historia dental revista francesa

November 13, 2016 | Author: Carlos Palomero Gil | Category: N/A
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ISSN 1277-7447

Actes

Société française d'histoire de l'art dentaire XXe congrès

Pouy-sur-Vannes, 2010 Vol. 15

Société française d'histoire de l'art dentaire Bibliothèque interuniversitaire de médecine et d'odontostomatologie, Paris

Actes Société française d'histoire de l'art dentaire XXe congrès. Pouy-sur-Vannes, 2010

Vol. 15

Directeur de la publication Danielle GOUREVITCH Responsables éditoriaux Micheline RUEL-KELLERMANN Frédérique LESCA

Sommaire Auteur

Titre

Roland Benoît Évelyne Peyre Jean Granat Niède Guidon Florent Destruhaut Emmanuelle Vigarios Philippe Pomar

Des premières descriptions des dents au système alvéolo-dentaire Un fossile du Brésil (Santa, 5900 ans BP, Piauí) témoin de l’histoire des dents de l’homme Anthropologie et prothèse maxillo-faciale. Vers une médecine du sacré

13

Rémi Esclassan Anne Marie Grimoud Marie Pierre Ruas André Sevin Philippe Pomar

Caries, usure et alimentation au sein de la population médiévale de Vilarnau d'Amont

16

Valerio Burello Alex Peregudov Konstantine Borissenko Jean Granat Évelyne Peyre

La collection historique de la « Dental School » de Turin V. J. Kurljandsky, fondateur de la dentisterie prothétique soviétique

22 26

Les dents fossiles de Petit-Puymoyen, des descriptions de Siffre à nos jours

31

Javier Sanz Miguel López Bermejo

Influence de l’œuvre de Francisco Martinez de Castrillo sur les auteurs espagnols non dentistes

38

Micheline Ruel-Kellermann

L’héritage castillan de Francisco Martinez de Castrillo. De Bernardin Martin à Pierre Fauchard

42

Pierre Baron

Débat dans le premier XVIIIe siècle sur les racines des dents temporaires

47

Maria José Solera Andrea Santamaria

La chirurgie orale dans l’œuvre de Blas Beaumont (1690-1758)

51

Marguerite Zimmer

Nicolas Dubois Chemant : nouveaux éléments biographiques

55

Julien Philippe

John Hunter et l’orthodontie

4 7

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Actes. Société française d'histoire de l'art dentaire, 2010, 15

Des premières descriptions des dents au système dento-alvéolaire From first descriptions of teeth to dentoalveolar system Roland Benoît DCD, DSO, DEO, HDR, Pr honoraire Paris V

Mots clés

Résumé

 germe dentaire  organe dentaire  ectomésenchyme  génétique  biologie systèmique  système dento-

L’étude des dents est restée relativement négligée jusqu’au XVIe siècle. À cette époque, l’alvéole qui se construit en même temps que la dent est découverte. L’étude se poursuit au XVIIe siècle. La Révolution française stoppe cet élan de recherche. À la fin du XIXe siècle et au début du XXe, diverses observations anatomiques, techniques, histologiques, histochimiques, expérimentales et immunologiques permettent de préciser chacune des structures constitutives de l’organe dentaire. Au XXIe siècle, la génétique et la biologie des systèmes (systèmique) précisent la responsabilité des divers éléments en interaction et leurs intégrations dans le système dento-alvéolaire.

Keywords

Abstract

 dental germ  dental body  genetics  ystemic biology  dento-alveolar system

The study of the teeth remained rather neglected until the 16th century. At that time, the cell which is built at the same time as the tooth is discovered. The study continues during the 18th century. The French Revolution stops this dash. At the end of the 19th century and the beginning of the 20th, various anatomical observations, technical, histological, histochemical, experimental, immunological, make it possible to specify each structure constitutive of the dental body. With the 21th century, the genetics and the biology of the systems (systemic) specify the responsibility for the various elements in interactions and their integrations in the dento-alveolar system.

