anges une notion de royauté, qui les lie intimement à l’Épée, autrement dit au Saint Nom YHWH, le fruit même de l’Arbre de la Connaissance qu’ils défendent et protègent. Ils s’avèrent être des combattants terriblement puissants et implacables dans cette mission, à l’instar de Gabriel, l’Ange de feu et de lumière, qui de son glaive défend l’entrée du Jardin d’Éden, d’où Adam, (et non pas Ève, mais son Isha, en hébreu, à savoir son féminin intérieur) a été chassé. Cet épisode de la Genèse est celui de l’exil à soi-même : nous sommes tous et toutes cet Adam coupé de son Ishah. Considérons alors ce Jardin d’Éden comme le jardin de jouissance, c’est-à-dire de la Rencontre et de l’Union. Alors, tout le parcours de l’homme sur terre est celui de ce retour au Soi, de cette reconnexion à l’Ishah : il nous incombe d’accomplir ce chemin qui doit nous mener de la périphérie au centre de nous-mêmes. D’ailleurs, tous les mythes d’enlèvements (les Sabines chez les Romains, Eurydice et Perséphone chez les Grecs …) relèvent du même thème de la coupure du féminin. Et nous voilà par conséquent coupés du monde angélique. C’est pourquoi, si un Chérubin armé d’une épée garde l’entrée du Jardin d’Éden côté ciel pour nous protéger de la brûlure de la lumière divine que nous ne saurions supporter, il nous appartient d’y retourner du côté terre : nous avons à y entrer ici et maintenant. L’Ange est donc bien loin de cette créature inoffensive : dans la Bible (l’Ancien Testament notamment) il est à plusieurs reprise l’Ange exterminateur : celui qui fait mourir ce qui doit renaitre à un niveau supérieur. Car toute énergie non transformée en lumière se retourne en violence contre soi-même et contre les autres. C’est exactement ce qu’exprime Tempérance dans son mal-vécu : la destruction de soi ou la guérison, celle qui permet la circulation de ces énergies en fluidité
Le monde dans lequel nous vivons est devenu " une chose " que nous consommons, où la dimension subtile de notre existence est douloureusement absente. Pourtant, l'appel de l'Ange est là, comme un autre réel caché derrière le voile de notre existence. Par cette relecture inouïe des Écritures, par cette rencontre avec la figure de l'Ange, nous voilà conviés à notre tour sur ce même chemin initiatique. Il s'agit de s'abandonner dans la confiance et de plonger dans nos profondeurs, passant du " dehors " au " dedans ", de l'inaccompli à l'accompli, du grossier au subtil, pour enfin nous élever et atteindre la plénitude de notre être. Annick de Souzenelle et Pierre Yves Albrecht nous révèlent la profondeur secrète des textes sacrés et des grands courants spirituels, de la Grèce antique au judéo-christianisme en passant par les védas hindous, l'islam soufi et bien d'autres traditions. De toutes ressortent la même essence, les mêmes structures alchimiques qui appellent l'homme à se transformer vers la dimension la plus haute de son âme. Qu'il s'agisse d'une vision, d'une voix, d'un compagnon ou d'un adversaire, les Anges apparaissent aux prophètes et héros mythiques ainsi qu'à nous-mêmes comme des signaux, des guides qui exaltent l'âme humaine et l'incitent à déployer ses ailes vers la beauté et la sagesse, à rejoindre sa source unitaire.
Ce livre est écrit conjointement par A. de Souzenelle et P-Y Albrecht. Quelques extraits :
A.deS. - Les anges sont des énergies divines créées. (p.19)
... Enfermés dans la certitude que seule a vie ce que nos sens appréhendent du réel immédiat, nos contemporains tiennent pour infantile imagination ce que nos aïeux ont vu et nous ont rapporté; ce que certains, aujourd’hui encore, voient et n’osent plus dire. Or l’expérience vécue de tous ceux-là est celle du «mundus imaginalis», selon l’expression
d’Henry Corbin : le «monde imaginal» qui est un réel caché derrière le voile de notre exil et dont l’imaginaire est l’expression dramatiquement dégradée. (p.20)
...Chacun de nous est l’actualisation d’états qui n’étaient que virtuels avant notre naissance et qui continueront d’exister après notre mort. (p. 23)
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P-Y A. - Tout homme est appelé à grandir vers son «Ange» par une sorte d’alchimie spirituelle visant en quelque sorte à une angelomorphose. La transmutation progressive de l’homme en son ange, en sa nature parfaite, en son seigneur ou en son Soi, fait référence à l’adage de haute sagesse qui invite à «se connaître soi-même», ainsi que l’univers et les dieux. (p.142)
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A.deS. - ... seul le véritable amour, l’Eros total, peut percer ces murs et pénétrer l’imaginal. Seul le désir donne des ailes, et même s’il nous fait marcher sur le fil du rasoir, il nous fait participer de l’ange. (p.266)
P-Y.A. - Tu poses d’emblée la question entre l’amour et l’Ange ; et plus précisément entre amour divin et amour humain. Je pense que les deux sont les faces d’un même amour, celui que tu appelles l’Eros total. Passer de l’un à l’autre n’implique pas que l’on doive substituer à une réalité humaine, une réalité angélique, mais plutôt que l’on soit capable de
provoquer une métamorphose du regard aimant et du mode même de notre amour. (...) Car il nous faut bien partir de là où nous nous trouvons ! (...) As-tu lu les Dialogues avec l’Ange ? (p.266)
A.de S. - Oui (...) J’ai également rencontré Gitta Mallaz que je suis allée voir pour lui dire ma reconnaissance. (p. 267)
Le nom hébreu de l'ange, Mel'ak "plénitude de toi"... ... Ô homme en exil qui ne connait que la surface de ton être, semble dire l'ange, va vers toi, vers toi, outre du vin céleste que tu ne sais boire; apprends à t'enivrer de la royauté que je suis chargé de te transmettre. ... Dieu se multiplie, dit Maxime le Confesseur, mais un que multiplie un, que multiplie un, fait toujours UN. ... Les anges, nous l'avons vu, sont des êtres créés et, comme toute l'oeuvre divine, nous dit le texte des Macchabés (II, Macchabés 7, 28), "créés de Rien", Me'Ayin. Ce mot hébreu est aussi une question:"venant d'où?". Elle est celle qu'emploie Job lorsqu'il se demande avec angoisse: "Mais d'où vient la sagesse? D'où vient l’intelligence?" (Job 28, 12 et 20) De même pouvons-nous nous interroger: d'où vient le créé? Me'Ayin Bri'ah? La réponse est contenue dans la question; elle est lapidaire: "de Rien"!
L'étymologie latine du mot français "rien" est Res, soit une "chose". Quelle est donc cette "chose" pouvant rendre compte de ce "rien" qui est proprement inimaginable? Peutêtre parce que non observable? C'est ce que vient nous confirmer la Tradition mystique juive lorsqu'elle nous dit que ce "Rien", 'Ayin, est le tout premier NOM divin révélé à la limite du Tsim-Tsoum (de la racine Tasm'on "avoir soif") qui est une aspiration divine extrême allant jusqu'à l'évidement totale de l'Incréé pour créer. Dieu se fait "Rien" pour poser l'"autre" qui est autre et qui cependant ne peut être autre que lui! Cet évidement se retrouve dans le mot grec Kenosis qu'emploie la Tradition chrétienne pour parler de ce même mystère. A la lumière, ce "Rien" d'où tout se crée se présente comme étant l'Incréé vidé de lui-même, soit le vide de Dieu.
L'ange
Lire Cheminer avec l'ange de Annick de Souzenelle (écrit en collaboration avec Pierre-Yves Albrecht) me ramène à l'ange. L'ange n'est pas une croyance, c'est un effleurement. Aucune importance d'y croire ou non. L'ange ne s'attache pas à nos croyances. Il s'attache à accomplir sa tâche, soumis et libre à la fois...
L'éveil n'a ni début ni fin. Mais dans ce brouillard de l'"avant", cette période qui précède ou prépare la combustion spontanée, je me souviens d'une femme qui m'avait reçue chez elle. Elle n'était ni voyante, ni médium, peut-être guérisseuse, je ne saurais dire. Elle recevait les gens par le bouche à oreille. Et j'ai atterri sur son canapé comme en psychanalyse avec au fond de moi l'impression d'avoir touché le fond. Qu'avais-je besoin de guérir? Peut-on guérir de la vie? Comment la vie peut-elle être une maladie? Chaque jour, vivre dans un brouillard dense, en décalé, avec le crâne pris dans un bourdonnement incessant et confus de pensées... Avant d'entamer la séance, la guérisseuse (nommons-la ainsi) me déclara qu'elle commençait
toujours par une prière silencieuse à l'archange Michaël. Je lui demanda alors - farcie que j'étais de lectures Nouvel Age...- si elle communiquait avec lui, si elle le canalisait ou quelque chose de ce genre...Elle me répéta qu'elle se contentait de penser silencieusement à l'archange face au petit autel orné d'images catholiques qui lui était consacré dans un coin de la pièce. Il n'y avait rien de folklorique ou étrange chez cette femme. La pièce était très modestement meublée, très neutre. Je me souviens l'avoir trouvée un peu simple...
Puis la séance a commencé. Cela fait sept ans maintenant. Ses questions étaient précises, concrètes et y répondre me faisait mal comme si je vivais ma vie de loin , que je ne voulais pas réellement la vivre. Je pleurais beaucoup et mes entrailles tremblaient comme si je lâchais quelque chose depuis longtemps retenu. En même temps, une partie de moi raillait l'absurde de la situation. La guérisseuse avait des yeux perçants, verts qui m'effrayaient. Ils semblaient regarder en moi jusqu'à l'os; cela me mettait mal à l'aise car j'avais beaucoup de choses à cacher. A me cacher.
Avant de la quitter, la femme a plongé son regard dans le mien et a déclaré d'une voix appuyée: "tu es comme moi, tu ne le sais pas encore mais tu es comme moi." Je me suis pressée de partir heureuse de pouvoir échapper à ces yeux verts...inhumains. Je ne l'ai jamais revue. Mais l'ange m'a suivie. Aujourd'hui, je sais que ce regard, cette sensation d'être transpercée, mise à jour, était une rencontre avec l'ange. Tous les jours des signes évidents de sa présence. Une chanson quand on allume la radio, le nom d'une église, une multitude de choses inextricablement liées à l'ange.
L'avez-vous déjà vu en train de terrasser le dragon, le Satan, l'adversaire? C'est exactement cela qu'il préparait pour moi. L'éveil s'est produit une nuit, au coeur de l'enfer. Je devais affronter le dragon. Et il était redoutable.
Tant d'années à le fuir, l'avait rendu bien féroce. J'ai frôlé la mort. Mais l'ange est intervenu afin que seul l'essentiel survive en moi... J'ai plongé dans le vide total de l'être, là où il n'y a aucun refuge contre soi. Dans cette nuit intérieure que certains mystiques reconnaissent comme le nuage de l'inconnaissance parce qu'il se trouve audelà de tout, au-delà même de toute idée de Dieu. Le Nul part, le Rien des physiciens... L'ange m'y a poussée, habilement. Il a joué subtilement afin que je me dépouille de toutes ma carapace d'illusions. Je ne sais pas pourquoi. Mais je me souviens de sa phrase qui reste gravée en moi jusqu'à présent, et de ce regard vert, un regard de dragon:
"Tu es comme moi, tu ne le sais pas encore mais tu es comme moi." Selon une Tradition mystique très ancienne, au mont Moriah, au moment où Abraham allait porter sur Isaac le couteau du sacrifice, l'enfant eut une
vision dans laquelle son âme vit le Saint, Béni SoitIl, et les demeures de la Merkabah, les demeures du Trône divin. Totalement ligoté dans son obéissance et sans doute terrorisé, ISaac fut précipité au fond de l'abîme, au coeur du "vide" de son être où est "scellée Bassar, la chair", son Bereshit!
A. de Souzenelle
"Je suis dans une forêt immense (j'ai envie de dire une forêt symbolique). Je marche sur un chemin en forme de Tau égyptien. Je regarde la cime des arbres (des grands hêtres...êtres?)et soudain le corps d'un petit oiseaux mort tombe sur le sol. Puis un deuxième. Je suis figée d'horreur et je pense à ces pluies d'oiseaux morts qui ne présagent rien de bon. L'un des oiseaux est un Rouge-Gorge."
Dans cette dynamique, l'attitude incestuelle, voire incestueuse de la
mère, noie l'enfant; celle du père le brûle. La puberté qui ne connaît pas ce juste rapport eau-feu chez le jeune homme ou la jeune fille s'éparpille à l'horizontal dans le seul feu animal de la sexualité qui, si je puis dire s'épuise dans l'eau. On peut lire au Livre de Samuel un texte éclairant tout particulièrement ce sujet: les Philistins sont alors vainqueurs des Hébreux et emportent chez eux, à Ashdod, l'Arche d'Alliance qui contient les textes sacrés de la Torah. Et voici que les habitants d'Ashdod sont atteints d'hémorroïdes sanglantes et meurent. L'Arche est alors transportée à Gath dont les habitants à leur tour vivent la même épreuve; mais Ekron, la troisième ville sollicitée pour abriter la responsable, pousse des cris de fureur et renvoie l'Arche chez les Hébreux. 'Epholim, le nom hébreu des "hémorroïdes", est fait de l'enlacement des verbes 'aloh, "monter" , et naphol, "tomber". On peut y voir aussi un oiseau qui tente de s'envoler puis tombe.
Cela veut dire que l'Arche, sanctuaire du Verbe de Dieu, présente dans la monde des Philistins, est une haute énergie qui suscite chez l'Homme, et exige de lui dans son intériorité, une "montée de sève"; or, chez l'"ennemi", entendons "l'inaccompli" du peuple saint, cette montée ne peut se faire. La "sève montante" de l'Arbre humain, ne trouvant pas d'issue, "retombe" en boursouflures mortelles.
L'initiation - A.de Souzenelle et Pierre-Yves Albrecht ...Si nous nous penchons sur un mythe, le mythe biblique de Noé par exemple, il nous donne à voir que l'humanité, le collectif en situation d'exil, se débat et se noie dans ce que symbolise le Déluge - inconscience, violences, destructions, tragédies..., qui stérilisent la Semence et mènent l'Homme à la mort. Au coeur de ce drame, le patriarche Noé, homme juste, entend la voix divine et s'extrait du Déluge, que nous verrons être pour lui "matrice d'eau" et non plus tombeau, afin de construire son "arche", la Tébah en hébreu; proche du nom de Thèbes, ville sainte chez les Grecs, la Tébah est le nouvel espace intérieur du patriarche, qui sera pour lui "matrice de feu"; en elle il s'accomplira et deviendra le fruit promis de sa Semence, le fruit de l'Arbre de la Connaissance. Ce fruit, symbolisé en ce mythe par celui de la vigne, fait de Noé un homme ivre et nu: ivresse, jubilation de la connaissance acquise par le travail accompli dans l'arche; et nudité, dépouillement des savoirs que le monde lui a fait revêtir.
Il s'avance alors vers sa "tente", 'Ohel en hébreu, où il rencontrera son 'Elohim - sans doute symbolise-t-elle une ultime matrice, celle du crâne. La dynamique de croissance de la Semence implique la présence de ces trois matrices en notre corps... A.de Souzenelle - Le baiser de Dieu
Dans la bouche, la langue image de l'Epée, symbolise l'Oeuvre au Rouge. Dans la tradition chrétienne, ce sont des langues de feu descendant du Ciel le jour de Pentecôte, qui embrasent les apôtres et les amènent à cette expérience. Qu'il s'agisse de ces langues de feu, ou du char de feu qui va arracher Elie de terre, ou de l'ivresse spirituelle de Noé, l'Oeuvre au Rouge est vécu dans le feu, non plus destructeur, mais libérateur, dont le couleur rouge est le symbole.
La Pentecôte (50 jour) - NDR: le même nombre que la lettre noun citée dans les articles précédents - chrétienne ou "Pâque rouge" se greffe sur la fête juive de Shavouoth (7 semaines=49 jours) ou "Fête des moissons". Les blés et les orges ont alors mûri et donnent leurs fruits. Ils sont symboles du fruit de l'Homme, le Verbe.
A.de Souzenelle- le symbolisme du corps humain
Interroger les mystères
Mosa, fillette de la tribu Mohave -Edward Curtis
Le regard de cette petite fille (qui ressemble beaucoup à ma fille...) semble interroger les mystères de ce Féminin que l'être humain a relégué au royaume des ombres. Elle pourrait être la pure Vassilissa cheminant dans la forêt profonde, à la recherche du feu perdu par des générations de femmes et d'hommes réduits en cendre (ou en Cendrillon...). Je lis une immense tristesse dans ce regard; elle regarde certainement celui qui la photographie. Elle semble parfaitement comprendre qu'il la considère comme un animal en voie de disparition dont on garde un trophée... J'ai été d'abord frappée par la beauté des clichés d'Edward Curtis puis j'ai lu sa biographie et mon enthousiasme est retombé:
"En fait, il ne s’intéressa guère à ceux qui présentaient des signes trop évidents d’acculturation ; il exigeait de ses modèles une certaine pureté des mœurs. Son projet était soutenu par le grand industriel, financier et philanthrope newyorkais John Pierpont Morgan et par le président Theodore Roosevelt, pour qui il entendait enregistrer « tous les aspects de la vie dans toutes les tribus demeurées à un stade primitif » afin d'immortaliser ce qui pouvait être sauvé de ces cultures sur le point de disparaître, dans leur forme originelle." "(wikipedia)
Il est étrange de voir à quel point ceux qui ont perpétré le génocide des cultures amérindiennes ont éprouvé le besoin de collecter autant d'informations sur eux...Il faut bien comprendre pour séparer ceci de cela que ceux qui ont fondé notre monde dit "civilisé", établissant la raison cartésienne, humaniste et le matérialisme audessus de toute valeur, n'ont jamais en réalité partagé cette vision réservée aux masses incultes pour les rendre manipulables à souhait (en les coupant de leur nature véritable). Nos maîtres fondateurs (et leurs successeurs) au contraire, extrêmement superstitieux, ont toujours secrètement rêvé à l'instar de la marâtre du conte, de dérober le feu sacré à Baba Yaga. Ne pouvant y aller eux-même n'ayant pas le coeur pur leur permettant de bien répondre aux questions-piège de la redoutable sorcière - ils utilisent des moyens détournés, sacrifiant ce que l'humanité a de plus beau.
Source Tout le monde interroge les mystères. Mais tout le monde n'a pas les mêmes intentions. Tout comme Vassilissa, on se pose des questions; des questions qui nous brûlent la langue ou qui nous brûlent tout court, en particulier dans des moments critiques de notre vie, quand décidément, malgré le système bien huilé qu'on veut nous vendre, tout va mal. De façon très ironique, la formule "gagner sa vie" est une réalité en ce monde. Être vivant, réellement, je veux dire, de façon authentique et complète, ne peut se faire par les chemins communs qu'on nous fait emprunter. Pour être pleinement en vie,
non seulement ces questions sont incontournables, mais il faut avoir le courage de tout désapprendre pour pouvoir espérer en trouver la réponse. Désapprendre par exemple que la mémoire a un rôle a jouer dans la véritable connaissance. Désapprendre que cette connaissance doit être acquise alors qu'elle est innée, lovée dans nos profondeurs, dans le silence de l'oubli, là où nul ne pense aller (comme la forêt de Baba Yaga), telle une graine minuscule (voir la magnifique parabole du grain de Sénevé...) que Dieu aurait planté en nous. Avant même de chercher à décoder l'univers extérieur (sans fin), il faudrait commencer à décoder son intériorité. Suivre la voie ésotérique dans le sens premier du terme: aller vers l'intérieur, aller vers soi...(voir le rêve du Ver à soie!). Interroger les mystères, c'est comme accomplir les mystères d'Eleusis; c'est descendre dans nos profondeurs afin de trouver la réponse, cette graine divine que nous devons éclairer afin d'en permettre la germination. La graine pour germer n'a-t-elle pas besoin de lumière?
Source Et si la réponse ne peut être accessible par le mental c'est qu'en réalité, ce que nous recherchons n'est pas une formule mathématique, philosophique ou même magique, mais bien une énergie. Le Verbe de Dieu est une énergie infiniment disponible à chaque instant qui demande pour nous remplir de son Souffle une pleine attention. Une pleine attention qui signifie en réalité faire le vide. C'est aussi la véritable prière: laisser en soi toute la place à Dieu en se faisant petit, humble, en se retirant assez pour qu'Il nous remplisse.
Les héros des contes de fée, les archétypes, les dieux de la mythologies représentent bien des énergies particulières. Or qu'est-ce que l'énergie? C'est un vide-plein, c'est à dire un potentiel. Il y a dans l'univers des rythmes précis qui ordonne les flux d'énergies; or si nous ne sommes pas connecté à la part de nous qui "connait" ces rythmes, nous laissons le chaos régner en nous. Et le chaos appelle le chaos par la loi incontournable de l'attraction. Et la part de nous qui "connait" dans l'instant, sans même un effort de mémoire, c'est bien notre part divine, cette graine minuscule qu'il nous revient de cultiver. Plonger en soi en interprétant les rêves nocturnes par exemple, permet de comprendre comment s'articule nos énergies intérieures. Nous découvrons alors qu'il y a des discordances, des déséquilibres, qui se sont installés au fil de temps, parce que nous avons appris depuis l'enfance à vivre extérieurement, à vivre coupés de nous-même et de ce potentiel en friche qui nous habite. Tout ce qui a trait à ces énergies intérieures a été relégué au monde irréel, inaccessible comme celui des contes de fées réservés aujourd'hui exclusivement aux enfants. On nous apprend que devenir adulte c'est renoncer à croire au monde merveilleux du "il était une fois" et rentrer de plein pieds dans la monde glacé du rationnel et de l'extériorité. Quelle erreur!
