Analecta Bollandiana - Volume 133, Issue 2 - 2015.pdf

May 9, 2017 | Author: Noui Testamenti Lector | Category: N/A
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A NALECTA

ANALECTA BOLLANDIANA Revue critique d’hagiographie – A Journal of Critical Hagiography

ANALECTA BOLLANDIANA

La Revue paraît deux fois par an

The Journal is published twice a year

B OLLANDIANA

(en juin et enparaît décembre); La Revue deuxchaque fois par an livraison compte 240 pages. (en juin et en décembre); chaque livraison compte 240 pages.

(in June and December) in issues The Journal is published twiceof a 240 pages each. year (in June and December) in issues of 240 pages each.

Volume 134 (2016)

Volume 131 (2013) Abonnement Papier 3UL[GHO¶DERQQHPHQW

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2015 — ANALECTA BOLLANDIANA. — T. 133-II

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TOME 133 II – décembre 2015

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SOMMAIRE / CONTENTS

Analecta Bollandiana: vol. 1 (1882) – 127 (2009)

Xavier LEQUEUX. La Passion grecque abrégée de sainte Cyprille, martyre à Cyrène en Libye (BHG 2093) . . . . . . . 241

Each annual volume (2 issues): 110 € 25 € + shipping Minimum purchase of 4 volumes

Sergey A. IVANOV. The Right Hand Fetid, the Left Unclean. An Unknown Byzantine Spiritually Beneficial Tale . . . . . . 249

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Francesco MARZELLA. Al diavolo la tassa ! Un episodio interpolato della Vita S. Ædwardi regis et confessoris di Aelredo di Rievaulx 256

SUBSIDIA HAGIOGRAPHICA 94

Cécile LANÉRY. Hagiographie et prédication: le légendier CharlevilleMézières, BM, 177. . . . . . . . . . . . . 282

Saint Jean, higoumène de Scété (VIIe s.) Vie arabe et épitomé éthiopien

François DOLBEAU. Prologue inédit d’un homéliaire-légendier des anciens Pays-Bas . . . . . . . . . . . . . 350 Bernard JOASSART. Correspondance des bollandistes A. Tinnebroeck, É. Carpentier, H. Matagne, R. De Buck, C. De Smet, G. Van Hooff, J. Van den Gheyn et H. Delehaye avec Jean Gagarin et Jean Martynov . . . . . . . . . . . . . . 362 Jean-Marie SANSTERRE. Signes de sainteté et vecteurs de virtus dans les miracles posthumes du carme Albert de Trapani relatés aux XIVe-XVe siècles . . . . . . . . . . . . . 433

Bulletin des publications hagiographiques

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Publications reçues

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Index Sanctorum .

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Index operum recensitorum

Table des matières – Table of Contents

Édités et traduits par Ugo ZANETTI 2015, 288 p.

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TABULARIUM HAGIOGRAPHICUM 7

Au service de la réconciliation des Églises Jean Gagarin, Jean Martynov et Victor De Buck Correspondance Présentation, édition et commentaire par R. DANIELUK et B. JOASSART € 45*

2014, 1320 p. [p. 81 à 1284 sur CD-ROM] Standing order for the Collection: 10 % discount

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Résumés – Summaries: 248, 255, 278, 345, 356, 441 Ce numéro a paru le 30 décembre 2015 ISSN 0003-2468

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Querelles autour de l’hagiographie bretonne à la fin du XIX e s. Dom François Plaine et les Bollandistes Correspondance Présentation, édition et commentaire par Philippe GUIGON 2015, 128 p.

REVUE SUBVENTIONNÉE PAR LA FONDATION UNIVERSITAIRE

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Xavier LEQUEUX LA PASSION GRECQUE ABRÉGÉE DE SAINTE CYPRILLE MARTYRE À CYRÈNE EN LIBYE (BHG 2093)*

Les synaxaires byzantins honorent la mémoire de la martyre Cyprille tantôt le 4 juillet, tantôt le jour suivant1. Les notices disponibles rapportent l’histoire d’une femme de Cyrène, restée veuve pendant 28 ans2, après deux ans de mariage, sous le règne de Dioclétien. Souffrant d’un mal de tête intense, Cyprille va trouver l’évêque Théodore, alors en prison, pour qu’il la guérisse. Une fois soulagée, elle reste au service du saint homme, en compagnie de deux autres femmes, Lucie et Arhoa. Après le martyre de l’évêque, que les synaxaires commémorent également le 4 juillet3, Cyprille est traînée devant le gouverneur qui a fait exécuter Théodore4. On jette dans la main de la femme des charbons ardents et de l’encens afin de sacrifier aux idoles, ce qu’elle refuse de faire en objectant que l’acte qu’on lui impose n’est pas un sacrifice offert volontairement5. La main entièrement consumée, Cyprille est suspendue à un poteau et flagellée; elle décède, tandis que du sang s’écoule de ses blessures et que du lait suinte de sa poitrine. Comme on le verra par la suite, une courte Passion inédite apporte quelques variantes, ainsi que des précisions complémentaires. Elle est * Le prof. J. Noret a bien voulu examiner un premier jet de cet article. Qu’il en soit remercié. Nous sommes évidemment seul responsable des inexactitudes qui pourraient subsister. 1

Voir Synax. CP, col. 798, l. 11-29, et col. 799-800, l. 42-51, avec une préférence pour le 5 juillet, semble-t-il. Ajouter la notice du «Ménologe de Basile II»: PG 117, col. 524D-525A. 2

Col. 798, l. 13: lire χηρείᾳ ἔτη εἰκοσιοκτώ et non χηρείᾳ, ἔτει εἰκοσιοστῷ.

3

Voir Synax. CP, col. 796, l. 28 à 798, l. 10. Le Martyrologe pseudo-hiéronymien honore l’évêque de Pentapole (Cyrénaïque), en compagnie du diacre Irénée et des lecteurs Sérapion et Ammon, les 26 mars et 6 avril: Comm. martyr. hieron., p. 162-163 et 176-177. Les Byzantins ne semblent pas avoir conservé le souvenir de ces trois compagnons, tandis que le Martyrologe pseudo-hiéronymien ignore l’existence des jeunes filles entourant Théodore, ainsi que celle du sénateur Lucius, dont il sera question plus loin. N’aurait-on pas affaire à deux évêques homonymes de Pentapole ? Malheureusement, aucune Passion latine de l’évêque Théodore, dont la lecture permettrait peut-être de résoudre l’énigme, n’a été repérée à ce jour. 4

La notice du Synax. CP relative à Théodore de Cyrène (col. 796-798) précise le nom du magistrat: Διγνιανός. 5 Le stratagème du persécuteur consistait à jeter des charbons ardents dans la main du futur martyr, afin que ce dernier les laisse finalement tomber sur l’autel et semble ainsi avoir sacrifié aux idoles. Le même simulacre est proposé, en vain, au martyr Procope de Palestine, honoré le 8 juillet: cf. H. DELEHAYE, Les légendes grecques des saints militaires, Paris, 1909, p. 225-226 (chap. 18 de la Passion BHG 1576).

Analecta Bollandiana, 133 (2015), p. 241-248.

X. LEQUEUX

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transmise, à notre connaissance, par deux témoins dérivant d’un archétype déjà corrompu6: les manuscrits Vaticanus gr. 2014 (Bas. 53), XIIe s., parch., f. 111-113 (sigle V)7, et Andros, Μονὴ τῆς Ζωοδόχου Πηγῆς ἢ τῆς Ἁγίας 65, XVe s., pap., f. 195-198v (sigle A)8. Le texte qu’on découvrira plus loin laisse deviner que le persécuteur, alias le gouverneur Diognianus9, fut lui-même converti, plus tard, par un certain Lucius. Cette conversion est rapportée dans le résumé d’une Passion perdue de Théodore, évêque de Cyrène (BHG 2428)10 et dans la Passion abrégée du sénateur Lucius de Cyrène (BHG 2243), qui s’en inspire11. Le premier de ces textes mentionne, dans l’entourage de l’évêque, la présence de trois femmes, lesquelles sont également condamnées à l’épreuve suprême. L’hagiographe donne leurs noms — en l’occurrence Lucie, Arhoa et la très belle Cyprille — mais ne souffle mot sur la nature des tourments qui leur seront imposés. La Passion inédite de Cyprille vient combler en partie la lacune. Si l’on en croit cette nouvelle source, Cyprille refusa de se prêter à un simulacre de sacrifice et posa sa main sur l’autel brûlant. Furieux, le persécuteur, encore et toujours le gouverneur Diognianus, la fit écorcher vive. On vit alors du lait suinter des seins de la martyre et se mêler au sang qui s’échappait de ses blessures. L’écoulement du lait s’intensifia au point que les linges servant à l’ensevelissement furent complètement détrempés ! Suite à une prière prononcée par Arhoa, le flot de lait s’arrêta et la dépouille de Cyprille, qui dégageait une indicible fragrance12, fut transportée dans une grotte. Arhoa incisa sur la roche une croix, dans le creux de la6

Voir à ce sujet la note 3 de la traduction.

7

Ce manuscrit originaire d’Italie du Sud renferme une collection non ménologique: A. EHRHARD, Überlieferung und Bestand der hagiographischen und homiletischen Literatur der griechischen Kirche..., t. 3 (= Texte und Untersuchungen, 52), Leipzig, 1952, p. 746-747. 8 La pièce qui nous intéresse n’est pas signalée dans la notice de S. P. LAMPROS, Κατάλογος τῶν ἐν τῇ κατὰ τὴν Ἄνδρον μονῇ τῆς Ἁγίας κωδίκων, Athènes, 1898, p. 65. Nous remercions la Section grecque de l’Institut de Recherche et d’Histoire des Textes (CNRS), de nous avoir permis de visionner un microfilm de ce codex. 9

Au lieu de Dignianus.

10

§ 5-6 (éd. V. V. LATYŠEV, Menologii anonymi byzantini saec. X quae supersunt, II, Saint-Pétersbourg, 1912 [repr. Leipzig, 1970], p. 139-140). 11 12

Éd. F. HALKIN, Saint Lucius de Cyrène en Libye, in AB, 103 (1985), p. 231-232.

Les exemples de fragrance flottant autour du saint au moment de sa mort ne manquent pas: cf. par ex. B. CASEAU, Parfum et guérison dans le christianisme ancien et byzantin: des huiles parfumées des médecins au myron des saints byzantins, in Les Pères de l’Église face à la science médicale de leur temps, éd. V. BOUDON-MILLOT – B. POUDERON (= Théologie historique, 117), Paris, 2005, p. 141-191, en particulier 147-148.

LA PASSION GRECQUE (BHG 2093) DE CYPRILLE

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quelle les malades pouvaient puiser de la rosée, qui avait des vertus curatives, et on érigea finalement un sanctuaire en l’honneur de la martyre. Contrairement à ce qu’annonce le titre de la Passion, le texte ne fournit aucune précision sur le sort ultime des compagnes de Cyprille. Le curieux incident survenu au début des funérailles de Cyprille mérite d’être retenu. Décidément, l’imagination débordante des hagiographes ne connaît aucune limite. Société des Bollandistes

Xavier LEQUEUX

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ΜΑΡΤΥΡΙΟΝ ΕΝ ΣΥΝΤΟΜΩ ΤΩΝ ΑΓΙΩΝ ΚΑΙ ΕΝΔΟΞΩΝ ΤΟΥ ΧΡΙΣΤΟΥ ΜΑΡΤΥΡΩΝ ΚΑΙ ΑΘΛΗΦΟΡΩΝ ΓΥΝΑΙΚΩΝ ΚΥΠΡΙΛΛHΣ, ΑΡΩΑΣ1 ΚΑΙ ΛΟΥΚΙΑΣ2 Α = Androus, Monast. τῆς Ζωοδόχου Πηγῆς, 65, saec. XV, f. 195-198v V = Vaticanus gr. 2014 (Bas. 53), saec. XII, f. 111-113 1. Ἡ ἁγία μάρτυς Κυπρίλλα ἦν ἐπὶ Διοκλητιανοῦ τοῦ βασιλέως, ἐκ πόλεως Κυρίνης τῆς κατὰ Λιβύην, χριστιανῶν γονέων καὶ εὐγενῶν ὑπάρχουσα θυγάτηρ. Ζευχθεῖσα δὲ ἀνδρί, ἔτος ἄγουσα τεσσαρεσκαιδέκατον, καὶ τούτῳ συζήσασα ἔτη δύο ἥμισυ1, τελευτήσαντος αὐτοῦ, ἔμεινεν ἐν τῇ χηρείᾳ ἔτη κη´ ἥμισυ. Nόσου δὲ κεφαλικῆς ἐπελθούσης αὐτῇ2, κινδυνεύουσα ᾐτήσατο τοὺς γονεῖς αὐτῆς τοῦ ἀπελθεῖν πρὸς τὸν ἅγιον Θεόδωρον τὸν ἐπίσκοπον Κυρίνης. < . . . > τῷ τότε χρόνῳ ἐν φυλακῇ3 διὰ τὸν Χριστὸν ἐγκεκλεισμένῳ ὄντι καὶ βασανιζομένῳ, ὅπως διὰ τῆς ἁγίας αὐτοῦ εὐχῆς δυνηθῇ ἰαθῆναι ἀπὸ τῆς πιεζούσης αὐτὴν4 νόσου. Kαὶ δὴ τυχοῦσα τῆς ἐξαιτήσεως, ἀπέρχεται πρὸς τὸν μακάριον Θεόδωρον ἐν τῇ φυλακῇ· καὶ προσπεσοῦσα αὐτῷ, ἐδέετο τοῦ ἰαθῆναι. Ὁ δὲ ὅσιος καὶ τρισμακάριος ἐπίσκοπος Θεόδωρος5 παραυτὰ ἀναστάς, καὶ τὸν τίμιον καὶ ζωηφόρον6 σταυρὸν ποιήσας ἐν τῇ κεφαλῇ αὐτῆς, παραχρῆμα ἰάσατο αὐτήν. Ἡ οὖν μακαρία Κυπρίλλα εὑροῦσα ἐν τῇ φυλακῇ ἑτέρας δύο παρθένους7, οὐκ ἠθέλησεν ὑποστρέψαι ἔτι πρὸς τοὺς γονεῖς αὐτῆς, ἀλλ´ ἦν μετὰ τῶν ἐκεῖσε παρθένων Λουκίας καὶ Ἀρώας, ἀκούουσα τῆς διδασκαλίας τοῦ ὁσίου πατρὸς ἡμῶν Θεοδώρου τοῦ ἐπισκόπου.

Tit. 1 Ἀρόας Α || 2 Μηνὶ ἰουλίῳ praem. A || Ἄθλησις τῶν ἁγίων γυναικῶν Κυπρίλλας, Ῥώας καὶ Λουκίας V 1. 1 καὶ add. V || 2 Νόσῳ δὲ κεφαλικῇ ἐπισελθούσης αὐτῆς, καὶ V || 3 ἐν φυλακῇ iter. A || 4 αὐτῆς V || 5 Θεόδωρος ὁ ἐπίσκοπος V || 6 ζωοποιὸν V || 7 παρθένας A

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X. LEQUEUX

2. Τούτου οὖν τελειωθέντος ἐν τῷ ὑπὲρ Χριστοῦ μαρτυρίῳ μετ´ ὀλίγας ἡμέρας, διαβάλλουσι τινὲς Διογνιανῷ1 τῷ ἡγεμόνι καὶ ταύτας τὰς ἁγίας τοῦ Χριστοῦ μάρτυρας. Ὁ δὲ ἡγεμὼν ἐκέλευσεν ἐν τάχει παραστῆναι αὐτάς. Ἀγομένων τοίνυν αὐτῶν πρὸς τὸν ἡγεμόνα, ἄφνω ἐβόησεν ἡ ἁγία Κυπρίλλα· «Ὁ πατὴρ ἡμῶν καὶ μάρτυς Θεόδωρος προπορεύεται ἡμῶν· καὶ ὁρᾶται, ποτὲ μὲν γηραιός, ποτὲ δὲ νέος, ποτὲ δὲ φιλοσόφου σχῆμα καὶ τάξιν φορῶν». Καὶ ὡς ταῦτα ἔλεγε, παρέστησαν τῷ ἡγεμόνι ἥ τε Λουκία καὶ Ἀρῶα2, μέσον ἔχουσαι τὴν μακαρίαν Κυπρίλλαν. Ἐρωτηθεῖσαι δὲ παρὰ τοῦ ἡγεμόνος Διογνιανοῦ, ἔφασαν μαθήτριαι εἶναι Θεοδώρου τοῦ ἁγιωτάτου ἐπισκόπου Κυρίνης καὶ χριστιαναί. Ὁ δὲ ἡγεμὼν ἔτι ἐμμένων πρὸς τὴν εἰδωλικὴν πλάνην3 καὶ μήπω ἀκμὴν ταῖς παραινέσεσι τοῦ4 Λουκίου ζωγρηθεὶς εἰς τὴν τοῦ Χριστοῦ πίστιν, ἔφη πρὸς τοὺς παρεστῶτας αὐτῷ περὶ τῶν ἁγίων τριῶν γυναικῶν· «Πάλιν ἡ φύσις τρικέφαλον ἡμῖν κακὸν ἤνεγκε, τοῦ πατρικοῦ τέρατος εἰκόνα χείρονα παραστήσασα - τὰς τρεῖς ταύτας γυναῖκας φημί - πρώτη μὲν λέαιναν5, ὀπίσω δὲ δράκαιναν6, μέσον7 δὲ τὴν χίμαιραν ταύτην». Τοῦτο8 δὲ ἔφη, ἐφ´ ὕβρει τῶν ἁγίων γυναικῶν, μισῶν καὶ τὸν ἅγιον ἱερομάρτυρα9 Θεόδωρον, καὶ μὴ θέλων ἀκούειν τὸ τούτου10 ἅγιον ὄνομα. 3. Πολλὰ τοίνυν ἀναγκάσας αὐτάς, καὶ τὰ μὲν βίᾳ, τὰ δὲ κολακείᾳ ταύτας ὑπαγαγών, σαλεῦσαι τοῦ προκειμένου σκοποῦ οὐκ ἴσχυσεν. Ἐξαιρέτως δὲ τῷ κάλλει τῆς ἁγίας Κυπρίλλης τρωθείς, φέρειν οὐκ ἠδύνατο. Ἦν γὰρ πάνυ ὡραία καὶ περικαλλής. Ἡ δὲ ἁγία μάρτυς τοῦ Χριστοῦ Κυπρίλλα1 τοῖς λόγοις αὐτοῦ οὐδ´ ὅλως προσεῖχεν· ἀλλ´ ἵστατο γενναία καὶ ἀκλόνητος, καθόπέρ 2 τις ἐρριζωμένη πέτρα, πρὸς τὰς ἐμβολὰς τῶν κυμάτων ἀτίνακτος3. Ἐμβάλλουσι4 δὲ ἐν5 τῇ χειρὶ αὐτῆς λιβανωτὸν βιαίως, ἵνα δόξει6 τεθυκέναι καὶ μὴ θέλουσα· ἡ δὲ μακαρία Κυπρίλλα κράξασα μεγάλῃ τῇ φωνῇ «οὐκ ἔστι τοῦτο θῦσαι, τὸ ἄκοντα τινὰ βιάζεσθαι», παραχρῆμα ἐπέθηκεν τὴν τιμίαν καὶ ἁγίαν χεῖρα αὐτῆς7 ἐπὶ τὸν βωμὸν τῶν ἀνθράκων· καὶ ἐπὶ τοσοῦτον ἐφλέχθη, ὥστε τοὺς δακτύλους καὶ ἅπαντα τὸν κάρπον τῆς χεῖρος αὐτῆς ἐκτακῆναι καὶ τὰ ὀστᾶ γυμνὰ κατακαίεσθαι. Τότε ὀργισθεὶς ὁ ἡγεμὼν Διογνιανός, ὡς ἀποτυχὼν τοῦ σκοποῦ αὐτοῦ τοῦ ματαίου8, ἀναρτήσας αὐτὴν εἰς τὸ ξύλον, ἔξεε πικρῶς. Ξεομένης δὲ αὐτῆς, θαῦμα μέγιστον γέγονεν. Ἱδρὼς γὰρ ἐκ τοῦ τιμίου καὶ ἁγίου αὐτῆς σώματος, καὶ γάλα ἐκ τῶν μαζῶν, μετὰ τοῦ καταρρέοντος αἵματος ποταμηδὸν κατεφέρετο. Τοῦτο τὸ παράδοξον θαῦμα θεασάμενος ὁ ἡγεμών, ἐθαύμασε καὶ ἐκέλευσε καταγαγεῖν αὐτήν. Κατενεχθείσης δὲ αὐτῆς, σφραγισαμένη τῷ τιμίῳ καὶ ζωοποιῷ σταυρῷ, ἐκοιμήθη ἐν Κυρίῳ μηνὶ Ἰουλίῳ η´.

2. 1 Διογενιανῷ A || 2 Ἄρωα Α || 3 ἐν τῇ περὶ τὰ εἴδωλα πλάνῃ V || 4 om. A || 5 λέαινα A || 6 δράκαινα A || 7 μέσην V || 8 Οὗτο A || 9 μεγαλομάρτυρα A || 10 add. τίμιον καὶ V 3. 1 Κυπρίλλας V || 2 καθάπερ A || 3 ἀκλόνητος A || 4 Ἐμβάλουσι V || 5 om. A || 6 δόξει codd. || 7 αὐτῆς χεῖρα A || 8 τοῦ ματαίου om. Α

LA PASSION GRECQUE (BHG 2093) DE CYPRILLE

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4. Τότε εὐωδία πολλὴ ἀνεδόθη ἐκ τοῦ σώματος αὐτῆς τοῦ ἁγίου, ἥτις τὸν ἀέρα καὶ πάντας τοὺς παρεστῶτας ἐπλήρωσεν. Ἐπιτροπῇ δὲ τοῦ ἡγεμόνος Λουκία καὶ Ἀρῶα ἐνταφιάζουσι τὴν ἁγίαν μάρτυρα τοῦ Χριστοῦ1 Κυπρίλλαν· καὶ ἦν τὸ γάλα ποταμηδὸν ἐξ αὐτῆς ἐκφερόμενον καὶ μετὰ τὴν κοίμησιν αὐτῆς τοσοῦτον, ὡς καὶ τὰ ἐντάφια γενέσθαι εἰς τέλος διάβροχα. Ἐν ἀμηχανίᾳ οὖν πάντων ὑπαρχόντων περὶ τούτου, παρεκάλεσαν τὴν ἁγίαν Ἀρῶαν τοῦ εὔξασθαι τῷ Θεῷ σταθῆναι2. Kαὶ δὴ εὐξαμένης3 αὐτῆς, ἔστη ἡ ῥύσις τοῦ γάλακτος4 παραχρῆμα. Kαλύψασα δὲ τὸ τίμιον σῶμα τῆς μάρτυρος καὶ ἀσπασαμένη αὐτήν, ἤγαγεν ταύτην ἐπὶ τὴν ταφήν, ὄχλου πολλοῦ5 ἐπακολουθοῦντος καὶ ψάλλοντος πρὸς τὰ ἀδόμενα τῆς ὠδῆς ταύτης ἅπερ καὶ εἰσὶ ταῦτα· «ἀδελφή μου Κυπρίλλα, καλὴ γέγονας ὡς Ῥαχήλ, καὶ ὡραία ὡς Ῥεβέκκα, ἀστεία καὶ εὐμήκης ὡς Σάρα, χαρίεσσα ὡς Μάρθα, ἐπίπονος ὡς ἡ Σαμαρείτης, καλῶς χηρεύσασα ὡς Ἄννα, φιλόθεος ὡς ἡ Ἀσενέθ, φιλόξενος ὑπὲρ τὴν Σωμανῖτιν6. Περιλήψεταί σε ἡ ἀρρενοτόκος7 Μαρία ἡ τὸν εὐλογημένον καρπὸν γεννήσασα, καταφιλήσει8 σε ἡ τοῦ νότου9 βασίλισσα· εἰσέρχῃ γὰρ εἰς τὸν ἀθάνατον νυμφῶνα μετὰ τῶν πέντε παρθένων τῶν φρονίμων». Οὕτως δὲ συνεβόουν αὐτῇ καὶ αἱ λοιπαὶ γυναῖκες καὶ παῖδες καὶ ἄνδρες. Ἡ δὲ εὐωδία ἐκείνη ἡ ἄφατος καὶ τὴν ὁδὸν ὑπὲρ λόγον ἐπλήρωσεν. Ἐτάφη δὲ ἐν σπηλαίῳ τινὶ λεγομένῳ Λοιδόρῳ. Ἡ δὲ ἁγία Ἀρῶα10 ὑποστρέφουσα μετὰ τοῦ λοιποῦ ὄχλου, ἀπεβλέπετο συχνῶς πρὸς τὸν τάφον τῆς ἁγίας μάρτυρος Κυπρίλλης 11. Καὶ μὴ φέρουσα τὴν στέρησιν αὐτῆς, δακρύουσα καὶ κατὰ τόπον εὐχομένη, ἐσφράγιζε τὴν πέτραν διὰ γλυφῆς σιδήρου τῷ τύπῳ τοῦ σταυροῦ· ἐν οἷς συνήγετο ἡ δρόσος, ἣν καὶ ἀρυόμενοι12 πάντες οἱ κακῶς ἔχοντες ποικίλων νοσημάτων ἀπελυτροῦντο. Οἱ οὖν πιστοὶ ναὸν ἄξιον τῆς ἁγίας μάρτυρος Κυπρίλλης ἀνήγειραν, λίθοις τετραπεδικοῖς θαυμαστῶς13 ἡρμοσμένον· ἧς ταῖς πρεσβείαις καὶ ἡμεῖς εὕροιμεν ἔλεος14 καὶ χάριν ἐνώπιον τοῦ Χριστοῦ καὶ θεοῦ ἡμῶν, ᾧ ἡ δόξα εἰς τὸν αἰῶνα15· ἀμήν.

4. 1 τοῦ Χριστοῦ om. A || 2 add. τὴν ῥύσιν τοῦ γάλακτος A || 3 προσευξαμένης V || 4 ἡ ῥύσις τοῦ γάλακτος om. A || 5 πολλοῦ om. A || 6 σωμανίτην codd. || 7 θεοτόκος A || 8 καὶ φιλήσει A || 9 νώτου V || 10 Ἀρόα A || 11 Κυπρίλλας V || 12 ἀρρυόμενοι V || 13 om. A || 14 ἔλαιον A || 15 ἡμῶν ἐν τῇ ἡμέρᾳ τῆς κρίσεως συναριθμούμενοι τοῖς ἁγίοις αὐτοῦ, ὅτι αὐτῷ πρέπει ἡ δόξα καὶ τὸ κράτος νῦν καὶ εἰς τοὺς αἰῶνας τῶν αἰώνων Α

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X. LEQUEUX ABRÉGÉ DU MARTYRE DES SAINTES ET CÉLÈBRES FEMMES, MARTYRES ET ATHLÈTES DU CHRIST, CYPRILLE, ARHOA ET LUCIE

1. La sainte martyre Cyprille a vécu sous le règne de Dioclétien; native de la ville de Cyrène, en Libye, elle était fille de parents chrétiens et bien nés. Unie à un homme, alors qu’elle avait 14 ans1, et ayant vécu à ses côtés durant deux ans et demi, une fois ce dernier décédé, elle resta dans le veuvage pendant 28 ans et demi. Comme une céphalée l’assaillait, (Cyprille), en grand péril, demanda à ses parents de pouvoir s’en aller auprès de saint Théodore, l’évêque de Cyrène 2. 3 qui se trouvait à cette époque enfermé en prison et maltraité à cause du Christ, pour que, par sa sainte prière, elle puisse être guérie de la maladie qui l’accablait. Ayant obtenu ce qu’elle demandait, elle s’en va auprès du bienheureux Théodore dans la prison, et s’étant jetée à ses pieds, elle demanda à être soignée. Le saint et trois fois bienheureux évêque Théodore se leva instantanément, et ayant fait le signe de la croix précieuse et vivifiante sur sa tête, la guérit aussitôt. La bienheureuse Cyprille donc, qui avait trouvé dans la prison deux autres jeunes filles, ne voulut plus s’en retourner auprès de ses parents, mais elle resta avec les jeunes filles qui se trouvaient là, Lucie et Arhoa, écoutant l’enseignement de notre saint Père, l’évêque Théodore. 2. Ce dernier étant mort en martyr pour le Christ peu de jours après, quelques-uns accusent également ces saintes martyres du Christ auprès du gouverneur Diognianus. Le gouverneur les fit comparaître immédiatement. Tandis qu’on les conduisait donc devant le gouverneur, sainte Cyprille s’écria tout à coup: «Notre Père et martyr Théodore nous précède et on le voit sous la forme tantôt d’un vieillard, tantôt d’un jeune homme, tantôt arborant l’habit et la condition de philosophe». Alors qu’elle prononçait ces paroles, Lucie et Arhoa se présentèrent devant le gouverneur, tenant la bienheureuse Cyprille entre elles. Interrogées par le gouverneur Diognianus, elles déclarèrent qu’elles étaient des disciples de Théodore, le très saint évêque de Cyrène, et qu’elles étaient chrétiennes. Le gouverneur, qui était toujours dans l’erreur concernant les idoles et qui n’avait pas encore été converti par les exhortations de Lucius pour (embrasser) la foi dans le Christ, dit à ceux qui étaient à ses côtés, à propos des trois saintes femmes: «De nouveau, la nature nous a produit un être malfaisant à trois têtes, en donnant à voir une image pire que le monstre de nos pères – je parle de ces trois femmes –, à l’avant une lionne, à

1

Sur la précocité du mariage à Byzance et son caractère forcé, cf. J. BEAUCAMP, Le statut de la femme à Byzance (4e-7e siècle). T. II: Les pratiques sociales (= Travaux et mémoires du Centre de recherche d’histoire et civilisation de Byzance. Monographies, 6), Paris, 1992, p. 295-301. 2 Comme les sorties des femmes en public étaient strictement limitées (cf. ibid., p. 348), on ne s’étonnera pas que la fille veuve demande à ses parents la permission de sortir. 3

Lacune vraisemblablement causée par un saut du même au même dans l’archétype.

LA PASSION GRECQUE (BHG 2093) DE CYPRILLE

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l’arrière un dragon femelle, et au centre cette chimère»4. Voilà ce qu’il dit pour outrager les saintes femmes, haïssant aussi le saint hiéromartyr Théodore et ne voulant pas entendre son saint nom. 3. Après leur avoir donc imposé de nombreuses contraintes et après avoir tenté de les séduire tantôt par la violence tantôt par la flatterie, il ne parvint pas à les écarter du but qu’elles s’étaient proposé. Mais particulièrement touché par la beauté de sainte Cyprille, il ne put le supporter. En effet, elle était très jolie et de toute beauté. Mais la sainte martyre du Christ Cyprille ne se préoccupait absolument pas de ses propos; au contraire, elle se dressait noble et imperturbable, inébranlable comme une pierre enfoncée dans le sol face aux assauts des flots. Mais voici qu’ils mettent de force de l’encens dans sa main, pour qu’elle ait l’air d’avoir sacrifié, même sans y consentir. La bienheureuse Cyprille, s’écriant d’une voix forte: «ce n’est pas sacrifier, le fait que quelqu’un contre son gré y soit contraint», posa immédiatement sa main précieuse et sainte 5 sur l’autel rempli de charbons ardents; celle-ci s’enflamma au point que les doigts et tout le carpe de sa main fondirent et que les os mis à nus se consumèrent. À ce moment, le gouverneur Diognianus, en colère, parce qu’il avait manqué son vain but, l’ayant fait suspendre à un poteau, la fit cruellement écorcher. Tandis qu’on l’écorchait, un très grand miracle se produisit. En effet, de la sueur s’écoula de son précieux et saint corps, du lait s’écoula de ses seins, et (les deux liquides) se répandaient à flots en se mêlant au sang. Contemplant ce miracle extraordinaire, le gouverneur fut pris d’étonnement et ordonna de la dépendre. Mais une fois descendue, s’étant signée de la croix précieuse et vivifiante, elle s’endormit dans le Seigneur, le 8 juillet6. 4. Alors une fragrance s’échappa, abondante, de son saint corps, qui remplit l’air et tous ceux qui étaient présents. Sur l’ordre du gouverneur, Lucie et Arhoa ensevelissent Cyprille, la sainte martyre du Christ. Et le lait sortait à flots de sa dépouille, même après sa dormition, au point que les linges funéraires étaient totalement mouillés. Devant l’embarras général causé par cette situation, ils supplièrent sainte Arhoa de prier Dieu pour que cela cesse. À sa prière, l’écoulement de lait s’arrêta aussitôt. Après avoir couvert le précieux corps de la martyre et embrassé celle-ci, elle la conduisit au tombeau, suivie par une foule nombreuse qui psalmodiait, en ce qui concerne les strophes de l’ode en son honneur7, les paroles que voici: «Cyprille ma sœur, tu as été belle comme Rachel8, jolie comme Rébecca9, 4 La combinaison d’une chimère, en l’occurrence un animal hybride à trois têtes, avec une lionne et un dragon donne naissance à un monstre encore plus terrifiant. 5

Sans répandre l’encens.

