BENHOUHOU Nabila Docteur en didactique du FLE Département de français ENS/LSH- Bouzaréah Alger- ALGERIE Courriel :
[email protected]
UFC/ENS-LSH-Bouzaréah, ALGER
MODULE
DIDACTIQUE GENERALE 1ème année L.M.D
2008-2009
CONTENUS DU MODULE
Introduction………………………………………………………………… 1- 1- La didactique : définitions………………………………………………. 1.1. Didactique et pédagogie……………………………………………….. 1.2. La didactique des langues……………………………………………… 1.2.1. Les objets d’enseignement…………………………………………… 1.2.2. Les conditions d’appropriation des savoirs………………………….. 1.2.3. L’intervention didactique……………………………………………..
2. Les concepts fondamentaux de la didactique……………………………. 2.1. La transposition didactique……………………………………………… 2.2. Le triangle didactique…………………………………………………… 2.3. Le contrat didactique……………………………………………………
3. Les notions fondamentales de la didactique des langues………………… 3.1. Acquisition……………………………………………………………… 3.1.1. Les théories d’acquisition…………………………………………….. 3.2. Apprentissage…………………………………………………………… 3.2.1. Les stratégies d’apprentissage…………………………………………
4. Les méthodologies………………………………………………………. 4.1. Méthodologie/Méthode………………………………………………… 4.2. La méthodologie traditionnelle………………………………………… 4.3. La méthode directe…………………………………………………….. 4.4. La méthode audio-orale……………………………………………….. 4.5. La méthode structuro-globale-audio-visuelle (SGAV)………………..
4.6. L’approche communicative…………………………………………… 4.6.1. Les principes de l’approche communicative....................................... 4.6.2. L’unité didactique…………………………………………………… 4.6.3. Les objectifs d’apprentissage………………………………………… 4.6.4. La relation « entrée/sortie »………………………………………….. 4.6.5. Le déroulement méthodologique……………………………………… 4.7. L’approche par compétences……………………………………………
Bibliographie…………………………………………………………………
SEANCE 1
INTRODUCTION Des transformations profondes affectent la société sur le plan de la mobilité des personnes, appelées à se déplacer dans un cadre personnel ou professionnel. Aussi, l’apprentissage des langues étrangères est-il devenu une nécessité. L’internationalisation du marché du travail a créé des besoins langagiers énormes. Ainsi, en tant que discipline , il ne s’agit pas seulement d’acquérir un savoir mais d’acquérir également un savoir-faire qui se caractérise par la capacité à communiquer avec autrui, c'est-à-dire à comprendre et à se faire comprendre. Il s’agit en somme d’agir par et dans la langue ; d’interagir. Si la finalité
de
l’enseignement/apprentissage
des
langues
est
de
doter
l’apprenant d’une capacité à agir dans et avec la langue étrangère, une réflexion sur les contenus à enseigner s’impose, c’est le travail de la didactique. 1- La didactique : définitions Le terme didactique , étymologiquement adjectif, a pour signification : « qui est propre à instruire » (du verbe grec : didaskein, enseigner). Comenius est un éducateur tchèque du XVIIe siècle qui le premier, a élaboré des manuels de langue, son but était de structurer explicitement l’enseignement de la langue.
Pour le
dictionnaire des concepts clés de pédagogie (F. Raynal et A.
Rieunier, 1997), cette expression « renvoie à l’utilisation de techniques et de méthodes d’enseignement propres à chaque discipline » (p.107). C’est pourquoi, il faut distinguer « la didactique des langues » de « la didactique des mathématiques » de « la didactique des sciences naturelles »…..Parce qu’il est difficile d’apprendre une langue étrangère, il semble nécessaire et naturel de se demander comment en améliorer l’enseignement, la didactique permet d’optimiser les processus d’apprentissage, les techniques retenues sont, bien entendu, différentes selon les matières et les disciplines puisqu’elles dépendent directement des contenus à enseigner. L’enseignement des langues va privilégier des contenus et des techniques différents de l’enseignement des sciences naturelles, par exemple. En somme, chaque matière à enseigner, chaque discipline aura sa propre didactique c’est ce qu’on appelle la didactique de la discipline parce que le terme n’est pas propre seulement aux langues. La didactique consiste en
l’ensemble des
procédures retenues pour
sélectionner, analyser, organiser les savoirs et les savoir-faire qui feront l’objet d’actions visant à leur appropriation par tel public, en fonction d’informations diverses relatives à ce public. La didactique est une discipline de recherche qui analyse les contenus (savoirs, savoir-faire,…) en tant qu’objets d’enseignement et d’apprentissage référés et référables à des disciplines scolaires. Ce qui spécifie la didactique c’est la focalisation sur les contenus et sur leurs relations à l’enseignement et aux apprentissages.
Elle ne se contente plus de traiter la matière à enseigner selon des schémas préétablis, elle pose comme condition nécessaire la réflexion épistémologique de l’enseignant sur la nature des savoirs qu’il aura à enseigner, la prise en compte
des
représentations de l’apprenant par
rapport à ce savoir épistémologique de l’élève. L’épistémologie étant l’étude de la connaissance, elle peut se conduire selon deux axes : selon Piaget ou selon Bachelard : le
premier axe
rassemble les épistémologues qui tentent de répondre à la question : « Comment un individu acquiert-il ses connaissances tout au long de son développement ? », les réponses à cette question intéressent surtout
les
pédagogues. Le deuxième axe rassemble les épistémologues qui cherchent à répondre à la question : « comment se développent les connaissances dans tel domaine particulier du savoir ou des différents domaines ? Le mot épistémologie est alors synonyme de « philosophie des sciences ». Le concept de didactique a connu un engouement particulier dans les années
soixante-dix, dès lors que le
Dictionnaire
de
Didactique
des
Langues publié par Robert Galisson et Daniel Coste en 1976, a contribué à répandre l’expression « didactique des langues » en France et dans certains pays francophones. Il faut ajouter qu’une nouvelle terminologie est venue fleurir le monde de l’enseignement : « évaluation », « objectifs différenciée »,
comportementaux », « pédagogie
ce qui pousse les didacticiens à distinguer didactique de
pédagogie . Ces deux concepts s’opposent d’une certaine manière.
Puisque enseigner consiste à mobiliser des moyens propres à assurer la transmission et l’appropriation des contenus d’enseignement, l’enseignement résulte de la combinaison interactive de la didactique et de la pédagogie.
1.1. Didactique et pédagogie
Aujourd’hui, le mot didactique l’emporte sur le mot pédagogie : « terme fatigué par un trop long usage » [Jean-François Halté, 1992 : 9] parce qu’il comporte surtout l’idée centrale relative aux savoirs. C’est la discipline de référence des
pratiques
interactions
qui
d’enseignement : « La
peuvent
s’établir
d’enseignement/apprentissage
entre
dispensateur
et
de
ce
savoir
un
un
didactique dans
savoir
élève
étudie
une
situation
identifié, un
récepteur
de
les
ce
maître savoir »
[Dictionnaire des concepts clés, 1997 : 108]. Mais elle n’est pas pour autant une discipline appliquée. L’histoire de la didactique manifeste un dégagement progressif d’une conception naïve fondée exclusivement sur la pratique, l’expérience et un sens prétendu « bon ». Elle voit se constituer des concepts méthodologiques originaux, voit s’affirmer la nécessité d’une théorisation propre. La didactique est une discipline de recherche caractérisée par « des questions spécifiques (en l’occurrence la constitution, la description, les variations des contenus et de leur mise en œuvre via l’enseignement, ainsi que leurs modalités d’appropriation…), des théories, des concepts, des méthodes de recherche et des recherches empiriques (recueillant et traitant des données). » [Y. Reuter, 2007 : 69].
La pédagogie représente « toute activité déployée par une personne pour développer
des
apprentissages
précis
chez
autrui » (Dictionnaire des
concepts clés, 1997 : 223). Elle ne se centre pas sur les contenus, c’est ce qu’explique Y. Reuter dans les propos suivants : « On désigne généralement par pédagogie un mode d’approche des faits d’enseignement et d’apprentissage qui ne prend pas spécifiquement en compte les contenus disciplinaires mais s’attache à comprendre les dimensions générales ou transversales des situations qu’elle analyse et qui sont liées aux relations entre enseignant et apprenants et entre les apprenants eux-mêmes, aux formes de pouvoir et de communication dans la classe ou les groupes d’apprenants, au choix des modes de travail et des dispositifs, au choix des moyens, des méthodes et des techniques d’enseignement et d’évaluation. » [2007 : 163]. Le
didacticien
est
un
spécialiste
de l’enseignement
d’une
(ou des)
discipline(s), il s’interroge sur les notions et les concepts qui devront se transformer en contenus à enseigner. L’une de ses préoccupations majeures touche à l’appropriation des savoirs. Quant au pédagogue, c’est un praticien qui résout des problèmes concrets d’enseignement/apprentissage. Ces deux concepts, didactique et pédagogie ne s’opposent pas mais sont
complémentaires, comme le souligne J-F
Halté : « (…) la didactique constitue un prolongement naturel de la pédagogie. Elle en est une région, solidement attachée et dépendante. En même temps, ce faisant, en tant qu’elle explore des problèmes étroitement circonscrits (qu’est-ce que savoir écrire ?) et qu’elle convoque à ce propos ses propres référents, qu’elle développe ses propres méthodologies, elle
s’éloigne
de
la
pédagogie
et
tend
à
se
constituer
en
discipline
autonome ».[1992 : 15] La didactique s’occupe donc des contenus (les savoirs) à enseigner, tandis que la pédagogie s’occupe des moyens (les démarches) pour transmettre ces contenus. Jean-François Halté [1992 : 3] présente le schéma suivant pour circonscrire le champ de la didactique : SAVOIRS CONTENUS
ENSEIGNANT
ELEVES
MOYENS DEMARCHES
L’enseignement résulte de la combinaison interactive de la didactique et de la pédagogie. En didactique, l’accent est mis sur les contenus à enseigner, donc sur l’acquisition ; la pédagogie est une activité qui implique une relation entre l’enseignant et l’apprenant
et qui met l’accent sur les aspects psycho-
affectifs, donc sur la qualité de l’acquisition.