alvéolaire

Le passé Dans l’Antiquité, la connaissance des dents et de leurs alvéoles était succincte. Aristote (384-322 av. J.-C.) décrit les dents par l’intermédiaire des animaux dont l’anatomie est proche de celle de l’homme. Galien (127-vers 216), considéré comme le plus grand anatomiste et le plus grand médecin de l’Antiquité après Hippocrate, médecin des gladiateurs, étudie l’anatomie humaine en soignant les blessés. Il conseille, comme Aristote, d’étudier aussi l’anatomie sur des animaux, comme le singe. Ayant ressenti des pulsations dentaires, il pensait qu'un centre vital devait exister dans la dent. Au XVe siècle, débute en Italie la Renaissance artistique et scientifique qui s’étendra sur toute l’Europe jusqu’au XVIe siècle. La guerre, avec l’apparition des armes à feu, remet en cause les connaissances en anatomie. Les chirurgiens, dans leurs interventions à l’intérieur des corps, pratiquent d’une

certaine façon des dissections. Au XVIe siècle, Vésale (1543) décrit les dents et leurs racines. Realdo Colombo (1516-1559) écrit que les dents sont formées in utero chez l’embryon, qu’elles ne naissent pas de la gencive lors de l'éruption, comme tous le pensaient. Il croit à la croissance continue de la racine lors de l’éruption à travers la gencive. Selon Gabriel Fallope (1523-1563), la dent et l’alvéole apparaissent comme une unité organique. Dent permanente et dent de lait ont chacune leur alvéole qui s'édifie en même temps que la dent. Les dents permanentes antérieures remplacent les dents de lait. Lors de l'éruption, la dent se compose d'un pôle superficiel, dur, qui émerge et un pôle profond mou, humide d'où sortiront les futures racines. Quant à Bartolomeo Eustachio (1510-1574), il écrivit en 1564 un livre d'anatomie dentaire qui montre que les dents ne sont pas de l'os et que le pôle dur est composé d'émail et d'ivoire. Bon observateur, il décrit un ligament entourant les racines. Les dents sont insérées dans les gencives comme les ongles dans la peau. La minéralisation

Correspondance : 4 bis, rue de l’Indienne, 91100 Corbeil-Essonnes ([email protected])

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Actes. Société française d'histoire de l'art dentaire, 2010, 15

Fig. 2. A : coupe histologique de « l’organe dentaire » chez un fœtus humain à 4 mois d’après Robert Weill in Jean RACADOT, Robert WEILL, Histologie dentaire, J Prélat, 1966. B : éléments constitutifs de l’organe dentaire au cours de son développement.

Le vingtième siècle et l’époque contemporaine Fig. 1. Germe dentaire (cervidé) sur lequel on retrouve les éléments constitutifs du « germe » décrit par Pierre Fauchard, Le Chirurgien Dentiste, 1746, T.1, p. 21-22. (Cliché R. Benoît)

se fait de la couronne vers la racine. Pierre Fauchard (1678-1761) apporte des précisions sur les éléments constitutifs du germe dentaire (Fig. 1) : « Les racines des dents de même que leurs alvéoles se trouvent recouvertes d’un périoste… Cette grande cavité est tapissée d’une membrane… et aux nerfs qui se distribuent dans l’intérieur de la dent » (1746, T 1, p. 21-22).

Il faut attendre le XXe siècle pour voir les médecins stomatologistes comme A. Mugnier (1964) s’intéresser au système dentaire. Il en est de même pour des chercheurs comme Dalcq, Pourtois et Miller en Belgique, qui développent des techniques histochimiques en prenant le germe dentaire ou le pôle céphalique embryonnaire comme modèle expérimental. Avec la mise en place des facultés de chirurgie dentaire en 1968, sous l’impulsion de Robert Weil, Robert Franck, et d’autres, les laboratoires, par leurs travaux, permettent de préciser les éléments constitutifs de l’organe dentaire (Fig. 2). Après que Pierre Chibon (1969) eut montré le déplacement de cellules provenant du tube neural dans les arcs branchiaux, Gérard Couly confirme la participation de ces nouvelles cellules (les cellules des crêtes neurales) dans la formation de la pulpe dentaire et dans le sac folliculaire : « l’organe dentaire et le sac folliculaire sont issus de la neurulation » (G. Couly 1991) (Fig. 3). Depuis 1970, la biologie du développement a soulevé un énorme intérêt pour le diagnostic génétique et des espoirs thérapeutiques : la thérapie génique et l’utilisation des cellules souches. Cependant la complexité de formation de la sphère cranio-faciale nous a obligé à réfléchir à une nouvelle biologie mieux à même dans sa description des phénomènes du développement, d’intégrer au plus près cette complexité. Ainsi la biologie des systèmes ou biologie systémique peut s’appliquer au développement normal ou pathologique d’un système parmi les autres : le système dento-alvéolaire (Fig. 4). Fig. 3. L’ectomésenchyme Au XXIe siècle, on découvre que la (1991). A : origine des morphogenèse coronaire et folliculaire cellules des crêtes neurade la dent se fait sous l’interaction de les, migration vers le pregènes de signalisation et de gènes de mier arc branchial chez un embryon de 3 semaines. B : transcription au niveau de quatre stacoloration à la b galactosides : initiation, bourgeon, cupule, clodase de l’ectomésenchyme che (Fig. 5). Dans la morphogenèse au stade « initiation » et au stade du bourgeon dentaire radiculo-alvéolaire, la gaine de Hertwig, les débris épithéliaux jouent un (d’après Yang CHAI 2000 in Biologie du développerôle important dans les interactions de ment, 2004). ces tissus par des facteurs de signalisation et de transcription (Fig. 6). Pour chaque dent, l’éruption se produit dans une croissance positive et négative allomètrique, sous l’effet d’interaction génétique dans trois éléments du système alvéolaire : la pulpe, le ligament, l’os alvéolaire (Fig. 7). Le développe-