6

Ce n’est pas la date retenue par les synaxaires. Le 8 juillet, ceux-ci honorent Procope de Palestine, que l’on essaya de corrompre de la même manière que Cyprille. Curieuse coïncidence ! 7

Le grec n’est ici pas très clair.

8

Cf. Gn 29, 17.

9

Cf. Gn 24, 16.

X. LEQUEUX

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distinguée et grande comme Sara10, aimable comme Marthe11, courageuse comme la Samaritaine12, tu as vécu un beau veuvage comme Anne13, tu as aimé Dieu comme Aseneth14, tu as été plus accueillante que la Sunamite 15. Μarie, la mère de l’enfant mâle16, celle qui a enfanté le fruit béni17, t’embrassera; la reine du Sud te baisera tendrement18, car tu t’avanceras vers la chambre nuptiale immortelle avec les cinq vierges sages19». Et de la sorte s’écriaient avec elle les autres femmes, les enfants et les hommes. Cette indicible fragrance remplit aussi la route au-delà de toute parole. Elle fut ensevelie dans une grotte appelée Loidoros 20. Sainte Arhoa revenant sur ses pas avec le reste de la foule, tournait souvent les yeux vers le tombeau de la sainte martyre Cyprille. Ne supportant pas d’être privée d’elle, pleurant et priant sur place, elle marqua la roche du signe de la croix, au moyen d’une incision opérée par le fer. C’est là que se condensait la rosée que venaient puiser tous ceux qui souffraient, lesquels étaient délivrés de diverses maladies21. Les fidèles, donc, érigèrent un sanctuaire digne de la sainte martyre Cyprille, admirablement orné de pierres rectangulaires. Par ses prières, puissions-nous également trouver pitié et grâce en face du Christ notre Dieu. À lui la gloire pour l’éternité. Amen. 10

Cf. Gn 16-21.

11

Cf. Lc 10, 38-42.

12

Cf. Jn 4, 1-30.

13

Cf. Lc 2, 37.

14

Cf. Gn 41, 44-50.

15

Cf. 2 (4) Rg 4, 8-37.

16

Cf. Ap 12, 4-5.

17

Cf. Lc 1, 42.

18

Cf. Mt 12, 42; Lc 11, 31.

19

Il s’agit des cinq vierges sages évoquées dans Mt 25, 1-13.

20

Νom vraisemblablement forgé à partir de l’adjectif λοίδορος (Ι Co 5, 11 et 6, 10).

21

Cf. Is 26, 19.

Summary. The new text edited on the basis of MSS Andros, Monastery τῆς Ζωοδόχου Πηγῆς, 65 (15th cent., f. 195-198v) and Vaticanus graecus 2014 (12th cent., f. 111-113) relates the history of a woman of Cyrene who was one of the entourage of Bishop Theodore at the time of Diocletian. After the martyrdom of the bishop the pagans tried to force the beautiful Cyprilla to sacrifice to the idols. She avoided this by placing her hand on the burning-hot altar. Suspended from a pole she was flayed alive and died. Milk seeped from her breasts and was mixed with the blood dripping from her wounds to the point that they soaked through the shroud enveloping her mortal remains. The martyr was buried in a grotto and a cross was carved on the rock in the hollow of which the sick drew dew with curative properties. Cyprilla is venerated at Byzantium either on 4 July or the following day.

Sergey A. IVANOV THE RIGHT HAND FETID, THE LEFT UNCLEAN AN UNKNOWN BYZANTINE SPIRITUALLY BENEFICIAL TALE The text published below did not survive, so far as we know, in its Greek original; it exists only in Slavic translation, but we can be fairly sure that the former existed: Theodoretus, the patriarch of Antioch, who is mentioned in the tale, is a real historical figure of the late 8 th century, but we know next to nothing about him1 and he would not be the first name to come to a Slavic bookman’s mind. The very plot, although in a less developed form, can be found in one of the spiritually beneficial tales included in the still unpublished Byzantine collection Meterikon compiled in the 13th century by abba Isaiah: in a dream a girl sees her late mother, who has spent her life lasciviously, being boiled in a fiery cauldron; the sinner implores her daughter for help but the latter only burns her hands in the fire2. The motif of a person who looks for a possibility to come into contact with the other world also occurs in spiritually beneficial tales: a hero asks more and more famous monks for mediation and they refuse one by one, referring him to some especially saintly hermit deep in the desert3. What looks really unique in our tale is the comical ado around the right and left hands of the main hero: he eats with his left hand and the patriarch reproaches him with a false quote from Basil the Great: “the right hand serves (for everything) from the loins up to the head, while the left — for everything (that is) below”. What could probably lie behind this citation is (Pseudo-)Basil’s ascetic sermon: “Let your left hand not be unruly, let it not take the flings of the right; let it be better idle, and if not, let it help the right hand”4. This injunction has nothing to do with the Manichaean division presupposed by the patriarch’s words. We were unable to 1

I. DICK, Un continuateur arabe de saint Jean Damascène: Théodore Abuqurra, évêque melkite de Harran. La personne et son milieu, in Proche-Orient chrétien, 13 (1963), p. 114-129; V. GRUMEL, Traité d’études byzantines. I: La chronologie (= Bibliothèque byzantine), Paris, 1958, p. 447; K.-P. TODT, Region und Dukat von Antiocheia in mittelbyzantinischer Zeit und im Zeitalter der Kreuzzüge (969-1204), Wiesbaden, 1998, p. 174-177. 2

Meterikon. Sobranie nastavlenij avvy Isaii vsechestonoj inokine Feodore, Moscow, 1995, p. 36-37. 3 H. DELEHAYE, Un groupe de récits «utiles à l’âme», in Mélanges Bidez, vol. I, Bruxelles, 1934, p. 262-263. 4

Basilius Caesariensis, Sermo 11 (sermo asceticus et exhortatio de renuntiatione mundi), ed. PG 31, col. 644: Ἐπὶ τραπέζης μὴ ἀτακτείτω ἡ χείρ σου ἡ ἀριστερά, μηδὲ καταυθεντείτω τῆς δεξιᾶς. Ἀργείτω δὲ μᾶλλον· εἰ δὲ μὴ, κἂν ὑπουργείτω τῇ δεξιᾷ.

Analecta Bollandiana, 133 (2015), p. 249-255.

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find any hints at such a distinct worldview in Byzantine texts. It was supposed that one normally eats with the right hand5, in real life lefthandedness was perceived as a handicap, the left hand symbolizing the flesh as opposed to the spirit6, but the left hand was not perceived as damned: to show that it was meant to reveal good deeds7, one could even cross oneself with it if unable to do so with the right one8 and the group of Ἀριστεροὶ who “abhor the left hand and do not dare to offer anything with it”9 was regarded as heretical. The Byzantine tradition did not have such a prejudicial attitude that is revealed in our tale. As for Islam, it used to discriminate the left hand from the very early times. According to Hadith, found in Sahih Muslim Book 23 (No. 5010), “Allah’s Messenger (may peace be upon him) [was] saying: None of you should eat with his left hand and drink with that (left hand), for Satan eats and drinks with that (hand)”. This attitude assigned to the left hand only “base”, sanitary tasks. The Byzantines scorned Muslims for such an attitude; Bartholomew of Edessa mocked the Islamic custom: “Put your finger into your bottom and pour water with your left hand and wash !”10. Yet what we see in our tale is the exact imitation of the Muslim prejudice camouflaged by a false reference to a Church Father’s authority. Such mimicry seems natural for the Antioch Christians who had been living under the Islamic rule for centuries. It is unlikely that the tale under scrutiny emerged under Patriarch Theodoretus but it definitely comes from the Antioch milieu of the period when his name was still memorable. We cannot say more on the date of the composition of our tale. Until now it has been assumed that the tale was translated into Russian from Polish in the 17th century, when such translations became 5

GIÈRE

Léontios de Néapolis, Vie de Syméon le Fou et Vie de Jean de Chypre, ed. A.-J. FESTU– L. RYDÉN (= Bibliothèque archéologique et historique, 95), Paris, 1974, p. 95.

6 Iohannis Zonarae lexicon ex tribus codicibus manuscriptis, ed. J. A. H. TITTMANN, vol. I, repr. Amsterdam, 1967, p. 298. 7

Maximi confessoris quaestiones et dubia, I, 68, 43, ed. J. H. DECLERCK (= Corpus Christianorum. Series Graeca, 10), Turnhout, 1982, p. 157. 8 Barsanuphe et Jean de Gaza, Correspondance. Vol. II: Aux cénobites. T. II: Lettres 399-616, ed. Fr. NEYT – P. DE ANGELIS-NOAH (= Sources Chrétiennes, 451), Paris, 2001, p. 514-516 (letter no. 437). 9 Matthaeus Blastares, Collectio alphabetica, I, 2, in Σύνταγμα τῶν θείων καὶ ἱερῶν κανόνων τῶν τε ἀγίων…, ed. M. POTLES – G. A. RHALLES, vol. 6, Athens, 1859, p. 61: Οἱ αὐτοὶ δὲ καλοῦνται καὶ Ἀριστεροὶ, ὅτι τὴν ἀριστεράν εἰσι βδελυττόμενοι χεῖρα, δι’ αὐτῆς προσίεσθαι τὸ οἱονοῦν μὴ τολμῶντες. 10

Bartholomaios von Edessa, Confutatio Agareni, 32, ed. K.-P. TODT (= Corpus IslamoChristianum. Series Graeca, 2), p. 32, 19-26: βάλε τὸν δάκτυλόν σου εἰς τὴν καθέδραν σου καὶ μετὰ τῆς ἀριστερᾶς σου χειρὸς βάλε τὸ ὕδωρ, εἶτα πλύνε.

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fashionable in Moscow. The initial source of the borrowing seems to be one of the Latin exempla11 but we have failed to find any trace of our story in any Latin collection of exempla; and it is found in only one manuscript of the translated exempla entitled Speculum12: of the whole collection of 902 stories our tale is the very last, so that in all probability it was added at the last moment from some other source. The main genre in which the tale features frequently is that of the socalled “sinodiki”, diptychs, a genre peculiar to the Muscovite literature which comprised, besides the lists of the departed for whose salvation their relatives made donations to clerics or monasteries, tales accompanied by miniatures of the posthumous fate of the soul13. The spiritually beneficial tales, selected on a thematic principle, are taken from various sources and are found in a number of variants from one manuscript to another. Nearly all the manuscripts of such “sinodiki” belong to the 17th century and later14. However, the oldest manuscript to contain our tale that we managed to trace is of the 16th century: it is No. 1287 of the Pogodin Collection in the Russian National Library at St. Petersburg, ff. 178v-183r. This could serve as additional evidence that the translation was made from a Greek, not a Latin source. We could hypothesize that the tale was brought to Muscovy not via Mount Athos or Constantinople (where it remained unknown) but directly from the patriarchate of Antioch by one of the embassies which visited Moscow pleading for alms. The edition of this curious tale is based on the oldest extant manuscript. Higher School of Economic

Sergey A. IVANOV

Myasnitskaya, 20 RU – Moscow 101000

11 I. V. DERGACHEVA, Eskhatologicheskie predstavleniia v russkoj literature XI-XIX vv., Dissertation, Moscow, 2003, p. 217. 12

Russian National Library (St. Petersburg), Pogodin Collection No. 1383, f. 139v-142v.

13 E. V. PETUKHOV, Ocherki iz literaturnoj istorii Sinodika, St. Petersburg, 1895. Our tale is mentioned under number 10 on pp. 143-144 but without any special attention or hypotheses as to its origin. 14 Russian National Library (St. Petersburg), Pogodin Collection No. 1582; 1603; Solovetsky Monastery Collection No. 221-295; F. I No. 323; 383 (this 17th-cent. copy became the basis of the only publication of the text: Pamiatniki starinnoj russkoj literatury, izdannye grafom G. Kushelevym-Bezborodko, ed. N. KOSTOMAROV, Vyp. 1, St. Petersburg, 1860, pp. 99-101); F. IV No. 200; Titov Collection No. 251; 2595; State History Museum (Moscow), Schchukin Collection No. 139; Uvarov Collection No. 565/1; Russian State Library (Moscow), Sevastianov Collection No. 36-1466.

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Слово ѿ патерика Повѣсть д͠шеполезна ѡ изведшемъ М͠трь свою ѿ мученїѧ Мл͠тв ради ст͠ых и пр͠пдбныхъ Оц͠ъ Инокъ некїй повѣда намъ гл͠ѧ Ꙗкѡ щедшу ми нѣкогда ко Ст͠ому Ѳеодориту патріарху Антиѡхійскому и той повѣда Ми вещь сицеву ꙗкѡ пред Малѣми дн͠ьми пріиде нѣкто Страненъ здѣ неизмовенъ и мнѡгими Власы и ризами власѧными Ѡдѣꙗнъ и взѧхъ егѡ ꙗсти с собою, Сѣдшу же емѹ ꙗсти зрю его Лѣвою рукою едꙗща деснаѧ Же рука егѡ обвита платом До запѧстія и г͠ла емѹ почто Брате не ꙗси правою рукою, Не вѣси ли ꙗко деснаѧ рука Служитъ ѿ чреслъ до главы, Лѣваѧ же даже до долу: тако Пишетъ ѡ семъ великій Василій . во ѡбычных своих Ѹчениіх, онъ же г͠ла: прости Мѧ вл͠дко, страсть ми нѣкаѧ Есть и сего ради не могѹ. И мнѡго нудихъ его: Та же похитивъ портъ его ꙗже на рукѣ носѧше и вергохъ его долу, но дастъ Рука егѡ смрадъ лютъ, ꙗкѡ Намъ задержати комѹждо Ноздри своѧ, и ѿбѣжати донъдеже Паки тѣмже портомъ ѡбви. Азъ же начах мужа вопрошати Что есть се, он же воздохнѹвъ Нача повѣдати. Азъ же рече с͠тѣйшій Влдко, имѣхъ мт͠рь бл͠говидну

Homily from the patericon. A spiritually beneficial tale of a person who saved his mother from torment thanks to the prayers of holy and venerable fathers. A certain monk told us this story. He said: “Once I went to the holy Theodoretus, the Patriarch of Antioch, and he told me the following thing: a few days earlier a stranger came here, unwashed, with unkempt hair and clad in haircloth. I took him to eat with me; when he sat down to eat, I saw that he was eating with his left hand, while his right hand was wrapped in a rag up to his wrist, and I told him: ‘O brother, why are you not eating with your right hand ? Do you not know that the right hand serves from the loins up to the head, while the left – for everything below. This is what Basil the Great writes in his usual admonitions’. But he said: ‘Excuse me, lord, I have an illness and because of it I cannot’. I urged him strongly and even grabbed the rag he was wearing on his hand and threw it to the ground. His hand emitted an awful stench, so that we had to hold our noses and run away until he wrapped his hand back in the same cloth. I began to inquire of this man what it meant and he gave a deep sigh and began to tell: ‘Most holy lord’, he said, ‘I had a mother who was goodlooking and widowed young while I was still small. She indulged herself in gluttony, drinking and fornication, and she managed to collect a lot of

A BYZANTINE SPIRITUALLY TALE

И юну сущу ѡбвдовевшу мене Точію мала имущи вдаде же Себе пищи и піꙗнству и блуду Ꙗкѡ и ѿ блуженіѧ собрати Ей много стѧжаніѧ В той же сквернѣ закоснѣвши Случисѧ ей и ѹмрети. Азъ же В чювство пришедъ положихъ Въ срдцы своемъ г͠лѧ невозможнѡ ми влдко гд͠и Б͠же ѿ нечистаго сего Богатьство раздахъ цр͠квамъ и нищимъ За д͠шу мт͠ре моеѧ, не ѡставихъ Себѣ ничто же, токмо ризу сію юже Ношу. И размышлѧхъ в себѣ кто Ми извѣститъ аще пріꙗтъ б͠гъ Даннаѧ нищимъ. Паче же ѿ Скверны собраннаѧ бѧху. И идохъ вл͠дко во іер͠слимъ к Патріарху и той повѣда ми Добрѣ все сотворилъ еси чадо, Попеклъсѧ еси ѡ сп͠сеніи мт͠рьни Сіѧ бо творѧ себе бл͠годѣиствуеши И д͠шу свою спасаеши, ѡбаче Никто же можетъ совершенно Вѣдѣти ѡ сей вещи. Поиди ѹбѡ в Скитъ и в Вифаиду и тамо Ѡбрѧщеш мужи б͠гоносны, и Могутъ ти мл͠твою ѿкровениіе Извѣстити. Доидохъ ѹбѡ тамо и слышахъ Преподобныхъ онѣхъ о͠ць ѿ смиреніѧ Многа ѿметающихсѧ ꙗко нѣсть рѣша Чадо в насъ таковаго Ꙗкова ты ищеши иди ѹбо во внѹтренюю Пустыню и ѡбрѧщеши тамо чл͠ка могуща Ѡ семъ извѣстити тебѣ. Пріим же ѹбѡ Хлѣбъ і идохъ тамо тридесѧть днеи И обрѣтохъ пещеру малу и стопы человѣча. И толкнѹвъ с мл͠твою и

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property from her fornicating. She happened to die wallowing in this filth. Being deeply affected I took a decision in my heart and said: It is impossible for me, Lord God, to accept any of this unclean wealth. I gave away all the riches to churches and beggars for the soul of my mother, I did not keep anything for myself except these clothes that I am wearing. And I was thinking in myself: who will inform me whether God accepted what I gave to the beggars which had been accumulated from lasciviousness. I went, o lord, to Jerusalem, to the patriarch, and he told me: ‘You have done everything well, child, you took care of your mother’s salvation. By so doing you are doing good to yourself and saving your own soul, but nobody may know for certain about such things. Go therefore to Sketes and to Bethaida and there you will find godly people, they can give you a revelation by their prayer’. So I went there and heard those venerable fathers refuse because of their great humility, and then say: ‘child, among us there is no person like the one you are looking for; go out to the inner desert and there you will find a man able to inform you on this matter’. So, I accepted bread and walked for thirty days and I found a small cave and human footprints. With a prayer I knocked – and a holy elder answered: ‘Amen’. After praying we sat down and he said to me: ‘Welcome, child, after having endured so much ! Tell me how do Christians live these days,

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Ѿвѣща ми с͠тыи старец аминь и По мл͠твѣ сѣдохом, и гл͠аа ми добрѣ Пришелъ еси чадо толикъ трудъ терпѣв Рцы ми како хрс͠тіане живутъ днесь, Како ц͠ріе, и како вѣра ѹтвержаетсѧ Мнѣ же рекшу мл͠твами вашими всѧ Бл͠гочестнѡ и ми(р) и вѣра ѹтвержденна Томѹ же рекшу и каѧ вина к намъ твоего приходу и повѣдахъ емѹ все по рѧду ꙗже ѡ мт͠ри моеи. Ѿвѣщалъ же истинны рабъ бж͠іи рече: паче моеѧ силы таковое прошеніе но ѡбаче помолим чадо ѡбо Б͠га, и аще изволит ѿкрыетъ нам. Ї сотвори жезлом своим писаніе окр͠стъ мене и постави мѧ внутрь и заповѣда ми з҃ дней не ѧсти ни пити но молити б͠га д͠нь и нощь, и аз рече толико же имам молитисѧ и сотворь мл͠тву ѡстави мѧ внутрь писменъ и ѿиде. И створшу ми ѕ҃ днеи и ѕ҃ нощеи и ꙗкѡ пріиде ми седмаѧ нощь и быхъ во изступлении И видѣхъ на лѣвои Сторонѣ езеро тинно смрада исполнено, И главы нѣкихъ восходѧщихъ и Низходѧщихъ во глубинѹ . ѹзрѣхъ с Ними и матерь мою восходѧщу и Нисходѧщу до выѧ и познавши мѧ Возопи чадо мое помилуи мѧ и паки Пониче во глубинѹ и паки выникши До перси возопи чадо мое помози ми И паки заиде во глубинѹ и паки Возшедшу и мнѡжае вопіющу со Слезами чадо мое не ѡстави мѧ в Бѣдѣ сей . Азъ же прострохъ деснѹю Руку и похватихъ ю за власы ѡна Же воднопогрѧзши и ѡмочисѧ рука Моѧ въ тину смрада ѡного Сію же исторгъ и возрѣвъ зрю купѣль Воды чисты и тамо ю ѡбмыхъ

how do emperors, and how faith is being strengthened ?’. I answered: ‘Thanks to your prayers, everybody is pious, peace and faith are well established’, then he said: ‘And what is the reason for your coming to us ?’ I told everything from beginning to end about my mother. Answering me, this true servant of God said: ‘Such a request is beyond my strength but still let us both pray to God, child, and if He pleases He will reveal all to us’. And with his staff he drew a circle around me and placed me inside and instructed me to neither eat nor drink for seven days but to pray to God day and night and ‘I myself – he said – will pray as much I can’. And having prayed, he left me inside the circle and departed. And having spent six days and six nights, when the seventh night came, I fell into an ecstasy and saw to the left of me a silted lake emitting stench, and people’s heads that were emerging and submerging into the depth. Among them I recognized my mother who emerged and submerged to her neck. She recognized me and cried: ‘Have mercy on me, my child !’ – and again sank into the depth and again she resurfaced up to her breast and cried: ‘My child, help me !’, and again she went deep into the water and resurfaced again and cried with many tears: ‘My child, do not leave me in this misery !’ I stretched out my right hand and seized her by the hair, but she sank and my hand was soaked in the stinking silt. But I pulled her up and looking around I saw a font of

A BYZANTINE SPIRITUALLY TALE

Ѿ смрадныѧ тины и с сущими Свѣтлыми людьми совокупихъ Славѧщихъ хр͠та б͠га Дню же бывшу, рабъ бж͠іи Вопрошаше мѧ что еси видѣлъ, Мнѣ же повѣдающѣ и показахъ Емѹ руку свою нестерпимаго Смрада и г͠ла ми ст͠ыи не печалуисѧ сіѧ бо печаль есть истинны еже вѣровати всѣмъ видѧщимъ ꙗкѡ истиннѡ есть видѣніе, ꙗкѡ добре есть и по смерти творити милостыни и приношеніѧ за ѿшедшихъ ꙗкѡ щедроты гд͠нѧ на всѣхъ дѣлѣхъ его, ѡ руцѣ же твоей извѣщу можеть ѹбѡ б͠гъ всѧчески ту таковаго премѣнити смрада, но ꙗкѡже речесѧ мнитисѧ двое быти и невѣрнѡ мнѡгимъ сице повелѣ рабъ Бж͠іи имѣти платъ сей и обви мнѣ руку і преста смрадъ. По сих же гл͠а ми то рабъ бж͠іи: се чадо то ли҃ путшествовалъ еси како доидеши пакы і се д͠хом об͠ла ѿторжесѧ і гл͠а ст͠ы старец тебѣ повелѣваю аг͠глу бж͠ію ѡ имени Іс҃ъ Хв҃ѣ пріми сего брата и донеси во своѧ его да всѣм скажет величіѧ бж͠іѧ. Пріим же мѧ обл͠а и постави мѧ в дому моем ꙗкоже некогда аввакума в ров к даніилу ѡ всѣх же сих прославим х͠а б͠га нашего емѹ ж слава

255

clean water, I washed the stinking mud off her and joined her to the radiant persons who were glorifying Christ the Lord. When day came, the servant of God asked me: ‘What did you see ?’ I told him and showed him my hand which was stinking unbearably and the saint told me: ‘Do not be sad for this is the sadness of truth when all seeing it know that it is a true vision, that it is good to do charity and bring offerings for the departed even after their death, since the Lord’s mercy is in all His works. As for your hand, I must say that God can certainly stop such a stench; yet, it is said that many consider this to be dubious and untrue’. So the servant of God ordered me to have this rag and he wrapped it round my hand, and the stench ceased. After this the servant of God told me: ‘Child, although you journeyed to arrive here, you will return by the wind on a cloud’. And the holy elder said: ‘I order you, o angel of God, in the name of Jesus Christ, take this brother and carry him home so that he may tell everybody about God’s greatness’. The cloud took me and brought me to my house, like Habbakuk was once transported to Daniel’s den”. Let us glorify Christ our God for all these things. Glory to Him !

Résumé. Le texte original grec de cette historiette vit le jour dans un milieu chrétien à Antioche sous la domination arabe, alors que le souvenir du patriarche Théodoret (VIIIe s.) était encore vivace. L’intrigue, byzantine dans ses grandes lignes, reflète aussi l’influence de la tradition musulmane, péjorative à l’égard de la main gauche .

This study was supported by the Academic Fund Programme of The National Research University-Higher School of Economics, in 2014-15 (research grant No. 14-01-0031).

Francesco MARZELLA AL DIAVOLO LA TASSA ! UN EPISODIO INTERPOLATO DELLA VITA S. ÆDWARDI REGIS ET CONFESSORIS DI AELREDO DI RIEVAULX In parte della tradizione manoscritta della Vita sancti Ædwardi regis et confessoris (d’ora in poi VERC) di Aelredo di Rievaulx1, è presente un episodio che riguarda l’abolizione da parte del re della tassa nota con il nome di danegeld 2. Detta anche geld o gafol e denominata danegeld solo a partire dal XII secolo, questa tassa fu imposta per la prima volta da re Etelredo II dopo la sconfitta degli Anglosassoni contro i Vichinghi nella battaglia di Maldon (991): il denaro raccolto servì al re per tenere lontana la minaccia degli invasori. Successivamente, la tassa fu soppressa nel 1051 da Edoardo il Confessore3, per poi essere nuovamente introdotta sotto i re Normanni. Enrico II fu l’ultimo re a imporre il pagamento del danegeld (nel 1155-56 e nel 1161-62)4. 1. Tradizione manoscritta L’episodio compare in nove dei ventisette codici contenenti il testo della Vita: 1

Sulla tradizione manoscritta dell’opera v. F. MARZELLA, La tradizione manoscritta della Vita Sancti Ædwardi Regis et Confessoris di Aelredo di Rievaulx, in Filologia Mediolatina, 19 (2012), pp. 343-373. Della Vita sancti Ædwardi regis et confessoris (BHL 2423-2424), biografia di sant’Edoardo scritta da Aelredo nel 1163 su richiesta dell’abate di Westminster, Lorenzo, ho curato l’edizione critica di prossima pubblicazione nella collana Corpus Christianorum. Continuatio Mediaevalis. Per le citazioni dalla VERC riproduco il testo da me stabilito, fornendo anche l’indicazione dei passi corrispondenti nell’edizione della Patrologia Latina (t. 195, coll. 737B-790B). 2

Per maggiori informazioni sul danegeld sarà sufficiente rimandare a J. A. GREEN, The Last Century of Danegeld, in English Historical Review, 96 (1981), pp. 241-258; M. K. LAWSON, The Collection of Danegeld and Heregeld in the Reigns of Aethelred II and Cnut, in English Historical Review, 99 (1984), pp. 721-738; J. GILLINGHAM, ‘The Most Precious Jewel in the English Crown’: Levels of Danegeld and Heregeld in the Early Eleventh Century, in English Historical Review, 104 (1989), pp. 373-384; M. K. LAWSON, Danegeld and Heregeld Once More, in English Historical Review, 105 (1990), pp. 951-961; R. P. ABELS, Paying the Danegeld: Anglo-Saxon Peace Making with the Vikings, in War and Peace in Ancient and Medieval History, ed. P. DE SOUZA – J. FRANCE, Cambridge, 2008, pp. 173-192. 3 Questo secondo la testimonianza dell’Anglo-Saxon Chronicle, versione D (sub anno 1051), ma alcuni studiosi ritengono che si sia trattato solo di una sospensione temporanea: V. F. BARLOW, Edward the Confessor, 2a ed., New Haven – London, 1997, p. 106 n. 5. 4 Su altri possibili tentativi di imporre la tassa da parte di Enrico II, v. GREEN, The Last Century..., pp. 254-258.

Analecta Bollandiana, 133 (2015), p. 256-281.

UN EPISODIO INTERPOLATO DELLA VITA S. ÆDWARDI ●

257

Cambridge, Corpus Christi College, 318

Codice pergamenaceo in quarto, pp. 4 + 184 + 73 + 4, 236 × 170 mm, in colonne 5 singole o doppie, composto di due volumi (il primo arriva fino a p. 362 , nel secondo volume il testo è distribuito su due colonne). Risale al XII sec. e la scrittura, secondo James, è riconducile all’ambiente di Christ’s Church, Canterbury. Da indicazioni interne si deduce che il manoscritto fu custodito a Rochester. Contiene opere agiografiche, l’Historia Caroli Magni dello Pseudo-Turpino e l’Historia Apollonii Regis Tyri. La Vita è alle pp. 1-140 del primo volume. Alle pp. 21-26 l’episodio del danegeld. Nel testo della Vita una seconda mano in scrittura gotica interviene 6 con alcune correzioni . La grafia del testo latino qui pubblicato si basa su questo codice. ●

Gloucester, Cathedral Library, 1

Codice in pergamena, ff. 194, 393 × 280 mm, specchio di scrittura 295 × 195 mm, testo su due colonne da 48 righe, sec. XIII. Leggendario forse proveniente da Leominster, terzo volume di una collezione di Vitae di santi, di cui fanno parte i mss. 149 e 150 della Lincoln Cathedral. Il testo della VERC è ai ff. 118r-135v. L’episodio del danegeld si trova ai ff. 121r-121v, dopo il cap. VI della VERC (De conuersatione 7 eius et moribus) . ●

London, Lambeth Palace Library, 761

Codice in pergamena, ff. 70, 224 × 158 mm, XIII sec. Contiene esclusivamente il testo della VERC seguito da quello della Translatio (ff. 1r-70v), cronaca della traslazione del santo nel 1163 e dei fatti che la precedettero, mancante della parte ini8 ziale (inc. Alexander episcopus...). L’episodio compare ai ff. 13v-16r . ●

London, Lambeth Palace Library, 331

Codice in pergamena forse proveniente da Peterborough, 265 × 185 mm, composto di due fascicoli, uno del XV sec. e il secondo, nel quale è contenuto il testo della VERC (ff. 118v-157v, 30 righe per f.) insieme alla parte finale del vangelo di Tommaso, del XIII-XIV sec. Al f. 157v c’è il testo della Translatio di sant’Edoardo che si interrompe con le parole: cepit super hoc habere deliberacionem9. 5

Seguo l’uso di M. R. James che indica come ff. solo le carte di guardia, mentre si riferisce agli altri fogli attribuendo un numero di pagina per ogni facciata. V. nota seguente. 6 Per una descrizione del ms., cf. M. R. JAMES, A Descriptive Catalogue of the Manuscripts in the Library of Corpus Christi College, Cambridge, II, Cambridge, 1912, pp. 128-131. Per i manoscritti del Corpus Christi College di Cambridge rimando anche alla risorsa Parker Library on the Web: http://parkerweb.stanford.edu/parker/actions/page.do?forward=home, per la quale è necessario un abbonamento. 7

Cf. A Catalogue of Gloucester Cathedral Library, cur. S. M. EDWARD, Gloucester, 1972,

p. 1. 8 Per una descrizione del ms., cf. M. R. JAMES, A Descriptive Catalogue of the Manuscripts in the Library of Lambeth Palace, Cambridge, 1932, pp. 804-805. 9

Cf. Ibid., pp. 436-437.

