Dissertation Balzac

October 23, 2017 | Author: MariaFernandes | Category: Honoré De Balzac, La Comédie Humaine, Literary Realism, Charles Baudelaire, Novels
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Dissertation sur Illusions Perdues...

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12/10/2016

« La manière balzacienne consiste plus précisément à faire deux choses à la fois : raconter et décrire, railler et penser, détruire et produire, analyser et enchanter, transfigurer en « … » matérialisant » Ebguy, Jacques-David et Novak-Ledevalia, Agathe ;« Balzac aujourd’hui et demain » ; Magazine Littéraire ; 2011 « J'ai maintes fois été étonné que la grande gloire de Balzac fût de passer pour un observateur ; il m'avait toujours semblé que son principal mérite était d'être visionnaire, et visionnaire passionné(…) Bref, chacun, chez Balzac, même les portières, a du génie »1. Ainsi écrit Charles Baudelaire sur le génie de Honoré de Balzac suite au décès de ce dernier. Nous percevons donc que Balzac met du génie dans son œuvre jusqu’aux moindres détails, n’avait-il pas rédigé La Comédie Humaine, son œuvre magistrale composé de plus de cent livres. Afin d’accomplir sa mission, Balzac s’est notamment intéressé à la dualité comme l’entend le Magazine Littéraire. La création balzacienne se base sur le principe des doublons, Balzac emploie deux procédés divergents et convergents à la fois pour unifier tout son œuvre. Ainsi, nous pouvons nous demander par quels moyens est-ce que Balzac emploie la dualité, caractéristique de l’écrivain afin de garder une unité tout au long de son œuvre ? Nous y répondrons en exploitant successivement toutes les facettes des duos mentionnées dans l’énoncé, dans le but d’expliquer comment est-ce que l’écrivain les manie ainsi que dans quel objectif, pour enfin déterminer comment tous les doublons font l’œuvre dans son ensemble. Tout d’abord, Balzac « raconte et décrit ». Pour cela, nous ne devons pas oublier que Balzac est un écrivain qui appartient au courant réaliste, qui s’est déroulé principalement au XIXème siècle. Ce dernier consiste à décrire le réel tel qu’il, sans aucun artifice. Par exemple, afin d’avoir une description des plus authentiques d’Angoulême pour son roman Illusions Perdues, Balzac a entretenu une correspondance avec Madame Zulma Carraud en juin 1836, 1 Baudelaire Charles, L’art romantique : Volume 3 de Œuvres complètes de Charles Baudelaire, Paris : Michel Lévy Frères, 1869 1

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quelques mois seulement avant la parution de Les deux poètes. « En tout cas, que je vous voie ou non, j’ai bien besoin des renseignements suivants sur Angoulême (…). Je voudrais savoir le nom de la rue par laquelle vous arriviez sur la place du Mûrier et où était ferblantier ; puis le nom de la rue qui longe la place du Mûrier et le palais de justice et menait à la première maison de M. Bergès ; puis le nom de la porte qui débouche sur la cathédrale ; puis le nom de la petite rue qui mène au Minago et qui avoisine le rempart, commençant auprès de la porte de la cathédrale, et où était cette grande maison où nous avons entendu quelquefois jouer du piano. Je voudrais savoir, si cela était possible, le nom de l’autre porte par où on descendait directement à l’Houmeau» 2 Grâce à ses renseignements, Balzac a pu inclure dans son récit la rue de Beaulieu, la rue du Minage, la porte Saint-Pierre, la place du Mûrier entre autres, ce qui a permis de donner l’aspect réaliste, véridique de l’œuvre. Balzac a su décrire la réalité telle qu’elle était dans les années de 1820, le temps du récit de Illusions Perdues. Bien que le réalisme soit ancrée dans le roman, selon Michel Raimond « Romancer est un verbe qui signifie raconter en français ». Par conséquent, Illusions Perdues est un roman qui ne possède pas que des descriptions réalistes et monotones mais aussi une histoire, avec des personnages. Les personnages ont une place capitale au sein de La Comédie Humaine, puisque le retour des personnages apparaît pour la première fois dans une œuvre. Et ce n’est pas seulement quelques dizaines de personnages, mais plus de deux milles personnages. C’est notamment grâce au retour des personnages que Balzac a pu écrire La Comédie Humaine comme une seule œuvre, dont les personnages récurrents créent des liens entre les divers romans. « (…) qu’ils seraient plus beaux réunis en un cycle où les mêmes personnages reviendraient et ajouta à son œuvre, en ce raccord, un coup de pinceau, le dernier et le plus sublime. Unité ultérieure (…) Elle surgit comme tel morceau composé à part, né d’une inspiration, (…) et qui vient s’intégrer au reste. »3 2 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5470610b/f347.item.r=Angoulê me 3 Proust Marcel, À la recherche du temps perdu ; 6. La prisonnière (Sodome et Gomorrhe, III). Tome 6, Volume 1, Paris : Nouvelle revue française, 1923, page 219 2

