le projet de loi des entreprises en difficultés maroc

November 4, 2017 | Author: Ghizwa1 | Category: Morocco, Statutory Law, Business, Liquidation, France
Share Embed Donate


Short Description

le projet de loi des entreprises en difficultés maroc...

Description

Introduction Comme vous le savez, l’entreprise, à l’instar d’une personne physique, a une vie pendant laquelle elle peut se trouver face à des incidents qui peuvent mettre en péril sa pérennité. Les causes sont multiples : elles peuvent être d’ordre interne comme la défaillance du système de gouvernance, les conflits sociaux ou des difficultés financières ; mais elles peuvent également être d’origine externe comme la survenance de crise économique, les problèmes du marché ou autres. Les premières à être touchées par ces difficultés sont les petites et moyennes entreprises, car elles sont en général sous capitalisées et n’ont pas les compétences nécessaires pour les confronter. De même, la défaillance d’une entreprise d’une certaine taille, peut avoir des conséquences graves, non seulement sur l’emploi, mais aussi sur l’activité économique de son marché Etant donné que l’entreprise est le pilier de tout tissu économique, sa vie devient la préoccupation essentielle du législateur. C’est ici où le droit des E en D entre en jeu, dans la mesure où il offre des outils à l’entreprise afin : -de prévenir les difficultés avant que sa situation ne soit sérieusement compromise ; -d’organiser judiciairement son redressement lorsqu’elle est en situation de cessation de paiement, -et enfin de procéder à sa liquidation judiciaire lorsque sa situation est irrémédiablement compromise. Sous l’empire de l’ancien régime juridique, le dispositif légal relatif aux difficultés de l’entreprise prévoyait un traitement chirurgical de choc sous la forme de deux procédures étroitement liées réservées aux entreprises qui se trouvaient en état de cessation de paiement : la liquidation judiciaire et la faillite. Ce n’est qu’en 1996 que la loi actuelle 15-95 régissant les entreprises en diff a été promulguée. Nous sommes donc passés d’un droit de la sanction à un droit beaucoup plus souple. L'accent est désormais mis sur la nécessité de sauvegarder l'entreprise en tant qu'entité viable et génératrice d'emplois.

1

Toutefois, comme s’accordent à le dire les représentants du secteur privé et certains magistrats, le problème essentiel que pose le livre V du C.Com est son manque de clarté, ayant comme conséquence de retarder les procédures du fait. De meme, certains auteurs déplorent vivement que le droit marocain ne s’intéresse à l’entreprise que lorsqu’elle est tombée dans le trou noir de la cessation de paiement. C’est dans cette perspective qu’un projet visant la réforme de la loi n°15-95 instituant le livre V du C.Com, consacré au traitement des difficultés des entreprises est en cours de finalisation. Le processus est enclenché depuis 2003, à l’initiative du ministère de la justice en collaboration avec l’agence américaine pour le développement (USAID). Notre sujet revêt donc un triple interet : -D’abord, l’intérêt juridique : Le projet de loi vient donc pallier à la défaillance de la loi 15-95 en améliorant la qualité des textes juridiques afin de faire installer la transparence et la sécurité juridique dans le monde des affaires et créer ainsi un climat d’affaires favorable et attractif aux yeux des investisseurs étrangers. Tout en adaptant et harmonisant les normes Ensuite, l'intérêt socio-économique, vu que d’une part une réforme réussie fera preuve d’un atout pour favoriser la survie des entreprises et par conséquent constituer un levier pour l’économie du Royaume. Surtout que les PMI, souvent victimes de difficultés, constituent la grande majorité du tissu économique du pays. Et d’autre part, vu que l'intérêt général est touché par le trouble que les disparitions des entreprises cause à l'économie, tout comme l'ordre social est heurté par la disparition d'emplois. Enfin, l'intérêt du sujet est suscité aussi par les défis techniques qui découlent du fait qu’un système moderne de traitement des entreprises en difficulté comporte de nombreux acteurs : l’entreprise en difficulté, la direction, les salariés et les actionnaires de ces entreprises, leurs créanciers, les magistrats, juristes et autres professionnels qui traitent les dossiers et même les communautés où sont implantées ces entreprises. D’où la difficulté d’équilibrer équitablement les différents droits, obligations et intérêts. Cette réforme pourra-elle relever ce défi et trouver un équilibre subtil et simultané de tous les impératifs en l’occurrence, la sauvegarde des entreprises viables, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. 2

Quels sont les apports de cette nouvelle réforme, pourront-ils pallier aux défaillances de l'ancienne loi et seront-ils adaptés à la réalité marocaine ?