258 ●

Fr. MARZELLA

London, British Library, Cotton Vitellius C XII

Manoscritto pergamenaceo, leggermente danneggiato nell’incendio della collezione Cotton, ma completamente leggibile, ff. 290, sec. XIV. Raccoglie testi storici e agiografici, ai ff. 236r-254v il testo della VERC. L’episodio del danegeld compare ai ff. 10 239v-240r . ●

London, British Library, Harley 200

Codice pergamenaceo in quarto, ff. 208, 196 × 130 mm, specchio di scrittura 150 × 100 mm, XIV-XV sec. Raccolta di opere storiche inglesi, il testo della VERC, che costituisce un fascicolo a parte, è ai ff. 150r-208r. Ai ff. 161r-163r l’episodio del da11 negeld . ●

Oxford, St. John’s College, 149

Manoscritto pergamenaceo, ff. 205, 208 × 145 mm, specchio di scrittura 155 × 100 mm, XII sec. Contiene, fra le altre opere, la Vita Kenelmi e gli scritti di Elisabetta di Schönau. Il testo della VERC è ai ff. 1r-59v. L’episodio del danegeld compare ai 12 ff. 35v-37v, dopo il cap. XXVI (Quid ei Dominus de septem dormientibus reuela13 uerit) . ●

Peterborough, Central Library, s.n.

Manoscritto cartaceo, ff. VIII + 63 + III, 230 × 143 mm, specchio di scrittura 163 × 98 mm, il numero di righe varia da 28 a 32. Fu compilato da Thomas Sandon fra il 1471 e il 1483. Proveniente probabilmente da Westminster. Contiene, oltre alla VERC (ff. 1r-41r), altri tre testi legati a sant’Edoardo: il sermone In translacione 14 sancti Edwardi confessoris (ff. 41r-44r), il testo integrale della Translatio (ff. 44rv 47 ) e una Sequentia de sancto Edwardo (f. 48r). Il testo della VERC include l’epi15 sodio del danegeld (dopo il cap. VI) . 10

Cf. The British Library Manuscripts Catalogue (http://www.bl.uk/catalogues/manuscripts /INDEX.asp); e Catalogue of the Manuscripts in the Cottonian Library 1696 (Catalogus Librorum Manuscriptorum): Thomas Smith, Reprinted from Sir Harley’s Copy, Annotated by Humphrey Wanley, Together with Documents Relating to the Fire of 1731, ed. C. G. C. TITE, Cambridge, 1984, p. 88. 11

Cf. ibid., I, pp. 62-63.

12

Il titolo nell’edizione della Patrologia Latina è Quid ei Dominus de septem dormientibus spiritualiter revelaverit (PL 195, coll. 767-769). 13 Cf. A Descriptive Catalogue of the Western Medieval Manuscripts of St John’s College, Oxford, cur. R. HANNA, Oxford, 2002, pp. 212-215. 14

Si tratta di un sermone pubblicato in P. JACKSON, ‘In translacione sancti Edwardi’: The Lost Sermon by Ælred of Rievaulx Found ?, in Cistercian Studies Quarterly, 40 (2005), pp. 4583. A mio avviso è improbabile che si tratti del sermone scritto da Aelredo in occasione della traslazione del santo, come ho argomentato in MARZELLA, La tradizione manoscritta..., pp. 371372. 15

Cf. N. R. KER – A. J. PIPER, Medieval Manuscripts in British Libraries, IV, Oxford, 1992, pp. 170-171.

UN EPISODIO INTERPOLATO DELLA VITA S. ÆDWARDI ●

259

Winchester, Cathedral Library, XIII

Manoscritto pergamenaceo in quarto, ff. 91, testo su due colonne da 33 righe, sec. XII. Contiene anche le Visiones di Elisabetta di Schönau, il Liber viarum Dei e altre opere minori; una biografia di S. Tommaso Becket (BHL 8180). Il testo della VERC è ai ff. 50r-80v, ai ff. 80v-82r l’episodio del danegeld.

Rapporti fra i manoscritti Tutti i codici che riportano l’episodio del danegeld appartengono alla famiglia 16 “di Westminster” a eccezione di due, i mss. Cotton Vitellius C XII e Harley 200. Si tratta di due manoscritti, accomunati da errori congiuntivi, che fanno parte di una famiglia secondaria cui appartengono anche i codici, conservati anch’essi nella British Library, Stowe 104 e Harley 4976, nei quali l’interpolazione non è presente. Il compilatore dell’immediato progenitore dei mss. Cotton Vitellius C XII e Harley 200 deve aver collazionato un esemplare interpolato della famiglia di Westminster. Quanto ai rapporti fra gli altri manoscritti che riportano l’interpolazione, distinguiamo tre gruppi principali: i mss di Cambridge, Gloucester e Peterborough, che in generale presentano un testo meno corrotto rispetto al resto della tradizione, sono accomunati dall’introduzione all’episodio nella parte finale del capitolo precedente 17 (duo ponamus exempla... ); visto che la lezione è presente anche nei codici della British Library, il loro progenitore doveva presentare la stessa lezione e il suo compilatore deve aver collazionato un esemplare vicino a questi codd.; i due mss. provenienti dalla Lambeth Palace Library presentano errori congiuntivi (o un ordo verborum peculiare) che si ritrovano spesso anche nel testo di Riccardo di Ciren18 cester , che evidentemente si basò su un parente stretto del progenitore di questi codici; altri errori congiuntivi dimostrano la parentela fra l’esemplare di Winchester 19 e quello oxoniense . Ulteriori riflessioni merita la diversa collocazione dell’episodio nei vari esemplari, che discuteremo nel paragrafo successivo.

16

L’esame dei testimoni mi ha portato a distinguere, in base alla presenza di alcune varianti significative, due famiglie principali: una prima, che tramanda la versione più antica del testo, legata a Rievaulx, e l’altra riconducibile a Westminster (v. MARZELLA, La tradizione manoscritta..., pp. 358-370). Gli altri quattro manoscritti appartengono a una famiglia secondaria, risultato della contaminazione delle altre due, come si dirà nell’introduzione alla mia edizione critica. 17

V. infra, p. 263, n. 28.

18

Alcuni esempi, limitandoci al testo dell’interpolazione: in puncto est invece di est in puncto; causam invece di causas; aspecturus per inspecturus; considerat per conscenderat. In altri casi Riccardo non riporta la lezione corrotta dei due codici della Lambeth Palace Library (restaurationem, per il corretto recreationem; deformissime per deformis). 19

Suscepit per suis cepit; fonte per fronte; deformissimi per deformis simie; linguam per lingua; visionis per iussionis.

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Fr. MARZELLA

2. Un episodio interpolato La trama della storia, in breve, è la seguente: Edoardo, da poco salito al trono, è riuscito a portare l’ordine nella nazione dopo anni di dominio straniero. Ha abolito il danegeld, ha riformato le leggi, ricostruito monasteri e aiutato i poveri attingendo denaro dai suoi tesori. Il suo regno segna anche l’inizio di una rinascita spirituale della nazione. Il diavolo osserva infastidito e trova un modo per ostacolare il virtuoso comportamento del re: istiga i vassalli a convincere Edoardo che è bene reintrodurre la tassa perché bisogna essere pronti a fronteggiare la costante minaccia di un nuovo attacco danese. Dopo un primo rifiuto, il re cede per stanchezza all’insistenza dei suoi consiglieri. Quando il denaro viene raccolto, questi conducono il sovrano davanti al tesoro: con grande stupore Edoardo vede apparire il diavolo, con le sembianze di una scimmia seduta sul mucchio di denaro, che schernisce il re, prendendosi la sua rivincita. Edoardo rimprovera i vassalli e ordina loro di restituire il denaro al popolo, e quando i vassalli propongono di impiegare il denaro per ricostruire i monasteri o riparare dei ponti o far del bene ai bisognosi, egli oppone un fermo rifiuto, sostenendo che niente di buono può esser fatto col denaro sottratto a poveri e vedove. La tassa pertanto viene definitivamente abolita e da quel giorno nessuno osa più reintrodurla. Il testo presenta delle caratteristiche stilistiche interessanti, che si possono osservare in particolare nella prima parte del racconto, in cui viene tratteggiato il contesto storico dell’episodio. Colpisce, per quanto riguarda la struttura del periodo, il prevalere dell’ipotassi, mentre, da un punto di vista formale, si deve rilevare il ricorso insistito ed eccessivo a espedienti retorici quali omoteleuto, anafora, asindeto, chiasmo, allitterazione, paronomasia, figura etimologica e altri bisticci verbali. Prenderemo in esame alcuni passaggi del testo per illustrare queste caratteristiche, a iniziare dal primo periodo. Principante ac propugnante piissimo rege Ædwardo, cum nutu diuino gens Anglorum, excusso Danice dominationis iugo, diu deploratam exuens seruitutem, in pristinam redisset libertatem et in antiquam refloreret dignitatem, rex insignis gratie, ab irruptione barbarica et hostili feriatus incursu, tanquam miles strenuus ac bellicosus uitiis spiritualibusque nequitiis bellum protinus indixit.

Il periodo si apre con due ablativi assoluti, principante ac propugnante piissimo rege Ædwardo, in cui si nota l’allitterazione di pr, e prosegue con due subordinate narrative (cum ... gens Anglorum ... in pristinam redisset libertatem et in antiquam refloreret dignitatem) sulle quali si innestano un altro ablativo assoluto (excusso ... iugo) e altre subordinate implicite (diu

UN EPISODIO INTERPOLATO DELLA VITA S. ÆDWARDI

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deploratam exuens seruitutem); infine la principale (rex insignis... indixit) e un participio congiunto (feriatus). Anche i periodi successivi sono utili per un’esemplificazione dello stile. Cepit etiam leges intermissas reformare, noue pacis iura promulgare, frena dare uitiis, uirtutibus iter liberum preparare. Cepit et crebris orationibus uacare, diuinis laudibus inuigilare, carnem mortificare et in celestibus spiritum dilatare apertisque thesauris suis cepit opes manu munifica spargere, ecclesias edificare, ornare monasteria, egenis alimenta, nudis indumenta languentibusque adiumenta necessaria ministrare, ratus thesauros sibi conseruari fidelius ac fructuosius in sinu pauperum quam intra murorum ambitum. Videt hec hostis antiquus et inuidet, anxiatur, cruciatur, dissecatur, torquetur, incenditur, uritur. Molitur insidias, tendit laqueos, dolos intendit, spargit lapides offensionis et petras scandali, sed fraus omnis decipitur, uirtus omnis eliditur, eluditur omnis conatus.

Per prima cosa notiamo l’anafora della forma verbale cepit, ripetuta tre volte; il nostro autore sembra voler conferire un certo ritmo al periodo anche grazie ai numerosi infiniti di verbi di prima coniugazione; si diletta in giochi paronomastici (es. alimenta/indumenta/adiumenta); frequente è poi il ricorso al chiasmo (per es. ecclesias edificare, ornare monasteria) spesso a conclusione di un tricolon asindetico (per es. molitur insidias, tendit laqueos, dolos intendit; fraus omnis decipitur, uirtus omnis eliditur, eluditur omnis conatus, il chiasmo mette in evidenza eliditur / eluditur, omnis compare in tutti i membri, nei primi due membri — che sono in parallelismo perfetto — gli altri termini sono anche isosillabici); nel caso delle infinitive frena dare uitiis, uirtutibus iter liberum preparare, l’inversione dell’ordine accusativo / verbo / dativo in dativo / accusativo / verbo è funzionale a mettere in evidenza le coppie contrastive frena / iter liberum e uitiis / uirtutibus; l’accumulo verbale in asindeto è frequente (uidet hec hostis antiquus et inuidet, anxiatur, cruciatur, dissecatur, torquetur, incenditur, uritur; si noti anche la climax), e non mancano altri casi di paronomasia (eliditur / eluditur) e di giochi etimologici (inferri / efferri, tendit / intendit, uidet / inuidet). Talvolta alcuni espedienti retorici possono concentrarsi in poche parole. È il caso del periodo nulli ceditur, parcitur nulli, nulli defertur, caratterizzato dal tricolon asindetico con doppio chiasmo e anafora del pronome nulli. Il testo da noi preso in esame era già stato ritenuto un’interpolazione da studiosi che non avevano una conoscenza approfondita della tradizione manoscritta della VERC20. A mio avviso è evidente come questo racconto, 20

Cf. The Middle English Verse Life of Edward the Confessor, ed. G. E. MOORE, Phi-

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Fr. MARZELLA

non attribuibile ad Aelredo, sia un’aggiunta al testo aelrediano, e fonderò la mia dimostrazione su solide prove che vengono anche dal controllo completo dei testimoni. Il primo argomento è proprio di tipo stilistico. Molte delle figure retoriche da noi prese in esame sono spesso utilizzate anche nella Vita. Ci limitiamo a pochi esempi tratti dalla dedica a Enrico II, dalla lettera all’abate Lorenzo e dalla praefatio21: nel passaggio usque ad haec infelicia tempora in quibus crebrescunt uitia et rarescunt uirtutes, semper pro patribus tales nati sunt filii, doctrina quorum indocti quique instruerentur, auctoritate fulcirentur, informarentur exemplo si nota, nella prima parte del periodo, il bisticcio con omoteleuto crebrescunt / rarescunt e la contrapposizione allitterante uitia / uirtutes22, poi il tricolon con chiasmo nel terzo membro, l’omoteleuto in -rentur delle forme verbali, la figura etimologica doctrina / indocti; nell’esortazione trimembre uideas in ea quod imiteris, uideas quod admireris, uideas in quo glorieris Aelredo ricorre all’anafora con variatio (uideas ... quod, uideas quod, uideas in quo) e ancora all’omoteleuto delle forme verbali; ritroviamo l’impostazione tripartita con anafora, variatio (eius ... eius ... de eius) e omoteleuto anche nel successivo eius igitur fidei me totum committens, eius obsequiis me totum dedens, de eius auxilio precibusque confidens. L’impiego da parte di Aelredo dei medesimi espedienti retorici però non è mai così insistito, ripetitivo, privo di misura, tanto eccessivo da risultare una goffa ostentazione di nozioni scolastiche, come accade nel testo qui preso in esame, che sembra invece essere opera di un autore troppo preoccupato dell’effetto. Il nostro racconto inoltre è aperto da un’ampia introduzione generale in cui si racconta come dopo la fine delle invasioni danesi l’Inghilterra conosca una nuova epoca di pace sotto la guida di Edoardo, che si affanna sia per il suo popolo con iniziative concrete, come l’abolizione della tassa, sia per la sua anima, combattendo contro i vizi e il peccato. Spesso i capitoli della Vita sono aperti da alcune brevi considerazioni introduttive dell’autore, che talvolta prende le mosse da un brano tratto dalle Sacre Scritture, ma nel caso del nostro testo la cornice iniziale è ben più lunga e fornisce delle coordinate storiche del tutto inutili a chi abbia finora letto la biografia di Aelredo. ladelphia, 1942, pp. XLIII-IV, e La Estoire de seint Aedward le rei Attributed to Matthew Paris, ed. K. Y. WALLACE (= Anglo-Norman Text Society, 41), London, 1983, pp. XXVI-VII. 21 22

Cf. PL 195, coll. 739B-740C.

Stessa contrapposizione che ritroviamo nel nostro testo, ma che è così scontata per una narrazione agiografica da non poter essere usata come prova della paternità aelrediana.

UN EPISODIO INTERPOLATO DELLA VITA S. ÆDWARDI

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Passiamo poi a un argomento di carattere strettamente filologico. Solo un terzo dei manoscritti della VERC a noi pervenuti riporta l’episodio e la maggior parte di questi codici offre, in generale, un testo della biografia piuttosto corrotto23. In altre parole, l’episodio non è presente nei codici più autorevoli della tradizione, in particolare nei migliori codici della famiglia “di Rievaulx”, quella cioè che preserva la versione certamente aelrediana del testo24. Inoltre nei manoscritti che lo riportano esso non compare sempre nello stesso punto dell’opera: nell’esemplare di Winchester la storia è collocata dopo l’ultimo capitolo della VERC (De monacho a triplici morbo sanato)25, nel manoscritto oxoniense dopo il capitolo sulla visione dei Sette Dormienti di Efeso (cap. XXVI), nei due codici custoditi nella British Library26 segue l’episodio del ladro sorpreso a rubare dal tesoro del re (Quomodo fur eo inspiciente thesauros eius furatus sit. VII)27 mentre nei restanti manoscritti lo precede28. Nel ms. XIII di Winchester l’episodio si rivela chiaramente un’aggiunta, perché sebbene si riferisca a Edoardo quando era ancora in vita, compare dopo la narrazione dei miracoli post mortem. Nel codice oxoniense — che, come si è detto29, è parente del codice di Winchester — il racconto è posto dopo il capitolo che narra la visione dei Sette Dormienti di Efeso, a sua volta preceduto dal racconto di un fatto storico, la morte del conte Godwin, avvenuta nel 1053, due anni dopo la soppressione del danegeld. Data la vicinanza cronologica fra i due avvenimenti, si potrebbe ipotizzare che chi ha inserito l’episodio del diavolo non lo abbia collocato prima di quello relativo alla morte del conte solo per non spezzare lo stretto legame tematico esistente fra quest’ultimo capitolo e il XXV, che lo precede e racconta la previsione della morte dei figli di Godwin; resta però più difficile spiegare perché la storia del danegeld sia posta dopo e non prima della visione 23

Con l’unica eccezione dell’esemplare cantabrigense, che ho collazionato completamente per la mia edizione della VERC, i codici che presentano questo episodio si sono rivelati, dopo una collazione parziale, assai corrotti e non utili per ricostruire il testo di Aelredo: v. MARZELLA, La tradizione manoscritta..., pp. 347 sgg. 24

V. supra, n. 16.

25

De monacho a triplici morbo curato, in PL 195, coll. 788-790.

26

Come si è detta (supra, p. 259) i due codici sono parenti.

27

Cf. PL 195, col. 746.

28

Nei manoscritti di Cambridge, Gloucester, Peterborough e della British Library i due episodi vengono così introdotti (a conclusione del cap. VI): Sane huius tante virtutis duo ponamus exempla. I codici custoditi nella Lambeth Palace Library concordano invece con il resto della tradizione e riportano Sane huius tante virtutis unum ponamus exemplum, con riferimento al solo episodio del ladro sorpreso a rubare. Cf. supra, p. 259. 29

V. supra, p. 259.

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dei Sette Dormienti, cioè immediatamente dopo il capitolo sulla morte di Godwin. Gli altri codici dunque presentano quest’episodio prima o dopo il capitolo che parla del ladro sorpreso a rubare dal santo, il quale generosamente lascia che il giovane rubi e poi gli permette di scappare; il nesso fra le due storie è evidente: entrambe sottolineano il disprezzo del denaro da parte di Edoardo, presentato come un pecunie contemptor. La diversa collocazione dell’episodio e il fatto che la storia appaia come un racconto in sé concluso e quasi indipendente dal contesto potrebbero far pensare a una prima circolazione del testo sotto forma di schedula, cioè un breve resoconto — custodito presso il suo santuario — di un miracolo o di una storia che ha per protagonista il santo30. Su questo torneremo31, per il momento aggiungiamo però che sia il progenitore dei manoscritti di Winchester e di Oxford, sia quello dei due codici della Lambeth Palace Library presentavano certamente un testo più corrotto rispetto a quello degli altri manoscritti: la collocazione inusuale, rispetto agli altri testimoni, dell’episodio non deve necessariamente far pensare a uno stadio più antico della trasmissione dello stesso. Per esempio, non è escluso che il compilatore del manoscritto progenitore del codice di Winchester e di quello di Oxford possa aver derivato l’episodio da un codice che lo poneva prima del capitolo sul fur, in quella che forse era la sua collocazione quando fu aggiunto per la prima volta a un esemplare della biografia, e averlo aggiunto in appendice alla Vita, come lo ritroviamo nel codice di Winchester; il copista dell’esemplare oxoniense, accortosi dell’incongruità della collocazione, avrebbe potuto tentare di inserire l’episodio nel testo, seguendo un vago criterio cronologico. Ci sono ancora altre prove a conferma dell’ipotesi dell’interpolazione. Aelredo accenna all’abolizione del danegeld in un altro punto dell’opera, nel capitolo XII (De visione quae apparuit cuidam incluso): Insuper et tributum illud grauissimum quod tempore patris sui primo classi Danicae pendebatur, postmodum uero fisco regio annis singulis inferebatur, regia liberalitate remisit, et ab onere hoc importabili in perpetuum Angliam absoluit 32. 30

Sulla natura di tali schedulae, che furono fra le fonti usate da Osberto di Clare, autore di una più antica biografia del Confessore, v. The Life of King Edward Who Rests at Westminster, Attributed to a Monk of Saint-Bertin, ed. F. BARLOW, 2a ed., Oxford, 1992, pp. XXXVXXXVI e F. MARZELLA, L’anello del re e il «paradiso» dell’evangelista. Genesi di un episodio della “Vita sancti Edwardi regis et confessoris” di Aelredo di Rievaulx, in Hagiographica, 18 (2011), pp. 217-261. 31 32

V. infra, p. 268.

De visione quae apparuit cuidam incluso de ipse rege, in PL 195, coll. 752-754. Nel nostro testo ci sono alcune riprese verbali da questo capitolo. V. infra, p. 266.

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Se questo episodio avesse fatto parte del piano originale dell’opera, comparendo dopo il capitolo VII, come nella maggior parte dei testimoni, non si spiegherebbe perché Aelredo sarebbe tornato nuovamente sull’argomento solo qualche capitolo dopo. Aelredo non può essere l’autore di quest’episodio anche per un altro motivo: nella chiosa alla storia si ricorda come nessuno osò reintrodurre la tassa dopo che questa fu abolita da re Edoardo. Aelredo dedica la sua opera a re Enrico II, discendente di Edoardo per parte di madre, ed Enrico, come abbiamo già ricordato, impose la tassa almeno in due occasioni. Il cistercense, nella breve notizia dell’abolizione della tassa nel cap. XII, si conforma alla tradizione secondo la quale Edoardo volle che la tassa fosse abolita in perpetuum, ma limita la notizia a poche righe, forse proprio per evitare qualsiasi incidente diplomatico con il suo dedicatario. Infine, l’episodio non compare in un’anonima versificazione latina della VERC composta probabilmente fra il 1163 e il 1170 su richiesta di Lorenzo, l’abate di Westminster, già committente della biografia scritta da Aelredo33: la forte aderenza della biografia in versi a quella in prosa — nella versione rimaneggiata a Westminster — lascia supporre che la storia del diavolo seduto super acervum pecunie fosse assente nell’esemplare della VERC usato dall’anonimo poeta. L’episodio non è incluso neanche nella più antica versificazione anglo-normanna della VERC, La Vie d’Édouard le Confesseur, attribuita a una monaca di Barking e composta in quegli stessi anni34. La questione dell’origine e dello scopo del racconto resta aperta. Ci limitiamo a registrare i dati oggettivi e a proporre qualche riflessione. Sebbene non si possa escludere una precedente circolazione del racconto in forma orale o in una versione scritta meno ricca di dettagli, il testo a noi giunto compare inizialmente solo in testimoni della VERC, inizia quindi a circolare con la Vita in un periodo compreso fra il 1163 e la fine del secolo. È possibile che il testo sia stato scritto anche prima del 1163, si potrebbe addirittura pensare che fosse fra il materiale fornito dall’abate Lo33

Alcuni versi dell’opera erano stati pubblicati da H. R. LUARD in Lives of Edward the Confessor, London, 1858, pp. 381-383. Ho curato un’edizione critica dell’opera, di fatto l’editio princeps, che presto pubblicherò insieme alla Vita aelrediana, nella mia tesi di laurea specialistica presso l’Università degli Studi dell’Aquila (Il poema anonimo Vita Sancti Edwardi versifice. Introduzione ed edizione critica, L’Aquila, 2007, relatore prof.ssa Franca Ela Consolino). V. F. MARZELLA, ‘Et noua cum prosa uis tibi metra dari’: il poema anonimo Vita sancti Ædwardi uersifice (BHL 2425), in Sacris Erudiri, 53 (2014), pp. 345-372. 34 Per un’edizione, v. La Vie d’Édouard le Confesseur. Poème anglo-normand du XIIe siècle, ed. Ö. SÖDERGÅRD, Uppsala, 1938. Per una traduzione inglese v. La Vie d’Edouard le Confesseur, by a Nun of Barking Abbey, ed. and trans. J. BLISS, Liverpool, 2014.

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renzo ad Aelredo per scrivere la Vita e che fu scartato dal cistercense proprio per evitare di offendere il suo dedicatario Enrico. L’unico elemento in comune con il breve accenno alla soppressione del danegeld nella VERC è l’uso della formula in perpetuum (...) absolvit, troppo poco per stabilire con certezza il possibile rapporto fra i testi. Colpiscono poi due aspetti della parte introduttiva del racconto: la già notata35 genericità delle prime righe e l’assenza di una formula di riallaccio alla narrazione della VERC. Ne deduciamo alcune informazioni: il testo non fu concepito per essere immediatamente inserito nella VERC (un capitolo da aggiungere alla Vita non inizierebbe certo con principante et propugnante piissimo rege Ædwardo, un’informazione che sembra solo fornire le coordinante cronologiche del racconto), né, quando fu interpolato, si provvide a modificarne l’introduzione per adattarlo alla VERC. In altre parole, il testo sembrerebbe concepito — prima o dopo la stesura della VERC — per sussistere come racconto autonomo o magari incluso in un’altra opera ed è stato poi goffamente inserito nella Vita36. Ci si può chiedere allora quale fosse l’intento di chi ideò la storia. Certamente colpisce la cornice storica della vicenda, che prende le mosse da un evento effettivamente avvenuto, l’abolizione della tassa da parte di Edoardo, e che non poteva non richiamare alla memoria del lettore le ultime esazioni e la definitiva abolizione da parte di Enrico II. Ci si chiede se non si debba vedere in questo racconto un intento polemico, cioè il proposito di denunciare la rapacità di Enrico, che osò imporre la tassa anche dopo l’abolizione da parte del Confessore37. Il succo della storia sembra essere il seguente: il denaro è lo sterco del diavolo ed è bene che un sovrano si prenda cura della sua gente donando piuttosto che accumulando. Edoardo, re generoso che combatte i vizi e si oppone alla vessazione dei più deboli, risulterebbe allora un polemico termine di paragone per Enrico 35

Cf. supra.

36

Un altro elemento che depone a favore dell’autonomia del testo dalla Vita: la formula di giuramento per Deum Deique matrem, presentata come formula solitamente usata da Edoardo, ma mai citata nella VERC. 37

Secondo l’interpretazione di W. Stubbs di un passo della biografia di san Tommaso Becket scritta da Edward Grim, durante il concilio di Woodstock, nel luglio del 1163, Tommaso Becket si sarebbe opposto alla decisione del re di rimpinguare le casse regie con il danegeld. Si potrebbe allora formulare l’ipotesi che l’episodio sarebbe stato ideato dalla fazione di Becket in aperta polemica con il re. In realtà il problema non si pone perché l’interpretazione si è rivelata errata, dal momento che la biografia scritta da Grim farebbe riferimento non al danegeld, ma a un’altra tassa, lo scheriffs’ aid, v. J. H. ROUND, The Alleged Debate on Danegeld (1163), in English Historical Review, 5 (1890), pp. 750-753, ristampato in Feudal England, London, 1964, pp. 377-380. V. anche GREEN, Last Century... (cf. supra, n. 2), pp. 255-257.

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e incarnerebbe un ideale di regalità tradito dal suo discendente. La storia potrebbe essere stata concepita prima della stesura della Vita (e forse fu proprio l’intento polemico che spinse Aelredo a scartarla) e fu reinserita nella Vita solo successivamente. Può far propendere per la recenziorità della VERC un dato: nella fonte principale dell’abate di Rievaulx, la Vita beati Eadwardi regis Anglorum38 scritta da Osberto di Clare, manca qualsiasi cenno al danegeld ed Aelredo potrebbe aver effettivamente derivato dal nostro testo la notizia dell’abolizione della tassa39. Va notato poi come questa leggenda riesca anche a colmare un lacuna nel dossier agiografico del Confessore. Uno dei topoi più comuni della biografia di un santo è senz’altro l’incontro-scontro fra il diavolo, tentatore o derisore, e l’uomo di Dio. Né la biografia scritta da Aelredo né le opere che l’hanno preceduta presentano alcun episodio simile. L’unico personaggio della Vita aelrediana che viene presentato con antagonista del protagonista è il suocero di Edoardo, Godwin, malvagio calcolatore pronto ad approfittarsi della bontà del sovrano, che, seppur presentato con tratti quasi demoniaci dal cistercense40, è lungi dall’essere un diavolo. Si può supporre allora che la leggenda sia stata concepita proprio al fine di colmare questa lacuna. A ben pensare però ci sarebbero stati modi diversi di presentare la figura del diavolo: l’episodio potrebbe avere avuto una struttura più consueta, senza chiamare in causa l’abolizione della tassa, e il protagonista avrebbe potuto riportare una più netta vittoria sul nemico. Invece nel nostro racconto Edoardo non compie alcun miracolo — se nel periodo conclusivo si parla di miraculum è solo nell’accezione più generica di “prodigio” — ed è per giunta deriso dal diavolo-scimmia. La mancanza di un incontro, o uno scontro, fra santo e demonio nelle Vitae non sembra poter essere il motivo principale per l’ideazione di questa storia. Inoltre, come già notato, il testo pare essere concepito come un racconto autonomo. La cornice storica dell’episodio fa invece un peso notevole nell’economia della narrazione. Dobbiamo allora limitarci a ipotizzare che chi per 38 Per un’edizione v. M. BLOCH, La Vie de S. Édouard le Confesseur par Osbert de Clare, in AB, 41 (1923), pp. 5-131. 39

Un elemento questo che si somma all’espressione in comune col testo interpolato (in perpetuum... absoluit), senza però risultare un argomento definitivo per trarre conclusioni certe circa la dipendenza di Aelredo dal nostro racconto. 40

Si vedano per es. le descrizioni dell’indole del conte e del suo comportamento nei cap.

VIII (cf. De castis nuptiis, et virginitate ejus et reginae, in PL 195, coll. 747-748) e XXV (cf. De

miserabili morte Godwini comitis, col. 766). Si noterà come nel secondo caso compaia anche il verbo temptare.

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primo impugnò lo stilo per registrare questa storia — con o senza intento polemico, prima o dopo la stesura della VERC — forse si basò su una tradizione orale nata intorno alla notizia dell’abolizione della tassa, arricchendola di alcuni elementi tratti dalla tradizione monastica, come le sembianze scimmiesche del diavolo, sulle quali torneremo41. Ci sono invece maggiori elementi per tentare di risolvere un altro problema, quello dell’inclusione della storia nella Vita. Dobbiamo chiederci chi potrebbe avere avuto interesse ad arricchire la biografia del Confessore. Inevitabile pensare all’ambiente di Westminster, che sotto la guida dell’abate Lorenzo (m. 1173) aveva ottenuto la canonizzazione di Edoardo e che ovviamente aveva notevoli interessi nella promozione del culto del santo che riposava fra le mura dell’abbazia regale. Una volta che la storia fu nota ai monaci, essi dovettero provvedere ad aggiungerla al novero delle storie prodigiose che avevano come protagonista il rifondatore di Westminster42. I dati che si possono ricavare dalla tradizione manoscritta43 sembrano puntare in questa direzione. Il nostro testo — abbiamo già avuto modo di notarlo44 — deve essere stato interpolato a poca distanza dalla prima stesura della VERC, dal momento che tre dei nove manoscritti in cui è presente sono stati compilati nel tardo XII secolo. Pietro di Cornovaglia (c. 1140-1221) incluse alcuni episodi della Vita nel suo Liber Revelationum, composto fra 1200 e 1206, fra questi c’è anche il nostro testo, evidentemente presente dopo l’episodio del fur nel manoscritto consultato da Pietro45. Pietro ha modificato solo in 41

Cf. infra, p. 274-276.

