Daniel Lagache La Psychanalyse Et La Structure de La Personnalité

February 14, 2023 | Author: Anonymous | Category: N/A
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La psychanalyse et la structure de la personnalité (1961) Daniel Lagache, Eva Rosenblum Rosenblum Dans Œuvres (4) (1982), pages 191 à 237

Chapitre I - Structure et personnalité ’anthropologie est aujourd’hui structuraliste. Un de ses traits principaux est la promotion de la catégorie d’ « ensemble », d’unitas multiplex. Réagissant contre l’atomisme psychologique du XIXe siècle, nous partons de l’idée que nous n’avons pas afaire à des éléments isolés ni à des sommes d’éléments, mais à des ensembles dont les parties sont elles-mêmes structurées. Le « champ psychologique » est l’ensemble des des relations de l’o l’organisme rganisme et de l’entourage. Nous ne pouvons penser l’un sans l’autre l’autre : il n’est ppaas d’organisme d’organisme qui  qui ne soit en situation, ni de situation que pour un organisme. Nécessité en dernière analyse géométrique, mais qui prend un sens nouveau en biologie et en psychologie : celui d’une « explication » du corps vivant avec son monde. L’organisme même, nous ne le percevons et le concevons que dans la mesure où, à travers le lux des phénomènes, nous reconnaissons le retour de certaines relations, la latence, la cohésion et l’autonomie de certaines structures.

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La personnalité est elle-même une structure, une structure que le temps diférencie dans l’individu, un ensemble dynamique, c’est-à-dire organisé et mouvant, de formations psychophysiologiques, elles-mêmes organisées et mouvantes ; elles assurent cependant avec quelque régularité les relations de la personne avec son

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monde personnel, qui veut dire avec elle-même. diférenciée dans une structure qui lacecomprend, elleaussi comprend elle-mêmeStructure des structures.

 

Deux conceptions de la structure personnelle se dégagent de la personnologie contemporaine. Pour les uns, la structure personnelle est un ensemble hiérarchisé de traits directement observables ; conception statique, formelle, classification logique de toutes les composantes individuelles, i ndividuelles, psychologiques ou somatiques. Selon l’autre conception, la structure personnelle est un système de relations entre des formations qui ne sont pas directement observables, mais auxquelles l’observation de certaines régularités confère une réalité conceptuelle à l’intérieur d’un modèle théorique. C’est de cette seconde conception, analytique et dynamique,

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qu’il a été question jusqu’ici. C’est d’elle que la personnologie psychanalytique ofre l’exemple le plus ancien et le plus typique [1]. Un des mérites de Freud est d’avoir dégagé le point de vue de la structure, dès le Projet de psychologie scientifique (1895) [18] et surtout dans L’interprétatio L’interprétation n des rêves (1900) [20]. Aux critères économiques et dynamiques sur lesquels il se fonde alors pour distinguer les « systèmes » dont il compose la « fiction » d’un appareil psychique, on a depuis proposé d’ajouter d’autres critères, tels le critère génétique, qui concerne à la fois l’origine et le style d’organisation des formations partielles, et le critère d’adaptation, qu’il vaudrait sans doute mieux concevoir comme le critère cri tère de la relation à l’objet. D’autres critères pourraient sans doute être proposés : on a

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mentionné celui de l’autonomie partielle. Ce qu’il faut souligner, c’est la clairvoyance avec laquelle Freud subordonne le point de vue structural au point de vue économico-dynamique, c’est-à-dire à la considération de processus se déroulant dans le temps, plus proches du matériel de l’analyse et de son interprétation. C’est ce qui fait que la conception freudienne de la structure personnelle est une conception non seulement psychanalytique, mais analytique dans le sens le plus large du terme, et non pas une construction purement artificielle. La même idée se retrouve sous une autre forme dans la représentation que se fait Freud de la vie mentale et, plus particulièrement, de son déroulement : à la conception mécaniste de l’associationnisme, il substitue une conception dynamiste, qui subordonne le lux des événements mentaux à un petit nombre (il en est Parce souvent question dans L’interprétatio L’interprétation n des rêves,  sous led’idées nom dedirectrices Zielvorstellungen). qu’aucun processus mental n’échappe à ces tendances directrices, des structures mentales peuvent se constituer. En termes classiques, la théorie des pulsions est théoriquement plus fondamentale que la théorie de l’appareil psychique [2]. La structure de la personnalité est l’efet durable des choix et des rejets efectués par un sujet.

II - Du moi autonome à l’autonomie relative du moi La préoccupation du moi, de son autonomie et, par conséquent, de son hétéronomie, est l’idée directrice qui permet d’accéder à une vue d’ensemble dans l’histoire du problème de la structure personnelle.

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C’est dans ces termes que le problème se pose dans la psychologie et la psychopathologie préanalytique. On le voit bien dans les travaux de la décennie 1880-1890, où des termes comme « personnalité multiple », « double conscience », « inconscient », deviennent d’un usage courant. Prenons pour exemple le petit livre de Ribot sur Les maladies de la personnalité  (1884)  (1884) [70]. La casuistique et l’argumentation y sont dirigées contre l’idée d’un moi autonome, un et permanent, que Ribot trouvait dans la tradition de la psychologie philosophique. L’intention majeure, appuyée sur les « maladies de la personnalité », est de montrer que le moi

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n’est pas autonome mais hétéronome. L’idée d’un moi un et permanent est une fiction. L’unité de la personnalité réelle est une unité organique, fondée sur le consensus physiologique. L’inconscient, c’est-à-dire le physiologique, est tout, et la conscience phénoménale n’en est qu’une infime partie [3]. L’unité du moi se fragmente en une pluralité de moi virtuels que révèlent les altérations, les alternances, les fragmentations, les dissolutions de la personnalité. Le sujet n’est jamais plus actuel que lorsque le moi n’est pas posé, dans l’attention intense et l’action ajustée. Le moi actuel n’est jamais qu’un moi partiel, quelque chose que nous appellerions aujourd’hui « le moi-ici-maintenant ». La régulation du sentiment de l’identité personnelle est soumise à des conditions parmi lesquelles les causes intellectuelless s’efacent devant les causes afectives, cénesthésiques, en dernière intellectuelle analyse physiologiques. Les observations surprennent le lecteur, par la facilité avec laquelle Ribot méconnaît l’évidence d’articulations conlictuelles, logiques, symboliques et surtout morales entre cette pluralité de moi virtuels dont seule l’étendue du champ de la conscience limite le nombre. Non moins par le fait que beaucoup de ces observations d’altérations, de dédoublement, d’alternances de la personnalité ne pouvaient avoir de sens que par référence à un sujet dépendant mais relativement autonome : qu’un sujet puisse dire : « J’ai deux hommes en moi », », semble impliquer un troisième terme. L’entreprise de démolition du moi autonome, un et permanent, laisse un résidu : la nécessité d’une autonomie relative et partielle du sujet. On touche là sans doute à une dimension essentielle du problème, ppuisque uisque c’est aussi l’histoire de la personnologie psychanalytique : elle va également de la mise en question de l’autonomie du moi à la thèse de l’autonomie relative du moi.

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Freud a commencé par parler en termes de « personnalités multiples », et il a parlé longtemps encore ce langage, par exemple à la fin de L’homme aux rats (1909) [23] [4], tout en l’articulant avec le modèle incomparablement plus étofé et structuré qu’il avait élaboré dans L’interprétatio L’interprétation n du rêve (1900) [20] : deux « systèmes », l’Inconscient et le Préconscient, entre lesquels la censure joue comme co mme la réfraction lorsque la lumière passe d’un milieu dans un autre ; le « système conscience », en dépit de vues

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d’une admirable profondeur sur lesquelles Freud n’est guère revenu mais dont rien n’indique qu’il les ait abandonnées, y fait surtout figure d’une dépendance du système préconscient. Ici l’observateur des névroses et des rêves, et un observateur d’une immense expérience clinique, n’abandonne jamais le théoricien. L’appareil

 

psychique est décrit comme une structure, un ensemble organisé de formations à la fois autonomes et interdépendantes, que diférencient leurs origines, leurs caractères économiques et dynamiques, leurs rapports avec la réalité. Par référence à ce modèle, bien qu’il ne donne pas une place explicite au moi, il n’est pas besoin de forcer les textes pour le situer très clairement en l’assimilant au système Préconscient-Conscient. L’emprise du système Inconscient sur le système Préconscient, du processus primaire sur le processus secondaire, du principe de « déplaisir » sur le principe pri ncipe de réalité, innominé mais présent, définissent sans ambiguïté la condition d’hétéronomie du sujet. L’énergie libre de la conscience, sa capacité d’ « attention » et de « surinvestissement », son degré de tolérance au déplaisir, voire sa possibilité de s’opposer s’opp oser au principe de déplaisir, ouvrent la voie à des ajustements plus discriminatifs, à une pensée objective et rationnelle, en d’autres termes à une autonomie relative du sujet. Par référence au premier modèle de l’appareil psychique, les textes, avons-nous dit, permettent de situer le moi sans ambiguïté. Ceci est encore plus vrai pour la décennie 1910-1920, contrairement à l’opinion de Heinz Hartmann, qui caractérise cette période par un efacement de l’intérêt de Freud pour le moi (Le développement du concept de l’ego dans l’oeuvre de Freud, 1956) [45]. Au contraire, les théories nouvelles (le narcissisme et l’idéal du moi), les travaux psychopathologiques, surtout sur les psychoses, les additions des nouvelles éditions de L’interprétati L’interprétation on des rêves, témoignent en faveur d’une préoccupation grandissante et d’une continuité co ntinuité entre la première théorie de l’appareil psychique et la seconde. Ceci ne doit pas faire méconnaître leurs diférences : s’il est vrai que la qualité inconsciente des opérations défensives du moi a été le motif décisif de la révision, il faut ajouter que la distinction du ça, du moi et du surmoi est d’un style plus « personnaliste » ; si le terme « appareil psychique » n’est pas abandonné, aba ndonné, Freud, dans ses derniers écrits, parle aussi de la « personnalité psychique ». Toutefois, dans Le moi et le ça (1923), le problème de la structure de la personnalité se pose dans les mêmes termes, c’est-àdire en termes d’autonomie d’hétéronomie n’est qu’enclair appliquant ces concepts à chacune des troisetinstances que l’onrelatives parvient; ce à un exposé de chacune des instances de la personnalité et de leurs rapports. L’idée dominante reste celle de l’hétéronomie du moi, sur laquelle Freud insiste longuement dans le chapitre V de Le moi et le ça et qu’il vulgarise dans la célèbre allégorie du cavalier. Les derniers travaux montrent qu’il n’a jamais renoncé à cette idée, non cependant sans l’atténuer et la nuancer : en 1926, dans Inhibition, symptôme et angoisse, il réagit avec force contre l’insistance exclusive et excessive de certains psychanalystes sur la dépendance du moi et il fait valoir son autonomie (littéralement, la force du moi), en soulignant l’importance de ses opérations défensives. Argument qui n’est pas sans soulever des objections, auxquelles seule pouvait répondre une discussion de la structure intrinsèque du moi.

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Dans les travaux postfreudiens, avec l’orientation égologique de la psychanalyse, c’est cette idée qui a fait prime. On peut en juger par la prédominance des écrits qui ont eu pour objet le moi, s’eforçant de mettre en lumière l’autonomie du moi ou, plus exactement, l’autonomie relative du moi. Car il en est pour le moi comme pour le ça et le surmoi : dans le modèle psychanalytique de la personnalité, la diférenciation d’une structure lui reconnaît une autonomie, mais la personnalité ne reste elle-même une structure que si l’autonomie de chacune de ses substructures est une autonomie relative, limitée par une hétéronomie qui correspond à

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l’autonomie relative des deux autres .

III - Naturalisme, anthropomorphisme, personnalisme Cette esquisse historique pose que le second modèle est plus « personnaliste », ce qui impliquait que le premier était plus « naturaliste ». Dans l’élaboration de la première théorie de l’appareil psychique, Freud s’inspire de la physiologie « physicaliste » de son époque et de l’évolutionnisme de Darwin ; l’idée d’un « appareil psychique » est présentée comme une « fiction », construite par analogie avec un appareil d’optique d’opti que et avec l’appareil rélexe ; les systèmes se diférencient par leurs « fonctions » dans le conlit, par analogie avec un modèle physiologique ; des concepts physiologiques, telles excitation, innervation, décharge, interviennent fréquemment ; la censure est définie d’une manière purement fonctionnelle : elle exprime le heurt des tendances préconscientes et des tendances inconscientes ; ce n’est qu’avec l’introduction de l’idéal du moi qu’elle sera rattachée à une structure, et à une structure « personnaliste ». Le surmoi est une modification du moi, reliquat de relations intersubjectives ; le moi est une dénomination plus « personnaliste » que le « système Préconscient-Conscient » ; même si le moi doit être considéré comme une construction théorique, le sentiment de l’identité personnelle en est une fonction ; il est sujet à l’identification ; et le caractère le plus radical r adical du ça est son impersonnalité.

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L’interprétation personnaliste du deuxième modèle de l’appareil psychique semble évidente. Sa légitimité est cependant mise en question par l’interprétation qui en est habituellement donnée, notamment notamment par Hartmann, Kris et Loewenstein [47]. Pour ces auteurs, les concepts structuraux ont bien été élaborés à partir de l’expérience, donc d’une expérience personnelle et interpersonnelle, mais à distance de l’expérience. Freud a pris pour critère la «  fonction »  des  des systèmes ou substructures dans le conlit, et le modèle qui l’inspire est physiologique ; le rôle des concepts structuraux est de favoriser les explications causales, et s’ils sont parmi nos outils les plus valables, c’est qu’ils se situent dans un contexte génétique. Cette position naturaliste comporte une partie négative, la critique de l’usage métaphorique et anthropomorphique des concepts structuraux ; on concède cependant à l’anthropomorphisme qu’il joue un rôle dans la pensée introspective et que la

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communication avec les patients peut justifier le recours à un langage anthropomorphique ; le danger commence si et quand la métaphore empiète sur la signification, c’est-à-dire quand les concepts structuraux sont anthropomorphisés.  Ainsi, à l’interprétation personnaliste, personnaliste, nous voyons s’opposer ici une une interprétation non seulement métapsychologique, c’est-à-dire, brièvement, à distance de l’expérience, mais naturaliste. Et la question se pose de savoir si un modèle théorique, voire métapsychologique, est nécessairement un modèle naturaliste, et si l’autre branche de l’alternative est une option o ption anthropomorphique.