I – L’anticipation des difficultés A- L’alerte : + Extension de la nature des difficultés à l’aspect social : Le législateur a compris que le nombre des litiges de nature sociale devient de plus en plus considérable.

Pas toutes les entreprises peuvent bénéficier de l’alerte : - La faculté de désignation du CAC prévue par la loi : Les sociétés et groupements d’interet économique atteindront difficilement les seuils fixés par la loi pour nommer un CAC et donc ne bénéficient pas de la procédure d’alerte.

Pour celles qui peuvent en bénéficier et veulent la déclencher : - Critères de déclenchement de l’alerte : Les F.N.C.C.E toujours pas définis dans le projet de loi. - Afin de conférer à l’alerte un caractère davantage opérationnel, il serait concevable de définir des indices permettant de déceler l’apparition d’une situation préoccupante. - Le CAC engage sa responsabilité dans 2 cas : négligence ou faute cad s’il déclenche une alerte alors que les faits relevés ne necessitent pas cette action. Il faut donc alléger les risques que peut rencontrer le CAC. - La réponse du dirigeant :  Forme de réponse du dirigeant au CAC non précisée  Mode de présentation des modes de redressement par le chef d’entreprise  Pas de sanction vis-à-vis au non-respect de l’obligation de réponse du C.E - Préciser les modalités de convocation du C.E et les mesures à prende en cas de convocation infructueuse. - Les représentants des salariés ne sont pas integrés dans le processus d’alerte interne. 3

B- Prévention-traitement des difficultés : Le législateur a entammé une série d’apports. Les premiers apports majeurs concernent :

 Le mandataire spécial  Possibilité de prolongation de la mission du mandat spécial, conditionnée par la présentation d’un rapport au président du tribunal en cas d’échec de sa mission. Le C.E n’est donc pas maitre du procédé, chose qui pourrait déranger les C.E.  Possibilité de changement du mandataire, sous la même condition. -- Décision non-susceptible de recours : Possibilité de changement sous le monopole du P.T. -- Le législateur ne délivre pas qui doit présenter le rapport ni le délai maximum pour la délivrance du rapport. -- Quant à la personne du mandataire, son statut n’est toujours pas réglementé : incompatibilités, rémunération…

 La conciliation au lieu du règlement amiable + La conciliation remplace le règlement amiable. -- Le législateur n’a fait qu’un changement terminologique. + Ds prérogatives du P.T très importantes (élargissement de ses pouvoirs de nature à lui donner toute information sur la situation financière de l’ese) et très en faveur vis-à-vis de l’entreprise. -- Toutefois, aucune obligation n’a été prévue pour fournir les docs comptables au P.T, lui permettant d’apprécier la situation financière de l’entreprise. -- Statut du conciliateur non déterminé 4

-- Impossibilité pour le C.E de proposer un conciliateur de son choix ou de prévoir sa récusation.

 Vers une meilleure protection des créanciers ? Dans le nouveau projet de loi, le législateur se met pour objectif : « mettre en place une procédure équilibrée qui puisse garantir les droits corollaires des débiteurs et des créanciers des entreprises en difficultés ». + Faire bénéficier les cautions de la SPP. -- Le leg n’a pas pris en compte les recommandations de l’USAID en faveur des créanciers. -- Certains articles sont toujours vagues comme l’art 556 : Beaucoup de précisions doivent s’y ajouter : Le legislateur utilise les termes « tous les créanciers ». S’agit-il des créanciers ordinaires ou privilégiés ? Privilère spécial ou général… -- L’art 556 impose aux créanciers refusant de participer à l’accord, des délais de paiement à côté des autres créanciers qui y consentent Atteinte à l’ordre public : Principe d’égalité entre les créanciers. -- Déséquilibre entre droits des débiteurs et droits des créanciers : L’art 550 confère au débiteur seul le droit d’initier l’ouverture du R.A ce qui pourrait engendrer la perte de certains créanciers potentiels comme les banques. + Tentative de regagner la confiance des créanciers : en prévenant la résolution de l’accord en cas du non respect des engagements de l’Ese. + L’art 562 prévoit de nouveaux documents pour que le tribunal déclare une Ese en cessation de paiements, de manière à mieux renseigner l’ese sur la situation de l’Ese. + Les formalités de dépôt de la demande d’ouverture de la procédure sont plus étoffés (4 Documents de plus). 5