42

Se la stesura del testo avvenne prima del 1163 i monaci potrebbero avere tentato di far includere l’episodio nella Vita ed Aelredo potrebbe aver ritenuto più prudente accantonarlo onde evitare incidenti diplomatici con Enrico II. 43 La storia compare principalmente in manoscritti della famiglia “di Westminster”; cf. supra, p. 259. 44 45

Cf. supra, p. 265.

Ringrazio per l’informazione il prof. Richard Sharpe. Per uno studio del testo basato sull’analisi dell’unico testimone (ms Lambeth Palace Library 51) vedi R. EASTING – R. SHARPE, Peter of Cornwall’s Book of Revelations (= Studies and Texts, 184; British Writers, 5), Toronto, 2013. Gli episodi della Vita riportati da Pietro sono, nell’ordine (il numero romano corrisponde al quello del capitolo della Vita nella mia edizione, i titoli dei capitoli invece sono quelli dell’edizione della PL; gli episodi tratti dalla Vita si trovano ai ff. 433v-440v del ms. Lambeth Palace Library 51, la storia del danegeld è ai ff. 434r-435r): IIII, Quid de eo et regno ejus cuidam episcopo reuelabatur Glastoniae; apparizione del demonio dopo dell’abolizione del danegeld; IX, Quomodo in spiritu regem Daciae diuino judicio uidit submersum; XII, De uisione quae apparuit cuidam incluso de ipso rege; XIII, De contracto quem rex sanctus portando curauit; XIIII, De ecclesia Westmonasterii quam sanctus Petrus dedicauit; XVIII, Quomodo super altare Jesum Christum in sacramento cum quodam comite uidit; riassunto dei capp. XXXXIII, De caeco per manuum ejus lauaturam sanato, De alio caeco similiter per beatum uirum

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parte l’episodio, riducendo sensibilmente la parte iniziale. Certamente una copia della VERC contenente questo racconto doveva essere custodita anche a Westminster almeno nel XIV secolo dal momento che era presente nell’esemplare (o negli esemplari) dell’opera utilizzato da Riccardo di Cirencester (c. 1335 – c. 1401) per il suo Speculum historiale de gestis regum Angliae, una cronaca che racconta gli avvenimenti accaduti fra 447 e 1066, nella quale Riccardo, monaco a Westminster, accolse l’intera biografia aelrediana di sant’Edoardo46. Una volta entrato a far parte del dossier agiografico di sant’Edoardo, l’episodio comparve anche in alcune biografie scritte nei secoli successivi. Lo troviamo in La Estoire de seint Aedward le rei (vv. 934-961)47, poema anglo-normanno del XIII secolo che si basa principalmente sulla VERC ed è stato attribuito a Matteo Paris (m. 1259). L’autore all’inizio dell’episodio dichiara: «s’avint par une aventure, / dunt me testmoinne l’escripture» (vv. 934-935). Si può supporre che abbia pertanto usato una copia della VERC nella quale era contenuto anche questo capitolo. La storia è tratteggiata brevemente e manca qualsiasi riferimento alla forma scimmiesca assunta dal diavolo. Nella miniatura che accompagna il testo nell’unico e magnifico testimone dell’opera, il ms. Ee.3.59 dell’University Library di Cambridge (f. 9v), il diavolo viene raffigurato con le più consuete sembianze di un satiro48. Due le ipotesi: l’autore del poema potrebbe aver coilluminato, De quodam caeco regio tactu similiter curato, De tribus caecis et uno monoculo per beatum uirum illuminatis; XXVI, Quid ei Dominus de septem dormientibus spiritualiter reuelauerit; XXVII, De annulo quam sanctus rex beato Joanni euangelistae dedit, et quomodo eumdem receperit; XXIX, De uisione quam uidit in extremis; XXXIIII, De uictoria regis Haraldi per beati regis merita; XXXV, Quomodo caecus beatum Edwardum uidit de sepulcro exire, et ita uisum recepit. Pietro riassume la prima parte del racconto del danegeld, il testo è riportato integralmente solo a partire da Quorum [illorum in Liber Revelationum] instantiam... 46 V. Ricardi de Cirencestria Speculum historiale de Gestis regum Angliae, ed. J. E. B. MAYOR (= Rolls Series, 30), 2 vol., London, 1863-1869. L’episodio del danegeld si legge alle pp. 214-217 del volume II. Anche in questo caso l’episodio del diavolo precede quello del ladro; Riccardo concorda con gran parte della tradizione manoscritta (e in particolare con i codici della Lambeth Palace Library, con cui il suo testo ha alcune variae lectiones in comune, v. infra) scrivendo però unum ponamus exemplum a conclusione dell’episodio che precede la storia del danegeld. 47 48

V. La Estoire de seint Aedward le rei… (cf. supra n. 20), pp. 27-28.

Per una versione digitale del manoscritto v. http://cudl.lib.cam.ac.uk/view/MS-EE00003-00059/. Il diavolo è raffigurato in maniera analoga anche nel ms. B 11. 2 del Trinity College di Cambridge, che contiene, oltre a una celebre Apocalisse miniata del XIV sec., anche una serie di illustrazioni degli episodi principali della Vita di sant’Edoardo, compilata nel XV secolo e proveniente da Westminster; secondo M. R. James le immagini assomigliano alle scene scolpite nella cornice di pietra sul fianco della tomba del santo; aggiunge lo studioso inglese: «Both in selection and in composition the pictures in our MS. are so closely related to the sculptures that the latter might well be supposed to have been adapted from them». V. M. R. JAMES,

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nosciuto la storia attraverso altre fonti scritte o orali che non raccontavano delle sembianze scimmiesche assunte dal diavolo o, più semplicemente, potrebbe aver semplificato il racconto trovato in una copia interpolata della Vita, tralasciando il dettaglio dell’aspetto del diavolo, tutto sommato non fondamentale. Anche in un’altra biografia medioinglese del re, un’opera in prosa che fu scritta nel XV secolo e segue da vicino il testo della VERC, troviamo l’episodio, collocato prima della storia del giovane ladro: la narrazione medioinglese è del tutto analoga a quella del nostro testo, del diavolo si dice che fu visto dal re «in lykenes of an ape foule deformed syttyng upon the tresoure»49. 3. Giraldo Cambrense e Ruggero di Hoveden A conferma della discreta fortuna della leggenda ci sono ulteriori testimonianze. La storia viene riferita brevemente anche da Giraldo Cambrense (m. 1223) nel suo De principis instructione, più precisamente nella prima distinctio dell’opera, probabilmente composta nell’ultima decade del XII secolo50. Riportiamo per intero il racconto di Giraldo: Item et aliud principis ejusdem factum memoratu dignum reputo. Cum enim contra Dacorum et Norwagiencium irruptiones in insulas navigio crebras, compulsus a suis et valde invitus, gravem per totum regnum exactionem et collectam, quae lingua eorum Daneglit dici solet, quasi contra Dacos collectam, quorum repentinus tunc temporis formidabatur adventus, fieri fecisset, monitu suorum pecuniam ut coadunatam cerneret accessit. Et statim super acervum argenteum et tumulum congestae pecuniae grandem datum est ei diabolum in forma horribili assumpta sedentem et tanquam suam occupantem corporeis oculis intueri. Quo viso, fecit archiepiscopos et episcopos regni sui necnon et proceres convocari, quibus et hoc ostenso, protinus per ministros, vicecomites et ballivos provinciarum omnium singulis singula quibus extorta fuerant, nihil inde prorsus sibi retinendo, restitui fecit universa (distinctio I, ed. WARNER, vol. 8, p. 130).

Giraldo riporta questa storia insieme ad altri due episodi della Vita di sant’Edoardo, presentato come l’unico sovrano anglosassone a essersi distinto per il suo comportamento virtuoso insieme a sant’Osvaldo. La leggenda dell’apparizione del diavolo è preceduta dall’episodio del giovane The Western Manuscripts in the Library of Trinity College, Cambridge: a Descriptive Catalogue, Cambridge, 1900, I, pp. 283-286. 49 The Middle English Verse Life… (cf. supra, n. 20), pp. 79-80. All’episodio del danegeld si accenna brevemente anche nella Nova Legenda Angliae, v. ibid., p. XLIII. 50

Cf. Giraldus Cambrensis, De principis instructione liber, ed. G. F. WARNER (= Rolls Series, 21; Giraldi Cambrensis opera, 8), London, 1891, pp. XIV-XX.

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ladro sorpreso a rubare nella camera del re e seguita dalla visione dell’annegamento del sovrano danese avuta dal santo durante una messa. Giraldo potrebbe aver avuto conoscenza diretta del testo aelrediano e la sua versione della storia si presenta come un riassunto della nostra interpolazione; l’unica novità — si ammetterà, non troppo significativa, potrebbe essere un’amplificazione dell’autore — consiste nella convocazione di vescovi e notabili da parte del re immediatamente dopo l’apparizione51. L’uso del medesimo termine (acervus) per indicare il mucchio di monete sul quale siede il diavolo potrebbe deporre a favore di una derivazione del passaggio del De principis instructione dal nostro racconto, così come il più generico in forma horribili assumpta potrebbe corrispondere a in specie deformis simie, che nei mss. Oxford St. John’s College 149 e Winchester Cathedral Library XIII è corrotto in in specie deformissimi, mentre in ms. Lambeth Palace Library 331 si legge in specie deformissime simi e in ms. Lambeth Palace 761 in specie deformis sime. La dipendenza di Giraldo dal testo aelrediano è confermata da altre e più significative riprese verbali presenti negli altri episodi della Vita di sant’Edoardo riportati nel De principis instructione. A proposito di Ugolino, il camerarius — cioè custode del tesoro — del re che potrebbe sorprendere il giovane ladro (di cui si narra nel cap. VI della Vita), Giraldo scrive erat enim hoc camerario nomen, mentre in Aelredo leggiamo hoc erat enim regii cubicularii nomen52. Il re danese secondo Giraldo annega cum ad navem deferretur in scafa, mentre nella recensione della Vita sancti Ædwardi da me ricondotta all’ambiente di Westminster53 leggiamo dum de scapha in nauem conscendere pararet; e ancora qualche rigo più sotto nel De principis instructione leggiamo: notatis itaque die simul et hora diei..., probabile ricordo dell’aelrediano notatur tempus et hora. Certo quest’ultimo episodio presenta delle innovazioni non trascurabili rispetto al testo della Vita: Giraldo ci informa che la messa durante la quale Edoardo ha la visione viene celebrata dall’arcivescovo di Canterbury, Edoardo avrebbe avuto la visione mentre si era leggermente assopito, il primo a chiedere ragione del sorriso del re sarebbe stato il fido conte Edwin (mai nominato nella biografia del re). Quest’ultima innovazione rispetto alla Vita si può spiegare sostenendo che Giraldo sia stato influenzato dal ricordo di un’altra visione del Con51 Nel nostro racconto Edoardo si rivolge direttamente ai suoi clientes, già presenti nel luogo in cui era stato accumulato il denaro. 52 Cubicularius è sinonimo di camerarius, v. C. DU CANGE, Glossarium mediae et infimae latinitatis, Graz, 1954 (ed. originale Paris, 1688), s. v. camerarius. 53

V. F. MARZELLA, La tradizione manoscritta... (cf. supra, n. 1).

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fessore, quella in cui vide i Sette Dormienti cambiare il lato sul quale dormivano. Nella Vita, dopo la visione della morte del sovrano danese, Edoardo racconta quanto gli è stato rivelato alle persone presenti alla messa. Dopo la visione dei Sette Dormienti, Edoardo è seguito dal duca Aroldo che gli chiede ragione del sorriso accitoque uno episcoporum et abbatum uno, come avrebbe fatto — secondo Giraldo, mutatis mutandis — Edwin, che chiamò l’arcivescovo e altri vescovi e notabili (convocato ad hoc archiepiscopo et episcopis magnisque viris tam saecularibus quam ecclesiasticis). Se ne deduce che il racconto di Giraldo deriva dalla Vita, più precisamente dalla versione della stessa che circolò a Westminster e nell’Inghilterra meridionale. L’ipotesi di un utilizzo di una fonte intermedia — alla quale sarebbero attribuibili le novità rispetto al testo aelrediano — da parte di Giraldo non può essere esclusa del tutto, ma risulta improbabile e tutt’altro che necessaria, visto che le novità potrebbero essere state introdotte proprio da Giraldo. In ogni caso, nell’esemplare della Vita usato da lui o dalla sua fonte l’episodio del diabolus super acervum doveva essere probabilmente collocato dopo il capitolo sul giovane fur. Conobbe la nostra leggenda anche Ruggero di Hoveden (m. 1201)54, che la incluse insieme ad altri episodi della Vita del Confessore nella sua Chronica, in cui registrò gli eventi principali della storia inglese dal 732 fino ai suoi tempi. Questa la versione di Ruggero: Quadam die contigit, quod cum praedictus rex Anglorum Edwardus, regina et comite Haraldo deducentibus, aerarium suum intravit, ut videret pecuniam magnam, quam regina et comes Haroldus, rege ipso nesciente, collegerant ad opus regis, scilicet per singulos comitatus totius Angliae de unaquaque hida 55 terrae quatuor denarios, ut rex inde contra Natale Domini pannos emeret ad opus militum et servientium suorum; cumque rex intrasset aerarium suum, comitantibus regina et comite Haroldo, vidit Diabolum sedentem super denarios illos, et ait illi rex, “Quid hic facis ?” Cui daemon respondit: “Custodio hic pecuniam meam”. Et dixit ei rex: “Conjuro te per Patrem et Filium et Spiritum Sanctum, ut indices mihi quamobrem pecunia ista tua est”. Et respondens dixit ei daemon: “Quia injuste adquisita est de substantiis pauperum”. Illi autem qui illum comitabantur stabant stupefacti, audientes quidem illos loquentes, neminem autem videntes praeter solum regem; et ait illis rex: “Reddite denarios istos illis a quibus capti sunt”. Et fecerunt sicut praecepit illis rex (ed. STUBBS, vol. 1, p. 110). 54 Per informazioni vedi J. B. GILLINGHAM, Two Yorkshire Historians Compared: Roger of Howden and William of Newburgh, in The Haskins Society Journal, 12 (2002), pp. 15-37. Per un’edizione v. Chronica magistri Rogeri de Hovedene, ed. W. STUBBS (= Rolls Series, 51), 4 vol., London 1868-1871. 55

Per l’uso della preposizione contra in luogo di circa, v. DU CANGE, Glossarium mediae et infimae latinitatis... (cf. supra, n. 52), s. v. contra.

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Questo breve racconto si differenzia dall’interpolazione alla Vita per diversi elementi: 1) il denaro sarebbe stato raccolto dalla regina Edith e da suo fratello Aroldo, all’insaputa del re; Edith e Aroldo avrebbero poi condotto Edoardo nella stanza del tesoro; 2) manca un esplicito riferimento al danegeld56, ma viene introdotto un preciso (e verosimile)57 dato “tecnico”, la pretesa di quattro scellini per ogni hide58 di terra; 3) viene fornita un’indicazione puntuale circa la finalità della riscossione del denaro e il periodo dell’anno in cui la tassa fu esatta. Anche in questo testo manca qualsiasi riferimento alle sembianze scimmiesche assunte dal diavolo. La presenza di questi elementi rende più problematica la valutazione del rapporto fra la Chronica e la Vita interpolata. Viste le novità della prima rispetto alla seconda ci si potrebbe chiedere se Ruggero abbia attinto a una fonte diversa dalla Vita. Gli episodi dedotti dal dossier agiografico del Confessore, oltre alla storia dell’apparizione del diavolo, sono tre: la visione della morte del re danese, la leggenda dell’anello donato da sant’Edoardo a san Giovanni, la guarigione di uno storpio portato sulle spalle da Edoardo e deposto nella chiesa di Westminster. In questi racconti non ci sono significative riprese verbali del testo aelrediano59, mentre ogni storia presenta novità importanti rispetto ai corrispettivi capitoli della Vita: nel primo episodio il vescovo che celebra messa teme di aver causato il riso di Edoardo e per questo chiede spiegazioni al re al termine della celebrazione; san Giovanni avrebbe riconsegnato l’anello a un solo pellegrino (e non a due, come racconta Aelredo) nello stesso giorno in cui Edoardo glielo aveva consegnato; lo storpio sarebbe stato secondo Ruggero un lebbroso, guarito da Edoardo nel giorno della sua incoronazione. Tali novità rispetto al testo di Aelredo potrebbero essere attribuite tanto a Ruggero quanto a una fonte intermedia che potrebbe aver modificato e compendiato questi episodi che in ogni caso deriverebbero, in ultima istanza, dalla Vita. Anche se la storia del diavolo presenta novità di un certo rilievo, non

56

Ruggero riporta la notizia dell’abolizione del danegeld poco più sopra, quando, raccontando gli eventi del 1051, scrive: Rex Eadwardus absolvit Anglos a gravi vectigali xxxviiio anno ex quo pater suus Egelredus primitus id Danicis solidariis solvi mandarat (ed. STUBBS, vol. 1, p. 96). 57 Per indicazioni sull’ammontare del tributo pagato per il danegeld, v. GREEN, The Last Century... (cf. supra, n. 2), passim. 58

Si tratta di un’unità di misura terriera adottata per la tassazione sin dai tempi anglosassoni. V. Oxford English Dictionary, s. v. hide, n2 (http://www.oed.com/search?searchType= dictionary&q=hide&_searchBtn=Search). 59

Solo nel caso della visione della morte del re danese viene usata un’espressione (notatis die et hora) simile a quella che si trova nella Vita (notatur tempus et hora).

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ultima l’indicazione tecnica del numero di scellini per hide, sembra lecito supporre, dal momento che essa compare nella Chronica insieme ad altri episodi presenti nella Vita, che Ruggero non l’abbia derivata da una fonte diversa da quella degli altri racconti di miracoli operati dal santo re60. 4. Diabolus simia Dei Vorrei ora soffermarmi sul particolare aspetto assunto dal diavolo61 nel testo interpolato. La scimmia è associata al diavolo nel fortunato detto diabolus simia Dei che probabilmente prende le mosse da un passo di Tertulliano (De praescriptione haereticorum, XL), in cui il diavolo viene descritto come un pessimo imitatore di Dio (questa l’accezione in cui nel detto deve intendersi simia)62. Nei bestiari la scimmia non gode di particolare fortuna ed è associata al diavolo a causa del suo aspetto “deforme”. Così il Fisiologo latino (versione b): Similiter et simia figuram habet diaboli: sicut enim simia caput quidem habet, caudam uero non habet; et licet totus turpis sit, tamen posteriora eius satis turpia et horribilia sunt. Sic et diabolus caput quidem habuit, caudam uero non habuit; hoc est, initium habuit cum esset angelus in caelis, sed quia hypocrita et dolosus fuit intrinsecus, perdidit caput; nec caudam habet, id est sicut periit ab 63 initio in caelis, ita et in fine totus peribit .

La scimmia appartiene al bestiario infernale e il diavolo può evidentemente manifestarsi assumendo sembianze scimmiesche. Il nostro Edoardo non è stato certo l’unico a essere sorpreso da simili apparizioni. Sembra che il diavolo si compiaccia di turbare con tali sembianze soprattutto la quiete dei monasteri cistercensi, come riferiscono alcuni testi scritti fra la fine del XII secolo e l’inizio del XIII. 60 L’editore della Chronica, W. Stubbs, si limita a osservare (Chronica magistri Rogeri... [cf. supra n. 54], vol. 1, p. XXXIII): «this (= the account of the miracles of Edward the Confessor) is not necessarily original, but I have not been able to trace the actual words employed in any legendary Life of Edward». 61

Sul diavolo nel Medioevo rimando a A. GRAF, Il diavolo, 2a ed., Milano, 1889; J. B. RUSSELL, Il diavolo nel Medioevo, Roma – Bari, 1987 (ed. originale Lucifer. The Devil in the Middle Ages, Ithaca – London, 1984); R. MUCHEMBLED, Une histoire du diable, XIIe-XXe s., Paris, 2000; Il diavolo nel Medioevo. Atti del XLIX convegno storico internazionale, Todi 1417 ott. 2012, Spoleto, 2013. Sull’iconografia del diavolo v. per es. L. LINK, Il diavolo nell’arte: una maschera senza volto, Milano, 2001 (ed. originale The Devil: A Mask Without A Face, London, 1995) e il contributo di A. E. MAKHOV in Angels, Devils. The Supernatural and Its Visual Representation, ed. G. JARITZ, Budapest, 2011. 62

Si veda per es. RUSSELL, Il diavolo nel Medioevo..., p. 258 n. 10: “la scimmia è simbolo di satana che imita e dileggia Dio”. 63

p. 38.

Physiologus Latinus. Éditions préliminaires, versio B, ed. F. J. CARMODY, Paris, 1939,

UN EPISODIO INTERPOLATO DELLA VITA S. ÆDWARDI

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Il ms. Troyes, Bibl. mun. 946, contiene il Collectaneum Exemplorum et visionum Clarevallense, raccolta di aneddoti, exempla, racconti miracolosi e visioni composta a Clairvaux sul finire del XII secolo64. Secondo questo testo il diavolo si sarebbe aggirato sotto forma di scimmia addirittura nel coro dell’abbazia di Clairvaux durante una veglia, deridendo i monaci che si erano assopiti, battendo le mani e congratulandosi per la loro negligenza: Semper hostis antiquus bonis actibus inuidet et de uirtutum detrimento gaudet. Narrauit quidam quod in Clara Valle, nocte quadam cum sacre celebrarentur uigilie , quidam uidit malignum spiritum per occidentalem ingressum chori in specie simmie intrare ad uigilias, qui per medium chori incedens, uigilantes monachos transibat, dormientes uero deridebat, stans ante eos plaudens manibus, de eorum negligentia gratulans et defectu. In crastino tenuit ille rem sub silentio et noluit reuelare. Sequenti uero nocte uidit similiter diabolum in eadem effigie ita facientem. Postea uisionem propalauit et deinceps simmiam transfi65 gurationis non uidit .

Come nel nostro racconto, le sembianze scimmiesche del diavolo sembrano strettamente connesse con la derisione: in entrambe le storie il diavolo si fa beffe dei malcapitati di turno perché questi son venuti meno al loro dovere (i monaci non sono riusciti a rimanere svegli) o hanno compiuto azioni poco virtuose (Edoardo ha permesso che fosse sottratto del denaro ai bisognosi). Corrado di Eberbach (m. 1221) nel suo Exordium Magnum Cisterciense ci racconta un miracolo post mortem di Bernardo di Chiaravalle, che ripara al maligno intervento di un diavolo presentatosi ancora nel coro di Clairvaux con le sembianze di una scimmia. La ridicula bestia deride il povero monaco Goffredo che poi si ritrova malato e non può più cantare. San Bernardo appare in visione allo sventurato, lo segna sul collo e gli restituisce la voce: Altera quoque uice, dum isdem Dei famulus in ecclesia cum ceteris fratribus staret ad psallendum, conspicatus est manifeste spiritum immundum instar simiae per medium chorum transeuntem. Cumque uenisset et staret ante eum ridicula bestia dedignanti oculo respiciens illum atque despiciens patulis naribus aliquamdiu subsannabat. Quae postquam ab eo pertransiit, tandem egressa de choro ulterius non comparuit. Infirmabatur aliquando iste beatus homo et circa gutturis partes graui molestia laborabat. Crescebat languor in dies factusque tandem est morbus inueteratus et paene a medicis desperatus. Vnde etiam angus64

Per maggiori informazioni rimando all’edizione critica: Collectaneum exemplorum et visionum Clarevallense e codice Trecensi 946, ed. O. LEGENDRE (= Corpus Christianorum. Continuatio Mediaevalis, 208), Turnhout, 2005. 65

Ibid., pp. 303-304.

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tiabatur animo uehementer pro eo maxime, quod arteriis ab aegritudine coartatis psallendi et cantandi in ecclesia uires amisisset. Proinde conuersus ad beatum Bernardum die noctuque cum multis lacrimis precabatur, ut cantandi gratiam eius interuentu recipere mereretur. Cuius precibus et lacrimis motus pius pater ei per uisionem apparuit et loco dolenti manu sua tangendo ac benedicendo signum crucis impressit. Cumque uir Dei euigilasset, sanatum se reperiens mire ad cantandum conualuit et nullum deinceps impedimentum ab eadem aegritu66 dine pertulit (distinctio III, 24) .

Corrado ci racconta anche di un’altra apparizione del diavolo con le medesime sembianze. In questa nuova circostanza il derisor pessimus avrebbe baciato e leccato la stola di un povero monaco infermo, incapace di proferire parola: Alius quidam Cisterciensis ordinis monachus, cum infirmitate tactus ad horam ultimam deuenisset iamque loquendi officium amisisset, uidit immundum spiritum ad instar simiae sedentem in pertica iuxta parietem posita, ubi scapulare ipsius dependebat. Porro in ipso scapulari ueteri et dirupto isdem frater modicum panni scissuram sine licentia nuper assuerat, quam ille impurus spiritus suauiter attrectans et saepe deosculans etiam lingua lingebat et manu palpabat. Quod cum ille uideret, ingemuit et quia iam loqui non poterat, protensione indicis indicando uerbisque semirutis ac dimidiatis balbutiendo, quomodo poterat, innuebat, ut derisorem pessimum amouerent. Fratribus uero, qui circa ipsum stabant, mirantibus et diu percunctantibus, quid diceret aut quid intenderet, diuina tandem miseratione recepit officium linguae et ait: Numquid non uidetis obscoenum illum daemonem sedentem in nostro scapulari et ore spurcissimo lambentem pitacium illud, quod nuper in eo sine licentia consuere praesumpsi ? Expellite ergo quantocius sceleratum et tollite de indumento pitacium, ne mihi in finem calumniosus et impius iste derisor insultet. Cumque omnes intente respicerent et spiritum nequam, quem ille conspicabatur, uidere non possent, amouerunt scapulare de loco, et protinus recessit exprobrator pessimus. Frater uero infirmus accepta paenitentia pro delicto suo rursus obmutuit atque post pau67 lulum in bona confessione decessit (distinctio V, 2) .

Anche in questo caso possiamo notare una stretta connessione fra la manifestazione diabolica e il peccato compiuto dal monaco, che avrebbe riparato la stola con un panno senza chiedere il permesso. Il mancato rispetto delle gerarchie monastiche può avere delle conseguenze imprevedibili68. 66 Cf. Corradus Eberbacensis, Exordium Magnum Cisterciense sive Narratio de initio Cisterciensis Ordinis, ed. B. GRIESSER (= Corpus Christianorum. Continuatio Mediaevalis, 138), Turnhout, 1994, p. 212. 67 68

Ibid., p. 305.

Ancora in ambito cistercense varrà la pena segnalare, anche se solo in maniera cursoria, il caso di una monaca cistercense che vide dei demoni in forma di scimmie e gatti che tenevano prigionieri alcuni monaci peccatori nei pressi di Aquisgrana, come riferito da Cesario di Heisterbach nel suo Dialogus miraculorum (dist. V, 50). Al breve excursus potrebbe aggiun-

UN EPISODIO INTERPOLATO DELLA VITA S. ÆDWARDI

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Da questa breve rassegna di casi analoghi al nostro si evince come non senza ragione il diavolo decide di apparire a Edoardo sotto forma di scimmia, dal momento che queste sembianze sembrano legate alla volontà di distrarre o deridere il malcapitato di turno, talvolta colpevole di aver compiuto un peccato. Nel nostro episodio Edoardo è deriso perché imponendo la tassa ha involontariamente colpito i più poveri fra i suoi sudditi. Il diavolo, da tempo irritato dalla condotta integerrima del santo, si è finalmente preso la sua rivincita e può esultare. L’interpolazione dell’episodio sembrerebbe poco funzionale al contesto agiografico in cui è inserito: il santo in questo caso viene deriso perché è caduto in errore, mentre il diavolo celebra il suo trionfo. In realtà Edoardo ha le sue attenuanti: non era sua intenzione imporre nuovamente la tassa, anzi l’idea è stata dei suoi consiglieri e il sovrano accondiscende alla richiesta solo perché sfinito dalla loro insistenza e nella parte conclusiva del racconto non esita a rimproverarli per la loro avidità. Inoltre è Dio stesso a concedere che Edoardo sia messo alla prova ad humilitatis custodiam69. In conclusione, non è possibile stabilire con certezza in quale ambiente fu registrata questa leggenda, nata intorno alla notizia dell’abolizione della tassa da parte di Edoardo. Possiamo però trarre conclusioni più certe sulla sua inserzione nel dossier agiografico del santo: essa fu interpolata nella Vita aelrediana prima della fine del XII secolo, probabilmente ad opera dei monaci di Westminster. Non si può escludere che questo testo facesse parte del materiale fornito a Aelredo dall’abate Lorenzo prima della stesura della Vita e che fu scartato dal cistercense per evitare un incidente diplomatico con il re Enrico II, il quale impose nuogersi un gustoso racconto, un po’ più tardo rispetto ai testi finora presi in considerazione e proveniente dall’ambiente domenicano, in cui il diavolo appare non a un semplice monaco, ma niente di meno che a san Domenico. Si tratta di un episodio dei Miracula beati Dominici, scritti sulla base dei ricordi della beata Cecilia (m. 1290): il diavolo, assunto il consueto aspetto di scimmia, avrebbe cercato di distrarre il santo, intento a scrivere nel cuore della notte; quest’ultimo per tutta risposta pose una candela nella mano della scimmia perché gli facesse luce mentre scriveva. Il diavolo obbedì, ma quando la candela fu quasi del tutto consumata dalla fiamma, il suo dito prese fuoco ed egli iniziò a dimenarsi e a urlare per il dolore. Il santo, con poca compassione nei confronti del povero diavolo, gli ordinò di stare fermo. Il diavolo cercò ancora di obbedire, ma quando il dito fu completamente bruciato non riuscì a trattenere le urla e fu per giunta preso a sferzate dal frate. Per maggiori informazioni e per un’edizione critica del testo latino, che qui per brevità non viene riportato, rimando a A. WALZ, Die “Miracula beati Dominici” der Schwester Cäcilia, in Archivum fratrum praedicatorum, 37 (1967), pp. 5-45, l’episodio qui discusso è a p. 28. 69

Anche se questi esempi tratti da testi cistercensi sono coevi o di poco successivi alla stesura del nostro testo, che deve essere collocata prima della fine del XII secolo, si può prendere in considerazione l’ipotesi che l’ideatore della storia dell’abolizione del danegeld abbia tratto ispirazione da alcune tradizioni cistercensi di apparizioni di diavoli-scimmia.

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vamente il danegeld abolito dal suo antenato. Sembra deporre a favore di questa ipotesi un ulteriore dato: nel nostro testo Edoardo viene definito una volta beatus, poi benedictus, ma mai sanctus. L’episodio interpolato potrebbe allora precedere la stesura della Vita (c. 1163), ma anche la canonizzazione di Edoardo (1161). Il curioso racconto conobbe poi una certa fortuna, comparendo in nuove biografie del Confessore e in altre opere di autori che raccontarono i miracoli compiuti da Edoardo, entrando nel novero dei più celebri episodi che ebbero per protagonista il santo re anglosassone. Università degli Studi dell’Aquila

Francesco MARZELLA

Dipartimento di Scienze Umane Viale Nizza, 14 I – 67100 L’Aquila

Summary. Only part of the manuscript tradition of Aelred of Rievaulx’s Vita sancti Ædwardi regis et confessoris contains an episode concerning the abolition of a tax known as danegeld. According to the account Edward reintroduced this tax, once paid to prevent Danish invasions, only at the suggestion of his counsellors and then decided to abolish it definitively after seeing the devil in the shape of a monkey on the pile of money collected. In this paper the story is analyzed in order to demonstrate that it is an episode interpolated into the Vita before the end of the 12th century. The study is followed by a critical edition of the Latin text.