La préoccupation pédagogique génère des besoins didactiques : quels effectifs sont compatibles avec une pratique d’enseignement différencié. Il ne suffit pas de mettre les apprenants en situation de faire quelque chose sur le modèle classique : « on apprend en faisant comme….. » pour qu’ils apprennent à le faire. En résumé, la didactique se définit par : -a- une réflexion sur les objets d’enseignement, puisqu’elle est l’interface entre l’école comme lieu de diffusion de savoirs et l’ensemble des savoirs savants et sociaux, -b- des recherches sur les conditions d’appropriation des savoirs, puisqu’elle est l’interface entre les savoirs et le sujet apprenant, -c- des recherches sur l’intervention didactique, à l’organisation des situations d’enseignement, à la construction de séquences didactiques, à l’adaptation au type de public, à l’approche de la classe et de son fonctionnement, puisqu’elle est l’interface entre l’enseignant médiateur et le point d’arrivée (une discipline de référence des pratiques d’enseignement). Le point commun étant l’attention portée aux savoirs scolaires disciplinaires, la didactique étant une discipline théorico-pratique dont l’objectif est de produire des argumentations solidement étayées et cohérentes susceptibles d’orienter efficacement les pratiques d’enseignement.
Activité de réflexion : Expliquez la définition de la notion de didactique proposée par Jean-Maurice Rosier : « (…) la didactique n’est pas seulement une discipline de référence pour la pratique enseignante, elle est une discipline d’action et d’intervention,
carrefour entre savoirs savants propres qu’il faut modéliser pour en faire des objets d’enseignements (logique de la recherche), savoirs de référence qui n’ont pas à être enseignés (à dominante psychologique), qu’il convient de croiser avec les savoirs issus de l’expérience (logique scolaire) pour permettre la facilitation, l’amélioration des pratiques de terrain et l’appropriation par les élèves des savoirs langagiers et culturels. » [2002 : 101].
SEANCE 2 1.2. La didactique des langues
Enseigner une langue appelle à considérer des contenus différents de ceux d’autres disciplines comme les mathématiques ou les sciences naturelles. Les contenus de la didactique des langues relèvent de disciplines de référence telles que la linguistique, la littérature, la poésie, et plus récemment d’autres disciplines comme la sociolinguistique, la psycholinguistique, la communication, l’analyse du discours, l’ethnographie de la communication…. Jean-François Halté (1992) pose le problème de savoir quels liens existent « entre une liste rationnellement organisée de savoirs à enseigner et la dynamique de l’apprentissage ? Comment améliorer la coïncidence de ce qui s’enseigne et de ce qui s’apprend ? ». En d’autres termes, l’objectif principal est de produire des argumentations savantes et cohérentes susceptibles d’orienter efficacement les pratiques d’enseignement. La didactique des langues s’intéresse aux : -1- savoirs linguistiques : éléments et règles de fonctionnement de la langue : phonétique, lexique, vocabulaire, syntaxe, grammaire, sémantique, ….. -2- compétences communicatives : savoir-faire, règles, emplois et moyens
pour agir et interagir : (voir plus loin les composantes de la « compétence de communication » : manières de présenter/se présenter, manières d’exprimer son point de vue, manières d’expliquer/d’exposer, manières d’informer/de s’informer, ….. Il s’agit en somme d’un ensemble de paramètres qui sont au même titre indissociables de la langue car inscrits dans la langue. Toute réflexion
didactique
porte
sur
les objets
d’enseignement,
les
conditions d’appropriation des savoirs et sur l’intervention didactique. 1.2.1. Les objets d’enseignement
La didactique s’intéresse à leur nature cognitive : savoir ou savoir-faire. Elle s’intéresse à leur statut épistémologique : savoir savant ou savoir social.
Elle
s’intéresse
à
la
méthodologie
de
leur
construction :
transposition ou élaboration de savoirs. Elle s’intéresse aussi à leur organisation en curricula et à leur histoire institutionnelle. 1.2.2. Les conditions d’appropriation des savoirs
La didactique s’interroge sur la construction des concepts et des notions dans l’apprentissage, leur construction, les pré-requis qu’ils supposent, les représentations ordinaires qu’en ont les apprenants et les différentes sortes d’obstacles à l’apprentissage que tous susciter.
ces concepts et notions peuvent
1.2.3. L’intervention didactique
Elle s’intéresse à l’approche de la classe et à son fonctionnement : tâches de
l’enseignant,
l’organisation
des
situations
d’enseignement,
la
construction de séquences didactiques, l’adaptation au type de public. Il y a intervention pour structurer l’apprentissage, pour solliciter, pour répondre aux besoins de l’apprentissage. A
ce
propos,
Jean-François
Halté
[1992 :
8]
souligne
que
« l’opérationnalisation des objectifs d’enseignement ne peut s’effectuer sur la seule base de l’application des théories de l’apprentissage : elle implique aussi une connaissance profonde des savoirs à enseigner », pour exemple, connaître la grammaire est une chose, savoir l’enseigner est une autre. Dans l’apprentissage d’une langue, des éléments de tous ordres s’inscrivent parmi lesquels il faut distinguer : - des savoirs linguistiques (phonétique, lexique, grammaire, les règles de fonctionnement de la langue) ; - des compétences communicatives (des savoir-faire
répondant à des
situations de communication définies) ; -
un
comportement
culturel (ritualisation
des
échanges)
adéquat
indissociable de la langue. - des savoirs encyclopédiques (connaissances du monde). Il est vrai que le terme « didactique » a été longtemps synonyme de « linguistique appliquée » parce que la didactique des langues a été longtemps dépendante des recherches de la linguistique. Mais elle s’est peu à peu dégagée de cette tutelle pour chercher des réponses à ses questions en interrogeant
d’autres disciplines comme la psychologie, la sociologie, les sciences de l’éducation, l’analyse du discours, …. Cependant la connaissance des concepts de la linguistique, des différentes théories est nécessaire à un enseignant parce qu’elle lui permettra de mieux décider des contenus linguistiques à mettre en place dans sa classe, de saisir la meilleure manière de les appréhender en classe. Activité de réflexion : Les savoirs linguistiques (phonétique, lexique, vocabulaire, syntaxe, grammaire, sémantique) suffisent-ils pour la maîtrise de la langue étrangère ? Pourquoi ?
SEANCE 3 : 2. Les concepts fondamentaux de la didactique 2.1. La transposition didactique
Cette notion a été proposée par Michel Verret (1975) dans le domaine de la sociologie, puis reprise par plusieurs auteurs dont Yves Chevallard (1985) dans le champ de la didactique des mathématiques, qui dit que « tout
projet
social
d’enseignement
et
d’apprentissage
se
constitue
dialectiquement avec l’identification et la désignation de contenus de savoirs comme contenus à enseigner » [1991 : 38]. Cette notion permet de rendre compte « du passage d’un contenu de savoir précis à une version didactique de cet objet de savoir ». L’auteur distingue deux temps, une première phase transpose le « savoir savant » en « savoir
à
enseigner » à
travers les
Instructions
Officielles
et
les
programmes mis en texte dans les manuels et/ou dans les programmes ; une seconde phase transpose l’objet à enseigner en objet d’enseignement dans le contexte de la classe. C'est-à-dire le savoir savant, lorsqu’il est transposé en savoir à enseigner, subit des transformations adaptatives qui vont le rendre apte à prendre place parmi les objets d’enseignement, ce travail est appelé « transposition didactique ».
De façon schématique : -a- La détermination d’une politique éducative décide des finalités et des objectifs généraux d’un système éducatif. La réalisation de ces objectifs généraux passe par la sélection de domaines et des disciplines de référence susceptibles de fournir des éléments de savoirs qu’il convient d’aménager. Le processus de transposition les transforme en objets d’enseignement. -b- Des programmes les ordonnent en fonction des niveaux scolaires. -c- L’enseignant passe des objets d’enseignement aux objets effectivement enseignés apportant de multiples transformations.