+ L’obligation d’aviser les créanciers non inclus dans l’accord + Etendre les effets de l’ouverture de la procédure à l’ensemble des associés solidaires ainsi que pour la répartition des produits de vente, y compris ceux qui se sont retirés du capital après constatation de la cessation de paiements. -- Elargir les pouvoirs d’investigation aux créanciers principaux

 Autres failles du projet de loi : -- Supprimer le monopole du président du tribunal qui peut retarder le déclenchement des procédures pour indisponibilité/congés… et prévoir la possibilité de déclenchement de la procédure (prévention interne) par le vice-président. -- La loi doit instaurer des mécanismes susceptibles d’être mis en œuvre par toute personne ayant intérêt. -- Les mesures de prévention doivent être confidentielles surtout au début.

Ch 2 : La procédure de sauvegarde L’accent est aujourd’hui mis sur la nécessité de sauvegarde de l’entreprise entant qu’entité viable et génératrice d’emplois. C’est une procédure de prévention qui intervient avant toute cessation de paiement. Elle s’inspire de la loi française du 26 Juillet 2005 qui, a son tour, s’inspire du fameux chapitre 11 américain sur les procédures collectives. Le but de cette procédure est de renforcer le traitement préventif des difficultés, renforcer la place des créanciers, redéfinir les prérogatives du débiteur, et surtout réduire le pouvoir judiciaire. 6

-- Toutefois, le contexte dans lequel cette législation est sensée s’appliquer est loin de ressembler au contexte français -- La réalité marocaine n’est pas propice à l’implantation d’une autre procédure de traitement des difficultés des entreprises : PMEs + entreprises familiales qui manquent les compétences nécessaires pour connaitre les outils qui leurs sont disponibles et qui généralement ne tiennent pas une comptabilité régulière et ne recrutent pas de juristes.  La démarche de prévention intervient à un moment où il ya cessation de paiement, qui rend obligatoire l’engagement de la phase judiciaire.

-- Elle va accentuer la complexité du système déjà existant dont l’application n’est toujours pas évidente. -- Le chef d’entreprise va se trouver devant une panoplie de procédures complexes. Il est nécessaire d’alléger les procédures, d’abréger les étapes. La multiplicité des procédures peut etre adaptée au tissu économique français, elle ne l’est pas au Maroc. L’évolution de la norme doit être continue, progressive et assimilée par les hommes et les institutions dont elle devient l’outil de travail.

7

II- Traitement judiciaire des difficultés : A- La saisine du tribunal + Définition de la notion de cessation des paiements (Art 556) -- La réforme n’a apporté aucun éclaircissement sur les modalités d’assignation de la procédure par tout créancier. + Le projet de loi confère de larges pouvoirs au P.T pour vérifier l’état de cessation de paiement. (Dans plusieurs cas le demandeur ne fournit pas tous les documents necessaires ? Cet apport sera bénéfique aux créanciers demandeurs auquels incombe la responsabilité d’apporter la preuve de celle-ci.)

 Le Juge-commissaire : +Désignation d’un vice juge-commissaire qui exerce les fonctions du J.C en cas d’empechement de ce-dernier. (En France il est désigné parmi les jufes des tribunaux de commerce qui sont des commerçants élus)

+Le juge-commissaire ordonne la distribution des parts relatifs à la liquidation et le classement des créanciers au lieu du syndic. -- La loi n’a pas précisé les voies de recours contre les décisions du J.C. --Sous le régime actuel le legislateur n’a pas spécifié un corps spécialisépour accomplir la mission du syndic et n’a pas défini sa résponsabilité et ses obligations.  Le syndic : -- Le tribunal n’a aucune autorité sur le syndic. -- La qualification du syndic ne fait l’objet d’aucune condition légale formelle.  Il faut unifier les modalités de désignation des syndics au niveau de tous les tribunaux des royaumes. -- Il faut prévoir la possibilité de désignation de plusieurs syndics pour faire face au cumul des taches du syndic. (Comme en France : administrateur et mandataire) 8