*

*

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CONSPECTUS SIGLORUM CAMBRIDGE, Corpus Christi College, 31870

C G

GLOUCESTER, Cathedral Library, 1

H

LONDON, British Library, Harley 200

J

OXFORD, St. John’s College, 149

L1

LONDON, Lambeth Palace Library, 331

L2

LONDON, Lambeth Palace Library, 761

P

PETERBOROUGH, Central Library, s.n.

R

Riccardo di Cirencester, Speculum Historiale

V

LONDON, British Library, Cotton Vitellius C XII

W

WINCHESTER, Cathedral Library, XIII 70

Per la presente edizione critica si è seguita la grafia del ms. C.

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APPENDIX: EDIZIONE DELL’EPISODIO Quomodo uidit diabolum super aceruum pecunie quem exactores eius collegerant sedentem

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Principante ac propugnante piissimo rege Ædwardo, cum nutu diuino gens Anglorum, excusso Danice dominationis iugo, diu deploratam exuens seruitutem, in pristinam redisset libertatem et in antiquam refloreret dignitatem, rex insignis gratie, ab irruptione barbarica et hostili feriatus incursu, tanquam miles strenuus ac bellicosus uitiis spiritualibusque nequitiis bellum protinus indixit. Volensque sibi diuini fauoris gratiam misericordiis pauperum conciliare propensius, ab exactione uectigalis quod ab Anglis danegeldum uocatur, eo quod Dacis olim persoluebatur, uniuersam Angliam in perpetuum solemniter absoluit. Cepit etiam leges intermissas reformare, noue pacis iura promulgare, frena dare uitiis, uirtutibus iter liberum preparare. Cepit et crebris orationibus uacare, diuinis laudibus inuigilare, carnem mortificare et in celestibus spiritum dilatare, apertisque thesauris suisa cepit opes manu munifica spargere, ecclesias edificare, ornare monasteria, egenis alimenta, nudis indumenta languentibusque adiumenta necessaria ministrare, ratus thesauros sibi conseruari fidelius ac fructuosius in sinu pauperum quam intra murorum ambitum. Videt hec hostis antiquusb et inuidet, anxiatur, cruciatur, dissecatur, torquetur, incenditur, uritur. Molitur insidias, tendit laqueos, dolos intendit, spargit lapides offensionis et petras scandalic, sed fraus omnis decipitur, uirtus omnis eliditurd, eluditur omnis conatus. Ædwardum enim regebat manus excelsae, ne forte offenderet ad lapidem pedem suumf. Verumptamen ut ad humilitatis custodiam intelligeret quantum propriis uiribus fidere posset, quid etiam gratie

a

Mat 2, 11 b Attestata già in Cypr. Carth., Ad Fortunatum, praefatio (Aduersarius uetus est et hostis antiquus), questa definizione del diavolo gode di notevole fortuna; v. per es.: Aug. Hip., Sermones, 94a (ille hostis antiquus semper contra nos uigilat) e 389 (ille hostis antiquus, id est diabolus); Hier., Vita Malchi, 3 (diaboli esse temptationem, et sub honestae rei occasione antiqui hostis astutias). c Cfr. Isa 8, 14 d Cfr. Ecl 6, 2 e Exo 14, 8 f Mat 4, 6; Luc 4, 11 1-2 quomodo ... sedentem] om. CHJVW, quomodo beatus rex Edwardus uidit ... sedentem R | 3 propugnante] propinquante HV | 4 exuens] exiens L2 | 5 antiquam] antiqua C | 6 incursu] in cursu W | 7-8 bellum] om. JW | 8 indixit] induxit CP sibi diuini] tr. J | 9 conciliare] consiliare L1 consiliari L2 | 12 frena] finem G | 14 et ... dilatare] om. HV | 15 suis cepit] suscepit JW | 15-16 ornare monasteria] tr. HV | 16 egenis alimenta] tr. P languentibusque] languentibus Wp.c.G adiumenta] adiuvamenta R om. HV | 16-17 necessaria] om. C | 17 sibi] om. G | 18 intra] inter L1 L2R | 20 molitur] mollitur Gp.c. | 21 eliditur] elicitur L1R illicitur L2 | 23 pedem] suppl. W suum] tuum L2 | 24 fidere] facere L2 etiam] enim R

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diuine deberet, quadam uice sibi derelictus est in puncto ad modicum temptandus in hunc modum. Clientes siquidem regii cernentes exhaustum iri thesauros regios, pauca inferri, efferri plurima, que rex benedictus in celis sibi thesaurizare studuitg, mutuo loquebantur, dicentes in pernitiem patrie pecunias profligari. Proponunt sibi repentinos hostium incursus, expertas Dacorum insidias, regis si deficerent sacculi destitutionem, regni euersionem. Hos in satellicium nequitie sue predo pestilens eligit, quos ad propositum suum procliues inuenit. Accendit animos, cogitationes inflammat, discrimen formidatum exaggerat, consilium tandem quasi salubre uirulentus insibilat. Quid multa ? Regem adeunt, exhaustum erarium suggerunt, timoris sui causas exponunt imminentique periculo consilio salubri perhibent maturius occursandum. Vtque quod conceperant parturirent, uectigal pretaxatum consulunt exigendum. Quorum instantiam rex mitis blanda sepius responsione repellens: “Qua — inquit — fronte, quo iure, qua conscientia poterimus a pauperibus danegeldum exigere, quod Dacis nec debemus nec uolumus exhibere ?”. Sed inualuerunt nimis iterate uoces eorum, adeo ut rex illorum cedens inportunitati, non tam fauens consilio quam elanguens tedio diceret: “Ite, et que cogitastis explete”. At illi continuo rapientes uerbum ex ore illiush, assensum approbant alacresque procedunt et quasi regium procaciter promulgant edictum. Nec mora: per prouincias, per urbes, per castella, per uicos discurrunt nuntii, crudelis sententie baiuli. Itaque mammona iniquitatisi arcius quam parcius disquiritur, nequius quam equius exigitur, molestius quam modestius extorquetur. Nulli ceditur, parcitur nulli, nulli defertur. Quid plura ? Colligitur, adunatur, congeritur, infiscatur. Ad regem curritur, protrahitur ad erarium gaze quantitatem inspecturus, ut agnosceret quid sibi commodi contulissent, quid gratie promeruissent. Aduentanti regi reseratur erarium, stat eminus

g

Cfr. Mat 6, 20

h

1Re 20, 33

i

Lc 16, 9

25 est in puncto] in puncto est L1L2R est inpuncto W | 26 modum] mundum L2 | 27 iri] in C | 27-28 in celis sibi thesaurizare] thesaurizare sibi in celis HV | 29 repentinos hostium] tr. HV | 29-30 expertas] expertos R | 30 deficerent] deficient L2 | 31 euersionem] subuersionem G satellicium] satellitum L2PR | 32 procliues] per diues L1 prodiues L2P | 33 quasi] quamuis L1L2R | 33-34 uirulentus] uirulentiis C | 35 causas] causam L1L2R imminentique] imminenti H | 36 utque] ut P parturirent] parturient R | 37 consulunt] consiliunt W | 38 sepius] sapius L2a.c. om. HV repellens] compellens HV fronte] fonte JW | 39 danegeldum exigere] tr. HV | 40 inualuerunt] inualuerunt nobis L2 ualuerunt R | 40-41 iterate uoces eorum] uoces eorum iterate Ha.c. | 41 illorum cedens] tr. HV non] nec L1L2 | 42 diceret] dicit J dixit W | 42-43 continuo rapientes] tr. Ca.c. | 43 ex ore] om. G | 44 regium] regnum C procaciter] om. P per] om. L2 | 48 nulli ceditur... defertur] om. H | 49 infiscatur] infixatur L2 protrahitur] pertrahitur R | 50 inspecturus] aspecturus L1L2R | 51 regi] regi regi Ga.c.

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et considerat; et ecce sedebat iniquitas super talentum plumbi, diabolus siquidem in specie deformis simie, collectum suo nutu pecuniarum conscenderat aceruum, contra regem nunc stridulis rictibus crepitans, nunc inflatis buccis exsufflans, nunc lingua longius ore profusa gesticulans, quasi regi diceret insultans: “Eya rex Ædwarde, qui michi totiens insultasti, totiens illusisti ! En prorsus habeo unde tibi uicariam insultationis iure irrogem contumeliam”. Quo uiso rex substiterat conuersusque ad clientes: “Heccine est — inquit — quam michi adquisistis pecunia ? Per Deum — ait — Deique matrem — hoc enim in usum iurandi traxerat — ne unum quidem ex his omnibus minutum in usus regalium sumptuum insumetur. Sed ite, dissipate massam Sathane et unicuique quod suum est reddite”. Ad hec ministri: “Non ita loquaris — inquiunt — domine rex, sed potius accede comminus et contemplare. Ecce enim habes sumptus repositos in annos plurimos, ad terrorem hostium, ciuium consolationem, pauperum subuentionem. Sin autem displicet ut cedant in usus regios, placeat saltim ut in ecclesiarum constructionem, monasteriorum restaurationem, uiarum et pontium reparationem pauperumque recreationem erogentur”. Ad quos rex: “Quam — inquit — elemosinam facere poterimus de preda pauperum, de rapina uiduarum, de manibus pupillorumj, que non appareat execrabilis et cruenta in conspectu diuinitatis ? An non uidetis qualiter illis insideat diabolus in simie cognata sibi spetie, in nostram pernitiem propriam sibi uendicans possessionem ? Per Deum Deique matrem, aliud ex eis non faciam, nisi ut sua singulis restituam. Accelerate quantocius et sic facite”. Quia igitur regis urgebat iussiok, iussionis ilico subsecuta est executio. Sicque factum est ut rex beatus leuem triumphans reatum perhennem sibi gloriam cumularet, diaboli presumptionem confunderet, ecclesiam edificaret, plebem letificaret. Quieuit igitur Anglia cunctis diebus eius ab huius exactione salarii, nec ausus fuit quisquam a die illa et deinceps ei super hoc molestus esse, sed omnes euidenti miraculo conterriti regis sententiam fauore prosequebantur unanimi. j

Cfr. Lc 3, 10

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Dan 3, 22

52 et] om. V | 53 siquidem] quippe HV specie] speciem G deformis simie] deformissime L1 deformissimi JW simie] simi L1 sime L2 om. JL2W suppl. supra rasuram C2 | 53-54 conscenderat] considerat L1L2R concederat P | 54 crepitans] creputans L2 | 55 lingua] linguam JW longius] a longius C ore] ex ore Ga.c. | 56-57 totiens ... illusisti] totiens illusisti, totiens insultasti P | 59 Heccine] Ecce V adquisistis] adquisiste P pecunia] pecuniam R | 60 ait] inquid L1 traxerat] texerat L1L2R | 61 ne] nec L1L2R | 63 hec] hoc C | 64 comminus] quominus L2 enim] om. HV | 68 et] ac R recreationem] restaurationem L1L2 | 70 manibus] manubiis HR | 71 diuinitatis] diuinitate P qualiter] quomodo H | 71-72 illis insideat] tr. HV illis insidiat C illis insidat GP | 72 in simie] insinue L2 | 75 iussionis] visionis JW | 77 sibi] sibi reatum L2 | 78 igitur] ergo H eius] Edwardi R | 79 huius exactione salarii] exactione salarii huius H | 80 regis] rege P | 81 sententiam] scientiam J

Cécile LANÉRY HAGIOGRAPHIE ET PRÉDICATION: LE LÉGENDIER CHARLEVILLE-MÉZIÈRES, BM, 177*

La bibliothèque municipale de Charleville-Mézières possède, entre autres manuscrits provenant de la chartreuse du Mont-Dieu, dans les Ardennes, un in-quarto du XIVe siècle, le n° 177, signalé dans le catalogue de 1879 comme un exemplaire de la Légende dorée (BHL 9035)1. Mais en réalité, comme le souligna, bien plus tard, J. van der Straeten, le manuscrit ne correspond pas exactement à cette description2: c’est plutôt un recueil de Vies de saints, abrégées pour la plupart, dans lequel les chapitres de la Légende dorée se trouvent mêlés à d’autres notices hagiographiques, de provenances diverses. Comme le bollandiste n’entendait pas décrire en détail ce genre de légendier abrégé, il se contenta d’une très brève notice, néanmoins susceptible d’aiguiser la curiosité des chercheurs ultérieurs. De par son contenu, assez original, et même parfois inédit, ce manuscrit n’est en effet pas dépourvu d’intérêt; et cet intérêt lui-même est redoublé, comme on le verra plus loin, par l’origine du volume, l’un des rares légendiers messins encore conservés de nos jours. I. De Metz au Mont-Dieu: histoire et composition d’un légendier abrégé En dépit de sa provenance ancienne, le manuscrit de Charleville n’est pas originaire du Mont-Dieu: d’après une note du bibliothécaire de cette chartreuse, Dom Oudard Rainsant († 1612), le volume aurait été apporté au Mont-Dieu en 1328 par un certain Jean de Metz, qui, avant de se joindre aux Chartreux, avait été moine dans deux abbayes messines, Sainte-Croix et Saint-Arnoul3. Sainte-Croix, fondée entre 1137 et 1141, était une fille de

Liste des abréviations bibliographiques, cf. ci-dessous, p. 346-347.

1

Cf. Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques des départements. Série in-4°, t. 5, Paris, 1879, p. 622. Sur les manuscrits du Mont-Dieu, cf. COLLIN-ROSET, Les manuscrits (p. 50 sq. sur le ms. Charleville 177). 2

Cf. J. VAN DER STRAETEN, Les manuscrits hagiographiques de Charleville, Verdun et Saint-Mihiel (= Subs. hag., 56), Bruxelles, 1974, p. 13 et 30. 3 F. 1v: Hunc librum attulit ad Montem Dei d Johannes de Sancta Cruce seu de Metis monachus alias S. Arnulfi et postea Montis Dei anno 1328. L’adverbe alias («à un autre moment», «une autre fois») ne permet pas de savoir si Jean fut d’abord prémontré à SainteCroix, puis bénédictin à Saint-Arnoul, ou bien l’inverse. COLLIN-ROSET, Les manuscrits, p. 51,

Analecta Bollandiana, 133 (2015), p. 282-349.

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Belval (O. Praem.)4; pillée en 1324, lors du siège de Metz, cette abbaye entretenait, semble-t-il, des liens avec l’illustre abbaye Saint-Arnoul (O.S.B.), dont les origines remontaient à l’époque mérovingienne5. Les deux établissements, en tout cas, échangeaient des manuscrits6, et le cas précis de Jean de Metz atteste que les moines circulaient également entre les deux abbayes. De ce personnage, cependant, nous ne savons quasiment rien. Il copia, dans les années suivantes, plusieurs manuscrits au MontDieu (Charleville-Mézières, BM, 87, 89 et 125)7, mais sa main ne correspond à aucune de celles qui se partagèrent la copie du ms. 177. Apporté de Metz au Mont-Dieu, en 1328, le légendier Charleville 177 avait été copié après 1297, car il contient, sous la rubrique Vita sancti Ludovici regis [144]8, une Vie de Louis IX, précisément canonisé cette année-là. Sa décoration, qui l’apparente fortement à certains manuscrits estimait que le ms. 177 avait pu être apporté de Verdun en même temps que CharlevilleMézières, BM, 181, qui, de son côté, porte la mention suivante: Liber Montis Dei... Venit de Virduno cum duabus legendis aureis et multis aliis libris (f. 223v, mention du XIVe s.). Rien ne prouve, cependant, que le ms. 177 ait été l’une des deux Légendes dorées verdunoises: il accuse plutôt, comme on le verra plus loin, une origine messine, et son contenu excède largement celui d’une Légende dorée. 4 À l’origine, l’abbaye Sainte-Croix possédait plusieurs implantations dans le pays messin (Sainte-Croix de Buris et La Grange-aux-dames), qui furent réunies dès 1161 sous le vocable commun de «Sainte-Croix de Metz»; l’abbaye fut détruite en 1552, lors du siège de Metz par Charles Quint: cf. BONDÉELLE-SOUCHIER, Bibliothèques, p. 98 sq. et 204 sq. 5 Sur Saint-Arnoul, cf. entre autres études, KLAUSER – BOUR, Un document, p. 106 sq.; ODERMATT, Der Liber, p. 3 sq.; MÜLLER, Am Schnittpunkt; GAILLARD, D’une réforme, p. 39 sq. et passim. L’abbaye Saint-Arnoul tire son origine d’une église mérovingienne, située hors les murs et dédiée aux apôtres; elle était alors desservie par une communauté de clercs dirigée par un abbé. Le transfert en ce lieu des reliques de l’évêque messin Arnoul de Metz († 641/642) provoqua, à terme, un changement de vocable: la basilique des Saints-Apôtres prit, dès le VIIIe s., le nom de Saint-Arnoul, dont elle conservait précieusement la sépulture, l’une des plus révérées du diocèse de Metz. Au IXe s., l’abbaye était étroitement liée au pouvoir carolingien, et tirait gloire des généalogies fictives qui faisaient de S. Arnoul l’ancêtre supposé des Pippinides. En dépit de cette proximité avec les élites carolingiennes, l’abbaye tarda à se réformer: l’archevêque Drogon (823-855) tenta bien d’y établir des moines, mais c’est seulement en 942 que l’abbaye fut réformée dans le sillage de celle de Gorze: elle adopta alors pleinement la règle bénédictine. Puissante durant le Moyen Âge, l’abbaye déclina à partir du XIVe s., victime de ses difficultés financières et des interventions récurrentes de l’évêque et de la curie romaine. Elle fut elle aussi détruite en 1552, lors du siège de Metz par Charles Quint. 6 BONDÉELLE-SOUCHIER, Bibliothèques, p. 205, cite les manuscrits Bern, Burgerbibl., 265, et Charleville-Mézières, BM, 21, qui semblent avoir appartenu à l’une et l’autre abbaye. 7 Les manuscrits Charleville-Mézières, BM, 87 (a. 1344-1345) et 89 (a. 1346-1348) sont tous deux signés par Iohannes de Metis, monachus Montis Dei. La copie du ms. Charleville, BM, 125 (a. 1328) lui est également attribuée par Dom Oudard Rainsant: cf. COLLIN-ROSET, Les manuscrits, p. 33. 8 Les nombres entre crochets associés à une fête ou à un nom de saint renvoient à la numérotation des pièces dans la notice du légendier, p. 293-312.

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contemporains de Sainte-Glossinde et de Saint-Arnoul9, signale une origine messine, ce que confirme l’examen du contenu hagiographique. Aux chapitres de la Légende dorée, le ms. 177 ajoute en effet de nombreuses notices empruntées à la rédaction messine du légendier de Jean de Mailly, l’Abbreviatio in gestis et miraculis sanctorum10, ainsi que des Vies de saints lorrains (Airy de Verdun [3], Èvre de Toul [151]), et surtout messins: des textes y sont ainsi consacrés aux évêques Clément [37] [200], Arnoul [118], Goéric [152] et Clou [57]; l’abbesse Glossinde [87] († 602), fondatrice du monastère Sainte-Glossinde, à Metz, y est également célébrée, ainsi que l’unique et obscur martyr messin, Livier [188], pour lequel le rédacteur a eu accès à un texte rare, celui du Petit Cartulaire de SaintArnoul, peut-être rédigé sous l’abbatiat mouvementé de Guillaume de Vry (1287-1307)11. 9 Cf. A. STONES, Gothic Manuscripts 1260-1320, t. I/1, London – Turnhout, 2013, p. 71: d’après Stones, le ms. 177 aurait pu être enluminé par le même artiste que celui du chartrier de Sainte-Glossinde (Metz, Archives départementales de la Moselle, H 4085 [5], a. 1293). On trouve par ailleurs des initiales historiées similaires dans un fragment de bréviaire messin copié dans le premier quart du XIVe s. (Metz, BM, 585, reproduit dans C. BEIER, Buchmalerei für Metz und Trier im 14. Jahrhundert. Die illuminierten Handschriften aus der Falkenstein-Werkstatt, Langwaden, 2003, fig. 39). Quant aux grandes initiales rouges et bleues, richement filigranées, que l’on remarque à partir du f. 36v dans le ms. 177, elles sont tout à fait semblables à celles du Petit Cartulaire de Saint-Arnoul (Clervaux, Bibl. de l’abbaye Saint-Maurice, 7 [107], XIIIeXIVe s., reproduit sur CD-Rom dans GAILLARD, Le souvenir). 10 Jean de Mailly († 1254/1260) était clerc à Auxerre, vers 1228-1230, lorsqu’il rédigea l’Abbreviatio in gestis et miraculis sanctorum (BHL 9034), un légendier abrégé qu’il révisa luimême après 1234, et qui servit de modèle à des légendiers ultérieurs, à commencer par la Légende dorée. En 1243, Jean de Mailly, qui s’était entre-temps établi chez les Dominicains de Metz, produisit une troisième rédaction de son légendier, enrichie des Vies de S. Clément de Metz et de S. Dominique. À certains manuscrits de cette troisième rédaction fut aussi joint un Supplément, probablement rédigé par Jean lui-même, et composé de Vies de saints messins ou titulaires d’églises dans les faubourgs de Metz (Arnoul, Glossinde, Ségolène, Simplice d’Autun, Maximin de Trèves, Gangolf). Dans le ms. 177, on rencontre le chapitre de la rédaction messine sur Clément [37] [200], ainsi que plusieurs emprunts au Supplément (De quadam regina [27], Gangolf [49], Paphnuce [214], Malc [215], De quadam sanctimoniali [216], Abraham [217]). Sur l’Abbreviatio et Jean de Mailly, cf. A. DONDAINE, Le Dominicain français Jean de Mailly et la Légende dorée, in Archives d’histoire dominicaine, 1 (1947), p. 53-102; G. PHILIPPART, Le manuscrit 377 de Berne et le supplément au légendier de Jean de Mailly, in AB, 92 (1974), p. 63-78; M. CHAZAN, Écrire l’histoire à Metz au Moyen Âge: la Chronique de Jean de Mailly, in Cahiers lorrains, 3 (1991), p. 205-238; G. P. MAGGIONI, in AS, p. IX sq. 11 Le Petit Cartulaire de Saint-Arnoul ou Historia S. Arnulfi Mettensis, est une compilation de sources diplomatiques, historiques et hagiographiques, réalisée à Saint-Arnoul au XIIIeXIVe s. sur la base de documents dont certains remontaient au Xe-XIe s.: cf. GAILLARD, À la recherche; EAD., Le «Petit cartulaire» de Saint-Arnoul de Metz, in Bulletin de la Société nationale des antiquaires de France (2000), p. 124-143. Avant 1944, il en existait quatre manuscrits, tous d’origine messine: P. SALMON, Les manuscrits du «Petit Cartulaire» de l’abbaye Saint-Arnould de Metz, in Revue bénédictine, 44 (1932), p. 260-262. Un seul demeure aujourd’hui, et, par chance, il pourrait s’agir de l’original (Clervaux, Bibl. de l’abbaye Saint-Maurice, 7 [107]); les

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L’utilisation de ce Petit Cartulaire, également sollicité pour la notice de S. Clou [57], laisse d’ailleurs supposer que le ms. 177 fut lui-même copié à Saint-Arnoul, à une époque, sans doute peu après 1300, où l’abbaye connaissait une certaine activité littéraire et hagiographique, destinée à glorifier son illustre passé12. À l’appui de cette hypothèse, on relèvera qu’Arnoul et son fils Clou étaient précisément ensevelis à Saint-Arnoul; le corps de l’abbesse Glossinde y avait lui aussi temporairement séjourné. Pour les évêques Clou et Arnoul, le rédacteur du légendier bénéficiait même de matériaux inédits, notamment des miracles, manifestement originaires de l’abbaye Saint-Arnoul13. Dans cet établissement, le souvenir de Charlemagne était particulièrement vif14, et c’est sans doute pourquoi une rubrique lui fut spécialement aménagée dans le légendier [218d]. Enfin, on remarque que le rédacteur a parfois privilégié le calendrier de cette abbaye, contre l’usage de la cathédrale et des autres calendriers messins15. Tous trois autres (Metz, BM, 814, XIVe-XVe s., 1225, XVe s. et 816, XVIe s.) ont disparu dans l’incendie qui détruisit de nombreux manuscrits messins en 1944 (voir ci-dessous, n. 16). Le Petit Cartulaire avait été auparavant partiellement édité par G. WAITZ, in MGH. Scr., t. 24, p. 491492 et 527-549, sur la base du ms. 814 (dont il subsiste encore une copie photographique à l’abbaye de Solesmes); plus récemment, GAILLARD, Le souvenir, en a donné une édition complète, basée sur le ms. de Clervaux. 12

Cf. GAILLARD, À la recherche, p. 108 sq. et MÜLLER, Am Schnittpunkt, p. 209 sq. Cette activité littéraire, notamment illustrée par la rédaction du Petit Cartulaire et du Nécrologe, était destinée à fixer la mémoire glorieuse de l’abbaye, à un moment où celle-ci était en conflit avec l’évêque de Metz, Renaud de Bar (1302-1316), au sujet de son exemption. L’évêque, tirant parti des difficultés financières de l’abbaye, alla jusqu’à déposer l’abbé Guillaume de Vry pour incompétence; les moines refusèrent d’élire un nouvel abbé, et, à la mort de Guillaume, se choisirent un parent de celui-ci, André de Vry, dont l’élection fut confirmée en 1309 par le pape Clément V. 13

Cf. ci-dessous, l’édition des Vies d’Arnoul [118] et de Clou [57], Annexes 1 et 2.

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Rappelons ici que S. Arnoul était présenté, depuis l’époque carolingienne, comme l’ancêtre de Charlemagne. L’abbaye messine s’enorgueillissait par ailleurs d’abriter plusieurs sépultures royales, dont celles de Louis le Pieux, de son parent Drogon (archevêque de Metz), de la reine Hildegarde (épouse de Charlemagne), et des filles de Pépin le Bref et de Charlemagne. 15 Cf. les notices consacrées à Clou [57], Pantaléon [89], Nazaire et Celse [90], Bénigne [202] et Afra [102]. Sur la liturgie de Metz à date ancienne et les listes stationales messines, cf. KLAUSER – BOUR, Un document; les calendriers et les litanies de Metz sont commodément reproduits dans C. M. MARK, Manuscript Illumination in Metz in the Fourteenth Century: Books of Hours, Workshops, and Personal Devotion, Ph. D. Diss., Princeton University, 1991, t. 2, p. 506 sq. (litanies) et 516 sq. (édition synoptique des calendriers). La liste des manuscrits liturgiques de Saint-Arnoul a été établie par ODERMATT, Der Liber, p. 21 sq. Ces manuscrits, comme ceux des autres établissements messins, ont été en grande partie détruits lors de l’incendie de 1944 (voir ci-dessous, n. 16). Mais le Processionnal (fin du XIe s.) ainsi que le Cérémonial (XIIe s.) de la cathédrale avaient auparavant été édités par PELT, Études, p. 139-159 et 238-464, d’après les mss. Metz, BM, 329 et 82. Le Liber Ordinarius de Saint-Arnoul, copié vers 1240, fut quant à lui édité par ODERMATT, Der Liber, grâce à une photographie du manuscrit détruit Metz, BM, 132. Quelques bréviaires messins ont survécu (Metz, BM, 462 et 588, XVe s.; Metz,

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ces indices concourent donc à faire du ms. 177 une production de SaintArnoul: or, cette origine revêt un intérêt particulier, dans la mesure où notre connaissance de l’hagiographie messine est aujourd’hui obérée par la disparition de très nombreux manuscrits dans l’incendie qui ravagea, en 1944, les collections de la Bibliothèque de Metz16. Le légendier Charleville 177 ne nous est malheureusement pas parvenu intact: si l’on en croit la foliotation ancienne, il manquerait 70 folios au début, et 18 à la fin17. Il s’ouvre aujourd’hui avec un chapitre mutilé consacré à la chaire de S. Pierre [1], fêtée le 22 février; mais l’on sait, grâce à une note copiée au XVe s. sur la garde du f. 1v, qu’il s’ouvrait à l’origine avec un chapitre sur l’Avent, comme la Légende dorée18. Le légendier de Jacques de Voragine constitue en effet l’armature de base du ms. 177: seuls manquent aujourd’hui les chapitres 1 à 43, victimes de la mutilation initiale; le chapitre sur Élisabeth de Hongrie [192 = LA, 164] a été inséré un peu en amont de sa position régulière, entre les quatre Couronnés (LA, 160) et Théodore (LA, 161); S. Gilles [132 = LA, 123] a été décalé vers le bas, entre Mamertin (LA, 126) et la Nativité de la Vierge (LA, 127); douze chapitres ont été écourtés19, mais celui de l’Assomption BM, 573, XIVe s., bréviaire d’hiver de Saint-Arnoul); pour les autres (Metz, BM, 461, XIIIe s.; Metz, BM, 45, 46, 333 et 337, XIVe s., bréviaires de Saint-Arnoul), on ne dispose plus que de la description de V. LEROQUAIS, Les bréviaires manuscrits des bibliothèques publiques de France, t. 2, Paris, 1934, p. 222 sq. 16

Dans la nuit du 31 août au 1er septembre 1944, un incendie ravagea trois des casemates du Mont Saint-Quentin, au N.-O. de Metz, où 1450 manuscrits messins, avec un lot de livres précieux et d’incunables, avaient été entreposés par les autorités allemandes. Seuls 887 manuscrits furent sauvés; emportés en Allemagne, ils furent retrouvés à la fin des hostilités. La liste des manuscrits disparus figure dans le Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France. T. 53: Manuscrits des bibliothèques sinistrées de 1940 à 1944, Paris, 1962, p. 12. 17 L’actuel f. 2 correspond en effet au f. LXXI dans la foliotation ancienne, contemporaine de la copie; celle-ci se poursuit sans accident jusqu’au f. 201 (CCLXXVI), qui s’achève sur une réclame de cahier (anno domini) laissée en suspens: le f. 202 qui suit correspond en effet à l’ancienne garde du manuscrit et a été laissé en blanc; il avait néanmoins été réglé et folioté au préalable, comme tous les autres feuillets; or, il porte le n° CCIIIIXXXV, d’où l’on peut déduire que le manuscrit a probablement perdu deux cahiers en fin de volume (sans doute un quaternion et un quinion, cahiers dont il est constitué par ailleurs). 18

La disparition, consécutive à cette mutilation, de toutes les Vies de janvier et février pourrait notamment expliquer la curieuse absence de l’évêque Patient, normalement fêté le 8 janvier. Ce personnage, censé être un disciple de S. Jean l’évangéliste, était particulièrement honoré à Saint-Arnoul, où son culte avait été utilisé pour faire pièce au culte de S. Clément, disciple de S. Pierre et figure tutélaire du diocèse de Metz. Le corps de Clément était en effet possédé par l’abbaye Saint-Clément, grande rivale de Saint-Arnoul. 19 Pierre Martyr [33], Praxède [81], Félix [91], Simplice, Faustin et Béatrice [92], S. Pierre aux liens [99], Dominique [105], Augustin [123], Nativité de la Vierge [133], François [167], Quentin [184], Élisabeth [192].