Devenir adulte, c'est justement passer comme Alice de l'autre côté du miroir, et visiter ce "merveilleux", cet infini possible qui nous habite. C'est l'histoire du héros pauvre et démuni qui découvre un royaume et qui au final, en épousant la princesse (le Féminin retrouvé ce pouvoir caché de notre intériorité) va en devenir le souverain. Être adulte n'est-ce pas se connaître et accéder à une certaine maîtrise de soi? Ces énergies intérieures sont à harmoniser; elles sont ce fameux mystère que nous interrogeons non pas pour obtenir une réponse figée, définitive, mais pour connaître la façon de les gérer au mieux, selon les mouvements de la vie. Elles sont notre
réalité car tout ce qui va advenir du monde extérieur, les rencontres que nous allons faire dépendent d'elles. Elles sont la source dans laquelle naissent nos pensées, nos désirs, et la matière qui nous compose et compose le monde (c'est pourquoi beaucoup cherchent à en connaître le fonctionnement...). Tout ce qui nous arrive est en pleine résonance avec ces énergies. Cette loi de l'attraction des énergies explique aussi le phénomène de la synchronicité. Interroger les mystères, c'est commencer à tracer une carte à travers ce territoire inconnu que nous sommes, afin de retrouver le chemin vers l'unité, seule possible à celui qui reprend les rênes de son royaume Poser la bonne question
Oedipe et la Sphinge - Odilon Redon
Après avoir beaucoup marché, elle rencontra un cavalier blanc sur un cheval blanc, et l'aube apparut: puis vint un cavalier habillé de rouge, et le soleil se leva. Elle marcha tout le jour. Le soir, elle vit une cabane faite d'ossements humains dont la barrière était ornée de crânes. Alors passa un cavalier vêtu de noir et montant un cheval noir. La nuit tomba et les yeux des crânes se mirent à briller; Baba Yaga arriva, volant dans les airs, assise dans un mortier, ramant à l'aide d'un pilon et effaçant ses traces
avec un balai. Elle s’allongea et demanda à Vassilissa de lui apporter à manger, n'offrant à la jeune fille qu'un croûton de pain. Puis elle lui ordonna, pour le lendemain, de tout nettoyer et de trier le tas de blé, grain par grain, si elle ne voulait pas être dévorée.*
Il y a bien une énigme dans ce passage, un message dissimulé derrière ces trois personnages qui surviennent dès que Vassilissa franchit le seuil de la forêt, lieu frontière entre le monde d'en haut et le monde d'en bas...Ces trois cavaliers aux couleurs du Grand Oeuvre mènent notre héroïne à la sorcière. L'Oeuvre au noir peut être dans ce conte symbolisée par la mort de la trop bonne mère (qui elle serait la materia prima) et l'apparition de la marâtre. Puis l'Oeuvre au blanc par le cavalier de la même couleur, et l'Oeuvre au rouge par le cavalier du midi. Ils me renvoient au mythe d'Oedipe, et de la description qu'Annick de Souzenelle dans le symbolisme du corps humain fait de la Sphinge:
"Un gardien du seuil se tient à l'entrée et dévore ceux des habitants qui ne peuvent répondre à son énigme. Frère de tous les monstres dévoreurs des mythes, ce gardien est à son tour dévoré, c'est à dire intégré par celui qui saisit les énergies-informations qu'il est. Celui-là devient l'informé, le connaissant."
Nous avons déjà vu que le Féminin refoulé, non conscientisé, apparaît sous diverses formes à travers le conte. Son aspect le plus menaçant est sans doute représenté par la marâtre et ses deux filles. Elles symbolisent en quelque sorte ce gardien de l'entrée qui menace de détruire le héros si ce dernier ne donne pas la réponse en adéquation avec l'énigme posée. Pourtant, d'une certaine façon, c'est elles qui poussent Vassilissa à s'enfoncer dans la forêt (elles posent en quelque sorte l'énigme). Sans leur intervention, la jeune fille ne se serait sûrement pas aventurée dans sa nuit intérieure. La rencontre avec Baba Yaga contient en elle-même la bonne réponse. En fait, Vassilissa ne donne pas de réponses mais pose LA bonne question...ce qui est le plus judicieux.
"Ce gardien est nous-même dans une dimension effrayante tant que nous ne le sommes pas devenus et pour le devenir, car il nous oblige à aller vers nous-même, vers ces épousailles avec nous-même, avec la mère intérieure, pour y atteindre. Ces gardiens sont souvent des femmes
terrifiantes car c'est le féminin intérieur, nous l'avons vu, qui détient la force que nous sommes appelés à épouser, et qui, à la limite, détient le noyau, le NOM.
La Sphinge tétramorphe est Oedipe dont l'accomplissement sera symbolisé par les quatre enfants qui lui naîtront de Jocaste, quatre dimensions de lui-même au fur et à mesure de ses épousailles de plus en plus profondes avec lui-même, avec les énergies de la Mère. "La Sphinge, selon ce que certains disent, était une fille bâtarde de Laïos..." Cette version vient confirmer la lecture du mythe, selon laquelle la Sphinge est "soeur d'Oedipe", autrement dit, son aspect féminin non encore accompli.
Pour ceux qui se passionnent pour l'énigme du Tarot, cliquer sur le Monde... Ismène ("force vigoureuse") est le taureau: première étape de la vie, ancrage en terre, fécondité promise et promesse de la couronne que les cornes de l'animal symbolisent. **(Le cavalier blanc de l'aube)
Polynice ("nombreuses victoires") est le lion: deuxième étape de la vie centrée sur une qualité solaire d'amour vrai qui permet toutes les victoires sur soi-même (épousailles des énergies). **(Le cavalier rouge du midi)
Etéocle ("vraie clef") est l'aigle, gardien de la "porte des dieux" qui détient le pouvoir des "clefs" (...) *(le cavalier noir qui rentre dans la cabane)
Antigone ("avant le naissance") est le retour aux normes ontologiques, dimension dans laquelle seule l'Homme peut accomplir le NOM qu'il est.**(la rencontre avec Baba Yaga)"(A. de Souzenelle)
"Pose-les (les questions) mais souviens-toi que toute question n'est pas sage: trop de savoir rend vieux."* Ainsi parle Baba Yaga avant que Vassilissa l'interroge. Or, la question de Vassilissa pointe justement sur l'essentiel. Ce n'est pas une question futile issue d'un esprit curieux et immature mais bien celle qu'un bon disciple poserait à son maître. En questionnant Baba-Yaga sur les mystérieux cavaliers, la jeune fille montre de façon subtile qu'elle a compris le bon chemin à prendre pour descendre dans sa vérité profonde et celui qui va lui permettre d'en revenir.
Sphinge au Louvres Nous remarquons que la sphinge ou sphynx, mi-bête mi-humaine apparait dans de nombreuses mythologies: en Mésopotamie ( où l'on retrouve de semblables créatures gardiennes de la déesse
Ishtar ), en Egypte, en Grèce et en Europe en particulier durant la période la Renaissance où elle connaîtra un véritable essor. Il suffit de se promener dans Paris pour s'apercevoir que ce symbole est encore bien présent et que son énigme est loin d'avoir été résolue...
Notre pensée intime est un vaste royaume Dont le drame profond se déroule tout bas. Toute chair emprisonne un fantôme Toute âme est un secret qui ne se livre pas. Et c'est en vain Ô front! que tu cherches l'épaule, Refuge en qui pleurer, aimer ou confesser; L'être vers l'être va comme l'aimant au pôle, Mais l'obstacle entre eux vient entre eux se dresser. Car, au fond de nous tous, ennemie et maîtresse, La Sphinge s'accroupit sur son dur piédestal, Et tout épanchement du coeur, toute caresse, Soudain se pétrifie à son aspect fatal. Sa présence toujours aux nôtres se mélange, Sa croupe désunit les corps à corps humains; Au fond de tous les yeux vit son regard étrange Ses griffes sont parmi les serrements de mains. Et lorsque nous voulons regarder en nous-même Pour nous y consoler et nous y reposer, La sphinge est là tranquille en sa froideur suprême, L'énigme aux dents prête à nous la proposer. Occident - Lucie Delarue Mardrus
* Extrait de la version du conte la Belle Vassilissa issu de l'interprétation des contes de fées par Marie-Louuise Von Franz **Notes personnelles L'Homme sera vérifié jusqu'à ce que sa base soit solide. (...) Et l'os, cette partie la plus solidifiée du corps, porte plus que tout autre la conscience du Moi.
Le mot Etsem; l'os, veut dire la "substance", l'"essence". Il se décline pour rendre compte de "moi-même, toi-même, soi-même...", que l'on peut lire: "mon os, ton os, son os...", ce qui appartient à chacun dans le plus intime. Il est l'hypostasis grec, la "Personne" en tant qu'elle est unique, "icône divine" créée dans le "son" du Verbe, dans la résonance de son NOM. Lorsque Adam, conduit par Dieu dans ses profondeurs, est mis face à face avec lui-même, avec son "côté ombre" afin qu'il prenne conscience de son inaccompli et des épousailles qu'il doit maintenant accomplir, Adam contemplant son féminin s'écrie: "Voici celle qui est os de mes os et chair de ma chair" (Genèse, II, 23). Et nous pourrions traduire:"Voici celle qui est essence de mon essence..." Le symbolisme du corps humain, Annick de Souzenelle
L'Homme sera vérifié jusqu'à ce que sa base soit solide. (...) Et l'os, cette partie la plus solidifiée du corps, porte plus que tout autre la conscience du Moi.
Le mot Etsem; l'os, veut dire la "substance", l'"essence". Il se décline pour rendre compte de "moi-même, toi-même, soi-même...", que l'on peut lire: "mon os, ton os, son os...", ce qui appartient à chacun dans le plus intime.
Il est l'hypostasis grec, la "Personne" en tant qu'elle est unique, "icône divine" créée dans le "son" du Verbe, dans la résonance de son NOM.
Lorsque Adam, conduit par Dieu dans ses profondeurs, est mis face à face avec lui-même, avec son "côté ombre" afin qu'il prenne conscience de son inaccompli et des épousailles qu'il doit maintenant accomplir, Adam contemplant son féminin s'écrie:
"Voici celle qui est os de mes os et chair de ma chair" (Genèse, II, 23).
Et nous pourrions traduire:"Voici celle qui est essence de mon essence..."
Le symbolisme du corps humain, Annick de Souzenelle
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La légende dit que la nymphe Eurydice, bien-aimée d'Orphée le virtuose, mourut de la morsure d'un serpent sur lequel elle posa le pied en voulant fuir les avances du faune Aristée. Orphée partit jusqu'au fond des Enfers dans l'espoir de la ramener. Il charma tant par sa musique le royaume des morts et son souverain, le dieu Hadès, qu'il lui fut permis de reprendre Eurydice à une seule condition: durant tout le trajet du retour vers la surface du monde, il ne devait pas se retourner.
Il guida Eurydice à travers les ténèbres à l'aide de sa lyre mais, quand il aperçut enfin la lumière du jour, il ne put s'empêcher de se retourner pour voir si elle le suivait.
Aussitôt, elle retourna dans les profondeurs.
Lamentations d'Orphée de Bouveret
Ce mouvement de "descentes"dans les mythes peut symboliser l'être qui, se faisant germe, s'enfonce dans les ténèbres opaques de la matières, la "Mère Noire", la matricielle, afin d'y rencontrer sa propre lumière. C'est à partir de ses propres ressources, au coeur de la nuit noire, que l'être doit accéder à sa co-NAISSANCE. Si Adam étymologiquement signifie l'homme rouge, il doit pour s'accomplir devenir l'Homme vert:
"Dans les trois traditions du Livre (Judaïsme, Christianisme, Islam), l'homme qui accompli toutes les morts et résurrections et qui est né à sa dimension divine est l'Homme vert." (A.de Souzenelle)
L'homme pour s'accomplir, devenir vert afin que comme l'annonce Jésus, tous les oiseaux du ciel viennent l'habiter:
"Matthieu 13.31.
Il leur proposa une autre parabole, disant, Le royaume des cieux est semblable à un grain de moutarde qu’un homme prit et sema dans son champ,
32 lequel est, il est vrai, plus petit que toutes les semences ; mais quand il a pris sa croissance, il est plus grand que les herbes et devient un arbre, de sorte que les oiseaux du ciel viennent et demeurent dans ses branches."
Ce grain de moutarde qu'on trouve dans l'évangile doit germer dans les profondeurs insondables de la terre noire de l'inconscient. Le féminin non réalisé s'apparente à cette terre, matrice de tous les possibles contenant du germe divin en l'homme. Et comme dans le mythe d'Orphée tout commence par une blessure...
La morsure du serpent est l'indice d'un féminin blessé comme dans le cas d'Eurydice, par l'imprudence d'un masculin négatif représenté par Aristée. Aristée est par ailleurs une figure non négligeable dans ce mythe. Il est musicien comme Orphée et on le représente souvent sous l'apparence d'un berger portant un agneau sur ses épaules. De nombreux mythes font intervenir l'archétype du jeune berger et la descente aux enfers.
La déesse mésopotamienne Inanna-Ishtar tombe amoureuse du berger Dumuzi-Tammuz avant de le tuer croyant être trahie par lui. Folle de douleur, elle descend dans le royaume des enfers régi par sa soeur, son double noir, Ershkigal pour de tenter de le récupérer. Il s'agit bien d'un mythe de mort et de resurrection. On a trouvé des sceaux sur lesquels la déesse Ereshkigal étaient représentée entre les jambes d'inanna en position d'accouchement, comme si en sauvant son pôle masculin, le féminin parvenait à naître de nouveau...
Sceau sumérien
Dans le culte de Cybèle en Anatolie, nous retrouvons le berger Attis qui trouve la mort par castration (masculin innaccompli) puis qui ressuscite apportant le salut. Le berger est multiple; il conduit le troupeau de ses instincts plus ou moins maîtrisés. Aristée est donc le reflet d'Orphée sous sa forme inaccomplie, un homme n'ayant pas encore dépassé son animalité; il est en quelque sorte l'homme rouge, l'Adam non réalisé. Il est soumis à ses bas instincts et ne peut donc prendre conscience des conséquences de ses actes. La blessure survient par manque de vigilance. Les forces sousterraines inconscientes (féminin) non maîtrisées par un masculin immature se manifestent par la souffrance ultime, la descente aux enfers, une mort psychique inévitable.
Cette mort symbolisée par la descente aux enfers est présente dans de nombreuses traditions.
"C'est ainsi que nous la trouvons dans le Livre du voyage nocturene d'Ibn Arabi, dans le Livre des morts (Bardo Thödol) du tibet, dans celui de l'Egypte, dans les descentes aux Enfers des mythes grecs, dans les Enfers de Dante. Enfin la cécité de nombreux héros de nos légendes (Oedipe) traduit cette même descente dans les ténèbres (...). "(A.de Souzenelle - La symbolique du corps humain)
Dans l'antiquité le serpent est l'attribut de la déesse sous toutes ses formes (Ishtar, Nidaba, Hathor, Héra...) et ce n'est pas un hasard si le reptile s'adresse à Eve plutôt qu'à Adam dans le jardin d'Eden...
Eurydice est mordue au pied, symbole qui est loin d'être anodin. Le pied représente en quelque sorte les racines de l'être, ce sur quoi on s'appuie pour avancer. La morsure du pied Eurydice représente là un féminin prisonnier du passé, de l'héritage familial ou culturel. Ce féminin là est forcément un masque car il est empesé de tout un passif de mâleentendus, de projections, de souffrances non-résolues. Être mordu aux pieds peut s'apparenter dans le mythe à une souffrance névrotique, la répétition de schémas destructeurs, ou plus directement l'impossibilité totale d'avancer.
Orphée en découvrant sa bien-aimée inanimée tente alors l'impossible.
Orphée par Jean Delville
Il y a plusieurs niveaux de compréhension dans le mythe ou le conte. On peut au premier niveau considérer l'histoire d'Orphée et Eurydice comme une romance tragique mais s'arrêter à ce seul niveau serait bien sûr lui en ôter tout intérêt, car ce premier niveau n'est qu'une accroche, un écrin. Il faut comme Orphée, descendre au fond de soi afin d'accéder à l'enseignement véritable du mythe.
L'impossible que va tenter Orphée est ce pouvoir de rédemption que nous portons tous en nous, cette possibilité de résilience (du verbe latin resilio, ire, littéralement « sauter en arrière »), de prendre du recul par rapport à ce troupeau de personnalités multiples qui nous a envahit (voir
l'archétype du berger) afin d'apercevoir qui nous sommes vraiment derrière tous ces masques.
Orphée, dans ce geste de descente, représente l'être qui dans l'abandon total de toute lutte, cet abandon qui survient parfois au coeur du plus profond désespoir (car l'être est fait ainsi, il lui faut parfois aller au plus noir de lui-même pour comprendre...), trouve des ressources insoupçonnées en lui. Ces ressources sont symbolisées là par le chant de sa lyre qui charme tous les habitants des enfers sur son passage. On peut faire le lien avec le Chant des Chants du cantique qui n'est autre que Dieu (transcendance), l'amour qui unit, élément indispensable pour féconder le germe qui va être planté dans le profondeurs.
"A son arrivée, non seulement il charma le passeur Charon, le chien Cerbère et les trois Juges des Morts par sa musique, mais il interrompit momentanément les supplices des Damnés: il adoucit à tel point l'insensible Hadès et son épouse Perséphone qu'il obtint la permission de ramener Eurydice dans le monde des vivants."
Ainsi le féminin est fécondé par un masculin transcendé par l'amour, le Chant des Chants qui est cette vibration à l'origine de toute chose. Orphée peut remonter Eurydice avec lui mais Hadès qui préside aux enfers lui donne une condition qui est en réalité une recommandation du mythe, une erreur à ne pas commettre . Orphée ne doit pas se retourner sur lui-même. Ce qui lui est demandé là est de respecter l'essence même de l'amour: la foi. C'est en apercevant la lueur du jour, qu'Orphée soudain doute et se retourne perdant ainsi à jamais sa bien-aimée.
C'est souvent quand les choses de la vie s’éclaircissent, que les problèmes s'estompent qu'on est soudain tenté de se rendormir, de revenir à nos anciens schémas, même après avoir senti en soi la foi de l'abandon, la tentation de douter est toujours présente. Cette foi réclame un aveuglement qui est non pas l'aveuglement de l'être inconscient, le héros inaccompli au début du mythe, dont le regard est constamment tourné vers l'extérieur mais un aveuglement de sagesse, c'est à dire comme exactement dans ce mythe d'Orphée, un regard qui même tourné vers
l'extérieur (face à la lumière du jour = illusions du monde matériel) ne cesse de contempler son intérieur.
L'homme sage, l'Homme vert dont le germe croît nourri par la foi en l'amour qui unit, n'a nul besoin de se retourner sur lui-même pour regarder en lui. Pour accéder à son accomplissement, il a déjà effectué un retournement; se retourner à nouveau signifierait revenir aux anciens schémas, à ce qui est déjà mort. Cela voudrait dire à l'instar d’Orphée que son regard est encore sensibles aux apparences extérieures du monde (tout ce qui brille n'est pas or...) et qu'il a besoin de se retourner, de se souvenir pour pouvoir garder le germe en lui.
Or le germe ne se nourrit pas du passé, du souvenir, du suranné. Cette tentation très humaine de vouloir s'approprier chaque expérience de transcendance, de s'y arrêter alors que l'être dot suivre le mouvement: avancer, naître nouveau à chaque instant.
On ne saisit pas le Soi par la pensée. On ne le saisit que par l'abandon total à ce qui est. Par une foi indéfectible en ce Chant de chants qui nous accompagne à chaque pas. Avancer en ayant toujours l'assurance que quelque soit la route que nous empruntons l'amour nous suit pas à pas. A l'arrière de toute conscience, il précède chaque souffle et ferme chaque pas L'amande sacrée
l'amandier de Vincent Van Gogh
La gloire de l'Homme est symbolisée par la mandorle que l'on voit enveloppant le corps du Christ en majesté, comme celui des saints et des bouddhas dans les différentes traditions iconographiques religieuses. La mandorle est "l'amande ourlée", c'est-à-dire celle qui ouvre sur la Lumière.
Prabhutaratna et Shakyâmuni en conversation, Chine, 518
(...) l'amandier fait partie de ces nombreuses essences d'arbre et d’arbustes qui sont vénérés tout d'abord en tant que ressortissant à la notion "d'arbre vert", symbole de l'arrivée de "l'Homme rouge" à son accomplissement divin; mais elles le sont aussi pour leurs vertus particulières.
Bas-relief de la cathédrale de Chartres
La France est les, pays celtes sacralisent le chêne pour sa robustesse et sa virilité. Il vénèrent aussi le houx et le pin pour leur immortalité: leur feuillage ne se flétrit pas. Or, ces trois arbres, avec l'oranger, encadrent la "Dame à la Licorne" dans chacune des six tapisseries exécutées à la gloire de cet animal fabuleux (...).
Tapisserie de la Dame à la Licorne
Les fruits de l'oranger sont les fameuses "pomme d'or" qui apparaissent dans bien des contes ou mythes. contrepoint à la "pomme" dont la tradition orale fait le fruit de l'arbre de la Connaissance, la "pomme d'or"n est celui de l'Arbre de Vie.
