CAS RIBOU 1

August 16, 2017 | Author: christophe.bardy | Category: Life Insurance, Loans, Economies, Social Institutions, Society
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CAS RIBOU Pierre et Marie RIBOU viennent vous consulter : ils souhaiteraient savoir comment se répartirait leur succession si l’un d’eux (on supposera le mari) venait à décéder, et si des solutions devraient être envisagées pour optimiser la transmission successorale dans une optique notamment fiscale. Procédez à la liquidation civile et fiscale de la succession et indiquez quelles solutions pourraient être envisagées pour répondre à leur désir d’optimisation de la transmission. Ils vous fournissent les informations suivantes. A.- Situation de famille Pierre RIBOU est né le 12 mai 1947, Marie RIBOU est née le 24 mars 1948. Ils se sont mariés le 12 janvier 1972, sans avoir fait précédé leur union d’un contrat de mariage. Ils ont deux enfants : Jean et Sophie âgés respectivement de 32 et 30 ans, mariés et installés. Pierre RIBOU est Président de la SAS RIBOU, son épouse est enseignante. B.- Patrimoine Biens

Estimation actuelle 300.000

Résidence principale à VICHY, acquise en 1986, sur un terrain que Pierre possédait avant son mariage. La construction a coûté 100.000 €, payés par les époux au moyen d’un emprunt. Le terrain peut être estimé actuellement à 30.000 € Une maison située à Cannes, résidence secondaire, acquise en 1980 600.000 pour 250.000 €. L’acquisition a été financée par la revente d’un appartement, acquis en 1975, pour 200.000 €. Le complément a été payé au moyen d’une donation que les parents de Pierre lui ont consenti. Taxe foncière 3.000 € Un appartement situé à Clermont-Ferrand, acquis pour 40.000 € en 90.000 remploi de la vente d’un studio pour 25.000 €, provenant d’une donation consentie à Marie par ses parents. La différence et les frais (5.000 €) ont été financés par un emprunt souscrit par les époux, entièrement remboursé aujourd’hui. Taxe foncière 500 €, loyer annuel : 4.800 € Une maison située à Paris, rue Oberkampf, dont Marie a hérité en 1.000.000 1990. La toiture a dû être refaite, coût de l’opération 200.000 €, payé par la communauté. Un ascenseur a été installé, pour un montant de 50.000 €, payé à l’aide de la vente d’un portefeuille de valeurs mobilières que Marie possédait avant son mariage. Sans les travaux, la valeur de la maison pourrait être estimée à 500.000 €. Loyers annuels : 80.000 €, taxe foncière : 5.000 € SAS RIBOU créée en 1980, 1.000 actions ; répartition du capital : Estimation de l’action : Pierre et Marie 760 actions en PP, 200 en US. 3.000 €, soit pour les

Jean RIBOU 20 actions en PP, 100 en NP Sophie RIBOU 20 actions en PP, 100 en NP Les actions possédées par Jean et Sophie proviennent d’une donation consentie par leurs parents, en janvier 2004, sur la base d’une valeur de 2.000 €, l’action. Pierre et Marie se sont réservés un usufruit réversible sur les 200 actions. Les droits de mutation ont été acquittés par les donateurs. Il est précisé que le capital de la SAS est de 100.000 €, 50.000 € à la création, 50.000 €, suite à une augmentation de capital par incorporation de réserves. PEP assurance, souscrit par Pierre RIBOU en janvier 1990, versements cumulés avant 1998 : 90.000 € PEA ouvert en juillet 1992, au nom de Marie, investi en SICAV actions françaises, versements cumulés 95.000 € Comptes chèques joints Portefeuille titres Total

760 actions en PP : 2.280.000 €

135.000 90.000 50.000 455.000 5.000.000

C.- Revenus 1.- Pierre : a/ traitement SAS 60.000 € + dividendes SAS 50.000 € 2.- Marie : traitement 25.000 € 3.- Revenus fonciers : voir ci-dessus, les frais généraux et d’entretien courant sont estimés à 20 % des loyers. LIQUIDATION CIVILE Observations générales -

-

Régime matrimonial : le mariage ayant eu lieu en 1972 sans contrat préalable, les époux sont soumis au régime légal de la communauté réduite aux acquêts institué par la loi du 13 juillet 1965. En vertu des dispositions transitoires qu’elle contient, la loi du 25 janvier 1985 leur est également applicable. Succession : si l’un ou l’autre des époux vient à décéder la loi du 3 décembre 2001 leur sera applicable dans toutes ses dispositions ; si la communauté était dissoute par divorce, il en irait de même de la loi du 26 mai 2004 (à condition que le divorce n’ait pas été engagé avant le 1er janvier 2005), réserve faite de la question de la survie de la loi ancienne pour les avantages matrimoniaux et les libéralités entre époux consenties avant cette date. Liquidation du régime matrimonial Qualification des biens et récompenses

1.- Résidence principale à Vichy : elle a été construite pendant le mariage sur un terrain propre de Pierre (bien présent : art. 1405). Le coût de la construction ayant été acquittés par les époux ainsi qu’il est indiqué, on suppose que les fonds utilisés sont communs. Nonobstant, la construction sera propre en vertu de la théorie de l’accessoire (accession immobilière : art. 552, al. 1er) sans qu’il y ait à considérer la valeur respective du terrain et de la construction :

le fonds immobilier constitue toujours le principal (art. 1406 ; par ex. Cass. 1re civ., 6 juin 1990, Bull. civ. I, n° 134 ; Cass. com. 24 juin 2003, Bull. civ. IV, n° 105). Simplement, il y aura lieu à récompense au profit de la communauté à la charge de Pierre ou de ses héritiers (ibid.). La construction a coûté 100.000 € payés par les époux au moyen d’un emprunt ; actuellement, la résidence principale vaut 300.000 €, ce qui s’entend très certainement de sa valeur terrain compris, lequel peut être estimé actuellement à 30.000 €, ce qui correspond à sa valeur s’il n’était pas construit. La construction constitue une amélioration du bien propre au sens de l’article 1469, al. 3. La récompense due à la communauté ne peut donc être inférieure au profit subsistant, c’est-à-dire à l’enrichissement consécutif du patrimoine propre évalué au jour de la liquidation du régime. Pour calculer ce profit subsistant, la Cour de cassation a précisé que dans le cas d’une construction édifiée à l’aide de fonds communs sur un terrain propre, la récompense est égale, non à la valeur du bien construit, mais à la plus value procurée par la construction au fonds où elle est implantée, c’est-à-dire à la valeur actuelle de l’immeuble diminuée de la valeur actuelle du terrain (Cass. 1re civ., 6 juin 1990, Defrénois 1991, p. 862, obs. G. Champenois). Dans le cas présent, ce profit subsistant est égal à 300.000 – 30.000, soit 270.000 €. Mais il faut tenir compte de ce que la construction a été financée par un emprunt. Cela peut avoir deux incidences : a) si les remboursements de l’emprunt par la communauté n’ont financé qu’une partie de l’acquisition (soit qu’une partie de la construction ait été payée comptant avec des deniers propres du propriétaire, soit que l’emprunt n’ait pas été remboursé en totalité par la communauté : par ex. il reste à la dissolution de la communauté une partie à rembourser), la communauté n’aura droit au profit subsistant qu’à proportion de la part de dépense qu’elle a financée (on précise qu’à la dissolution de la communauté, les mensualités de l’emprunt restant à courir sont dans les rapports entre les époux mis à la charge du propriétaire) : cf. Cass. 1re civ., 16 déc. 1997, Bull. civ. I, n° 371). b) Le montant de l’emprunt comporte le remboursement du capital emprunté et le paiement des intérêts rémunérant le prêteur. Or il est maintenant constant que les intérêts d’un emprunt ayant servi à acquérir ou à améliorer un bien propre sont laissés à la charge de la communauté comme contrepartie de la jouissance des propres (les fruits et revenus des biens propres lui sont affectés) : Cass. 1 re civ., 31 mars 1992, Defrénois 1992, p. 1121, obs. G. Champenois. La communauté n’a donc droit au profit subsistant que dans la mesure du remboursement du capital. Dans le cas présent, il est dit que la construction a coûté 100.000 euros payés par les époux au moyen d’un emprunt : on suppose donc que ces 100.000 euros correspondent au seul capital emprunté et qu’ils ont financé toute la construction. La communauté a donc bien droit à récompense pour l’intégralité du profit subsistant soit 270.000 €, comme il a été indiqué. 2.- Résidence secondaire à Cannes : la maison a été acheté en 1980 pour 250.000 € financés à hauteur de 200.000 € au moyen de la revente d’un appartement acquis en 1975. Le complément a été payé au moyen d’une donation que les parents de Pierre lui ont consentie. La résidence secondaire est donc commune en tant qu’acquêt de communauté (art. 1401). Il en irait ainsi alors même que l’appartement acquis en 1975 et ayant servi à financer l’achat de la résidence secondaire serait propre pour avoir été acquis en emploi de fonds propre. En

effet, l’acte d’acquisition de la résidence ne contient pas, à ce qu’il paraît, de déclaration d’emploi, ce qui est la condition de la qualification de propre par subrogation (art. 1434). On considèrera que l’appartement acquis en 1975 était un acquêt de communauté, de sorte que sa vente pour financer l’acquisition de la résidence secondaire à Cannes ne donne pas lieu à récompense. En revanche, il y a lieu à récompense au profit de Pierre pour l’utilisation de la donation reçue de ses parents : faute de stipulation contraire, cette donation a été faite à Pierre à titre de Propre (art. 1405). La dépense étant d’acquisition, la récompense ne peut être inférieure au profit subsistant ; elle est proportionnelle à la contribution du patrimoine propre à l’acquisition de la résidence secondaire, soit : 50.000 (montant de la donation) / 250.000 (montant de l’acquisition) x 600.000 (valeur actuelle de l’acquisition) = 120.000 €. Rq. Si l’appartement acquis en 1975 l’avait été avec des deniers propres à l’un des époux mais sans déclaration d’emploi dans l’acte, les époux pourraient convenir d’un remploi à retardement. Ce remploi a posteriori n’aurait efficacité que dans leurs rapports réciproques (il ne serait pas opposable aux créanciers de la communauté), mais il permettrait à l’époux ayant financé en partie l’acquisition de la résidence secondaire de prétendre à la propriété de celleci, moyennant une seconde déclaration de remploi a posteriori, puisqu’il l’aurait financée intégralement s’il s’agissait du mari, et pour la plus grande part s’il s’agissait de l’épouse (c’est du moins ce que l’on tend à admettre en doctrine). Dans ce dernier cas, le mari pourrait prétendre à une créance entre époux valorisée sur le fondement de l’article 1479. A défaut, l’époux qui établirait que l’acquisition de l’appartement avait été financée avec des fonds lui appartenant pourrait toujours réclamer une récompense qui serait indexée à due proportion sur la valeur de la résidence secondaire (cf. art. 1469, al. 3). S’il ne parvenait pas à établir cette preuve, il pourrait toujours prétendre à récompense pour le nominal en se bornant à démontrer que ces fonds sont tombés en communauté, la jurisprudence ayant récemment renoncé à exiger la preuve d’un profit pour la communauté (cf. Cass. 1re civ., 8 févr. 2005, D. 2005, panor., p. 2114, obs. V. Brémont…). 3.- Appartement situé à Clermont-Ferrand : il a été acquis pour 40.000 € en remploi de la vente pour 25.000 € d’un studio provenant d’une donation faite à Marie par ses parents. Le studio dont le prix a servi à l’acquisition était donc un propre de Marie (art. 1405) ; le cas pratique laisse entendre que les formalités du remploi (déclaration d’origine des fonds et déclaration d’emploi dans l’acte : art. 1434) ont été effectuées et la majeure partie du prix d’acquisition provient de deniers propres : l’appartement sera donc propre à Marie moyennant récompense due à la communauté pour sa participation à l’acquisition (on suppose que l’emprunt souscrit a été remboursé avec des deniers communs) ; dans cette comparaison, il faut tenir compte des frais d’acquisition. Ainsi la communauté a déboursé le reliquat du prix soit 15.000 € (40.000 – 25.000) et les frais d’acquisition 5.000 : au total, 20.000 € sur 45.000 (40.000 + 5.000 de frais), à rapporter à la valeur actuelle du bien soit 90.000. Sa récompense ne peut être inférieure à 20.000 / 45.000 x 90.000 = 40.000 €. 4. Maison rue Oberkampf à Paris : Marie en a hérité en 1990, c’est donc un propre à l’épouse (art. 1405).