Le concept de transposition didactique est important pour la didactique des langues dans la mesure où la linguistique et la littérature, les deux disciplines-mères de la didactique des langues, ont été les deux disciplines dans lesquelles
sont puisés les savoirs savants, savoirs à transposer, à
transmettre, à expliquer aux apprenants. Aujourd’hui, les savoirs à transposer sont
également
puisés
dans
les
autres
disciplines
(sociolinguistique,
psycholinguistique, …) Ces savoirs ont fourni la base de l’enseignement des langues en général, en référence à l’étude de la langue (la linguistique) et l’étude du texte littéraire ( la littérature), et plus précisément l’écriture : la production écrite est pensée comme le lieu où l’apprenant va faire la synthèse de ses
apprentissages issus des deux disciplines-mères. En d’autres termes, la production écrite
permet à l’enseignant de vérifier
le processus de
transposition didactique. Exemple concret de transposition didactique : Le schéma de communication de Roman Jakobson, transposé de la linguistique à l’enseignement des langues. La linguistique et la littérature ont longtemps constitué les noyaux durs de la didactique, ce sont les domaines privilégiés de la transposition didactique en matière d’enseignement des langues. Aujourd’hui, le domaine s’élargit à d’autres champs : la didactique mobilise les contenus de la sociologie, la psychologie, l’anthropologie, la communication,
l’ethnographie
de
la
communication, les
sciences
cognitives ; disciplines appelées disciplines contributives. Cependant, il faut souligner que la didactique ne se définit pas par l’application directe des données des autres sciences ou disciplines, mais par l’usage qu’elle en fait pour son propre compte, comme le souligne Christine Barré de Miniac : « Cela n’est possible que si elle est conçue comme
une
dynamique
interactive
entre
travail
sur
recherche. » [1996 : 102]. 2.2. Le triangle didactique
La didactique est une discipline qui articule trois pôles : - le pôle « savoirs ». - le pôle « élèves ».
le terrain
et
- le pôle « enseignants ». Chaque pôle représente une problématique qui doit être travaillée de façon autonome : - Le pôle « savoirs » représente l’élaboration didactique qui consiste à recueillir
et à sélectionner les savoirs savants susceptibles de conduire
aux buts et aux
finalités du système
éducatif. Ces savoirs seront
transformés/construits en objets d’enseignement établis dans un programme. - Le pôle « élèves » constitue tout ce qui est relatif à l’appropriation des savoirs, ce sont alors les théories de l’apprentissage qui sont mises en jeu. - Le pôle « enseignants » représente tout ce qui est relatif à l’intervention didactique
qui consiste en l’explicitation des objectifs, c’est le contrat
didactique, la mise en place des stratégies d’enseignement : adaptation du programme à la classe,
organisation du travail en projets ou autres, la
progression selon les classes et les niveaux. Le schéma récapitulatif peut être représenté de la manière suivante, selon Jean-Maurice Rosier [2002 : 108] :
SAVOIRS (Transposition)
ENSEIGNANT
APPRENANT
(Formation)
(Contrat)
Ce schéma montre la centration sur les contenus (relation entre « savoirs » et « enseignant »), la centration sur l’apprentissage (relation entre « savoirs » et « apprenant ») et la centration sur les relations (relation entre « enseignant » et « apprenant »). Ces trois éléments jouent un rôle important dans les choix pédagogiques : - « Enseignant » : âge ? Formation ? Expérience ? Natif ? Non natif ? Connaissance de la langue (ou de l’objet) à enseigner ? -
« Apprenant » :
âge ?
Classe
mixte
(ou
non) ?
Nombre ?
Niveau
homogène/hétérogène ? - « Savoirs » : langue proche/éloignée des apprenants ? Degré de connaissances théoriques linguistiques ? Cependant, il faut noter que ce schéma est à insérer dans une situation d’enseignement précise : temps, lieu, durée, rythme, programmes, … qui jouent un rôle dans la réussite de l’apprentissage.
2.3. Le contrat didactique
L’enseignant et les apprenants sont liés par un contrat implicite ( ou explicite) d’enseignement/apprentissage.
C’est
un
contrat
passé
entre
l’enseignant et les apprenants, qui garantit, si les clauses du contrat sont respectées par chacun, que les échanges dans la classe se passeront sans difficulté majeure. Il s’agit donc de l’espace des interactions entre les différents acteurs d’une situation de classe : quelles régulations ? Quelles contraintes ? Quelles déterminations ? Y. Reuter définit la notion de contrat didactique comme « (…) l’ensemble des régulations et de leurs effets, reconstruits à partir des interactions entre enseignants et élèves, issus de la situation et liés aux objets de savoirs disciplinaires mis en jeu dans cette situation. » [Y. Reuter, 2007 : 59]. Ce contrat légitime les statuts, les rôles, les attentes de chacun. C’est une négociation dont le but est de procéder à des ajustements qui constitueront une base à l’évaluation finale.
Activité de réflexion Comment se manifeste sur le terrain le concept de « contrat didactique », donnez des exemples concrets issus de votre expérience personnelle.
SEANCE 4 : 3. Les notions fondamentales de la didactique des langues Parmi les concepts fondamentaux de la didactique et notamment de la didactique des langues qui permettent d’en circonscrire la spécificité, la notion de situation d’enseignement / apprentissage constituée d’éléments hétérogènes
dont
il
faut
tenir
compte, les
notions
d’acquisition et
d’apprentissage. La didactique se nourrit donc des théories du langage et de l’apprentissage. Qu’est-ce qu’une situation d’enseignement/apprentissage ? L’élargissement du public scolaire (école obligatoire jusqu’à 16 ans) a entraîné une hétérogénéité des apprenants dans les classes, nécessitant de réfléchir à d’autres parcours d’enseignement et à la diversification des démarches et activités selon les disciplines. La situation d’enseignement/apprentissage est une situation particulière de communication qui articule trois composantes : - un formateur (enseignant) ayant l’intention d’instruire, de faire apprendre et d’apprendre à apprendre, donc de provoquer un apprentissage précis, - des formés (élèves) venus pour apprendre, - un contenu d’enseignement. Ces trois composantes font qu’on passe d’une situation A à une situation B, en passant par des actions précises, le but est de faire acquérir de nouvelles capacités. En effet, enseigner consiste à mobiliser des moyens propres à assurer la transmission et l’appropriation des contenus d’enseignement.
3.1. Acquisition
L’enseignant qui cherche à atteindre son objectif se tourne vers psychologie
et
ses
recherches
pour
avoir
des
réponses
à
la ses
interrogations. L’enseignement, pour être efficace, doit avoir recours à des techniques de guidage et de résolution de problèmes, rendant l’apprenant plus autonome. Pour la problématique du domaine, les notions fondamentales suivantes sont retenues : - L’inné et l’acquis L’homme naît avec des dispositions qui lui permettent de comprendre et de parler une langue, à la naissance, l’enfant a la possibilité d’apprendre toute langue. L’environnement linguistique et social est incontestable. Pour un
enfant,
l’acquisition
d’une deuxième
langue
ressemble
à
l’acquisition de la langue maternelle. Quand on apprend une langue étant adulte, on perd la facilité d’acquisition, mais on développe des stratégies : connaissance des phénomènes linguistiques, conceptualisation….. - Le rôle de la mémoire dans le processus d’acquisition
L’apprentissage ne peut se faire sans un travail de la mémoire. Le système cognitif est muni d’une mémoire qui permet à l’organisme de réagir différemment à des évènements semblables. Les différents types de mémoire : - mémoire à court terme : système qui permet de conserver l’information pendant un laps de temps court (l’acquisition du sens d’un mot, mais qu’on oublie par la suite, …), - mémoire à long terme : système qui permet de conserver les informations le plus longtemps (l’acquisition de règles grammaticales, …), - mémoire procédurale qui concerne les apprentissages et les procédures (le savoir-faire),
exemple : « comment se présenter, rédiger une lettre
administrative, …. », - mémoire lexicale qui stocke la forme phonétique et orthographique du mot. - La spécificité du langage Beaucoup d’expériences ont été menées pour apprendre à l’animal à parler (Vicki, le chimpanzé), mais toutes les expériences ont échoué, donc le langage est une spécificité humaine.
3.1.1. Les théories d’acquisition
Les théories mécanistes : le behaviorisme Le behaviorisme, associé à Skinner, a eu une grande influence en psychologie dans les années 20. La démarche consiste à observer des faits notamment l’étude des pratiques d’enseignement. L’acquisition du langage se fait par un processus d’imitation et de renforcement : « stimulus-réponse-renforcement »,
l’approche a fait apparaître les exercices structuraux dans l’élaboration
de
programmes divisés en étapes et en fonction d’objectifs d’apprentissage très précis selon une progression qui va du plus simple au plus complexe. En classe, les élèves automatisent une situation-type par répétition. L’apprentissage est envisagé comme une situation optimale pour la production de réponses automatisées, exemple, « il faut que » entraîne le subjonctif, la répétition de
ce
processus
crée
un renforcement.