Dans cette perspective, l'oranger est l'arbre des noces de l'humanité et de son Dieu; la couronne de fleurs d'oranger, le diadème de l'épousée. Et ce dernier symbole était vécu, il y a peu de temps encore, dans nos campagnes français es où ne se célébrait aucune noce sans que
l'épousée n'eût, à défaut de couronne de fleurs d'oranger sur sa tête, au moins, son bouquet dans sa corbeille, elle-même symbole de la corne d'abondance.
Détail du printemps de Botticelli
L'amandier a la même signification que l'oranger, en ce sens que, arbre monoïque, sa fleur est mâle et femelle. Il est alors en "l'Homme vert" symbole de l'androgynie conquise. Ayant dépassé la dualité des sexes, conquis l'unité, l'Homme est introduit dans la chambre nuptiale.
XXIème arcane du tarot de Marseille
La fleur de l'amandier, soeur de l'églantine et de la rose, rejoint aussi leur symbolisme que chantent les rosaces de nos cathédrales: mariage du macrocosme et du microcosme, du Ciel et de la terre; elles flamboient de la lumière et du Feu de l'Amour Divin Qui brûle et ne consume pas.
Aller au centre de la rose, c'est retourner à l'Un.
Rose nord de la cathédrale de Chartres
"Quand l'amandier fleurit...l'Homme retourne à sa demeure éternelle" (Ecclésiaste, XIII,7).
Si l'amande est le fruit divin qui symbolise non seulement l'immortalité, mais surtout l'éternité de l'homme, elle est essentiellement un fruit de lumière. or la langue hébraïque nous propose un autre mot pour désigner l'amande: Luz dont l'homonyme Loz signifie "mis à part". Ce signifié est la racine même de l'idée du sacré.
Le sacré est ce qui est mis à part, écarté du vulgaire (car ,'est devenu vulgaire, profane, que ce qui est séparé du sacré).
Ce fait est d'autant plus intéressant que rené Guénon, rendant compte d'une tradition quabbalistique, nous dit: "le mot luz est le nom donné à une particule corporelle indestructible représentée symboliquement comme un os très dur et à laquelle l'âme demeure liée après la mort jusqu'à la résurrection. Par le déploiement du Kundalini, cette zone s'éveille, se déploie pour atteindre les divers chakras, puis le troisième Oeil..."
En tant que colonne vertébrale du monde, israël prend son départ à Luz, ville en laquelle au cours de la nuit (ténèbres du triangle inférieur) Jacob a la vision de l'Echelle. Or parmi toutes les significations symboliques que revêt cette échelle qui monte de la terre au ciel - et descend du Ciel à la terre - se trouve essentiellement l'éveil de Kundalini.
L’échelle de Jacob par Chagall
Lorsque Jacob se réveille, il donne au lieu sur lequel il a passé la nuit le nom de Bethel ce qui signifie "Maison de Dieu" (remarquons bien que le même mot, Bethyl, est tout simplement celui de l'émeraude!).
Quant à Luz, le nom primitif de la ville, il semble que Jacob aille maintenant le porter à un autre échelon de l'Echelle...
La racine Luz est liée à celle d'où sont tirés, dans les langues celtooccitanes, les mots lux (la lumière en latin), lug (nom d'un dieu celte), Luc, Ludwig, etc., prénoms qui tous rendent compte de la lumière. Il est à noter que dans le symbolisme chrétien, l'animal qui correspond au génie de l’Évangéliste Luc est le taureau.
Luz, l'amande portée en germe dans sa coque, symboliquement à la base de la colonne vertébrale, a gravi tous les échelons des ténèbres; elle a cassé sa coque.
Tel le christ sortant du tombeau, l'homme est devenu Lumière.
Dernière manifestation du corps, à la limité de l'immatériel, la mandorle, oeuf de lumière, présuppose les engendrements successifs de l'homme
naissant de lui-même à lui-même dans le mystère de plus en plus inconnaissable de l'amour.
Il va vers l'Aïn-Soph-Aor, l'Aïn-Soph, l'Aïn, le Rien...
Quand le symbole apparaît flamboyant, il révèle une multitude de correspondances, de signes minuscules, semés comme les cailloux d'un petit Poucet sur le chemin de notre vie.
Ces détails en apparence in-signe-ifiants (signe mot du latin signus issu de la racine indo-européenne sekw > suivre, "suivre ce chemin"...) éclairent notre quotidien d'une lumière nouvelle. Comme si le simple fait de rencontrer des "signes" voulait dire qu'on a retrouvé le chemin pour rentrer chez soi. Après une longue errance dans la forêt. A l'instar de l'hermite du tarot guidé par sa lanterne, nous distinguons mieux le lien invisible qui relie chaque chose.
Par exemple après le rêve de la mandorle, des petites choses de ma vie prennent soudain un sens: mon attirance pour l'odeur de la fleur d'oranger que je trouve "divin"au sens propre comme au figuré (je porte ce parfum sur moi tous les jours), les deux prénoms de ma fille qui sont les noms de deux fleurs blanches au parfum si proche, l'impression de m'être brisée comme une noix lors de l'éveil (la coque) et Luz comme Luc du signe du taureau qui est aussi le mien... des petits signes anodins qui vus de façons séparés, ou pour une personne extérieure, ne signifient pas grand-chose mais qui pour moi, intérieurement son inextricablement liés. Il y en a même qu'il est très difficile d'exprimer tant ils sont subtilement liés à l'intériorité de l'être. On appelle cela le syndrome de la "synchronicité", mis en évidence par le courant "new age" mais déjà connu depuis une éternité par toutes les traditions. Cette synchronicité survient de plus en plus évidente (et amusante) quand on entreprend un dialogue sincère avec soi-même, une écoute attentive.
Ces signes récurrents sont révélateurs d'une Présence aimante à tous les niveaux de la vie, au-delà même de toute conscience; c'est l'appel de l'Un
derrière tous nos désirs et même derrière nos différences, ce qui nous fait unique. Une unité au coeur même de la dualité, inextricablement liés...
Le côté gauche (femelle)
La Gauche divine est présidée par la séphirah Binah, Intelligence, révélée sous le nom de "Mère divine". Elle éclaire la Colonne de Rigueur, nom de la séphirah Din, qui est aussi Gebourah, la Force.
Elle correspond au niveau du corps humain à la gauche ontologique et féminine; au niveau de l'Arbre de la Connaissance, au côté Ra, côté non encore lumière, côté ténèbre.
C'est au creux maximal de la Ténèbre qu'est le noyeu énergétique, le NOM qui participe de Yaveh et qui est symbolisé par la lettre Yod'. Chacun de nos cieux intérieurs est, au niveau énergétique qui lui est propre, participation au NOM et fait de lui à ce degré précis, rigoureux.
Le féminin est en chacun de nous, en l'Homme, la Force rigoureuse faite de tel degré de participation au NOM; la force féminine est réceptive à la pénétration mâle et en attente de cette pénétration.
Détentrice du NOM, elle est donc et Force et Connaissance totale. Elle est Intelligence Binah, celle qui, pénétrée, va "construire" (Banoh) le "fils"(Ben) qui est la dimension du Yod' de Yaveh.
L'intelligence n'est en profondeur qu'ouverture amoureuse distribuant les énergies de Yaveh au fur et à mesure que celui qui, participant de la sagesse divine, se sachant faible et ignorant, pénètre ses cieux intérieurs.
Tel est l'ordre ontologique.
Ce côté femelle contenant le NOM caché, le Soi, semble détenir la même force d'attraction qu'un trou noir, en sachant que le mot femme en hébreu peut aussi se lire trou...
Je suis noire mais je suis belle, fille de Jérusalem... Ne prenez pas garde à mon teint noir (ténèbres), c'est le soleil qui m'a brûlée... Ne réveillez pas, ne réveillez pas l'amour avant qu'elle ne le veuille.
Ce trou noir, désirant, que nous portons en nous, contient le centre de l'être, le creuset même de toute création ou transmutation. Ce féminin non réalisé est au départ ténèbres languissantes; il appelle l'être à se trouver lui-même à retrouver son noyau (moyeu) divin. Par essence, le féminin est passif. Il est la princesse endormie du conte au coeur d'une forêt de ronce. Cette forêt sombre et noire des profondeurs inconscientes, destinée à être défrichée, pénétrée puis dépassée. Le féminin est l'attente infinie,
la racine et la fleur de toute les conquêtes de l'homme assoiffé de lui-même. Il est soit terre d'exil, terre en friche, désertique et sans fin, soit terre promise fleurissante, accueillante et fertile. Tout dépend du mâle... Tout dépend du prince ou de l'amant... Le féminin non réalisé doit être pénétré par la blessure ardente, porte initiatique de l'être, que symbolise le sexe féminin. Il faut passer cette porte tant redoutée, affronter l'épreuve vaillamment mais pour cela le mâle doit guérir... Le côté droit (mâle)
La Droite divine est présidée par la séphirah Hokhmah, la Sagesse, révélée sous le nom de "Père divin". Elle éclaire la Colonne de Miséricorde, nom de la séphirah Hesed qui est aussi Gadoulah, la Grandeur.Elle correspond au niveau du corps humain à la droite ontologique et masculine; au niveau de l'Arbre de la Connaissance au côté Tov, côté lumière.
C'est dans l'intensité maximale de la lumière acquise à tel niveau de son évolution, et dans la grandeur qu'elle lui confère, que l'Homme peut se faire mâle.
Mais il ne peut être mâle que s'il a conscience de sa fragilité, s'il sait que sa lumière n'est que faiblesse par rapport à celle qu'il peut et doit devenir en pénétrant son ombre, son côté féminin, ténèbre, receleur d'une nouvelle information, d'une nouvelle force.
Être mâle consiste donc à se savoir faible et à se faire germe pour descendre dans une nouvelle Terre intérieure afin d'y germer une nouvelle et plus grande lumière encore. Là est la sagesse.
Qu'elles sont nombreuses tes oeuvres, ô Seigneur, Tu les as toutes faites avec sagesse, chante le psalmiste (Psaume, CIV)
A l'image de la sagesse divine, l'Homme ne peut construire son cosmos intérieur qu'en se faisant faible et en étant plein de miséricorde, Hesed, pour la faiblesse des autres.
Il ne peut se faire faible par rapport à la nouvelle Terre vers laquelle il va que parce qu'il se sait fort de celle qu'il vient de conquérir.
Il ne peut se faire germe que parce qu'il a connu la Grandeur. (Annick de Souzenelle - Le symbolisme du corps)
Le mâle accompli que décrit Annick de Souzenelle est bien représenté dans les rêves les yeux bleus et l'âme soeur sous la forme de personnages masculins qui dégagent justement ce mélange subtil de douceur (faiblesse) et de force (lumière intérieure). Nous sommes aux antipodes de l'homme macho (inaccompli) qui considère que toute forme de faiblesse serait une atteinte justement à leur masculinité. L'homme ne se tient pas debout mais à l'envers: ce qui doit être intérieur est à l'intérieur et inversement. Il semble marcher sur la tête... Cette force qu'il cultive dans l'apparence n'est là que pour cacher une grande faiblesse intérieure. Privé d'accès à son féminin intérieur qu'il identifie à la mère toute puissante et inconsciente, donc effrayante, l'homme inaccompli se coupe de sa véritable force ou masculinité. Il ne peut grandir et reste bloqué dans une grande
immaturité intérieure (donc affective) qui le rend dépendant de tout regard extérieur et non du seul qui importe: le regard intérieur. Dans les yeux bleus, le rêve invite justement à un retournement radical, un inversement totale des valeurs. Le masculin inaccompli est parfaitement représenté sous la forme du mari violent (refoulement du féminin), des hommes témoins (impuissance) qui se font tuer l'un après l'autre, et enfin des jeunes dans la rame de métro qui insultent l'homme aux yeux bleus. Les deux côtés
La colonne vertébrale, au niveau du corps humain, est le reflet de la colonne du milieu de l'Arbre des Séphiroth, reflet de l'Arbre de Vie, de la Lame de l'épée.
Les deux côtés du corps sont le reflet de la Colonne de Rigueur, à gauche, et de la Miséricorde, à droite, reflets de la connaissance de TovveRa, les deux tranchants de l'Epée.
Commençons par ce qui nous est le plus proche, le plus immédiat: cet aspect direct de la vie. La vie se manifeste à nous, comme nous l'avons vu, par opposition ou complémentarité: ténèbres et lumière, silence et parole, froid et chaleur, féminin et masculin, etc. Cette manifestation est le résultat de l'oeuvre de la Création dont l'objet est essentiellement une séparation dans le sens "distinction" à partir de l'Unité primordiale. Nous avons vu aussi que cette distinction n'est qu'apparente. Elle est l'image même de la manifestation divine qui procède par antinomies: Immobilité et Source de tout mouvement, Être et Non-Être...
Le Divin ne S'appréhende pas qu'à partir de ces contradictions saisies ensemble et dans leur juste rapport par le connaissant. Mais au niveau de notre monde sensible qui est ressenti par nous, "homme de chute",
comme séparé, déchiré entre ses aspects antinomiques, notre gauche et notre droite reflètent les aspects les plus contradictoires de notre Être.
Je veux faire avec toi ce que le printemps fait avec les cerisiers... Pablo Neruda Dans le rêve les yeux bleus décrit précédemment, la rêveuse (moi ou vous puisque en le lisant vous recevez le message vous aussi...) est invitée à effectuer un retournement. Ce retournement est exprimé par la répétition du suffixe trans dans les mots transport et transsexuel. Il s'agit bien donc d'un changement radical, un renversement tel que le décrit Annick de Souzenelle dans le symbolisme du corps humain: Entre la conscience et la supra-conscience, se situe ce que le tradition hébraïque appelle le "Retournement des Lumières". Il s'agit d'un retournement mystérieux selon lequel l'Homme, qui jusqu'ici était miroir de Dieu, traverse le miroir.
Son bras droit devient le bras gauche de Dieu, son bras gauche le bras droit de Dieu. L'Homme entrant dans le divin est "retourné" et l'intérieur devient l'extérieur,
Aujourd'hui, nous voyons au moyen d'un miroir, d'une manière obscure, mais alors nous verrons face à face. (Paul, I, Corinthiens, XIII,12)
Ce retournement se lit aussi au niveau du corps humain, l'hémisphère cérébral droit régissant le côté gauche du corps, l'hémisphère cérébral gauche , le côté droit. Le croisement s'opère à la hauteur du bulbe rachidien où les fibres nerveuses émanées du cerveau droit se portent vers la moitié gauche de la moelle, les fibres émanées du cerveau gauche vers la moitié droite de la moelle.
...
Cette notion de retournement insaisissable intellectuellement, ne peut
être rapprochée que par l'image d'un gant que l'on retourne : le gant droit ne peut plus alors ganter que la main gauche. Mais l'intérieur est devenu l'extérieur...
Ce retournement s'accompagne de la traversée des hiérarchies angéliques, mondes invisibles que les vertèbres cervicales du corps symbolisent. Elles conduisent à l'ultime mystère.
Le rêve intitulé les yeux bleus, très riche symboliquement, décrit une phase initiatique importante de l'être. C'est pourquoi je vais faire quelques détours à travers les mythes et les symboles afin de bien en saisir le sens et comprendre le message qu'il délivre... 4 échos Liens vers ce message Tags : Annick de Souzenelle, Reves mardi 7 juin 2011 Le symbolisme du corps Le symbolisme du corps humain 1/5 par zindabad7
Le symbolisme du corps humain 2/5 par zindabad7
Le symbolisme du corps humain 3/5 par zindabad7
Le symbolisme du corps humain 4/5 par zindabad7
Le symbolisme du corps humain 5/5 par zindabad7 0 échos Liens vers ce message Tags : Annick de Souzenelle, Video jeudi 26 mai 2011
L'ange
Lire Cheminer avec l'ange de Annick de Souzenelle (écrit en collaboration avec Pierre-Yves Albrecht) me ramène à l'ange. L'ange n'est pas une croyance, c'est un effleurement. Aucune importance d'y croire ou non. L'ange ne s'attache pas à nos croyances. Il s'attache à accomplir sa tâche, soumis et libre à la fois...
L'éveil n'a ni début ni fin. Mais dans ce brouillard de l'"avant", cette période qui précède ou prépare la combustion spontanée, je me souviens d'une femme qui m'avait reçue chez elle. Elle n'était ni voyante, ni médium, peut-être guérisseuse, je ne saurais dire. Elle recevait les gens par le bouche à oreille. Et j'ai atterri sur son canapé comme en psychanalyse avec au fond de moi l'impression d'avoir touché le fond. Qu'avais-je besoin de guérir? Peut-on guérir de la vie? Comment la vie peut-elle être une maladie? Chaque jour, vivre dans un brouillard dense, en décalé, avec le crâne pris dans un bourdonnement incessant et confus de pensées... Avant d'entamer la séance, la guérisseuse (nommons-la ainsi) me déclara qu'elle commençait
toujours par une prière silencieuse à l'archange Michaël. Je lui demanda alors - farcie que j'étais de lectures Nouvel Age...- si elle communiquait avec lui, si elle le canalisait ou quelque chose de ce genre...Elle me répéta qu'elle se contentait de penser silencieusement à l'archange face au petit autel orné d'images catholiques qui lui était consacré dans un coin de la pièce. Il n'y avait rien de folklorique ou étrange chez cette femme. La pièce était très modestement meublée, très neutre. Je me souviens l'avoir trouvée un peu simple...
Puis la séance a commencé. Cela fait sept ans maintenant. Ses questions étaient précises, concrètes et y répondre me faisait mal comme si je vivais ma vie de loin , que je ne voulais pas réellement la vivre. Je pleurais beaucoup et mes entrailles tremblaient comme si je lâchais quelque chose depuis longtemps retenu. En même temps, une partie de moi raillait l'absurde de la situation. La guérisseuse avait des yeux perçants, verts qui m'effrayaient. Ils semblaient regarder en moi jusqu'à l'os; cela me mettait mal à l'aise car j'avais beaucoup de choses à cacher. A me cacher.
Avant de la quitter, la femme a plongé son regard dans le mien et a déclaré d'une voix appuyée: "tu es comme moi, tu ne le sais pas encore mais tu es comme moi." Je me suis pressée de partir heureuse de pouvoir échapper à ces yeux verts...inhumains. Je ne l'ai jamais revue. Mais l'ange m'a suivie. Aujourd'hui, je sais que ce regard, cette sensation d'être transpercée, mise à jour, était une rencontre avec l'ange. Tous les jours des signes évidents de sa présence. Une chanson quand on allume la radio, le nom d'une église, une multitude de choses inextricablement liées à l'ange.
L'avez-vous déjà vu en train de terrasser le dragon, le Satan, l'adversaire? C'est exactement cela qu'il préparait pour moi. L'éveil s'est produit une nuit, au coeur de l'enfer. Je devais affronter le dragon. Et il était redoutable.
Tant d'années à le fuir, l'avait rendu bien féroce. J'ai frôlé la mort. Mais l'ange est intervenu afin que seul l'essentiel survive en moi... J'ai plongé dans le vide total de l'être, là où il n'y a aucun refuge contre soi. Dans cette nuit intérieure que certains mystiques reconnaissent comme le nuage de l'inconnaissance parce qu'il se trouve audelà de tout, au-delà même de toute idée de Dieu. Le Nul part, le Rien des physiciens... L'ange m'y a poussée, habilement. Il a joué subtilement afin que je me dépouille de toutes ma carapace d'illusions. Je ne sais pas pourquoi. Mais je me souviens de sa phrase qui reste gravée en moi jusqu'à présent, et de ce regard vert, un regard de dragon:
"Tu es comme moi, tu ne le sais pas encore mais tu es comme moi." Selon une Tradition mystique très ancienne, au mont Moriah, au moment où Abraham allait porter sur Isaac le couteau du sacrifice, l'enfant eut une
vision dans laquelle son âme vit le Saint, Béni SoitIl, et les demeures de la Merkabah, les demeures du Trône divin. Totalement ligoté dans son obéissance et sans doute terrorisé, ISaac fut précipité au fond de l'abîme, au coeur du "vide" de son être où est "scellée Bassar, la chair", son Bereshit!
A.
de
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Souzenelle
Cheminer avec l'ange
Le nom hébreu de l'ange, Mel'ak "plénitude de toi"... ... Ô homme en exil qui ne connait que la surface de ton être, semble dire l'ange, va vers toi, vers toi, outre du vin céleste que tu ne sais boire; apprends à t'enivrer de la royauté que je suis chargé de te transmettre. ...