La toiture a dû être refaite pour un montant de 200.000 euros payés par la communauté. Il s’agit d’une dépense tout à la fois nécessaire et conservatoire ouvrant droit à récompense au profit de la communauté (art. 1437) pour une somme qui ne peut être inférieure ni à la dépense faite ni au profit subsistant (art. 1469 al. 2 et 3 combinés). On sait que sans les travaux la valeur de l’immeuble serait de 500.000 alors qu’elle est aujourd’hui de 1.000.000, mais on ne sait pas ce qui procède dans cette plus-value de l’installation d’un ascenseur dans l’immeuble. Le montant comparé des travaux de réfection de la toiture et d’installation de l’ascenseur laisse supposer qu’une bonne partie de la plus-value procède de la réfection de la toiture et que le montant du profit subsistant serait ainsi plus élevé que la dépense faite : il devrait donc constituer le montant de la récompense. Mais on ne dispose pas des éléments pour le chiffrer ; on s’en tiendra donc pour l’évaluation de la récompense au montant de la dépense faite soit 200.000 euros. Un ascenseur a donc été installé également pour un montant de 50.000 € payé à l’aide d’un portefeuille de valeurs mobilière que Marie possédait avant son mariage. Les travaux ont donc été financés par le patrimoine propre de Marie (art. 1405) ; sans doute, le mariage ayant eu lieu en 1972 et la réalisation du portefeuille n’ayant pu intervenir avant 1990 (puisque la maison a été héritée à cette époque), il est probable que des arbitrages ont du être opérés pendant le temps du mariage pour conserver le portefeuille : des titres ont été vendus et d’autres rachetés à la place ; or il est peu probable que les déclarations du remploi aient été effectués (ce n’est pas l’usage : cf. CA Agen, 26 févr. 1986, JCP N 1988, II, p. 68) ; peut être donc le portefeuille a-t-il entièrement changé de composition. Pour autant, il reste très certainement propre ; car on y voit aujourd’hui une universalité de fait au sein de laquelle fonctionne la subrogation réelle et les actes d’aliénation de titres avec remploi de titres nouveaux en remplacement ne sont pas considérés comme des actes d’aliénation, mais comme des actes de gestion ordinaire (des actes d’administration en somme) : cf. au sujet des pouvoirs de l’usufruitier : Civ. 1re, 12 nov. 1998, Baylet, D. 1999, p. 167 ; cf. au sujet du legs de residuo : Civ. 1re, 2 juin 1993 ; cf. dans le même sens : G. Champenois ; A. Colomer. On retiendra donc qu’il n’y a pas lieu à récompense de ce chef puisque des fonds propres ont financé des travaux sur un bien propre. Rq. Si l’on avait retenu la qualification de bien commun du portefeuille, la question se poserait de l’évaluation de la récompense. A priori, c’est une dépense d’amélioration qui doit être réévaluée à hauteur du profit subsistant (art. 1469, al. 3). Mais il pourrait être soutenue que cette dépense est une dépense nécessaire à l’habitabilité de l’immeuble et que la récompense ne pourrait donc pas être inférieure à la dépense faite, si d’aventure cela était plus avantageux que la revalorisation. Une telle conception de la nécessité a déjà été retenue par la Cour d’appel de Paris au sujet de la réfection et de l’aménagement d’une cuisine et de sanitaires dans un immeuble d’habitation : CA Paris, 16 mars 1978, Defrénois 1979, p. 1518. Et la Cour de cassation a elle-même admis en principe ce genre de raisonnement : Cass. 1re civ., 25 janv. 2000, Bull. civ. I, n° 20. Rq. Le fait que les valeurs mobilières aient pu générer de nouvelles valeurs mobilières par accroissement ne change pas la qualification à retenir. En effet, suivant l’article 1406, alinéa 1er, les valeurs nouvelles et autres accroissements se rattachant à des valeurs mobilières propres sont propres par accessoire. Il en va ainsi en particulier des droits préférentiels de souscription attachés à des actions propre (en cas d’augmentation de capital par émission d’actions nouvelles à libérer en numéraire) et des actions nouvelles acquises au moyen de ce droit préférentiel de souscription (le prix de souscription donnera alors lieu à récompense s’il a été payé par la communauté).

5.- SAS Ribou : La société a été créée en 1980 ; elle est actuellement constituée de 1.000 actions ; Pierre et Marie en possèdent 760 en pleine propriété et 200 en usufruit. Il s’agit d’une société de capitaux et non de personnes, par conséquent la distinction du titre et de la finance n’a pas cours, alors qu’elle prévaudrait dans le cas contraire. Cette société a été constituée pendant le cours de la communauté et l’on suppose qu’il en va de même du fonds exploité sous la forme sociale. Les actions acquises constituent donc des acquêts de communauté au sens de l’art. 1401 et il y a lieu de tenir compte de leur valeur actuelle dans le partage de la communauté. En janvier 2004, quarante autres actions ont été données par Pierre et Marie à leurs deux enfants en pleine propriété (20 actions chacun) en même temps que les 200 actions sur lesquels les parents n’ont plus que l’usufruit leur étaient données en nue-propriété avec réversion d’usufruit sur la tête du conjoint. Il s’agit donc de la donation de biens communs par des époux à leurs enfants ; la question se pose de la mise à la charge de chacun des époux d’une récompense pour l’appauvrissement de la communauté qui en résulte. En théorie pure, chaque époux devrait une récompense égale à la moitié de la dépense faite, c’est-à-dire de la moitié du montant donné. Un argument a contrario pourrait d’ailleurs être recherché en ce sens dans l’article 1439 du Code civil qui ne prévoit la solution contraire qu’en cas de dot. Et cette solution est effectivement enseignée par une partie importante de la doctrine (par ex. M. Grimaldi). Mais la pratique, partant du constat, que cette double récompense au rétablissement de l’équilibre entre les masses lorsque chaque époux a vocation à la moitié de la communauté ne retient pas ce droit à récompense (qui augmente artificiellement l’actif communautaire et donc la taxation du partage). Et elle est approuvée par d’autres auteurs (par ex. M. Le Guidec). On ne retiendra donc pas de récompense de ce chef. Quant à la réversion de l’usufruit des 200 actions données en nue-propriété aux enfants, il faut certainement considérer que les époux ont voulu que cet usufruit appartienne personnellement au survivant au décès de l’un d’eux. C’est donc une donation éventuelle que chacun a consentie à l’autre à l’aide de biens communs. Cette donation doit être considérée suivant la jurisprudence de la Cour de cassation comme une donation de biens présents. Elle a été consentie avant l’entrée en vigueur de la loi du 26 mai 2004 sur le divorce (le 1 er janvier 2005) ; on peut donc admettre, même si la question est controversée, qu’elle conserve le régime juridique antérieurement applicable, c’est-à-dire qu’elle est librement révocable. Mais le décès du de cujus éteint cette faculté de libre révocation qui est personnelle. Il n’empêche que cette solution est importante : en effet, on admettait traditionnellement ce genre de donation parce qu’elle était librement révocable et ne prenait donc effet définitif qu’à l’issue du régime, de sorte qu’on estimait qu’elle n’était pas contraire à l’immutabilité du régime matrimonial. Aussi bien on allait parfois jusqu’à considérer qu’elle ne donnait même pas lieu à récompense (cf. Ponsard sur Aubry et Rau, T. 8, n° 206, qui estimait que l’intention libérale excluait la récompense). Mais cette solution était très douteuse, car elle aboutissait à faire supporter par le donataire la moitié de la donation qui lui était consentie et elle aboutissait à consacrer une entorse à l’immutabilité du régime matrimonial. Aussi bien, il paraît plus juste de retenir la solution contraire. Et celle-ci s’imposerait sans doute de plus fort aujourd’hui. En effet, que faudrait-il décider si la donation avait été consentie après l’entrée en vigueur de la loi du 26 mai 2004 ? Irrévocable, la donation contreviendrait directement au principe de l’immutabilité du régime matrimonial. Pour autant on ne peut certainement pas considérer,

sauf le cas de fraude, que ce genre de donation est désormais impossible. La validité doit être maintenue en principe, mais il paraît indispensable de retenir désormais l’exigence d’une récompense à la charge du donateur, pour qu’au moins l’équilibre en valeur des masses soit respecté. Si l’on admet cette récompense, on doit la chiffrer au montant de la dépense faite, soit la valeur de l’usufruit donné, évalué au jour de la donation. Pour ce faire et par commodité on peut retenir le barème de l’art. 669 CGI (cf. infra), ce qui conduit à retenir la moitié de la valeur des actions données soit 200.000 (200 x 2000 [valeurs des actions en 2004] x 50 %). Rq. La pratique actuellement n’est pas en ce sens : elle retient dans le cas d’une donation de bien commun à un enfant avec réserve d’usufruit au profit du survivant des époux donateurs qu’il n’y a pas matière à récompense et que la donation indirecte taxable dont bénéficie le conjoint n’est que de la moitié des donations. Mais c’est une solution très contestable. Rq. Si les actions étaient propres aux époux, il faudrait s’interroger sur l’incidence de l’augmentation du capital par incorporation de réserves. D’une manière générale, lorsque les actions sont propres, constituent des propres par accessoire (comme les droits préférentiels de souscription) : - les réserves facultatives des sociétés qui sont susceptibles de distribution : alors même qu’elles sont constituées à l’aide des bénéfices sociaux, elles ne sont pas regardées comme des fruits accumulés. Si donc elles sont distribuées à titre de revenus de droits d’associés propres, les fonds constitueront des revenus de propres (et donc sont communs) ; si elles sont distribuées à titre de capitaux, les fonds constitueront des propres ; - les actions gratuitement attribuées en cas d’augmentation de capital par incorporation des réserves, et des droits d’attribution permettant l’augmentation de capital. Dans ce cas, la communauté qui n’a fourni aucun financement n’a pas même droit à récompense, sauf le cas de fraude lorsque les réserves sont artificiellement (sans intérêt social) gonflées pour frustrer la communauté de sa vocation aux revenus des propres. 6.- PEP assurance : il a été souscrit par Pierre Ribou en janvier 1990, les versements cumulés avant 1998 (la période minimale d’épargne est de 8 ans) étant de 90.000 € (ce qui est presque le plafond : 92.000 €) ; sa valeur actuelle est de 135.000 €. C’est un acquêt de communauté. Il est vrai que la qualification de bien commun de l’assurance-vie est en recul, puisque même les assurances mixtes, qui sont des assurances de placement, sont désormais considérées comme régies par l’art. L. 132-12 du Code des assurances (Cass. ch. mixte, 23 nov. 2004). Mais encore faut-il pour cela qu’il s’agisse d’une assurance-vie souscrite au bénéfice du conjoint. Lorsqu’un époux souscrit une assurance en cas de vie sur sa propre tête on considère au contraire que le produit d’assurance est commun et de même la valeur de rachat d’un contrat d’assurance-vie non dénouée figure dans l’actif de communauté en cas de dissolution par divorce (JP Praslicka ; en cas de dissolution de la communauté par décès, il semble, à suivre la doctrine fiscale, que les héritiers bénéficient d’une option). L’analogie avec le PEP assurance paraît s’imposer : en effet le contrat d’assurance-vie qui doit être souscrit doit comporter obligatoirement une garantie en cas de vie et c’est simplement à titre complémentaire qu’il peut prévoir une garantie en cas de décès ou d’invalidité ; et le bénéficiaire du capital garanti en cas de vie doit obligatoirement être le titulaire du PEP ; en outre, le PEP doit prévoir une valeur de rachat pour permettre la sortie anticipée. C’est dire que le PEP est incontestablement un produit d’épargne et non pas essentiellement de

prévoyance ; et il ne serait pas normal qu’un époux puisse ainsi se constituer des capitaux propres au préjudice de la communauté. 7.- PEA ouvert au nom de Marie : il a été investi en SICAV actions françaises, les versements cumulés atteignant 95.000 €. Sa valeur actuelle est de 90.000 €. Le titulaire désigné auprès de l’établissement bancaire importe peu pour la qualification du plan. Ce qui compte seulement, c’est la date et la nature du financement : le plan a été constitué pendant le cours de la communauté et constitue donc un acquêt de communauté. 8.- Comptes chèques joints : 50.000 euros ; les sommes sont réputées communes (art. 1402) 9.- Portefeuille de titres : 455.000 € : les valeurs sont communes comme constituant des acquêts de communauté ordinaires.