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Ensuite, la manière balzacienne consiste à « railler et penser », railler qui se défini par «user de l’ironie, de la moquerie, de sarcasmes» 4. Ainsi Balzac emploie de l’ironie, notamment par le biais des personnages, pour montrer les vices de la société, faire une critique des mœurs de la société française« D’où, en 1842, le choix du titre de La Comédie Humaine, qui, sans doute, dénonce l’hypocrisie, le jeu de rôles qui gouverne la société(…) »5. Les personnages balzaciens se distinguent par l’intérêt que Balzac a porté à la physiognomonie, une manière de se moquer des personnages et par conséquent de leurs défauts. Par exemple, Balzac emploie M. Séchard se fait nommer Ours « « Ce Séchard était un ancien compagnon pressier, que dans leur argot typographique les ouvriers chargés d'assembler les lettres appellent un ours. Le mouvement de va-et-vient, qui ressemble assez à celui d'un ours en cage, par lequel les pressiers se portent de l'encrier à la presse et de la presse à l'encrier, leur a sans doute valu ce sobriquet. En revanche, les ours ont nommé les compositeurs des singes, à cause du continuel exercice qu'ils font pour attraper les lettres dans les cent cinquante-deux petites cases où elles sont contenues. »6 . Il utilisa également les convives de Mme de Bargeton pour dénoncer la bassesse de l’aristocratie provinciale « Quant aux femmes, la plupart sottes et sans grâce se mettaient mal, toutes avaient quelque imperfection qui les faussait, rien n’y était complet, ni la conversation ni la toilette, ni l’esprit ni la chair. »7 ainsi que la société corrompu de Paris, comme le dit Lousteau « Je suis forcé d’aboyer après le libraire qui donne peu d’exemplaires au journal : le journal en prend deux que vend Finot, il m’en faut deux à vendre. Publiât-il un chef-d’œuvre, le libraire avare d’exemplaires est assommé. C’est ignoble, mais je vis de ce métier, moi comme cent autres ! Ne croyez pas le monde politique beaucoup plus beau que ce monde littéraire : tout dans ces deux mondes est corruption. Chaque homme y est ou 4 http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/railler/66245? q=railler#65499 5 Miterrand Henri, « L’œuvre d’une vie », Histoire de la littérature, Nathan 6 Balzac, Illusions Perdues : Edition de Jacques Noiray, Paris : Folio classique, 2013 7 ibid. 3