Dieu se multiplie, dit Maxime le Confesseur, mais un que multiplie un, que multiplie un, fait toujours UN. ... Les anges, nous l'avons vu, sont des êtres créés et, comme toute l'oeuvre divine, nous dit le texte des Macchabés (II, Macchabés 7, 28), "créés de Rien", Me'Ayin. Ce mot hébreu est aussi une question:"venant d'où?". Elle est celle qu'emploie Job lorsqu'il se demande avec angoisse: "Mais d'où vient la sagesse? D'où vient l’intelligence?" (Job 28, 12 et 20) De même pouvons-nous nous interroger: d'où vient le créé? Me'Ayin Bri'ah? La réponse est contenue dans la question; elle est lapidaire: "de Rien"! L'étymologie latine du mot français "rien" est Res, soit une "chose". Quelle est donc cette "chose" pouvant rendre compte de ce "rien" qui est proprement inimaginable? Peut-être parce que non observable? C'est ce
que vient nous confirmer la Tradition mystique juive lorsqu'elle nous dit que ce "Rien", 'Ayin, est le tout premier NOM divin révélé à la limite du Tsim-Tsoum (de la racine Tasm'on "avoir soif") qui est une aspiration divine extrême allant jusqu'à l'évidement totale de l'Incréé pour créer. Dieu se fait "Rien" pour poser l'"autre" qui est autre et qui cependant ne peut être autre que lui! Cet évidement se retrouve dans le mot grec Kenosis qu'emploie la Tradition chrétienne pour parler de ce même mystère. A la lumière, ce "Rien" d'où tout se crée se présente comme étant l'Incréé vidé de luimême, soit le vide de Dieu. Extraits choisis et distillés de Cheminer avec l'Ange - Annick de Souzenelle et Pierre-Yves Albrecht
0 échos Liens vers ce message Tags : Ange, Annick de Souzenelle, Livres, Vide jeudi 31 mars 2011
Les lettres beit et ba
La Genèse en hébreux commence par le mot Bereshit que l'on traduit communément (et commodément) par "au commencement". Ce mot non seulement ouvre le Livre de la création mais aussi le contient tout entier en l'intitulant. Il en est en quelque sorte la matrice... Le Bereshit est le Livre de la Genèse, appelé ainsi en hébreu du premier mot qui le compose et dont le Tradition nous assure qu'il contient la totalité de la Torah. A son tour le premier mot, dit-elle encore, confie son secret à la première lettre, le beit. La lettre beit ouvre et recouvre notre Livre
sacré. Elle est le "Toi" jailli des lèvres divines comme une semence d'amour livrant cette "autre" qui ne peut être autre sans rompre l'infini de Dieu! Mais ô merveille, elle est rupture et nonrupture; ensemencée de Lui, elle porte son infinitude; crée, elle est matrice d'Incréé; face à Lui, le Un, et lourde de Lui, elle est le "deux"; elle est aussi soumise à la dualité; constituée de pôles opposés et complémentaires dont l'un ne peut être sans l'autre, elle est récapitulée dans l'homme et la femme. Au-delà de toute dualité, Dieu Un ne se révèle mâle, archétype du masculin, que dans son rapport à la Création alors toute entière féminine par rapport à Lui, tout entière aussi contenue dans la lettre beit de valeur 2 et de vocation fodamentalement matricielle. Première lettre du Bershit, mystère du Créé, celui de l'humanité (hommes et femmes), elle est née de "Rien", Me'Ayin en hébreu, nous dit la Tradition. Ce Rien ('Ayin) est le premier Nom divin révélé, le point ultime d'une contraction, d'une abnégation totale de Celui
qui se fait "Rien" pour que l'"Autre" soit: absence-présence à la plus extrême pointe du point, qui est et qui n'est point! Annick de Souzenelle - Le féminin de l'Être
Les Ecritures ont été desservies par la traduction, vidées de leur substance, castrées. La traduction a certes permis leur diffusion mais n'a rien apporté à la compréhension. Rien n'est du au hasard et si les textes restent hermétiques, c'est qu'ils demandent à être lu autrement. Il nous incombe d'aller chercher le sens véritable et profond de chaque, mot non pas en survolant les mots, mais en pénétrant en soi. Aller chercher la Vérité dans la profondeur. Nul personne ne peut accomplir ce chemin à notre place. Nous vivons dans un monde d'illusion, une illusion tissée par le diable (le calomnieur) qui s'évertue à inverser, renverser, tout mélanger (chaos) afin de semer le trouble et la discorde. Il divise certes mais à partir d'un semblant d'unité, une unité purement matérialiste. Le mal ne se répand pas la plupart du temps de manière ouverte et claire. Il se répand sournoisement, de façon insidieuse et la
plupart des cas ceux qui font le mal sont persuadés de faire le bien. Celui qui n'est pas vigilant, éveillé, méditant (c'est à dire: agissant à partir du centre médian, du Soi) tombe rapidement dans le péché qui n'a rien à voir avec une morale branlante et changeante au gré des vents, mais plutôt avec la capacité de choisir entre l'illusion ou la Vérité en toute chose. L'unité que l'on doit chercher n'a jamais cessé d'être. Seul notre regard a le pouvoir de changer. Le libre-arbitre n'est autre que le choix du regard que nous portons sur les choses. Et les textes sacrés nous exhortent à ouvrir notre regard, à asservir le mental, le rendre à son véritable rôle pour laisser la parole divine se répandre dans notre coeur et lui rendre la vie. Il nous appartient donc de percevoir l'Unité, le Fil conducteur de l'Un qui nous guide à travers les dédales du monde fourvoyeur. Plus nous sommes dans l'illusion, plus la Vérité va nous sembler innaccessible voire impossible. Mais à celui qui pratique le retrait, qui parvient à s'effacer, se
soumettre, la Vérité se dévoile comme une fiancée promise, une bénédiction, une source infinie de joie pure. Il suffit d'ouvrir les yeux, de regarder avec amour, non pas condescendance mais avec la plus extrême pointe du point... Par exemple, si nous suivons le fil, la Bible commence par Bereshit, le lettre beit, dans la langue originelle qu'est l'hébreu. Or, l'hébreux est la racine de l'arbre sémitique dont les ramures éclatantes ont fait fleurir deux autres langues : l'araméen et l'arabe. Deux prophètes parlaient ces deux langues: Jésus (l'araméen qui fut traduit en grec puis en latin pour arriver jusqu'à nous) et Mahomet (Muhammad en arabe).
Milieu du VIIe siècle Encre sur parchemin, 29,1 x 24,5 cm, BnF, Manuscrits orientaux, arabe 328, f. 10 à 14.
Le Coran ou Qur'an commence par une sourate que le musulman ( muslim en arabe qui signifie en arabe "celui qui se soumet") doit réciter plusieurs fois durant les cinq prières quotidiennes: la fatiha.
[1] Au nom d'Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux.
[2] Louange à Allah, Seigneur de l'univers. [3] Le Tout Miséricordieux,
Miséricordieux,
le
Très
[4] Maître du Jour de la rétribution. [5] C'est Toi (Seul) que nous adorons, et c'est Toi (Seul) dont nous implorons secours. [6] Guide-nous dans le droit chemin, [7] le chemin de ceux que Tu as comblés de faveurs, non pas de ceux qui ont encouru Ta colère, ni des égarés.
Cette sourate est considérée comme l'ouverture du Livre Sacré, et même sa matrice. En effet, le Coran selon la Tradition a été révélé au Prophète par l'intermédiaire de l'ange Gabriel, pour rectifier le message de la Bible que les hommes avaient déformé. Le Coran est donc la continuité de l'Ancien et du Nouveau Testament qu'il reprend et corrige. On retrouve ainsi la première lettre beit de
la Genèse dans celle de la Fatiha qui commence en langue arabe par Bismillah, la lettre ba.
La lettre "ba", de la formule Bismillâh (au Nom de Dieu), est une particule d'implication qui signifie ceci : C'est par Dieu que les êtres contingents se sont manifestés et c'est par Lui que les créatures sont venues à l'être pour devenir existantes. Ainsi, il n'y a aucun être contingent et créé, aucun être qui advient et qui est ordonné, qu'il s'agisse des essences concrètes, des effets, des poussières, des variadons, des pierres, de la terre, des étoiles, des arbres, des traces, des vestiges, des idées, des sensations, des dispositions de sagesse ou des causes dont l'existence n'est pas due à Dieu, dont Dieu n'est pas Le Roi, dont le commencement n'advient pas de Dieu et dont le retour n'aboutit pas à Dieu. C'est par Dieu que trouve celui qui affirme l'unicité divine. C'est par Dieu que nie celui qui mécroit. C'est par Dieu que celui qui Le reconnaît est devenu connaissant et c'est par
Lui qu'est ravalé celui qui a commis des forfaits. Car Dieu a dit Bismillâhi (Au Nom de Dieu) et n'a pas dit billâh (Par Dieu) pour qu'on recherche les bénédictions en mentionnant Son Nom, comme le suggèrent certains exégètes, et pour bien marquer la différenciation entre le Bismillâhi (au Nom de Dieu) et le serment billâh (par Dieu) selon d'autres (ndt: le ba correspond dans nôtre traduction à "AU" dans "au Nom de Dieu").
Il reste que pour les savants que le nom, c'est le nommé, tandis que pour ceux qui possèdent la connaissance spirituelle, il s'agit d'arracher les secrets aux entraves et de purifier les coeurs des attaches pour que l'affection, accompagnant l'articulation du Nom Allah, touche un coeur purifié et un secret intime transparent. L'évocation de ce Verset (c'est-à-dire Bismillâhi al rahmân al rahîm Au Nom de Dieu le très Miséricordieux, le tout Miséricordieux) rappelle à d'autres que le ba symbolise Sa bonté (birr) envers Ses Amis, que le sin indique Son secret (sirr) avec Ses Élus et
le mim représente Sa faveur (mann) pour ceux qui ont mérité Son amitié afin qu'ils sachent que par Sa bonté, ils ont connu Son secret, par Sa faveur pour eux ils ont préservé Son commandement et par Lui qu'Il soit exalté -ils ont su Sa véritable valeur.
D'autres, en entendant Bismillâh, se rappellent que le ba constitue une exemption de Dieu, - qu'Il soit exalté - contre tout méfait, que sin indique que Dieu - que Sa toute Puissance soit magnifiée - est prémuni contre tout déficience ou imperfection et que le mim représente Sa gloire - qu'Il soit exalté et magnifié - en vertu de la magnificence de Sa qualification.
D'autres encore se rappellent, en évoquant le ba, Sa beauté éclatante, en évoquant le sin, Sa magnificence éblouissante et en évoquant, le mim, Son mulk (royaume). Par Abdel-Karim al Quchayri (Mort en 465 de l'Hégire) Extrait de son Tafsir du Qur'an " Lata'if al-Isharat"
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Inanna-Ishtar ou l'Isha
Bas-relief représentant une déesse ailée- Epoque du règne d'Hammurabi, début du IIe millénaire av.JC- Londres, the British Museum.
Hier, tandis que moi, la reine, je tuais le temps! Hier, tandis que moi, Inanna, je tuais le temps, je tuais le temps à danser, A chanter tout le jour, jusqu'à la tombée de la nuit, Il m'a rejointe, il m'a rejointe! Le Seigneur m'a retenu la main dans sa main:
Ushumgalanna m'a embrassée,... Poème extrait du livre "le mariage sacré" de S.N. Kramer
Voici un basrelief représentant ce que les archéologues ont nommé "la reine de la nuit". Il s'agirait soit d'InannaIshtar la désse de l'amour et de la guerre (que reprendra plus tard le mythe d'Athéna), soit de sa soeur aînée Ereshkigal déesse chtonienne des enfers.Ce qui selon moi sont les deux facettes d'une même énergie. Cette représentation de la déesse me rappelle étrangement le mythe de Mélusine que j'ai évoqué dans mon sujet précédant. On remarque le même corps de femme ailé aux formes sensuelles doublé de cette partie basse animale. Mélusine et Ishtar seraitelle apparentée malgré les quelques millénaires qui les séparent? On peut dire que Mélusine subit un viol en étant surprise par Raymondin. Il y a un mythe sumérien qui raconte un viol similaire concernant InannaIshtar. De plus, Mélusine interdit à son époux de venir la voir le sixième jour de chaque semaine, le samedi donc, qui est un jour particulier puisqu'il renvoit au Shabbat des hébreux, c'est à dire au sixième jour de la création, le jour où Dieu contemplant sa création, se repose. Pour comprendre comment je papillone impunément de Mélusine à Inanna puis à la Bible, voici un extrait du mythe du viol d'Inanna prélevé dans le livre "Le berceau de la civilisation" aux éditions Time Life:
Un jour, Inanna- Ishtar grimpa sur une montagne pour observer le pays de Sumer afin d'y distinguer les méchants des justes. Cette entreprise est décrite par les
termes suivants : « permettre au Mé de manifester sa perfection ». (le Mé étant les Lois universelles ou hors contexte... le Tao) Inanna, fatiguée par son inspection des cieux et de la terre pour déterminer qui était les innocents et les coupables, s'allongea pour se reposer à l'ombre d'un peuplier. Dans ce mythe, le Mé est représenté par sept tablettes sacrées portées par la déesse sur ses genoux. La voyant allongée non loin de son jardin, Shou-kaletouda s'approcha et se coucha près d'elle. Il dénoua les tablettes et la pénétra durant son sommeil. Avant l'aube, il retourna dans son jardin avec les tablettes.
Reconstitution de la porte d'Ishtar en Irak, une des entrées de la ville de Babylone.
Inutile de préciser que la colère d'Inanna fut terrible et qu'elle remua ciel et terre pour retrouver le double violeur. Certes, il n'y a pas ici la même histoire d'amour qu'entre Mélusine et Raymondin mais on y retrouve ce thème de l'intrusion. Intrusion d'un personnage noninitié aux mystères et qui provoque ainsi soit sa propre mort, soit la fin d'un amour ce qui équivaut à la même chose. Mais quelle est cette entreprise étrange qu'effectue la déesse à séparer le bon du mauvais? N'estce pas le but même de toute méditation? Prendre conscience de ce qui est destiné à disparaître et ce qui est destiné à durer...
Le mythe de Mélusine et d'Ishtar nous renvoie donc au mystère de l'homme, un mystère intérieur qui nous est caché et qui ne peut être dévoilé avant l'heure. Nous pouvons constater parmi de nombreux mythes fondateurs humains en particulier dans les cosmogonies, que les textes semblent rejoindre un seule et même sens. Le mythe murmure des vérités cachées en nous en attente d'être reconnues. Dans son analyse admirable de la genèse en langue hébraïque dans le féminin de l'être, Annick de Souzenelle revient sur la création de l'homme (dans son sens d'être humain et non masculin) et sur celle de sa part féminine., la Ishah: Son pôle femelle, ses « cieux », ses ténèbres, le potentiel inouï de son futur accomplissement; cet autre pôle est aussi appelé Adamah en tant que mère des profondeurs de qui il naîtra au fur et à mesure qu'il la « travaillera » et fera œuvre mâle en elle. En elle aussi il prend contact avec sa « semence », son Nom Germe, le noyau de son être, le Verbe qu'il est en puissance et qui, avec son esprit, est appelé « chair » (basar): « Dieu scelle la chair dans les profondeurs. » Et ce mot « profondeur » (Tahténah) a une connotation de « mariage ».
Chagall le cantique des cantiques Cette histoire de mariage nous renvoie au rituel très ancien du Mariage sacré pratiqué en Mésopotamie ancienne comme l'atteste l'assyriologue Samuel Noah Kramer dans son ouvrage: le mariage sacré: Grâce à un certain nombre de textes littéraires écrits en sumérien: mythes, surtout hymnes et chants liturgiques, ou poèmes de cour, nous sommes informés qu'il existait en Mésopotamie ancienne, au moins jusque vers le début du II ième millénaire, une croyance selon laquelle, non seulement les dieux,
anthropomorphes se mariaient entre eux comme faisaient les hommes, et non seulement – s'agissant d'aussi béats et chanceux personnages – leur union était forcément heureuse, c'est à dire féconde, mais elle pouvait à la fois servir de modèle à la fécondité icibas et la provoquer, la garantir. Comme le monde surnaturel était obligatoirement invisible, nul mortel ne pouvant y avoir accès, et qu'on était par ailleurs convaincu sur le plan religieux, de la validité de la « substitution »: du remplacement possible de n'importe quel être par un autre, les dieux, absents de la terre, pouvaient donc se trouver légitimement représentés et suppléés par des hommes de chair et d'os, et, sur ce point précis qui nous retient à présent, leur Mariage pouvait donc liturgiquement s'accomplir, entre un homme et une femme censés prendre leur nom et place, et réaliser leur activité fécondatrice et bénéfique. De nombreux poèmes chantent les noces de la déesse Inanna avec le berger Dumuzi son bienaimé de manière parfois très explicite: « Quant à moi, à ma vulve, à moi, tertre rebondi, Moi, Jouvencelle, qui me labourera? Ma vulve, ce terrain humide que je suis, Moi, Reine, qui y mettra se boeufs (delabour)? » « Sitôt que du « giron » du roi l' « eau(ducoeur) » eût jailli, A ses côtés sortirent les plantes, à ses côtés poussa le grain: Steppe et vergers, près de lui, se chargèrent de luxuriance! Tandis qu'en la Maisondevie, dans le Palais royal, sa « femme » demeurait près de lui en liesse; Qu'en la Maisondevie, dans le Palais royal, Inanna demeurait près de lui en liesse! » Le mariage sacré de S.N. Kramer On remarque que la déesse dans son élan amoureux invite son bienaimé à labourer la terre, sa terre, mouvement sexuel physique mais surtout mouvement spirituel indispensable du retour à soi qui s'apparente à un vaetvient, une respiration. Cette terre n'estelle pas la Adamah, la terre promise, dans laquelle sommeille le germe de l'Illumination?Ces chants célébrants l'union entre le berger Dumuzi fils d'Enki (notons que l'homme est simple un berger et non un roi, ni un dieu, il s'agit donc de l'homme non encore initié) et la déesse Ishtar, rappelle l'union symbolique représentée par Adam et son Ishah dans la genèse.
'Esh est le feu, 'Ishah est la feu! La matrice d'eau à ce nouvel étage d'épousailles devient matrice de feu. En elle 'Ish (Adama ou l'époux) doit épouser 'Ishah pour se verticaliser afin de devenir le Verbe (…). Annick de Souzenelle
Ainsi apparaît le mythe de Lilith, citée une fois dans la bible par le prophète Isaïe, qui semble être cette même ishah que l'Adam doit reconquérir, mais sous son aspect sombre comme son nom l'évoque: « la nuit ». Elle est ce Mystère terré au fonde de nous, dans notre part d'inconscience et à laquelle nous avons donné les masques les plus difformes afin de ne pas être tenté de les lui ôter. Libérer le germe du Soi, c'est labourer la Terre, donc plonger ses mains dans la boue, dans le noir fertile, percer l'abcès purulent des blessures de l'âme, et réaliser ainsi que toute fleur prend racine dans le fumier. En effet, Lilith fait partie de ces personnages ambigüe comme Mélusine, Ishtar, ou la reine de Saba, tentatrice qui met l'homme au défi et se moque de son orgueil. Elle est gardienne de l'Ombre, de notre blessure primordiale, celle qui nous a jeté hors du paradis d'Eden et nous laisse en exil de Dieu...en exil de Soi. Cette blessure est le sceau même de notre libération. A l'inverse, Ève est cette part de féminité en nous non réalisée, l'aspect bridé et domestiqué de la conscience par une morale ou des croyances réductrices. Celle qui nous tient attachés aux apparences du monde extérieur faisant de nous un animal en exil, inconscient de son essence divine. C'est la terre laissée en friche où rien d'autre ne pousse que la mauvaise herbe. Ishtar est la déesse ceinturée d'étoiles à l'instar d'Isis et de Nout; elle symbolise ainsi la part céleste que nous avons oublié. Elle est aussi assimilée à Zib, l'étoile du matin, qui devint la Vénus des romains, puis plus tard l'étoile du berger par les chrétiens.
Ainsi Ishtar, étoile du berger, n'estelle pas celle qui guida les Rois mages jusqu'à celui qui devait, par l'enseignement de sa vie, ouvrir la Voie aux hommes. Celui qui donna à l'Adam le chemin pour retrouver la chambre nuptiale et célébrer à nouveau les noces entre l'époux et Isha l'épouse flamboyante. C'est ce murmure d'amour incessant que souffle chaque mythe, chaque légende et chaque conte. Retrouver cette chambre secrète en soi pour le Bienaimé du Cantique des Cantique puisse retrouver sa bienaimée, en prenant conscience que ces retrouvailles ne peuvent être forcées comme nous l'enseigne les histoires parallèles d'Ishtar et Mélusine. Il faut laisser à l'épouse le temps de se dévoiler: Je vous adjure, filles de Ieroushalaîm, par les gazelles ou par les biches du champ, n'éveillez pas, ne réveillez pas l'amour avant qu'il le désire !
Annick de Souzenelle (Cheminer... p. 278/79) Nous sommes exilés de notre féminin intérieur qui est un potentiel inouï en nous-même et que les physiciens découvrent, l’appelant le «réel voilé» de toutes choses, soit le monde imaginal. Nous ne voyons que la coque des choses et de nous-même. Et nous sommes invités à casser cette coque pour aller vers la totalité de nous-même et de toutes choses, comme Jacob est invité à casser la coque de l’»amande» sur laquelle il s’endort et voit en songe l’échelle qui le mène jusqu’à son Seigneur. Et l’échelle est parcourue du haut en bas et de bas en haut par les anges.
P.Y. A - L’échelle de Jacob est une belle image ; toutes les sortes d’Anges apparaissent sur celle-ci : elles sont célestes comme terrestres... (c’est moi qui souligne)
THE HISTORY OF HUMANITY by tonabamiro @ 2011-01-15 – 14:35:03
By Annick de Souzenelle (The following article was taken from a site. It was written by Annick De Souzenelle and was written in French. Permission was given on the site to anyone who would like to use the article to do so. I have translated the article from French to the best of my ability. Any errors due to translation are entirely mine). The Book of Genesis is that of our origins, but the third chapter of this book, called that of the fall, reveals a drama being played out in the Creation and Adam - first man perhaps, but certainly all mankind - Man is thus expelled from the Garden of Eden, that is to say, his within, he is totally deported to the exterior of himself, and has no more regard for that which is within described in the first two chapters of Genesis. He thinks he has become god reigning over the cosmos outside since he took the fruit of the Tree of Knowledge, promising deification, according to to the serpent. (I use the word man with a capital letter to distinguish it from the same word for man in relation to women. Man is humanity - men and women.)