Aperçu liquidatif a) Reprises et récompenses 1° De Marie Ribou Reprises en nature : * appartement de Clermont-Ferrand : * maison rue Oberkampf à Paris : * 200 actions de la SAS Ribou en usufruit Récompenses - dues à la communauté : * acquisition de l’appartement de Clermont-Ferrand : * réfection de la toiture de l’appartement de Clermont-Ferrand : - dues par la communauté : * néant Solde dû à la communauté : 2° De la succession de M. Pierre Ribou : Reprises en nature : * résidence principale à Vichy : Récompenses - dues à la communauté : * construction de la résidence à Vichy : * donation de l’usufruit de 200 actions de la SAS Ribou au conjoint : - dues par la communauté : * acquisition de la résidence secondaire à Cannes : Solde dû à la communauté :

90.000 1.000.000 300.000

40.000 200.000 240.000

300.000

270.000 200.000 120.000 350.000

b) Liquidation de la communauté Actif * résidence secondaire à Cannes : * 760 actions SAS Ribou en pleine propriété : * PEP assurance : * PEA : * comptes chèques joints : * portefeuille titres : * récompense due par Marie : * récompense due par la succession de Pierre : Ensemble :

600.000 2.280.000 135.000 90.000 50.000 455.000 240.000 350.000 4.200.000

Passif * néant : on fait abstraction des charges de la jouissance (taxe foncière, frais d’entretien…) n’ayant pas connaissance de la date exacte du décès. Actif net 4.200.000 Dont la moitié pour chacun des époux ou sa succession Est de : 2.100.000 Liquidation de la succession a) Dévolution de la succession Le de cujus laisse son conjoint et deux enfants communs. A défaut de dispositions testamentaires, le conjoint survivant a vocation à succéder en concours avec les enfants et dispose d’une option entre l’usufruit de tous les biens existants et le quart en pleine propriété des biens existants laissés disponibles. Le tout sans préjudice des droits au logement du conjoint. Pour connaître quel choix le conjoint a intérêt à exercer, il faudra calculer la réserve et imputer les libéralités faits par le de cujus. La réserve des enfants est des deux tiers de la succession, le disponible du tiers. On rappelle que le disponible est élargi au bénéfice du conjoint dans les termes de l’art. 1094-1 c. civ. Chaque enfant a reçu 20 actions en pleine propriété et 100 actions en nue propriété et le conjoint 200 actions en usufruit ; mais s’agissant des enfants, la donation a été faite par les deux parents conjointement : Pierre est donc censé n’avoir donné à chacun de ses enfants 10 actions en pleine propriété et 50 actions en nue-propriété. Pour l’évaluation des actions en démembrement de propriété on retiendra y compris dans la liquidation civile le barème fiscal de l’art. 669 CGI. Marie Ribou qui est titulaire de l’usufruit à un peu moins de 58 ans : son usufruit est donc égal à 50 % de la valeur de la pleine propriété et identiquement pour la nue-propriété. Les actions données à Jean et Sophie l’ont été simultanément en janvier 2004 sur la base de 2.000 euros. La donation aux enfants est rapportable, sauf stipulation contraire, ce que l’énoncé du cas pratique n’indique pas, et à condition qu’il ne s’agisse pas d’une donationpartage, auquel cas, la liquidation devrait être conduite différemment et en tenant compte pour

les besoins de la réserve de la valeur des actions au jour de la donation (2.000 euros) et non pas du décès (3.000 €). Les conditions de l’article 1078 sont en effet réunies : tous les enfants vivants ou représentés au décès de l’ascendant ont reçu un lot dans le partage anticipé et l’ont expressément accepté et il n’a pas été prévu de réserve d’usufruit portant sur une somme d’argent. On considèrera que la donation consentie aux deux enfants est une donation simple. b) Calcul de la quotité disponible 1. Biens existants au décès : * résidence principale à Vichy : * moitié du boni de communauté : Ensemble :

300.000 2.100.000 2.400.000

2. Déduction des dettes : * récompense due à la communauté : Solde :

350.000 2.050.000

3. Réunion fictive des donations : * donation à Jean : - 10 actions en pleine propriété : - 50 actions en nue propriété : * donation à Sophie : - 10 actions en pleine propriété : - 50 actions en nue propriété : * donation à Marie - 200 actions en usufruit : Ensemble :

30.000 75.000 30.000 75.000 300.000 510.000

Total : 2.560.000 Dont le tiers constituant la quotité disponible et les parts individuelles de réserve (C. civ. art. 913) Est de : 853.333,33 d) Imputation des libéralités Chaque enfant a reçu : A prendre sur sa part de réserve : Qui est ramenée après imputation à :

105.000 853.333,33 748.333,33

Le conjoint a reçu une libéralité en usufruit, il y a donc lieu de faire application des règles de combinaison des quotités disponibles. S’agissant d’une libéralité en usufruit, on retient généralement (même si la solution est très discutable) que l’imputation doit se faire prioritairement sur l’usufruit de la réserve. Si l’on admet cette solution, l’imputation n’entraîne aucune réduction (l’usufruit d’une assiette de 600.000 = valeur actuelle des 200 actions, est à prendre sur 748.333,33 x 2) et le disponible ordinaire reste intact après imputation. Le total des libéralités consenties n’excédant pas les limites de l’art. 1094-1, il n’y a pas lieu à réduction et le disponible après les imputations demeure de : 853.333,33 RQ Si les donations faites simultanément aux deux enfants l’avaient été dans le cadre d’une donation-partage, pour apprécier l’existence d’une atteinte à la réserve et procéder à une éventuelle réduction, il faudrait procéder comme prévu à l’art. 1077-1 c. civ. Ce texte fait

d'une opération en comblement des parts de réserve le préalable nécessaire de la réduction de la donation-partage. La succession ayant déjà fait l'objet d'un partage, il est en effet logique de commencer par vérifier que chacun a bien reçu sa part de réserve dans le partage intervenu et, si ce n'est pas le cas, de tenter de composer ou compléter les parts, avant de poursuivre la réduction des libéralités. On doit donc commencer à calculer le montant de la réserve en tenant compte de la donation-partage dans la masse de calcul : si chacun a trouvé dans la donation-partage sa réserve, il ne reste plus alors qu’à partager les biens existants (en suivant éventuellement les dispositions testamentaires du de cujus) et les éventuelles indemnités de rapport (si des libéralités ont été faites aux copartageant en dehors de la donation-partage). Mais à cet égard, la donation-partage présente à certaines conditions un avantage considérable. On sait en effet que les biens donnés doivent être évalués en principe au jour de l’ouverture de la succession. Par dérogation, les biens compris dans la donation-partage sont évalués au jour de l’acte aux trois conditions de l’art. 1078 que l’on a déjà énoncées : 1° tous les enfants vivants ou représentés au décès de l’ascendant ont reçu un lot dans le partage anticipé ; 2° ils l’ont expressément accepté ; 3° il n’a pas été prévu de réserve d’usufruit portant sur une somme d’argent (la raison en est qu’il faut éviter que l’attributaire de la somme d’argent ne pâtisse de l’inflation puisque la restitution doit se faire au nominal à la fin de l’usufruit, tandis que ses frères et sœurs attributaires de biens en nature profiteraient dans le même temps de l’inflation puisqu’elle apprécierait leur lot). Cette solution remarquable a pour but de stabiliser la distribution voulue par l'ascendant en évitant que tout ou partie des attributions faites ne soient menacées de réduction par suite de variations de valeur fortuites. Concrètement, elle conduit en période d'inflation à sous-évaluer les biens partagés par rapport aux biens existants ou simplement donnés, puisque ceux-ci sont évalués au jour de l'ouverture de la succession, donc plus tardivement. De la sorte, le risque de réduction de la donation-partage est effectivement diminué. Mais les libéralités qui lui sont étrangères sont corrélativement fragilisées, le risque étant plus grand que la donation-partage ne remplisse pas les copartagés de leurs droits à réserve. Et c'est pourquoi l'évaluation au jour de l'acte est subordonnée, sinon au respect de la plus stricte égalité dans la distribution, du moins à l'allotissement effectif de tous les enfants dans le partage anticipé. Exemple n° 1. Le de cujus laisse deux enfants ; il a donné une somme de 100 à chacun par donation-partage ; chacun des enfants a investi les fonds reçus dans l’acquisition d’un bien valant aujourd’hui 200. Les biens laissés par le de cujus valent également 200 ; il a été fait une donation au dernier vivant de la quotité disponible en pleine propriété. Masse de calcul de la réserve : 200 (BE) + 100 et 100 (sommes données aux enfants) = 400 ; parts individuelles de réserve et quotité disponible : 133,33. Chaque enfant n’a reçu que 100 et doit donc encore prendre 33,33 sur les biens existants pour compléter sa réserve = la donation au dernier vivant ne peut s’exercer que pour 133,34 (200 – 66,67). Si les enfants avaient reçu par donation simple, la masse de calcul de la réserve serait de 200 + 400 (donations réévaluées) soit 600 ; la part individuelle de réserve serait de 200, correspondant exactement au montant des allotissements : la donation au dernier vivant pourrait s’exercer pour ce montant. Il y a un autre intérêt pratique à figer les évaluations au jour de l'acte, car la révision du montant de la réunion fictive ou de l'imputation peut-être due, non à une plus ou moins-value des biens donnés, mais à la manière dont ils ont été employés par les donataires. Or la

donation-partage ne donne pas lieu au rapport donc laisse à chacun des donataires les chances de gains et les risques de perte relativement à son lot. Exemple n° 2. Un père consent, à des dates très proches, trois dons manuels de 300 à chacun de ses enfants, A, B, et C ; A décide de jouer au casino les 300 reçus et il perd évidemment ; B préfère acheter un studio, et C. fait des placements hasardeux. Au décès du donateur, survenu quelques années plus tard, les placements ont fondu à 100, et le studio vaut 500. Dans le règlement successoral, A devra rapporter 300, B. 500 et C. 100. Au vu d'un tel résultat, on peut estimer que les fins égalitaires du rapport ont mal fonctionné. Or le disposant, en réunissant ses trois dons manuels dans une donation-partage, aurait pu garantir le maintien de la valeur des trois attributions. Quoi qu’il en soit, si le calcul de la réserve montre qu’un enfant au moins n’a pas reçu sa part de réserve dans la donation-partage, la loi lui fournit naturellement le moyen de la reconstituer. Mais ici la liquidation se sépare des règles habituelles, un partage ayant eu lieu par hypothèse, il n’est pas question de procéder comme on le fait habituellement à l’imputation et à la réduction éventuelle des libéralités en conséquence. Il faut que chacun tâche de prendre sa réserve sur les donations qui ont pu lui être faites en dehors de la donation-partage et sur les biens existants avant de prétendre à la réduction des libéralités faites à d’autres qu’à lui : c’est ce qu’on appelle l’action en comblement de part de réserve qui est la deuxième étape de la liquidation (rq. Si un enfant a été purement et simplement omis de la donation-partage parce qu’il n’existait pas et peut-être aussi parce que son existence était ignorée), il peut même réclamer par cette action en comblement une part successorale entière et pas seulement sa réserve). Donc si un enfant n’a pas été rempli de sa réserve dans la donation-partage, on doit s’efforcer de composer ou compléter sa part de réserve : - d'abord avec les biens qu'il a reçus en dehors du partage anticipé par libéralités rapportables (lesquelles cessent alors évidemment de l’être), les libéralités préciputaires qui ont vocation à s'ajouter à la part de réserve du gratifié ne pouvant évidemment remplir cette fonction. - ensuite avec les biens existants qui demeurent disponibles, autrement dit qui n'ont pas été légués. Le comblement des parts individuelles de réserve étant conçu comme un préalable à la réduction, il faut en effet servir en priorité les légataires. Si, à l'issue de ces opérations, la réserve de chacun est assurée, les biens restants et les éventuelles indemnités de rapport seront partagés entre les héritiers au prorata de leurs droits successoraux. C'est seulement si la part de réserve d'un héritier n'a pu, de la sorte, être reconstituée, que l'action en réduction de la donation-partage et des autres libéralités est recevable. On retrouve, à ce stade de la procédure liquidative, les règles de droit commun (cf. art. 10772, al. 1er) : l'action en réduction doit être dirigée d'abord contre les legs puis contre les donations, en commençant par les plus récentes. À cet égard, la donation-partage prend rang à sa date, au même titre qu'une donation ordinaire, pour l'ensemble des attributions qu'elle contient, y compris celles qui procèdent de la réintégration de donations antérieures, lesquelles perdent donc du fait de leur incorporation le bénéfice de l'antériorité d'imputation. Dans le cas présent, le couple n’ayant que deux enfants (et probablement plus d’espoir d’en avoir d’autres, à moins que le mari n’ait été volage) et chacun ayant été alloti dans la donation-partage exactement de la même manière sans qu’existe d’autres dispositions à titre