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Il n’est pas question de défendre la dramatisation anthropomorphique. Il est clair que c’est là transformer les concepts structuraux et théoriques, de quelque nature qu’ils soient, en entités personnelles, et l’on peut à bon droit parler à ce propos de « substantification », de « réification », de « personnification ».

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Pour ces raisons mêmes, nous sommes peu disposés à faire des concessions à l’anthropomorphisme, en ce qui concerne les communications au patient. Oui, il arrive qu’on emploie, en certaines occasions, le langage anthropomorphique parlé spontanément par le patient ; je me souviens d’un de mes premiers patients qui, de temps en temps, non sans opportunité, faisait intervenir l’ « autre a utre ». A des fins

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didactiques, il arrive aussi que l’on prolonge une interprétation par une formulation structurale, pour établir un pont entre l’expérience et la théorie. Mais, en règle générale, la forme verbale de l’interprétation ne doit pas faire intervenir les concepts structuraux, parce qu’ils sont trop éloignés de l’expérience et que leur emploi ne peut que favoriser la réification. Si le patient pati ent parle lui-même ce langage, nous y voyons une résistance. Le seul langage qu’on ne puisse se dispenser de parler est celui des relations intersubjectives et des identifications. L’anthropomorphisme n’est pas non plus, autant qu’on semble le croire, le langage de l’introspection, dans le registre de la psychologie de conscience. Certes, la « voix de la conscience » est une réalité phénoménale ; déjà, pour le patient, c’est une métaphore : « J’ai l’impression, dit l’un, qu’une voix me dit : Lève-toi et va-t’en » ; il arrive à chacun de dialoguer avec lui-même, et ces dialogues ressemblent à ceux du parent avec l’enfant. On est plutôt surpris que ces faits ne soient soi ent pas plus fréquents, au moins chez les adultes et dans notre culture ; bien plus souvent, la pensée psychologique courante est dépouillée d’anthropomorphisme ; le modèle psychologique auquel on se réfère implicitement est un modèle physiologique ou physicaliste ; l’anthropomorphisme n’apparaît guère que sous la forme d’un artificialisme physique. Toute notre culture, en efet, nous détourne de l’anthropomorphisme et tend à nous faire méconnaître le rôle de l’anthropomorphisme dans notre formation et nos relations avec les autres. Les choses changent, et souvent assez vite, dès que l’on est engagé dans l’analyse : les afects, les idées, les actions trouvent alors leur place et révèlent leur sens dans le contexte des relations interpersonnelles et le jeu des identifications. Si anthropomorphisme il y a, c’est bien moins dans le registre de l’introspection et de la

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conscience que dans celui des données de l’investigation analytique et des processus inconscients, en passant du « contenu manifeste » au « contenu latent » entendu dans le sens le plus large.  Ainsi, l’interprétation naturaliste naturaliste et physiologique du modèle modèle psychanalytique de la personnalité le fait ressembler bien plus à celui qu’implique l’introspection consciente qu’à celui qui se dégage de l’exploration des formations inconscientes. Si ce modèle est construit sur des bases analytiques, il ne peut être interprété que dans un sens personnaliste, c’est-à-dire en soulignant le rôle des relations intersubjectives dans la structuration de la personnalité. Une prise de position personnaliste ne fait pas à l’anthropomorphisme d’autre concession que de reconnaître sa présence dans le fonctionnement et la genèse de l’appareil psychique et des relations interpersonnelless ; c’est contre nos préjugés intellectualistes et naturalistes que la interpersonnelle psychanalyse a décelé, dans l’appareil psychique, l’existence d’enclaves « animistes ». Ceci n’empêche en rien que le deuxième modèle de l’appareil psychique reste une construction théorique, ni que l’on puisse diférencier les systèmes par leurs fonctions ; le concept de fonction n’est d’ailleurs pas un concept exclusivement physiologique : on ne peut parler d’organisation structurée sans faire intervenir la diférenciation fonctionnelle. Ceci, enfin, ne peut en rien nuire à la fécondité

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théorique et heuristique de notre modèle : en définitive, c’est bien de sa qualité personnaliste que sa fécondité lui est venue. On est ainsi amené à s’arrêter sur le concept de relation intersubjective et sur le concept d’identification, voie par laquelle les relations intersubjectives jouent un rôle capital capi tal dans la structuration personnelle du sujet.

IV - Relations intersubjectives et structuration de la personnalité

Si l’on interprète deuxième modèle de l’appareil psychique dans unlasens personnaliste, onlesouligne le rôle des relations intersubjectives dans structuration de la personnalité. On implique ainsi que ce que l’on sait ou o u apprendra des relations intersubjectives pourra s’appliquer, mutatis mutandis, aux relations intrasubjectives du sujet, c’est-à-dire à ses relations avec sa propre personne. Comme il s’agit d’une structuration dans laquelle les deux classes de relations se diférencient et s’articulent progressivement, on ne peut tenter d’élucider ce processus que dans une perspective génétique englobant les relations du sujet avec autrui et avec lui-même.

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La pensée moderne a cherché à s’afranchir des préjugés de l’idéalisme naïf, qui tente de faire dériver de la subjectivité la genèse du monde personnel [6]. Un fait nous

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frappe, la précession de la relation intersubjective. On veut dire par-là que, dans une conjoncture sociale, culturelle et familiale déterminée, le modèle de relation intersubjective significatif pour les enfants à venir existe avant leur naissance. Avant d’exister en lui-même, par lui-même et pour lui-même, l’enfant existe pour et par

 

autrui ; il est déjà un pôle d’attentes, de projets, pro jets, d’attributs. Ce qui est vrai avant la conception restera vrai dans la vie et même après la vie. C’est au fond ce que Freud nous a signifié en disant que le surmoi se formait non pas tant par l’identification aux parents, que par l’identification à l’image idéalisée des parents et au surmoi des grands-parents. Le système surmoi - idéal du moi est à l’origine un modèle transcendant et le problème de l’humanisation est en grande partie de savoir comment ce modèle s’incorpore à l’existence individuelle.  Avec la conception, l’enfant l’enfant commence à eexister xister en soi. Le problème du développement est donc de savoir par quelles médiations vont se rejoindre et s’intégrer ces deux modalités de l’existence, l’être pour autrui et l’être en soi. Au cours de l’existence prénatale, l’être pour autrui se modifie et s’enrichit par l’ « incarnation », et il n’est pas absurde de supposer que vers le milieu de la gestation, les premières manifestations d’activité du fœtus sont les rudiments d’une existence autonome.

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L’union parasitaire succède à l’union organique. Les débuts de l’existence individuelle peuvent être caractérisés par la « diférenciation primaire » et la « participation syncrétique ».

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La notion de diférenciation primaire est préférable à celle d’indiférenciation qui est plus couramment adoptée. L’indiférenciation n’est que relative, par comparaison aux stades ultérieurs ; elle n’est pas absolue, comme l’impliquent certaines formules téméraires, telles que l’absence de conscience, l’absence de sujet, d’objet et, par conséquent, de relations d’objets. La diférenciation primaire est démontrée par l’existence d’appareils qui assurent au sujet un minimum d’autonomie : appareils de la perception, de la motricité, de la mémoire, seuils de décharges des besoins et des afects ; ces appareils servent à la gratification grati fication des pulsions et sont aussi les garanties primaires de l’ajustement à l’entourage ; préexistant au conlit, ils peuvent  y participer en tant que facteurs indépendants [Rapaport, 68]. On nie l’évidence, l’évidence,

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quand prétend que le et nouveau-né n’aexpériences pas d’expériences conscientes, alors qu’il alterneon entre le sommeil la veille. Ces conscientes sont surtout des expériences d’états et d’actes corporels, c’est-à-dire qu’elles reposent principalement sur des réceptions intéro- et proprioceptives. L’enfant n’est cependant pas enfermé dans leur subjectivité. Il est dificile de concevoir la relation du nouveau-né avec le sein autrement que comme la relation d’un sujet avec un objet : sans exister en tant que structure cognitive, le sujet fonctionne et s’actualise successivement dans les besoins qui l’éveillent et le motivent, dans les actes d’orientation puis de consommation qui l’apaisent et l’endorment ; de même, le sein et le lait remplissent leur fonction d’objet bien avant qu’il y ait conscience positionnelle de l’objet. Ce qui est vrai, c’est que ces relations d’objet fonctionnelles ne sont pas structurées en ce sens que le sujet et l’objet ne sont pas diférenciés, que le sujet n’a nulle notion de son identité ni de l’identité de l’objet, qu’il se confond avec les impressions i mpressions corporelles dans lesquelles l’objet est donné. Enfin, les tableaux sensoriels successifs entre

 

lesquels se morcelle la vie psychique de l’enfant sont valorisés, ils sont agréables ou pénibles, et cette valorisation motive des choix et des rejets dont do nt le retour et la consolidation amorcent précocement une diférenciation secondaire. La relation avec la mère est elle aussi une relation syncrétique non diférenciée. Nous supposons que l’enfant se confond avec la mère, dans une participation symbiotique, pour autant que la mère satisfait ses besoins, et qu’il se distingue d’elle et la distingue de lui pour autant qu’elle lui fait défaut, et qu’il se vit alors lui-même comme détresse et impuissance. La prédominance de la passivité fait qu’il reçoit son personnage temporaire de la situation. Ainsi, les débuts de l’existence individuelle sont concrètement déterminés par l’être-par-autrui, bien que l’être pour soi des expériences conscientes commence à introduire une médiation entre l’être-pourautrui et l’être-en-soi de l’existence prénatale.

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Cette intégration se poursuit au stade suivant, dont le processus caractéristique est l’identification. Cette progression trouve ses conditions dans le conlit intersubjectif, par le jeu combiné de la maturation et de l’apprentissage. Il y a diférenciation en ce sens que l’expérience s’organise en groupements plus stables, le corps et les objets, l’ego et l’alter ego. Mais cette diférenciation reste syncrétique : l’identité des objets qui se découpent dans le monde personnel n’est pas délimitée et stable ; les parties du corps peuvent être traitées comme des objets, ou les objets comme des parties du corps ; l’enfant peut assumer l’identité de l’autre, ou assigner à autrui sa propre identité. Autrement dit, cette période des relations d’objet est le règne de l’identification, sous les deux formes de l’introjection et de la projection. Le fait le plus important est que dans l’établissement de sa propre identité, l’enfant s’appuie sur le point de vue d’autrui ; ce qui se manifeste clairement dans le langage, lorsque au cours de la deuxième et de la troisième année, l’enfant parle de lui-même comme autrui en parle, ou se parle à lui-même comme autrui lui parle. On saisit bien là la conjonction qui s’opère entre l’être-par-autrui et l’être-par-soi.

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Le stade suivant estpose celuil’identité de l’objectivation : les du monde personnel se stabilisent ; le sujet respective dustructures corps propre et des objets matériels, de l’ego et de l’alter ego. Cette identification diférentielle du sujet et de l’objet n’est pas atteinte en même temps dans tous les secteurs ; la catégorie d’objet se dégage entre 14 et 18 mois, d’après Piaget, sans être encore étendue à tout l’univers ; et quant à l’identité personnelle, elle n’est posée d’une manière stable qu’à la fin de la troisième année. La disposition à l’objectivation est renforcée par nos conditions culturelles, l’éducation, l’instruction. Elle tend ainsi à masquer et rendre inintelligibles les identifications antérieures, sans cependant en supprimer les efets ni empêcher le développement inconscient d’introjections et de projections nouvelles.

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Ceci explique certaines particularités des relations du sujet avec sa personne propre, notamment en ce qui concerne le sentiment et la notion de l’identité personnelle. Par l’intériorisation de la relation intersubjective, le sujet a appris à se traiter comme

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un objet ; une fois ce dédoublement de l’intériorité devenu autonome, on oublie son origine intersubjective, à laquelle nous savons qu’il peut facilement régresser ; nous avons tendance également à le considérer comme le régime habituel des relations de la personne avec elle-même, alors que ce régime est bien plutôt l’identification : nous  voulons dire par-là que le moi-sujet a tendance à se confondre avec le moi-objet, avec son corps propre, son nom, son histoire, ses qualifications, ses rôles, ses prétentions. Ce n’est que par un efort particulier que le sujet peut objectiver sa personne propre et ses attributs, ses dispositions, ses états et ses actes, mettant une distance entre le moi-sujet et le moi-objet ; le moi-objet peut ainsi devenir comparable à un moi étranger, avec les attributs de l’objet transcendant.  Au contraire, le moi-sujet moi-sujet ne peut s’objectiver sans sans cesser d’être suje sujet. t. En tant que sujet, je n’existe jamais autant que dans mon activité intentionnelle, dans l’attention et la rélexion, dans l’action ajustée, sans conscience positionnelle du moi. Je peux bien parler « en général » du moi-sujet, de ses attributs, former un concept du moisujet. Mais je ne peux pas le poser comme un objet : par définition, si je le pose comme objet, il s’évanouit.