When we reach the world, we're all this Adam, this human being, estranged from his inner and conditioned by one's senses and the relationship it establishes between him and the outside world, the latter being subject to the rhythm of historical time: past -Present-Future. It is in this conditioning from which Man is exiled from himself, that our eyes have read and our intelligence have understood the first three chapters of Genesis, while the first two reflect the situation of Adam before the fall and the third is the turning point o the previous event, and also our situation of exile. This original state is not subject to historical time and it is that of the interior of Adam, that every human being carries within him in his great forgotten profoundness. Reading under this new consciousness, the book of Genesis is that of our foundational reality, obscured by the fall, but still present in the heart of each of us, in part unsuspected by one, its East, the very ancient, says the Bible . The first word of Genesis, Bereshit, can no longer be translated as "the beginning" but "in principle", what is enunciated elsewhere by the Greek (arch) and Latin (in principio). This principle lives in us and we continue to ignore it! The text of the Torah is connected to the Word of God The Hebrew text of the Torah was originally written without any break between words ever being introduced: the words were separated according to the comprehension one felt better conveyed the message, without eradicating provided other aspects of this message, just like a music played subtly on the other octaves, depending on different hyphenation of text. Adding to this that the Hebrew Alphabet did not have vowels, tradition allows us to contemplate the infinite fluidity of the language which it invites the seventy levels of reading; seventy! but essentially four levels expressed by the four letters of the word pardes, PRDS, which means "orchard." Enter the first orchard and taste its fruit. It is the pshat, of which it is very simple, and this level, as I just said, reflects an inadequate historical reality; it is one on which we hold in our state of exile,it is that which only is proposed to our translators and we are far from sufficiently nourished by it, because it is the outer man who gives meaning when it is the inner Man who seeks and finds (dissatisfied one closes the Bible and goes to seek other traditions for a supplement for life!). The second is the orchard remez, those who blink; a soul palpitates behind the letter, a heart beats, a respiration takes shape between the text and the divine Word, the divine creator. The fruits of this garden open our minds to the symbolic dimension of the message inside. The interior Man is concerned and sits at the banquet, he sits at the table for a feast.
The third is the darash orchard. In this one, one returns to the reality, the foundation, one searches its riches; its fruits fill us up; but the message delivered demands a total return towards the inward, toward the interior of one's being, being left of fallow ground. Until then because the message belongs to register of ontological laws - those of the state of Adam before his from exile - laws that structure things created. At this level, and inevitable daily realization, the outward man must begin to fade out before the inward man. To examine and to demand overlap in a manner distinct but not separable, on this root darash;, this means that the same energy holds them together, and that anyone who examines the text and who finds it open to him, enters in the "exigence" of actualization of what is delivered to him and what is required of him. This is a lifetime commitment, a commitment very unassuring with respect to the views that are imposed until then, by the norms formed on the exterior and which it is necessary to contest against. Given the misunderstanding or even collective rejection by him due to the formidable views formerly held, it might be difficult to change. Anyone who has this experience and who obeys the order of this new message, sees the text a little more open to him, but with a new requirement. The text is like two lovers, in which one opens up her her veil at the caress of the lover, in a loving relationship, one that is demanding and bewildering at the same time. She veils herself until she delivers her secret, because such is the name of the fourth orchard. Sod is the secret that no one can be introduced without having traversed all the other orchards, which means without having eaten of their fruit, having acquired the force thus to attain to the totality of himself; no one could further be introduced inside this sanctuary which is the "promised land" without God opening the door to him. Inside the secret (chamber), and by the divine hand, the fruit of the tree of the knowledge will be presented back to him. Need to take an ontological look on how we read the Torah One can not enter into this part mentioned above without a changed ontological view. Then the word Bereshit, "in principle" turns out to be a bar-eshit, Son, I lay in a foundation or, bara-shit He creates and lays foundation in ... , Or other marvelous interpretations, to the point that Jewish mystics have spent their lives studying this word only the first word that tradition says contains the entire message of the Torah! St. John the Evangelist, who spoke Hebrew before the Greek, confirms it: In the principle is the Word. And the Word is the Son whose germ (seed), Image of God,founds each of us based on his East, it is the Holy Name, YHWH, present tense of the verb to be, I AM.
Having been created "image of God," Adam's vocation is to go as far and become his likeness, to be his name, he is an "I AM" in the process of becoming one . But he turns away from this path. Many biblical stories reflect this drama. One of them is very little studied and is one that focuses on energy "power" just because it is ontologically stressed in the first chapter of Genesis when God invites Adam to dominate his inner cosmos - animals of the fifth and sixth days. The third chapter commonly called that of the fall, focuses on energy "Pleasure," the fourth chapter - that of Qain - Energy "Possession". Pleasure, Possession and Power are the components of the Divine Name, those of the Fruit of the Tree of Knowledge, described by Ishah when contemplating the fruit offered by the serpent and says it good to eat, desirable for the view and valuable to succeed (good for wisdom) - (Gen 3.6). But taken from the hands of Satan, this fruit nourishes man's delinquent energy. The myth of the Tower of Babel read in full view ontological (Genesis 11:1-9) A myth is not a historical narrative, it is not a mental construct devoid of reality, as defined in the dictionary! It is presented as an account of banal reality intended to capture the inner man through the tools available to the outward man, and that means it is a reality inherent to humans, and domestic tools myth - the words and meaning of the story - have a symbolic function. In the Gospels, Christ uses this method constantly saying: He who has ears to hear let him hear... (Luke 8.8). Already Solomon in his wisdom said: It is the glory of God to conceal a thing, is the glory of the kings to search it out. (Pr 25.2) Let us open our ears of the heart, entering the royal dimension of our being and fathom the mythical story of the Tower of Babel: An the whole earth was of one language, and of one speech- Genesis 11 1. This is not about same speech and same words, but about a unity which signifies the intimacy between Man and God who alone is One. This number is a for the Hebrews, a divine name. The story places us in the East so that of the whole of Adam, but also to the East of every human being. This story concerns each of us who is capable of remembering this sacred space of our Bereshit. The text in Genesis 11 continues, And it came to pass, as they journeyed from the east, that they found a plain in the land of Shinar; and they dwelt there.Gen 11:2 Men gravitated back to their East and found a plain in the land "where one cries out and howls, whose principle is wandering," says the Hebrew word Shinar, which designates the place called Babel a few verses later in the story.
This makes one think about a new baby just newly born, where he quits an archetypal paradise to enter into in to the world where he cries, where all is cry with regard to the Divine language, to which he was hearing the archetypes in his maternal womb, and where the vertical axis of reference to the divine language seems lost. This property belongs to the existential historical time which signifies in a nutshell what the myth tells in the passage of a divine language of the interior, to the cry of our languages; although beautiful in themselves, these languages are only howls and roars as far as the Divine language is concerned. The man who turns his back on his East dithers outside of himself, totally identified with Cacophonic Babylon, deaf to the voice of the Word, to that of a language of its east. Cut off from the Word, man is desecrated from himself, his secret name - the I AM he is to become - and he comes and goes without making a landmark in this world of exile, and there is only but suffering. The biblical story confirms this level of the myth by relating that the inhabitants of Shinar said to one another, Go to, let us make brick and burn them thoroughly. And they had brick for stone, and slime they had for mortar.. This verse is the key to the story. The "stone" in Hebrew, Eben (Even), contains the name of "father" - ab - and the son's - ben -. The symbol of the stone is so revealing: is "stone" that which is "son of the father" and who can maintain a fraternal relationship with other men, in love. The Psalmist sings: The stone the builders refused, is become cornerstone (Ps 117.22). Man-stone is the one who confesses the cornerstone, Christ, Son of the Father. Simon son of Jonah, having just confessed Christ as the Son of God, Jesus acknowledges him able to reach the quality of the cornerstone, "You are Peter and upon this rock I build my Church (Mt 16.17 -18). The men of Shinar who have turned their backs on their East were detoured from the Divine Father, symbolically they became bricks and could only work bricks, they can only work as bricks. The word "brick" Lebenah in Hebrew, no longer contains the presence of the Father in his name alone that of "son" - ben - is still there, but the son who are no longer bound by unity become strangers one to another, to each other, and live by force one with another. The Hebrew slaves of the Egyptians during the 430 years of exile from the Land of Israel were also responsible for making bricks. The brick is related to the state of slavery, and even today in our world of total unconsciousness, the Man in the economic marketplace is worth has much as bricks! The city, and the tower, which was constructed by the brick-Men of Shinar, who invest all the totality of their energy, the energy they should have used to nourish the image of God in them, had they remained stone-Men related to their East, in constructing the tower. If they had remained stone-Men, they would have taken the path that leads them to the resemblance to the
Divine Name, they would become the name, everyone would have reached his I AM, the only true identity. Instead, by projecting their own design, they add: Let us make us a name, lest we be scattered over the whole earth. Man becomes his stone-NAME (accomplishment of divine seed (germ) which is the founding Image). The Man-brick, he, seeks fame, looks for renown. This "exteriorisation" is an unconscious compensation for what is lacking inside. The city then called Babel is a counterpoint to the heavenly Jerusalem, and the tower which claims to reach to the heavens, the will power of man who wants to be god. This power is expressed in all sorts of grandiose civilizations, but also in all the destructive arms, in their most admirable technologies, but also the more alarming. God therefore comes to put a stop to the the madness and folly of these men who were by their own means and techniques, capable of rediscovering the ONE language and therefore capable of realizing their designs, which implied, and which other biblical passages make us understand, no more a return to their East, no more escape from exile, and no more receptive to the divine pardon, to divine tenderness. The intervention from above is therefore a work of salvation: and even though much painful to Man at first, and much incomprehensible at the their level of unconsciousness, seem unfair if it is merciful on the part of Him awaiting the reversal of humanity towards Himself. Man, denounced as a prostitute given to the false husband - the diabolique Satan - is constantly called by God, the one true Bridegroom, to be married to him. Therefore, behold, I will allure her, and bring her into the wilderness, and speak comfortably unto her(Hosea 2:14) For thy Maker [is] thine husband; the LORD of hosts [is] his name; and thy Redeemer the Holy One of Israel; The God of the whole earth shall he be called.(Is 54.5). The return of Man, the pardon of God, God's forgiveness The entire Bible is a great love story between God and His Creation, between God and man. But in the blindness of his exile, Man is unable to enter the intelligence of the events that invite to the wedding, he will have a lot of suffering - not punitive, but consecutive to his expulsion from God and of himself - for him to hear,listen, again this language,the divine language. Indeed, through the myth of the fall, this is very clear, Man has let himself be espoused by the serpent -Satan. The new husband of humanity devours his wife, he "eats the dust," that is to say the multiple energies of Adamah - interior of Adam - entrusted to its growth. In this constant interference, Man can not be built as the Son - and at best, he obeys the law outside and tries to do good and not do evil. But in these categories of good and evil, "the dust of energy," which Man ignores the presence in himself, is not so far invested in the work completion and accomplishment,they are devoured by Satan who exercises a devastating power over Man. Man is enslaved.
In the sweat of thy face shalt thou eat bread, till thou return unto the ground (Adamah); for out of it wast thou taken: for dust thou [art], and unto dust shalt thou return. (Gen 3:19). You will eat your bread ... is said to Adam by the divine Spouse who warns of the consequences of his choice, which invites him with infinite tenderness to find the path with his whole being and, return to his ontological norms, and one that is liberating at that. This "return" toward the true Spouse, the One who nourishes his wife, is the focus of our lives. To quit the prostitution and enter into holiness - same word QDSH in Hebrew - is the act of turning towards the savior, a saving return savior toward the East. Leaving behind the bricks to become a stone is to distance away from Babylon and go on to Jerusalem, most many biblical expressions invite us to reconnect with the Divine Image founder, to anchor ourselves in it, to capture the likeness. And this reversal and return is possible because Christ died and rose again. All Bar-Abbas, "son of the Father," that we are, bound in the depths of the prison of exile, are released and liberated by the death and resurrection of the One who forgives and pardons his bride, and it opens his new space of accomplishment in his East. This is possible from the first instance of the fall. Redemption is coexistent with the fall because it is beyond the historical time that the work of God goes. The Divine time is that of eternity which is one radically transcendent to historic time; but by his incarnation Christ enters human history, He is - I AM, YHWH. He affirms that, saying - Before Abraham was - I AM. Or, again - If you do not believe that I AM, you remain in your sin. (Jn 8,58 and 24). The Christ who lives every moment of history, is the instant that habits each time of history. Every moment is one that remains empty for Man-brick, identified by the situation of exile that he normalizes and to the human soul-group that the person has not emerged - but that same instant, the Man-stone of eternity is heavy, heavy with the I AM Presence, rich with all the pardons, open to all possibilities. In this light, we can better understand the two stories above that of the Tower of Babel which as I said earlier, they expressed, with this last one, the aspects "pleasure, possession and power" of the fall. In the third chapter of Genesis - the aspect "pleasure" God speaks to the serpent saying I will put enmity between thee and the woman (Ishah), and between thy seed and her seed; It shall bruise thy head, and thou shall bruise his heel; (Gen 3:15)
1 It is to make a mistake in grammar to translate seed by "it." The seed, Zera, in Hebrew is a masculine, and the verb to which the word is subject is third person singular masculine. The - seed - the serpent is Satan. The seed of Ishah, that is to say, all human being's in their interior, is the Christ, the Word of God, principle of the creation. The historic victory of Christ over Satan can not only belong to a future that precedes Christ's life and to the period that follows, but it can only be traduced in this verse by a present, because, lived by Christ, YHWH is God, he is from eternity and lives each moment in history, from the beginning to the end of time of exile. Now if we look to the myth of Qain - aspect "possession": the verb qanoh means to "acquire" we have to deal with the Man-brick Babel, who has no regard to his inner Ishah and accordingly the one that leans on the "other" exterior of himself, objectively unconscious of this "other" within, which engenders only rivalry, balance of power, contempt ... "Habel his brother" is that which is presented only in his role as brother, as if he had no existence in himself, whose name means "vanity, he who is not." Indignant at what the Lord YHWH has regarded and received the of offering of this "nothing" and not his own, jealousy erupts like a fire inside Qain and he decides to kill his brother, and he executes his plan. Fire extinguished and cooled completely, Qain is destroyed by the consequences of his crime: "My punishment is too heavy to bear!" (Gen 4:13). He also discovers the ontological law that, having killed, certainly he will be killed. Then the Lord put a sign on Qain ... protective sign, a sign of forgiveness, a sign of the cross, sign of a promise of resurrection! For seven generations Qain will be protected from death, but remaining in exile and totally unconscious, he will perpetuate the crime and must go through the experience of their choice. Humanity today is still part of those generations, but perhaps we can identify at what stage we are in the collective. The son of Qain, third patriarch from Adam, is Hanok (Enoch, pronounced Ranor) and is father of the man who inaugurated the tradition of the murderers to devote himself to his own glory - to acquire fame as his brothers in the Tower of Babel! - You could say he laid the first brick in building the tower, he built cities and civilizations in the world outside. Irad, after him, is he who continues the work of his father and built cities on urban civilization, on civilization. His name expresses this series of "city"-Ir. Mehuyaël his son, fifth generation, means "forget God."
The tower almost touches the sky, can we say continuing to bring the two stories. Man becomes a god, what did he even bother to God? At the same time he rejects God and is thereby threatened with death, divine protection is promised in his days and his presence quietly infiltrated by YHWH in the name of Mehuyaël; when he begets a son, the patriarch becomes Mehiyaël. The letter Yod registered in his name indicates a program change: in the depths of the unconscious of this slice of humanity, YHWH subtly energizes the Image of God that was forgotten. The Divine name the THWH is a sword, the Yod is the nob waw the blade, and the Heys the two sides or edges, says the Jewish Tradition of the Divine name(YHWH). This descent into the depths of Man by YHWH at this moment,Man intoxicated with his power, rejects his correspondence and and this is confirmed in the myth of the Tower of Babel. At the same time when the brick-Man may achieves unity at the top of the tower, "YHWH comes down to earth and confuses the languages." In the myth of the fall, one also finds an echo: Behold the Man has become as one (capable of attaining unity ...) lest he put the forward hand and take also of the Tree of Life ... (Gen 3:22). With Mehiyaël the sword plunges into the heart of humanity and just sterilize His works. The Sword - double edged sword, which runs throughout the Bible, that Christ came to reveal (I am not come to bring peace but a sword. Mt 10.34) determined as a precipitate in this alchemical preparation of the humanity, which has taken place over the previous generations and it makes the the "evil" and "good" go to the ultimate end of themselves, and operates a strict cleavage that leads first to their maximum wickedness and the latter towards the fulfillment of their being, before the test. When I say "wicked and the good." I use an image that matches that of the Gospels when Christ separates the sheep from the goats (Mt 25.32). The sheep, kebesh in Hebrew, is one that is "subject", which fulfills the will of the Father, the goat, Atoud, as his name gives the key to what Christ means to him, the word atoud is made from the same three letters as daat , "knowledge," but not arranged in the order of "knowledge," the goat is the one who is still in the dark mess of the unfinished, the unaccomplished, and yet is expected to later build the tree of knowledge, when its turn comes. I do not mean anything other than that by speaking "the good and the bad guys and the wicked will one day also called to return, to repentance. But at the time of cleavage, it would exercise its darkness so that the suffering of humanity would become intolerable. "My punishment is too heavy to carry." Unable to do more, the sixth patriarch then Methuhoël, who "demand the death," or mutation, a change, something other than this untenable situation. With Methushoël, humanity seems to be rushed into the eye of the storm she has raised. Also Lemek, the seventh patriarch, humanity makes its radical reversal. He takes two women, which