L’appropriation d’un
élément
linguistique permet de le réintroduire sans effort. Mais cette théorie a montré ses limites du fait qu’elle ne prenait pas en compte l’aspect novateur des productions langagières et que l’apprentissage est réduit à l’imitation. Les théories interactionnistes Elles se développent dans les années 70 et 80 avec les travaux de J. Piaget (le constructivisme) et de L. Vygotsky (le socioconstructivisme). La théorie piagétienne montre la relation entre le développement cognitif de l’enfant et le développement langagier. Pour Piaget, le langage de l’enfant n’est ni inné, ni acquis mais résulte de l’interaction entre le développement cognitif et le développement linguistique, c'est-à-dire que l’évolution des connaissances est en relation avec l’âge et la maturation de l’enfant. La didactique des langues s’est nourrie de cette théorie pour mettre en place la progression des contenus et des choix didactiques en fonction du point de départ de chaque sujet. Quant à Vygotsky, il préconise l’apprentissage social. Il met l’accent sur la dynamique de l’interaction sociale dans les processus d’acquisition, les structures s’acquièrent en fonction du niveau cognitif atteint par l’enfant et en fonction de la motivation basée sur l’interaction sociale. Le statut social d’une langue influe sur l’apprentissage, des schèmes représentatifs se bâtissent chez l’enfant dans l’interaction avec le milieu physique tout comme des
schèmes communicatifs se bâtissent au contact du milieu social. Pour lui, être mûr ne suffit pas. 3.2. Apprentissage
Il existe des manières différentes d’apprendre selon les individus, selon la question des attitudes et des motivations face à la langue étrangère et selon l’âge le plus favorable à l’acquisition. En didactique, la question de l’apprentissage est essentielle : il s’agit de l’apprentissage par les apprenants de contenus d’enseignement ciblant à la fois, les savoirs et les savoir-faire. L’apprentissage est appréhendé sous deux sens : l’apprentissage comme processus (le fait d’apprendre) et l’apprentissage comme résultat ou effet du processus (le fait d’avoir appris). De même qu’il faut distinguer l’apprentissage à long terme (maîtriser la langue dans différentes situations) et l’apprentissage à court terme (maîtriser un concept, une donnée dans une situation particulière : « se présenter » en langue étrangère). Il faut noter que l’apprentissage en situation scolaire est contraint, inséparable d’une programmation didactique, organisé, a une dimension formelle, c'est-àdire largement explicite (rôle de l’enseignant) et est constamment évalué. Apprendre à apprendre est devenu une activité pédagogique en soi dans le cours de langue étrangère dès les années 80, suivant en cela les théories du constructivisme. L’apprenant participe activement à la des savoir-faire.
construction
3.2.1. Les stratégies d’apprentissage
Les différentes stratégies d’apprentissage mises en œuvre pour apprendre une langue ont été classées par O’Malley et Chamot de l’Université de Cambridge (1990) et par P. Cyr (1998). Les stratégies cognitives Elles impliquent une interaction avec la matière à l’étude, une manipulation de cette matière et une application de techniques dans l’exécution d’une tâche d’apprentissage. Ses composantes sont les suivantes : - la répétition ; - l’utilisation de ressources ; - le classement ou le regroupement ; - la prise de notes ; - la déduction ou l’induction ; - l’élaboration ; - la traduction ; - le transfert des connaissances ; - l’inférence. Les stratégies métacognitives
Elles impliquent une réflexion explicite de
l’apprenant sur son propre
processus d’apprentissage. Ses composantes sont les suivantes : - l’anticipation ou la planification ; - l’attention générale ; - l’autogestion ; - l’autorégulation ; - l’identification d’un problème ; - l’autoévaluation. Les stratégies socio-affectives Elles impliquent l’interaction de l’apprenant avec une autre personne, dans le but de favoriser l’apprentissage et le contrôle de la dimension affective accompagnant l’apprentissage. Ses composantes sont les suivantes : - la clarification/vérification ; - la coopération ; - le contrôle des émotions ; - l’auto-renforcement. L’apprenant adopte donc des stratégies de résolution des problèmes, par exemple,
en
situation
scolaire,
l’apprenant
élabore
la
règle
avec
l’enseignant, il interpelle son camarade quand une question n’est pas comprise. Activités de réflexion Activité 1 Analysez l’impact de la théorie vygotskyenne dans un des projets du manuel scolaire (Cycle moyen ou secondaire). Activité 2
Observez les attitudes des élèves d’une classe lors d’une séance de compréhension de l’écrit, quelles stratégies d’apprentissage développent-ils ?
SEANCE 5 : 4. Les méthodologies On
a
tendance
à
penser
que
la
meilleure
méthode,
pour
l’enseignement/apprentissage d’une langue, est celle qui intègre le plus possible d’éléments : textes diversifiés, contes, romans, articles de journaux, de revues, …. En réalité, la question fondamentale
est celle de la
cohérence pédagogique, c'est-à-dire la compatibilité et la convergence des outils, des techniques et des procédés mis en œuvre dans une méthode, elle-même cohérente avec une didactique d’ensemble. 4.1. Méthodologie/Méthode
La méthodologie représente l’étude des méthodes et de leurs applications. C’est le niveau où se définissent les principes et les hypothèses qui soustendent l’élaboration, où
s’opèrent les choix des théories de référence :
les théories linguistiques, les théories de l’apprentissage. C’est un
ensemble construit de procédés, de techniques, de méthodes
articulés
autour
« méthodologie à
des
discours
matrice
structuraliste », « les communicative »…etc.
théoriques de référence,
grammaticale »,
méthodologies
se
« méthodologie réclamant
de
exemple : d’inspiration l’approche
Les
méthodologies
d’enseignement
des
langues
étrangères
sont
fondamentalement destinées à accompagner les processus d’appropriation des apprenants. Une méthodologie est un appareil conceptuel qui fonde l’enseignement des langues en prenant en compte : -1- les objectifs fondamentaux : apprendre une langue pour en faire quoi ? -2- les théories de référence ne se limitent plus uniquement aux théories linguistiques
mais
sociolinguistique,
puisent
des
concepts
psycholinguistique,
dans d’autres
théories
de
disciplines :
communication,
ethnographie de la communication. La compétence de communication est un concept méthodologique qui met en avant un
savoir de type procédural qui se réalise par deux canaux
différents : écrit et oral ; et de deux manières différentes : compréhension et production. Elle met en lumière les interactions incessantes et continues entre l’écrit et l’oral, entre la compréhension et la production. En effet, les objectifs de tout programme d’apprentissage grands
types
de
compétences :
la
sont définis par quatre
compréhension
orale (CO),
la
compréhension écrite (CE), la production orale (PO) et la production écrite (PE) qui peuvent
être
regroupées
en
compétences
réceptives
et
en
compétences productrices. Une méthode matérialise d’une certaine manière, un certain nombre d’orientations théoriques. Elle vise un apprentissage guidé avec plusieurs types d’activités
qui
obéissent
dans leur
forme, leur
choix
et
leur
succession à un principe général d’apprentissage se traduisant au terme de ces activités par une amélioration des compétences de l’apprenant. Le terme « méthode » représente donc deux acceptions :
1) Le matériel d’enseignement comportant le manuel/livre et/ou la cassette
audio ou vidéo, exemple : la méthode « Café-crème »,
« Espaces », « Reflets »….pour l’enseignement du français envisagé en tant que langue étrangère. 2) Une manière de s’y prendre pour enseigner et pour apprendre : un ensemble de procédés et de techniques de classe destinés à favoriser une orientation particulière pour acquérir une langue, exemple : « la méthode directe », « la méthode SGAV (Structuro Globale Audio Visuelle ) ». Le Dictionnaire des concepts-clés (1997) définit la méthode comme « (Une) organisation codifiée de techniques et de moyens mis en œuvre pour atteindre un objectif. « Codifiée » signifie ici que les parties du tout forment un ensemble cohérent, formalisé et communicable, qui, appliqué correctement, produit le même résultat. » [1997 : 227]. Une méthode correctement appliquée donne, à quelque chose près, des résultats attendus. - « méthodologie » : ensemble de principes, de choix intellectuels - « méthode » : supports matériels concrets, démarches, l’outil avec lequel travaillent les enseignants au jour le jour dans les classes par lequel s’organisent une relation, un comportement d’apprentissage guidé avec des activités qui obéissent dans leur forme, leur choix et leur succession à un principe général d’apprentissage et qu’au terme de ces activités, cela se traduit par une amélioration significative des compétences de l’apprenant. Pour H. Besse, « une méthode pourrait être plus précisément caractérisée comme un ensemble discursif raisonné, portant plus ou moins cohérent d’hypothèses (d’ordre linguistique, psychologique,…) visant à organiser les débuts de l’enseignement/apprentissage en une combinaison dont on suppose
qu’elle est plus efficiente que d’autres pour atteindre certaines finalités qu’on prête à cet enseignement/apprentissage. » [1995 : 101].
Quelles sont les différentes méthodologies qu’a connues l’enseignement des langues ? 4.2. La méthodologie traditionnelle
Elle
se
caractérise
par
l’enseignement
d’une
langue
normative,
enseignement centré sur l’écrit, par conséquent l’importance est donnée à la grammaire, la littérature étant le domaine privilégié de l’apprentissage d’une langue. Le recours à la traduction était fréquent. 4.3. La méthode directe
En réaction à la méthodologie traditionnelle, le recours à la traduction est éliminé, prohibé. C’est une méthode active, naturelle dont le principe est d’acquérir une langue au contact de ceux qui la parlent, c’est le système de questions/réponses. Elle
se
caractérise
par
l’apprentissage
du
vocabulaire
courant,
la
grammaire est envisagée sous sa forme inductive et implicite, c'est-à-dire on conduit l’apprenant à découvrir les régularités de certaines formes ou structures et induire la règle.
L’accent est mis sur l’acquisition de l’oral,
l’écrit est envisagé comme
auxiliaire de l’oral.