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 V - Sur la structure du ça Contrairement au surmoi et surtout au moi, le ça semble avoir peu sollicité la curiosité et la rélexion des chercheurs. Certes, de nombreux travaux ont eu pour objet les pulsions, en particulier la question toujours controversée des pulsions de mort ; ces travaux intéressent le ça, en ce sens que les pulsions sont couramment autant que sommairement définies comme les « contenus » du ça. Mais ils se cantonnent le plus souvent dans une perspective économico-dynamique, et ne nous apprennent rien sur le ça en tant que concept structural. Sur ce point, on o n est à peu près réduit à ce qu’a écrit Freud, ce qui comprend, bien entendu, tout ce que Freud a écrit sur l’inconscient en tant que système de l’appareil psychique. Loin de s’être enrichi et diférencié, le concept du ça, si l’on se réfère aux vues courantes, s’est appauvri et simplifié : à notre surprise, tel auteur bien informé se borne à le définir comme le réservoir des pulsions et comme une organisation qui a pour particularité de n’être pas organisée, parce que l’on n’y trouve pas p as les modes d’organisation caractéristiques du moi. Comme si les particularités propres aux processus inconscients ne constituaient pas un mode positif et original d’organisation, auquel cas il y aurait lieu de se demander comment Freud a pu en parler et les décrire. On peut caractériser cet appauvrissement du concept du ça comme une « biologisation », ou, mieux, une « naturalisation » du ça.  Voir ainsi les choses est déjà en contradiction avec les les vues les plus biologisantes de Freud. On sait avec quelle complaisance Freud a aventuré des thèses qui font du ça un dépôt des expériences ancestrales, l’hérédité prenant le pas sur la tradition. A 

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plus d’une reprise, le complexe d’Œdipe et le complexe de castration sont présentés comme préfigurés dans l’inconscient, cette préfiguration imposant sa forme au complexe quelles que soient les circonstances extérieures ; c’est le passé de la race qui informe le destin individuel. Dans plusieurs passages de Le moi et le ça, Freud suppose que le surmoi est ébauché dans le ça, au titre de reliquat des « moi » passés de l’humanité. Ainsi présentées, ces idées soutiennent mal une discussion scientifique. Elles montrent cependant que si la conception freudienne du ça en fait une construction biologique, biologique doit ici être entendu dans un sens très large, impliquant des virtualités psychologiques et morales. Si les hypothèses phylogénétiques paraissent peu satisfaisantes, satisfai santes, l’examen du concept de « biologique » amène à y voir plus et autre chose que les processus physico-chimiques auxquels le réduisent les vues les plus courantes et, semble-t-il, les plus indiscutables. Un Schwarz nous a avertis que la catégorie de « sens » était indispensable à la physiologie. Considérons le concept de « pulsion » ; quand on dit que le ça est le réservoir des pulsions, on sous-entend qu’il s’agit d’états physicochimiques du corps, de pulsions aveugles, que les rencontres de l’organisme avec l’entourage lieront à des objets, et il y a dans les textes freudiens de nombreuses preuves de cette position « empiriste » ; elle est dificile à concilier avec la part très

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large que les hypothèses phylogénétiques font à l’innéisme ; surtout, à regarder de plus près le concept de pulsion, l’étofe corporelle d’une pulsion n’est pas quelconque : elle a une source locale et une intensité, elle tend vers un but ; quelle que soit la marge de contingence de l’objet, n’importe quel objet ne lui est pas approprié : le biberon est un sein artificiel, arti ficiel, et il n’est pas logique, parce qu’un crayon peut stimuler la succion chez le nouveau-né et même chez le fœtus, de conclure que la pulsion n’a pas d’objet ; le rélexe se réfère à un envisagement partiel ; dans une perspective d’ensemble, si le sujet de la pulsion ne se représente pas l’objet, il n’est pas absurde de dire que la pulsion même vise la valeur que l’objet constitue : la faim du nourrisson, écrivait Max Scheler, est l’intuition de la « valeur nourriture » ; en d’autres termes, avant mêmeenque l’objet soit donné, la pulsionqu’au peutcontact être conçue comme une relation d’objet puissance et qui ne s’efectue d’un objet plus ou moins approprié. Certes, il ne s’agit que d’une relation d’objet fonctionnelle. Mais si l’on passe au point poi nt de vue structural, on est fondé à parler à propos du corps de structure, d’intégration, de fonctions contrôlantes et de fonctions contrôlées ; sans recourir à de coûteuses hypothèses phylogénétiques, on a beaucoup de raisons d’admettre que la structure spécifique et individuelle du corps prépare la structure de la personnalité. C’est d’ailleurs une direction de pensée dont les textes freudiens témoignent avec une fermeté tempérée de prudence. Il y a plus. La « naturalisation » qui fait du ça le réservoir des pulsions méconnaît la lettre même de vues auxquelles Freud n’a jamais renoncé. A toutes les époques de sa pensée et de son œuvre, il a signifié sans équivoque la double origine des contenus de l’inconscient ou du ça : d’une part, des contenus héréditaires et innés ; d’autre part, des contenus refoulés et acquis. Il nous dit encore que ces éléments refoulés

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sont des éléments d’anciens « moi » ; il insiste sur la fragilité des limites entre le ça et le moi, entre les couches les plus superficielles de l’un et les couches les plus profondes de l’autre. Ceci veut dire, entre autres choses, que les contenus refoulés du système Inconscient ou du Ça sont des relations d’objet.

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L’interprétation n des rêves, le « modèle » du désir inconscient suppose qu’une Dans L’interprétatio perception associée à la satisfaction d’un besoin a laissé des traces mnésiques ; le

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désir inconscient, c’est la relation dynamique qui fait tendre la pulsion vers le réinvestissement du souvenir de cette perception : processus primaire qui tend par la voie la plus courte à l’ « identité des perceptions » et à l’ « hallucination » de l’objet et du but des désirs inconscients. Indestructibles, ceux-ci forment le corps de notre être, ainsi constitué par des relations d’objet, et non par pa r des pulsions sans objet. Dans L’inconscient  (1915)  (1915) [32], le fantasme, premier degré de la formation du rêve et du symptôme, forme de passage p assage entre l’inconscient et le préconscient, est présenté comme hautement organisé, non contradictoire, à peine distinct des phénomènes conscients, et cependant inconscient et incapable de devenir conscient. Qualitativement, il appartient au préconscient ; structuralement, à l’inconscient.

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L’interprétation n des rêves, le « souvenir inconscient » ne passe dans le Dans L’interprétatio préconscient que sous la forme d’ « idées de transfert » ; la régulation par le « principe de déplaisir » fait que le préconscient s’en détourne, qu’il les désinvestit ; les idées de transfert sont ainsi abandonnées à elles-mêmes, refoulées. Ainsi, « la présence d’un stock de souvenirs infantiles, dès l’origine tenue à l’écart du préconscient, devient un sine qua non de refoulement ».

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Donc, même en admettant que les pulsions, à l’état natif, doivent être considérées comme « anobjectales » (ce qui est discutable, on l’a vu), elles sont précocement engagées dans des relations d’objet et ouvrent ainsi les portes aux relations

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intersubjectives et à la communication.  Ainsi, nous concevons le le ça non comme uun n réservoir de pulsions vitale vitales, s, mais comme un agrégat de relations d’objet non structurées mais fonctionnelles ; nous les supposons soumises à la condensation et au syncrétisme ; ce n’est qu’en analysant leurs « rejetons » que nous les reconstruisons sous la forme de relations d’objet d’ob jet explicites. Non seulement le sujet ne s’y distingue pas de la pulsion, du but et de l’objet, mais il est éparpillé parmi ces diférentes relations d’objet ou leurs groupements partiels. En définitive, c’est cette absence du sujet cohérent qui caractérise le mieux l’organisation du ça ; ce que signifie si gnifie l’expression le « ça », c’est son fonctionnement sur un mode impersonnel. L’opération défensive et refoulante exclut la pulsion du moi cohérent, la renvoie à une espèce de non-moi intérieur et ignoré. D’où le caractère d’étrangeté de la pulsion dont les « rejetons » forcent

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logiquement le sujet à reconnaître l’existence. On pourrait parler à ce propos de « dépropriation », ou bien b ien encore, dire des éléments refoulés qu’ils sont « désujettis ». On ne peut donc parler d’une absence radicale d’organisation. Le processus primaire, le syncrétisme sont des modes d’organisation. Trois arguments paraissent décisifs pour compléter cette démonstration : l’opposition dialectique des pulsions de vie et de mort, de la réalisation des possibilités et de la réduction des tensions ; la stratification génétique des pulsions ; l’organisation complexuelle : comment concevoir le complexe de sevrage ou le complexe d’Œdipe sinon comme des modèles structuraux ? L’absence d’organisation du ça n’est que relative, et trouve son sens dans l’absence des relations propres à l’organisation du moi.

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L’absence de la négation dans le ça est un aspect particulier parti culier de cette question. Freud a exprimé plusieurs fois cette idée, qui frappe les esprits et que l’on retient facilement ; on a été jusqu’à conclure de l’absence de négation à la présence de l’afirmation : la pulsion serait donc de nature afirmative ; la négation viendrait du moi ou du surmoi ou de leur action combinée. On peut ainsi tenter de construire un modèle dans lequel, par exemple, le moi jouerait le rôle d’arbitre entre l’afirmation du ça et la négation du surmoi.

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Une telle déduction n’est pas défendable, non plus que les conséquences qui en découleraient. Freud a écrit qu’il n’avait jamais trouvé la négation dans le ça : cette proposition n’implique pas la présence de l’afirmation ; l’en déduire est un abus. On  voit mal comment une une telle proposition se concilierait concilierait avec la coexistence des pulsions de vie et de mort : la tendance à la réalisation des possibilités est contrariée par la tendance à la réduction des tensions ; vivre, c’est mourir un peu et peu à peu, quelquefois beaucoup, voire tout à fait, et la peur de vivre installe la mort ou le non vivre dans la vie ; il est est impossible de concilier les les principes les plus éélémentaires lémentaires de la théorie des pulsions avec un privilège de l’afirmation. Le conlit des pulsions de

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 vie et de mort n’e mpêche pas de dire qu’il qu’il n’y aqu’il pas de contradiction en entre tre leset pulsions : pourn’empêche qu’il y ait contradiction, il faut y ait à la fois afirmation négation. Or, il ne peut être question, à propos du ça, ni d’afirmation ni de négation : ce sont des modalités du jugement, et le jugement est une fonction du moi. Et c’est là exactement ce que pense Freud : « Il n’y a dans ce système, écrit-il au chapitre V de L’inconscient  [32],  [32], ni négation ni doute ni degré dans la certitude » ; « ni degré dans la certitude » ne signifie certes pas qu’une certitude entière est un attribut de l’inconscient ; la formule exclut aussi bien une certitude sans réserve qu’une supposition plus ou moins vive. Tout ce qu’on peut dire des pulsions du ça est qu’elles existent, et qu’elles existent « en soi », sur le mode impersonnel. Ce n’est qu’à leurs « représentants » dans le moi que l’on peut reconnaître l’existence « pour soi » qui les rend accessibles aux modalités du jugement. Freud a souvent parlé des pulsions comme de la « demande » que le corps fait à l’appareil psychique. On peut retenir ce terme et aller plus loin : l’émoi pulsionnel qui représente la pulsion dans le

 

moi n’est jamais, si pressant et urgent soit-il, qu’une interrogation qui met le moi en question, voire « à la question ». Afirmative ou négative, la réponse est une opération du moi, et qui l’engage, et c’est là le fondement de son autonomie et de son unité.

 VI - Sur la structure du moi Dans Inhibition, symptôme et angoisse (1926) [37], Freud réagit contre l’idée excessive que certains psychanalystes s’étaient faite de l’hétéronomie du moi, à la suite de Le moi et le ça ; il i l souligne une autonomie qu’il n’illustre explicitement qu’en s’appuyant sur les mécanismes de défense et le refoulement opéré par le moi. Dans la littérature postfreudienne, le thème de l’autonomie du moi est devenu un thème d’élection ; on a montré qu’elle n’était qu’une autonomie relative, limitée qu’elle était par l’hétéronomie du moi ; que cette autonomie relative valait non seulement par rapport aux autres substructures de la personnalité, le surmoi et surtout le ça, mais par rapport à la réalité extérieure ; que ces deux autonomies, interne et externe, si elles entraient en opposition dans les situations extrêmes, s’étayaient normalement l’une l’autre ; développement moderne de l’idée freudienne, que la relation avec la réalité extérieure constitue le noyau du moi [Rapaport, 65, 68].

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Par cette insistance sur l’autonomie relative du moi, on risque de sembler méconnaître que l’autonomie relative est un caractère commun de toutes les substructures de la personnalité et qu’il n’est pas possible de reconnaître un « système » sans lui accorder par là même une autonomie relative, c’est-à-dire une autonomie limitée par l’autonomie des autres systèmes, d’où la notion de « conlit intersystémique » que doit compléter celle de « coopération intersystémique ». Si le moi, par exemple, est motivé par le ça ou le surmoi, les appareils de perception et d’exécution sont des appareils du moi.

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Ceci explique pourquoi l’autonomie relative du moi revêt une importance particulière : elle n’est pas seulement autonomie interne, par rapport aux autres systèmes, mais autonomie externe, par rapport à la réalité. De ce fait, c’est l’autonomie relative du moi qui est la garantie de l’autonomie relative de la personne dans son ensemble. Qui plus est : on peut parler non seulement d’autonomie du moi, mais d’« autonomisme », en ce sens que chez bien des sujets et dans bien des conjonctures, le sujet cherche à renforcer son autonomie contre les stimulations externes ou internes, souvent d’une manière tendancieuse, voire pathologique ; c’est un problème que l’on retrouvera en abordant la structure du surmoi. On peut supposer que cet autonomisme du moi a contribué à orienter la rélexion sur son

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autonomie, après tous les assauts qu’elle avait subis.