gratuit à leur profit, il n’y avait aucun risque de réduction de la donation-partage. Mais il peut en aller différemment. Deux exemples l’illustreront : Exemple n° 3 : Un père de famille laisse à son décès des biens valant 50. De son vivant, il a fait donation rapportable à son fils A d'un tableau évalué à 50 au jour de l'acte et 100 à l'ouverture de la succession. Plus tard, il a fait une donation-partage entre ses deux autres enfants B et C qui ont reçu chacun un immeuble valant l'un 100 et l'autre 200 au jour de l'acte, 300 et 350 au jour de l'ouverture de la succession. La masse de calcul de la réserve est de 800 (50 + 100 + 300 + 350) ; les parts de réserve et la quotité disponible sont donc de 200. B et C ont été pourvus de leur réserve dans la donationpartage. A qui n'y a pas participé compose la sienne à hauteur de 150 au moyen de l'avancement d'hoirie reçu (qui cesse ainsi d'être rapportable) et des biens existants. Pour le surplus, c'est-à-dire les 50 manquants, il doit poursuivre la réduction de la donation-partage ; les lots de B et C excèdent leur réserve de 100 et 150, soit 250. La réduction étant proportionnelle, il convient de réduire de 20 le lot de B (50 x 100 / 250) et de 30 le lot de C (50 x 150 / 250). Si le règlement de la succession est différé à une époque où le lot de B vaut 360 et celui de C 420, les indemnités de réduction devront être réévaluées en conséquence : B devra 24 (360 x 20 / 300) et C 36 (420 x 30 / 350). Variante : Si la donation rapportable adressée à A avait été incorporée (telle quelle) à la donation-partage, tous les enfants du de cujus ayant participé à celle-ci, les biens partagés par anticipation devraient être évalués au jour de l'acte pour l'imputation et le calcul de la réserve. En conséquence, la masse de calcul serait de 400 (50 + 50 + 100 + 200) et la quotité disponible ainsi que les parts individuelles de réserve de 100. À nouveau, seul A n'aurait pas été pourvu de sa réserve dans la donation-partage. Mais il pourrait cette fois compléter ses droits avec les biens existants sans qu'il soit nécessaire de réduire les lots de B et C. Exemple n° 3 : Soit une donation-partage consentie par un père de famille à ses deux enfants A et B : A reçoit un lot évalué à 260 au jour de l'ouverture de la succession et 330 au jour de son règlement, B reçoit un lot valant 240 et 310 à ces mêmes dates. Quelques années plus tard, l'ascendant consent une donation préciputaire à son fils A : le bien donné vaut 150 à l'ouverture de la succession et 210 au jour de la liquidation. Survient ensuite un nouvel enfant, C, qui est gratifié par donation rapportable d'un bien d'une valeur de 110 au décès du disposant et de 130 à l'époque du règlement. Au décès de l'ascendant les seuls biens existants valent 40 ; ils sont évalués à 60 lors de la liquidation. La part de réserve de chaque enfant se chiffre, ainsi que la quotité disponible, à 200 : (260 + 240 + 150 + 110 + 40) / 4 ; C n'ayant, par hypothèse, pas reçu sa réserve dans la donationpartage, va la composer à l'aide de la donation rapportable à lui faite et des biens existants : il est ainsi rempli de ses droits à hauteur de 150 (110 + 40). Pour obtenir les 50 manquants, il agit en réduction. Les lots de A et B dans la donation-partage s'imputent sur leur part de réserve et pour le surplus (60 et 40) sur le disponible qui est ainsi ramené à 100 ; la donation préciputaire adressée à A absorbe ce reliquat de disponible et est réductible pour le surplus (50 / 150) ; l'indemnité de réduction due à C au jour de la liquidation est de 70 (50 / 150 x 210). Si C avait été sciemment omis de la donation-partage, A aurait finalement recueilli 470 (son lot évalué à 330 et le préciput qui a trouvé à s'imputer, c'est-à-dire 140), B 310 (valeur actuelle de son lot) et C 260 correspondant à ses droits à réserve (60 + 130 + 70). Mais n'ayant pas été conçu à l'époque, il peut encore réclamer sa part dans le disponible. Si le partage n'avait pas été réalisé par anticipation, sa part héréditaire serait de 900 (60 + 330 + 310 + 130 + 70) / 3 =

300. Il peut donc agir en réduction de la donation-partage pour obtenir les 40 qui viendront compléter les 260 auxquels il peut prétendre au titre de sa réserve. Cette somme est due par A à hauteur de 30 et B à hauteur de 10, sommes représentant la valeur de leur lot qui dépasse leur part héréditaire. Au total A a droit à 440 (330 - 30 + 140) ; B à 300 (310 - 10) et C à 300 (60 + 130 + 70 + 30 + 10). RQ. On a retenu que l'action en réduction est exercée dans les conditions de l'article 1077-2 contre les copartagés, simultanément et en proportion des biens qu'ils ont reçus, sans stipulation de préciput, au delà de leur part héréditaire. Rappr. Morin, n° 133 (exemple 3). Comp. Grimaldi, J-Cl., Fasc. 40, n° 56 et 57, pour qui les copartagés contribuent à proportion de la valeur de leur lot, de sorte que finalement la réduction peut conduire à ramener un lot en dessous de la valeur d'une part héréditaire à seule fin de reconstituer celle de l'enfant omis (cf. l'exemple IV), ce que ne souhaiterait probablement pas l'ascendant. Si l'on avait fait application de cette méthode : les 40 de réduction seraient supportés par A pour 20,625 (40 x 330 / 640) et B pour 19,375 (40 x 310 / 640) : finalement A aurait droit à 449,375 (330 - 20, 625 + 140) et B à 290,625 (310 - 19,375). Au terme de la liquidation C recueillerait une part successorale complète, mais non B. e) Droits du conjoint Marie peut opter pour l’usufruit de la totalité des biens existants ou la propriété du quart des biens (art. 756) : - si elle opte pour l’usufruit, elle aura donc la jouissance de toute la communauté (partie en pleine propriété et partie en usufruit) et des biens propres de son défunt mari ; les droits successoraux des enfants (réserve comprise) seront ainsi différés au décès de leur mère, exception faite des donations reçues. Concrètement, leurs droits seront ramenés à la nuepropriété des biens existant au décès. Une conversion de l’usufruit en rente viagère, voire en capital en cas d’accord entre les enfants et le conjoint, sera possible dans les conditions des articles 759 et s. Toutefois, si le conjoint ne consent pas à la conversion, celle-ci ne pourra pas concerner la résidence de Vichy, puisqu’elle constitue le logement qu’il occupe à titre de résidence principale et elle ne pourra pas porter non plus sur le mobilier le garnissant (que le cas pratique ignore) : art. 760. - si elle opte pour le quart en pleine propriété, il faut pour liquider ses droits suivant la méthode de l’article 758-5 : Masse de calcul : * biens existants dont moitié du boni de communauté (exception théoriquement faite des legs) : 2.400.000 * déduction du passif (si on admet cette déduction) : 350.000 * réunion fictive des libéralités rapportables : 210.000 (il ne paraît pas que la libéralité faite au conjoint soit rapportable, du moins on peut présumer que telle a été l’intention du de cujus et le serait-elle qu’il faudrait en contrepartie admettre que le conjoint exerce ses droits légaux en priorité sur sa libéralité : rapport en moins prenant) Total : Dont le quart, Représentant les droits théoriques du conjoint est de : Masse d’exercice :

2.260.000 565.000

Suivant l’art. 758-5, al. 2 le conjoint ne peut exercer ses droits sur les biens dont le prédécédé n’a disposé ni par acte entre vifs ni par acte testamentaire et sans préjudicier aux droits de réserve ni aux droits de retour. Autrement dit, la masse d’exercice correspond au reliquat du disponible après imputation des libéralités, soit dans notre cas 853.333,33 (le disponible étant intact). La masse d’exercice étant supérieure à la masse de calcul, le conjoint pourra prélever sur les biens existants le quart auquel il a droit en totalité, soit 565.000, le restant ayant vocation à être partagé entre Jean et Sophie. Mais encore faut-il tenir compte du droit viager au logement (qui est au contraire absorbé par l’usufruit lorsque le conjoint opte pour celui-ci). La résidence principale de Vichy répond en effet aux conditions du droit au logement : elle dépend totalement de la succession de Pierre, tout laisse à penser qu’elle est effectivement occupé à titre d’habitation principale par Marie. Celle-ci peut donc prétendre à un double droit sur le logement : - un droit temporaire qui consiste dans la jouissance gratuite du logement pendant un an (art. 763) ; - un droit viager au logement qui consiste en un droit d’habitation du logement et un droit d’usage du mobilier (art. 764). Mais ce droit, à la différence du précédent, a un caractère successoral et il doit être imputé sur les droits recueillis par le conjoint survivant dans la succession. Pour les besoins de cette imputation, il faut donc évaluer la valeur de ce droit au logement. On peut le faire par adaptation de la méthode d’évaluation économique des usufruits ou par référence au barème fiscal d’évaluation des usufruits, étant entendu que pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit la valeur des droits d’habitation et d’usage est de 60 % de la valeur de l’usufruit déterminée par l’art. 669 CGI. Dans le cas présent, la valeur du droit viager d’habitation représente donc 30 % (60 % x 50 %) de la valeur de la pleine propriété de la résidence principale, soit 30 % x 300.000 = 90.000 € ; la propriété ainsi démembrée vaut de son côté : 210.000 €. Le montant du droit viager d’habitation (90.000) sera donc imputé sur le montant des droits légaux du conjoint dans la succession (565.000), de sorte qu’outre l’exercice du droit au logement le conjoint ne pourra plus prétendre qu’à des droits en pleine propriété d’une valeur de 475.000 € en pleine propriété. f) Masse partageable Si Marie opte pour l’usufruit : Son usufruit étant universel et portant sur tous les biens existants, la masse à partager entre les enfants sera ramenée à la nue propriété de ces biens (moitié du boni de communauté compris) à quoi s’ajouteront les rapports dus par chacun : 1. Biens existants Actif - Ensemble :

2.400.000 Passif

- récompense due à la communauté : Actif net :

350.000 2.050.000

Sur lequel Marie exercera son usufruit universel et dont la nue propriété reviendra à Jean et Sophie pour moitié.

Rq. On a déduit le passif de l’actif brut pour constituer un actif net sur lequel l’usufruitier et les nus-propriétaires exerceront leurs droits. Il est vrai que les dettes en capital sont à la charge des nus-propriétaires, l’usufruitier n’étant tenu que des intérêts et des dettes usufructuaires. Mais en vertu de l’article 612 c. civ., le propriétaire peut faire vendre une portion des biens soumis à l’usufruit pour acquitter le passif (cf. Cass. 1re civ., 6 mars 2001, Bull. civ. I, n° 64, qui paraît toutefois n’admettre que la vente soit imposer à l’usufruitier qu’à concurrence des intérêts). 2. Rapports des donations * Jean : - 10 actions en pleine propriété : - 50 actions en nue propriété : * Sophie : - 10 actions en pleine propriété : - 50 actions en nue propriété : Ensemble :

30.000 75.000 30.000 75.000 210.000

Revenant à chacun des enfants pour moitié Si Marie opte pour la pleine propriété 1. Biens existants Actif - Ensemble :

2.400.000 Passif

- récompense due à la communauté : Actif net :

350.000 2.050.000

2. Droits de Marie - droit au logement sur la résidence à Vichy : - droits en propriété après imputation du droit au logement : 3. Restent à partager entre les enfants - biens existants : - rapports : Ensemble : A répartir par moitié :

90.000 475.000 1.485.000 210.000 1.695.000 847.500

g) Droits des parties Si Marie opte pour l’usufruit : 1. Marie * reprises en propriété :

1.090.000

* part de communauté :

2.100.000

* récompense due à la communauté : Solde (boni de communauté) :

240.000 1.860.000

* usufruit successoral : * donation préciputaire en usufruit :

1.025.000 300.000

2. Jean * part de succession en nue-propriété : * rapports - en nue propriété : - en pleine propriété 3. Sophie * part de succession en nue-propriété : * rapports - en nue propriété : - en pleine propriété

512.500 75.000 30.000

512.500 75.000 30.000

Si Marie opte pour la pleine propriété : 1. Marie * reprises en propriété :

1.090.000

* part de communauté : * récompense due à la communauté : Solde (boni de communauté) :

2.100.000 240.000 1.860.000

* droit au logement : * droits successoraux en propriété * donation préciputaire en usufruit :

90.000 475.000 300.000

2. Jean * part dans les biens existants et rapport :

847.500

3. Sophie * part dans les biens existants et rapport :

847.500

LIQUIDATION FISCALE Règles d’imposition applicables 1° Donations a) Donations à Jean et Sophie Ces donations sont rapportables civilement : c’est dire qu’elles doivent être réintégrées dans la masse partage. En principe, il faudrait donc en tenir compte en ajoutant le montant des

rapports à l’actif successoral pour déterminer le montant des parts héréditaires. Mais comme on l’a déjà dit le rapport est facultatif sur le terrain civil et sur le terrain fiscal le mécanisme du rapport n’a pas d’incidence directe, car le rapport civil n’est jamais taxé : en effet, dans la mesure où la donation a été déclarée, les droits ayant déjà été acquittées à l’occasion de la donation, le montant du rapport est déduit de la part du donataire. Ce n’est donc que si tous les copartageants ne doivent pas le même rapport que celui-ci va avoir une incidence sur la répartition de l’actif entre les héritiers et, par voie de conséquence, sur le montant des droits dus par chacun d’eux. Car la majoration de la masse taxable par l’effet du rapport va se traduire alors par une diminution de la part taxable de l’héritier qui effectue le rapport et une augmentation de la part taxable des autres héritiers. Dans le cas présent, le rapport dû par Jean et Sophie étant rigoureusement identique, il n’y aura pas à en tenir compte dans la masse taxable. En revanche, il faudra les rappeler dans la déclaration de succession et en opérer le « rapport fiscal » pour calculer les droits dus. Il faut en effet établir le montant de l’abattement et éventuellement des tranches basses de l’impôt qui restent utilisables, puisque ces donations ont moins de six ans : art. 784 CGI, rédac. L. n° 2005-1719 du 30 déc. 2005 : Les parties sont tenues de faire connaître, dans tout acte constatant une transmission entre vifs à titre gratuit et dans toute déclaration de succession, s'il existe ou non des donations antérieures consenties à un titre et sous une forme quelconque par le donateur ou le défunt aux donataires, héritiers ou légataires et, dans l'affirmative, le montant de ces donations ainsi que, le cas échéant, les noms, qualités et résidences des officiers ministériels qui ont reçu les actes de donation, et la date de l'enregistrement de ces actes. La perception est effectuée en ajoutant à la valeur des biens compris dans la donation ou la déclaration de succession celle des biens qui ont fait l'objet de donations antérieures, à l'exception de celles passées depuis plus de six ans, et, lorsqu'il y a lieu à application d'un tarif progressif, en considérant ceux de ces biens dont la transmission n'a pas encore été assujettie au droit de mutation à titre gratuit comme inclus dans les tranches les plus élevées de l'actif imposable. Pour le calcul des abattements et réductions édictés par les articles 779, 780, 790 B, 790 C et 790 D il est tenu compte des abattements et des réductions effectués sur les donations antérieures visées au deuxième alinéa et consenties par la même personne.