4.4. La méthode audio-orale
Cette méthode a bénéficié des apports de deux domaines : la linguistique avec l’avènement du structuralisme pour le choix des contenus à enseigner ; et la psychologie, avec le Behaviorisme qui met l’accent sur les processus d’acquisition avec le montage d’habitudes verbales, la langue est conçue selon un jeu d’associations entre des stimuli et des réponses établies par le renforcement. L’accent est mis sur l’oral, on a recours à des exercices de répétition et l’acquisition
des
structures
syntaxiques
se
fait
sous
la
forme
d’automatismes. En grammaire, on privilégie la forme plutôt que le sens Ainsi les éléments paradigmatique
de la phrase sont
mis
en relation sur l’axe
en opérant des substitutions, sur l’axe syntagmatique en
additionnant les mots de la phrase, en opérant des transformations de la phrase simple à la phrase complexe. Cette méthode a été contestée en
linguistique par la Grammaire
Générative et Transformationnelle de N. Chomsky.
4.5. La méthode structuro-globale-audio-visuelle (SGAV)
Cette méthode vise à enseigner la parole en situation (ce que la linguistique de Saussure évacue), la priorité est donc donnée à l’oral qui est conçu comme objectif d’apprentissage et comme support d’acquisition. Chaque « leçon » consiste en un dialogue qui véhicule la langue de tous les jours et qui se développe dans une situation de communication de la vie quotidienne. Les leçons consistent en des dialogues qui véhiculent la langue de tous les jours et qui se développent dans une situation de communication de la vie quotidienne. L’enseignement de la grammaire est implicite et inductif, il s’intéresse plus à la parole qu’à la langue, c’est la parole en situation qui est retenue L’oral prime et l’accès au sens est favorisé par la situation visualisée, ce sont les phénomènes intonatifs qui permettent d’accéder au sens grâce aux informations situationnelles. En effet, les structures SGAV sont beaucoup plus sémantiques que morpho-syntaxiques. Comme pour la méthode audio-orale, l’écrit n’est considéré que comme un dérivé de l’oral, son apprentissage est par conséquent différé. 4.6. L’approche communicative
C’est dans les années 70 que les notions de
communication et de
compétence de communication sont introduites en didactique des langues ; une nouvelle approche est née : l’approche communicative. Elle s’inscrit dans un vaste mouvement de réaction aux deux méthodes qui prévalaient dans
les années 60 : les méthodes audio-orales (MAO) et les méthodes audiovisuelles (MAV) qui privilégiaient l’oral comme objectif d’apprentissage et comme support d’acquisition. Ces deux méthodes se fondaient
sur le
behaviorisme qui met l’accent, dans le processus d’acquisition, sur le montage d’habitudes verbales. L’approche communicative est née avec le développement de nouvelles théories de référence : la linguistique de l’énonciation, l’analyse du discours et la pragmatique qui mettent en place de solides bases pour les matériaux d’apprentissage. Elle privilégie le document authentique qui permet un contact direct avec la langue réelle utilisée dans un contexte réel. La linguistique n’est plus la seule discipline de référence, l’approche communicative diversifie les apports théoriques, les emprunts théoriques ne se limitent pas uniquement à la linguistique (la linguistique structurale pour la les méthodes SGAV) ou à la psychologie ( le Behaviorisme), mais elle emprunte des concepts à d’autres disciplines comme la sociolinguistique, la psycholinguistique, l’ethnographie de la communication, l’analyse du discours et la pragmatique. Des concepts y sont puisés comme : - les variétés de la langue envisagées dans les pratiques langagières ( le français standard, par exemple), - la grammaire textuelle aborde l’énoncé, non pas dans un cadre phrastique, mais dans son ensemble textuel qui appréhende le texte dans sa dimension discursive, - la pragmatique langage, dans
a retenu essentiellement la fonction communicative du la
mesure
où
elle
étudie
le
contextualisation, l’organisation des actes de langage
langage
dans
sa
fournit des éléments
d’interprétation : adéquation d’un énoncé par rapport à un autre. La priorité n’est pas accordée aux formes syntaxiques car la correspondance entre la forme (Impératif) et l’acte (l’ordre, le conseil) ne peut être évidente,
autrement dit l’aspect formel des énoncés est moins important que le sens. L’approche pragmatique considère le langage comme un moyen d’action sur l’Autre et l’étudie dans sa contextualisation, en effet, c’est le contexte qui permet de fournir une interprétation, de savoir si tel énoncé doit être interprété comme une information, comme une promesse ou un ordre. L’analyse pragmatique d’un énoncé permet de vérifier l’adéquation d’un énoncé par rapport à un autre, la position d’un énoncé dans le discours.
Le renouvellement méthodologique de l’enseignement des langues a appelé à reconsidérer un certain nombre de facteurs extra-linguistiques, en effet, lorsque deux (ou des) personnes communiquent, elles ont des statuts particuliers qui font que selon leur âge, leur sexe et leur rang social, elles tiennent des propos dans certaines circonstances, choisissent un registre, des formules et adoptent une attitude particulière vis-à-vis de l’interlocuteur. D’où l’introduction de paramètres tels que les facteurs socioculturels et psychologiques dans la notion de compétence de communication.
Activité de réflexion Quelles différences relevez-vous entre l’approche communicative et les méthodes qui l’ont précédée ?
SEANCE 6 : 4.6. L’approche communicative (suite)
N. Chomsky (1957) a d’abord introduit en linguistique la notion de compétence linguistique pour référer aux connaissances intuitives des règles grammaticales sous-jacentes à la parole qu’a un locuteur natif idéal de sa langue et qui le rendent capable de produire et de reconnaître les phrases correctes. Pour lui, la compétence correspond à la capacité à se débrouiller dans une langue, il établit un rapport entre la notion de « compétence » et celle de « communauté linguistique », cette dernière étant complètement homogène. La phrase est une abstraction, l’unité maximale de la description syntaxique et ces connaissances concernent donc les unités, les structures et le fonctionnement du code interne de la langue (phonologie, morphologie et syntaxe) dont l’étude sera décontextualisée, dissociée des conditions sociales de production de la parole. Pour contrecarrer et compléter ce réductionnisme, D. Hymes (1984) propose la notion de « compétence communicative », pour désigner la capacité d’un locuteur à produire et à interpréter des énoncés de façon appropriée, d’adapter son discours à la situation de communication en prenant en compte les facteurs externes qui le conditionnent : le cadre spatio-temporel, l’identité des participants, leurs relations et leurs rôles, les actes qu’ils accomplissent, leurs finalités et les normes sociales. En didactique des langues étrangères, cette
vision de la compétence amène inéluctablement à des approches qui donnent priorité à la maîtrise des stratégies illocutoires et discursives, des pratiques et des genres : approche communicative, approche notionnelle-fonctionnelle.
Si
l’objectif
principal
de
cette
méthodologie
est
d’apprendre
à
communiquer en langue étrangère, par conséquent, il faut faire acquérir une compétence de communication, concept clé créé par Dell Hymes. Les travaux de Hymes ont servi de base au renouvellement méthodologique de l’enseignement des langues, notamment étrangère. Pour lui, acquérir
une
dans l’acquisition d’une langue
compétence
de
communication, c’est
acquérir « une compétence de deux types : un savoir linguistique et un savoir sociolinguistique, ou en d’autres termes, une connaissance conjuguée de normes de grammaire et de normes d’emplois » [D.Hymes, 1984 : 47] Beaucoup de chercheurs se sont penchés sur la notion de compétence de communication, comme
C. Bachman, J. Lindelfeld et J. Simonin qui
soulignent que « pour communiquer, il ne suffit pas de connaître la langue, le système linguistique, il
faut également savoir s’en servir en
fonction du contexte social » 1981 : 53]. Le concept de compétence de communication réside dans l’interaction des interlocuteurs : on apprend à communiquer en apprenant à adapter les énoncés linguistiques en fonction de la situation de communication et en fonction de l’intention de communication. Ce concept met en lumière l’idée que savoir communiquer ne se réduit pas à la simple connaissance de la langue mais implique la connaissance des règles d’emploi. C’est la distinction entre usage et emploi.
En effet, on a longtemps supposé qu’une fois les aptitudes linguistiques acquises, les capacités de communication suivraient automatiquement. Or, force est de constater que, dans la réalité ce n’est pas toujours le cas, comme le déclare
H.G. Widdowson : « l’acquisition
des aptitudes linguistiques
ne
garantit pas forcément l’acquisition des capacités de communication dans une langue donnée » [1981 : 80]. Il souligne que la capacité à produire des phrases correctes est certes selon lui, un élément essentiel ; toutefois ce n’est pas la seule aptitude à acquérir, ce qu’il faut c’est actualiser la langue dans un comportement communicatif signifiant : « Connaître une langue est souvent interprété comme la connaissance de l’usage correct mais ce savoir est de peu d’utilité
s’il n’est complété par une connaissance de l’emploi approprié »
[1981 : 29]. Qu’est-ce que l’usage ? Qu’est-ce que l’emploi ? H. G. Widdowson (1981) définit l’usage comme « l’aspect qui indique dans quelle mesure l’utilisateur de la langue démontre sa connaissance des règles linguistiques. » [1981 : 14]. Par emploi, il entend ce « qui indique dans quelle mesure l’utilisateur de la langue démontre sa capacité à se servir de sa connaissance des règles linguistiques pour communiquer efficacement. » [1981 : 14]. Ainsi, la langue doit-elle être envisagée comme la capacité d’utilisation à des fins de communication : « Connaître une langue est souvent interprétée comme la connaissance de l’usage correct mais ce savoir est de peu d’utilité s’il n’est complété par une connaissance de l’emploi approprié. » [1981 : 29]. Les notions de compétence et de performance établissent donc des relations entre les règles de grammaire et les règles d’utilisation. C’est la dimension socioculturelle qui permet de saisir les données pertinentes de l’utilisation de la langue, dimension absente du concept de performance de Chomsky. Le concept de
compétence
de
communication
met
en
lumière
l’idée
que
savoir
communiquer ne se réduit pas à la simple connaissance de la langue mais implique la connaissance des règles d’emploi.