means that this time it makes a profound look, gazes on his Adamah-Ishah, the female, feminine in his profoundness . With him humanity realizes the divine content of the information given to Adam: You will live in slavery, "until you turn to your adamah" unto the dust energies that compose it and unto its wealth and potential and its ontological liberation. Tsilah and Adah, the two women Lemek are the space-time inside the patriarch. Here too the letters are also in disorder, but the name of the patriarch holds the promise of royalty. Melek will be the "king." Lemek for now, has a huge interior work to do and now he becomes aware of his crime. I killed a man! he exclaims. And immediately, because he enters his interiority, marries his Ishah, he sees, as are the prophets - the heavens opened, he sees the space-time inside him and humanity, he sees death and the Resurrection of Christ, so he adds at once to his confession: I killed a man for wounding me, a young man to my healing. He knows he is healed, forgiven, raised. An immense fertility process gets under way. And Shet is restored to Adam instead of Habel that Qain killed . Shet means "foundation." Mankind will continue now on a new "foundation", a new Bereshit, she will gradually come out of exile and accomplished through ten offspring with Noah, is the tenth from Adam, in linen of Shet. Noah is the one St. Hilary of Poitiers says "He is a precursor of the Messiah to come" (Treaty of mysteries 1.13), forerunner of the One who says' It is finished (John 19:30) and this will be the Resurrection. View of humanity today In light of this myth, we may ask ourselves where is our humanity today. For it is certain that this pattern applied to the mythical Hebrew people identified as a first step all the way up Messianic Israel Lemek, liberator of his progeny qaïnique, is very much like the slavery Moses brought the Hebrew people out of Egypt, and Christ is the one that promised by the aspect of Noah. But since Christ applies this same pattern in a second time to all nations, it applies all human beings. Are we are all approaching a Lemek? The emergence of the feminine world, inseparable from the discovery of the feminine within every being tempts me to say. But at the same time Mehouyaël forgetfulness of God - still presides at all official life, it also appears that the Sword of God begins to separate - the sheep from the goats - and precipitating events in a "maximalism" of suffering and madness, along the first indications of a rise of consciousness, however, plays only low role for now, but certainly will ripen when all the old structures will completely collapse. More than Lemek, we are confident of divine forgiveness, infinite love, One who is constantly calling us to forgiveness, to love each other, the total opening of the heart, place of death and resurrection
Entre le cosmique, l’humain et le divin
Le corps, lieu de notre accomplissement spirituel1 Par ANNICK DE SOUZENELLE Mes amis, j’aimerais vous dire à quel point je suis émue, profondément, surtout pour partager avec vous un sujet qui m’est cher. Cela a été le premier sujet, qui a constitué l’objet de mon écriture. C’est sûr que l’on revient toujours avec sympathie à ses premières amours, et puis surtout, c’est un sujet grandiose que celui du symbolisme du corps humain. En fait, c’est un sujet qui m’a travaillé depuis ma petite enfance. Je me souviens que lorsque j’apprenais ce qu’on appelait à ce moment-là l’Histoire sainte, j’étais étonnée du nombre assez important d’évocations du corps dans les livres sacrés et aussi dans les mythes. Vous vous souvenez comme moi du talon d’Ishah, qui est blessé dans le livre de la Genèse. Les blessures au pied, nous allons les retrouver dans les mythes grecs, dans beaucoup d’autres mythes. Un peu plus tard, nous allons retrouver Jacob, dont le nom d’ailleurs signifie aussi « le talon ». Donc, nous sommes là devant un sujet extrêmement important. Lui, il va être blessé à la hanche. Je voyais Sanson dont la force était tout entière dans les cheveux. Qu’est-ce que cela veut dire ? Pourquoi ? Qu’est-ce que sont ces lieux du corps ? Et quand je posais la question à mes maîtres, j’étais renvoyée comme étant indiscrète. Je n’avais pas à savoir ce que cela voulait dire. Le bon Dieu avait fait les choses comme cela, et puis c’était tout. Moi, j’étais évidemment frustrée. Cette question est restée vivante. Plus tard, au chevet des patients qui allaient être opérés le lendemain, puisque je devais les endormir, j’étais toujours émue de leurs angoisses, de leurs questions. Pourquoi est-ce que cela m’arrive ? Pourquoi un cancer de l’estomac ? Pourquoi une fracture ? Pourquoi, pourquoi ? Je ne savais pas leur répondre. Et je sentais confusément que si j’avais pu leur apporter une piste de réponse, ils se seraient responsabilisés devant ce qui se passait pour eux et n’auraient pas laissé toute la responsabilité au médecin, au chirurgien, en se démettant un peu de ce qui leur arrivait. Je pense que cela les aurait certainement aidés. Mais j’en étais absolument incapable, et tout cela faisait problème en moi. Je pense que cela a dû produire un chemin intérieur profond, car la réponse me fut donnée. Ou tout au moins, le chemin de réponse me fut donné dans la tradition judéo-chrétienne, que j’abordai plus tard après avoir cherché pendant longtemps. La chair, mystère de l’Homme Paradoxalement, l’hébreu n’a pas de mot pour dire le « corps ». Ce qui est tout à fait étonnant. C’est pourquoi le mot est remplacé par la « chair ». Or, la chair n’est pas le corps. C’est cela d’abord que je veux dire, parce que c’est important. La chair s’exprime dans notre corps, mais la chair est quelque chose de profond, c’est tout le mystère de l’Homme. La première fois que nous voyons apparaître ce mot dans la Bible, au deuxième chapitre de la Genèse, c’est au moment où Dieu scelle la chair dans l’autre côté d’Adam – je vous rappelle 1 Conférence
donnée à Lausanne le 13 novembre 2007 dans le cadre du cycle organisé par le Centre catholique d’études de Lausanne, en collaboration avec trilogies. 2
qu’il n’a jamais été une côte dont est sorti la femme. C’est le côté de tout être humain, son autre côté mystérieux. D’autant plus mystérieux que Dieu y scelle la chair là, dans les profondeurs de son être. On va retrouver quelques versets plus loin l’Adam. L’Adam, qui est vous et moi, l’humanité totale, chacun de nous. C’est en ce sens que son histoire nous importe. L’Adam fait l’expérience d’une grande plongée dans ses profondeurs pour aller découvrir l’autre côté de lui. Il entre dans une extase, disant : « Voici celle qui est os de mes os, et chair de ma chair. » En hébreu, le mot « os » est le mot qui est employé pour parler de la partie la plus profonde de soi. Si je veux dire moi-même dans le sens de ma plus grande profondeur, je vais dire mon « os ». Et le mot « chair » en hébreu, Basar, est un mot extrêmement
intéressant, parce qu’il contracte le premier mot de la Genèse, qui est Bereshit. Le mot Bereshit que nous traduisons très mal par « au commencement », car cela n’a jamais été le commencement de notre historicité. Le mot Bereshit signifie « dans le principe » : le principe qui nous habite, qui m’habite, qui est présent. Le langage du mythe Il faut que je fasse une petite parenthèse ici pour vous dire que nous nous trouvons, dans les premiers chapitres de la Genèse, devant des récits qui sont uniquement des mythes. Le mythe, dans un dictionnaire, est défini comme une fable. Alors je voudrais rectifier un peu les choses, parce que le mythe est le récit de quelque chose qui n’a pas de langage, c'est-à-dire de notre intériorité. Le mystère de notre intériorité. Le mystère va emprunter à l’Homme extérieur son langage pour se dire. Si bien que lorsque nous nous trouvons devant un récit mythique, il faut le verticaliser ou comprendre qu’il ne s’agit pas de le prendre à la lettre, mais d’entrer dans une intelligence profonde de ce à quoi il nous reconduit. Il nous ouvre à la réalité extrêmement mystérieuse, profonde, sacrée de l’Homme intérieur. C’est pourquoi Bereshit n’est pas un commencement historique. Il est vraiment le principe qui nous habite. C’est en ce sens-là que nous sommes concernés : là, maintenant, tout de suite. Le mot Bereshit – compte tenu de la souplesse extraordinaire de la langue hébraïque – je peux aussi l’entendre Bar-Eshit, « un Fils je pose ». Le mot Bar est un mot extrêmement important dans la Bible, nous allons le retrouver continuellement. Il veut dire « le grain de blé » et aussi « le fils ». C’est le mot qu’emploiera le Christ lorsqu’il dira : « Si le grain ne meurt, il ne peut porter de fruit. » Et le Fils qui nous habite, c’est une semence divine qui est déposée au coeur de chacun de nous, qui est le fondement même de notre être. C’est le mot Bar qui est là, « le Fils », que nous retrouvons dans le mot Basar qui veut dire « la chair ». L’Evangile au coeur du corps La chair, c’est la présence du Fils, la semence. Le mot « semence » est nettement exprimé au troisième et au quatrième chapitre de la Genèse. C’est la semence avec laquelle chacun de nous est ensemencé : nous sommes ensemencé de Dieu. Nous sommes ensemencé d’une étincelle divine – d’un sperme divin j’allais presque dire – que nous avons à faire croître à l’intérieur de nous. Ce qui est d’autant plus important, c’est que si je prononce le mot Basar Baser – étant donné qu’il n’y a pas de voyelle en hébreu – cela devient le verbe « informer ». Ce qui donnera d’ailleurs Bassorah, que nous appelons « les Evangiles », « la Bonne Nouvelle ». C’est l’information profonde que le Christ est venu réouvrir en nous. Je le dis toujours, je choque peut-être : le Christ n’est rien venu apporter de nouveau. Il a apporté, au contraire, quelque chose de très ancien, de ce qui est le plus antique à l’intérieur de nous, c'est-à-dire le principe même qui contient toute l’information : Basar, Baser, « l’information ». 3
Nous avons toute l’information de notre devenir au coeur de nous. Chaque cellule de notre corps est riche de cette information. C’est pourquoi, lorsque nous n’obéissons pas à cette information, qui est là déposée dans les grandes profondeurs de notre être, il est bien certain que cela créé des courts-circuits. Cela donne la maladie, toute la violence que nous voyons déferler partout. Parce que cette information n’est pas respectée, pas entendue, pas réalisée. C’est de cela dont nous mourons à l’heure actuelle. C’est pourquoi il faut que nous revenions d’une façon urgente à la compréhension des textes, des messages bibliques, des Evangiles. A ce qu’ils nous disent et à l’invitation pressante qu’ils nous font de revenir à la nécessité de faire croître la semence divine à l’intérieur de nous. L’expérience de la forme divine Notre corps est construit dans ce sens. Ne croyez pas que sa forme soit là par hasard. La forme du corps, nous la retrouvons dans l’archétype même de ce que la Bible appelle le
corps divin, ou plus exactement la forme divine. C’est l’expérience étonnante, immense, que nous pouvons découvrir avec Moïse, dans la grande aventure de sa rencontre avec Dieu. Lorsqu’il monte sur la montagne du Sinaï pour recevoir la Torah, Dieu dit de lui : « A mon serviteur Moïse, je parle bouche à bouche, et lui, il voit ma forme. » Ce bouche à bouche est traduit dans la plupart de nos bibles par « face à face ». Mais ce n’est pas suffisant : le bouche à bouche, cela veut dire le « verbe à verbe ». C’est pour cela qu’il s’agit d’un baiser divin. Moïse reçoit la Torah, nous recevons la Torah, car nous pouvons tous la recevoir dans un baiser divin. C’est une relation amoureuse, immense, intense, qui se joue là. Moïse, lui, a l’expérience de la forme divine, mot que la Bible des Septante a traduit par « gloire ». Certes, c’est aussi la gloire divine dont il a l’expérience. Mais je ne crois pas qu’il faille évacuer ce que le mot hébreu veut dire d’une façon beaucoup plus précise, c'estàdire la « forme » divine. Ne pensons pas que lorsque le Christ s’incarne, il prend la forme de l’Homme. Non, c’est l’Homme dont la forme du corps obéit à la forme divine. Celle-ci est archétypale, fondamentale. C’est pourquoi l’Homme à l’image de Dieu est image de Dieu jusque dans la forme de son corps et jusque dans les informations qui sont contenues dans chaque cellule du corps. Et l’information fondamentale qui est là, c’est celle qui demande, qui nous demande à chacun, avec urgence, de faire croître la semence, de la faire grandir à l’intérieur de nous, de devenir des Fils. Enfanter le « Fils » divin Dans les Evangiles, les apôtres viennent trouver Jésus, qui est à l’intérieur d’une maison. Comprenons ce que veut dire « à l’intérieur ». Les apôtres sont à l’extérieur et ils viennent dire : « Ta mère te cherche. » Jésus dit : « Qui est ma mère ? » Jésus sait bien qui est sa mère biologique, mais s’il pose cette question, c’est – comme dans une maïeutique – qu’il veut faire dire aux apôtres que ce sont eux qui sont « mère » du Christ. Comme nous tous. C’est d’ailleurs ce que Jésus va confirmer en disant : « Vous êtes ma mère quand vous faites la volonté de mon Père. » Et la volonté du Père n’est pas la volonté d’un monarque absolu. C’est notre liberté fondamentale, qui a choisi de vivre la grande aventure, la bouleversante aventure d’être un espace matriciel de la croissance du Fils à l’intérieur de nous. Quand je dis « espace matriciel », c’est contenu dans le nom d’Adam. Adam, si vous prenez la première et la dernière lettre, c’est le mot « aime » en hébreu, qui veut dire la « mère ». Nous sommes tous « mère », hommes et femmes ici. Il ne s’agit pas, bien sûr, d’une maternité biologique. Nous seules, femmes, nous avons la maternité biologique en image. Mais ontologiquement, fondamentalement, nous sommes tous enceint de Dieu et nous avons tous à nous mettre au monde. Et nous l’avons complètement oublié, tellement nous sommes polarisé sur le monde extérieur. C’est cela le drame de ce qui fut appelé « l’exil » au 4
troisième chapitre de la Genèse – j’ai éradiqué le mot « chute » de mon vocabulaire, parce que ce mot n’existe pas dans les textes. En revanche, nous sommes en exil de nous-même, en exil de notre intériorité, en exil de l’autre côté de nous, qui est lourd de la présence divine. L’autre côté de nous, qui est une matrice, une immense matrice dans laquelle nous avons à porter en gestation, pendant toute notre vie, le Fils divin. Nous avons à le devenir : c’est grandiose, immense. C’est lorsque nous serons devenu Fils que nous serons, à ce moment-là, épousé de Dieu. Nous sommes appelé à être épousé de Dieu. Pour l’instant, dans notre situation d’exil, nous ne sommes même pas encore des Hommes. Nous sommes un monde animal. Il n’y a qu’à ouvrir les journaux : un monde terriblement cruel. Nous vivons dans des rapports de force et nous nous entretuons. C’est d’ailleurs ce qui est décrit dans le livre de la Genèse avec tous les descendants de Caïn, qui sont tous des tueurs. Mais vient un moment où il y a un retournement. Ensuite, c’est toute une humanité qui est en train de se redresser. Nous sommes proche de cette charnière. Il faut que nous en devenions conscient.
Matrice d’eau : découvrir l’autre côté de l’être Il nous faut donc obéir à l’instance du corps. En tant que matrice, le corps que nous sommes est composé essentiellement de trois matrices : la matrice d’eau au niveau du ventre, la matrice de feu au niveau de la poitrine et la matrice du crâne. Ce qui, dans les Evangiles, va être appelé baptême d’eau, baptême de feu, baptême du crâne. Nous allons retrouver cela dans toutes les traditions. Il n’y en a aucune qui ne connaisse les trois matrices. Les Chinois les appellent des « champs de cinabre ». Le cinabre est une matière, un corps qui va reconduire l’Homme à son éternité, pour autant qu’il assume les mutations successives. C’est de ces trois matrices que je vais vous parler, parce que je ne peux pas entrer dans tous les aspects du symbolisme du corps. Ces trois matrices sont notre fonction essentielle. Malheureusement, nous ne le savons pas. Nous restons continuellement dans la matrice d’eau. Nous sommes confondu avec elle, noyé en elle, c'est-à-dire noyé dans notre inconscient, noyé dans un monde psychique cruel, où nous nourrissons l’autre côté qui est le Satan. Ce qui est exprimé d’une façon tout à fait formelle au troisième chapitre de la Genèse, où le Satan mange notre poussière. Qu’estce que la poussière qui est en nous ? C’est la poussière d’énergies potentielles qui nous habitent. L’autre côté de nous est infiniment riche d’énergies potentielles. C’est un cosmos entier. Quand il nous est dit, dès le départ, que « dans le principe, Dieu créé les cieux et la terre », cela signifie que les cieux sont à l’intérieur de nous. Les Evangiles vont le confirmer. Les cieux, c’est un cosmos immense, un potentiel immense, peuplé de vivants – haiot, la « vie » en hébreu. Ces vivants sont symbolisés par des animaux. Des animaux que nous connaissons dans notre monde extérieur, mais qui sont à l’intérieur de nous. Souvenez-vous de Basile de Césaré, en particulier, qui dit : « Ça hurle, ça pique, ça mord, ça déchire, ça tue à l’intérieur de nous. » Nous avons une puissance, une énergie, une violence énorme à l’intérieur de nous. D’ailleurs, dans les Evangiles, le Christ dit : « Si vous voulez conquérir le royaume, pénétrez votre violence. » Allez nommer tous ces animaux, là. En effet, Adam va être appelé à nommer les animaux, non pas pour voir s’il appelle un chat un chat, et un tigre un tigre. Mais pour nommer, pour voir ce que cela constitue pour lui. Afin que ses énergies potentielles deviennent de l’information, que nous les intégrions. Nous savons aujourd’hui – en physique quantique – que l’énergie, c’est de l’information. De l’image divine à la ressemblance Nous avons à construire l’Arbre de la connaissance pour en devenir le fruit. Le fruit, c’est le Saint Nom. C’est la semence, symbolisée par la petite lettre Yod en hébreu, – la plus petite lettre de l’alphabet – qui elle-même est le symbole de YHWH. Un nom imprononçable. 5
Je respecte la tradition de nos frères juifs en ne le prononçant pas, mais en l’épelant : Yod – Hé – Vav – Hé. Quatre lettres qui nous composent. Nous avons tous à le devenir. Lorsque Moïse fait l’expérience bouleversante du Buisson ardent, il entend la voix de YHWH, qui lui dit : « Je suis qui je suis en devenir. » On oublie toujours de traduire cette dimension du devenir. Or, il s’agit bien d’un inaccompli, c'est-à-dire que Moïse se trouve devant son devenir, le Saint Nom, YHWH. Que nous avons tous à devenir dans notre nom secret, chacun de nous. Que nous construirons en intégrant toutes les énergies potentielles, qui sont dans nos cieux intérieurs. Mais nous n’avons pas encore compris cela. Le drame de l’oubli : c’est pourquoi il est important de sentir à quel point nous sommes dans une errance dans la matrice d’eau. Dans une errance, car nous allons à droite, à gauche, puis nous retournons à droite pour repartir à gauche, etc. Nous sommes comme des poissons dans l’eau, mais qui n’y sont pas tellement bien et qui ne savent pas très bien où ils vont. Heureusement, ils sont saisis dans un « faire divino-humain ». Je veux dire par là, qu’au sixième jour de la Genèse, lorsque Dieu crée l’Adam, c'est-à-dire qu’il nous crée – c’est un présent, c’est à chaque instant, ce n’est pas une histoire passée – il est dit qu’« Il nous crée dans l’image, mais nous allons être fait à la ressemblance divine », capable de
ressemblance divine. Il y a deux verbes en hébreu, qui sont recouverts par un seul verbe dans la Septante. On dit souvent que nous sommes créés à l’image et à la ressemblance de Dieu. C’est faux : l’Homme est créé dans l’image seule, mais il va faire et il va être fait par Dieu pour aller vers la totalité de lui-même, vers la ressemblance. C’est pourquoi la Bible est pleine de : « Va vers toi. » Une injection que Dieu donne à Abraham, lorsqu’il n’est encore qu’Abram, parce qu’il est encore stérile. Mais la stérilité du couple d’Abram et Sarah, c’est notre stérilité à tous, par rapport à l’enfant qui meurt à l’intérieur de nous. Dieu va lever la stérilité d’Abram, qui va devenir du coup Abraham. Il recevra l’ordre divin, l’invitation divine : « Va vers toi. » Nous retrouvons cela dans le Cantique des cantiques. Quand le bien-aimé dit à la Shulamite : « Mais va vers toi. » Nous avons à entendre l’appel d’aller vers nous-même et de sortir de notre stérilité. C’est la première étape dans laquelle l’humanité est encore tout entière, dramatiquement. A l’exception des êtres qui s’élèvent dans une sainteté, dans une beauté admirable, et il y en a de plus en plus. Mais le collectif en général se trouve dans une inconscience absolument tragique. Il s’en contente et compense cela par le consumérisme. Chercher le bonheur à l’extérieur, acquérir à l’extérieur. Au lieu d’acquérir le Royaume, au lieu d’aller nommer tous les animaux qui nous habitent et qui nous dévorent. Nous avons vraiment à faire un travail extraordinaire à l’intérieur de nous. La matrice d’eau va être mise en ordre, à peu près, par la loi morale : « Tu dois, tu ne dois pas ; c’est bien, c’est mal. » Dans le fond, nous sommes obligés d’éduquer l’être comme cela. Mais il y a un moment où cela n’a plus de poids pour nous, ce n’est plus possible. Il faut que nous sortions de cela pour aller vers un autre paradigme. Le bien et le mal ne sont pas ontologiques. Dieu n’a pas créé le bien et le mal. L’Arbre de la connaissance, ce n’est pas celui du bien et du mal ; il est celui de ce qui est accompli de nous et de ce qui n’est pas encore accompli. Il s’agit d’arriver à cet accomplissement. L’expérience de l’errance L’errance est symbolisée par les intestins avec tous les méandres intestinaux. Les intestins ont deux fonctions fondamentales : celle de l’assimilation du bol alimentaire et celle de l’élimination. L’errance n’est d’ailleurs pas totalement stérile. Car si nous étudions vraiment les textes et si nous étudions aussi les expériences et les mythes, nous allons voir que durant toute l’errance, nous acquérons – c’est l’assimilation du bol alimentaire – beaucoup plus de connaissances que nous ne le pensons. Elles sont là, mais elles n’arrivent pas encore au niveau du cortex. Prenez par exemple Oedipe, qui va voir la Pythie de Delphes pour lui demander : « Qui suis-je ? » Voilà l’interrogation essentielle, alors qu’il est dans l’errance. Mais, plus tard, quand il arrive devant la Sphinge, à ce moment-là, la 6
connaissance arrive. Il est là dans la grande puissance d’un face à face avec lui-même que symbolise la Sphinge. C’est pourquoi lorsqu’elle lui dit : « Quel est l’animal qui est sur quatre pattes le matin, sur deux pieds à midi, sur trois pieds le soir ? », il sait que c’est l’Homme. Non pas l’Homme qui marche sur quatre pattes parce qu’il est un petit bébé, mais parce que nous sommes identifié à notre monde animal intérieur. La verticalisation, se mettre sur ses deux pieds – le midi de notre être – demande justement de prendre une distance par rapport à la matrice d’eau, de la voir et d’entrer en elle par le baptême. Dans d’autres traditions, ce seront d’autres rites, comme par exemple la circoncision chez nos frères juifs, etc. Mais nous retrouvons partout le symbole de l’eau dans toutes les traditions – un symbole pénitentiel – où nous prenons conscience de notre inaccompli. Nous ne voyons qu’après avoir tout essayé : nous avons été à droite, à gauche, etc. C’est une démarche négative : ce n’est pas cela, ni cela, ni cela. Nous ne pouvons aller vers nous-même que par une démarche négative. Nous ne sommes jamais réduit à ce que nous croyons être de nous-même. Nous pouvons toujours aller plus loin en nous-même, toujours plus loin.