 

Le moi est donc à la fois hétéronome et autonome. Ceci attire à nouveau notre attention sur l’ambiguïté sémantique de ce terme, le « moi ». Les psychologues p sychologues l’emploient dans toutes sortes de sens. En psychanalyse, le moi devient une sorte de « Maître Jacques », d’ « homme à tout faire ». Hartmann (1949), lui attribue toutes sortes de fonctions, centrées à vrai dire sur la relation avec la réalité : organisation et contrôle de la motilité et de la perception, externe et interne ; protection contre les stimuli externes et internes ; épreuve de la réalité ; action et pensée ; activités de détour ; anticipation ; perception du temps ; action inhibitrice ; traits de caractère ;

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fonction synthétique. On est frappé par le caractère disparate et incomplet i ncomplet d’un tel exposé, caractère qui n’échappe pas à l’auteur ; envisager des caractères plus généraux comme le contrôle, l’organisation, l’adaptation, ne résout rien : chacune des propriétés du moi peut se référer en même temps à plusieurs de ces caractères. En d’autres termes, on ne peut sortir de la dificulté par une classification logique qui ne reposerait que sur une analyse conceptuelle. On est sans doute dans une meilleure voie lorsqu’on fait intervenir la notion de « conlit intrasystémique ». Le même Hartmann donne des exemples de contrastes dans les fonctions du moi : opposition oppositi on aux pulsions et satisfaction des pulsions ; insight   et et rationalisation ; connaissance objective et abandon aux préjugés ;

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indépendance des buts et subordination aux demandes des autres substructures de la personnalité, etc. Ainsi, « beaucoup de malentendus et d’obscurités peuvent être ramenés au fait que nous ne nous sommes pas habitués à considérer l’ego d’un point de vue intrasystémique. On parle de l’ego comme étant rationnel, ou réaliste, ou facteur d’intégration, alors que ce ne sont là des caractéristiques que de l’une ou l’autre de ses fonctions ». C’est là poser le problème, trop négligé, de la structure interne du moi. En fait, ces fonctions du moi ne sont pas seulement diférentes ou contrastantes, elles sont à proprement parler « antinomiques », et l’antinomie la plus frappante est que le moi est à la fois l’agent du refoulement et l’agent du défoulement, de la maladie et de la

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cure. La structure intrinsèque du moi ne peut donc être considérée comme une structure homogène : elle comprend, par exemple, des formations par lesquelles il est hétéronome, et des formations par lesquelles il est autonome. Si l’on veut reconnaître ces formations, il faut partir d’une analyse des conlits internes du moi. Ce n’est qu’une fois cette structure interne reconnue ou tout au moins esquissée que nous pourrons savoir s’il est permis de parler du moi dans tous les cas, en quel sens et pour quelles raisons. Or, il existe dans l’œuvre de Freud, sinon une réponse, du moins l’ébauche d’une réponse à une telle question : elle se trouve dans ce que Freud dit de la conscience, à L’interprétation n des rêves. la fin de L’interprétatio

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Si l’on compare la deuxième théorie de l’appareil psychique à la première, il n’est pas dificile d’apercevoir que, dans les grandes lignes, le moi correspond au système Préconscient-Conscient. Freud distingue le système Inconscient et le système

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Préconscient, entre lesquels joue la censure. La conscience est en général présentée comme une dépendance du système Préconscient, lequel contrôle l’accès à la conscience et à la motilité ; il a à sa disposition, « pour la distribuer, une énergie d’investissement mobile dont une partie nous est connue sous la forme de l’attention ». Freud parle encore d’une « seconde censure », qui n’intervient qu’audessus d’un certain seuil entre le préconscient et le conscient, et qui est un attribut de la conscience ; c’est cette seconde censure que l’on essaye de mettre hors de jeu par la règle de libre association. Mais, dans d’autres passages, Freud parle de la conscience comme d’un système qu’il place au sommet de l’appareil psychique. Ce système fait corps avec le système Perception, et Freud parle assez souvent — il continuera — du système PerceptionConscience. Ce qui nous intéresse le plus est qu’il reconnaît à ce « système » des caractères qui le diférencient du système Préconscient :

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1° Du point de vue économique, la conscience est une énergie « libre ». » . Ce qui diférencie le système Préconscient du système Inconscient, c’est que l’énergie y est « liée » et non mobile ; au contraire, l’attention représente, sous une forme qui nous est familière, une part d’énergie « libre » à la disposition du système Préconscient. On peut parler à ce propos d’un « surinvestissement » qui emprunte une partie de son énergie aux souvenirs verbaux. Toutefois, à travers toute son œuvre, Freud n’a pas cessé de souligner la diférence entre la conscience, incompatible avec des traces, et la mémoire, inconcevable sans traces.

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2° Du point de vue dynamique, la conscience introduit une régulation plus discriminative. L’activité du préconscient reste dominée par le « principe de déplaisir » (ce qui veut dire qu’elle tend à la réduction des tensions). Or la conscience permet à l’appareil psychique d’investir et d’élaborer ce qui est associé associ é avec la libération de déplaisir.

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La conscience nous apparaît ainsi, au moins en certains moments de son activité, comme une énergie libre, capable de se dégager des contraintes du passé et de l’afect. Bien que Freud n’ait pas poussé cette distinction et qu’il l’ait négligée par la suite (sur la conscience, les textes de la maturité et de la vieillesse vi eillesse sont elliptiques ou évasifs), on trouve dans la fin de L’interprétatio L’interprétation n des rêves les éléments d’une distinction structurale, à l’intérieur du système Préconscient, d’un système Perception-Conscience opposé aux systèmes mnésiques. Est-ce la voie vo ie d’une solution pour le problème de la structure intrinsèque du moi ? Plus explicite sur les rapports des processus conscients, préconscients et inconscients, est-ce donc la première théorie de l’appareil psychique qui complèterait ici la seconde ? Nous ne devons pas nous laisser aller à trop d’espoir car, comme le dit Freud, tour à tour au

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service du ça, du surmoi ou du moi, la conscience se prête mal à des considérations structurales.

 

Portons l’attention sur le matériel où les antinomies du moi nous sont à la fois évidentes et familières : sur l’expérience psychanalytique elle-même, au moins sur quelques-uns de ses aspects.

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Le but de la règle fondamentale est que l’analysé ne recoure pas, autant que possible, à la capacité de choix et de rejet de la conscience, à ce que Freud a appelé, à certains moments, la seconde censure ; les associations d’idées sont « libres » en ce sens que l’analysé est dégagé de sa sujétion à la réalité externe ; cette forme artificielle et extrême d’« autonomie externe » a pour contrepartie l’augmentation de l’hétéronomie interne, c’est-à-dire de la dépendance du moi par rapport aux formations de l’inconscient dont procèdent la résistance et la névrose de transfert.

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L’observance de la règle fondamentale n’empêche pas l’analysé de choisir et de rejeter, mais cette fois inconsciemment. C’est ici qu’intervient la censure proprement dite, la « première » censure, entre l’inconscient et le préconscient. Le psychanalyste constate des résistances, c’est-à-dire les efets, sur la communication du psychanalysé au psychanalyste, des opérations défensives du moi. Ce moi qui « résiste » est-il autonome ou hétéronome ? La réponse difère selon qu’on se place au point de vue intersystémique ou au point de vue intrasystémique.

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Du premier point de vue, les résistances sont des opérations actives du moi, essentiellement essentielleme nt « autoplastiques », dans lesquelles le « contre-investissement » complète le « désinvestissement », où ce que dit l’analysé contribue à efacer et masquer ce qu’il ne dit pas ; et si le but dernier de la défense est la réduction des tensions, c’est-à-dire de motivations issues du ça, du désir inconscient, il n’en est pas moins vrai que les afects déplaisants dont il s’agit d’éviter le développement sont utilisés par le moi sous la forme d’afects-signaux. En ce sens, on peut parler d’autonomie du moi par rapport au ça et au surmoi.

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La conclusion est diférente si l’on se place au point de vue « intrasystémique », à l’intérieur de la structure propre du moi : le moi est « afecté » par ses motifs de défenses ; ses opérations défensives sont automatiques et inconscientes, elles échappent aux intentions du sujet, à son contrôle et à sa responsabilité. Le sujet subit sa résistance, qui nous apparaît maintenant comme une limitation de l’autonomie du moi : l’analysé voudrait bien échapper à sa tension, à sa stérilité, à son bavardage, mais il ne peut pas.

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Dans la névrose de transfert, le moi est sous l’empire de l’automatisme de répétition, de quelque façon qu’on l’interprète, comme répétition de besoin ou comme besoin de répétition. Les motivations issues du ça tendent à l’ « identité des perceptions », c’est-à-dire au retour de la situation princeps que l’expérience a liée à la première satisfaction de la pulsion ; il arrive que l’analysé cherche à transformer l’entourage dans le sens du désir inconscient, ou qu’il revive le souvenir inconscient dans une expérience « ecmnésique » ; là encore, l’augmentation de l’autonomie externe, sous

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la forme de la méconnaissance ou de la sous-estimation de la réalité, a pour contrepartie la perte de l’autonomie interne par rapport à des formations et à des processus inconscients. L’hétéronomie du moi dans le transfert n’est pas diminuée par la fonction « restitutive » que l’on a pu attribuer à la répétition transférentielle [7]. Il s’agit ici, quant à la genèse du transfert, du rôle de la blessure narcissique de l’enfance, de l’échec de la sexualité infantile, dont Freud estimait qu’ils auraient dû, rationnellement, empêcher empêcher le transfert. J’ai soutenu, et je pense toujours, que cette blessure narcissique est en fait un des motifs les plus puissants du transfert. Mais ceci ne définit pas assez clairement le rôle du moi dans le transfert. En admettant que l’activité restitutive soit une activité du moi, la blessure narcissique qui motive la répétition a frappé le moi idéal, c’est-à-dire une formation distincte du moi.

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Dans des cas nombreux, il est patent que c’est l’éventualité envisagée par Freud qui se réalise, et que le besoin de sécurité l’emportant, l’analysé « résiste au transfert », le plus souvent en renforçant, en rappelant sans cesse la signification objective de la relation thérapeutique (contre-investissement), c’est-à-dire en s’appuyant sur la réalité extérieure (hétéronomie externe) pour renforcer son autonomie interne. Encore le moi de l’analysé se trouve-t-il là sous l’empire d’une motivation issue du moi idéal et d’un « autonomisme » qui répète l’autonomisme par rapport aux parents.

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La névrose de transfert est donc une condition de « dépendance du moi » ; l’autonomie du moi n’intervient que dans le sens d’une résistance inconsciente, qui oppose la répétition agie à la remémoration pensée et parlée du désir inconscient.

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L’intervention du psychanalyste, sous la forme de l’interprétation, implique et induit des modifications radicales de la structure intersubjective et intrasubjective.

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Je suppose une interprétation de résistance assez complète, montrant à la fois

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pourquoi l’analysé se défend, comment et contre quoi. Une jeune fille me raconte qu’elle a fait un compliment à un jeune homme qui l’intéresse ; ce compliment a été mal reçu : il rappelle au jeune j eune homme les compliments que d’autres jeunes filles lui ont faits pour le conquérir. Après m’avoir raconté cet incident, la patiente ajoute « que ça n’a pas d’importance et que dorénavant, elle s’abstiendra de lui faire des compliments ». Il s’agissait d’une organisation obsessionnelle ; la problématique, largement élaborée dans la névrose de transfert et surtout la névrose infantile, tournait autour du dilemme « forcer - être forcée », avec des déterminations sadiques-anales précises.

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L’interprétation systématique de ce fragment de matériel met en évidence les points suivants : I° L’objet de la défense est un fantasme de domination : par son compliment, la jeune fille veut forcer le jeune homme à l’aimer ;

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2° Le motif de la défense est une ébauche de malaise fonctionnant comme signal : il il s’agit d’un sentiment de culpabilité et d’échec induit par la réponse du jeune homme (je ne veux pas de compliments par lesquels on cherche à s’emparer de moi) ; cet afect déplaisant a ses conditions subjectives dans un conlit entre le narcissisme de la patiente, qui la poussait à dominer, et les interdictions maternelles : non seulement la mère était l’adversaire dans le conlit fondamental (forcer - être forcée), mais encore avait-elle dit et répété à sa fille qu’il était très mal pour une jeune fille de troubler un jeune homme et, par conséquent, de chercher à le conquérir ;

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3° La résistance et l’opération défensive s’expriment dans les mots : « ça n’a pas d’importance » : l’incident n’a pas de valeur, il ne veut rien dire, c’est tout juste s’il a existé ; dénégation et annulation par lesquelles la patiente glisse sur ce qui s’est passé, suspend le développement de son malaise et méconnaît qu’efectivement, le but du compliment était de s’assurer une prise sur le jeune homme ;

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4° Ce fragment de matériel met encore en évidence le « retour du refoulé » ; la tendance dominatrice méconnue revient à la charge, ajustée au partenaire par le moi : au lieu de faire des compliments, la jeune fille s’en abstiendra ; mais le but reste le même : plaire et dominer.

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On est donc en droit de parler d’autonomie du moi à propos des opérations défensives du moi, par lesquelles il se défend contre un désir de domination et les afects déplaisants qui en dérivent, sentiments d’échec et de culpabilité. Mais, par ailleurs, le moi est hétéronome, en ce sens qu’il est motivé par des formations inconscientes et que l’opération défensive elle-même s’accomplit inconsciemment.

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Si l’analyste intervient pour interpréter, la structure du champ analytique est modifiée. L’analyste s’adresse au sujet conscient et L autonome. L’analysée est engagée à se mettre dans une attitude rétrospective et rationnelle, par rapport à son récit de l’incident, à « réléchir » sur ce qui a été vécu et raconté d’une manière irréléchie. La structure intersubjective de l’interprétation induit une structuration intersubjective de l’analysée : elle est engagée à « objectiver » une expérience avec laquelle elle s’était d’abord identifiée. La parole de l’analyste renforce l’autonomie interne de l’analysée, par rapport au ça, au surmoi, aux mécanismes de défense, en général par rapport aux formations et aux processus inconscients, ceci aux dépens de l’autonomie externe.

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Théoriquement, l’interprétation met l’analysée à même, en reconnaissant les divers aspects de la situation et leurs rapports, de juger et de choisir. L’interprétation est un appel à l’autonomie de l’analysé, appuyé sur la parole de l’analyste. Mais il ne s’agit plus de l’autonomie dans le sens que le moi, motivé par des afects déplaisants, développe inconsciemment des opérations défensives contre une. pulsion refoulée ; l’autonomie dont il s’agit consiste à prendre conscience et à contrôler ces opérations défensives qui étaient d’abord inconscientes.

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Naturellement, il ne s’agit là que de l’efet théorique de l’interprétation. En général, Naturellement, cet efet théorique n’est pas obtenu immédiatement. En supposant que l’interprétation soit correcte, elle peut induire i nduire une résistance secondaire, par exemple, dans le cas cité, une opposition motivée par le sentiment d’être contrariée et forcée. Supposons que l’interprétation ait été comprise et acceptée : elle se heurte à l’autonomie propre des formations inconscientes qu’elle vise : désirs inconscients du ça, narcissisme, moralisme du surmoi, mécanismes de défense du moi. C’est ce qui fonde la nécessité de l’« élaboration » ou « translaboration ».