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Fig. 4. Au XXIe siècle, apparition du nouveau concept de « Biologie systèmique ». Ainsi se trouve isolée l’étude du système dento-alvéolaire.

Actes. Société française d'histoire de l'art dentaire, 2010, 15

Fig. 5. Tableau récapitulatif des facteurs de transcription et des facteurs de signalisation, aux différents stades de l’odontogenèse connus aujourd’hui (Thesleff Y. A., 2003, Zhang C. et al., 2005, Bluteau et al., 2008). D’après documents Henri Magloire, communication IFRO 2008. Fig. 6. Interactions dans le système dento-alvéolaire au cours de la morphogenèse radiculaire aboutissant à la différenciation cellulaire des odontoblastes, cémentoblastes, fibroblastes, ostéoblastes et ostéoclastes.

ment du système dentoalvéolaire se complète par une intégration progressive dans la bouche puis dans la face.

Bibliographie BENOÎT Roland et al. Embryologie dentaire. Introduction à la biologie du développement, Julien Prélat, Paris, 1979, p. 142. BENOÎT Roland, « La canine dans le système alvéolo-dentaire », Revue ODF, Vol. 44, n°1, 2010, p. 17-45. BENOÎT Roland, Biologie systémique de la mandibule (à paraître). COULY Gérard, Développement céphalique, Edit CdP, Paris, 1991, 134 p. FAUCHARD Pierre, Le Chirurgien Dentiste ou Traité des maladies des dents, des alvéoles et des gencives, 2e éd., Paris, Pierre-Jean Mariette, 1746. GRANAT Jean, PEYRE Évelyne, « L’homme, ses incisives, son évolution et l’anatomie crânio-faciale au XVIe siècle », Biom. Hum. et Anthropl. 3-4, 2003, p. 135-143. MUGNIER André, Embryologie et développement crânio-facial, Masson et Julien Prélat, Paris, 1964, 302 p. WEIL Robert, Histologie dentaire, Masson et Julien Prélat, Paris, 1966, 229 p.

Fig. 7. Interactions génétiques dans la pulpe, le desmodonte et l’os alvéolaire aboutissant à des phénomènes de construction et de destruction tissulaires au cours de l’éruption.

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Un fossile du Brésil (Santa, 5900 ans BP, Piauí) témoin de l’histoire des dents de l’Homme A fossil from Brazil (Santa, 5900 years BP, Piauí) as evidence for the history of human teeth Évelyne Peyre *, Jean Granat **, Niède Guidon *** * Chercheuse CNRS, Commission recherche à l’Académie nationale de chirurgie dentaire (conseillère scientifique), UMR CNRS 7206 Eco-Anthropologie et Ethnobiologie et USM MNHN 104 ** Membre titulaire de l’Académie nationale de chirurgie dentaire, chercheur associé, UMR CNRS 7206 Eco-Anthropologie et Ethnobiologie et USM MNHN 104 *** Docteur en préhistoire, EHESS et FUMDHAM, São Raimundo Nonato, Brésil

Mots clés

Résumé

 biométrie  Brésil  carie dentaire  dents  dent en pelle  dysharmonie dento-

Nous présentons les résultats de l’étude des dents humaines fossiles datées de 5,9kaBP1 et retrouvées à la Toca da Santa (État du Piauí, Brésil). Ces découvertes odontologiques améliorent la connaissance archéologique de la région de São Raimundo Nonato où deux grottes avaient déjà fourni des dents humaines anciennes (Garrincho 14-20kaBP et Antonião 10kaBP) et où un site (Pedra Furada) attestait d’une activité humaine dès 50kaBP. Les dents de Santa témoignent de l’histoire de la conquête de l’Amérique et, avec les autres découvertes de la région, ébranlent la théorie classique d’un premier peuplement de l'Amérique par la Béringie vers le Nouveau Mexique vers 12kaBP. Leur étude qualitative et quantitative apporte une meilleure connaissance de l’histoire des dents.