C’est la même démarche que la recherche de Dieu. Dieu, cette semence divine, est en nous. Nous ne pouvons absolument pas nous arrêter à « Dieu est ceci ou Dieu est cela » : Il n’est pas. C’est dans l’errance apparente – que nous n’avons pas à nommer échec mais expérience – que nous arriverons un jour à ce qui correspond au niveau de la deuxième lombaire. A ce niveau, il se passe quelque chose de tout à fait intéressant. D’abord, c’est l’aboutissement de la moelle épinière. La moelle épinière est arrivée jusqu’au sacrum pendant les trois premiers mois de la vie intra-utérine ; puis elle est remontée jusqu’à la deuxième lombaire. Elle a laissé une mémoire au niveau du sacrum – c’est très probablement pour cela que le sacrum est appelé « sacrum » et les premières vertèbres « sacrées ». Parce que la moelle épinière est comme la sève de l’Arbre de vie, qui est descendu jusqu’au sacrum et qui est remonté jusqu’à la deuxième lombaire. Si bien que nous sommes entre ces deux pôles – comme entre les deux pôles d’un aimant – et conduit par un Dieu amoureux de nous, qui nous appelle et nous conduit jusqu’à la deuxième lombaire. A cet endroit-là, les Chinois posent un point d’acupuncture extrêmement important, qui s’appelle le ming meng. Ils disent qu’à ce niveau, le ciel antérieur passe dans le ciel postérieur. C'est-à-dire que nous faisons une expérience céleste. Nous entrons dans une résonance avec le noyau divin de nos profondeurs. L’accession au « Je suis » Là, nous entrons en résonance avec le petit Yod – qui est le « Fils » – sans savoir encore que c’est Lui. Nous ne savons rien, mais c’est inoubliable. C’est l’expérience que va faire Jacob lorsqu’il va dormir au pied de l’échelle qui va se dérouler devant lui pendant la nuit. En haut de l’échelle, le Seigneur YHWH l’attend. Jacob devra monter sur l’échelle ; les anges montent et descendent le long de cette échelle. Dans cet archétype fantastique est décrite toute une dynamique, qui va de l’image jusqu’à la ressemblance. Le Jacob qui s’est endormi la veille n’est pas le même homme lorsqu’il se réveille le lendemain. Il ne sait pas encore où il va, mais il sait qu’il y a un sens à sa recherche, à son chemin. C’est alors qu’il se met en route pour aller prendre une épouse. L’expérience du Yod, c’est aussi le moment du Buisson ardent pour Moïse, qui est appelé par le Saint Nom. Celui-ci révèle à Moïse ce qu’il est, qu’il n’est pas encore accompli mais sur la voie de l’accomplissement. C’est aussi le moment où l’apôtre Paul est mis à bas de son cheval sur le chemin de Damas. Il voit le Seigneur, le Christ, qui est le YHWH de l’Ancien Testament. Dans les Evangiles, le Christ dit : « Avant qu’Abraham fut, je suis. » Je suis, c’est la dimension d’éternité, qui est présente en chaque instant de notre temps historique. Chaque instant de notre temps, soit nous le réduisons au temps historique, et c’est la banalité, l’ennui, la répétition et la banalisation. Soit nous le verticalisons, dans l’éternité avec la présence divine, présence que nous pourrons vivre dans un ancrage en Lui. C’est ce qui 7
se passe là, dans l’expérience du ming meng – je reprends l’expression chinoise – cette expérience que nous faisons à ce moment-là. Expérience lumineuse, étonnante, du fait qu’on n’est plus le même après et qu’on prend une distance par rapport au collectif. On sait que la matrice d’eau devient matricielle. Elle n’est plus le lieu de l’errance, mais un lieu dans lequel on va baigner de façon consciente pour aller nommer tous les animaux qui le hantent, toutes les énergies qui l’habitent, afin d’accomplir la totalité du monde animal, de la potentialité. Une potentialité que les physiciens de la physique quantique retrouvent aujourd’hui. Il semble en effet que le moindre morceau de matière est fait d’états différents. Un assemblage d’états dont un seul est observable. Mais il y a tous les autres, qui contiennent un potentiel incroyable et qui ont l’information de leur devenir. Nous retrouvons cela au niveau de notre être. Lorsque l’Homme obéit à cet ancrage, à cette information, et qu’il prend une distance par rapport au collectif, il entre dans sa véritable personne. Il reste le fils et la fille de papa et maman, bien sûr, mais cela demeure secondaire. Il entre dans une autre identité, une
identité divine. C’est dans ce sens-là que le mythe d’OEdipe – allant chercher son identité auprès de la Pythie de Delphes : « Qui suis-je ? » – est tellement intéressant. Nous pouvons lire le mythe d’Oedipe à un tout autre niveau de lecture que celui de Freud, bien que celui de Freud soit tout à fait juste au niveau psychologique. Il peut être lu aussi à un niveau ontologique. Mais revenons à cette sortie de la matrice d’eau. Après avoir fait l’expérience du numineux à l’intérieur de nous – qui peut être très différente pour chacun de nous – nous ne sommes plus le même après. Nous savons que le divin est là et que nous avons à le devenir. Nous sommes donc dans cet instant du « Je suis ». A vivre dans la plénitude de l’instant, si dur soit-il, car quelquefois il est très douloureux à vivre. Lorsque nous avons déjà travaillé et pris conscience que ce n’était plus un problème de bien et de mal, de permis et de défendu, mais qu’il s’agit d’aller vers un autre paradigme, nous prenons conscience qu’il y a une présence en nous, qui nous informe de quelque chose de tout à fait autre et de personnel. D’une liberté inaliénable qu’aucune institution extérieure ne peut entraver, ni venir aliéner. Il se créé une intelligence cachée, une sagesse quelque part en nous, qui relève du « Je suis » à l’intérieur de nous, qui fait que nous entrons dans la dimension de la personne. Un retournement radical Tant que nous étions dans la matrice d’eau, nous enfermions les énergies que nous appelions mal derrière les grilles des interdits. Maintenant, quand nous allons être conduit vers le mal, il ne s’agira plus de cela. Mais bien de prendre en main les énergies et de les transformer. Car elles sont de la future information et il conviendra de les intégrer. A ce moment-là, c’est un retournement radical que nous avons à faire à l’intérieur de nous. C’est ce que Dieu dit à Adam, lorsqu’Adam a mangé le fruit de l’Arbre de la connaissance avant de l’être devenu, indûment. C’est ce que nous continuons de faire, chacun de nous – là encore, c’est un présent, ce n’est pas une histoire passée, c’est maintenant, tout de suite. Dieu nous dit quand il parle à Adam : « Voilà les conséquences de ton geste, tu mangeras ton pain à la sueur de tes narines. » Cela n’a rien à voir avec une malédiction divine, avec une punition divine. Dieu est amour, mais il nous dit : « Voilà, tu es libre, tu as choisi librement de faire cela, mais en voilà les conséquences. » Tu seras donc esclave du Satan, auquel tu t’es donné. Jusqu’à ce que tu te retournes vers ta Adamah, c'est-à-dire vers ta matrice intérieure : « Parce que tu es poussière, et vers la poussière, retourne-toi. » C’est elle qui contient tout ton devenir. C’est elle qui est la richesse potentielle de ton être ; tout cela est à l’intérieur de toi. D’où la Teshouvah en hébreu, qui est le « retournement », la « métanoia ». Alors, nous entrons dans notre vraie dimension d’Homme. Cela se produit quand nous retournons vers les normes ontologiques de notre être, qui sont décrites dans les deux premiers chapitres de la Genèse. Là, nous comprenons ce que nous sommes véritablement – et non plus ce que nous entendons ordinairement par la phrase « Dieu créé l’Homme, 8
mâle et femelle, à savoir homme et femme. » Moi, Annick, je suis femelle biologiquement, mais je peux être mâle, si je me souviens de l’autre côté de moi – « mâle » est le même mot que le verbe « se souvenir » en hébreu. Si je me souviens de tout le potentiel, qui est le féminin de mon être. Féminin voilé, car confondu avec la femme que l’on voit à l’extérieur. Si je comprends qu’il s’agit du féminin voilé – du réel voilé dont parlent aujourd’hui les philosophes et les physiciens de la physique quantique. Je vais essayer d’aller vers moimême et d’enlever les voiles du féminin, afin de réaliser la totalité de moi-même. Voilà le but de ma vie, le but de nos vies à chacun. Là, nous devenons mâle, quelle que soit notre situation biologique. Mais, au contraire, tant que nous restons identifié à la matrice d’eau, identifié à l’inconscient, nous sommes tous femelle. C’est pourquoi il est dit au début du livre de Noé : « Les hommes se multipliaient sur la terre, mais ne mettaient au monde que des filles. » Je me demande comment ils pouvaient se multiplier, s’ils ne mettaient au monde que des filles ! Cela veut dire qu’ils ne mettaient au monde qu’une humanité femelle, et nous
sommes aujourd’hui une humanité femelle. Il s’agit de devenir des Hommes. Matrice du feu : lutte avec l’adversaire Il s’agit de nous redresser, de nous verticaliser véritablement aujourd’hui. C’est l’urgence. Nous entrons à ce moment-là dans la matrice de feu. Notre corps, à ce niveau-là, est une forge. C’est la vésicule biliaire, qui est la matrice de cet étage de feu. La rate et le pancréas symbolisent les terres profondes dans lesquelles nous allons chercher les énergies inaccomplies afin de les accomplir. Nous sommes là devant des organes extrêmement puissants, forts, intéressants. Nous retrouvons là, d’ailleurs, l’intelligence et la sagesse que nous avons à devenir. Intelligence dans la rate, sagesse dans le pancréas : Pan-kréas en grec, Kol-Basar en hébreu, « toute chair ». Nous retrouvons là la « chair » et l’instance de la chair qui demande à être accomplie. Nous allons saisir toutes les énergies-là pour, non plus lutter contre, mais avec elles. Pour les transformer, les intégrer. Nous ne pouvons le faire qu’avec la présence divine. Nous retrouvons ici le mythe de Job placé par Dieu dans une situation d’épreuve pour sortir de l’impasse où il se trouve. Job se croyait un être tout à fait remarquable : il était bon, généreux, etc. Comment ne pas être content de soi-même dans ces conditions ? Il était dans un narcissisme tragique, dans une impasse. Il était content de lui, il ne pouvait pas s’accomplir. Alors Dieu le met par terre, tout simplement, comme il le fera avec l’apôtre Paul. Job se révolte et certains de ses amis viennent lui faire la morale. Mais il les envoie promener : ces malheurs-là ne jouent plus pour lui. Ce n’est que quand le Seigneur luimême, YHWH, vient vers lui et lui fait visiter tous les animaux de ses profondeurs – qui commencent par le lion et se terminent par l’aigle – qu’il va muter. Nous retrouvons là le tétramorphe présent dans toutes les traditions : un animal fabuleux, avec des pieds de taureau, un corps de lion, des ailes d’aigle et un visage humain. C’est dans cet espace que nous entrons avec la guerre sainte. Une guerre qui n’est plus la guerre contre, mais la guerre avec ses énergies. J’assume mes énergies, j’assume ce passionnel et je les transforme avec l’arme de l’amour. Car il n’y a pas d’autres armes que l’amour dans la guerre sainte. L’accomplissement C’est le foie qui va thésauriser l’accompli. Dans le mythe grec de Prométhée, quand celui-ci va voler le feu du ciel dans la forge de Héphaïstos, toute la tragédie se répand sur la terre. Prométhée en prend conscience et décide de venir remettre le feu où il l’a pris. Il retourne dans la forge et replace le feu. A ce moment-là, Héphaïstos le fait entrer dans sa matrice de feu : il l’attache au sommet du mont Caucase. Là, Prométhée va assumer, pendant des nuits, la froideur de la nuit et, pendant des jours, la chaleur du jour. Pendant mille ans. Le jour, un aigle vient lui manger le foie. Qu’est-ce que cette relation de Prométhée à l’aigle ? L’aigle est – comme dans tous les mythes – gardien du seuil. Il garde 9
la porte de la matrice de feu, cette partie si importante de notre être. Avec les clavicules qui sont les petites clés qui ferment la porte. L’aigle est présent comme pour interroger Prométhée : « Est-ce que tout est accompli ou est-ce que tout n’est pas encore accompli ? Si tout n’est pas accompli, retourne dans la nuit. » L’aigle est le gardien qui, tel l’ange avec l’épée divine, garde le chemin de l’Eden, comme dans le troisième chapitre de la Genèse. Les alternances de jour et de nuit se répéteront autant de fois que cela sera nécessaire pour que tout soit accompli. Dans la nuit, on va chercher les énergies inaccomplies. On va travailler avec amour, avec puissance. La puissance qui nous est conférée par Dieu. Dans la journée, nous nous accomplissons, l’oeuvre s’accomplit. On va retrouver cela dans le mythe de Noé : la descente avec le corbeau dans les profondeurs et la montée dans la lumière avec la colombe. L’arche de Noé, c’est la matrice de feu, où Noé va accomplir la totalité de lui-même. Tous ses animaux sont rentrés dans l’arche et il va en assumer la totalité. C’est pourquoi saint Hilaire de Poitiers dit en parlant de Noé : « Quand il sort de l’arche, il est le
prémisse du Messie à venir. » Il peut dire : « Tout est accompli. » A ce moment-là, il boit du vin, il s’enivre, il se dénude, il est dans la connaissance totale. C’est l’ivresse de la connaissance totale. C’est l’ivresse de l’Esprit saint totalement acquis, totalement accompli. Après, il entre dans la tente et vient le moment de la matrice du crâne. La plus grande arme, c’est l’amour Dans la matrice de feu, nous luttons et travaillons avec. Souvenez-vous du combat de Jacob avec l’ange. Jacob voit arriver vers lui son frère Esaü, qui veut le tuer. Jacob a terriblement peur et lui fait envoyer des présents pour essayer de l’amadouer, de le faire changer d’avis. Mais Esaü décide de le tuer, car il a une rancune féroce envers son frère qui lui a pris le droit d’aînesse. C’est encore une grande histoire, bien symbolique, mais je n’ai pas le temps de vous en parler. Jacob va rester seul toute une nuit. Il se trouve là devant un monstre qu’il doit épouser: sa peur de mourir, la haine de son frère et, sans doute, tous les troupeaux de l’âme qui accourent là, qui font qu’il est dans une peur et dans un état tragique. C’est la nuit de l’âme. Toute la nuit, il va travailler avec les armes de l’amour. Il va pardonner à son frère et accepter éventuellement de mourir. Il va assumer, intégrer tous les troupeaux de l’âme. Si bien qu’à l’aube, il est vainqueur. Son frère se précipite vers lui et au lieu de le tuer, il l’embrasse. A ce moment-là, Jacob boite. Il est blessé à la hanche, parce qu’il a passé cette porte tellement importante. Là, c’est le début de la matrice de feu. Le verbe « boiter » est le même mot que le fameux « côté » – qui n’a jamais été une côte : on ne boite pas avec une côte, mais avec un côté. C’est pourquoi il s’agit de l’autre côté de nous. L’arme la plus grande, c’est l’amour. Dans le Cantique des cantiques, un des derniers versets est généralement traduit par « l’amour est plus fort que la mort ». C’est une traduction juste, mais je crois qu’il est plus juste encore de traduire : « La force de l’amour nous permet une mutation. » Car toute énergie acquise nous fait entrer dans une mutation, c'est-à-dire un nouveau champ de conscience. C’est toute la montée de conscience. C’est la grande aventure de la conscience, dont parle aussi Sri Aurobindo. C’est toute cette aventure de la vie, où nous construisons le Nom à l’intérieur de nous, où nous nous construisons. La seule arme est l’amour. L’amour, c’est transformer un animal en amour, en lumière. C’est cela la vie, la vraie vie. Nous avons constamment de tels événements dans notre vie, qui sont des faces à face où nous nous heurtons à l’adversaire. Le Satan, c’est le nom qui veut dire « l’adversaire ». Mais l’adversaire n’est pas l’ennemi. Il est celui dont le rôle ontologique est de nous montrer l’autre côté de nous-même. Il ne nous vainc que lorsque nous lui donnons la puissance. C’est à nous de lui parler et de le nommer, avec la grâce de Dieu. Car si nous sommes avec la force de Dieu, il n’a aucun pouvoir sur nous. Telle est la guerre sainte à l’intérieur de nous. C’est cela que notre corps vit et recèle. A ce moment-là, nous transformons chaque cellule de notre corps. Si j’avais un tableau, je pourrais faire un dessin 10
– chaque cellule comprend une partie capable de refaire toute la cellule. Par exemple, si je prends une cellule de la peau, il y a en elle une toute petite partie qui est capable de refaire de la peau. Tout le reste de la cellule est là d’une façon apparemment aberrante. C’est ce qui fait d’ailleurs l’objet du clonage, parce qu’avec toute une cellule, on pourrait refaire un corps tout entier. La cellule a l’information du corps tout entier. Je crois que lorsque nous faisons ce travail d’accomplissement de notre être, la partie intelligente correspond à la partie accomplie de nous et la partie apparemment aberrante à la partie inaccomplie. Je crois pouvoir dire que lorsque nous faisons un travail sur nous-même, cette partie inaccomplie s’accomplit. Notre corps s’illumine. La cellule s’illumine. A la limite, l’Homme peut devenir un Homme de lumière. Il y a des êtres comme cela – Séraphin de Sarov, par exemple – qui se sont transfigurés de leur vivant. Si vous lisez les livres d’Henri Corbin sur le soufisme, vous verrez que des êtres se sont transfigurés de leur vivant. Matrice du crâne : la résurrection
Nous avons à choisir entre la transfiguration de l’être dans l’accomplissement de la totalité de nous-même, ou une fin souvent tragique, comme par exemple dans les maisons de retraite que nous connaissons aujourd’hui. C’est un choix radical, il n’y a pas de milieu. Nous avons à prendre ce chemin de lumière, où nous sommes accompagnés d’un Dieu d’amour et d’un Satan qui n’a aucun pouvoir sur nous, si nous ne le lui donnons pas. Mais, malheureusement, nous le lui donnons souvent et nous reconduisons tous les jours le mythe que nous appelons le péché originel. Un mythe qui n’a rien d’originel, mais qui est de tous les jours, de chaque instant. Lorsque le travail est fait, nous sommes emmené dans une dernière étape de nous-même : la matrice du crâne, le lieu d’une nouvelle naissance. Qu’estce que c’est que cette nouvelle maternité ? Souvenez-vous du Tao chez les Chinois, qui naît par le sommet du crâne. Souvenez-vous de Zeus chez les grecs, qui épouse Métis, la plus haute instance de la sagesse. De leur union va être conçue celle qui naîtra sous le nom de Athéna, que Zeus porte derrière son front. Zeus assume son ultime gestation. Quand il arrive au moment des douleurs de l’accouchement, il fait appeler Héphaïstos, le Dieu du feu. Celuici arrive et fend en deux le crâne de Zeus. Athéna va sortir toute casquée d’or du crâne de Zeus. Je n’invente rien, les mythes le disent : c’est la résurrection. Qu’est-ce que la résurrection ? C’est ce que le Christ va vivre dans la matrice du crâne – le Golgotha est le « lieu du crâne ». Nous disons toujours que c’est par ses souffrances que Dieu nous guérit. Mais la souffrance est inhumaine, la souffrance n’est pas ontologique. Ce n’est pas elle qui guérit. Elle peut participer de la guérison, pour autant qu’elle soit reconduite à l’épreuve fondatrice. Lorsque le Christ descend dans les enfers, les dernières entrailles, il a traversé toute la matrice de feu. Après le baptême d’eau, il a vécu la matrice de feu durant toute sa vie publique, où il a rencontré tous les démons de l’humanité, à travers le paralytique, le sourd-muet, l’aveugle, etc. Nous ne voyons généralement que le côté superficiel du « Lève-toi et marche ». Mais il le dit aussi : « Qui a des oreilles pour entendre, entende, des yeux pour voir, voit. » Le Christ descend dans un autre espacetemps que le nôtre et, là, il se mesure aux démons de l’humanité. Si l’aveugle guérit, c’est parce que le Christ a intégré le démon de la cécité. Si le paralytique guérit, c’est parce qu’il a intégré celui de la paralysie. Le Christ a vraiment traversé toute la matrice de feu et, maintenant, il va vers le baptême du crâne. Il entre dans les profondeurs d’une autre dimension encore, dans l’espace ultime, dans les enfers ultimes. Les enfers – source de la vie – sont la source de nous-même. Là, le Christ va réaliser ce qui est écrit dans le livre de la Genèse, lorsque Dieu parle au serpent, après qu’il ait proposé le fruit de l’Arbre de la connaissance avant l’heure : « Une inimitié, je place entre toi et Ishah. » C'est-à-dire entre toi et l’autre côté de l’Homme. « Je place une inimitié entre sa semence et ta semence. Toi, tu l’écrases au niveau du talon. La semence d’Ishah t’écrase au niveau de la tête. » Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela signifie que, dans cet instant d’éternité qu’est le Golgotha, la semence d’Ishah – qui est 11
YHWH, le « Je suis », le Christ que nous portons tous à l’intérieur de nous – va écraser le Satan. Donc, le Christ a pris la tête de l’humanité, en tant qu’il prend la tête de notre vie. Mais pour cela, nous avons à faire sortir le Satan, qui a pris la place de Dieu dans le Bereshit, notre principe. C’est ce que le Christ dénonce dans les Evangiles, quand il dit : « Votre père, c’est le diable. » C’est pourquoi nous avons un exorcisme à réaliser absolument. Nous avons à redonner à Dieu – quelle que soit notre tradition – sa présence dans le principe de notre être. Vers une nouvelle conscience Le Christ, qui est universel – il n’appartient pas aux chrétiens, mais à toutes les traditions – écrase le Satan. C’est en cela qu’il prend la tête de l’humanité. Il le fait non pas à notre place, mais pour que nous puissions le faire. Car nous pouvons le faire. C’est dans cette force-là, dans cette présence-là, que nous pouvons parler au Satan et lui dire : « Tu
n’as aucun pouvoir sur moi. » Dans ma vie, je peux vous dire que je l’ai rencontré plusieurs fois. Et à chaque fois, je lui ai parlé. Cela a été des luttes quelquefois très difficiles. Mais à chaque fois, il est parti, avec la grâce de Dieu. Dans des conditions parfois douloureuses, difficiles. Mais quelle grandeur est entre nos mains ! Quelle force est entre nos mains ! Nous n’en avons pas suffisamment conscience. Oui, nous avons une puissance de vie incroyable. Le Christ dit : « Tout ce que j’ai fait, vous pouvez le faire. » Nous sommes là comme des enfants de choeur, une humanité balbutiante, ne sachant pas notre grandeur. Quand le Christ rencontre le Satan et le vainc, c’est la résurrection. Nous sommes tous déjà en puissance des ressuscités. C’est dans le corps que la grande alchimie de l’être se fait. On ne peut s’accomplir que si nous devenons conscient, que si nous prenons l’engagement du retournement, que si nous sortons de l’infantilisme du bien et du mal, que si nous cessons d’être content de nous et d’avoir bonne conscience. La bonne conscience, c’est la catastrophe ! Car il s’agit d’une montée de conscience, de changer de paradigme. Aujourd’hui, nous sommes pris collectivement dans une énorme mutation. Il faut que le collectif fasse cette mutation urgemment. On pourra prendre toutes les mesures écologiques à l’extérieur, si l’écologie ne se joue pas à l’intérieur de nous, elle sera inefficace à l’extérieur. C’est cela l’urgence aujourd’hui : devenir des Hommes. Au plus vite. Dans l’amour de Dieu. Annick de Souzenelle www.trilogies.org |
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"Les anges sont les hiérophantes de Dieu, écrit-elle, à l'image des Energies divines incréées, ils sont créés et s'expriment à notre niveau dans les mondes minéral, végétal et animal. Ils habitent le monde "imaginal", non imaginaire, ce que la Bible appelle les "cieux" et les physiciens d'aujourd'hui le "Réel voilé", c'est-à-dire l'autre "côté" de nous, à l'intérieur de nous, et de toute chose à l'extérieur. Ils ne cessent de chanter la Gloire de Dieu et de porter jusqu'à nous la lumière divine et les messages que nous avons à entendre. Ils incarnent les lois qui jalonnent la dynamique du chemin de l'Homme vers Dieu, mais sont aussi porteurs, avec cette rigueur, de l'infinie tendresse divine."