La communication par le langage fait appel à diverses compétences qui contribuent à l’élaboration du message. Considérées dans leur ensemble, elles constituent ce que l’on nomme la compétence de communication. La compétence de communication est donc subdivisée en une liste de savoirs et de savoir faire pouvant être évalués, « la liste de ces sous-compétences évaluables est appelée un référentiel » [I. Gruca et J-P. Cuq, 2002 : 126]. Toute compétence est analysable en éléments discrets. Se pose alors la question de la nature des composantes de la compétence en langue ou de ses sous-compétences constitutives parce que communiquer, ce n’est pas seulement dire, c’est faire, c’est être, c’est exister. Les composantes de la compétence de communication -a- La composante linguistique C’est la composante principale parce qu’elle constitue un niveau de compétence minimale en deçà duquel l’apprenant éprouve des difficultés. Elle regroupe tout ce qui participe du système de la langue : phonétique, phonologie, lexique, syntaxe et sémantique. Cependant, il faut noter qu’ « il est inexact(…) que les deux partenaires de la communication, même s’ils appartiennent à la même « communauté linguistique », parlent exactement la même langue » [C. Kerbrat-Orecchioni, 1980 : 14], c’est pourquoi à la compétence linguistique, il faut ajouter des compétences d’ordre idéologique, culturelle et para-linguistique. Ainsi, la
compétence des communiquants, selon C.Baylon et X.Mignot (1994), doitelle être comparée : « la communication par le langage ne fonctionne pas en autarcie. Elle fait appel aux diverses compétences que possède l’être humain et qui contribuent à l’élaboration du message, et surtout du sens attaché au
message. Prises toutes ensemble, y compris les compétences
appelées linguistique et paralinguistique, elles constituent ce qu’on appelle la compétence de communication » (p.82). A la
compétence linguistique, D. Maingueneau
ajoute la compétence
encyclopédique qui consiste à « (…) disposer d’un nombre considérable de connaissances sur le monde » [1998 : 27]. Quelquefois, nos élèves possèdent ces connaissances
mais dans la langue maternelle, ou dans la langue
d’enseignement (l’arabe, dans le contexte scolaire algérien), mais elles peuvent faire défaut en langue étrangère. -B- la composante sociolinguistique Pour les auteurs du CECRL1, « la compétence sociolinguistique porte sur la connaissance et les habiletés exigées pour faire fonctionner la langue dans sa dimension sociale. » [2001 : 93]. Elle intègre les règles de politesse qui, il faut le noter, varient d’une culture à l’autre, les marqueurs des relations sociales qui sont, à notre avis, décisives dans les communications écrites parce qu’elles prennent en compte le statut relatif des interlocuteurs, et les différences de registre. Le problème qui se pose est comment développer cette composante chez nos apprenants. Il faut mettre en œuvre des techniques de travail : exposer l’apprenant à des situations où il y a des contrastes et des différences sociolinguistiques entre sa société et celle de la langue étrangère avec un enseignement explicite des structures moyennant des méthodes pour faciliter 1
Cadre européen commun de référence pour les langues, 2001, Les Editions du Conseil de l’Europe.
leur développement. Intégrer plusieurs niveaux d’analyse : mettre en relation, par exemple, les caractéristiques sociolinguistiques d’un document oral ou écrit et leurs réalisations linguistiques, mais sans pour autant tomber dans le piège de travailler sur des énoncés isolés. -C- la composante pragmatique Les fonctions pragmatiques d’un texte s’effectuent par la saisie des spécificités énonciatives pour tous les types de textes. Dans un acte de communication écrite, il faut tenir compte de l’interlocuteur qui, dans une communication différée, n’est pas en situation de face à face comme dans une interaction orale. Le scripteur malhabile (en langue étrangère) n’est pas seulement celui qui fait des fautes d’ordre morphologique, mais celui qui ne sait pas entrer en relation avec son lecteur ou son destinataire pour agir sur lui : « l’approche pragmatique considère le langage comme un moyen d’action sur l’autre et l’étudie dans sa contextualisation : en effet, c’est le contexte qui permet de fournir une interprétation » [E. Bérard, 1991 : 23]. Dans certaines productions écrites, des formes grammaticalement correctes apparaissent contextuellement et situationnellement erronées. Pour C. Cornaire et P.M. Raymond, « Les connaissances pragmatiques se rapportent aux conditions dans lesquelles les connaissances déclaratives et procédurales seront mises en œuvre. De façon plus précise, quand et pourquoi doit-on les utiliser ? A quel moment serait-il utile, par exemple, de rédiger un court message pour inviter quelqu’un à vous accompagner au restaurant. » [1994 : 22-23]. -D- La composante discursive Pour A. Gohard-Radenkovic, les compétences discursives « comportent une capacité d’identifier et de reproduire l’organisation « matricielle » (dimension
cachée et convenue) des savoir-faire écrits ou oraux, des types de discours offrant donc des récurrences organisationnelles en fonction de situations types d’énonciation – soit une manière d’obtenir des renseignements, une manière d’écrire une lettre, une façon de présenter un exposé, une manière de rédiger un essai, etc., qui sont l’héritage de pratiques culturelles et éducatives variant d’un pays à une autre. Il faut qu’il y ait donc apprentissage des outils linguistiques nécessaires et initiation à la « mise en forme » de ces différents modes d’expression, savoir-faire transverses et spécifiques. » [1999 : 95]. -E- la composante stratégique : « Le secteur stratégique comprend à la fois les stratégies verbales et nonverbales qui sont susceptibles de servir
à repérer les ruptures dans la
communication et peuvent aussi être considérées comme incluant les stratégies de communication et d’apprentissage des apprenants d’une seconde langue. » [D. Hymes, 1991 : 183]. Ainsi, lorsque ces deux types de stratégies sont adoptés par l’apprenant, elles témoignent d’une
attitude positive par rapport aux
ressources dont il dispose. Une stratégie n’est donc mise en œuvre qu’en cas de difficulté. Le locuteur développe des stratégies selon l’interprétation qu’il fait des situations de communication qui se présentent à lui. Aujourd’hui les chercheurs semblent se tourner plus volontiers vers les stratégies qui seraient mises en œuvre par les scripteurs même inexpérimentés. Nous pouvons citer l’exemple de « stratégies de compensation » d’expressions de la langue (que les auteurs du CECRL appellent « francisation », p.53), utilisées par nos apprenants, il s’agit de la formation d’un mot construite sur un savoir antérieur, par exemple, le terme « dégoûtage », utilisé par nombre de nos apprenants, témoigne du savoir antérieur sur le suffixe « age » qui sert à former les noms.
Il serait intéressant de voir quelles stratégies utilisent nos apprenants pour communiquer que celles-ci relèvent du domaine individuel, qu’elles soient liées au fonctionnement social d’un groupe ou qu’elles soient le résultat d’un transfert de compétences maîtrisées par l’individu dans sa culture d’origine, il n’en demeure pas moins que l’apprenant ne désarme pas en langue étrangère. En tout cas, les stratégies permettent d’actualiser la communication.
Activité de réflexion Quelle (s) composante (s) de la compétence de communication cible (nt) la notion de l’usage et celle de l’emploi ?
SEANCE 7 : 4.6.1. Les principes de l’approche communicative
- considérer la langue comme instrument de communication, - Faire acquérir à l’apprenant la langue dans la variété de ses registres et usages, l’objectif est de comprendre et d’utiliser les différentes variétés de la langue, - réhabiliter l’écrit, - privilégier le sens, - acquérir un savoir-faire, - les énoncés dépassent le cadre de la phrase et c’est la notion de discours qui est retenue, c'est-à-dire ce sont des énoncés appropriées aux situations de communication qu’il faut étudier, -
enseigner
une
compétence
de
communication
en
travaillant
ses
différentes composantes2, - enseigner la langue dans sa dimension sociale, - les théories de la communication vont orienter l’apprentissage de la grammaire dès les débuts de l’acquisition et les formes vont être abordées dans une perspective notionnelle, - large place faite à la grammaire explicite et à la conceptualisation : activités de découverte du fonctionnement de la langue. Les exercices de 2
Cf. séance 6.
type structural permettent d’acquérir uniquement des automatismes et de systématiser le fonctionnement morpho-syntaxique de la langue.