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[117] a été enrichi de miracles supplémentaires. Dans l’ensemble, toutefois, l’éditeur du ms. 177 a respecté le plan et le contenu de la Légende dorée qu’il avait à sa disposition, probablement un exemplaire de la seconde édition du légendier dominicain20. Mais il l’a, ce faisant, considérablement enrichi de chapitres consacrés à des saints moins connus que les figures universelles célébrées par Jacques de Voragine. Ce dernier avait en effet destiné son ouvrage à tous les prédicateurs de son Ordre, indépendamment de leur origine géographique; c’est pourquoi son légendier fut parfois adapté par les copistes aux nécessités de cultes régionaux ou locaux. Il n’est donc pas rare de rencontrer des exemplaires de la Légende dorée enrichis de dossiers complémentaires, souvent regroupés en fin de manuscrit, ou insérés, comme c’est le cas ici, dans l’ordre du calendrier liturgique. Le ms. 177, toutefois, se distingue par le nombre et l’originalité de ses additions: dans l’état actuel du légendier, et même en excluant les notabilia super legendas sanctorum, dont il sera question plus loin21, on recense en tout 84 ajouts, dont des dossiers exceptionnellement joints à la Légende dorée22: de toute évidence, le concepteur du légendier disposait d’une bibliothèque particulièrement riche, comme pouvait l’être, vers 1300, la bibliothèque de Saint-Arnoul. Il avait notamment sous les yeux, en plus de la Légende dorée, le légendier abrégé de Jean de Mailly et son Supplé20 Le ms. 177 donne en effet, à sa juste place (28 avril), le chapitre sur la vierge antiochienne [32], extrait du De virginibus d’Ambroise de Milan et inséré par Jacques de Voragine lui-même dans la seconde édition de son légendier (LA, 60). Les copistes du ms. 177, cependant, ne disposaient sans doute pas du dernier état de cette seconde édition: c’est pourquoi Charleville 177 ne contient pas le chapitre dédié à S. Syr de Gênes (LA, 77), que Jacques de Voragine n’avait ajouté que dans l’ultime rédaction de sa seconde édition. Sur la tradition manuscrite de la Légende dorée et les différentes phases de sa diffusion, cf. G. P. MAGGIONI, Ricerche sulla tradizione e diffusione della «Legenda aurea» (= Biblioteca di «Medioevo Latino», 8), Spoleto, 1995; ID., in LA, t. 1, p. XV sq. 21 22

Sur les notabilia [221], cf. ci-dessous, Annexe 3.

Grâce au dépouillement systématique des témoins de la Légende dorée effectué par FLEITH, Studien, on peut comparer le sanctoral du ms. 177 à celui d’autres exemplaires du légendier de Jacques de Voragine. Or, si l’on rencontre bien, dès le XIIIe s., des formes enrichies de la Légende dorée, aucune d’entre elles ne présente un sanctoral similaire à celui du ms. 177. Le légendier messin est en effet le seul à ajouter des textes, non seulement pour des fêtes locales ou régionales, comme Airy [3], Romary [7], la Translation d’Arnoul [118b], Clou [57], Glossinde [87], Goéric [152] et Livier [188], mais aussi pour Digna [205], Papula [109], Ogier [26] et Pachôme [220]. Le Planctus de la Vierge [17] est lui aussi un ajout exceptionnel. Et l’on pourrait encore citer d’autres additions, rarement insérées dans les exemplaires de la Légende dorée, tels Hyacinthe [5], Amator [40], Prisque [56], la Translation de S. Martin [75], Loup de Troyes [94], Susanne [114], Privat [136], Andoche [147], Pierre, André et Denise [150], Èvre [151], Clément de Metz [37] [200], la Fête-Dieu [201], Paphnuce [214], Malc [215], Abraham [217] et Silvain [223].

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ment messin, qu’il a exploités de façon méthodique: il a ainsi inséré, entre les notices de la Légende dorée, 41 dossiers traités par Jean de Mailly, mais écartés par Jacques de Voragine23. À ces notices, déjà abrégées, il a ajouté des Vies puisées dans des recueils hagiographiques locaux (Petit Cartulaire de Saint-Arnoul, recueils de miracles et Vies de saints régionaux)24, dans des volumes de Vitae patrum25, dans des légendiers monastiques26, et dans différents livres d’histoire ecclésiastique, de piété mariale, de liturgie ou d’homilétique27. Dans le légendier Charleville 177, la plupart des Vies ajoutées aux chapitres de la Légende dorée et de l’Abbreviatio se présentent elles aussi sous une forme abrégée; comme les techniques employées pour les réduire sont assez homogènes, tout au long du volume, on peut même supposer que l’abréviation fut, sinon exécutée, du moins supervisée par une seule et même personne. Ce compilateur, quel qu’il fût, n’était certes pas aussi habile qu’un Jean de Mailly ou qu’un Jacques de Voragine. Il n’a que très rarement reformulé les textes à sa disposition, se contentant de les écourter, ou, plus souvent, d’en prélever de longs extraits. Il en a aussi simplifié le

23 Certes, l’utilisation de l’Abbreviatio pour compléter des manuscrits de la Légende dorée n’est pas exceptionnelle, même si Jean de Mailly connut une diffusion bien moindre que celle de Jacques de Voragine (G. P. Maggioni, in AS, p. LXXVII sq., a répertorié une trentaine de témoins de l’Abbreviatio). Dans le cas précis du ms. 177, on est cependant frappé par le caractère précoce et systématique de cette contamination. À titre de comparaison, on notera que le ms. Bern, Burgerbibl., 240, lui aussi originaire de Metz et copié au début du XIVe s., n’a ajouté que six extraits de l’Abbreviatio au légendier de Jacques de Voragine. À Clairvaux, il est vrai, on rencontrait déjà de larges extraits de l’Abbreviatio dans un exemplaire de la Légende dorée copié à la fin du XIIIe s. (Montpellier, Bibl. Fac. Médecine, H 381); toutefois, dans ce manuscrit cistercien, les deux légendiers, celui de Jacques de Voragine et celui de Jean de Mailly, étaient simplement juxtaposés, et non fondus en un même continuum liturgique comme c’est le cas dans le ms. 177. Visiblement, le compilateur du légendier messin avait les deux recueils – Jean de Mailly et Jacques de Voragine – ouverts sous les yeux, tandis qu’il composait son propre ouvrage: aussi a-t-il parfois même combiné en un seul chapitre les notices de ses deux prédécesseurs: les entrées qu’il consacre à l’Assomption [117] et au martyr Longin [12] sont ainsi des montages d’emprunts à la Légende dorée et à l’Abbreviatio. 24 Airy de Verdun [3], Euchaire, Valère et Materne de Trèves [4], Romary du Saint-Mont, dans les Vosges [7], Clou de Metz [57], Glossinde de Metz [87], Odile de Hohenbourg, en Alsace [108], Arnoul de Metz [118], Èvre de Toul [151], Goéric de Metz [152], Livier [188]. 25

Syméon le Stylite [59], Pachôme [220], un moine anonyme [222], l’abbé Silvain [223].

26

Hyacinthe de Porto [5], Maur [10], Eulalie [19], Ogier [26], Walburge [34], Translation de S. Nicolas [50], Afra [102], Foi, Espérance et Charité [103], Susanne [114], Eusèbe de Rome [116], Privat [136], Louis IX [144], Pierre, André et Denise [150], Genès [153], Cyrille [154], Procope [155], Éleuthère [156], Thibaud de Provins [157], Médard [158], Brendan [159], Sabine [186], Bénigne [202], Digna [205]. 27 Damase [8], Planctus de la Vierge [17], Papula [109], Conception de la Vierge [177], Trinité [187], Fête-Dieu [201].

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détail par des excisions ponctuelles. Pour certains dossiers, cependant, et notamment pour les saints locaux, son matériel était plus abondant: il s’est alors efforcé de rassembler toute l’information dont il disposait, non sans s’autoriser, çà et là, quelques effets oratoires. Pour Livier [188], Clou [57] et Arnoul [118], il a ainsi agencé, avec quelques retouches, différentes sources hagiographiques (Vies, Petit Cartulaire, miracles), dont certaines ne nous sont d’ailleurs aujourd’hui connues que par son intermédiaire (Miracles d’Arnoul, vision de S. Clou sur le site des Glandières)28. Son goût de la synthèse l’a même parfois conduit à croiser des textes consacrés à des saints homonymes: sa Passion d’Eulalie [19] combine les Passions d’Eulalie de Barcelone (BHL 2696) et d’Eulalie de Mérida (BHL 2700)29; pour Pachôme [220], il a d’abord suivi la Vie de Pachôme le Jeune (BHL 6411) avant d’enchaîner, sans transition aucune, sur des éléments prélevés dans la Vie de l’abbé Pachôme de Tabennèse (BHL 6410); les deux saints, il est vrai, étaient fêtés le même jour, ce qui ne pouvait que favoriser la confusion. Les synthèses hagiographiques ainsi élaborées présentent certes un caractère composite perceptible à la simple lecture. Mais il n’est pas sûr que cette question ait beaucoup préoccupé le compilateur: celui-ci était visiblement moins intéressé par la lecture continue des Vies que par la somme des exempla susceptibles d’y être prélevés: dans cette optique, l’unité littéraire de l’ensemble devenait secondaire. De fait, malgré ses sources et son origine, le légendier Charleville 177 n’était pas réellement conçu pour des lectures continues dans le cadre monastique. Son utilisation liturgique est par ailleurs elle-même des plus sujettes à caution: aucun texte n’y fait l’objet d’un quelconque découpage en leçons, et les indications de date y sont rares. Certes, l’ordre liturgique des calendriers messins a été globalement respecté, mais les entorses y sont fréquentes30; parfois, l’éditeur a même introduit, en un seul bloc, tout un groupe de saints, peutêtre prélevés dans une même source, mais fêtés à des dates différentes31. 28

Cf. ci-dessous les Annexes 1 et 2 consacrées aux dossiers de Clou et d’Arnoul. Pour Livier, voir n. 91. 29

Cf. ci-dessous n. 50.

30

Cf. les Vies d’Airy [3] (1er décembre), d’Euchaire, Valère et Materne de Trèves [4] (8 décembre, 29 janvier, 14 septembre), de Hyacinthe [5] (26 juillet), de Romary [7] (8 décembre), de Damase [8] (11 décembre) et de Maur [10] (15 janvier), disséminées parmi les notices de février-mars. 31

Cf. les textes [153] à [159], insérés entre Goéric (19 septembre) et Justine (26 septembre): Genès (25 août), Cyrille (9 juillet), Procope (8 juillet), Éleuthère (18 avril), Thibaud (1er juillet), Médard (8 juin), Brendan (16 mai).

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Sa compilation, au demeurant, excède l’horizon de la liturgie locale: il a ainsi consacré des chapitres spécifiques à des saints, non seulement ignorés par Jacques de Voragine et Jean de Mailly, mais aussi parfaitement absents des calendriers, des litanies, et des listes stationales de Metz qui nous sont parvenus32. Tout en adaptant la Légende dorée aux particularités du sanctoral messin, il l’a donc enrichie à la manière d’une summa sanctorum33, une sorte d’encyclopédie hagiographique, certainement pas exhaustive, mais directement utilisable par les prédicateurs de la région. Pour un prédicateur messin, le ms. 177 présentait en effet un double avantage: non seulement il l’instruisait des principaux faits et gestes des saints universels et régionaux, mais il approvisionnait également ses sermons en exempla et anecdotes édifiantes, prélevées pour l’occasion dans des récits sans rapport avec la liturgie locale34. L’intérêt pour la prédication est en effet particulièrement visible dans le ms. 177. Non seulement le compilateur a basé son propre légendier sur les notices de la Légende dorée et de l’Abbreviatio, qui étaient déjà elles-mêmes conçues à l’usage des prédicateurs, mais il y a également inséré un sermon, celui d’Hugues de Saint-Cher pour la Trinité [187], peut-être développé par ses propres soins35. Pour faciliter l’usage de son légendier par des prédicateurs, il y a aussi fait relever, dans les marges, les passages qui lui paraissaient les plus notables ou les plus susceptibles d’alimenter des exempla36. Enfin, certaines de ses interventions, dans les notices les plus élaborées (Clou [57] 32 Ogier [26], Papula [109], Susanne [114], Pierre, André et Denise [150], Cyrille [154], Procope [155], Éleuthère [156], Brendan [159], Pachôme [220], Silvain [223]. Sur la documentation liturgique messine, cf. ci-dessus, n. 15. 33 Ce titre de summa sanctorum figure d’ailleurs en tête d’un autre exemplaire de Légende dorée enrichie, un ms. prémontré du XIIIe s. (Praha, Národní knihovna, XXIII E 28: cf. FLEITH, Studien, p. 260 sq.). 34 C’est cette recherche d’anecdotes et d’exempla qui a notamment présidé à la confection des deux dernières notices du légendier, celle du moine anonyme [222], et celle de l’abbé Silvain [223], qui résultent toutes deux d’emprunts aux apophtegmes des Pères du désert. En cela, le compilateur ne faisait d’ailleurs que poursuivre la voie indiquée par Jean de Mailly dans son Supplément, également tributaire des Vitae patrum. On ignore toutefois, en l’état actuel du ms. 177, dans quelle mesure la fin du légendier, aujourd’hui gravement mutilé, était ou non tributaire d’exempla prélevés dans les Vies des Pères. 35

Cf. ci-dessous n. 90. À titre de comparaison, on notera que Jacques de Voragine, lui, avait exclu la fête de la Trinité de sa Légende dorée, mais lui avait en revanche réservé une place dans ses Sermones de sanctis, entre la Pentecôte et la fête de S. Barnabé. Dans le ms. 177, la présence de ce sermon pour la Trinité est un signe, parmi d’autres, des interactions entre hagiographie et prédication aménagées par le concepteur du légendier. 36 Les marges du légendier sont en effet parsemées de ces signes d’attention (Noa, Exm), contemporains de la copie du manuscrit. Peut-être ont-ils servi à la confection des registra qui complétaient le volume avant sa mutilation (cf. ci-dessous n. 40).

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et Arnoul [118]), trahissent le prédicateur37, de même que les curieux canevas homilétiques rassemblés en fin de volume, sous le titre de Notabilia super legendas sanctorum38. Le légendier Charleville 177 était donc résolument conçu pour alimenter la prédication hagiographique; mais ce sont les ressources documentaires d’une abbaye bénédictine, Saint-Arnoul, qui servirent à sa composition. Et c’est un ancien moine de Saint-Arnoul, Jean de Metz, également ancien Prémontré, qui l’emporta avec lui à la chartreuse du Mont-Dieu, peu de temps après sa confection. Il n’est donc pas impossible, vu l’intérêt des Prémontrés pour la prédication, que ce légendier abrégé ait été copié à Saint-Arnoul, précisément pour Jean de Metz, et peut-être même sous sa supervision directe. Cela expliquerait notamment pourquoi le manuscrit se trouvait en sa possession lorsqu’il quitta Metz pour le Mont-Dieu. Transféré dans les Ardennes, le manuscrit put ainsi réchapper à l’incendie dévastateur qui mutila si gravement les collections messines au cours du e XX s. Même endommagé et acéphale, il demeure encore aujourd’hui un témoin précieux du lien étroit qui existait alors entre hagiographie et prédication: la vitalité de cette dernière stimulait en effet la confection de Vies abrégées et la collecte hagiographique de documents épars, dont certains ne nous sont précisément parvenus que par ce seul canal. II. Description et analyse du légendier Charleville-Mézières, BM, 177 Dans l’analyse qui suit, toutes les pièces du ms. Charleville, BM, 177, ont été numérotées par mes soins. Leurs titres, en italiques, reproduisent les rubriques du manuscrit, mais les abréviations ont été homogénéisées de la manière suivante: ab(bas), ap(ostolus), B(eatus/a), conf(essor), ep(iscopus), ev(angelista), imp(erator), m(artyr), mon(achus), p(apa), pr(esbyter), S(anctus/a), v(irgo). Le premier titre, mutilé, a été restitué entre crochets obliques. Les rubriques en petits caractères correspondent à de simples mentions, accompagnées de renvois à d’autres chapitres du légendier. Pour chaque fête, j’ai indiqué, à droite, la date de fête du saint con37 Cf. notamment, dans la Vie de S. Clou [57] (Annexe 1), la vision des Glandières et cette conclusion du rédacteur, déterminé à tirer les leçons édifiantes de l’épisode hagiographique: Pulchre thuribulo domus designatur Deo construenda: non enim hic levitatum dissolutio, sed pro excessu negligentiarum fervens mentis debet esse compunctio. Hinc etiam mos antiquis inolevit ut in sanctorum sollempniis thus circumferatur, quatinus in cordis conpunctionem Deo festa celebrare moneantur. Cf. aussi les insertions homilétiques dans les miracles mariaux pour la fête de la Conception de la Vierge [177]. 38

Sur ces notabilia, cf. ci-dessous l’Annexe 3.

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cerné, de manière à rendre plus lisible le déroulé du circulus anni et les entorses qui y ont été faites. Ces dates sont celles des calendriers messins39; pour les saints qui ne sont mentionnés dans aucun de ces calendriers, on s’est contenté de signaler, entre parenthèses, la date usuelle donnée par la Bibliotheca hagiographica latina. La description codicologique et l’analyse proprement dite du légendier seront suivies de trois annexes, consacrées à l’édition des pièces qui ont paru les plus dignes d’intérêt, à savoir les Vies de Clou [57], d’Arnoul [118], et les Notabilia super legendas sanctorum [221]. Premier quart du XIVe s. (entre 1297 et 1328). — Parchemin fin, soigneusement préparé. 205 f. (dont f. 1 et 202-203, de garde; dans la foliotation actuelle, en chiffres arabes, il y a deux f. «8» et deux f. «21»). 340 × 235 mm. Gravement mutilé du début et de la fin, si l’on en juge par la foliotation ancienne, en chiffres romains (cf. ci-dessus, n. 17). — Réglure à la mine de plomb, traces de piqûres; just.: 240 × 170 mm. Deux colonnes de 48 lignes. — Volume homogène constitué de 25 cahiers: 38 (f. 2-23v) + 110 (f. 24-33v) + 218 (f. 34-201v). Réclames contemporaines de la copie; signatures de bi-feuillets et marques de milieu de cahier portées par des relieurs ultérieurs. — Encre brun foncé; plusieurs copistes contemporains; quelques annotations et corrections marginales, de peu postérieures à la copie. — Décoration soignée, similaire à celle d’autres manuscrits messins contemporains (cf. ci-dessus n. 9). Les principaux chapitres, dans les quatre premiers cahiers, sont introduits par de petites initiales historiées, illustrant la fête correspondante (initiales à dominante rose et bleue, avec filets blancs sur fond d’or bruni; antennes assorties formant bordures, relevées de petits motifs végétaux et zoomorphes); à partir du cinquième cahier, ces initiales historiées laissent place à de grandes initiales parties rouges et bleues, avec filigranes bicolores, petits motifs végétaux, vrilles et antennes bicolores «à bandes d’I». Les autres chapitres sont plus sobrement introduits, tout au long du volume, par des initiales plus petites, alternativement rouges ou bleues, avec filigrane de la couleur opposée et antennes bicolores «à bandes d’I». Les mêmes initiales, mais sans les prolongements «à bandes d’I», servent à délimiter les divisions internes. Pieds de mouche alternativement rouges ou bleus, rubriques en rouge. — Reliure médiévale (ais de bois, dos à cinq nerfs), restaurée à l’époque moderne (couvrure en parchemin).

39

Sur les calendriers et la liturgie messine, cf. ci-dessus, n. 15.

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(f. 1v, garde) Annotations diverses: liste des registra du volume (XVe s.)40, sentence pieuse (XVIe s.)41, note du bibliothécaire du Mont-Dieu, Oudard Rainsant († 1612)42. 1. (f. 2r-v) = LA, 44 22-96, inc. mut. (|in oscula Pauli ruit et ambo plurimum fleverunt … simplices sicut columbe). Febr. 22 Febr. 24 2. (f. 2v-4) De ethimologia nominis – Mathie ap. = LA, 45. 3. (f. 4-5) Vita S. Agerici ep. = cf. BHL 144 43. Dec. 1 4a. (f. 5-7) Vita S. Eucarii ep. = cf. BHL 2655 (Igitur postquam beatus Petrus apostolus ... lacrimis sepulture tradiderunt prestante Domino nostro...) Dec. 8 4b. (f. 7r-v) De S. Valerio ep. = BHL 2655, extr. (Post venerabilem obitum sancti Eucharii ... nec sepulchrum ab invicem separaret. Explicit de S. Valerio). Ian. 29 4c. (f. 7v-8) Vita S. Materni ep. = BHL 2655, extr. (Post decessum beati Valerii archiepiscopi... Eucharii ac Valerii honorabiliter posuerunt) + BHL 2656, extr. (Igitur omnipotens deus tres plagas … venit super populum et civitatem Trevirorum)44. (Sept. 14) 40

Nota. isto volumine sunt regristra (sic) que principaliter notanda. Ibi de adventu registrum primum indicat numerum foliorum ubi inveniuntur sanctorum pasiones (sic). Secundum registrum indicat de sancto Andrea cum sanctis sequentibus. Tertium lamentatio Maria (sic). Quartum Albani et Iohannis baptiste. Quintum de assumptione beate Marie virginis. Sextum de sancto Brandinio abbate. Septimum de visionibus. Octavum de bonis et utilibus exemplis. Cette note suggère qu’avant sa mutilation le ms. était pourvu d’une table des matières, mais aussi de divers aide-mémoires, ou listes de notanda, destinés à en féliciter l’utilisation par des prédicateurs. 41 Jesus † Maria. Clipeum sanctae solitudinis est simplicitas mentis et puritas cordis quoniam quo confidentia est purior eo mens est clarior. 42

Cf. ci-dessus, n. 3.

43

Airy, évêque de Verdun (VIe s.). Son culte, qui n’est sans doute pas antérieur au XIe s., demeura pour l’essentiel confiné au diocèse de Verdun et à ses parages immédiats. La Vie BHL 144 est un résumé, sans doute composé au XIIe s., de la Vie BHL 143, elle-même attribuée au réformateur Étienne de Saint-Airy († 1084): cf. PHILIPPART – WAGNER, Hagiographie, p. 706 sq. La Vie BHL 144 semble avoir assez peu circulé (seulement 6 mss d’après la Bibliotheca hagiographica latina manuscripta [= BHLms], dont un légendier messin du XIIIe s.: Paris, BnF, lat. 5278); dans Charleville 177, on la rencontre sous une forme légèrement abrégée: le compilateur a réduit le § 8 et supprimé le § 11, dont les éléments n’apportaient rien d’essentiel au déroulé de la narration (cf. Catalogus codicum hagiographicorum latinorum Biblioth. Nat. Parisiensis, t. 1 [= Subs. hag., 2/1], Bruxelles, 1889, p. 479-482). 44

Euchaire et Valère, évêques de Trèves (IIIe s.), étaient respectivement fêtés le 8 décembre et le 29 janvier par les calendriers messins, conformément aux dates usuelles. À Metz, une église était même spécialement consacrée à S. Euchaire, et elle était mentionnée dès le IXe s. dans la liste des stations quadragésimales: cf. KLAUSER – BOUR, Un document, p. 13 et 58 sq. Materne, en revanche, ne bénéficiait d’aucune fête spécifique. Dans Charleville 177, le compilateur a reproduit de très près la Vie BHL 2655, qu’il a scindée en trois parties; il n’y manque que le prologue (§ 1, dans AASS, Ian. t. 2, p. 918), un épisode de la Vie d’Euchaire (§ 15, ibid.,

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(Iul. 26) 5. (f. 8) Passio S. Iacincti m. = BHL 405345. r-v 6. (f. 8 ) Saturnini Saturi Perpetue et Felicitatis mm. = AS, 44. Mart. 7 7. (f. 8v-8bis) Vita S. Romarici ab. = cf. BHL 7322 (des.: huius oratione intercedente cernentibus multis sanata est)46. Dec. 8 8. (f. 8bis) Damasi p. = Rufinus, Hist. eccl., XI.10 (Damasus post Liberium… pena conversa est). Dec. 11 9. (f. 8bis) Vita S. Vigilii ep. = AS, 45. (Mart. 11) 10. (f. 8bis-9) Mauri ab. = cf. BHL 5773 (Beatissimus igitur Maurus clarissimo senatorum genere … astantibus discipulis qui relicti fuerant feliIan. 15 citer migravit)47. v 1-286 (des.: 11. (f. 9-12 ) De ethimologia nominis – Gregorii p. = LA, 46 multo relicto lumine abierunt). Mart. 12 12. (f. 12v-13) De S. Longino ep. (sic) = cf. LA, 47/AS, 47 (Longinus fuit quidam centurio qui cum aliis … sepeliens eum in fide Christi permansit)48. Mart. 15 13. (f. 13-15) De ethimologia nominis – Vita S. Benedicti ab. = LA, 48. Mart. 21 p. 920), ainsi que l’épilogue général (§ 25, ibid., p. 922), auquel le compilateur a substitué un extrait de l’appendice BHL 2656. 45 La Passion de Hyacinthe, martyr de Porto, est un texte bref, prélevé dans la plus vaste Passion de Césaire de Terracine (BHL 1511). Même si Hyacinthe est fêté le 26 juillet dans le martyrologe d’Adon, les éditeurs de légendiers le placèrent parfois au 11 septembre, par confusion avec son homonyme, compagnon des martyrs romains Prote et Eugénie: cf. H. QUENTIN, Les martyrologes historiques du Moyen Âge. Étude sur la formation du martyrologe romain (= Études d’histoire des dogmes et d’ancienne littérature ecclésiastique), Paris, 1908, p. 544 sq. C’est peut-être à la suite d’une confusion similaire, engendrée par l’homonymie, que la Passion BHL 4053 fut insérée dans le légendier Charleville 177. À Metz, en effet, Hyacinthe de Porto était parfaitement inconnu; en revanche, Prote et Hyacinthe étaient mentionnés par les calendriers de cette ville, à la date du 11 septembre. L’abbaye Saint-Vincent en possédait même des reliques, rapportées d’Italie par l’évêque Thierry Ier de Metz (965-984): cf. Sigebert, Vita Deoderici Mettensis ep., éd. G. H. PERTZ, in MGH. Scr., t. 4, p. 475. 46 Romary (VIIe s.), fondateur de l’abbaye du Saint-Mont (Remiremont). Sa Vie BHL 7322 aurait été composée à Remiremont dès l’époque mérovingienne: cf. SHG VI, p. 56 sq. C’est un texte peu fréquent (seulement 6 mss d’après BHLms, dont un légendier messin du XIIe s., Paris, BnF, lat. 5294). Le ms. 177 en présente ici une forme écourtée de presque la moitié du texte (qui s’arrête donc au § 9 de l’édition MABILLON, in Acta OSB, t. 2, p. 416-420). 47 La Vie BHL 5773, largement attestée depuis le IXe s. (plus d’une centaine de mss d’après BHLms), a été ici sévèrement abrégée: on n’y retrouve que les § 7-12 et 64-67 de l’édition des Acta Sanctorum (Ian. t. 1, p. 1040-1041, 1050). 48 La notice du centurion Longin combine les chapitres de Jean de Mailly et de Jacques de Voragine: dans Charleville 177, les premières phrases (Longinus fuit ... ad Christum convertit) reproduisent ainsi LA, 47 1-3. La phrase suivante (Quod cum preses Octovius ... linguam excidi) mêle Jacques de Voragine (LA, 47 3) et Jean de Mailly (AS, 47 4). La suite du récit (Longinus tamen loquelam ... in fide Christi permansit) dérive directement de AS, 47 27-65.

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14. (f. 15-16) De S. Patricio ep. = LA, 49. Mart. 17 v Mart. 25 15. (f. 16-17 ) Annuntiatio dominica = LA, 50. 16. (f. 17v-20v) De passione Domini = LA, 51. 17. (f. 20v-21bisv) Lamentatio B. Marie = cf. Ogerius de Lucedio, Planctus Mariae, recension B (Quis dabit capiti meo aquam … mortuus sicut presens dies demonstrat aperte)49. 18. (f. 21bisv-24) De tempore reconciliationis – De resurrectione Domini = LA, 52. 19. (f. 24r-v) De S. Eulalia v. = cf. BHL 2696/2700 (Igitur in Hyspania cum Datiano preside seva et multum crudelis … credulitatis exempla monstravit. Tunc Donatus ... collegit corpus et sepelivit in pace. Celebrantur [-bratur post corr.] autem passio eius in Emeretensium civitatem die IIII° id. dec. prestante…)50. Feb. 12/Dec. 10 20. (f. 24v-25) De ethimologia nominis – Passio S. Secundi m. = LA, 53. (Mart. 30) Apr. 7 21. (f. 25r-v) De S. Maria Egiptiaca51 = LA, 54. v 1-211 . Apr. 4 22a. (f. 25 -28) De ethimologia nominis – Ambrosii ep. = LA, 55 22b. (f. 28) Tiburtii et Valeriani mm. = LA, 55 212. 52

23. (f. 28) Mamertini mon. = AS, 51. 24. (f. 28r-v) Mariani mon. = AS, 52.

Apr. 14

(Apr. 20) (Apr. 20)

49

Cf. H. BARRÉ, Le Planctus Mariae attribué à saint Bernard, in Revue d’ascétique et de mystique, 28 (1952), p. 243-266: le Planctus Mariae, qui reproduit, sous forme de prosopopée, la lamentation de la Vierge au pied de la Croix, est un texte extrait du De laudibus du cistercien Ogier de Locedio. Il en existe de nombreuses variantes. De tous les exemplaires de la Légende dorée dépouillés par FLEITH, Studien, le ms. 177 est le seul à contenir cette Lamentation. On la rencontre néanmoins, mais beaucoup plus tard, dans un témoin de l’Abbreviatio de Jean de Mailly, provenant de Saint-Maximin de Trèves: London, Society of Antiquaries, 279 (XVe s.). 50 Dans les calendriers messins, comme ailleurs, Eulalie de Barcelone est fêtée le 12 février, tandis que son homonyme de Mérida apparaît au 10 décembre. La confusion des deux vierges était cependant des plus fréquentes, d’autant que leurs Passions sont très proches l’une de l’autre. Ici, elles sont toutes deux combinées: celle d’Eulalie de Barcelone (BHL 2696) est reproduite jusqu’à virgo perdurat in malis (§ 1-3 dans l’édition du Catalogus codicum hagiographicorum bibliothecae regiae Bruxellensis, t. 1 [= Subs. hag., 1], Bruxelles, 1886, p. 261262); mais la fin du texte est en partie empruntée à la Passion d’Eulalie de Mérida, BHL 2700. 51 Pour Marie l’Égyptienne, la BHL indique les dates usuelles du 2 et du 9 avril. À Metz, les calendriers la signalent au 7 avril; elle figure également dans les litanies. 52

S. Mamertin, abbé d’Auxerre, apparaît deux fois dans le légendier, non que ce saint fût particulièrement révéré à Metz, mais parce que Jean de Mailly et Jacques de Voragine en traitaient tous deux à des moments différents de l’année liturgique. Le compilateur, qui avait les deux ouvrages sous les yeux, ne s’est donc pas rendu compte que la notice de Jacques de Voragine [131], décalée au 1er septembre, faisait double emploi avec ce chapitre-ci [23], que Jean de Mailly avait correctement placé au 20 avril.