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corrupteur ou corrompu. »8. Par contre, avant de faire n’importe quelle critique, l’écrivain fait une réflexion critique et philosophique et cherche également à faire réfléchir son lecteur « Enfin, après avoir cherché, je ne dis pas trouvé, cette raison, ce moteur social, ne fallait-il pas méditer sur les principes naturels et voir en quoi les Sociétés s’écartent ou se rapprochent de la règle éternelle, du vrai, du beau ? »9. Dans Illusions Perdues, Balzac montre au lecteur que les plaisirs et les désirs de Lucien de Rubempré sont la cause de son échec. Par ce biais, Balzac essaie d’alerter la société sur les maux des plaisirs instantanés ainsi que ceux de la société de consommation grandissante, où l’argent guide les hommes. Nous pouvons ainsi relever que la critique des vices de la société rejoint la réflexion philosophique, Balzac emploie la critique pour atteindre son objectif, la réflexion. En plus de l’aspect critique et préméditée de l’écriture, la création balzacienne se compose également de « détruire et produire ». Précisément, la destruction de certains fondements de la société tel que le journalisme. « Il n’existe pas chez les journaliste balzacien d’éthique de l’acte critique ou du positionnement politique. »10 Nous pouvons le voir notamment à travers les yeux du Cénacle. Historiquement, le Cénacle est « Salle où Jésus Christ s’est réuni avec ses disciples quand il a célébré la dernière Cène »11, il symbolise donc les valeurs chrétiennes, à l’opposé du journalisme. « Le journalisme est un enfer, un abime d’iniquités, de mensonges, de trahisons, que l’on ne peut traverser et d’oùù l’on ne peut sortir pur, que protégéé comme Dante par le divin laurier de Virgile. »12 Tandis Balzac détruit la voie du travail facile, sans mérite qui caractérise le journalisme, au même temps il montre au lecteur les vrais valeurs de l’amitié « Nous ne reculons devant rien, répondit Michel Chrestien. Si tu avais le malheur de tuer ta maitresse, je t’aiderais à cacher ton crime et pourrais t’estimer encore ; mais, si tu devenais espion, je te fuirais avec horreur, car tu serais lâche et infâme par système. Voilàù le journalisme en deux mots. L’amitiéé pardonne l’erreur, le mouvement irréfléchi de la passion ; 8 ibid. 9 Balzac, Avant-Propos de 1842 10 Tuèrent Marie-Eve, « Splendeurs et misères des journalistes », Le Magazine Littéraire, 2011 11 http://www.eglise.catholique.fr/glossaire/cenacle/ 12 Balzac, Avant-Propos de 1842 4

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elle doit entre implacable pour le parti pris de trafiquer de son âme, de son esprit et de sa pensée. »13. Dans Illusions Perdues, Lucien de Remparé décide d’abandonner les bons fondements du Cénacle et ses véritables amis pour se lancer dans le journalisme, qui sera une des causes de sa chute à Paris. La même production et reproduction s’applique aux personnages de ces deux cercles, leur mansarde symbolisant chacun des deux. « Puis celle de Daniel d’Arthez, rue des Quatre-Vents, semblable en apparence à celle de Lucien, aussi nue, aussi pauvre, mais irradiée, sanctifiée par le travail assidu et probe et par l’amitié des membres du Cénacle qui s’y réunissent. »14 tandis que « en opposition complète avec la précédente ,la misérable mansarde de Lousteau, rue de la Harpe, qui réalise l’exemple le plus accompli du sordide, et porte l’empreinte du caractère de son occupant : tout n’y est que désordre, saleté, tristesse, indices d’une vie “sans repos et sans dignité“ »15 Nous concluons que Balzac produit certains fondements de la société tels la véritable amitié et détruit les vices de la société comme le monde corrompu du journalisme, dans le but de reproduire la société telle qu’elle était. En plus de la destruction et de la production des fondements, Balzac « analyse et enchante ». Les différents cercles sociaux de la société présents dans La Comédie Humaine sont dus au travail minutieux et analytique de l’auteur de Le Père Goriot. Une des ambitions de Balzac lorsqu’il écrit son œuvre majeure est de dresser un inventaire complet de la société de la première moitié du XIXème siècle mais également faire une étude analytique précise et complète des mœurs. Cette ambition a donné naissance aux Etudes Analytiques (section de La Comédie Humaine) ainsi qu’une analyse exhaustive des gens qui y habitaient, ce qui se lie avec le coté réaliste de l’œuvre. Balzac a utilisé sa propre expérience personnelle afin d’écrire sur le monde du journalisme ainsi que sur les dettes qui ravagent Lucien de Rubempré. Il s’est également renseignée sur l’histoire de l’imprimerie ainsi qu’il a tenu à décrire minutieusement non seulement la cartographie d’Angoulême mais également celle de Paris. Mais comme nous avons 13 Ibid 14 Noiray Jacques, Préface d’Illusions Perdues, Paris : Folio classique, 2013 15 ibid. 5