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L’autonomie du moi a donc deux sens antinomiques quand on parle de la résistance et de la levée de la résistance. Dans le premier cas, il s’agit d’une autonomie « intersystémique » ; dans le second, d’une autonomie « intrasystémique ». De plus, l’autonomie « intersystémique » se trouve être en même temps une hétéronomie « intrasystémique » : le moi ne contrôle co ntrôle pas les opérations défensives dont il est cependant l’agent.

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L’analyse structurale de l’interprétation et de ses efets amène au problème des buts et des moyens de l’analyse. Dans les termes de la première théorie structurale, ce qui était inconscient devait devenir conscient. Selon la seconde, le moi doit s’étendre aux dépens du ça. En évoquant les passages de L’interprétatio L’interprétation n des rêves qui décrivent les propriétés économiques et dynamiques de la conscience, nous avons laissé entendre que la deuxième formulation n’avait pas rendu la première inutile.

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Ce sens de la deuxième formulation ne soulève pas de discussion. La formule Wo Es war soll Ich werden est extraite de la fin de la troisième des Nouvelles Conférences, passage dans lequel il est également question de rendre le moi plus indépendant par rapport au surmoi dont la puissance, il est vrai, procède de charges pulsionnelles issues du ça. Dans la perspective de la deuxième théorie de l’appareil psychique, le but de l’analyse est donc la libération relative du moi par rapport aux autres substructures de la personnalité. En d’autres termes, ce que l’on a en vue, c’est la

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résolution du conlit intersystémique. Cette conception reste incomplète et ambiguë en ce qui concerne le moi ; c’est au moi qu’il incombe de lever la résistance dont il est l’agent ; c’est logique et c’est en même temps paradoxal : la résistance et la levée de la résistance sont antinomiques. En d’autres termes, ce que l’on perd de vue, c’est la résolution du conlit intrasystémique. L’antinomie n’est pas résolue lorsqu’on dit que, dans le processus de la « guérison », le moi remplace les défenses pathogènes par d’autres défenses moins coûteuses et plus réussies, notamment la sublimation. Une telle réponse n’a de sens qu’en étendant à l’extrême la compréhension du concept de défense, en y faisant rentrer, par exemple, tous les processus d’adaptation. Mais si l’on conserve au concept de défense sa signification spécifique — que les opérations défensives du moi ont pour but la réduction de tensions intolérables, et une réduction aussi rapide que

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possible — le recours au concept de défense apparaît insufisant : le but de l’analyse, au moins le but idéal, est que l’analysé réalise ses possibilités en acceptant ses limitations, ce qui a pour condition l’augmentation de sa tolérance à des tensions élevées ou, comme le disait Freud dans L’interprétatio L’interprétation n des rêves, la capacité de résister au « principe de déplaisir ». La contradiction apparaît clairement lorsque, comme Fenichel dans La théorie psychanalytique des névroses [16], on range la sublimation parmi les mécanismes de défense : la sublimation, nous est-il dit, est un mécanisme de défense très particulier ; c’est une défense « réussie » et qui a pour condition l’abolition de la défense ; c’est reconnaître que le concept de défense est insufisant pour définir l’activité du moi sans la résolution du conlit défensif. On se heurte ici à l’ambiguïté des concepts de « processus secondaire » et « principe de réalité » ; leur expression la plus authentique est la recherche de la vérité, qui a pour condition l’exclusion des facteurs extra-intellectuels et la dominance des catégories de la pensée rationnelle et objective ; mais on rattache également au processus secondaire et au principe de réalité l’intervention des opérations défensives du moi ; or, les opérations défensives du moi ont divers caractères qui les apparentent au processus primaire : elles s’accomplissent sous l’emprise du principe de plaisir et de la compulsion de répétition ; si elles ajournent la décharge de la

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pulsion dangereuse, elles tendent cependant à une réduction de tension aussi proche que possible ; leur structure est de toute évidence paralogique. En bref, les mécanismes de défense sont automatiques et inconscients et, comme Freud le dit, ils sont « à part dans le moi ». Le patient peut se sentir satisfait d’un développement de la cure que marque une plus grande ouverture de la relation analytique ; à la séance suivante, il est étonné et déçu que la résistance se soit reconstituée. Avec certaines réserves on peut, à propos de mécanismes de défense, retourner ce que Freud dit des fantasmes : structuralement, ils font partie du moi ; qualitativement, ils appartiennent au ça. Envisageons une autre hypothèse : que la résolution de la défense s’appuie sur les fonctions non conlictuelles du moi. Nous entendons par-là les fonctions du moi étudiées en psychologie, la perception interne i nterne et externe, l’action, la communication et le langage, l’imagination et la pensée, etc. Leur fonctionnement préconscient et conscient a ses lois propres et, de ce fait, une certaine autonomie. Mais cette autonomie n’est pas telle que l’intervention de ces « capacités » du moi puisse expliquer la résolution du conlit défensif : d’un côté, elles sont indispensables à cette résolution ; de l’autre, elles peuvent tout aussi bien se trouver au service de la défense, comme au service du surmoi ou du ça. Elles sont non conlictuelles co nlictuelles en ce sens qu’elles sont tantôt d’un côté du conlit, tantôt de l’autre. La dificulté est la même que celle que Freud démontrait à propos de la conscience : les fonctions non conlictuelles du moi se prêtent mal à des considérations structurales.

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Ni les mécanismes de défense, ni les fonctions non conlictuelles du moi ne se montrent donc propres à répondre au problème de la résolution du conlit défensif. C’est pourquoi nous avons été amené, il y a plusieurs années, à introduire le concept de « mécanisme de dégagement du moi », sans élaborer cette hypothèse dont nous ne proposons encore qu’une esquisse [8].

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Le but des opérations de dégagement du moi est diférent de celui des opérations défensives : celles-ci tendent à la réduction des tensions, conformément au « principe de déplaisir » ; celles-là tendent à la réalisation des possibilités, à les « vivre », au moins sur le divan, au lieu de les « non-vivre », de les « mortifier ». Les opérations de dégagement supposent le « désinvestissement » de la contre-pulsion défensive, son ajournement, et, en contrepartie, le « surinvestissement » de certaines pensées, lequel fait appel à l’attention et à la rélexion. Ces pensées et leur enchaînement obéissent au principe de l’identité des pensées que Freud a opposé à celui de l’identité des perceptions, lequel entache les opérations défensives, par exemple la projection ; en d’autres termes, leur structure est logique et non paralogique.

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On est en droit de parler de « mécanismes » de dégagement, en ce sens que les processus de dégagement empruntent des voies communes aux divers sujets. Ces  voies ont ceci de semblable semblable qu’elles cons constituent tituent un passage d’u d’un n mode de fonctionnement mental à un autre. L’exemple le plus classique est le passage de la répétition agie à la remémoration pensée et parlée. Le sujet se dégage ainsi de la répétition, qui répond à des motifs actuels et à l’attente d’efets imminents, par l’anticipation des efets éloignés de la conduite. On peut citer d’autres voies de dégagement : le passage de l’identification, par laquelle le sujet se confond avec son  vécu, à l’objectivation, par laquelle laquelle il prend de la la distance par rapport à ce vécu ; le passage de la dissociation à l’intégration ; le détachement de l’objet imaginaire, complété par le changement d’objet ; la familiarisation avec les situations phobiques, phobi ques, qui remplace l’attente anxieuse de la situation traumatique et fantasmatique ; la

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substitution du contrôle à l’inhibition, de l’expérience à l’obéissance. Dans tous ces exemples, l’opération défensive n’est neutralisée que pour autant qu’une opération de dégagement lui est substituée : « On ne détruit que ce qu’on remplace. » En termes psychologiques, les opérations de dégagement font appel à l’intelligence, dans le sens où nous la caractérisons par l’ajustement aux situations nouvelles et le remaniement structural du champ psychologique. Nous rejoignons Freud qui, dans les rares passages où il aborde ce problème, fait intervenir le jugement intelligent et le choix volontaire, les arguments logiques, la liberté de décision.

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Revenons au problème de la structure interne du moi. Les considérations qui

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précèdent amènent à introduire la distinction entre un moi constitué et un moi constituant. Le moi constitué est l’agent des opérations défensives, automatiques et inconscientes, motivées par le ça et le surmoi, et poursuivant la réduction urgente des afects déplaisants et des tensions pénibles. Le moi constituant s’en diférencie

 

par sa résistance aux tensions et à la répétition ; il tend à la réalisation des possibilités du sujet ; il met en jeu les formes les plus hautes de l’activité consciente, l’attention et la rélexion, le jugement et la volonté ; il étaye son activité activi té sur les catégories de la pensée rationnelle et objective, sur la parole du psychanalyste ; en dernière analyse, ces appuis extérieurs lui permettent d’afirmer son autonomie par rapport au moi constitué, de procéder à un remaniement structural du champ psychologique, dans une action à la fois destructurante et restructurante. Une dernière question se pose ; celle de l’unité du moi. L’autonomie du moi, on l’a vu, a au moins deux sens selon qu’elle désigne l’activité défensive du moi par rapport aux pulsions du ça, ou l’activité de dégagement du moi par rapport à ses propres opérations défensives ; le moi n’est certes pas une structure homogène, et l’on peut se demander s’il n’y a pas quelque abus à faire fai re intervenir le moi, comme on le fait en psychanalyse, dans des rôles non seulement si diférents, mais comme on l’a montré antinomiques. Cependant, il existe un trait commun entre les opérations défensives et les opérations de dégagement : c’est la capacité de choix et de rejet, fondée sur une sélectivité qui, en dernière analyse, a sa source dans la dualité des pulsions de vie et de mort, ou, pour être plus précis, de la tendance à la réalisation des possibilités et de la tendance à la réduction des tensions. Le ça ne choisit pas, il ne questionne même

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pas, mais les pulsions du ça modifient le moi, elles le « motivent » et c’est à propos de ces modifications qui l’« afectent » que le moi doit se questionner et répondre. Pour une large part, cette fonction de réponse est automatisée et inconsciente : tel est le rôle des « mécanismes de défense du moi ». L’action du surmoi est également une action sélective inconsciente, qui se spécifie sous les formes du refus ou de la permission, de la condamnation ou de l’approbation. Mais la capacité de choix ou de rejet du sujet n’est pas tout entière automatisée dans le jeu inconscient du moi constitué. La formation et l’action du moi constitué n’abolissent pas l’existence et l’action du moi constituant. L’autonomie du moi signifie aussi qu’il peut objectiver les opérations du moi constitué, co nstitué, prendre position

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à leur endroit et s’en dégager. L’expression la plus haute de cette activité du moi constituant est le jugement. Capacité de choix et de rejet, sélectivité sont donc des caractères communs des fonctions que nous attribuons au moi inconscient et au moi conscient. C’est ce fait qui nous autorise à parler également du moi lorsqu’il s’agit d’opérations défensives et lorsqu’il s’agit d’opérations de dégagement.

 VII - Sur la structure du surmoi Comme dans le cas du moi, l’analyse structurale du surmoi pose à la fois un problème intersystémique et un problème intrasystémique ; la progression du premier dépend en grande partie de celle du second, parce que celui-ci a été relativement négligé. Freud lui-même, dans Le moi et le ça, conçoit le surmoi comme une somme ou un système d’identifications ; il évoque à ce propos le concept

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préanalytique de la personnalité multiple, mais il concentre son attention sur les formations privilégiées qui, d’une manière typique, procèdent du déclin du complexe d’Œdipe. Cette position même a amené les auteurs à s’interroger sur les précurseurs préœdipiens du surmoi et sur ses remaniements postœdipiens, c’est-àdire sur l’aspect génétique de la question, en laissant le plus souvent dans l’ombre ses aspects structuraux.  Ainsi subsiste une confusion d’idées, qui se manifeste dans le maniement de la terminologie freudienne ; Freud parle, alternativement ou simultanément, de moi idéal, de surmoi, d’idéal du moi ; les psychanalystes se demandent s’il s’agit seulement de termes diférents, ou d’idées diférentes. La constatation de cet embarras, jointe à l’expérience clinique, engage à utiliser le détour de la terminologie pour aborder le problème de la structure interne du surmoi. Certes, l’existence de trois termes diférents n’entraîne pas l’existence de trois concepts diférents. Seul l’examen des faits peut permettre de trancher la question. Théoriquement, on peut envisager trois solutions : ou bien ces trois termes sont équivalents et désignent une seule et même structure ; ou o u bien ils désignent trois structures diférentes ; ou bien enfin des substructures à l’intérieur d’une même structure.

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La terminologie de Freud est passée par trois étapes.

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Dans Pour introduire le narcissisme (1914) [30], seules les expressions das Idealich (le moi idéal) et das Ichideal (l’idéal du moi) sont employées. Les textes ne permettent guère de diférencier leur emploi. Freud ne semble avoir en vue qu’un seul concept dont la nature structurale est indiquée plutôt que détaillée. L’idéal du moi a son origine dans la convergence du narcissisme primaire et des identifications aux parents, à leurs substituts et aux idéaux collectifs ; ses fonctions sont essentiellement la conscience morale, l’observation de soi, la censure ; la régulation du sentiment de la valeur personnelle dépend, dans des proportions variables, du narcissisme, de l’idéal du

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moi, et de l’apport des relations objectales. Dans Le moi et le ça (1923), Freud introduit un terme nouveau, das Ueberich (le surmoi), sans renoncer ni à « moi idéal i déal », ni à « idéal du moi ». Il est dificile de dégager des textes une diférence de sens. La nature structurale du concept du surmoi est clairement afirmée.

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Les Nouvelles conférences (1933) laissent subsister la confusion terminologique, avec cependant une précision : Freud parle de l’idéal du moi comme d’une « fonction » du surmoi, le situant ainsi sur le même plan que la censure et l’introspection, sans en faire une « structure » diférente du surmoi.

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La conclusion de cette recherche terminologique est que Freud n’a pas fait de diférence structurale explicite dans l’emploi des termes surmoi, idéal du moi, moi idéal ; la seule indication que l’on trouve est de considérer co nsidérer l’idéal du moi comme une « fonction » du surmoi.

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La littérature psychanalytique est, en général, restée confuse sur ce point et la consultation de quelques autorités scientifiques ne nous a pas apporté beaucoup plus.