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25. (f. 28v-31) De ethimologia nominis – De S. Georgio = LA, 56. Apr. 23 26. (f. 31r-v) Conversio illustris militis Otgerii = cf. BHL 2831 (Otgerius vir generosa nobilitate clarissimus...)53. (Oct. 28) v 27. (f. 31 -32) De quadam regina = AS. Suppl., 1. 28. (f. 32-33v) De ethimologia nominis – De S. Marco ev. = LA, 57. Apr. 25 29. (f. 33v) De S. Marcellino = LA, 58. Apr. 26 30. (f. 33v-34) De SS. Lino et Cleto = AS, 57. Apr. 26 / Nov. 26 31. (f. 34) De ethimologia nominis – De S. Vitali m. = LA, 59. Apr. 28 32. (f. 34-35) De quadam virgine antiochie = LA, 60. (Apr. 28) 33. (f. 35r-v) De ethimologia nominis – De S. Petro novo m. = LA, 61 1-66 (des.: pro defensione fidei sanguinem suum fudit). Apr. 29 v 34. (f. 35 -36) Vita S. Walburgis v. = cf. BHL 8766 (des.: est sepulta. Cetera miracula causa brevitatis omisimus que post mortem beate Walburgis fecit Deus pro ea)54. Mai. 1 r-v 35. (f. 36 ) De ethimologia nominis – De S. Philippo ap. = LA, 62. Mai. 1 36. (f. 36v-38v) De ethimologia nominis – De S. Iacobo ap. = LA, 63. Mai. 1 37. (f. 38v-39) Translatio S. Clementis ep. Metensis = AS, 174 176-190 (Anno Domini MXC cum iam in urbe Metensi quinquaginta episcopi…)55. Mai. 2 38. (f. 39-40v) De ethimologia nominis – De inventione S. Crucis = LA, 64. Mai. 3 53

La conversion du soldat Ogier fait partie du dossier de S. Faron, évêque de Meaux (VII s.), normalement fêté le 28 octobre. C’est un texte peu répandu (5 mss. recensés dans BHLms depuis le Xe s.), que l’on rencontre ici sous une forme contractée et amputée de son prologue. Ni Faron ni Ogier n’étaient connus de la liturgie messine, et c’est sans doute à son caractère exemplaire que ce récit édifiant dut d’être inséré dans le légendier Charleville 177. e

54 Walburge, abbesse d’Heidenheim (VIIIe s.) est fréquemment ajoutée aux exemplaires de la Légende dorée: cf. FLEITH, Studien, p. 496 (W2). Sa Vie BHL 8766, représentée dans une dizaine de mss depuis le Xe s. (d’après BHLms), surtout au Nord de la Seine et dans le Nord-Est de la France, est ici amputée de son dernier paragraphe (§ 5, dans AASS, Febr. t. 3, p. 543). 55

Clément, disciple de l’apôtre Pierre, était considéré, depuis Paul Diacre, comme le premier évêque de Metz. Son corps était conservé à Saint-Clément, mais, en tant que saint patron fondateur, sa mémoire était honorée dans toutes les collégiales et abbayes de la ville, y compris à Saint-Arnoul, la grande rivale de Saint-Clément. L’importance de ce dossier pour les hagiographes messins explique que le compilateur du légendier ait cru bon d’insérer deux textes pour S. Clément. Tous deux sont extraits de l’appendice que Jean de Mailly avait consacré à l’évêque de Metz dans sa notice sur le pape homonyme, Clément Ier (AS, 174 155-190). Le premier texte [37] commémore simplement la translation effectuée en 1090 par l’évêque messin Hérimann, qui avait déplacé le corps du saint au profit de la cathédrale (avant de devoir, plus tard, le restituer aux moines de Saint-Clément): le souvenir de cette translation provisoire était célébré à Metz le 2 mai. La fête du saint, en revanche, tombait le 23 novembre, et c’est pourquoi le compilateur a également inséré, à cette date, le reste de l’appendice composé par Jean de Mailly [200]. Pour une mise au point récente sur le dossier de S. Clément de Metz et sur ses nombreux avatars depuis la fin du Xe s., cf. PHILIPPART – WAGNER, Hagiographie, p. 634 sq., et la contribution de M. CHAZAN, in SHG X, p. 152-190.

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39. (f. 40v-41) Passio SS. Alexandri Evencii et Theodoli = AS, 64. Mai. 3 (Mai. 1) 40. (f. 41r-v) Vita S. Amatoris ep. = AS, 61. (Mai. 2) 41. (f. 41v) De S. Athanasio m. (sic) = AS, 62. Mai. 4 42. (f. 41v) De S. Quiriaco m. = AS, 65. 43. (f. 41v-42) De S. Iohanne ev. ante portam Latinam 56 = LA, 65. Mai. 6 / 8 44. (f. 42-43) De letania maiori et minori = LA, 66. 45. (f. 43-45) De ascensione Domini = LA, 67. 46. (f. 45-47) De sancto spiritu = LA, 68. 47. (f. 47r-v) De ethimologia nominis – Gordiani et Epimachi m. = LA, 69. Mai. 10 v 48. (f. 47 ) De ethimologia nominis – Nerei et Achillei mm. = LA, 70. Mai. 12 49. (f. 47v-48) Gengulphi m. = AS. Suppl., 30 (des.: et illa sine penitentia moreretur). Mai. 11 50. (f. 48r-v) Translatio S. Nicholay ep. et conf. = cf. BHL 6180 (Igitur millesimo octogesimo septimo anno ab incarnatione … possessi sanitati sunt restituti)57. Mai. 9 51. (f. 48v) De ethimologia nominis – Passio S. Pancratii m. = LA, 71. Mai. 12 52. (f. 48v-49) De tempore peregrinationis – De ethimologia nominis – De S. Urbano p. et m. = LA, 72. Mai. 25 53. (f. 49) De S. Petronilla = LA, 73. Mai. 31 54. (f. 49r-v) Marcellini et Petri mm. = LA, 74. Iun. 2 v (Mai. 16) 55. (f. 49 -50) S. Peregrini ep. = AS, 71. 56. (f. 50) Prisci m. = AS, 73. (Mai. 26) Iun. 8 57. (f. 50r-v) Vita S. Glodulfi ep. Metensis = éd. Annexe 1. v 58. (f. 50 -51) De ethimologia nominis – Primi et Feliciani mm. = LA, 75. Iun. 9 r-v 59. (f. 51 ) Vita Symeonis mon. qui in columpna stetit = cf. BHL 7957 Ian. 5 (des.: in ecclesiam aliam que vocatur Penitentia)58. 56 Jean l’évangéliste était l’un des deux patrons originels de l’abbaye des Saints-Apôtres, devenue plus tard Saint-Arnoul. La fête de la Porte latine y était célébrée le 8 mai, le 6 dans les autres établissements messins. 57 La Translation de S. Nicolas à Bari, en 1087, avait été relatée par plusieurs auteurs; parmi eux, Nicéphore de Bari composa un long récit qui nous est parvenu sous deux formes, BHL 6179 et 6180, toutes deux diffusées dans une dizaine de manuscrits depuis le XIe s. Ici, le compilateur a suivi BHL 6180, mais il en a écarté le prologue et l’épilogue, et l’a réduite, au prix de coupes sévères, à une sèche trame narrative.

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60. (f. 51v-52v) De ethimologia nominis – De S. Barnaba ap. = LA, 76. Iun. 11 61. (f. 52v-53) De ethimologia nominis – Passio S. Viti m. = LA, 77. Iun. 15 62. (f. 53r-v) De ethimologia nominis – Quirici et Iulite mm. = LA, 78. Iun. 16 63. (f. 53v) De S. Marina v. = LA, 79. (Iun. 18) 64. (f. 53v) Marci et Marcelliani mm. Passionem Marci et Marcelliani mm. require in festo B. Sebastiani m. Iun. 18

65. (f. 53v-54) De ethimologia nominis – Gervasii et Prothasii mm. = LA, 80. Iun. 19 66. (f. 54) Albani m. = AS, 81. Iun. 22 67. (f. 54-56) De ethimologia nominis – Iohannis Baptiste = LA, 81. Iun. 24 68. (f. 56r-v) Passio Gallicani m. = AS, 83. Iun. 25 Iun. 26 69. (f. 56v-57) Iohannis et Pauli mm. = LA, 82. 70. (f. 57) Vita S. Leonis p. = LA, 83. Iun. 28 71. (f. 57-60) De ethimologia nominis – Passio S. Petri ap. = LA, 84. Iun. 29 72. (f. 60-64v) De ethimologia nominis – De S. Paulo ap. = LA, 85. Iun. 30 Iun. 30 73. (f. 64v-65) Passio S. Marcialis m. = AS, 87. 74. (f. 65) Processi et Martiniani = AS, 88. Iul. 2 59 75. (f. 65) Translatio S. Martini = AS, 89. Iul. 4 Iul. 10 76. (f. 65r-v) Felicitatis cum VII filiis = LA, 86. 77. (f. 65v) Passio S. Victoris m.60 = AS, 91. Iul. 20/21 (Sept. 11) 78. (f. 65v-66v) De S. Theodora = LA, 88. 79. (f. 66v-67) De ethimologia nominis – Margarete v. 61 = LA, 89. Iul. 13 58

La Passion de Syméon le Stylite (Ve s.), BHL 7957, a été transmise par des volumes de Vitae patrum. Ici, l’abréviateur en a sélectionné plusieurs passages (§ 1-5, 7-8, 10-11, 16-19, 21, éd. H. ROSWEYDE, réimp. in PL 73, col. 325-334), de manière à en respecter le déroulement narratif. 59 Martin de Tours (IVe s.) est fêté deux fois dans le légendier Charleville 177 (sans compter les quelques lignes qui lui sont consacrées dans les Notitia [221]): il apparaît le 11 novembre, avec un chapitre de Jacques de Voragine [196], et le 4 juillet, avec cette fête de translation commémorée par Jean de Mailly, et bien attestée dans les calendriers messins. Il est vrai que Martin était doublement honoré à Metz, avec une abbaye, Saint-Martin-devant-Metz, et une église urbaine, toutes deux mentionnées par les listes stationales (depuis le IXe s. pour l’église, depuis le XIe s. pour l’abbaye): cf. KLAUSER – BOUR, Un document, p. 13 et 80 sq. 60

Victor de Marseille est normalement fêté le 21 juillet. Dans les calendriers messins, il apparaît tantôt le 21 juillet, tantôt la veille, et parfois aux deux dates (Cérémonial de la cathédrale). À Metz, le martyr disposait d’une église, mentionnée dans les listes stationales depuis le IXe s.: cf. KLAUSER – BOUR, Un document, p. 13 et 120 sq. 61 Pour Marguerite, la BHL indique la date du 20 juillet. Les calendriers de Metz, comme le martyrologe d’Adon, la fêtent le 13 juillet: cf. Le martyrologe d’Adon, ses deux familles, ses

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80. (f. 67-68) Vita S. Alexii conf. = LA, 90. Iul. 17 3-5 81. (f. 68) De S. Praxede v. = LA, 91 (Praxedis virgo … circa annos Domini CXL). Iul. 21 82. (f. 68-70v) De ethimologia nominis – Vita B. Marie Magdalene = LA, 92. Iul. 22 83. (f. 70v-71) De ethimologia nominis – Appolinaris m. = LA, 93. Iul. 23 Iul. 24 84. (f. 71r-v) De ethimologia nominis – Christine v. = LA, 94. 85. (f. 71v-74) De ethimologia nominis – Passio Iacobi ap. = LA, 95. Iul. 25 86. (f. 74-75) De ethimologia nominis – De S. Christoforo m. = LA, 96. Iul. 25 87. (f. 75r-v) Glodesindis v. = cf. BHL 3563 (Temporibus Childerici regis Francorum … mansitque sanctum corpus in eodem loco sepultum circiter per annos XXV)62. Iul. 25 Iul. 27 88. (f. 75v-76v) De septem dormientibus63 = LA, 97. Iul. 27/28 89. (f. 76v-77v) De S. Panthaleone64 = AS, 100. 90. (f. 77v-78v) De ethimologia nominis – Nazarii et Celsi mm.65 = LA, 98. Iul. 27 trois recensions. Texte et commentaire, éd. J. DUBOIS – G. RENAUD (= Sources d’histoire médiévale publiées par l’IRHT), Paris, 1984, p. 225. 62 L’abbesse Glossinde († 609) était la fondatrice de l’abbaye Saint-Pierre de Metz; elle avait d’abord été ensevelie aux Saints-Apôtres (i.e. Saint-Arnoul), avant d’être transférée dans son abbaye, renommée Sainte-Glossinde. Son dossier est constitué de deux Vies, BHL 3562 (vers 920) et BHL 3563-3564, attribuée à l’abbé Jean de Saint-Arnoul († ca 984), qui l’aurait composée pour les moniales de Sainte-Glossinde. Ce dernier texte, attesté dans une dizaine de témoins (d’après BHLms), est ici reproduit sous une forme contractée et excisée; il y manque notamment le prologue et le § 10 de la Vie BHL 3563 (AASS, Iul. t. 6, p. 201-212), ainsi que les récits de translations et les miracles (BHL 3564). Sur le dossier de Ste Glossinde, cf. PHILIPPART – WAGNER, L’hagiographie, p. 623 sq. et la contribution de M. GOULLET in SHG X, p. 282-295. 63 Les Sept dormants sont normalement fêtés le 12 novembre, selon la BHL. Mais la date du 27 juillet qui apparaît dans les calendriers messins correspond aussi à celle du martyrologe d’Usuard. 64 Des reliques de S. Pantaléon, martyr de Nicomédie, avaient été offertes à l’archevêque de Cologne en 972 (à l’occasion du voyage de ce dernier à Constantinople pour préparer le mariage d’Otton II avec la princesse Théophano); vers 1033-1036, un bras du même saint, offert au seigneur de Commercy, passa à l’abbaye Saint-Vanne, près de Verdun: cf. M. GOULLET – A. WAGNER, Reliques et pouvoirs dans le diocèse de Verdun aux Xe-XIe siècles, in Revue Mabillon, n.s. 10 = 71 (1999), p. 67-88. La diffusion de ces reliques explique la présence récurrente de ce martyr dans les légendiers de Lotharingie, ainsi que sa fréquente addition dans les exemplaires lorrains et allemands de la Légende dorée. À Metz, S. Pantaléon était fêté le 28 juillet; mais, dans l’Ordinaire de Saint-Arnoul, il apparaît au 27 juillet, comme dans le ms. 177, où Pantaléon a été inséré entre deux groupes de saints également célébrés à cette date. 65 À Metz, Nazaire et Celse étaient généralement fêtés le 12 juin, en compagnie du martyr Basilide. À Saint-Arnoul, toutefois, les deux saints milanais étaient fêtés seuls le 27 juillet, donc plus près de la date usuelle du 28 juillet. Le compilateur a manifestement adopté ici l’usage de Saint-Arnoul, contre celui des autres établissements messins.

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91. (f. 78v) Vita Felicis p. = LA, 99 2-8 (Felix loco Liberii in papatum eligitur…). Iul. 29 92. (f. 78v) Simplicii et Faustini mm. = LA, 100 5-15 (Simplicius et Faustinus fratres…). Iul. 29 v v 66 Iul. 30 93. (f. 78 -79 ) De S. Martha = LA, 101. 94. (f. 79v) De S. Lupo ep. = AS, 104. Iul. 29 Iul. 30 95. (f. 79v-80) Abdon et Sennen mm. = LA, 102. 96. (f. 80-81) De ethimologia nominis – De S. Germano ep. = LA, 103. Iul. 31 97. (f. 81r-v) De ethimologia nominis – Passio S. Eusebii m. = LA, 104. Aug. 1 Aug. 1 98. (f. 81v) Passio septem Machabeorum = LA, 105. 99. (f. 81v-83) Petri ad vincula = LA, 106 1-122 (des.: contigerant omnibus enarravit). Aug. 1 100. (f. 83) Stephani p. et m. = LA, 107. Aug. 2 101. (f. 83-84v) De inventione S. Stephani = LA, 108. Aug. 3 102. (f. 84v-85) De S. Afra = cf. BHL 109 (Apud provintiam Reciam in civitate Augusta cum christianorum esset gloriosa persecutio … secundo miliario de urbe Augusta)67. Aug. 5 r-v 103. (f. 85 ) Passio SS. Fidei Spei et Caritatis cum matre Sophia = cf. BHL 2971 (Temporibus Adriani imperatoris Romanorum erat quedam mulier nobilis nomine Sophia … iuxta filias suas in loco illo gaudentes de divina erga humanum genus electione. Finita est passio sanctarum virginum et martyrum pridie nonas augusti)68. Aug. 4 ? (Aug. 5) 104. (f. 85v) De S. Cassiano ep. = AS, 112. 66 te S Marthe, normalement fêtée le 29 juillet, est mentionnée le lendemain, 30 juillet, dans un calendrier messin rédigé en français (Linköping, Stifts- och Landsbibliotek, T. 285, ca. 1380). Son nom apparaît également dans les litanies de Metz. 67 te S Afra, normalement fêtée le 5 août, apparaît à cette date dans l’Ordinaire de SaintArnoul; elle est en revanche absente dans les litanies et les autres calendriers de Metz. Du cycle d’Afra, BHL 108-109, l’éditeur de Charleville 177 n’a retenu que la seule Passio BHL 109 (MGH. Scr. rer. merov., t. 3, p. 61-64), qu’il a légèrement abrégée et écourtée de son paragraphe final. 68

Foi, Espérance et Charité, sont en général fêtées le 1er août (Usuard, synaxaires grecs), bien que, dans la pratique, les textes et les manuscrits divergent grandement sur leur dies natalis. Ici, l’abrégé composé par l’éditeur du légendier indique la date du 4 août, bien que le modèle qu’il ait suivi, la Passion BHL 2971, donnait celle du 1er août (certains mss, comme Vaticano, BAV, Vat. lat. 5771, f. 330, IXe-Xe s., donnent toutefois, sans doute par erreur, celle du 1 er juillet). Il est donc possible que les trois vierges et leur mère Sophie aient été célébrées à Metz le 4 août, bien qu’elles n’apparaissent nulle part dans les calendriers conservés; elles y étaient connues, toutefois, car elles sont bien mentionnées dans les litanies.

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105. (f. 85v-86) De ethimologia nominis – De S. Dominico conf. = cf. LA, 109 1-285 (des.: et haec dicens obdormivit in Domino anno Domini MCCXXI). Aug. 5 Aug. 6 106. (f. 86v) De ethimologia nominis – De S. Sixto p. = LA, 110. 107. (f. 86v-87) De ethimologia nominis – De S. Donato m. = LA, 111. Aug. 7 108. (f. 87-88) De S. Hodilia v. = cf. BHL 6271 (Temporibus Childerici imperatoris Romane et Frantie erat quidam dux illustris … dominici corporis participata omnibus cernentibus animam tradidit. Obiit idus decembris)69. Dec. 13 109. (f. 88) Papule v. = BHL 645270. Aug. 8 110. (f. 88r-v) Passio S. Cyriaci m. = LA, 112. 111. (f. 88v) De S. Romano m. Passionem S. Romani m. require in passione S. Laurencii. Aug. 9

112. (f. 88v-91v) De ethimologia nominis – De S. Laurencio m. = LA, 113. Aug. 10 113. (f. 91v) Tiburcii m. Passionem S. Tiburcii require in passione S. Sebastiani. Aug. 11

114. (f. 91v-92v) De S. Susanna v. = cf. BHL 7937 (des.: corpus S. Susanne posuit iuxta corpora sanctorum in cimiterio Alexandri idus augusti). (Aug. 11) 115. (f. 92v-93v) De ethimologia nominis – Ypoliti m. = LA, 114. Aug. 13 Aug. 14 116. (f. 93v) Vita Eusebii conf. = BHL 2740. 117a. (f. 93v-99) Assumptio B. v. Marie = LA, 115 1-315 (f. 93v-97; des.: nec ad eam postmodum accessit) + cf. AS, 120 180-479 (f. 97-99; Quedam sanctimonialis sacrista… ad concilium eius ordinem cisterciensem intravit) + cf. PONCELET, Miraculorum, n° 596 (f. 99; In Normannia quedam beguina semper pro iuramento dicebat Ave Maria … et statim vidit beatam virginem que pallio suo aquam repellebat). 69

La Vie de l’abbesse Odile, BHL 6271, bien attestée depuis le XIe s. au nord de la Seine et dans l’aire germanique, a ici été abrégée de manière à respecter la cohérence narrative du récit. À en croire le répertoire de FLEITH, Studien, p. 482 (O3), c’est un ajout relativement fréquent dans les recueils de la Légende dorée. 70 Papula était une vierge de Tours (Ve/VIe s.), célébrée par Grégoire de Tours dans un paragraphe du Liber in gloria confessorum, 16 (MGH. Scr. rer. merov., t. I/2, p. 306-307). C’est ce texte qui a été reproduit tel quel dans Charleville 177, sans doute à titre d’exemplum, car Papula demeura largement inconnue des calendriers et des martyrologes, à Metz comme ailleurs, y compris dans les bréviaires tourangeaux. La présence de BHL 6452 dans les légendiers est d’ailleurs tout à fait rarissime (BHLms n’en connaît qu’un seul exemple, un ms. dominicain du XIIIe s., Würzburg, UB, MP Th. q. 53).

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117b. (f. 99-101v) Item de assomptione B. Marie = LA, 115 316-528 (f. 99101v; Modus sacratissime assumptionis … ignosce obsecro tu et tui) + Miraculum (f. 101v; Fuit quidam clericus in Burgundia … filius virginis salus mundi etc.)71. Aug. 15 v v 118a. (f. 101 -103 ) De S. Arnulpho ep. Metensi = éd. Annexe 2. Aug. 16 Iul. 18 118b. (f. 103v-104v) Translatio S. Arnulphi ep. = éd. Annexe 2. v 119. (f. 104 -107) De ethimologia nominis – Bernardi ab. = LA, 116. Aug. 20 120. (f. 107) De ethimologia nominis – De S. Thimotheo = LA, 117. Aug. 23 121. (f. 107r-v) De ethimologia nominis – De S. Simphoriano m. = LA, 118. Aug. 22 v v 122. (f. 107 -109 ) De ethimologia nominis – De S. Bartholomeo ap. = LA, 119. Aug. 24 v 123. (f. 109 -114) De ethimologia nominis – S. Augustino ep. = LA, 120 1-419 (des.: in valitudinis opem conferri potest). Aug. 28 r-v 124. (f. 114 ) Agapiti m. = AS, 121. Aug. 18 125. (f. 114v) Hermetis m. Passionem S. Hermetis require in festo Alexandri Eventii et Theoduli. Aug. 28

126. (f. 114v-116v) Decollatio S. Iohannis Baptiste = LA, 121. Aug. 29 v 1-6 127a. (f. 116 ) Iuliani et Ferreoli mm. = AS, 128 (des.: eadem die fuisset sepultum). 127b. (f. 116v-117) Item de miraculis = AS, 128 7-17 (des.: post modicum expiravit). Aug. 28 128. (f. 117) Felicis et Adaucti mm. = LA, 122. Aug. 30 r-v 72 Aug. 29 129. (f. 117 ) Saviniani m. et Savine v. = LA, 124. 71

Ce dernier miracle ne semble pas figurer, ou pas sous cette forme, dans l’index de PONCELET, Miraculorum. On le trouve néanmoins attesté, dès la fin du XIIIe s., dans un légendier claravallien (Montpellier, Bibl. Fac. Médecine, H 381, f. 491). En voici la transcription, qui aidera peut-être à son identification ultérieure: Fuit quidam clericus in Burgundia multum diligens ac sollicitus salutare matrem Domini in hiis verbis: ʻAve Maria etc.ʼ Tandem apparuit ei in ipsa salutatione ipse salvator omnium, Iesus Christus, dicens: ʻIam mater diligit hec tua verba; te diligit multum; te suum vocat amicum. Hoc te moneo: similiter et me salutare memento. Quod si feceris, me ipsum amicum habebisʼ. Clericus vero respondens dixit: ʻNescio, Domine, quomodo te possim salutare. Si utique scirem, libentissime te salutaremʼ. Salvator autem dans ei hos versus scriptos dixit: ʻSic me salutare curabis: Ave Iesu Christe, verbum Patris, filius virginis, salus mundi, etc.ʼ 72 Pour Sabinien et Sabine, martyrs de Troyes, la BHL donne la date du 29 janvier. Mais, dans le martyrologe d’Usuard, seul Sabinien était fêté à cette date: Sabine était célébrée le 29 août, comme son homonyme romaine: cf. DUBOIS, Le martyrologe, p. 170 sq. et 293. À Metz, le nom de Sabine apparaît dans les calendriers, à la date du 29 août, mais peut-être cette entrée concernait-elle la seule vierge romaine, également évoquée dans le légendier [186].

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(Sept. 1) 130. (f. 117v-118) De S. Lupo73 = LA, 125. r-v 74 131. (f. 118 ) De S. Mamertino = LA, 126. (Apr. 20) 132. (f. 118v-119) De ethimologia nominis – Egidii ab. = LA, 123. Sept. 1 133. (f. 119-122) Nativita (sic) B. Marie v. = LA, 127 1-180 (des.: ex hac vita vocavit). Sept. 8 134. (f. 122-123) Passio S. Adriani m. = LA, 128. Sept. 8 135. (f. 123) Gorgonii et Dorotei m. = LA, 129. Sept. 9 r-v 136. (f. 123 ) Passio S. Privati m. = cf. BHL 6932 (des.: cruciatione quassatus non multo post seculo excedens ad debitam sibi gloriam commiAug. 21 gravit)75. v v 137. (f. 123 -124 ) Passio SS. Prothi et Iacincti = LA, 130. Sept. 11 v 138. (f. 124 -126) De ethimologia nominis – De exaltatione S. Crucis = LA, 131. Sept. 14 (Sept. 14) 139. (f. 126-128v) De S. Iohanne Crisostomo = LA, 132. 140. (f. 128v) De ethimologia nominis – Cornelii et Cypriani mm. = LA, 133. Sept. 14 v 141. (f. 128 -129) De ethimologia nominis – De S. Eufemia = LA, 134. Sept. 16 r-v Sept. 17 142. (f. 129 ) De S. Lamberto m. = LA, 135. 143. (f. 129v-131) De ethimologia nominis – De S. Matheo ev. et ap. = LA, 136. Sept. 21 76 144. (f. 131-132) Vita S. Ludovici regis = cf. BHL 5043 . Aug. 25 Sept. 16 145. (f. 132r-v) Lucie et Geminiani mm. = AS, 141. Sept. 23 146. (f. 132v-133v) De S. Tecla v. = AS, 145. v 147. (f. 133 ) Andochii Tirci et Felicis mm. = AS, 146. (Sept. 24) Sept. 25 148. (f. 133v-134) Firmini ep. et m. = AS, 147.

73 Loup de Sens (VIe s.) est normalement fêté le 1er septembre, mais il n’apparaît pas dans les calendriers messins. Un S. Loup est certes mentionné dans les litanies, mais il s’agit sans doute de son homonyme de Troyes (Ve s.), fêté, à Metz comme ailleurs, le 29 juillet [94]. 74

Cf. ci-dessus n. 52.

75

La Passion BHL 6932, bien attestée depuis le IXe s. (une vingtaine de mss selon BHLms), a ici été abrégée par excisions successives, de manière à respecter la cohérence narrative du récit. L’évêque martyr S. Privat du Gévaudan bénéficiait à Metz d’une église paroissiale, mentionnée dès le XIe s. dans le Processionnal de la cathédrale: cf. PELT, Études, p. 147. 76 Pour S. Louis, canonisé en 1297, le compilateur a utilisé la Vie BHL 5043, dont il constitue donc l’un des tous premiers témoins (une vingtaine de mss dans BHLms). Néanmoins, et bien que BHL 5043 fût déjà un épitomé, il l’a encore excisé de nombreux passages, ne reproduisant que les leçons 1-4 et 7-9 de l’édition BOUQUET, Recueil des historiens des Gaules et de la France, Paris, 2e éd., 1840-1904, t. 23, p. 160-165.

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149. (f. 134-135) De ethimologia nominis – De S. Mauricio cum sociis = LA, 137. Sept. 22 150. (f. 135r-v) Petri Andree et Dyonisie = cf. BHL 6717 (des.: Andreas et Paulus lapidibus et Dionisia gladio martirisaverunt)77. (Mai. 15) v 151. (f. 135 -136) Vita S. Apri ep. et conf. = cf. BHL 616 (Beatus Aper in suburbio Auguste Tricorum … reddidit conditori terrena relinquens adeptus est premia eterna)78. Sept. 15 r-v 152. (f. 136 ) Goerici ep. = cf. BHL 3606 (Sanctus Goericus in Christo magni meriti a puerilis etatis sue … felicissima pace et beatissima quiete spiritum Domino ipse felix reddidit XIII° kal. octobris anno episcopatus Sept. 19 sui XVII)79. 153. (f. 136v-137) Passio S. Genesii = cf. BHL 3322 (Sub imperio Diocletiani cum per annos IIIIor… perstiteret iussit imperator tandem sanctum Genesium decollari)80. Aug. 25 154. (f. 137) De S. Cyrillo m. = cf. BHL 2069 (Sanctus Cyrillus Egyptus (Iul. 9) cuius fides apud Deum et homines…)81. 77

Pierre, André et Denise, martyrs de Lampsaque, sont normalement fêtés le 15 mai, mais leurs noms ne figurent pas dans la documentation liturgique de Metz, ce qui explique que le compilateur les ait insérés à une date fantaisiste. Il a abrégé pour eux la Passion BHL 6717, une variante rare de la plus commune Passion BHL 6716: BHLms ne signale en effet qu’un unique témoin pour BHL 6717, un légendier du XIIe s. provenant de Liège (Bruxelles, KBR, 9290 [VdG 3223]), contre une vingtaine pour BHL 6716 depuis le Xe s. 78 Saint régional, l’évêque Èvre de Toul (VIe s.) était titulaire d’une église à Metz, d’où sa présence ici et dans les calendriers de la ville. Le compilateur a utilisé la Vie longue BHL 616, composée vers la fin du Xe s., et plus largement diffusée que la Vie antérieure, BHL 617 (13 mss dans BHLms pour BHL 616, contre 4 pour BHL 617); la Vie BHL 616 est notamment attestée dans un légendier messin du XIIIe s., Paris, BnF, lat. 5278; ici, elle a été sérieusement abrégée et écourtée: le compilateur, écartant le prologue et la fin du récit, n’en a conservé que les § 1 à 9 (AASS, Sept. t. 5, p. 66-68). Sur le dossier de S. Èvre, cf. SHG VI, p. 27 sq. 79

S. Goéric († 642/643), également nommé Abbon, fut le successeur d’Arnoul sur la chaire épiscopale de Metz; une partie de ses reliques furent transférées à Épinal par l’évêque Thierry Ier de Metz († 984) dans les années 980. À Metz, une église, attestée dès le Xe s., lui était spécialement dédiée: cf. KLAUSER – BOUR, Un document, p. 129 sq. De sa Vie, BHL 3606, précisément composée vers 980, le compilateur a conservé les paragraphes 1-5, 7-9, 12-16, 19-20 et 24-27 (AASS, Sept. t. 6, p. 48-54); il a surtout fortement abrégé ce qui concernait, dans ce récit, la translation des reliques d’Arnoul à Metz par Goéric, estimant sans doute que cet épisode avait été suffisamment décrit par la Translatio S. Arnulphi [118b]; seuls l’intéressaient les épisodes relatifs au seul Goéric. Pour une analyse plus complète de la Vie BHL 3606 et de son appendice plus tardif, BHL 3607, cf. PHILIPPART – WAGNER, L’hagiographie, p. 624 sq. et la contribution de M. GOULLET in SHG X, p. 234-241. 80 La liste stationale du IXe s., puis le Processional de la cathédrale, au XIe s., mentionnent tous deux l’existence, à Metz, d’une église dédiée au martyr romain Genès: cf. PELT, Études, p. 146, et KLAUSER – BOUR, Un document, p. 13 et 100 sq. Ici, le compilateur a abrégé la Passion BHL 3322, une recension minoritaire de la Passion de S. Genès (9 témoins depuis le Xe s. recensés par BHLms), que l’on rencontre surtout au Nord de la Seine et dans le Nord-Est de la France.