Il reste que la donation faite aux enfants n’a été faite en pleine propriété que pour partie (10 actions de la SAS) : en effet, chaque enfant a reçu de son père 50 actions en nue-propriété avec réserve d’usufruit au profit du disposant et de son conjoint. La question se pose alors de l’application de la présomption de l’article 751 CGI. Suivant ce texte : Est réputé, au point de vue fiscal, faire partie, jusqu'à preuve contraire, de la succession de l'usufruitier, toute valeur mobilière, tout bien meuble ou immeuble appartenant, pour l'usufruit, au défunt et, pour la nuepropriété, à l'un de ses présomptifs héritiers ou descendants d'eux, même exclu par testament ou à ses donataires ou légataires institués, même par testament postérieur, ou à des personnes interposées, à moins qu'il y ait eu donation régulière et que cette donation, si elle n'est pas constatée dans un contrat de mariage, ait été consentie plus de trois mois avant le décès. Sont réputées personnes interposées les personnes désignées dans les articles 911, deuxième alinéa, et 1100 du code civil. Toutefois, si la nue-propriété provient à l'héritier, au donataire, au légataire ou à la personne interposée d'une vente ou d'une donation à lui consentie par le défunt, les droits de mutation acquittés par le nupropriétaire et dont il est justifié sont imputés sur l'impôt de transmission par décès exigible à raison de l'incorporation des biens dans la succession.

En l’occurrence la donation dont résulte le démembrement de propriété date de plus de trois mois, elle écarterait donc le jeu de l’article 75I CGI si besoin était. Mais de toute manière, la clause de réversion d’usufruit au profit du conjoint survivant a eu pour effet que l’usufruit n’est pas demeuré sur la tête du de cujus (ou, plus exactement, est censé n’avoir pas été sur sa

tête puisque la réversibilité d’usufruit est regardée comme une donation de biens présents) et il en résulte semble-t-il que la présomption n’aurait pas pu jouer (puisque d’un autre côté le fisc reconnaît le transfert de l’usufruit en le soumettant aux droits de mutation à titre gratuit). Remarquons que lorsque la présomption de l’article 751 joue, parce que la donation avec réserve d’usufruit qui est à l’origine du démembrement date de moins de trois mois, doit être réintégrée à la succession de l’usufruitier non seulement la valeur en pleine propriété du bien donné mais aussi les droits de mutation à titre gratuit lorsqu’ils ont été pris en charge par le donateur. En revanche, les droits de mutation acquittés par le nu-propriétaire sont imputés sur l’impôt de mutation par décès exigible à raison de l’incorporation dans la succession des biens atteints par la présomption. Remarquons aussi que l’art. 751 CGI est inapplicable aux personnes morales (RMF Lemoine, 28 janv. 1970, JO Sénat n° 8903, p. 21) et notamment aux SCI (mêmes constituées entre nuspropriétaires personnes physiques visées par le texte) acquéreurs de la nue-propriété. Mais encore faut-il comme toujours que la SCI est une existence réelle : il faut tenir rigoureusement sa gestion comptable, financière et juridique, en tenant un registre de délibérations, en produisant des bilans et comptes de résultat, faute de quoi l’administration fiscale pourrait la tenir pour fictive et appliquer la présomption de l’article 751. b) Donation indirecte à Marie résultant de la réversion d’usufruit à son profit L’article 1965 G du CGI pose le principe de la neutralité fiscale en matière d’extinction de l’usufruit : la reconstitution de la pleine propriété sur la tête du nu-propriétaire n’est pas taxée. Mais lorsque la réversibilité de l’usufruit sur la tête d’une tierce personne a été stipulée, cette reconstitution de la pleine propriété est empêchée et l’opération s’analyse on l’a dit comme une donation de biens présents éventuelle. Le droit fiscal partage la même analyse : la réversibilité constitue une donation indirecte taxable aux droits de mutation à titre gratuit lorsqu’elle s’opère (l’exonération de droits de mutation des sommes versées à titre de rente viagère à l’époux survivant ou aux parents en ligne directe – art. 793,1,5° CGI – n’est pas applicable). Dans le cas présent, la réversibilité d’usufruit sera donc taxée comme une donation faite à l’époque du décès. La difficulté tient à la détermination de l’assiette taxable : faut-il considérer que la donation consiste seulement dans la moitié des donations, l’idée étant que chacun des époux a fait à l’autre une donation de la moitié de l’usufruit seulement ou bien que la donation éventuelle est du tout ? On a retenu la seconde solution, mais une fois encore la pratique est en sens contraire (alors même que c’est très contestable car cela devrait alors conduire a laisser dans la communauté l’autre moitié de l’usufruit qui n’a finalement pas été donné). On retiendra pour notre part l’existence d’une donation du tout. 2° Récompenses Dans la déclaration de succession, il y a lieu de liquider les récompenses conformément aux règles civiles, c’est-à-dire suivant les règles d’évaluation des articles 1469 c. civ. (Rép. Min., 11 déc. 1968, Defrénois 1969, art. 29243). S’agissant des récompenses dues par la succession et qui constituent donc un passif dont la déduction est demandée, les héritiers doivent par conséquent être en mesure d’en justifier par tous moyens compatibles avec la procédure écrite (il faut un écrit ou des présomptions graves, précises et concordantes : des témoignages ou un aveu, notamment des héritiers, seraient insuffisants).

En l’occurrence, la succession doit récompense pour la réversibilité de l’usufruit sur les parts de la SAS donnés en nue-propriété aux enfants et pour le financement de la construction de la maison à Vichy. Dans le premier cas, la preuve de la récompense est établie par l’acte de donation, dans le second cas, il ne devrait pas être difficile de montrer (relevés bancaires à l’appui) que les échéances de l’emprunt ont été payés au moyen de deniers communs. Quant à la récompense due par la communauté et qui vient en compensation partielle, elle est établie par acte authentique puisqu’elle résulte du remploi de fonds donnés à Pierre par ses parents dans l’acquisition de la résidence secondaire à Cannes. De même les récompenses dues à la communauté par Marie Ribou devraient pouvoir être facilement établies : l’une procède des remboursements par la communauté d’un emprunt souscrit pour l’acquisition de l’appartement de Clermont-Ferrand, l’autre du financement par la communauté de la réfection de la toiture sur cet appartement : là encore les relevés bancaires feront la preuve. Rq en pratique la difficulté se pose surtout pour la récompense due par la communauté lorsque les fonds sont tombés en communauté. 3° Actif taxable a) Résidence principale à Vichy Selon l’art. 764 bis CGI : Par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 761, il est effectué un abattement de 20 % sur la valeur vénale réelle de l'immeuble constituant au jour du décès la résidence principale du défunt lorsque, à la même date, cet immeuble est également occupé à titre de résidence principale par le conjoint survivant, par le partenaire lié au défunt par un pacte civil de solidarité ou par un ou plusieurs enfants mineurs ou majeurs protégés du défunt, de son conjoint ou de son partenaire. Ces dispositions s'appliquent dans les mêmes conditions lorsque les enfants majeurs du défunt, de son conjoint ou de son partenaire sont incapables de travailler dans des conditions normales de rentabilité, en raison d'une infirmité physique ou mentale, congénitale ou acquise au sens du II de l'article 779.

La maison de Vichy constituant la résidence principale du couple, on peut penser que les conditions de l’abattement de 20 % sur sa valeur vénale réelle sont réunies. b) Imposition du mobilier meublant Le cas pratique ne fait pas état de l’existence de meubles meublants. Il faut donc faire application du forfait mobilier de 5 % qu’envisage l’article 764, I du CGI (puisqu’il n’est pas fait état d’un inventaire ou d’une vente publique) : Pour la liquidation des droits de mutation par décès, la valeur de la propriété des biens meubles est déterminée, sauf preuve contraire : 1º Par le prix exprimé dans les actes de vente, lorsque cette vente a lieu publiquement dans les deux années du décès ; 2º A défaut d'actes de vente, par l'estimation contenue dans les inventaires, s'il en est dressé dans les formes prescrites par l'article 943 du code de procédure civile, et dans les cinq années du décès, pour les meubles meublants, et par l'estimation contenue dans les inventaires et autres actes, s'il en est passé, dans le même délai, pour les autres biens meubles, sauf les dispositions du II ; 3º A défaut des bases d'évaluation établies aux 1º et 2º, par la déclaration détaillée et estimative des parties; toutefois, pour les meubles meublants, et sans que l'administration ait à en justifier l'existence, la valeur imposable ne peut être inférieure à 5 % de l'ensemble des autres valeurs mobilières et immobilières de la succession, la preuve contraire étant aussi réservée.

A moins que les parties ne parviennent à faire la preuve qu’il n’y avait pas de mobilier. Car la preuve contraire à l’application du forfait de 5 % peut être administrée par les parties. Mais en

l’espèce eu égard à l’existence d’immeubles propriétés des époux, cela est très douteux. On ne voit pas qu’il puisse justifier d’actes et d’écrits ou de présomptions graves, précises et concordantes de l’absence complète de mobiliers. Le forfait mobilier qu’il faut donc chiffrer se calcule sur l’ensemble des valeurs mobilières autres que les meubles meublants, et immobilières imposables en France composant l’actif successoral avant déduction du passif. C’est dire que l’assiette du forfait est l’actif brut héréditaire, c’est-à-dire avant déduction du passif, étant entendu : - qu’il n’y a pas lieu de comprendre dans cet actif les rapports de dons en avancement d’hoirie et les biens exonérés de droit de succession (soit totalement, soit à concurrence de la partie exonérée en cas d’exonération partielle) ; - qu’il faut comprendre pour la toute propriété dans l’assiette du forfait les biens qui entrent dans le champ d’application de l’article 751 CGI (RMF, 1er oct. 1929, Ind. 1020) ; - que lorsque le de cujus était marié sous le régime de la communauté, il y a lieu d’ajouter à ses reprises et biens propres, sa part de communauté déterminée en déduisant de l’actif brut commun les récompenses en faveur des deux époux, après quoi il convient suivant le cas encore de retrancher de la part du de cujus l’éventuelle récompense qu’il doit à la communauté ou d’y ajouter la récompense que lui doit la communauté. Et c’est sur cette somme que l’on calcule le forfait. c) Actions de la SAS Ribou détenues en pleine propriété Le forfait mobilier ne s’applique pas à l’évaluation des actions (art. 764, III, CGI). Pour celles-ci il faut appliquer la règle spéciale d’évaluation de l’article 759 du CGI : le texte fait distinction pour l’évaluation des valeurs mobilières admises à une côte officielle et celles qui ne sont pas cotées. Les secondes – c’est le cas des actions de la SAS Ribou – sont imposées sur la base de la déclaration estimative des parties. Cette valeur estimative portée dans la déclaration de succession doit tenir compte, non seulement de la valeur mathématique des parts ou actions non cotées, mais aussi d’éléments divers tels les perspectives d’avenir et valeur de productivité (Rép. Taittinger, Sénat, 19 août 1982, p. 3858, n° 6616 ; Rép. Vasseur, AN 5 nov. 1990, p. 5135, n° 12409 ; TGI Grenoble, 3e ch., 8 févr. 1996 et 4 avr. 1996, Dr. fiscal 1996, n° 39, comm. 1145). De son côté, l’art. 764 A CGI précise qu’en cas de décès de l’une des personnes qui assument la direction générale d’une société par actions non cotée, il est tenu compte, pour la liquidation des droits de mutation par décès dus par ses héritiers, légataires ou donataires, de la dépréciation éventuelle résultant de ce décès et affectant la valeur des titres non cotés ou des actifs incorporels ainsi transmis. En pratique, l’expert-comptable ou le commissaire aux comptes est habilité à fournir au redevable de l’impôt une attestation de valeur des droits sociaux taxables. Pour cette évaluation financière, sont utilisés en particulier les bilans (dont peut se déduire la valeur mathématique des titres), le revenu du titre, l’attrait spéculatif plus ou moins grand qui résulte de la manière dont l’affaire est gérée et de ses perspectives d’avenir (Dijon, 31 juill. 1935, Ind. 3395), les éléments de comparaison tirés du prix de transactions portant sur des titres identiques à des dates proches du décès. Dans le cas présent, on peut retenir l’évaluation portée dans la liquidation civile S’agissant des dividendes des valeurs mobilières non cotées, ils ne doivent figurer à l’actif successoral que si la décision de mise en distribution a été prise antérieurement au décès (Bourges, 7 févr. 1989, Ind. 15166 ; Cass. com., 23 oct. 1990, Ind. 15466).