Donc, l’approche communicative s’intéresse moins à l’analyse d’énoncés isolés, elle prend en compte la dimension discursive du langage, la globalité des échanges ; c’est l’enchaînement des énoncés et le contexte qui vont donner un
sens à un énoncé dans la mesure où l’approche
communicative retient non pas la phrase mais dépasse le cadre de la phrase pour s’intéresser au discours, en effet, c’est le discours qui permet de faire intervenir les différentes composantes de la compétence de communication. Les
discours
sont
privilégiés
comme
support
d’enseignement parce que ce sont « des documents qui présentent des échanges complets, ce qui permet d’intégrer plusieurs niveaux d’analyse et de mettre en relation les caractéristiques sociolinguistiques d’une conversation/d’un texte, les réalisations linguistiques, les stratégies de communication » [E. Bérard, 1991 : 30]. Le principe retenu dans l’approche communicative est d’enseigner la compétence de communication, par conséquent, il s’agit de prendre en charge,
dans
compétence
les de
programmes,
les
communication. Le
différentes problème
composantes que
de
la
pose l’approche
communicative est comment didactiser la notion de compétence de communication ? En effet beaucoup de stratégies communicatives relèvent de l’individuel et de l’instantané.
L’élaboration d’un programme d’enseignement communicatif de la langue doit proposer des contenus reliant objectifs communicatifs et
catégories
sémantique et grammaticale. Sur le plan méthodologique, il faut signaler que les documents de travail doivent être proches de ceux qu’on rencontre et qu’on trouve dans la vie courante ; et les types d’activités proposées aux apprenants se rapprochera des types d’échanges qui existent dans la réalité et qu’ils permettent à l’apprenant de s’insérer dans la communication réelle. C’est ainsi que l’apprenant pourra réinvestir en dehors de la classe ce qu’il a appris en développant et en réinvestissant des stratégies. Il travaillera/développera
les
aspects
linguistiques
en
parallèle
avec
la
dimension pragmatique du langage, les usages sociaux qui permettront de dégager les règles de fonctionnement de la communication. La vision de l’apprentissage proposée par l’approche communicative met en avant une attitude d’attention aux productions des apprenants, partant du principe que l’apprentissage d’une langue étrangère se fait par des réajustements successifs et par la mise en place progressive d’un système pour conceptualiser des règles de communication. L’objectif
de
l’approche
communicative
n’est
pas
d’acquérir
des
comportements automatisés (le Behaviorisme) dans la langue étrangère, mais
de
développer
des
capacités
de
réagir
à
des situations
de
communication variées et d’interagir avec les autres. L’approche
communicative
propose
une
variation
sur les
diverses
réalisations linguistiques possibles pour une même intention langagière et
intègre, par ses contraintes, l’acquisition des compétences socioculturelle et stratégique. La grammaire est centrée sur la communication et sur la construction du sens, l’objectif étant de donner à l’apprenant des moyens pour développer ses compétences en langue étrangère. Les activités grammaticales doivent être contextualisées et soumises à des objectifs fonctionnels, ce qui permettra le passage à un savoir procédural. D’où la distinction entre « savoirs » et « savoir-faire », c'est-à-dire qu’un savoir grammatical n’assure pas à lui tout seul une compétence de communication. L’écrit est réhabilité dès les débuts de l’apprentissage avec une prise en charge du perfectionnement de la production écrite. 4.6.2. L’unité didactique
L’organisation de l’enseignement / apprentissage d’une langue étrangère, inscrit dans le cadre de l’approche communicative, se présente sous la forme d’ « unités d’enseignement » appelées unités didactiques. L’unité didactique (UD) désigne « un ensemble de textes, activités et exercices de tous genres regroupés selon un critère le plus généralement fonctionnel,
parfois thématique et fonctionnel à la fois, les données
linguistiques étant le plus souvent subordonnées aux aspects fonctionnels » [J. Courtillon, 1995 : 109]. On utilise également le terme de « dossier » pour désigner cet ensemble. Il convient de signaler, comme le souligne D. Lussier (1992), que chaque UD
« présente
souvent
un
thème
sur
lequel
on
vient
greffer
l’apprentissage » (p.104). Ce thème va servir de base pour poser l’objectif d’apprentissage, objectif fonctionnel qui décrit en termes de capacités le résultat d’un apprentissage : les capacités langagières attendues. C’est une approche qui intègre des notions en rapport avec des fonctions précises, elle est alors appelée approche notionnelle-fonctionnelle Ainsi, toutes les tâches et les activités sont-elles liées à l’acquisition d’un contenu notionnel / fonctionnel immédiatement réutilisable, pour les quatre habiletés de base ( compréhension écrite, compréhension orale, expression écrite, expression orale) et le développement des
savoir-faire et des
savoir-se comporter qui prennent le pas sur les savoirs. L’UD étant
un parcours
d’apprentissage,
des
conditions essentielles
préalables à sa construction doivent être prises en compte : - définition claire des objectifs ; - mobilisation des moyens pour réaliser ces objectifs ; - acquisition des savoir-faire à une majorité d’apprenants, savoir-faire posés en termes de procédures. Les différents aspects pris en compte dans l’unité didactique concernent les objectifs d’apprentissage, la relation « entrée-sortie », le déroulement méthodologique, l’évaluation. 4.6.3. Les objectifs d’apprentissage
Selon D. Lussier, « les comportements décrivent
des
attendus habiletés,
objectifs chez des
les
d’apprentissage
décrivent
apprenants.(…) Des objectifs
attitudes,
des
techniques
ou
les précis des
comportements que les apprenants devront avoir développés à la fin d’une séquence d’apprentissage ou d’un programme d’étude. Ils visent à préciser
ce que ceux-ci seront capables de faire et pas seulement de savoir en fin de parcours » [1992 : 45] Ces objectifs, qui sont donc définis au niveau des capacités ou savoir-faire (appelées aussi habiletés linguistiques par D. Lussier), concernent les compétences réceptives et productives (CE, CO, PO, PE). Ainsi, par exemple, pour une unité didactique intitulée « Présenter / Se présenter », il faut amener l’apprenant, en phase de compréhension, à « identifier l’objet de la communication / conversation, repérer les thèmes d’une conversation, repérer les participants d’un échange verbal… ». En somme,
l’essentiel est de développer un certain nombre d’habiletés.
Ainsi, « le savoir-faire et le niveau de performance des élèves priment sur leurs savoirs et sur leurs connaissances de la langue étrangère »
[D.
Lussier, 1992 : 46]. Ceci suppose, chez l’apprenant, un certain nombre d’activités cognitives. 4.6.4. La relation « entrée/sortie »
L’unité didactique se divise en phases regroupant les quatre habiletés citées
ci-dessus.
Elle
comporte
une
« entrée »
et
une
« sortie ».
J. Courtillon précise qu’ « un élément important pour la constitution d’une unité didactique est le rapport qui doit exister entre les données (entrée) et les activités de production (sortie) proposées (…) pour l’appropriation de ces
données. Ce
rapport
doit
exister
non
seulement
aux
niveaux
thématique et linguistique, mais au niveau des savoir-faire discursifs » [1995 : 116].
L’ « entrée » se manifeste par des supports visuel, sonore ou audio-visuel qui sont sélectionnés dans des documents dits « authentiques » : journaux, magazines, débats télévisés, émissions radiophoniques…. Le choix du support dépend étroitement du type de discours, l’attention est ainsi portée sur l’aspect structural du texte. L’approche préconisée pour la compréhension de ces supports est l’approche globale. Quant à la phase de « sortie », elle correspond en général, à l’activité de production écrite. Le type de production écrite attendu répond au type de support
étudié
en
phase
d’ « entrée ». Les
activités
de « sortie »
entretiennent de ce fait, des rapports étroits avec les données d’ « entrée ». En effet, l’objectif visé est la reproduction du « canevas » d’ « entrée » comportant le réemploi des données linguistiques (grammaticales et parfois même lexicales lorsque ces dernières sont étroitement liées au thème). 4.6.5. Le déroulement méthodologique
Il pose comme principe de voir comment l’on s’achemine de la phase de compréhension (l’entrée) à la phase de production écrite (la sortie). Ce parcours fait état d’une étape intermédiaire appelée « phase d’analyse ». Elle a pour objectif la manipulation et la fixation des structures linguistiques (lexicales et grammaticales) ; il s’agit en fait de donner des activités de langue en rapport avec les données d’ « entrée ». Ces activités portent sur l’acquisition des champs lexicaux et sémantiques dégagés à partir des supports travaillés en phase de compréhension. Sur
le
plan
méthodologique,
il
faut
signaler
que
les
manipulations linguistiques doivent être proches de celles qu’on
activités de rencontre
et qu’on trouve dans la vie courante, avec des types d’échanges qui existent dans la réalité et qui permettent à l’apprenant de s’insérer dans la communication réelle. C’est ainsi que l’apprenant pourra réinvestir en dehors de la classe ce qu’il a appris en développant et en réinvestissant ces stratégies. Il travaillera/développera
les
aspects
linguistiques
en
parallèle
avec
la
dimension pragmatique du langage, les usages sociaux qui permettront de dégager les règles de fonctionnement de la communication. La vision de l’apprentissage proposée par l’approche communicative met en avant une attitude d’attention aux productions des apprenants, partant du principe que l’apprentissage d’une langue étrangère se fait par des réajustements successifs et par la mise en place progressive d’un système pour conceptualiser des règles de communication. L’objectif
de
l’approche
communicative
n’est
pas
d’acquérir
des
comportements automatisés dans la langue étrangère, mais de développer des capacités de réagir à des situations de communication variées et d’interagir avec les autres. L’approche
communicative
propose
une
variation
sur les
diverses
réalisations linguistiques possibles pour une même intention langagière et intègre, par ses contraintes, l’acquisition des compétences socioculturelle et stratégique. La grammaire est centrée sur la communication et sur la construction du sens, l’objectif étant de donner à l’apprenant des moyens pour développer ses compétences en langue étrangère. Les activités grammaticales doivent
être contextualisées et soumises à des objectifs fonctionnels, ce qui permettra le passage à un savoir procédural.