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La terminologie de Nunberg est cependant plus précise. Si la Neurosenlehre [59] accepte l’équivalence de surmoi et idéal du moi, le moi idéal, en revanche, est distingué de l’idéal du moi. Le moi idéal est introduit par Nunberg comme une formation chronologiquement et génétiquement antérieure au surmoi : « Le moi encore inorganisé, qui se sent uni au ça, correspond à une condition idéale, et c’est pourquoi on l’appelle le « moi idéal ». Le propre moi est probablement l’idéal du petit enfant, jusqu’au moment où il rencontre la première opposition à la satisfaction de ses besoins » ; on peut rapprocher rappro cher du « moi-plaisir-purifié » de Freud, pensons-nous, « cette condition idéale dans laquelle il s’accorde tout ce qui lui plaît et rejette tout ce qui lui déplaît » [ibid.]. Nunberg nous dit encore qu’au cours du développement, chaque individu laisse derrière lui « cet idéal narcissique », mais qu’en fait il aspire toujours à y retourner. C’est ce qui se produit pro duit surtout dans les psychoses mais aussi dans les névroses : « Chaque symptôme contient une réalisation de désir positive ou négative, dont le patient se sert pour atteindre la toute-puissance » [ibid].

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En résumé, l’expression « le moi idéal » désigne chez Nunberg une formation inconsciente narcissique, distincte du surmoi que spécifie l’identification ; à la précision terminologique près, on trouve la même distinction conceptuelle et structurale chez d’autres auteurs, par exemple Fenichel, dans La théorie

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 psychanalytique des des névroses [16].

Le même Fenichel y discute de la distinction entre surmoi et idéal du moi, qu’il a rencontrée dans la littérature sous deux formes. Certains ont proposé de distinguer entre l’idéal du moi, modèle de ce qu’on voudrait être, et le surmoi, puissance qui menace, défend et punit ; mais, objecte Fenichel, Freud a montré dans Le moi et le ça l’intrication de ces deux aspects. D’autres, comme Fromm, distinguent entre l’idéal

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 vrai, accepté la personnalité personnal ité tout entière, l’idéal faux, par un unee autorité extérieure oupar intériorisée ; mais Fenichel fait et remarquer queimposé l’idéal le plus authentique peut aussi être le fruit de l’introjection. Ce rapide sondage dans la littérature amène à distinguer deux problèmes, que l’on examinera tour à tour : le rapport entre le surmoi et l’idéal du moi, qui apparai apparaissent ssent comme deux notions très proches, sinon identiques ; le rapport entre idéal du moi et moi idéal, qui, à un premier examen et au moins d’après Nunberg, semblent plus faciles à diférencier.

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On a vu que chez beaucoup d’auteurs, à commencer par Freud, surmoi et idéal du moi sont employés dans le même sens ; Freud cependant, dans les Nouvelles conférences [38], introduit une distinction lorsqu’il fait de l’idéal du moi une fonction

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du surmoi. Nous nous demandons si l’on peut ajouter à cette distinction fonctionnelle une précision structurale. Nous pensons qu’on le peut, en revenant aux relations intersubjectives qui ont servi de modèle au surmoi. Dans ce modèle intersubjectif fourni par la relation parents-enfant, afin de ne pas déplaire et pour plaire à l’autorité qui dit « oui ou non », « c’est bien ou c’est mal », « tu peux ou tu ne peux pas », « tu dois ou tu ne dois pas », « je t’aime ou je ne t’aime plus », le sujet doit rejeter certaines conduites et en adopter d’autres.

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Dans le modèle personnologique, le surmoi correspond à l’autorité, et l’idéal du moi à la façon dont le sujet doit se comporter pour répondre à l’attente de l’autorité ; le moi-sujet s’identifie au surmoi, c’est-à-dire à l’autorité, et le moi-objet moi-obj et lui apparaît ou non conforme à l’idéal du moi. En d’autres termes, nous comprenons le surmoi et l’idéal du moi comme formant un système qui reproduit, « à l’intérieur de la personnalité », la relation autoritaire parents-enfant. Du point de vue génétique, on a trop simplifié les choses en définissant le surmoi comme une modification du moi par identification aux parents ou, plus exactement, à l’image idéalisée des parents et, mieux, au surmoi des parents. J’ai depuis longtemps fait observer que ce qui est intériorisé, ce n’est pas l’image de l’autre, mais le modèle d’une relation avec l’autre ; l’enfant, en efet, n’objective sa personne propre qu’en adoptant à son égard la position et l’attitude de l’autre ; c’est par cette voie qu’il devient capable de se dédoubler en moi-sujet et moi-objet ; ensuite, le dédoublement de l’intériorité en moi observant et moi observé peut fonctionner d’une manière autonome, et ce fonctionnement autonome nous fait oublier son origine ori gine intersubjective, vers laquelle nous savons qu’il peut très facilement régresser.

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En résumé, la formule de Freud, que l’idéal du moi est une fonction du surmoi, peut s’interpréter structuralement structuralement de la façon suivante : l’idéal du moi représente la façon dont la personne doit se comporter pour que le moi-sujet, moi- sujet, identifié à l’autorité parentale, puisse accorder son approbation au moi-objet.

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Le moi idéal représente-t-il une formation inconsciente diférente, à laquelle on doive accorder soit le statut d’une substructure distincte du système Surmoi - Idéal du Moi, soit celui d’une diférenciation à l’intérieur du système d’identifications auquel nous donnons le nom de Surmoi ? Le choix entre ces deux solutions est secondaire. Ce qui importe, c’est de savoir si l’on doit reconnaître le moi idéal comme une formation relativement autonome par rapport au système Surmoi Idéal du Moi.

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Sans poser explicitement la question, Freud lui a donné une réponse négative qui réunit ces formations dans le surmoi. Le sentiment de la valeur du moi (Selbstgefühl) dépend à la fois des apports que le moi reçoit du narcissisme primaire, du surmoi et des relations objectales. Le moi idéal se trouve ainsi inclus dans le système Surmoi Idéal du Moi.

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Chez Nunberg, au contraire, le moi idéal reste une formation dont l’autonomie relative est établie par ses origines (narcissisme primaire, union du moi avec le ça), par sa persistance latente, par ses retours pathologiques. Il est l’expression structurale du narcissisme de la toute-puissance.

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Si l’on se tourne vers l’expérience psychanalytique, la réponse à la question ainsi posée ne semble pas devoir être univoque ; plusieurs éventualités peuvent se rencontrer.

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Celle qui nous paraît correspondre à la pensée de Freud est l’intégration du moi idéal dans le système Surmoi - Idéal du Moi. Il y a, en efet, des cas où cliniquement et pendant une longue période d’analyse, le moi idéal ne semble pas pouvoir être distingué du surmoi. L’hétéronomie du sujet est telle que son identification au surmoi semble indissoluble. Si cette identification se développe en relations intersubjectives passées ou actuelles, la soumission à l’autre n’est pas mise en question. Il arrive que cet autre soit toujours présent dans la vie.

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Une telle éventualité doit être rare. En cherchant dans notre expérience analytique, nous ne trouvons pas de cas où une observation attentive et patiente ne mette en évidence des ferments de révolte, ou la projection du moi idéal sur une autre

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personne, un héros, ou un enfant. Le sujet le plus dépendant peut essayer de donner à son enfant une liberté qu’il n’a ni reçue ni conquise, bien que son attitude éducative comporte régulièrement des traits autoritaires. On peut conclure que cette fusion complète du moi idéal dans l’idéal du moi, si elle se trouve rarement réalisée d’une manière absolue et permanente, constitue un modèle idéal dont certains cas se rapprochent.

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 A l’extrême opposé, c’est c’est la formation surmoi-idéal du moi qui est absente ou ou,, à tout le moins, inopérante, et c’est au moi idéal que le sujet s’identifie. En pareil cas, les figures d’autorité morale sont objectivées mais elles ne sont pas « reconnues » ; elles

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sont dévalorisées, méprisées, considérées comme des adversaires ou des ennemis ; l’identification à l’idéal du moi est hors de question : les « conformistes » sont critiqués, raillés. L’idéal personnel est un idéal narcissique de toute-puissance. Il n’admet d’identification qu’à des personnages exceptionnels et prestigieux. Si le sujet éprouve des sentiments pénibles en rapport avec sa valeur personnelle, ce sont des sentiments d’infériorité, d’impuissance, d’échec ; si le sentiment de la faute apparaît, c’est pour avoir manqué à cet idéal narcissique. Dans cet ordre d’idées, j’ai décrit jadis j adis l’« identification héroïque » [9], et ce concept, formé à propos de certains jaloux, s’est prêté à l’analyse de la structure personnelle de nombreux délinquants. De telles vues ont une portée plus vaste, en raison de l’existence de nombreux « quasi-délinquants ». Ces sujets ne sont nullement incapables de se représenter le point de vue des autres, mais sans y adhérer. Souvent, ils parlent de leur idéal narcissique et héroïque comme d’un « mauvais moi » — une de leurs rélexions typiques est « je sais que j’ai un mauvais

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caractère » — mais un mauvais moi pour lequel ils se sentent disposés à la complaisance et à la tendresse, à la façon de parents indulgents. Ils ne sont pas incapables d’ « aimer », mais leur objet d’amour est une projection du moi idéal, dans les cas prononcés une accentuation, un achèvement du mauvais moi. Leur « milieu choisi » se compose de gens pour qui le sujet, identifié au moi idéal, est un obj objet et de tolérance, d’admiration, d’imitation. De tels sujets peuvent adopter des conduites extérieurement morales, morales, par sens de la réalité, mais aussi comme instrument de toute-puissance. Il est enfin des cas dont on peut rendre compte par l’oscillation du sujet entre le moi idéal et l’idéal du moi. Le conlit entre ces deux identifications i dentifications apparaît clairement dans l’histoire de certaines vies, pour peu qu’on en fasse une étude sufisamment poussée ; Jean Delay nous en donne un exemple dans son étude de La jeunesse d’André  Gide [II]. En psychanalyse, les exemples les plus frappants sont fournis par les cas qui, cliniquement et au début de la cure, se manifestent comme des formes accentuées de masochisme moral. Il apparaît souvent que le sujet a réservé au moi idéal un secteur limité : les études, la conduite des automobiles. Le moi idéal est encore révélé par des admirations passionnées pour de grands personnages de l’histoire ou de la vie contemporaines, que caractérisent leur indépendance, leur

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orgueil, leur ascendant. La cure progressant, on voit le moi idéal i déal s’esquisser, émerger, comme une formation irréductible à l’idéal du moi. Dans ses tentatives de dégagement par rapport au surmoi, le sujet s’appuie sur l’identification à des personnages prestigieux, à l’analyste, retour d’une identification primaire qui avait été refoulée avec l’établissement du surmoi. Les rapports évolutifs entre idéal du moi et surmoi (idéal du moi) permettent de distinguer quatre possibilités théoriques : . . cas dans lesquels le moi idéal a persisté et où la formation surmoi - idéal du moi ne s’est pas constituée ou est restée faible ;

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. persistance dudu conlit surmoi - idéal moi ;entre l’identification au moi idéal et l’identification au . efacement du moi idéal dans la formation surmoi-idéal du moi ; . reprise du moi idéal contre la formation surmoi - idéal du moi. Cet envisagement génétique amène amène à s’interroger sur les rapports du moi idéal et du surmoi avec le complexe d’Œdipe. Freud nous dit que le surmoi est l’héritier du complexe d’Œdipe, et aussi que l’échec de la sexualité infantile laisse une blessure narcissique. La distinction étudiée peut-elle permettre de mieux comprendre l’aspect structural du conlit œdipien ?

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Le moi idéal, c’est-à-dire, suivant Nunberg, le moi uni au ça, appartient à la période préœdipienne. Une lacune de cette conception est de n’envisager que le sujet isolé, sans tenir compte du contexte intersubjectif et, en particulier, de la relation de l’enfant avec la mère. Lorsqu’il en est encore au stade de l’union parasitaire et que sa

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passivité l’emporte sur son activité, l’enfant reçoit son personnage de la situation, avec une participation syncrétique à la toute-puissance maternelle. Les progrès de l’activité permettent l’identification primaire à la mère. Plus l’activité de l’enfant augmente, plus elle entre en conlit avec celle de la mère. Le refus de la mère place l’enfant devant une alternative : ou bien se soumettre en régressant à la participation parasitaire, ou bien s’opposer en s’identifiant à l’agresseur. C’est entre 12 et 18 mois que les psychologues ont fixé le début de la période d’opposition ; tout récemment, dans No and Yes [75], René Spitz a situé à 15 mois l’acquisition du « non ». Que  voulons-nous montrer par-là ? Le moi idéal, conçu com comme me un idéal narcissique narcissique de toute-puissance, ne se réduit pas à l’« union du moi avec le ça », mais comporte une identification primaire à un autre être investi de la toute-puissance, c’est-à-dire de la mère ; et le « conlit primaire » préfigure l’alternative de l’identification au moi idéal ou au surmoi. Dans la situation triangulaire, il arrive souvent que la mère recoure au père pour renforcer son autorité ; mais l’enfant cherche également dans l’identification primaire au père un moyen de faire obstacle à l’autorité de la mère. Cette identification primaire au père le fait entrer en conlit avec lui, pour des raisons qui ne se réduisent pas à la rivalité pour la possession amoureuse de la mère. La

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résolution de ce conlit suppose l’abandon de cette identification primaire au père — c’est la « blessure narcissique » dont parle Freud — et le passage à une position de soumission dont la forme extrême est le complexe d’Œdipe négatif ; l’imago paternelle devient le modèle des autorités, des persécuteurs, des séducteurs homosexuels ; le système Surmoi - Idéal du Moi supplante plus ou moins complètement le moi idéal. Du point de vue structural, le conlit œdipien s’interprète comme le conlit entre l’identification primaire au père et l’identification secondaire au père, entre le moi idéal et le surmoi - idéal du moi. Dans la description classique de la période de latence, ce moi idéal est absorbé dans la formation du surmoi. Mais cette description ne convient qu’à une partie des faits :

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il arrive souvent que persiste le conlit entre moi idéal et surmoi. La période pubertaire est classiquement décrite comme un conlit entre le ça et le surmoi : les pulsions du ça sont renforcées organiquement ; l’autorité des parents et l’identification au surmoi parental sont mises en question ; le conlit se résout par l’abandon des objets incestueux et l’investissement d’objets nouveaux. Une telle description n’épuise pas l’aspect structural du conlit ; elle ne tient pas assez compte, en particulier, du fait que les rêveries de l’adolescence ne sont pas seulement des rêveries érotiques, mais aussi des rêveries « mégalomaniaques ». Le moi idéal est réinvesti, ou son investissement est renforcé, souvent avec l’appui de nouvelles identifications à des personnages prestigieux. L’adolescent s’identifie à nouveau au moi idéal et tente par ce moyen de se dégager du surmoi et de l’idéal du moi. Dans d’autres cas, les choses se passent à bas bruit, et l’intégration du moi idéal dans le surmoi peut persister, au moins en apparence.