dentaire

 dysmorphose radiculaire  Garrincho, morphologie  Piauí, premiers peuplements

 Santa

Keywords

Abstract

 biometry  Brazil  dental caries  teeth  shovel shape tooth  morphology  dento-dental disharmony  roots dysmorphosis  Piauí, first peopling  Santa

Results of the study of the fossil human teeth of 5,9kaBP old that were unearthed at la Toca da Santa (Piauí, Brazil) are presented. These odontological discoveries improve the archaeological knowledge of the region of São Raimundo Nonato, where two caves had already provided other ancient human teeth dated of (Garrincho 1420kaBP and Antonião 10kaBP) and where one archaeological site (Pedra Furada) gave evidence of a human activity since 50kaBP. The teeth of Santa and the previous discoveries in this region constitute evidences for the historical reconstruction of the conquest of America. These discoveries are challenging the classical theory about the peopling of America, through the Bering Land Bridge and towards the State of New Mexico on about only 12kaBP ago. Their quantitative and qualitative study gives a better knowledge of the dental history.

Les dents, par leur histoire, montrent une évolution buissonnante. Elles témoignent simultanément de l’histoire de l’Homme et de sa richesse adaptative durant toute la radiation du genre Homo. De plus, l'organisation de la dentition a revêtu une importance cruciale dans l'évolution mammalienne. Cette histoire prouve que notre système alvéolo-dentaire est déjà attesté à l’ère secondaire, dès 250Ma, avec le Cynodonte (Fig. 1), reptile mammalien hétérodonte et thécodonte

ancêtre des mammifères. Celui-ci avait déjà trois champs dentaires manifestes (incisif, canin, molaire), comme l’a montré notre collaboration anthropo-génétique avec Roland Benoît dans le cadre de l’Académie nationale de chirurgie dentaire. Or, la biologie du développement a mis en évidence l’existence de ces trois champs d’origine génétique différente chez la souris (Sharpe 1998) et chez l’Homme actuel (Benoît 2004). Les dents de chaque genre ou de chaque espèce pré-

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Fig. 1. Hétérodontie chez le Cynodonte. D’après D. Sigogneau-Russel, avec autorisation

sentent des traits caractéristiques. Si les connaître est informatif pour la radiation humaine, ceci peut être aussi vrai pour l’histoire d’un groupe isolé comme celui qui a peuplé le Brésil dès 50kaBP. Le Piauí préhistorique, dans le Nordeste brésilien, vient de fournir un nouvel humain vieux de 5,9ka : une série dentaire mise au jour à la Toca da Santa (Fig. 2). Ce fossile fait suite aux découvertes de dents humaines (Antonião 10kaBP ; Garrincho 14-20kaBP) dans cette région archéologique de São Raimundo Nonato.

Les dents de Santa, nouveau fossile humain du Piauí Notre travail préliminaire a consisté à dégager le fossile qui était inclus dans sa gangue. Nous avons récupéré 23 dents2 (Fig. 3). La série gauche de 16 dents est totalement préservée. Celle de droite est très incomplète ; nous n’avons retrouvé que 7 dents : 4 incisives (I1d, I2d, I1d, I2d), 2 prémolaires maxillaires (P3d, P4d) et la 1ère molaire mandibulaire (M1d). Comment expliquer cette conservation différentielle très asymétrique des dents ? S’agit-il d’un processus physiologique ou taphonomique3 ? Le crâne était absent. Maxillaire et mandibule étaient brisés en de menus fragments. Il est donc impossible d’affirmer, sans cette base osseuse, que les 9 dents manquantes soient tombées du vivant de l’individu ou postmortem.

Fig. 2. Carte du Parc national de Capivara. En bas, agrandissement de la région des découvertes. (FUMDHAM, avec autorisation)

L’analyse taphonomique apporte des éléments de réponse. La série dentaire gauche, enfouie à l’intérieur des sédiments, aurait été protégée de l’érosion superficielle, ce qui peut expliquer sa préservation intégrale. En revanche, la série droite qui affleurait à la surface de la gangue a pu être soumise à une altération mécanique comme les effets du piétinement, ce qui peut rendre compte d’une destruction sélective

Fig. 3. Dents de Toca da Santa . Cliché J Granat

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9 Tableau. Dimensions des dents de Santa, en millimètres. E. Peyre

des dents les plus exposées à la surface du sol. De plus, les dents, examinées in situ, ont une disposition physiologique modifiée : le côté droit (maxillaire et mandibule) était accolé au gauche. Nous suggérons que la contrainte transversale qui aurait endommagé le crâne après son enfouissement a été forte et rapide, car elle a brisé les os sans les déformer. Cette force d’écrasement n’était cependant pas considérable, car les dents sont bien conservées. Bien que les séries dentaires ne fussent pas disloquées, certaines dents n’étaient pas localisées selon la disposition anatomique attendue. Leur délocalisation pourrait traduire, ce qui est fréquent, le passage perturbateur d’animaux fouisseurs longtemps avant la découverte du fossile