4.7. L’approche par compétences
Le but de l’approche par compétences est de présenter de manière opérationnelle
des
démarches
méthodologiques
pour
organiser
les
enseignements des langues par compétences spécifiques ; le principe étant de concevoir la maîtrise des langues comme un ensemble structuré de compétences diverses acquises à des niveaux différents. Ceci appelle des modes d’organisation des enseignements plus précis, plus adaptés à l’objet d’enseignement, contrairement à une méthodologie d’enseignement unique et englobante comme la méthode SGAV. Par exemple, pour développer chez l‘apprenant la capacité à interagir langagièrement dans telle ou telle situation de communication (tâche langagière inscrite dans le cadre d’un projet, notion développée par Ph. Jonnaert, 2000), les questions qui s’imposent (et que doit poser et se poser le praticien !) sont : quels moyens et quelles ressources linguistiques permettent de réaliser telle ou telle tâche langagière ? Quels pré-requis l’apprenant a-t-il pour pouvoir réaliser la tâche
demandée ?
Quelles
compétences
(référentielles,
stratégiques,
socioculturelles,…) dans la langue maternelle de l’apprenant ou dans la langue d’enseignement peuvent contribuer à développer la compétence langagière dans
la langue cible ? Quelles stratégies mettre en place pour aider l’apprenant à réaliser la tâche ? En effet, la finalité principale de l’Education est de former les apprenants à mobiliser leurs savoirs à bon escient et à les relier aux situations dans lesquelles ceux-ci permettent d’agir.
Il ne s’agit pas de privilégier « certaines » compétences mais de les viser toutes. L’approche par compétences vise à mettre l’apprenant dans une situation de communication définie, c'est-à-dire que pour réaliser une tâche langagière, la consigne de la tâche doit lui préciser : - son statut : quel rôle il va jouer en tant que producteur d’un discours, - son destinataire : à qui il s’adresse, parce que le choix et la sélection du matériau linguistique et langagier dépendent du statut de son destinataire, on n’adopte pas le même discours selon que l’on s’adresse à un
ami, à un
professeur, à un voisin,… - le contexte dans lequel il est appelé à communiquer : où et quand ? - la visée communicative : dans quel but il communique tel ou tel type de message. L’approche par compétences tend à développer une compétence langagière définie en prenant en compte dans chaque séquence d’apprentissage les quatre habiletés linguistiques (C.E, C.O, E.O. et E.E). Si on veut que l’élève apprenne à interagir dans n’importe quelle situation de communication qui se présente à lui, il faut que les contenus et les démarches ciblent le transfert des connaissances (connaissances que l’apprenant a dans sa langue maternelle ou dans la langue d’enseignement) et la mobilisation des ressources cognitives, linguistiques, sociolinguistiques, stratégiques et pragmatiques dans la langue cible.
Activités de réflexion Activité 1 Analysez un projet d’un des anciens manuels de français en dégageant les principes de l’approche communicative, notamment après les réaménagements des programmes du début des années 90. Activité 2 Analysez un projet d’un des nouveaux manuels de français (depuis 2003) et dégagez les caractéristiques de l’approche par compétences.
BIBLIOGRAPHIE ABDALLAH-PRETCEILLE, M (2003), Former et éduquer en contexte hétérogène, Paris, Anthropos. ADAM, J-M. (1990), Eléments de linguistique textuelle, Mardaga. - (1992), Les textes : types et prototypes : récit, description, argumentation, explication et dialogue, Paris, Nathan. - (1994), « Le texte et ses composantes : pour une théorie d’organisation », in Evaluer le savoir lire, J-Y. Boyer, J-P. Dionne et P. Raymond (réd), Montréal, Logiques. - (2004), Linguistique textuelle. Des genres de discours aux textes, Paris, Nathan Université. - (2005), La linguistique textuelle. Introduction à l’analyse textuelle des discours, Paris, Armand Colin. ADAMS, R. (coord.), KIRSCH, I. DE LANGE, J. et HARLEN, W. (1999), Mesurer les connaissances et compétences des élèves : un nouveau cadre d’évaluation, Paris, OCDE. ALLAL, L. et SAADA-ROBERT, M. (1992), La métacognition : cadre conceptuel pour l’étude des régulations en situation scolaire. Archives de psychologie, n° 60, p. 265-296. ALLAL, L. (dir.), BAIN, D. et PERRENOUD, Ph. (1993), Evaluation formative et didactique du français, Neuchâtel, Delachaux-Niestlé.
ANDERSON, L.W. (2004), Accroître l’efficacité des enseignants, Paris, UNESCO. BARBOT, M-J. et CAMATARRI, G. (1999), Autonomie et apprentissage. L’innovation dans la formation, PUF, coll. Education et formation. BARBOT, M-J. et GRANDMANGIN, M. (coord.) (2000), De nouvelles voies pour la formation, Les Cahiers de l’ASDIFLE, n° 11. BAUTIER, E. (1995), Pratiques langagières, pratiques sociales, Paris, L’Harmattan. BAUTIER, E. et BUCHETON, D. (1995), « L’écriture, qu’est-ce qui s’enseigne, qu’est-ce qui s’apprend, qu’est-ce qui est déjà là ? », in Le français aujourd’hui, n° 111, p. 26-36. BAUTIER, E. (2001), « Pratiques langagières et scolarisation », Revue française de pédagogie, n°137. BAYLON, C. et MIGNOT, X. (1994), La communication, Ed. Nathan. BEACCO, J-C. (dir.) (1992), Ethnolinguistique de l’écrit, Langages, n°105. - (1995), « La méthodologie circulante et les méthodes constituées », in Le français dans le monde, n° spécial, p. 42-49. - (1996), « Linguistique de discours et enseignements de langues », in Le français dans le monde, n° spécial, p. 183-192. - (2000), Les dimensions culturelles des enseignements de langues, Hachette, coll. F. - (2004), « Trois perspectives linguistiques sur la notion de genre discursif », Langages, mars, n° 153, p. 109-119. BEACCO, J-C., PORQUIER, R. (éd.) (2001), « Grammaires d’enseignants et grammaires d’apprenants de langue étrangère », Langue française, n° 131. BEAUCOURT, A. (1995), « Analyse des difficultés de traitement des consignes en situation interculturelle », Tradifle, n° 34. - (1997), « Les conditions de l’interprétation des consignes scolaires », Tradifle, n° 38.
BERARD, E. (1991), L’approche communicative, Clé International. BERTOCCHINI, P. et COSTANZO, E. (1989), Manuel d’autoformation à l’usage des professeurs de langue, Paris, Hachette. BESSE, H. (1984), Méthodes et pratiques des manuels de langue, Didier, « Essais ». BESSE, H. et PORQUIER, R. (1984), Grammaire et didactique des langues, Paris, Hatier, LAL. BLANCHET, Ph. (1998), Introduction à la complexité de l’enseignement du français langue étrangère, Louvain, Peeters. BOIRON , M. et RODIER , C. (1998), Documents authentiques écrits , Paris, Clé International, fiches n°s 1,5,17,19,24,34. BOLTON, S. (1987), Evaluation de la compétence communicative en langue étrangère, Paris, Credif-Hatier, LAL. BONIFACE, C. (1992), Les ateliers d’écriture, Paris, Retz. BONIFACE, C., PIMET, O. (1999), Les ateliers d’écriture. Mode d’emploi, guide pratique à l’usage des formateurs, Paris, ESF. BOYER, H., BUTZBACH, M. et PENDANX, M. (2001), Nouvelle introduction à la didactique du français langue étrangère, Paris, Clé International. CARE, J-M. (éd.) (1999), « Apprendre les langues étrangères autrement », in Le français dans le monde, janvier. CARIA, M. (1999), « Apprentissage implicite et explicite : grille pour une analyse corrective de l’écrit en classe de FLE », in Travaux de didactique du français langue étrangère, n° 39. CHARAUDEAU, P. (1992), Grammaire du sens et de l’expression, Paris, Hachette Education. CHARDENET, P. (1993), « De l’acte d’enseigner à l’acte d’évaluer : analyse des discours », in Le français dans le monde, août-septembre, p. 51-56.
CHISS, J-L., DAVID, J. et REUTER, Y. (1995), Didactique du français : état d’une discipline, Paris, Nathan. CHISS, J-L., DAVID, J. et REUTER, Y. (2005), Didactique du français, fondements d’une discipline, Bruxelles, De Boeck. COURTILLON, J. (2002) : Elaborer un cours de FLE, Paris, Hachette. CUQ, J-P. (1996), Une introduction à la didactique de la grammaire en FLE, Paris, Didier-Hatier. CUQ, J-P. et GRUCA, I. (2002), Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, PUG. CUQ, J-P. (éd.) (2004), Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et seconde, Paris, ASDIFLE, Clé International. CYR, P. (1998), Les stratégies d’apprentissage, Paris, Clé International. REUTER,Y.(dir.), (2007), Dictionnaire des concepts fondamentaux didactiques, DeBoeck.
des