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soulevé auparavant, l’œuvre ne se compose pas seulement de la réalité dure et plate, il y a également les passages qui enchantent les lecteurs, par le biais du romantisme. Nous pouvons souligner la promenade de Eve Chardon et David Séchard. « Les deux amants marchèrent silencieusement vers le pont Sainte-Anne afin de gagner la rive gauche de la Charente. Eve, qui trouva ce silence gênant, s’arrêta vers le milieu du pont pour contempler la rivière qui de là jusqu’àù l’endroit où se construisait la poudrerie, forme une longue nappe où le soleil couchant jetait alors une joyeuse trainée de lumière. ; La belle soirée ! dit-elle en cherchant un sujet de conversation, l’air est à la fois tiède et frais, les fleurs embaument, le ciel est magnifique. ; Tout parle au cœur, répondit David en essayant d’arriver à son amour par analogie. Il y a pour les gens aimants un plaisir infini à trouver dans les accidents d’un paysage, dans la transparence de l’air, dans les parfums de la terre, la poésie qu’ils ont dans l’âme. La nature parle pour eux. »16 A travers ce passage, la nature devient primordiale. La nature est sublime et fascine les jeunes âmes, le décor est en symbiose avec les personnages. David mentionne également le poète qui communique avec la nature, qui est en lien avec la théorie des correspondances de Charles Baudelaire, où le poète est l’intermédiaire entre le monde sensible et l’homme, la nature n’étant comprise que par le poète. Enfin,

l’écriture

balzacienne

« transfigure »

le

réel

en

le

« matérialisant » Les Illusions Perdues de Balzac est une œuvre réaliste, mais l’écrivain réaliste ne se limite pas à transcrire la réalité, il y a une réflexion critique et philosophique. La création balzacienne n’est pas du réel, mais une transfiguration du réel, une illusion. « Ce sont les allées et venues du personnage qui organisent autour de lui la société qu’il s’agit de reproduire. (…) et si le travail de restitution du réel peut être qualifié de réaliste, il relève d’en tout cas d’un réalisme de type subjectif. »17Toutefois cette reproduction du réel existe sous les vrais moments historiques du XIXème siècle. Les héros des romans balzaciens ont vécu sous la Révolution et les Restaurations. « Ce que le romancier peintre des mœurs cherche à 16 Balzac, Illusions Perdues : Edition de Jacques Noiray, Paris : Folio classique, 2013 17 Noiray Jacques, Préface d’Illusions Perdues, Paris : Folio classique, 2013 6

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restituer, c’est moins ce qui est que ce qui passe, et le présent, pour lui, est fait aussi de ce qui advient et de ce qui disparaît. De là le plaisir visible qu’il prend à rappeler à ses jeunes lecteurs ce que furent vers 1820 le restaurant Flicoteaux, ou les Galeries de Bois du Palais-Royal. »18 Nous pouvons de nouveau voir comment l’illusion du réel et le réel en soi se côtoient dans l’œuvre, afin de se complémenter. Pour conclure, l’auteur reproduit le réel afin de transmettre la critique des mœurs, de produire une réflexion, de développer une histoire, d’enchanter les lecteurs, enfin de créer une œuvre où toutes les dualités se rejoignent et permettent que La Comédie Humaine soit une œuvre entière, unifiée entre elles malgré la centaine de romans ainsi que les deux milliers de personnages distincts. L’ambition de Balzac était de « d'écrire l’histoire oubliée par tant d’historiens, celle des mœurs » et « faire concurrence à l'état civil » et pour réussir là où tant d’autres auteurs avaient échoué, il devait employer des multiples facettes, pour montrer non seulement le Bien et le Mal, mais tout dont une société se compose. Balzac n’a négligé aucun des aspects, ce qui font de lui un génie visionnaire et que ses œuvres soient toujours d’actualité.

18 ibid. 7

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