-- Il faut prévoir le suivi et le contrôle. Celui-ci est la compétence du J.C dont les lourdes fonctions lui laissent peu de temps pour la surveillance du travail des syndic. -- Rémunération non fixée, surtout que c’est lui qui prend en charge les frais de transport, de publication aux journaux..) -- Absences de voies de recours : Il faut fixer les modalités de recours ouvertes aux demandeurs. + Nous ne pouvons qu’etre optimistes par l’amendement de l’article 640 qui prévoit la réglementation de la fonction du syndic par décrét. + Possibilité de remplacement du syndic sous demande du M.P ou J.C

+ Le nouveau texte va réviser le système entier de déclaration des créances afin que les créanciers soient mieux avisés et protégés. (Art 686)

B- Choix de la solution  Redressement : -- La continuation : Il ne faut pas remettre en cause les délais acceptés par les créanciers. -- Il faut limiter les délais à la durée du plan pour faire adhérer les créanciers et les rassurer. -- La cession : Délais non raisonnables :La personne reste liée à son offre de rachat pendant un moix max après le dépôt du rapport du syndic. -- On ignore l’info des représentants du personnel par le syndic sur les offres de cession. 9

-- Prévoir la transmission des contrats nécessaires au maintien de l’activité.  Liquidation : -- Nécessité de définir la « situation irrémédiablement compromise ». -- Il est nécessaire d’instaurer une liquidation judiciaire simplifiée et assouplir le régime de responsabilité des dirigeants pour que ces derniers n’hésitent pas à engager une démarche devant le juge. -- Le système de sanctions devrait etre réexaminé aussi. -- L’article 375 ne précise pas d’une manière claire et limpide le classement des créanciers. -- Le législateur a ignoré un aspect très important : La moralisation des procédures de traitement des difficultés.

10

Conclusion -- Le législateur n’a pas rénové les procédures de T.J.D. Nous comprenons que le législateur s’est focalisé sur les procédures de prévention afin de les rendre plus attractives aux yeux des chefs d’entreprises et donc éviter le recours aux tribunaux. Toutefois, après 15 ans de préparation du projet de loi, le législateur aurait pu faire mieux et prévoir des dispositions régissant mieux les mécanismes de traitement des difficultés et remplissant le vide juridique qui régnait pendant une vingtaine d’années. -- Les procédures du chapitre 11 dont s’est inspiré le législateur français et marocain, ont été largement critiquées en tant que longues et couteuses. -- Ces procédures ne sont donc pas adaptées à la conjoncture économique marocaine vu que le tissu économique marocain se compose essentiellement de PME auxquelles ces procédures ne sont pas adaptées.  En France, il ya une procédure de Red. Simplifiée en faveur des petites Eses moins de 50 salariés.

-- Pour être réaliste, malgré la richesse et la diversité des apports du projet de loi, il nous parait illusoire d’attendre de ce projet de réforme la réalisation d’une satisfaction tant que les textes réglementaires font défaut. -- Il faut que le processus de réforme aborde le système d’insolvabilité dans son intégralité, pour que celui-ci soit réussi, soit : Les règlements, les institutions et la loi. -- Le rapport entre débiteur et créancier est toujours déséquilibré malgré les multiples corrections apportées par le projet de loi. Les salariés, plus précisément, ne sont toujours pas suffisamment protégés.

11

-- L’approche judiciaire a des limites. Il est temps de confier le traitement judiciaire des difficultés à un corps constitué de professionnels travaillant sous le contrôle du juge. -- Le principal reproche fait à ces textes est de ne tenir aucun compte de la réalité juridique, judiciaire, économique et sociale du pays. -- Avec le capital expérience de 20 ans, les rédacteurs du projet de loi auraient pu innover et doter l’entreprise marocaine d’u système qui lui est adapté.

12

View more...

Comments

Copyright ©2017 KUPDF Inc.
SUPPORT KUPDF