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 Après la puberté, ce conlit structural peut rester latent, se prolon prolonger, ger, persister. Si elle reste dans certaines limites, cette alternance entre l’identification au moi idéal et l’identification au surmoi, la recherche de compromis, ne peuvent être considérées comme pathologiques. Elles expriment un aspect essentiel de la condition humaine, au moins dans les conditions culturelles qui sont encore les nôtres.

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Dans la psychopathologie analytique, Freud, après 1910, a eu de plus en plus recours à une conceptualisation qui fait intervenir les relations intersubjectives et l’identification, les relations entre le moi et le surmoi. La distinction entre le moi idéal et l’idéal du moi permet de formuler certaines solutions avec plus de rigueur.

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En dépit de leurs diférences de sens, la tendance de Freud est d’interpréter de la même façon les sentiments d’infériorité et les sentiments de culpabilité : la tension » entre le surmoi et le moi y relète pareillement une privation d’amour et d’estime dans une relation intersubjective. Il est de fait que les uns et les autres correspondent à une « blessure narcissique » qui s’explicite en une attitude critique du moi-sujet par rapport au moi-objet. Certes, il y a des cas ambigus ; il est vrai qu’une déficience du sujet peut être sentie par lui ou qu’on la lui fait ressentir non comme un défaut, mais comme une faute. Toutefois, dans les formes diférenciées, les sentiments de culpabilité et les sentiments d’infériorité ne mettent pas en cause les mêmes aspects de la personne : dans le premier cas, le sujet soufre de n’être pas conforme à l’idéal du moi, pour autant que l’attente des autres est devenue sa propre attente ; dans les sentiments d’infériorité, c’est à sa propre attente que le sujet soufre de ne pas répondre ; son conformisme à l’idéal du moi peut être ressenti comme une infériorité. Ainsi, tel homme en voie d’émancipation se reproche tour à tour ses relations avec des prostituées, en opposition avec ses principes moraux, et son incapacité de se dégager de ces principes moraux, d’afirmer « ses droits naturels ». L’obéissance passive à la loi sociale et morale peut être ressentie comme une faute, par référence à un code de valeurs qui n’est plus celui du surmoi mais du moi idéal.

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Dans l’interprétation structurale de la mélancolie et de la manie, on fait intervenir l’identification à l’idéal du moi, sans une précision de langage sufisante. La distinction entre l’idéal du moi et le moi idéal permet plus de clarté. Dans la mélancolie et, plus généralement, dans les dépressions, le moi-sujet s’identifie au surmoi, fait alliance avec l’autorité répressive et sévit contre le moi-objet ; le moi idéal reste dans l’ombre ; s’il apparaît, c’est comme un moi mauvais, du seul fait qu’il  veut vivre ; il peut être supporté par certaine certainess identifications et projections. Lorsque l’analyse fait apparaître le conlit ambivalentiel avec l’objet et que se développent des attaques contre cet objet, l’objet est attaqué tantôt en tant qu’autorité morale sur laquelle est projeté le surmoi, tantôt en tant que moi idéal qui aspire à l’autonomie et à la vie. Quant à la manie, il ne sufit pas de dire que l’idéal du moi est réabsorbé dans le moi ; ce n’est ni tout à fait complet ni tout à fait exact : l’accès maniaque, même dans ses formes larvées, comporte une libération de pulsions agressives et

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sexuelles ; c’est une position peut-être plus régressive que la mélancolie, et les cliniciens eux-mêmes ont signalé ses traits infantiles et ludiques ; en termes structuraux, c’est au moi idéal, représentant des pulsions, que le maniaque s’identifie — les idées de grandeur sont fréquentes — et cette identification même lui sert à se dégager du système Surmoi-Idéal du Moi ; ainsi, une circulaire, faisant un accès maniaque après le suicide de son père, s’écrie : « J’en ai assez d’une hérédité comme ça. » Que « l’idéal du moi soit réabsorbé dans le moi » veut donc dire, selon nous, que c’est l’identification au moi idéal qui prévaut. La distinction entre moi idéal et idéal du moi éclaircit encore la structure de la position persécutive et de la position mégalomaniaque. Dans la position persécutive, l’imago parentale projetée sur le persécuteur est celle de l’autorité qui fait la loi, qui surveille, critique, condamne, soumet sexuellement. Dans la position mégalomaniaque prévaut l’identification au moi idéal et à des figures prestigieuses, et l’évolution typique du délire fait apparaître l’identification au moi idéal comme une réaction défensive contre l’identification au surmoi. Par exemple, chez un grand névrosé parfois subdélirant mais qui parvient à contrôler et réduire ses projections, les persécuteurs sont des hommes d’autorité, qui le mettent dans une humiliante position d’enfant, des hommes qui agissent dans l’ombre pour le surveiller et

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contrarier ses projets, parfois des séducteurs homosexuels ; dans la position « mégalomaniaque », il s’imagine libre, puissant, il s’enthousiasme pour les grandes figures de la politique, s’identifie aux puissants du jour. Ainsi, les idées i dées de persécution se réfèrent au surmoi, les idées de grandeur au moi idéal ; cette distinction structurale est amorcée par l’interprétation génétique de Freud, lorsqu’il rattache la persécution au stade homosexuel, la mégalomanie au stade narcissique. Le surmoi est un système de relations intersubjectives et d’identifications. Freud a reconnu la complexité de ce système et la multiplicité des identifications. Mais il n’a guère approfondi ce problème de la structure interne du surmoi ; on peut dire qu’il s’est limité à rattacher à la bisexualité bi sexualité originelle et à la prédominance de la

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composante masculine ou féminine, l’importance relative, dans les conséquences structurales du conlit œdipien, de l’identification paternelle et de l’identification maternelle. Notre efort pour élucider le problème de la structure interne du surmoi en a laissé de côté beaucoup d’aspects. Mais l’antinomie du moi idéal et du surmoi - idéal du moi, de l’identification narcissique à la toute-puissance et de la soumission à la toute-puissance, est sans doute une dimension essentielle.

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Le conlit « intrasystémique » du surmoi éclaire le conlit intersystémique entre le moi et le surmoi. Le moi, dit Freud, doit se rendre indépendant du surmoi. Dans

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cette lutte pour son autonomie, contre l’identification au surmoi, le sujet s’appuie sur d’autres identifications, dans lesquelles il investit son besoin de toute-puissance,

 

en particulier sur l’identification à l’analyste ; en dernière analyse, ces identifications passagères se ramènent au moi idéal et aux identifications primaires qui lui sont connexes.  Ainsi, l’accession du sujet sujet à l’ « autonomie du m moi oi » a pour condition un passage par l’ « autonomisme du moi idéal ». Un passage et non un aboutissement, car nous ne pouvons pas méconnaître que cette identification du sujet au moi idéal est ellemême une condition d’hétéronomie dont le sujet doit se dégager. Ceci nous fait retrouver l’idée, déjà exprimée, que la condition « normale » pourrait bien être un conlit antinomique entre l’autonomisme du moi idéal et l’hétéronomie de l’idéal du moi, et la recherche souvent laborieuse de compromis.

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 VIII - Structures et conscience dans la cure L’appareil psychique est une organisation d’ensemble de structures partielles. Cependant, toutes les structures partielles n’ont pas une signification personnologique évidente ; par exemple, il ne va pas de soi que telle habitude rentre dans l’unité de la personnalité, il faut le démontrer ; théoriquement, on peut

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supposer soit que toutes les structures partielles se tiennent, soit que, l’intégration n’étant pas parfaite, certaines possèdent une plus ou moins grande autonomie par rapport à l’ensemble. Tel est le cas des structures « personnologiques » étudiées en psychanalyse. Dans le processus de diférenciation dont elles sont les produits terminaux, la maturation somatique et l’apprentissage se combinent ; les efets structurants de l’apprentissage reposent notamment sur le conlit et le choix ; les expériences de la relation avec autrui jouent un rôle décisif : les relations intersubjectives, par l’introjection, s’inscrivent en structures intrasubjectives, et celles-ci, par la projection, pro jection, structurent de nouvelles relations intersubjectives. Dans cette causalité circulaire, la répétition compulsive des mêmes expériences « nourrit » les structuresdedenouvelles la personnalité : unde « masochique » fabriquedesans désemparer occasions se saisir dansmilitant le rôle héroïque victime innocente. Nous supposons, plutôt que nous ne savons, qu’une « expérience nouvelle » peut bouleverser ce cycle ; la psychanalyse ne peut le modifier qu’en s’y  insérant. Les artifices de l’analyse [10] mettent entre parenthèses les modèles habituels et communs de la conversation. L’incognito, la réserve, le silence tendent à poser l’analyste comme un interlocuteur « sans propriétés ». L’analysé est invité à abandonner sa parole aux sollicitations et aux retenues des formations inconscientes. C’est elles qui structurent la situation analytique. La problématique de l’analysé se traduit dans la névrose de transfert. Elle fait parler le mystère et le silence. L’analysé projette sur l’analyste les comparses significatifs de son histoire, la multiplicité de ses identifications et celles, plus détachées d’images personnelles et

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historiques, que connotent le surmoi, l’idéal du moi, le moi idéal. En général, on néglige de dire qu’en même temps que l’analysé projette quelque imago sur l’analyste, il s’imagine lui-même dans un rôle rô le semblable ou complémentaire. L’interprétation et l’élaboration visent à dissiper ces projections imaginaires. L’autonomie relative des structures intrasubjectives qui les sous-tendent explique leur persévération et leur « récupération spontanée ». Mais aussi les artifices de l’analyse : ils nourrissent la relation parents-enfant, parents tout-puissants et enfant insatisfait. L’expérience montre que la réduction analytique n’est jamais radicale et définitive. Elle montre aussi qu’au-delà d’un certain seuil — en des instants de plus en plus fréquents, pour des durées de plus en plus longues — la relation analytique tend à se dégager des projections qui l’ofusquaient. L’analysé reconnaît sa relation avec l’analyste comme un accouplement diférentiel entre deux partenaires à la fois semblables et diférents ; l’identification assimilatrice ne va pas sans identification diférentielle : deux « sujets » semblables avec des « propriétés » diférentes ; ceci  veut résumer ce que nous savons des modifications structurales et objectales qui seraient, parmi d’autres « critères », les signes d’une analyse en voie de se terminer.

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 Arrêtons-nous sur l’aspect l’aspect structural d’une te telle lle éventualité. éventualité. Nous disons que le sujet tend, sans l’atteindre, vers une condition idéale où il serait dégagé de toute identification imaginaire. Qu’est-ce à dire ? Quand une interprétation porte sur une telle identification, nous visons un état de choses où le sujet se confond lui-même avec un « avatar » de sa personne propre ; nous aidons le sujet à objectiver cet avatar, comme un « autre » dans lequel il se serait aliéné, et s’en étant distancé, à s’en retirer. Dans ce mouvement même par lequel il se retire, le sujet se saisit comme sujet : « Je ne suis pas cela. » Instant fugitif : le moment que le sujet se dit : « Je suis celui qui dit : je ne suis pas cela », le sujet s’évanouit. La conscience du sujet, en tant que sujet, ne peut être qu’une conscience non positionnelle.

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Mutatis mutandis, c’est un point que l’on peut éclairer en se référant à certains

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principes de l’ascèse dont la psychologie se prête plus d’un appellent rapprochement avec mystique, l’analyse. Les traductions de saint Jeanàde la Croix ap pellent « désappropriation » l’acte par lequel le sujet se détache d’une propriété personnelle. Nous pouvons appliquer la désappropriation à ces identifications dans lesquelles le sujet « se prend pour quelqu’un », ou plutôt, tour à tour, pour celui-ci et pour celuilà : fascination par la transcendance prêtée au paraître ; en s’en déprenant, est-il possible que l’existence du sujet, rendue à elle-même, se retrouve dans l’immanence de l’être et du faire ? Si la réduction des identifications imaginaires est autre chose qu’un leurre, il est plausible qu’elle modifie la relation du sujet avec les objets et, en particulier, avec autrui. Les mystiques attendaient de la désappropriation quelque chose comme une coïncidence avec l’Etre. Certes, dans notre domaine, une telle issue nous semble au moins aléatoire : pas plus que le sujet ne peut, d’une manière radicale et définitive, se désaliéner, pas plus l’objet ne peut être saisi et retenu dans son être. Pourtant, nous

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attendons du dégagement du sujet une plus grande ouverture sur l’être, sous des formes telles que l’attention, l’action ajustée, la communication adéquate ; nous observons parfois le moment où le moi-objet cesse de s’interposer comme un écran entre le sujet et l’objet de sa contemplation ou de son action, actio n, le moment où la conscience cesse d’être fascinée par le moi. La répétition est à la fois le problème, l’instrument et l’obstacle de la psychanalyse. La résistance au changement est un des attributs essentiels des formations inconscientes : compulsions défensives du moi, structures axiologiques du surmoi, désirs inconscients. Mise à part la constitution, le besoin de répétition n’explique pas complètement la résistance au changement. La répétition des besoins motive la persistance des structures, que « nourrissent » encore les événements nouveaux qui sanctionnent leur fonctionnement. Que pouvons-nous leur opposer ? I° qualitativement, le remaniement structural, la « prise de conscience », laquelle agit encore indirectement en modifiant le sens et la portée des événements qui sanctionnent le fonctionnement des structures ; 2° quantitativement : l’énergie pulsionnelle libérée. Or, de ces deux instruments, i nstruments, la conscience et les pulsions, Freud parle de la même façon en introduisant la notion d’énergie libre. La liberté de l’énergie pulsionnelle se trouve dans certains caractères du « processus primaire » : facilité de déplacement, dominance de la décharge. Ainsi la qualité, dit Freud, compte moins que la quantité. Ce qui veut dire, en particulier, que les antagonismes se règlent dans le sens de la tendance dominante, ou par voie de compromis. En première analyse, on ne voit pas ce qu’on peut tirer de cette liberté de l’énergie pulsionnelle contre la résistance au changement des structures inconscientes. Car c est précisément le processus primaire qui, de l’intérieur, règle et entretient ces structures : une compulsion défensive, quel que soit son motif, tend à une réduction de tension urgente ; et quant au désir inconscient, les métamorphoses

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fantasmatiques l’objet princeps. et transférentielles de son objet se ramènent toutes, en définitive, à De ce côté, la seule prise possible est oferte par le conlit : l’harmonie n’est pas complète entre la tendance à vivre pleinement, à dépenser sa vie, et la tendance à conserver la vie, entre le désir d’être puissant et le désir d’être aimé. C’est précisément dans la mesure où les structures auxquelles ces motivations renvoient ne sont pas dans un équilibre complet et définitif qu’il y a problème et possibilité d’analyse. Si de quelque façon, dans la vie ou au cours de la cure, un équilibre stable se réalise, l’analyse devient impossible ou laborieuse.