INTRODUCTION La Torah est un baiser de Dieu ! De Dieu « Moïse la reçut bouche à bouche », Verbe à verbe ; elle est le Verbe. Les « petites lettres d'en bas » qui écrivent le Livre sont lourdes des « grandes lettres d'en haut », leur source, mais aussi leur devenir si nous savons les reconduire à l'origine.
Car c'est à l'Homme qu'il revient d'œuvrer à ces noces que le baiser promettait. Chaque lettre danse le Verbe qu'elle est ; chaque mot chante le message qu'il délivre si nous nous offrons à lui. Cette appréhension de la Torah nous est bien étrangère, à nous Occidentaux, qui scrutons les textes en manipulant des mots figés comme objets de discours ; entre nos mains, ils deviennent des outils de pensée alors qu'ils en sont les maîtres. En vérité, le mot vient vers nous, comme une icône ; il scrute nos coeurs et les appelle à l'ouverture sur un univers infini. De cet univers les lettres sont les vibrations, car l'intériorité de l'Homme et la Torah sont sculptées du même ciseau, celui de la voix divine que « voyaient » les Hébreux au pied du Sinaï lorsque Dieu parlait à Moïse. La Torah n'est écrite que de consonnes, le Verbe ; leur musique est une voyellisation non écrite, un souffle, l'Esprit. L'Esprit est une onde qui voyage à l'infini, qu'on ne peut saisir, mais qui saisit les lettres dans une ronde ; et la ronde nous encercle à son tour et fait valser toutes nos certitudes ; elle fait se retourner, s'éloigner puis se rassembler les mots qui, soudain, prennent une couleur, un sens, mais un sens toujours ouvert sur d'autres horizons. L'hébreu, plus que toute langue, est propre à chanter les récits mythiques qui rendent compte de l'intériorité de l'Homme. Cette intériorité resterait muette si le mythe ne l'exprimait pas. « Muet » et « mythe » sont liés par la racine de base mu qui rend compte de l'indicible, du mystère. Derrière les mots du mythe, en quelque sorte, l'essentiel se tait mais s'inscrit dans un présent rigoureux. Le mythe se sert des matériaux de langage de l'Homme extérieur pour parler de l'Homme intérieur. Mais si nos yeux d'Homme en exil de lui-même figent ces matériaux dans leur seule dimension horizontale, il est bien certain qu'ils ne rendront aucunement compte de leurs messages. C'est ainsi que le mot Bereshit qui ouvre la Torah et dont la Tradition juive assure qu'il la contient tout entière, ce mot est massacré et la Torah l'est aussi s'il est traduit par « au commencement » ; ce « commencement », je l'ai souvent dit mais tiens à le répéter, introduit les temps historiques, nos temps d'exil, il y a des milliards d'années, et il nous concerne alors bien peu ! Si nous le traduisons par « dans le Principe », ce Principe est présent en nous ; il est le Noyau fondateur de l'être de l'Adam — l'humanité ; nous sommes alors saisis par ce Principe dans notre être le plus profond, dans notre « chair », Bassar, que « Dieu scelle dans les profondeurs de l'autre côté de l'Adam », son côté encore inaccompli, notre côté encore inconnu.
Bassar, que l'on peut aussi traduire par « dans le prince », contracte en un ballet nouveau le mot Bereshit, «dans le Principe» ; prononcé Bosser, il est alors le verbe « informer » : ce Noyau fondateur est Semence de notre être. Semence qui contient la totale information de notre devenir. Comme le gland conduit au chêne, ce Bereshit nous conduit à la totalité de nousmêmes, dont nous n'avons encore aucune idée ! Mais, si nous savons l'entendre, notre véritable Histoire commence : celle qui court en amont de l'exil et qui reste d'une brûlante actualité ; bien que brisée par l'Homme coupé de sa Source, elle continue en effet d'être tissée par les mains divines en sous-jacence de notre malheureuse histoire ; car, du même fil écarlate qui tissait l'histoire d'Israël, l'oeuvre divino-humaine se poursuit. Cela veut dire que cette « malheureuse histoire » de l'Homme extérieur a aussi sa dimension mythique, et qu'il est de première importance d'apprendre enfin à lire les événements de notre vie personnelle ou collective sur un autre registre que celui de l'existentiel ; l'histoire devient alors signifiante de l'évolution de l'Homme intérieur à partir de sa Semence : histoire dramatique lorsque cette Semence est stérilisée et sa dynamique stoppée, figée, oubliée au cœur de l'Homme, mais histoire qui peut être somptueuse une fois raccordée à sa Source d'où s'accomplira le devenir de l'Homme. Ces deux thèmes font l'objet de ce livre. Je suis frappée, par exemple, par le problème capital que posent aujourd'hui pour les pays d'Occident l'immigration des peuples étrangers et leur intégration à ces « terres d'accueil ». Nous verrons, au cours de cet ouvrage, que cette question objective l'incapacité que nous avons à intégrer en chacun de nous l'«étranger». Sur un plan biologique, cet étranger est le « non-soi » (microbe, virus, champignon, etc.). Nous en avons une peur si obsessionnelle que nous nous en protégeons en multipliant les mesures d'asepsie et de stérilisation qui à la limite sont la mort. Quant à notre médecine, elle ne sait « traiter » cet étranger organique qu'en le tuant par voie extérieure et en détruisant bien souvent avec lui le milieu environnant, au lieu de renforcer le système immunitaire qui, lui, se chargerait d'intégrer au « soi » le « non-soi » ; le « soi » est en effet capable de se reconnaître porteur du « non-soi» et donc de pouvoir l'assimiler. Sur un plan sociopolitique, cet étranger est l'homme d'une autre culture, voire d'un autre peuple, et il inspire à certains une peur tout aussi intense. Nous utilisons à son propos un double langage : celui des discours de surface qui se veulent accueillants au nom de la démocratie ; celui des lois, parfois inhumaines, souvent contradictoires, prouvant notre désarroi et notre ignorance de ce que l'humanité est une, et que l'autre est en chacun de nous. Nous verrons ainsi que le mot hébreu R'a, traduit habituellement par le « mal »,
alors qu'il est l'« inaccompli », l'inconscient, s'il est prononcé Ré'a est le « prochain ». «Aime ton prochain parce qu'il est toi-même, comme étant toi-même », pourrionsnous entendre. Ne devrions-nous pas alors renforcer notre « pouvoir immunitaire » en apprenant à aimer... Ces deux états de fait, qui relèvent à mon avis d'une même cause, n'introduisent en rien dans mon esprit une confusion entre leurs parties homologues, à savoir le non-soi en microbiologie et l'étranger dans le registre politique ; mais tous deux ont pour similitude leurs rapports respectifs l'un au corps biologique, l'autre au corps social. D'autre part, si nous nous penchons sur un mythe, le mythe biblique de Noé par exemple, il nous donne à voir que l'humanité, le collectif en situation d'exil, se débat et se noie dans ce que symbolise le Déluge — inconscience, violences, destructions, tragédies..., qui stérilisent la Semence et mènent l'Homme à la mort. Au cœur de ce drame, le patriarche Noé, homme juste, entend la voix divine et s'extrait du Déluge, que nous verrons être pour lui « matrice d'eau » et non plus tombeau, afin de construire son « arche », la Tébah en hébreu ; proche du nom de Thèbes, ville sainte chez les Grecs, la Tébah est le nouvel espace intérieur du patriarche, qui sera pour lui « matrice de feu » ; en elle il s'accomplira et deviendra le fruit promis de sa Semence, le fruit de l'Arbre de la Connaissance. Ce fruit, symbolisé en ce mythe par celui de la vigne, fait de Noé un homme ivre et nu : ivresse, jubilation de la connaissance acquise par le travail accompli dans l'arche ; et nudité, dépouillement des savoirs que le monde lui a fait revêtir. Il s'avance alors vers sa « tente », 'Ohel en hébreu, où il rencontrera son 'Elohim — sans doute symbolise-t-elle une ultime matrice, celle du « crâne ». La dynamique de croissance de la Semence implique la présence de ces trois matrices en notre corps ; le chapitre final de ce livre le dira. Dans la tente Noé, devenu Gloire d'Elohim, resplendit et diffuse une lumière insoutenable aux yeux de ceux qui n'ont pas atteint à cette qualité d'être. Deux de ses fils, Shem et Yaphet, le suivent ; ils marchent à reculons en revoilant leur père. Mais Ham, le troisième fils, regarde à l'intérieur de la tente où Noé a pénétré ; il voit et, certain de ce qu'il a vu, il va le raconter à ses frères à l'extérieur. Il y aura toujours dans le monde ces deux démarches de connaissance. Celle de Ham, le voyeur, dont le nom signifie la « chaleur », la « puissance », et qui forge ses concepts, les érige en certitudes qui deviennent idoles et objets de puissance ; son interprétation du mystère est pour lui vérité et celle-ci, ramenée au niveau des valeurs de l'exil, construit un dogmatisme stérilisant. Celle de Shem, le « Nom », et de Yaphet, l'« étendue de beauté », qui, eux, savent qu'ils ne savent pas, est apophatique, car c'est par une voie négative — à reculons — qu'ils atteignent à une vérité dont ils savent qu'elle en cache une
autre, plus proche de la vérité ultime, cachée, incluse dans le mystère de la tente ; aussi ils cherchent, interrogent, contemplent dans une quête amoureuse portée en eux-mêmes : ils se verticalisent. Juifs et chrétiens sont un dans le Saint Nom, le Shem. En lui leurs mystiques embrassent les différents niveaux du Réel dont je parlerai et qui, déployés à la verticale de l'être, sont « beauté », Yaphet— une beauté cachant l'autre, jusqu'à l'ultime splendeur qui les contient toutes. Nos frères juifs sont gardiens de la Torah, le Verbe ; s'ils avaient reconnu le Christ, ils se seraient hellénisés et auraient perdu l'hébreu, la langue du Verbe. Peut-être seraient-ils devenus des Ham. Les chrétiens ont reconnu le Verbe dans la Personne du Christ ; ils ont perdu l'hébreu. Beaucoup sont devenus des Ham. La Torah, en ce qui est compris d'elle, est objet d'exclusive propriété et devenue idole pour nombre de juifs. Pour nombre de chrétiens, c'est la Personne historique du Christ qu'ils vivent ainsi, n'entendant pas ce à quoi elle les renvoie en eux-mêmes. «Annick nous a volé la Torah», fut-il dit un jour à l'un de mes amis par un écrivain juif. Et, plus tard, par une auditrice israélienne : «Annick, tu nous as volé notre langue !» La « voleuse » ne fut pas moins surprise de lire tout récemment, dans un ouvrage écrit par un prêtre chrétien de haute fonction : « On nous demande aujourd'hui d'établir un dialogue (avec les autres traditions), mais comment agir sans faire de prosélytisme puisque nous avons la vérité ? » Confiant à un journaliste chrétien cette anecdote et la profonde tristesse que j'en avais, cet homme, étonné de ma réaction et voulant sans doute justifier le prêtre, me dit : « Mais, Annick, les chrétiens ont le Christ. - Pardon, lui dis-je, ils ont le Christ ? » Perplexe, le journaliste referma son cahier de notes et me quitta. Le Christ et la Torah, réduits aux normes de l'avoir, sont livrés aux mains du séparateur, le diabolos, qui nous fait jouer les Ham en proie à des rapports de force si destructeurs. Vécus au niveau de l'être par chacun des mystiques de ces deux traditions, le Christ et la Torah amèneront juifs et chrétiens à plonger au cœur d'eux-mêmes où le Saint Nom les attend dans un espace infini où le temps n'est plus.
Un en « Je Suis », YHWH, ils savent, pour les premiers que la Torah se danse et se chante sur soixante-dix octaves dont chacune s'efface devant la plus grande profondeur de l'autre ; pour les seconds, que la Personne historique du Christ se retire pour que « l'Esprit-Saint vienne qui leur enseignera toute chose » et les introduira peu a peu dans les soixante-dix « vergers » du Pardès ; soixante-dix contractés en quatre niveaux selon les quatre lettres du Pardès, dont le dernier, le Sod, est le « secret ». Dans le secret qui, au départ, est la Semence divine, un seul arbre grandit, dont le fruit est le Shem, YHWH. Le Rabbi Dov Baer, un grand saint du XVIIIe siècle, hassid bien connu sous le nom du Maggid de Meze-ritz, dit ceci : « Noé et les patriarches ont eu la révélation de la Torah dans son essence, dans sa nudité, sans la robe de la loi dans laquelle elle se présente et s'adapte au monde et qui, pour cette raison, la rend changeante et relative. Au temps de Noé et des patriarches, l'essence de la Torah était encore toute nue ; elle n'était point encore habillée dans les vêtements du monde ; elle ne portait pas encore une robe de juge et n'était pas munie du bâton du gendarme. Les lois de Moïse forment la gaine protectrice de la Torah dont la lumière originelle est trop forte pour le monde ; elle risque de l'aveugler et de le brûler. Mais la Tradition nous apprend qu'aux temps messianiques, le Saint-Béni-Soit-Il sortira le Soleil de sa gaine, c'est-à-dire que la lumière de la Torah brillera de tout son éclat, qu'on pourra la percevoir dans son essence (...) sans revêtements pour le monde et la société, c'est-à-dire sans les lois de Moïse qui sont nécessaires actuellement car sans elles le monde ne pourrait supporter l'éclat naturel de la Torah, qui est trop fort pour la plupart des esprits.» Mais les temps messianiques approchent. Nous avons à les préparer, nous, juifs et chrétiens, ensemble, sans exclure bien sûr tous les amoureux de l'Innommable sur terre. Aujourd'hui, les valeurs du monde montées sur le bateau des certitudes font naufrage, tandis que surgissent de nos profondeurs inaliénables celles de la Révélation. Elles ont une saveur de sel, du sel dont le feu ne se dissout plus dans l'eau mais l'embrase ; il embrase l'eau de l'inconscience du monde et brûle ses vêtements protecteurs. Car le Verbe inclus dans la Torah est en train d'accomplir de son feu la dernière part de l'arc-en-ciel qui relie le ciel à la terre. L'arc-en-ciel établi par Dieu avec Noé est signe de l'Alliance oubliée des hommes mais que Dieu, se souvenant d'elle, confirme et rend tangible au cœur de leur exil. Cet arc, comme le fil écarlate, trace l'histoire des hommes dont nous semblons vivre aujourd'hui la fin d'un temps ; nous vivons une dernière part du signe de
l'Alliance avant que le signe s'efface devant l'Alliance recouvrée. A cette étape actuelle du tracé, nos frères musulmans ont eux aussi à intervenir, car de leur père fondateur, Ismaël, Dieu dit : « II sera tireur d'arc », Rovéh Qeshet, qualité dont use la ruse divine pour dire d'Ismaël qu'il sera Rov HaQeshet, « maître de l'arc (-en-ciel) », artisan majeur de son redressement en l'Alliance fondatrice. Artisans de l'Alliance, nos frères musulmans nous obligent à nous réaffirmer, nous, juifs et chrétiens, face au vide de la modernité ; vide qui, s'il était vraiment vide, appellerait la grâce, mais il grouille d'idoles aliénantes ! En ce vide mutilé pénètre aujourd'hui le Saint Nom qui, de l'Epée à deux tranchants, de l'Epée flamboyante qu'il est, tue les idoles et invite l'Homme à recouvrer ses normes premières. Elle le conduit à se souvenir qu'il est le signifiant de Dieu par le Verbe, et que le mot est signifiant du Verbe. « II est vie, esprit, germe, ouragan, vertu, feu. Car le mot c'est le Verbe, et le Verbe, c'est Dieu. » Victor Hugo, Les Contemplations. Annick de Souzenelle Dans son chemin de retour, passant par la ‘porte des Dieux’, l’Homme traverse ces palais à l’intérieur desquels il est revêtu de robes successives, symboles des divins manteaux de lumière, robes qui le font accéder progressivement à la splendeur des splendeurs : il a mis au monde l’enfant divin et passe de la dimension de mère à celle d’épouse.
La Vierge et mère devient épouse et reine.
La dernière robe est la robe de noces.
Robe royale, elle pare l’épouse qui est alors introduite dans la chambre du Roi, Kether.
Ces palais correspondent aux neuf hiérarchies angéliques.
C’est Denys l’Aréopagite qui nous a laissé le traité le plus complet concernant l’Angélologie. Quel que soit l’homme caché sous le nom de l’Aréopagite, que nous sommes convenus d’appeler le ‘Pseudo-Denys’, l’auteur des Hiérarchies Célestes semble être entré dans le mystère. C’est là sa véritable authenticité. Il nous révèle que ces armées célestes – Énergies divines créées – transmettent la Lumière divine par degrés successifs ; chaque degré est structuré, ordonné, illuminé, unifié par une hiérarchie. Ces neuf hiérarchies angéliques constituent trois triades.
Une première ‘triade’ entoure le Trône Céleste ; elle est composée des Séraphins, des Chérubins et des Trônes. Elle participe de la transcendance divine. Elle correspond au triangle supérieur de l’Arbre. La deuxième triade comprend : les Vertus, les Dominations et les Puissances. Elle reçoit la Lumière de la première triade et correspond au premier triangle inversé. Elle ordonne les mondes et les revêt de beauté. La troisième triade comprend : les Principautés, les Archanges et les Anges. Elle est l’agent de l’économie divine à l’égard de l’Homme qu’elle guide, commande, et dont elle forge le destin. Elle œuvre selon la loi des nombres. Elle correspond au deuxième triangle inversé. Par les mondes angéliques, la Lumière divine sort de son secret, se distribue dans une grandiose harmonie de sons, de couleurs, d’odeurs et de tout ce que la Création peut goûter pour en vivre, puis rentre dans son secret, enrichie de cette Création bien que parfaitement riche déjà… L’ Homme qui sait entrer dans l’exactitude de ces vibrations divines et se laisse porter dans ce mouvement de retour au sein du Secret, celui-là doit connaître le ‘retournement’ dans l’expérience du revêtement des neuf états de corporéité angélique. Je vous laisse donc cette semaine avec cette méditation sur les anges.
Des vêtements sombres de nos sœurs orientales Aujourd’hui, Burqa et Niqab ont fait irruption dans nos pays occidentaux et font la une de nos journaux. Les uns s’indignent , les autres tolèrent, des lois se dressent, interdisant ici, posant des limites là, provoquant des réactions plus ou moins violentes. Bref, un problème se pose avec lequel on est mal à l’aise et qui, surtout, comme beaucoup d’autres, est traité dans les limites de sa réalité observable, sans que l’on se donne la peine d’entrer au cœur de ce qu’il signifie. Car tout évènement insolite dans la vie de chacun est un face à face qui renvoie à une problématique intérieure et demande à être traité par l’intérieur. Il en est de même pour le collectif. Nous sommes devant un évènement qui nous parle. Ces femmes voilées, voire revêtues de vêtements les plus sombres même si elles ne le savent pas, nous parlent. Elles sont l’expression d’un inconscient collectif, le féminin de nos profondeurs, totalement bloqué, non « épousé », qui hurle la souffrance de sa stérilité. Les physiciens de physique quantique connaissent aujourd’hui
l’existence
du
«
Réel
voilé
»
de
toute
chose.
En l’Homme il est admirablement décrit dans les mythes qui ne parlent que de l’Homme intérieur et donc de son autre « côté » - qui n’a jamais été une « côte » de laquelle est créé la femme - mais de ce côté de nous encore inconnu, mystérieux, riche d’un potentiel inouï et lourd du noyau informateur de son devenir. Cette information invite l’Homme – tout être humain – à pénétrer cet autre côté de lui, à « épouser » ce féminin voilé, intérieur à lui, pour en intégrer les énergies et le conduire à un autre niveau de conscience, c'est-à-dire à faire émerger en lui et àl’extérieur de lui, un autre niveau du Réel, une autre dimension de la vie. Ces énergies non épousées se retournent en violences contre nous : maladies, meurtres, accidents, tragédies. Ignorant ce « plus être », nous compensons par une accumulation de l’avoir, mortifère. Nos sœurs orientales posent un problème qui, bien sûr, en lui-même, relève d’une culture qui devra, comme la nôtre, s’approfondir... mais ce qui nous est demandé à nous, c’est de l’appréhender avec un regard autre que celui de la culture. Il s’agit du regard qui voit en la femme orientale l’objectivation du féminin situé à l’orient de notre intériorité ; et dans les voiles obscures qui la recouvrent, l’opacité de ce pôle de notre être tenu prisonnier au fond de sa geôle, incapable de délivrer sa richesse. Ces vêtements sombres tomberont d’eux-mêmes le jour où nous nous retournerons vers cet autre « côté » de nous, celui qui détient la réponse à nos misérables problèmes d’aujourd’hui et la promesse de notre royauté !