Santa et les Hommes actuels et anciens : odontologie comparative

mique. La radiographie style panoramique (Fig. 4) montre des dents d’aspect normal.Nous avons mesuré ces dents (Tab. I) selon leurs diamètres (Ø) mésio-distal (MD) et vestibulolingual (VL) et les avons comparées à plusieurs échantillons mondiaux (Levy 1976 ; Kieser 2008) d’Hommes actuels (M, n~6000) et anciens : pour l’Australie (A), Kow Swamp (K, 10ka) ; pour l’Amérique (I), des préhistoriques du Pérou (P, n~50, 6,5-1kaBP) et ceux sympatriques du Piauí au Brésil, Garrincho (G) T1 (14kaBP) et T6 (Peyre, Granat, Guidon 2009 ; Peyre et al. 1998). Les dents de Santa ont une morphologie d’Homme moderne et les molaires forment une série de taille décroissante, ordre qui s’est instauré progressivement depuis les premiers Homo pour devenir classique aujourd’hui. Leurs dimensions entrent dans la variabilité actuelle mais avec quelques différences. Leurs racines sont courtes (/M), surtout celles de M3g, ce qui est un caractère évolué. Rien d’étonnant alors à ce qu’elles soient plus brèves qu’au Garrincho, T6 et surtout T1, qui sont plus anciens.

Nous avons disposé les 23 dents de Santa selon l’ordre anato-

Fig. 4. Radiographie des dents de Santa. (cliché CIMI)

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Fig. 7. Usure des faces occlusales de la seconde prémolaire et des molaires mandibulaires gauches. Cliché J Granat

Fig. 5. Canine maxillaire gauche de Santa avec sa racine en crochet. Cliché J Granat

dents. À la mandibule, ce trait est souligné par le contraste entre un segment anté-molaire court et un segment molaire très long médio-distalement. La M2, longue et étroite, est même très archaïque par sa forme comprimée. Au maxillaire, la petitesse vestibulo-linguale des dents les distingue des Amérindiens et des Australiens, surtout celle de l’incisive I2 et de la molaire M3. Les molaires maxillaires (M1, M2) ont une forme plus semblable à l’actuel qu’à leur prédécesseur sympatrique Garrincho T6. Quant à l’incisive mandibulaire I1, sa couronne est plus comprimée chez Santa qu’actuellement et qu’au Garrincho T6, mais elle l’est beaucoup moins que l’I1 du très ancien Garrincho T1 que son fort diamètre vestibulo-lingual rend très archaïque.

Environnement et originalités dentaires de Santa Chez Santa, 3 dents maxillaires, la canine (Cg), Cd non retrouvée, et les premières prémolaires (P3g,d) sont marquées par une originalité édifiée durant la maturation. La racine de Cg présente dans son 1/5e apical une coudure (~180°) en crochet qui dévie l’apex distalement (Fig. 5). P3g et P3d présentent aussi des racines fortement recourbées avec la partie apicale en crochet. Une furcation radiculaire se situe au ⅓ apical. Les 2 racines se séparent nettement, s’écartent l’une de l’autre (angle ~90°), la vestibulaire se dirigeant vestibulo-mésialement et Fig. 9. Incisives maxillaires face palatine, la linguale linguo-distalement (Fig. 6). montrant l’usure et la forme en pelle très Le système dento-alvéolaire est déterminé par le prononcée de l’incisive latérale gauche. A devenir des cellules des crêtes neurales sous l’indroite face linguale de l’incisive latérale Fig. 6. Premières prémolaires maxillaires fluence de gènes du développement nonHOX. Des maxillaire droite de Garrincho. Cliché J avec région apicale en crochet. En haut, Granat cellules de la crête neurale migrent dans la zone côté droit. En bas, côté gauche. Cliché J Granat orale au niveau des bourgeons maxillaires et mandibulaires. Celles qui proviennent de la crête mésencéphalique vont former le champ canin et celles des crêtes Odontométrie coronaire des dents maxillaires. Les couronrhombencéphaliques, le champ prémolaire-molaire. A l’inténes des dents maxillaires de Santa sont de longueur moyenne rieur de chaque champ, des germes dentaires se différen(/M) à courte (ØMD
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