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Tournons-nous maintenant vers la conscience. Au départ, l’idée d’une énergie libre sous la forme de l’attention veut dire que la conscience peut être tour à tour ceci et cela, ou se tourner vers ceci et vers cela. C’est dans cette perspective que Freud, après

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Breuer, opposait la conscience à la mémoire, l’énergie libre du système conscience à l’énergie liée des systèmes mnésiques. En d’autres termes, mais dans le même sens, nous pouvons opposer conscience et structure. Cependant, nous ne pouvons pas dire, d’une manière générale et sans préciser notre pensée, que la conscience soit libre. Elle est souvent « aliénée », sous l’emprise des désirs inconscients du ça, des motivations issues du surmoi, des compulsions défensives du moi. Elle est l’agent de la projection et de la rationalisation, du contreinvestissement qui complète le désinvestissement et, par conséquent, de la méconnaissance.

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Mais elle est aussi l’agent de la connaissance, d’une régulation plus discriminative de l’action, de la recherche de la vérité.

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Toutefois, cette conscience attentive, contrôlante et contrôlée, est bien loin d’être une conscience destructurée. Il lui faut résister aux interférences des idées et des afects déplaisants, et opposer, aux facilités du « tout fait » et des « idées reçues », le remaniement structural du champ psychologique, labeur extraordinaire, dans lequel L’ « IDENTITÉ DES PENSÉES » doit faire pièce à L’ « IDENTITÉ DES PERCEPTIONS », c’est-à-dire : l’identification objectivante, qui maintient l’identité

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propre de chaque objet de pensée, doit contrer l’identification syncrétique, où la pensée métaphorique les confond. En un mot, la conscience attentive dont il est question s’appuie sur les structures de la raison, la cohérence et la stabilité du langage.  Ainsi, jusqu’ici, nous ne sommes pas parvenus à entendre l’éne l’énergie rgie libre de la conscience comme une énergie non structurée : ou bien la conscience est sous l’emprise des formations inconscientes et de leurs articulations paralogiques, ou bien elle est sous l’empire de la raison. L’expérience consciente figure toujours dans un contexte et il nous est dificile de la séparer radicalement de la mémoire. C’est une direction qui ne paraît pas pouvoir nous conduire très loin dans l’élucidation de l’idée de la conscience comme énergie libre.

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Si la conscience ne peut larguer la mémoire, peut-être verrons-nous plus clair en prenant en considération sa mobilité par rapport à ses systèmes de référence. Revenons à l’ascèse analytique. Quand on parle des conditions préalables de la cure, on dit, d’une manière assez vague, que « l’on s’appuie sur les parties parti es saines du moi ». Nous négligerons de préciser tous les sens que peut prendre cette idée. Un seul nous intéresse pour le moment : ce que nous pouvons appeler la mobilité de la conscience. Expliquons-nous a contrario : il y a des esprits tellement « liés » que leur idéation ne sort pas du registre rationnel et réaliste ; et inversement, il y a des esprits tellement « déliés » — en détournant cette épithète de son sens le plus usuel — qu’il nous est dificile de les « rallier ». Inversement, si un esprit se montre capable à la fois de rélexion et d’irrélexion, de raison et de déraison, de réalisme et d’imagination, de distance et de proximité, nous voyons là une ouverture favorable à l’ascèse

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analytique ; si une telle ouverture n’existe pas, nous essayons de l’obtenir, d’assouplir dans un sens, de consolider dans l’autre ; toujours, nous tentons de donner à la conscience à la fois plus de souplesse et plus de fermeté. L’étendue de ce registre mesure l’espace fictif dans lequel se déploie ce que nous avons appelé mobilité de la conscience. Et la direction de la cure s’exerce dans les deux sens, celui de la règle fondamentale et celui de l’interprétation, comme si le psychanalyste disait tour à tour à son patient : « déraisonnez » et « raisonnons ». Le régime de la « déraison » ressemble à la liberté de décharge et de déplacement attribuée aux processus pulsionnels. Les descriptions classiques parlent, à un moment de la cure, de libido ou d’agression « désinvesties », en suspens ; on redoute l’investissement prématuré de cette énergie énergie « lottante ». Nous ne manquons pas de données cliniques, dificiles à conceptualiser, pour nous assurer que ce ne sont pas là des vues de l’esprit, et que, théoriquement, il est possible que quelque chose de ce genre puisse se passer. Les formations de l’inconscient ne se maintiennent pas seulement parce qu’elles existent existent et, pour ainsi dire, par pure insistance répétitive ; elles immobilisent une part plus ou moins grande d’énergie pulsionnelle : une compulsion défensive prévient une élévation de tension et met en jeu une sorte d’automutilation, de renoncement à vivre ; si elle échoue, les virtualités d’afects

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déplaisants qu’elle retenait s’actualisent ; le surmoi est soutenu par le sadomasochisme, le moi idéal par le narcissisme ; le modèle du désir inconscient, enfin, implique la pérennité de ce désir. Toutes ces « intentions » deviennent manifestes dans les répétitions transférentielles et extra-transférentielles. Mais si la cohésion d’une structure inconsciente est ébranlée, nous supposons qu’une part de l’énergie qu’elle immobilisait devient mobile, que ces « intentions vers », détachées de leurs buts et de leurs objets, se cherchent de nouveaux buts et de nouveaux objets. Moment où l’agissement et la « fuite vers la réalité » menacent particulièrement l’analysé. Nous estimons que les choses tournent bien si, pour l’heure, ce surplus d’énergie se vit comme un surplus de conscience, s’il renforce la décision d’abandonner les chemins les idées etanalytique les afects pleinement, déplaisants, de conduire jusqu’au bout ses connus, pensées,d’afronter de vivre l’expérience mais dans les limites d’une conscience gonlée de vie, de violence et d’amour. L’obstacle est donc bien l’autonomie relative des structures inconscientes, leur résistance au changement, la cohésion de leurs éléments, que maintiennent non seulement le besoin de répétition, mais la répétition des besoins.

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Si cet obstacle est levé, on conçoit que devient de plus en plus possible un régime de la conscience comparable au processus primaire, avec les équivalents, au niveau de l’idéation et de la parole, de la décharge, du déplacement, de la condensation. Les tensions inconscientes se traduisent en intentions conscientes.

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La conscience est-elle devenue plus libre ? Oui, en ce sens qu’elle a largué les amarres non seulement de la raison, mais des compulsions défensives ; non, en ce sens qu’elle tombe sous l’empire d’autres structures et d’autres lois. Et si maintenant elle passe

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du côté de la raison, sera-t-elle plus libre ? Oui et non, et pour des raisons similaires. En dernière analyse, ce qui fait la liberté de la conscience, ce n’est pas la déraison ou la raison, c’est la possibilité de passer de l’une à l’autre, la facilité de ce passage, l’ampleur du registre qu’elles délimitent. La conscience n’est jamais j amais libre dans le sens de « destructurée » ; une conscience destructurée est une conscience « folle », qui a largué les amarres de la raison, soumise en fait à des structures irrationnelles ; mais la conscience est libre en ce que, connectée à une pluralité de structures, elle peut en quelque sorte jouer de l’une et de l’autre ; elle n’est pas liée une fois pour toutes à la réalité et aux structures qui en procèdent, engluée dans le présent de la perception ; elle peut prendre pied dans le réel, mais aussi dans l’imaginaire et le symbolique. En d’autres termes, l’eficacité de la conscience par rapport aux structures inconscientes est liée à une capacité de « décentration » du sujet.  Ainsi, les « transformations du moi », au cours de la névrose névrose de transfert, n nee sont pas décrites correctement lorsqu’on les caractérise d’une manière unilatérale par une régression du moi, laquelle régression rendrait plausible la nécessité d’une phase terminale de récupération des structures adultes et de réajustement à la réalité. Que ce soit là une éventualité possible, bien que fâcheuse, n’est pas mis en question. Mais ce n’est pas une règle générale ni une condition nécessaire de tout progrès ultérieur.

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Normalement, la régression ne va pas sans progression. Les artifices de l’analyse, la règle fondamentale engagent la conscience de l’analysé dans les voies d’une idéation régressive ; mais l’interprétation et l’élaboration rendent cette même conscience plus autonome par rapport aux structures inconscientes ; en familiarisant le patient avec elles, intellectuellement intellectuellement et afectivement, elles le rendent plus ouvert à des expériences plus étrangères ; le paradoxe est que la capacité de distance favorise la capacité de proximité ; l’amplitude du registre s’est accrue, et la facilité à s’y  mouvoir. La conscience n’est donc jamais libre, si l’on entend par liberté l’absence de toute structuration. Mais elle peut être libre, si l’on entend par liberté la mobilité de la conscience, c’est-à-dire la capacité de changer de système de références et de s’appuyer sur une structure contre une autre.

Notes [1]

 Au sens personnologique, personnologique, l’emploi psycha psychanalytique nalytique du co concept ncept de struc structure ture est consacré par l’usage. Mais le concept de structure intervient également, d’une façon implicite, dans ce que l’on peut appeler la « perspective sémantique ». Celleci se réfère à la distinction entre matière et forme. La matière — on dit couramment le « matériel » — est constituée par les paroles et les actions de l’analysé. La psychanalyse est l’art d’interpréter ce matériel, c’est-à-dire d’en significations ; par exemple, l’analyse d’un»rêve, «dégager contenulesmanifeste », metcachées en évidence les « pensées latentes de cepartant rêve, aude son moins une partie d’entre elles ; or, si je dégage dans le récit du rêve des significationss qui au départ n’étaient pas « conscientes », c’est que les éléments du signification récit du rêve étaient plus cohérents qu’il n’apparaissait ; mettre en évidence la

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signification latente du rêve, c’est aussi mettre en évidence la structure latente du récit du rêve, l’interdépendance de ses éléments et de ce qu’y ajoutent les « associations » de l’analysé. Comme cette structure se développe dans le temps, on peut parler de structure « dynamique ». Implicite ou explicite, cet usage du concept de structure est essentiel à l’analyse ; l’interprétation, seul mode d’intervention proprement analytique, analytique, invite l’analysé à un « remaniement structural » du matériel, à saisir d’une façon nouvelle les relations de ce qui a surgi dans llee champ psychanalytique. [2]

Théoriquement, c’est-à-dire c’est-à-dire dans le cadre d’une présentation déductive. En fait, la première théorie des pulsions sexuelles et des pulsions du moi relète la conception queconception se faisait Freud du conlit défensif correspondce à son de donner à cette une base biologique. Paretconséquent, qui besoin est fondamental, c’est la théorie du conlit. On peut faire les l es mêmes remarques à propos de la théorie des pulsions de vie et de mort.

[3]

Sur la primauté de l’inconscient, Ribot a écrit des lignes que Freud aurait pu signer (Maladies de la personnalité, 13-14) [ibid.].

[4]

La fin de L’homme aux rats contient deux descriptions de personnalité multiple, dont celle de l’homme aux rats. Il saute aux yeux que le modèle de la personnalité que ces descriptions impliquent est très proche de la deuxième théorie de l’appareil psychique, que Freud n’exposa qu’en 1923, dans Das Ich und das Es [36].

[5]

On a passablement parlé de l’ « autonomie relative du moi » sans paraître s’aviser que l’autonomie relative était aussi un caractère des autres substructures de l’appareil psychique, le ça et le surmoi.

[6]

Cet afranchissement, en ce qui concerne la psychanalyse, n’est qu’ébauché, par exemple avec l’importance croissante donnée depuis 1930 environ aux « relations d’objet ». Dans son ensemble, la théorie psychanalytique reste profondément infiltrée par des présuppo présupposés sés idéalistes et intellectualistes.

[7]

On pourrait appeler « primaire » la répétition automatique qui « fait irruption » dans le moi, et « secondaire » son utilisation par le moi à des fins qui lui sont propres, par exemple dans le sens de la fonction restitutive.

[8]

Je rends hommage, ici, à ce que E. BIBRING a écrit sur les diférentes modalités d’aménagement des tensions par le moi [6].

[9]

Cf. D. LAGACHE, Œuvres, vol. II, Contribution à la psychologie de la conduite criminelle. (N. de l’éd.)

[10]

Cf. aussi D. LAGACHE, Œuvres, ci-dessus, Les artifices de la psychanalyse. (N. de l’édit.)

Plan

 

I - Structure et personnalité II - Du moi autonome à l’autonomie relative du moi III - Natural Naturalisme, isme, anthropomorphisme, personnalisme IV - Relations intersubjectives et structuration de la personnalité  V - Sur la structure du ça  VI - Sur la structure structure du moi  VII - Sur la structure du surmoi  VIII - Structures et conscience dans llaa cure

 Auteurs Daniel Lagache

Eva Rosenblum

Mis en ligne sur Cairn.info le 12/01/2020

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