Rq. On fait abstraction de l’exonération de la moitié de la valeur des entreprises en cas d’engagement collectif de conservation (art. 789 A et B) : cf. infra. d) PEP assurance souscrit par Pierre Le fait que le PEP assurance ait été souscrit par Pierre et soit donc ouvert à son nom n’impose pas de le comptabiliser pour le tout dans sa succession. Certes, il faut tenir compte de la présomption de l’article 752 CGI suivant lequel : Sont présumées, jusqu'à preuve contraire, faire partie de la succession, pour la liquidation et le paiement des droits de mutation par décès, les actions, les obligations, parts de fondateur ou bénéficiaires, parts sociales et toutes autres créances dont le défunt a eu la propriété ou a perçu les revenus ou à raison desquelles il a effectué une opération quelconque moins d'un an avant son décès. La preuve contraire ne peut résulter de la cession à titre onéreux consentie à l'un des héritiers présomptifs ou descendants d'eux, même exclu par testament, ou à des donataires ou légataires institués, même par testament postérieur, ou à des personnes interposées, telles qu'elles sont désignées par les articles 911, deuxième alinéa, et 1100 du code civil, à moins que cette cession ait acquis date certaine avant l'ouverture de la succession. Les mesures destinées à l'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat

Sont donc présumées dépendre de l’actif successoral les biens visés au texte dont le défunt était propriétaire ou a perçu les revenus dans l’année précédant son décès. Et la jurisprudence retient que les sommes inscrites sur un compte bancaire constituent des créances entrant dans le champ du texte (par ex. Cass. com. 13 janvier et 3 mars 1987, JCP N 1987, II, p. 122 et 153). Mais la preuve contraire peut être administrée par tous moyens compatibles avec la procédure écrite et le fonctionnement légal du régime matrimonial est opposable à l’administration fiscale. Or on a dit que les sommes inscrites au PEP étaient regardées comme communes en application de l’art. 1502 c. civ. Par conséquent, il n’y a pas lieu d’en décider différemment pour la liquidation fiscale. Il faut faire application au PEP des conséquences qui résultent du régime matrimonial : au décès du titulaire du PEP son plan est automatiquement fermé. Les sommes placées sur un PEP bancaire entrent en conséquence dans la succession du titulaire (à due concurrence de sa part dans la communauté) et supportent les droits de succession dans les conditions ordinaires. RQ Lorsqu’il s’agit, comme en l’espèce, d’un PEP assurance, le contrat peut prévoir le versement des fonds à un bénéficiaire désigné en cas de décès du souscripteur ; dans ce cas, les sommes ainsi versées ne font pas partie de la succession du défunt et elles obéissent à un régime fiscal propre : pour les contrats souscrits avant le 20 nov. 1991 (ce qui est le cas), les sommes reçues par le bénéficiaire qui correspondent à des primes versées avant le 13 octobre 1998 (ce qui est le cas) ne donnent lieu à aucune taxation (celles qui correspondent à des primes versées après cette date donnent lieu à un prélèvement uniforme de 20 % après application d’un abattement de 152.500 €). Ce pourrait donc être un conseil pour l’optimisation fiscale de la transmission successorale que de désigner un bénéficiaire du PEP en cas de décès du souscripteur. RQ pour les contrats souscrits depuis le 20 nov. 1991, lorsque les sommes versées au bénéficiaire désigné correspondant à des primes versées après les 70 ans du titulaire, la fraction des primes supérieures à 30.500 € est soumise aux droits de succession, tandis que les sommes correspondant à des primes versées avant 70 ans sont soumises au prélèvement après abattement dont il vient d’être question. Dans le cas présent, une telle désignation n’étant pas indiquée, on considèrera que le PEP ne fait pas l’objet d’un régime particulier.

4° Passif déductible Il n’est pas fait état d’autres dettes que la récompense due à la communauté. En pratique, il faut tenir compte aussi d’autres dettes déductibles ; en particulier : - les frais funéraires déductibles pour 1500 € sans justificatifs (c’est un forfait) ; - le droit au logement temporaire du conjoint survivant lorsqu’il est assuré au moyen d’un bail (les loyers sont déductibles) ; - les impôts dus par le défunt : tous les impôts dus par le défunt au jour de son décès, même mis en recouvrement ensuite, sont en principe déductibles de l’actif successoral : taxe d’habitation, taxe foncière, ISF non réglé au jour du décès (il faut supposer que la succession s’est ouverte entre le 1er janvier et le 15 juin qui est la date de paiement), impôt sur le revenu de l’année précédente pour la partie non encore payée au jour du décès et impôt sur le revenu de l’année en cours pour la période du 1er janvier à la date du décès. Mais si le défunt était marié sous le régime de la communauté, ces dettes sont à la charge de la communauté (au contraire, si le de cujus était séparé de biens, l’impôt sur le revenu serait déductible de sa succession à concurrence de la fraction correspondant à ses revenus). - les plus-values professionnelles consécutives au décès du chef d’entreprise sont déductibles de l’actif taxable à la condition qu’il y ait cessation définitive de l’exploitation. 5° Abattements La succession étant dévolue au conjoint et aux enfants du défunt, il y a lieu de faire application de l’article 779, I du CGI qui ouvre au premier un abattement de 76.000 euros et attribue à chaque enfant un abattement de 50.000 euros. Mais pour le jeu de ces abattements, il faut tenir compte, on l’a dit, des donations précédemment faites et datant de moins de six ans qui ont pu les absorber en tout ou partie. - S’agissant de Marie, il n’y a pas lieu de déduire de l’abattement la donation indirecte que constitue la réversibilité d’usufruit, car cette donation étant éventuelle, les droits de mutation ne sont exigibles qu’à l’ouverture de la succession qui y donne droit. - S’agissant de Jean et Sophie, en revanche, il faut tenir compte de la donation (en pleine propriété et nue-propriété) qui leur a été faite par leur père. A cet égard, pour fixer le tarif des droits et déterminer si l’abattement subsiste en tout ou partie, il est toujours tenu compte de la valeur du bien au jour de la donation et du montant de l’abattement qui avait cours à l’époque. La donation a été faite en 2004 : chaque enfant a reçu à l’époque 70.000 € de son père (10 actions en pleine propriété à 2.000 € chacune et 50 actions en nue-propriété d’une valeur unitaire de 2000/2 €), alors que l’abattement applicable était de 46.000 €. C’est dire que l’abattement alors applicable a été totalement absorbé et qu’il ne reste plus disponible que le supplément d’abattement de 4.000 € issu de la loi de finances pour 2005 (passage d’un abattement de 46.000 à l’abattement actuel de 50.000 €). En outre, il y a lieu de faire application de l’abattement global institué par la loi de finances pour 2005 : cet abattement global s’applique aux successions en ligne directe et au profit du conjoint survivant, ce qui est le cas. Le régime de cet abattement est le suivant : - il profite héritiers en ligne directe et au conjoint au prorata de leurs droits ; - il s’impute après les abattements personnels des bénéficiaires ; - la fraction de l’abattement global non utilisée par un bénéficiaire se répartit entre les autres.

6° Barème Le tarif applicable est déterminé par l’article 776 CGI : Les droits de mutation à titre gratuit sont fixés aux taux indiqués dans les tableaux ci-après, pour la part nette revenant à chaque ayant droit : TABLEAU I Tarif des droits applicables en ligne directe FRACTION DE PART NETTE TAXABLE / TARIF APPLICABLE N'excédant pas 7 600 euros : 5 %. Comprise entre 7 600 et 11 400 euros : 10 %. [à retrancher 380 €] Comprise entre 11 400 euros et 15 000 euros : 15 %. [à retrancher 950 €] Comprise entre 15 000 euros et 520 000 euros : 20 %. [à retrancher 1.700 €] Comprise entre 520 000 euros et 850 000 euros : 30 %. [à retrancher 53.700 €] Comprise entre 850 000 euros et 1 700 000 euros : 35 %. [à retrancher 96.200 €] Au-delà de 1 700 000 euros : 40 %. [à retrancher 181.200 €] TABLEAU II Tarif des droits applicables entre époux FRACTION DE PART NETTE TAXABLE / TARIF APPLICABLE N'excédant pas 7 600 euros : 5 %. Comprise entre 7 600 et 15 000 euros: 10 %. [à retrancher 380 €] Comprise entre 15 000 euros et 30 000 euros : 15 %. [à retrancher 1.130 €] Comprise entre 30 000 euros et 520 000 euros : 20 %. [à retrancher 2.630 €] Comprise entre 520 000 euros et 850 000 euros : 30 %. [à retrancher 54.630 €] Comprise entre 850 000 euros et 1 700 000 euros : 35 %. [à retrancher 97.130 €] Au-delà de 1 700 000 euros : 40 %. [à retrancher 182.130 €] Les trois derniers tarifs sont applicables aux mutations à titre gratuit entre vifs consenties par actes passés à compter du 14 septembre 1983 et aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 1984.

7° Réductions de droits Il ne paraît pas que Jean et Sophie aient des enfants, la réduction de droits au profit des héritiers ayant au moins 3 enfants n’est pas applicable. DÉCLARATION DE SUCCESSION a) Récompenses Comme ci-dessus (liquidation civile) b) Communauté 1. Actif * résidence secondaire à Cannes : * 760 actions SAS Ribou en pleine propriété : * PEP assurance : * PEA assurance : * comptes chèques joints : * portefeuille titres : Ensemble : A ajouter les récompenses dues à la communauté : * récompense due par Marie : * récompense due par la succession de Pierre :

600.000 2.280.000 135.000 90.000 50.000 455.000 3.610.000 240.000 350.000

Actif brut de communauté :

4.200.000

2. Passif Néant 3. Actif net de communauté : Dont la moitié pour la succession Est de : c) Succession 1. Actif taxable - Résidence principale pour sa valeur vénale : dont il faut soustraire l’abattement de 20 %, soit : Reste taxable : A quoi il faut ajouter : - Moitié du boni de communauté : - Forfait mobilier de 5 % : 1. biens propres : 240.000 2. moitié de l’actif brut de communauté, soit 2.100.000, dont il faut soustraire la récompense due par la succession, soit 2.100.000 – 350.000 = 1.750.000 Ensemble : 1.990.000 Dont les 5 % sont de : Total : 2. Passif déductible - récompense due à la communauté :

4.200.000 2.100.000

300.000 60.000 240.000 2.100.000

99.500 2.439.500 350.000

3. Actif net de la succession :

2.089.500

i.- Si Marie opte pour l’usufruit - Son usufruit évalué à 50 % de la pleine propriété est de : - Reste pour Jean et Sophie : - Dont la moitié pour chacun est de :

1.044.750 1.044.750 522.375

ii.- Si Marie opte pour de la pleine propriété - Valeur de ses droits en propriété, tels que précédemment chiffrés * : - Restent à partager entre Jean et Sophie : - Dont la moitié pour chacun est de :

565.000 1.524.500 762.250

* Il semble que l’on puisse s’en tenir aux chiffres retenus dans la liquidation civile, en dépit de ce que la valeur de ses droits a été établi en tenant compte de la valeur vénale de la résidence principale, car on ne voit pas que le conjoint puisse invoquer l’abattement qui tient compte de ses droits pour chiffrer sa part. En outre, il n’y a pas lieu de distinguer ses droits en propriété et son droit au logement, puisque les premiers étant d’un montant supérieur à la valeur du second, celui-ci s’impute entièrement sur ceux-là.

d) Détermination des parts imposables i.- Si Marie opte pour l’usufruit * Marie - Valeur de son usufruit : - Donation indirecte résultant de la réversibilité d’usufruit sur les 200 actions de la SAS : Ensemble : - Abattement personnel : - part dans l’abattement global (1/2) - Reste imposable : * Jean et Sophie, chacun Montant de sa part : - Abattement personnel disponible après rappel de la donation de 2004 : - Part dans l’abattement global (1/4) : Reste imposable :

1.044.750 300.000 1.344.750 76.000 25.000 1.243.750 522.375 4.000 12.500 505.875

ii.- Si Marie opte pour de la pleine propriété * Marie - Droits en propriété : - Réversibilité d’usufruit : Ensemble : Abattement personnel : Part dans l’abattement global (565.000/2.089.500) X 50.000 : Reste imposable : * Jean et Sophie, chacun Montant de sa part : - Abattement personnel disponible après rappel de la donation de 2004 : - Part dans l’abattement global : (762.250/2.089.500) X 50.000 Reste imposable :

565.000 300.000 865.000 76.000 13.520 775.480 762.250 4.000 18.240 740.010

e) Calcul des droits de mutation exigibles Jean et Sophie ont reçu chacun de leur père 70.000 € par donation en 2004 (20.000 € représentant la valeur à l’époque des 10 actions reçues en pleine propriété et 70.000 € représentant la valeur à l’époque des 50 actions en nue-propriété). L’abattement étant alors de 46.000 €, 24.000 ont alors été taxés. La tranche de 5 % (7.600 €) a donc été entièrement utilisée, celles de 10 % (de 7.600 à 11.400 €) et de 15 % (de 11.400 à 15.000 €) aussi, et la tranche de 20 % (de 15.000 à 520.000 €) a été utilisé à hauteur de 9.000 €. La taxation de la

transmission successorale aux enfants devra donc être faite à partir de la tranche de 20 % dont 496.000 (520.000 – 24.000) demeurent disponibles. Quant à Marie, elle n’a encore subi aucune taxation, les droits afférents à la réversibilité d’usufruit n’étant exigibles qu’au décès du disposant. i. Si Marie opte pour l’usufruit * Marie (1.243.750 X 35 %) - 97.130 :

338.182,50

* Jean et Sophie, chacun 496.000 X 20 % : 9.875 X 30 % : Total (505.875) :

99.200 2.962,50 102.162,50

ii. Si Marie opte pour de la pleine propriété * Marie (775.480 X 30 %) – 54.630 :

178.014

* Jean et Sophie, chacun 496.000 X 20 % : 244.010 X 30 % : Total (740.010) :

99.200 73.203 172.403

SI LA SUCCESSION DE MARIE VIENT ENSUITE À S’OUVRIR EN L’ÉTAT Observations préliminaires Jean et Sophie lui succèderont pour moitié, et les seules libéralités faites par leur mère leur ayant été adressées exactement pour moitié, il n’y a pas à se demander si la réserve est atteinte : elle est nécessairement indemne. Pour la constitution de la masse partageable, il n’y a pas non plus lieu à faire état des rapports pour les raisons déjà dites à propos de la succession de Pierre : il n’y aura donc qu’à partager les biens existants. En revanche, les donations devront être comptabilisées dans la liquidation fiscale pour le calcul des droits au titre du rappel des donations de moins de six, avec exactement les mêmes conséquences sur les abattements puisque ces donations ont été faites pour moitié par chacun des époux. Naturellement, l’usufruit des 200 actions qui avait été reversé sur la tête de Marie aura disparu. On trouvera aussi dans la succession de Marie, le montant des droits de mutation qu’elle doit au titre de la succession de Pierre. Au titre des particularités, on signalera que l’appartement de Clermont-Ferrand pourrait éventuellement bénéficier d’une exonération de droit à hauteur des trois quart plafonnée à 46.000 € par part s’il répondait aux conditions de l’art. 793-2,6° CGI (acquisition entre le 1 er

août 1995 et le 31 déc. 1996, location pour habitation principale pour neuf ans…). On supposera que ce n’est pas le cas. Pour le reste, tout dépend du fait que Marie a pu opter pour l’usufruit de la succession de Pierre ou pour des droits successoraux en pleine propriété : dans le premier cas, ses droits en usufruit se seront éteints à son décès et les enfants auront recouvrer la pleine propriété de la succession de leur père sans droits supplémentaires (art. 1965 G CGI) ; dans le second cas, seul le droit d’usage et d’habitation constitutif du droit viager au logement aura disparu (si l’on suppose qu’il a été exercé) ; pour le reste, une seconde taxation aura lieu puisqu’il y aura eu une seconde mutation en pleine propriété. Liquidation civile 1. Masse partageable a) dans l’hypothèse où Marie a opté pour des droits successoraux en usufruit Actif - Biens repris en nature : * appartement de Clermont-Ferrand : * maison rue Oberkampf - Moitié du boni de communauté : Ensemble :

90.000 1.000.000 2.100.000 3.190.000

Passif - Récompenses dues à la communauté : - Passif fiscal : Actif net Revenant à Jean et Sophie pour moitié, soit :

240.000 338.182 2.611.818 1.305.909

b) dans l’hypothèse où Marie a opté pour des droits successoraux en propriété Actif - Biens repris en nature : * appartement de Clermont-Ferrand : * maison rue Oberkampf - Moitié du boni de communauté : - Droits en propriété dans la succession de Pierre : Ensemble : Passif - Récompenses dues à la communauté : - Passif fiscal : Actif net Revenant à Jean et Sophie pour moitié, soit : Liquidation fiscale

90.000 1.000.000 2.100.000 475.000 3.665.000 240.000 178.014 3.246.986 1.623.493

a) Si Marie a opté pour des droits en usufruit dans la succession de Pierre 1. Actif taxable - Biens repris en nature : - Moitié du boni de communauté : - Forfait mobilier de 5 % : (1.090.000 + 2.100.000 – 240.000) X 5% Ensemble : 2. Passif déductible - Récompense due à la communauté : - Passif fiscal : 3. Actif net de succession : - Dont la moitié pour chacun est de :

1.090.000 2.100.000 147.500 3.337.500 240.000 338.182 2.759.318 1.379.659

4. Détermination des parts imposables * Jean et Sophie, chacun Montant de leur part : - Abattement personnel disponible après rappel de la donation de 2004 : - Part dans l’abattement global (1/2) : Reste imposable :

1.379.659 4.000 25.000 1.350.659

5. Calcul des droits de mutation exigibles Comme dans la succession de Pierre, les tranches de 5, 10 et 15 % ont été utilisées par les donations de 2004 ; la taxation de la transmission successorale va donc débuter à la tranche de 20 % dont 496.000 demeurent disponibles : * Jean et Sophie, chacun : - 496.000 X 20 % : - 330.000 X 30 % : - 524.659 X 35 % : Total (1.350.659) :

99.200 99.000 183.630,65 381.830,65

b) Si Marie a opté pour des droits en pleine propriété dans la succession de Pierre 1. Actif taxable - Biens repris en nature : - Moitié du boni de communauté : - Droits en propriété dans la succession de Pierre :

1.090.000 2.100.000 475.000

- Forfait mobilier de 5 % : (1.090.000 + 2.100.000 + 475.000 – 240.000) X 5% Ensemble :

171.250 3.836.250

2. Passif déductible

- Récompense due à la communauté : - Passif fiscal : 3. Actif net de succession : - Dont la moitié pour chacun est de :

240.000 338.182 3.258.068 1.629.034

4. Détermination des parts imposables * Jean et Sophie, chacun Montant de leur part : - Abattement personnel disponible après rappel de la donation de 2004 : - Part dans l’abattement global (1/2) : Reste imposable :

1.629.034 4.000 25.000 1.600.034

5. Calcul des droits de mutation exigibles * Jean et Sophie, chacun : - 496.000 X 20 % : - 330.000 X 30 % : - 774.034 X 35 % : Total (1.600.034) :

99.200 99.000 270.911,90 469.111,90

La fiscalité de la transmission du patrimoine conjugal (5.000.000) est ainsi très lourde : - Si Marie a succédé en usufruit, les droits payés pour la transmission définitive du patrimoine aux enfants se seront élevés à 1.306.168 (338.182 et 102.162 X 2 dans la succession de Pierre + 381.831 X 2 dans la succession de Marie). - Si Marie a succédé en propriété, les droits payés se seront élevés à 1.461.044 (178.014 et 172.403 X 2 dans la succession de Pierre + 469.112 X 2 dans la succession de Marie). Pour alléger la charge fiscale, on peut envisager diverses mesures : On n’insistera pas sur : - les transmission de titres avec engagement de conservation : art. 787 B CGI : Sont exonérées de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur, les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès ou entre vifs si les conditions suivantes sont réunies : a. Les parts ou les actions mentionnées ci-dessus doivent faire l'objet d'un engagement collectif de conservation d'une durée minimale de deux ans en cours au jour de la transmission, qui a été pris par le défunt ou le donateur, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit, avec d'autres associés ; b. L'engagement collectif de conservation doit porter sur au moins 20 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s'ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé ou, à défaut, sur au moins 34 %, y compris les parts ou actions transmises. Ces pourcentages doivent être respectés tout au long de la durée de l'engagement collectif de

conservation. Les associés de l'engagement collectif de conservation peuvent effectuer entre eux des cessions ou donations des titres soumis à l'engagement. L'engagement collectif de conservation est opposable à l'administration à compter de la date de l'enregistrement de l'acte qui le constate. Dans le cas de titres admis à la négociation sur un marché réglementé, l'engagement collectif de conservation est soumis aux dispositions de l'article L. 233-11 du code de commerce. Pour le calcul des pourcentages prévus au premier alinéa, il est tenu compte des titres détenus par une société possédant directement une participation dans la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de conservation visé au a et auquel elle a souscrit. La valeur des titres de cette société qui sont transmis bénéficie de l'exonération partielle à proportion de la valeur réelle de son actif brut qui correspond à la participation ayant fait l'objet de l'engagement collectif de conservation ; L'exonération s'applique également lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans une société qui détient les titres de la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement de conservation. Dans cette hypothèse, l'exonération partielle est appliquée à la valeur des titres de la société détenus directement par le redevable, dans la limite de la fraction de la valeur réelle de l'actif brut de celle-ci représentative de la valeur de la participation indirecte ayant fait l'objet d'un engagement de conservation. Le bénéfice de l'exonération partielle est subordonné à la condition que les participations soient conservées inchangées à chaque niveau d'interposition pendant toute la durée de l'engagement collectif. c. Chacun des héritiers, donataires ou légataires prend l'engagement dans la déclaration de succession ou l'acte de donation, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit, de conserver les parts ou les actions transmises pendant une durée de six ans à compter de la date d'expiration du délai visé au a. d. L'un des associés mentionnés au a ou l'un des héritiers, donataires ou légataires mentionnés au c exerce effectivement dans la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de conservation, pendant les cinq années qui suivent la date de la transmission, son activité professionnelle principale si celle-ci est une société de personnes visée aux articles 8 et 8 ter, ou l'une des fonctions énumérées au 1º de l'article 885 O bis lorsque celle-ci est soumise à l'impôt sur les sociétés, de plein droit ou sur option ; e. La déclaration de succession ou l'acte de donation doit être appuyée d'une attestation de la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de conservation certifiant que les conditions prévues aux a et b ont été remplies jusqu'au jour de la transmission. f. En cas de non-respect de la condition prévue au c par suite de l'apport de titres d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale à une société dont l'objet unique est la gestion de son propre patrimoine constitué exclusivement d'une participation dans la société dont les parts ou actions ont été transmises, l'exonération partielle n'est pas remise en cause si les conditions suivantes sont réunies : 1º La société bénéficiaire de l'apport est détenue en totalité par les personnes physiques bénéficiaires de l'exonération. Le donateur peut toutefois détenir une participation directe dans le capital social de cette société, sans que cette participation puisse être majoritaire. Elle est dirigée directement par une ou plusieurs des personnes physiques bénéficiaires de l'exonération. Les conditions tenant à la composition de l'actif de la société, à la détention de son capital et à sa direction doivent être respectées à l'issue de l'opération d'apport et jusqu'au terme de l'engagement mentionné au c ; 2º La société bénéficiaire de l'apport prend l'engagement de conserver les titres apportés jusqu'au terme de l'engagement prévu au c ; 3º Les héritiers, donataires ou légataires, associés de la société bénéficiaire des apports doivent conserver, pendant la durée mentionnée au 2º, les titres reçus en contrepartie de l'opération d'apport. A compter de la transmission et jusqu'à l'expiration de l'engagement collectif de conservation visé au a, la société doit en outre adresser, dans les trois mois qui suivent le 31 décembre de chaque année, une attestation certifiant que les conditions prévues aux a et b sont remplies au 31 décembre de chaque année. Les dispositions du présent article s'appliquent en cas de donation avec réserve d'usufruit à la condition que les droits de vote de l'usufruitier soient statutairement limités aux décisions concernant l'affectation des bénéfices. Cette exonération n'est alors pas cumulable avec la réduction prévue à l'article 790.

Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives incombant aux redevables et aux sociétés.

La question sera traitée par H. Hovasse ; - la constitution d’une société civile avec clause de tontine dans les statuts : là encore, la question sera probablement traitée par H. Hovasse. On rappellera simplement que la clause de tontine insérée dans une coacquisition ne permet pas d’échapper à la taxation au droits de succession (sauf pour les immeubles affectés à l’habitation commune et dont la valeur n’excède pas 76.000 euros). En revanche, lorsque la tontine est insérée dans les statuts de la société, seuls sont dus les droits de mutation à titre onéreux cf. 87e congrès des notaires, 1991, p. 148 ; Raffray, Tontine et société, JCP N 1988, I, n° 33). Les parents peuvent ainsi constituer une société avec leurs enfants et stipuler dans les statuts une clause d’accroissement par laquelle, en cas de prédécès de l’un d’eux, les autres associés deviendront propriétaires de leurs droits sociaux. Le survivant des associés est ainsi réputé propriétaire de la totalité des actions. Simplement, lors du décès de l’un des associés, le « transfert » des droits sociaux au profit des survivants entraîne le paiement du droit prévu pour les mutations à titre onéreux (Rép. Rufenacht, AN 8 sept. 1979, p. 7151). - la clause d’imputation des donations faites aux enfants sur la succession du prémourant : cela permettrait de mieux équilibrer les transmissions, mais le gain fiscal serait assez limité. Si rien n’a été fait au décès du 1er époux, il faut suggérer à l’épouse d’anticiper la dévolution de sa succession de manière à profiter des diverses faveurs fiscales à l’anticipation : en particulier de la reconstitution tous les six ans des abattements et tranches basses qui permet de lisser la transmission en bénéficiant au mieux de la progressivité de l’impôt successoral. On peut en même temps jouer sur l’assiette de l’impôt, par exemple en transmettant la nue-propriété (V. infra) ou bien en souscrivant de l’assurance-vie. On peut aussi transmettre par anticipation de la pleine propriété de manière à profiter de la réduction des droits de 50 % que l’article 790 II CGI prévoit lorsque le donateur a moins de soixante-dix ans (30 % lorsqu’il a entre 70 ans révolus et 80 ans). Le tout sans préjudice évidemment de la prise en charge des droits de mutation par le donateur de manière à pouvoir bénéficier d’un gain supplémentaire. Dès le décès de l’époux prédécédé, on peut songer à une donation-partage cumulative ; cela permet à l’épouse : 1° de disposer en avancement d’hoirie à ses enfants, de manière à anticiper la dévolution de sa succession et ainsi leur faire profiter de la reconstitution des abattements et des tranches basses de l’impôt sur les successions après six ans : si sa succession ne s’ouvre pas avant six ans suivant la donation-partage, ils profiteront à nouveau entièrement de la progressivité de l’impôt successoral ; 2° de faire le partage confondu de ce dont elle dispose et de la succession de son mari, ce qui peut faciliter les allotissements. Si l’épouse se réserve en outre un usufruit sur ce qu’elle transmet, elle pourra conserver la jouissance de ses biens tout en faisant profiter ces enfants de l’avantage fiscal résultant de la reconstitution en franchise de droits de la pleine propriété. La donation-partage cumulative consiste en une donation-partage confondue avec un partage de succession : il y a un seul partage, mais deux transmissions au profit des enfants : l’une qui procède d’une donation de Marie et l’autre qui procède de la succession de Pierre. Le partage

étant confondu, on n’a pas à se demander quel bien procède du père et quel bien procède de la mère ; ce qui compte exclusivement, c’est l’importance de ce que chacun apporte au partage : si un enfant reçoit exclusivement des biens qui procèdent du père et l’autre des biens qui procèdent de la mère, il n’empêche qu’ils seront réputés avoir reçu chacun dans les mêmes proportions du père et de la mère : si le père et la mère ont apporté chacun la moitié des biens à partager, chaque enfant sera réputé tenir la moitié de son lot de son père et l’autre moitié de sa mère ; si le père à apporter les deux tiers et la mère le tiers restants, chaque enfant tiendra de chacun de ses parents à due concurrence. C’est ce que l’on appelle la règle de l’émolument théorique. Rq. Il reste que la donation-partage cumulative est plus fragile qu’une donation-partage ordinaire ou conjonctive, parce qu’elle associe un partage d’ascendant à un partage ordinaire : elle doit donc respecter les règles propres à chaque acte ; en particulier : - tous les enfants communs, successeurs du de cujus et héritiers présomptifs du survivant doivent être appelés à la distribution et aux partages confondus et doivent y consentir à l’unanimité ; en conséquence, la présence d’un mineur obligerait à recourir à l’homologation judiciaire ; l’omission d’un enfant serait sanctionnée de nullité. - l’égalité du partage doit être absolument respectée, la donation-partage cumulative demeurant sujette à rescision pour lésion. Mais le plus intéressant aurait évidemment consisté à faire une donation-partage conjonctive du vivant de Pierre. Les deux époux ayant moins de soixante ans, la disposition par chacun d’eux de la nue-propriété de partie de leur patrimoine serait en effet la plus avantageuse, car il y aurait ainsi dédoublement des avantages fiscaux. Encore faut-il décider ce qui sera inclus dans la donation-partage, car plusieurs combinaisons sont compatibles avec le souci d’optimisation fiscale des époux : - étant jeune, ils peuvent souhaiter ne transmettre de droits à leurs enfants qu’à hauteur des abattements dont ils profitent (soit 50.000 euros chacun, l’abattement global de 50.000 € n’étant applicable qu’aux successions (art. 775 ter), ce que n’est pas une donation-partage) : dans ce cas, les époux devront attendre 4 ans avant de pouvoir faire la donation-partage et procéder à une nouvelle donation à leur profit après 6 ans supplémentaires (ils auront encore moins de 70 ans) ; - mais eu égard à la consistance du patrimoine, cela ne permettra que de transmettre une faible partie en franchise de droit ; et c’est pourquoi les époux veulent certainement donner davantage de manière à profiter à chaque fois des tranches basses de l’impôt successoral (5, 10, voire 15 et 20 %, ce qui permet de donner à chacun jusqu’à 520.000 euros : mais il faut pour cela attendre 4 ans de manière à profiter de la reconstitution des tranches basses de l’imposition) ; et la taxation devrait être d’autant plus supportable que la donation faite en nue-propriété devrait bénéficier de la réduction des droits de l’article 790 I CGI suivant lequel : « Les donations en nue-propriété bénéficient sur les droits liquidés en application des articles 777 et suivants d'une réduction de 35 % lorsque le donateur est âgé de moins de soixante-dix ans [65 avant le 1.1.2006] et de 10 % lorsqu'il est âgé de soixante-dix ans révolus et de moins de quatre-vingts ans [75 avant le 1.1.2006] . Ces réductions s'appliquent à concurrence de la fraction de la valeur des biens transmis représentative directement ou indirectement de la nue-propriété de biens. Ces dispositions s'appliquent aux donations consenties avec réserve du droit d'usage ou d'habitation. »

-

Par ailleurs, les époux peuvent vouloir assurer le maximum de bien être au conjoint survivant : dans ce cas ils peuvent se contenter de la vocation légale que la loi attribue au survivant dans la succession du prédécédé ; mais on l’a vu, la fiscalité demeure d’autant plus lourde que l’usufruitier est jeune. Pour éviter toute soumission de cette attribution en usufruit aux droits de mutation à titre gratuit, ils peuvent songer à faire d’abord un changement de régime matrimonial en passant à la communauté universelle avec attribution intégrale ou en partie au conjoint survivant en usufruit ; l’apport par chaque époux de ses immeubles propres à la communauté aura en outre l’avantage de diviser par deux la charge fiscale de la transmission de leur propriété aux enfants dans la mesure où la transmission sera ainsi censée faite pour moitié par chaque époux (mais le passage du statut d’immeuble propre à celui d’immeuble commun aura constitué une mutation immobilière soumise à publicité foncière et donc justiciable de la TPF (2,60% + salaire du conservateur) à hauteur des droits transférés à l’autre époux (1/2). Et au décès de l’un des époux, le notaire rédacteur du contrat modificatif pourra percevoir des honoraires calculés sur la valeur des droits recueillis par le survivant en vertu de l’avantage à cause de mort (environ 1 %) ; également, il faudra établir une attestation immobilière et publier le changement d’appropriation des immeubles communs. Mais cela suppose certaines précautions : - ce changement de communauté est constitutif d’avantages matrimoniaux pour le survivant (avantage tiré de l’attribution en usufruit de la communauté au survivant) et pour celui des époux dont les propres sont les moins importants (Pierre en l’occurrence). Or l’onérosité des avantages matrimoniaux (art. 1527) ne vaut que dans la mesure où tous les enfants sont communs : s’il y a des enfants d’un autre lit même adultérins, les avantages matrimoniaux seront regardés comme des libéralités pour déterminer la consistance et l’intégrité de la réserve héréditaire. Il faut donc être assuré que le couple est stable… - en outre, s’il y a divorce, les avantages matrimoniaux qui ont pris effet pendant le cours du régime matrimonial (donc les apports en communauté) sont désormais irrévocables, ceux qui ne prennent effet qu’à la dissolution du régime étant révoqués sans qu’il y ait à considérer les torts dans le divorce (art. 264 c. civ.). C’est pourquoi, il est prudent d’insérer dans le contrat de mariage une clause de liquidation alternative de la communauté suivant que la dissolution du mariage a lieu par le décès de l’un des époux ou par divorce : ainsi que M. Simler l’a démontré de manière définitive cette clause est parfaitement valable et efficace parce qu’elle est le contraire d’un avantage matrimonial (elle empêche sa naissance). - enfin, il peut être bon de doubler le changement de régime matrimonial d’un testament par chaque époux (en prenant garde de ne pas faire un testament conjonctif) au terme duquel le conjoint est privé de ses droits de succession, de manière à ce qu’après avoir reçu l’usufruit de tout le patrimoine en vertu de la clause d’attribution intégrale il ne prétende pas en outre à des droits en (nue) propriété dans la succession du prédécédé au préjudice des enfants. Dans le cas présent, si l’on suppose ce changement de régime matrimonial effectué, le patrimoine commun est de 5.000.000 : on suppose que les époux ont renoncé aux droits à récompenses en leur faveur ou en faveur de la communauté à l’occasion du changement de régime. Quatre ans plus tard, les deux époux font donation-partage de la nue-propriété de : - leurs immeubles (valeur : 1.990.000/2) : 995.000 - 259 actions de la SAS Ribou * : 388.500 * de manière à conserver 501 actions en pleine propriété et 459 en usufruit

- leur portefeuille titre : Ensemble : Provenant de Marie et Pierre pour moitié, soit : Droits reçus par chaque enfant de chaque ascendant :

227.500 1.611.000 805.500 402.750

Les abattements et les tranches basses de l’impôt successoral étant reconstitués, les droits à payer au titre de chaque donation seront de : Base taxable : Abattement : Reste taxable : Application du tarif : (352.750 X 20 %) – 1.700 Réduction de droits de 35 % : Restent dus

402.750 50.000 352.750 68.850 24.097 44.753

Chaque enfant devra donc payer au total : 89.506 De sorte qu’il recevra une valeur nette de droits de : 715.994 402.750 X 2 – 89.506 Le taux d’imposition est ainsi approximativement de 11,11% (89.506/805.500 X 100) RQ. On a fait abstraction de la taxe de publicité foncière et des frais accessoires à celle-ci. RQ. En prenant à leur charge, les droits de mutation, les donateurs pourraient transmettre, sans débourser davantage 805.500 X 100 (100 + 11,11), soit : 724.957. On ne fera pas application de cette possibilité s’agissant de transmettre des biens en nature sur la valeur desquels on conçoit mal une imputation des droits de mutation. Au décès d’un époux (dont on suppose qu’il intervient plus de 6 ans après la donationpartage, de sorte que celle-ci échappe à la règle du rappel), l’autre recevrait l’usufruit de tout le patrimoine (5.000.000) en franchise de droits de mutation : valeur actuelle 2.500.000 (mais elle serait d’autant plus diminuée que le décès surviendrait tard). Il resterait dans le patrimoine commun (on retiendra les biens pour leur valeur actuelle) : Actif : - 501 actions SAS Ribou : - PEP assurance : - PEA : Ensemble :

1.503.000 135.000 90.000 1.728.000

Passif : néant Boni de communauté : Revenant pour moitié à l’époux survivant : Et pour un quart à chaque enfant : Part imposable de chaque enfant : Abattement personnel :

1.728.000 864.000 432.000 432.000 50.000

Part dans l’abattement global : Reste imposable : Droits dus par chaque enfant (357.000 X 20 %) - 1.700

25.000 357.000 69.700

Quand l’époux survivant viendra à son tour à décéder, la transmission portera sur les 864.000 € de biens conservés par lui en pleine propriété et la fiscalité sera la même. Au total, 457.812 € de droits auront été payés (89.506 X 2 dans la donation-partage, 69.700 X 2 dans la succession du père et autant dans la succession de la mère). Au total, les droits seront de moins de la moitié de ce qu’ils auraient été si rien n’avait été organisé.

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