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155. (f. 137r-v) Passio S. Procopii m. = cf. BHL 6949 (des.: capud amputatum ingressus vie celestis vel compendium beatus invenit VII° idus iulii)82. (Iul. 8) 156. (f. 137v-138) Passio S. Eleutherii m. = cf. BHL 2451 (des.: et sic imperator gladio eam percuti precepit)83. (Apr. 18 / Dec. 15) 157. (f. 138r-v) Theobaldi conf. = cf. BHL 8032 (Igitur Theobaldus bone indolis vir nobilibus Francorum parentibus … debiles adducti sospitatem sunt adepti)84. Iul. 1 158. (f. 138v-139) De S. Medardo ep. = cf. BHL 5864 (Beati Medardi episcopi vitam nolumus preterire. Pater huius … longevitate defessus spiritum Iun. 8 emisit)85. 159. (f. 139-143) Vita S. Brendani ab. = cf. BHL 1437 (Sanctus Brendanus regione Numenensi ortus fuit. Erat vir magne abstinentie … inter manus (Mai. 16) discipulorum migravit ad Dominum)86. 81 S. Cyrille, évêque martyr de Crète, ne figure pas dans la documentation liturgique messine qui nous est parvenue. Au demeurant, sa Passion, bien qu’ancienne, semble avoir été relativement peu diffusée: BHLms ne relève que 6 témoins pour BHL 2069, la recension utilisée par le compilateur. Comme c’est un texte bref, elle n’a été ici que légèrement abrégée. 82

Comme Cyrille et Éleuthère, S. Procope, martyr de Césarée en Palestine, n’est pas mentionné dans les calendriers et les litanies de Metz. Le compilateur a usé ici d’une Passion très brève, BHL 6949, attestée au moins dans une quinzaine de témoins depuis le IXe s. Il en a juste abrégé les dernières phrases. 83 Pour S. Éleuthère, le compilateur a utilisé la Passion BHL 2451, la plus diffusée du dossier obscur de cet évêque d’Illyrie, également compté parmi les martyrs de Rome et de Sicile. Mais cette longue Passion – attestée dans au moins 25 mss depuis le IXe s. – se trouve ici très fortement abrégée et réduite à sa seule trame narrative. 84 S. Thibaud de Provins († 1066), issu de la famille des comtes de Champagne, mourut ermite en Italie; il était très honoré en France, et tout particulièrement en Lorraine. Normalement fêté le 30 juin, il était honoré le lendemain, 1 er juillet, dans la ville de Metz. Son nom apparaît à cette date dans les calendriers messins, mais il figure également dans les litanies, et une collégiale lui était spécialement dédiée: cf. KLAUSER – BOUR, Un document, p. 13 et 89 sq. L’abrégé qui figure dans Charleville 177 dérive de la Vie BHL 8032, la plus répandue de ce dossier hagiographique (BHLms en relève une quinzaine de mss, surtout français, depuis le XIe s.): le compilateur en a reproduit l’essentiel (§ 2-6 et 8-15 dans l’édition des AASS, Iun. t. 5, p. 593-595), mais a écarté le prologue et le récit des tentations du saint. 85 Il y avait à Metz une église Saint-Médard, mentionnée dans la liste des stations quadragésimales du IXe s., puis derechef dans la liste stationale des rogations (XIe s.): cf. KLAUSER – BOUR, Un document, p. 13 et 47sq. Les reliques de cet évêque de Noyon, mort vers 557, étaient conservées à Soissons, et c’est peut-être aux relations entre Soissons et Metz à l’époque mérovingienne qu’il faut imputer l’implantation précoce de ce culte dans la cité messine. À l’époque du ms. Charleville 177, toutefois, la Vie BHL 5864, indûment attribuée à Venance Fortunat, était déjà largement diffusée. Le compilateur, qui l’a abrégée et écourtée, n’en a conservé que la teneur des paragraphes 1-3 et 7-9 (AASS, Iun. t. 2, p. 79-80), faisant ainsi l’économie de tous les miracles post mortem. 86

La présence, dans Charleville 177, de cet abbé de Clonfert ( VIe s. ?), célèbre en hagio-

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160. (f. 143-144v) De ethimologia nominis – Iustine v. = LA, 138. Sept. 26 161. (f. 144v-145) De ethimologia nominis – Cosme et Damiani mm. = LA, 139 (des.: reperierunt. Passi sunt autem circa annos Domini CCLXXXVII sub Dyocliciano). Sept. 27 162. (f. 145-146) De S. Forseo ep. = LA, 140. (Ian. 16) 163. (f. 146-148v) De ethimologia nominis – De S. Michaele archangelo = LA, 141. Sept. 29 164. (f. 148v-150) De ethimologia nominis – Ieronimi pr. = LA, 142. Sept. 30 165. (f. 150r-v) De ethimologia nominis – De S. Remigio ep. = LA, 143. Oct. 1 v Oct. 2 166. (f. 150 -151) Leodegarii ep. et m. = LA, 144. 167. (f. 151r-v) De ethimologia nominis – De S. Francisco = cf. LA, 145 1-259 (des.: absolutione recepta mox in Domino obdormivit). Oct. 4 v (Oct. 8) 168. (f. 151 -152) De S. Pelagia = LA, 146. r-v 169. (f. 152 ) De Margarita dicta Pelagius = LA, 147. (Oct. 8) (Oct. 8) 170. (f. 152v-153) De S. Thaide m. = LA, 148. v 171. (f. 153-154 ) De ethimologia nominis – Dyonisii cum sociis suis = LA, 149. Oct. 9 v Oct. 14 172. (f. 154 -155) Calixti p. et m. = LA, 150. 173. (f. 155-156) De ethimologia nominis – De S. Leonardo = LA, 151. Nov. 6 174. (f. 156-158) De ethimologia nominis – De S. Luca ev. = LA, 152. Oct. 18 r-v 87 Nov. 29 175. (f. 158 ) Grisanti et Darie mm. = LA, 153. Oct. 21 176. (f. 158v-159v) Undecim milium virginum = LA, 154. v 177. (f. 159 -160) Conceptio B. Marie = PONCELET, Miraculorum, n° 1700 + cf. n° 99 (Iure enim primordia … ille ceteris fratribus innotuit)88 + cf. graphie pour le récit de son voyage merveilleux, ne doit sans doute rien à l’existence d’un culte quelconque à Metz. C’est bien plutôt le caractère romanesque et exemplaire de sa navigatio qui lui a valu les faveurs du compilateur: de fait, et même s’il a abrégé la prolixe version BHL 1437 (au moins une vingtaine de témoins depuis le XIe s.), ce dernier lui a tout de même ménagé un espace beaucoup plus conséquent qu’à bien d’autres textes du recueil. 87 Pour Chrysanthe et Daria, la BHL donne comme fête usuelle le 25 octobre; Adon et Usuard les signalent au 1er décembre. Mais, à Metz, on les fêtait le 29 novembre, conformément au Hiéronymien et au martyrologe de Florus: cf. DUBOIS, Le martyrologe, p. 351 sq. 88 Le miracle PONCELET, Miraculorum, n° 99, est ici précédé d’un court prologue homilétique: Iure enim primordia redemptionis nostre omni cum devotione debemus suscipere ac in quantum possumus venerare. Humanum genus constrictum tenebatur in vinculis tartareis pro culpa primi parentis; sed eius salvationis exordium cepit in conceptione beatissime Marie semper virginis: et ideo omnes letemur in hac festivitate. Apud civitatem que vocatur Papia...

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n° 457 (Erat quidam canonicus Sancte Marie devotus horasque diei… et ut creditur Domino et beate Marie serviturus). Dec. 8 178. (f. 160) Vita S. Fidis = AS, 153. Oct. 6 v (Oct. 7) 179. (f. 160 ) Sergii et Bachi m. = AS, 155. (Oct. 18) 180. (f. 160v-161) Iusti m. = AS, 160. (Dec. 31) 181. (f. 161r-v) Saviniani Potenciani m. = AS, 161. 182. (f. 161v) Crispini et Crispiniani m. = AS, 163. Oct. 25 v 183. (f. 161 -163) De ethimologia nominis – Passio Symonis et Iude app. = LA, 155. Oct. 28 1-9 184. (f. 163) De S. Quintino m. = LA, 156 (des.: ad propria remeavit). Oct. 31 v (Nov. 1) 185. (f. 163-164 ) De S. Eustachio m. = LA, 157. 186. (f. 164v-165) De S. Sabina = cf. BHL 7586 + 7407 (Cum dies metuendus persecutionis innotuisset … prefectus iussit eam gladio percuti quarto kal. septembris)89. Aug. 29 187. (f. 165r-v) De S. Trinitate = Sermo in die Trinitatis (Benedicat nos Deus noster... [Ps. 66.7-8]. Benedicat nos Deus pater cui attribuitur potentia dando nobis ut simus potentes in corpore ut mundum conculcemus… cum sis mortalis que sunt mortalia cura)90. 89

Pour Sabine, martyre de Rome, la BHL indique la date du 23 août; mais la date la mieux attestée dans les martyrologes (Bède, Florus, Adon, Usuard) est bien celle du 29 août, également en usage à Metz (à moins que la Sabine célébrée à Metz le 29 août ne corresponde à la vierge homonyme de Troyes, parfois fêtée le même jour, et également évoquée par le légendier Charleville 177: cf. ci-dessus n. 72). Ici le compilateur a brièvement résumé la Passion de Sérapie et Sabine, BHL 7586 + 7407, largement attestée dans les légendiers depuis le IXe s. 90

La fête de la Trinité, qui se développa à partir de la seconde moitié du XIIe s., était normalement célébrée le dimanche qui suivait la Pentecôte. Le texte qui figure ici résulte d’un montage homilétique: depuis le début jusqu’à Patet ergo quod iste tres persone sunt unus deus tantum et eum debent metuere omnes fines terre (f. 165r), il correspond à un sermon écourté de Hugues de Saint-Cher († 1263) sur la Trinité: cf. J.-B. SCHNEYER, Repertorium der lateinischen Sermones des Mittelalters. T. II: Für die Zeit von 1150-1350 (Autoren: E-H) (= Beiträge zur Geschichte der Philosophie und Theologie des Mittelalters. Texte und Untersuchungen, 43/2), Münster, 1970, p. 762, n° 59; le texte de Hugues a été édité par J. BARTKÓ, Un instrument de travail dominicain pour les prédicateurs du XIIIe siècle: les Sermones de evangeliis dominicalibus de Hugues de Saint-Cher († 1263). Édition et étude. Thèse en vue de l’obtention du grade de docteur en Histoire, présentée sous la dir. de N. BÉRIOU le 15 sept. 2003, Université Lyon II, p. 379-380, d’après le ms. Paris, Bibl. Mazarine, 1026, f. 62. À ce canevas d’une trentaine de lignes, le compilateur a ajouté plusieurs comparaisons (f. 165r-v): la première (Item in quodam ymno de trinitate scilicet: O lux beata trinitas...) est basée sur une hymne que les Prémontrés avaient adoptée pour la fête de la Trinité: cf. Corpus Antiphonalium Officii, IV, 8358, éd. R. J. HESBERT (= Rerum ecclesiasticarum documenta. Ser. maior. Fontes, 10), Roma, 1970; cf. aussi Constitutiones quae vocantur Ordinis Praemonstratensis, XLVII, 416, éd. M. L. COLKER (= Corpus Christianorum. Continuatio Mediaevalis, 216), Turnhout, 2008. La deuxième comparaison (Item versus: Nix glacies et aqua tria nomina, res tamen una...) repose sur une

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188. (f. 165v-166) De S. Livario m. = cf. BHL 4959d/e (Beatus Livarius miles Christi strenuus … corpusque sancti Livarii deponentes reliquerunt laudantes et glorificantes Deum cui est honor et imperium in secula seculorum, Amen)91. Nov. 25

sentence proverbiale: cf. H. WALTHER, Carmina Medii Ævi posterioris latina. T. II/3: Proverbia sententiaeque latinitatis Medii Ævi. Lateinische Sprichwörter und Sentenzen des Mittelalters in alphabetischer Anordnung, Göttingen, 1965, n° 16966. Quant à la troisième comparaison (Item ponitur aliud exemplum: fons non est rivus nec stagnum...), elle est d’origine augustinienne, mais avait été relayée par les théologiens médiévaux, à commencer par Pierre Abélard, Theologia christiana, IV.83 (éd. E. M. BUYTAERT [= Corpus Christianorum. Continuatio Medievalis, 12], Turnhout, 1969). L’ensemble est conclu par un exemplum célèbre, inspiré de l’anecdote du théologien et de l’ange rencontré sur une plage: Fuit quidam theologus Parisius qui debebat facere sermonem in natali Domini (cf. Index exemplorum. A Handbook of Medieval Religious Tales, éd. F. C. TUBACH, in Folklore Fellows Communications, LXXXVI/ 204, Helsinki, 1969, n° 4986). Cet exemplum était conçu à l’origine pour illustrer le mystère insondable de la Trinité: mais ici, assez curieusement, c’est au mystère de Noël et de l’Incarnation qu’il est appliqué, alors que le sermon est pourtant consacré à la Trinité. Il est donc probable que le compilateur, trop pressé, l’a puisé tel quel dans un sermon pour Noël, sans prendre soin de le réadapter à la fête de la Trinité. 91 Sur Livier, martyr céphalophore, victime des Huns à Marsal, dans le Saulnois (extrémité Sud-Est du diocèse de Metz), cf. R. LOUIS, De Livier à Olivier, in Mélanges de linguistique romane et de philologie médiévale offerts à Maurice Delbouille, t. 2, Gembloux, 1964, p. 447-476; VAN DER STRAETEN, Saint Livier; PHILIPPART – WAGNER, Hagiographie, p. 629 sq.; GAILLARD, Le souvenir, p. 20 sq. et 224. Au Xe s., l’évêque Thierry Ier (965-984) fit transférer les reliques du martyr à Metz, dans l’église Saint-Polyeucte, où il était fêté le 25 novembre. Au XIe s., Livier fit donc son apparition dans la documentation liturgique messine, et son culte connut même, au niveau local, un relatif essor à partir du XIIIe s., date à laquelle Saint-Polyeucte prit le titre de Saint-Livier. Le renom de Livier, toutefois, demeura toujours étroitement limité à trois aires géographiques: le Saulnois, d’où il était issu, Metz, et aussi Verdun, qui, vers la fin du XIIe s., en importa le culte depuis Marsal, dont l’abbaye Saint-Sauveur de Verdun possédait la seigneurie. C’est sans doute à l’obscurité de son culte et des textes afférents qu’il faut attribuer l’entrée tardive de Livier dans la BHL: son dossier ne fut introduit que dans le Novum supplementum de 1986, avec deux Passions, BHL 4959d et BHL 4959e, toutes deux également rarissimes. BHL 4959d aurait été composée dans les années 1170, et n’a, à ce jour, été identifiée que dans un ms. du XIIIe s., un bréviaire de Saint-Maur de Verdun (Verdun, BM, 116). En fait de Passion, il ne s’agit en réalité que de huit leçons, dans lesquelles se trouve brièvement relaté le martyre du soldat Livier, territorii Salniensis indigena. Quant à BHL 4959e, c’est la Passion que l’on trouve transmise dans le Petit Cartulaire de Saint-Arnoul (cf. ci-dessus, n. 11), qui fait de Livier un martyr territorii Mettensis indigena, exécuté et enseveli à Marsal, avant la translation opérée par les soins de Thierry Ier au Xe s. Si ces deux Passions, et surtout celle du Petit Cartulaire, ont été diversement datées (le texte du Petit Cartulaire, assemblé vers 1300, pourrait être basé sur des documents beaucoup plus anciens), les chercheurs s’accordent généralement pour reconnaître à la Passion verdunoise une plus grande proximité avec la légende originelle (un soldat de Marsal décapité par les Huns): en d’autres termes, le Petit Cartulaire aurait remanié cette légende, soit en retouchant directement la Passion verdunoise, soit en recourant au modèle, aujourd’hui disparu, de cette Passion BHL 4959d. Quoi qu’il en soit, il apparaît clairement, à voir le ms. Charleville 177, que l’on disposait encore à Saint-Arnoul, au début du XIVe s., des différentes versions du martyre de Livier. Le texte qui figure aux f. 165 v166 du légendier combine en effet les deux légendes: Beatus Livarius miles Christi strenuus claro parentum sanguine progenitus territorii Metensis indigena fuit. Qui ab ipsis infancie ru-

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189. (f. 166-168) De festivitate omnium sanctorum = LA, 158. Nov. 1 190. (f. 168-171) Commemoratio omnium fidelium defunctorum = LA, 159. Nov. 2 r-v 191. (f. 171 ) De quatuor coronatis = LA, 160. Nov. 8 192. (f. 171v-172v) De ethimologia nominis – De S. Elizabet = cf. LA, 164 1238 (des.: redundare oleo est repertum). Nov. 19 v Nov. 9 193. (f. 172 -173) De S. Theodoro m. = LA, 161. 92 Nov. 10 194. (f. 173) De S. Martino p. et m. = AS, 169. 195. (f. 173) Passio S. Menne m. = AS, 170. Nov. 11 196. (f. 173-175v) De ethimologia nominis – Vita S. Martini ep. et conf.93 = LA, 162. Nov. 11 v Nov. 13 197. (f. 175 -176) Vita S. Bricii ep. = LA, 163. 198. (f. 176-177v) De ethimologia nominis – De S. Cecilia = LA, 165. Nov. 22 v v 199. (f. 177 -180 ) De ethimologia nominis – De S. Clemente p. et m. = LA, 166. Nov. 23 v 94 155-175 . Nov. 23 200. (f. 180 -181) De S. Clemente ep. Metensi = AS, 174 201. (f. 181r-v) De sacramento altaris = Thomas de Aquino, In sollemnitate corporis Domini Iesu Christi, lec. 1-5 (des.: subito de fontium venis sanguis dimentis studiis spiritalibus in Dei amore eruditus, virile robur conscendens, morum probitate nobilis, iusticie et veritatis sanctitate nobilior, tam Deo quam hominibus acceptabilem se exibebat in omnibus. Ea autem tempestate qua Hugnorum gens perfida proprias mutavit sedes diversasque deinde vastavit regiones, novissime Gallicanum impugnare aggrassa est orbem, urbes munitissimas licet longa obsidione evertens. Hic videns christianos a Hugnis diversis penis cruciari...». Les premières lignes du texte reproduisent celles de la Passion verdunoise (§ 1-2, éd. VAN DER STRAETEN, Saint Livier, p. 383); le compilateur, toutefois, a remplacé Salniensis par Metensis, comme dans le Petit Cartulaire, et, à partir de Hic videns, il a suivi le texte du Petit Cartulaire (§ 12, éd. GAILLARD, Le souvenir, p. 24-26) pour relater le martyre de Livier et sa translation à Saint-Polyeucte. La suture des deux sources est d’ailleurs encore visible: dans le Petit Cartulaire, en effet, le récit des destructions commises par les Huns (§ 11) précédait la présentation du martyr; le pronom hic, dans Hic videns, renvoyait donc naturellement à Livier, dont le portrait précédait immédiatement; mais, dans Charleville 177, les premières phrases suivent l’ordre de la Passio verdunoise, qui intercale les destructions des Huns entre le portrait du saint et le récit de son martyre: on ne voit donc plus aussi immédiatement à qui renvoie le pronom hic. La Passion de Livier, dans Charleville 177, est donc bien représentative de la méthode suivie par le compilateur: pour la notice de ce saint local, il a maladroitement combiné deux textes rares, celui du Petit Cartulaire, disponible à Saint-Arnoul vers 1300, et celui de sa source, c’est-à-dire, comme on l’a vu plus haut, la Passion verdunoise ellemême, ou bien son modèle disparu. 92 Pour le pape Martin, la BHL donne la date du 12 novembre. Mais, dans les calendriers messins, comme chez Adon et Usuard, ce pape est fêté le 10 novembre. 93

Cf. ci-dessus, n. 59.

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Cf. ci-dessus, n. 55.

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cepit erumpere)95. 202. (f. 181v-182) De S. Benigno ep. et m. = cf. BHL 1154 (des.: non procul ab ipso carcere condidit in sepulchro. Kal. novembris martirisatus est)96. Nov. 2 r-v 203. (f. 182 ) De S. Grisogono m. = LA, 167. Nov. 24 204. (f. 182v-184v) De ethimologia nominis – De S. Katerina v. = LA, 168. Nov. 25 205. (f. 184v-185) De SS. Digna et Emeritha = cf. BHL 2163 (des.: leprosus factus est et in vermibus expiravit)97. (Sept. 22) 95 Cf. C. LAMBOT, L’Office de la Fête-Dieu. Aperçus nouveaux sur ses origines, in Revue bénédictine, 54 (1942), p. 61-123 (p. 75-79 pour le texte des leçons). La Fête-Dieu était normalement célébrée le jeudi ou le dimanche qui suivait la Trinité; elle n’a que très rarement été ajoutée au sanctoral de la Légende dorée: cf. FLEITH, Studien, p. 489 (S6). 96 Le texte qui figure ici est un résumé de la Passion BHL 1154, attestée dans une quinzaine de mss français depuis le IXe s. Bénigne, martyr de Dijon, est normalement fêté le 1er novembre; à Metz, une église lui était consacrée et se trouvait mentionnée au IXe s. dans la liste des stations quadragésimales; toutefois, elle n’apparaissait déjà plus comme église stationale, ni pour les rogations au XIe s., ni, au XIIe s., dans le Cérémonial de la cathédrale: cf. KLAUSER – BOUR, Un document, p. 13 et 53 sq. Cette église appartenait à l’abbaye Saint-Arnoul, une propriété confirmée en 1192 par le pape Célestin III; cela explique sans doute pourquoi le calendrier de l’abbaye est le seul calendrier messin à mentionner S. Bénigne (mais à la date du 2 novembre et non du 1er): cf. ODERMATT, Der Liber, p. 371. Il est vrai que Saint-Arnoul entretenait aussi des rapports privilégiés avec l’abbaye Saint-Bénigne de Dijon: en 996, c’est à Guillaume de Volpiano (962-1031), abbé de Saint-Bénigne, que l’abbé de Saint-Arnoul, Adalbéron II, confia la réforme de son monastère. 97 Les noms de Digna et d’Émérita, fêtées le 22 septembre, n’apparaissent pas dans les calendriers messins, ni dans les litanies. Elles n’étaient pourtant pas totalement inconnues à Metz, car l’évêque Thierry Ier (965-984) en avait rapporté des reliques d’Italie: cf. Sigebert de Gembloux, Vita Deoderici Mettensis ep., éd. G. H. PERTZ, in MGH. Scr., t. 4, p. 475. Dans Charleville 177, le compilateur a abrégé, par petites excisions successives, un texte rare, la Passion BHL 2163. Le dossier hagiographique de Digna et Émérita est en effet composé de deux Passions, tout à fait indépendantes l’une de l’autre. La Passion romaine BHL 2160-2161 et son épitomé BHL 2162 ne se rencontrent que dans une poignée de mss médiévaux, tous romains (6 depuis le XIIe s.): le récit en est inspiré de la Passion d’Afra, BHL 108-109, et situé sous la persécution de Valérien. BHL 2163, en revanche, est un pur plagiat de la Passion de Ste Victoire, BHL 8591, ainsi que l’avait justement remarqué F. DOLBEAU, Recherches sur les œuvres littéraires du pape Gélase II. B: Subsiste-t-il d’autres travaux de Jean de Gaète ?, in Sanctorum societas. Récits latins de sainteté (IIIe-XIIe siècles), 2e éd., t. 2 (= Subs. hag., 85), Bruxelles, 2005, p. [700], n. 43: l’hagiographe s’est contenté de remplacer les noms de Victoire et d’Anatolie par ceux de Digna et d’Émérita; le récit se déroule donc sous la persécution de Dèce, et les deux vierges y sont désormais victimes de leurs fiancés respectifs, Aurélien et Eugène. Cette Passion BHL 2163 n’a été identifiée que dans trois mss, tous issus de l’aire franco-germanique: La Haye, Museum Meermanno-Westreenianum, 10 B 12, XIIe s., prov. Saint-Vincent de Metz; Trier, Seminar, 35 (R.I.11), XIIIe s., prov. Trèves; Münster, Universitätsbibl., 23, XVe s., prov. Böddeken (détruit). Il n’est sans doute pas indifférent de constater que le ms. le plus ancien de BHL 2163 était d’origine messine, tout comme Charleville 177: peut-être la Passion BHL 2163 fut-elle précisément rédigée à Metz, après l’arrivée des reliques italiennes rapportées par Thierry Ier; comme on ne disposait pas, en Lorraine, de Passion pour Digna et

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Nov. 29 206. (f. 185v) De S. Saturnino m. = LA, 169. v v 207. (f. 185 -186 ) De S. Iacobo interciso = LA, 170. (Nov. 27) (Iul. 26) 208. (f. 186v-187) De S. Pastore ab. = LA, 171. r-v (Mart. 27) 209. (f. 187 ) De S. Iohanne ab. = LA, 172. 210. (f. 187v) De S. Moyse ab. = LA, 173. (Aug. 28) v (Iul. 19) 211. (f. 187 -188) De S. Arsenio ab. = LA, 174. r-v (Oct. 21) 212. (f. 188 ) De S. Agathone ab. = LA, 175. 213. (f. 188v-191v) De SS. Barlaam et Iosaphat = LA, 176. (Nov. 27) (Nov. 29) 214. (f. 191v-192) De S. Pafnutio ab. = AS. Suppl., 4. 215. (f. 192r-v) De S. Malcho ab. = AS. Suppl., 3. (Oct. 21) v 216. (f. 192 ) De quadam sanctimoniali = AS. Suppl., 11. (Mart. 16) 217. (f. 192v-193) De S. Habraham ab. = AS. Suppl., 6. v 1-150 (des.: veneno sibi dato 218a. (f. 193-194 ) De S. Pelagio p. = LA, 177 interiit). (Mart. 2) v 171-187 (Circa annum 218b. (f. 194 -195) De venerabili Beda = LA, 177 Domini DCIIIIXX et VII Beda venerabilis... et eterna morte periit). (Mai. 29) 218c. (f. 195) De illis qui ordinaverunt missam = LA, 177 224-240 (Huius tempore Karoli [Tempore Karoli magni post corr.] officium ambrosianum ... Sancti Spiritus adsit nobis gratia etc.). 218d. (f. 195) De Karolo imp. et de statura eius = cf. LA, 177 241-375 (Karolus ut refert Turpinus archiepiscopus... spiritum exalavit et corpus Domini disparuit)98. Ian. 28 219. (f. 195-198) De dedicatione ecclesie = LA, 178. 220. (f. 198-199) De S. Pachomio ab. = cf. BHL 6411/6410 (Pachomius erat Mempheus genere gentilium ... in senectute sancta migravit ad Domi(Mai. 14) num)99. Émérita, les Messins pourraient avoir adapté la Passion de Ste Victoire, BHL 8591, qui circulait alors dans les régions voisines (Victoire était honorée à Sainte-Barbe de Cologne, et ses compagnons eunuques, Calocère et Parthène, avaient eux-mêmes été transférés à Moiremont, en Champagne, à l’époque carolingienne). 98 Le compilateur a fragmenté en quatre parties le chapitre composite de Jacques de Voragine sur le pape Pélage, ce qui lui a notamment permis de créer une entrée particulière pour Charlemagne. La mémoire de cet empereur était particulièrement vive à Saint-Arnoul, où étaient conservés les tombeaux de sa femme Hildegarde et de sa fille Adélaïde: cf. P.-E. WAGNER, Trésor de Saint-Arnoul, in Le chemin des reliques: témoignages précieux et ordinaires de la vie religieuse à Metz au Moyen Âge. Exposition Metz, Musées de la Cour d’Or, 16 déc. 2000 – 18 mars 2001, Metz, 2000, p. 17-22. Dans l’un des mss du calendrier de Saint-Arnoul (Metz, BM, 46, aujourd’hui détruit), le nom de Charlemagne fut même ajouté au 28 janvier, jour de l’octave de Ste Agnès: cf. ODERMATT, Der Liber, p. 361. Il est vrai que l’abbaye tirait grand prestige de la parenté supposée entre S. Arnoul et la dynastie carolingienne. 99

Pour Pachôme, le compilateur a réuni, en les abrégeant sévèrement, les Vies de deux

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C. LANÉRY

221. (f. 199-201) Incipiunt quedam notabilia super legendas sanctorum = éd. Annexe 3. 222. (f. 201r-v) De quodam monacho = BHL 6538, § 93 (Erat quidam solitarius in Egypto qui rogabat Dominum dicens: Domine ostende mihi... quia occulta et iusta sunt iudicia Dei)100. 223. (f. 201v) De abbate Silvano = BHL 6527, XIV.5 + X.41-42 + XI.48 + BHL 6525, 133 + Hier., Ep. 125.19 (Hinc beatus Hieronimus dicit: Sed dicis, ipse non detraho ... quam illius qui audit loquentem) + BHL 6529, IV.1 + BHL 6527, IV.62 + XI.5 + XI.10 + XI.42 + cf. XI.42a (des.: nam si aliquis operetur multum et non conservet et sobrie non gesserit impossibile est custodire exteriorem)101 + cf. XI.25 (des.: contentiosus est quia si faciat celum et terram novam non potest esse securus|). (f. 202-203, gardes) Annotations diverses: note médicale (f. 203, seconde moitié du XIVe s.)102, traces de comptes en chiffres arabes (f. 203, main moderne). Institut de Recherche et d’Histoire des Textes

Cécile LANÉRY

40, Avenue d’Iéna F – 75116 Paris saints homonymes, tous deux fêtés, il est vrai, le même jour (14 mai). Du début jusqu’à cum sapientia legis percepta in tabulis cordium vestrorum sint (f. 198v), il a suivi la Vie de Pachôme le Jeune (fin du IVe s.), BHL 6411, § 2-9 (AASS, Mai. t. 3, p. 359-362). Puis, il a enchaîné, sans transition aucune (f. 198v: Tantam fiduciam sanctus Pachomius apud Dominum acquisierat...), sur la Vie de Pachôme de Tabennèse († vers 346), BHL 6410, dans laquelle il a puisé une succession d’extraits des § 19 à 53 (PL 73, col. 241-272). 100 Cf. Prototypon veteris ecclesiae continens vitas, gesta dictaque sanctorum..., Köln, 1547, n. p. (dernier paragraphe du livre V des Vies des Pères). 101 Cf. C. M. BATLLE, Vetera Nova. Vorläufige kritische Ausgabe bei Rosweyde fehlender Vätersprüche, in Festschrift Bernhard Bischoff zu seinem 65. Geburtstag dargebracht von Freunden, Kollegen und Schülern, éd. J. AUTENRIETH – F. BRUNHÖLZL, Stuttgart, 1971, p. 40. 102 Nota. In marcio si sanguinem minuas sexto decimo kalendas aprilis .f. non pacieris febrem in anno. In aprili si tercio idus aprilis .c. si sanguinem minuas non pacieris febrem in anno. In maio si sanguinem minuas sexto vel quinto kalendas iunii .g. et .a. non pacieris febrem in anno. Dans les traités de comput, les lettres a à g désignent les sept premiers jours de l’année (du 1er au 7 janvier). Il faut donc comprendre cette note de la manière suivante: «En mars, si tu fais une saignée le 17 mars, jour ‘f’, tu ne souffriras pas de fièvre dans l’année. En avril, si tu fais une saignée le 11 avril, jour ‘c’, tu ne souffriras pas de fièvre dans l’année. En mai, si tu fais une saignée le 27 ou le 28 mai, jours ‘g’ et ‘a’, tu ne souffriras pas de fièvre dans l’année». Si donc on prend, par exemple, l’année 1365, qui commençait un mercredi, le jour f (6 janvier) était un lundi, le jour c (3 janvier), était un vendredi, les jours g (7 janvier) et a (1er janvier), étaient respectivement un mardi et un mercredi. En 1365, on pouvait donc, pour éviter la fièvre, faire une saignée le lundi 17 mars, le vendredi 11 avril, ou encore les mardi 27 et mercredi 28 mai. Je remercie Isabelle Draelants, de l’IRHT, pour ses précieuses explications sur le système de comput médiéval.

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ANNEXE 1: Une Vie de S. Clou, évêque de Metz [57] S. Clou († 663/669), fils de S. Arnoul et troisième successeur de son père sur la chaire épiscopale de Metz (après Goéric et Godon), fut, comme Arnoul, enseveli dans la basilique des Saints-Apôtres (plus tard renommée Saint-Arnoul); au Xe s. (vers 959 ?)103, son corps fut partiellement transféré au prieuré de Lay-Saint-Christophe, une dépendance de Saint-Arnoul située près de Nancy; l’abbaye-mère, toutefois, conserva le chef du saint. Dans les calendriers messins, et notamment dans le Cérémonial de la cathédrale, S. Clou était fêté le 6 septembre, et sa translation commémorée le 11 décembre. À Saint-Arnoul, cependant, la seule date retenue était celle du dies natalis, le 8 juin, et c’est manifestement aussi celle que retint le compilateur du légendier Charleville 177, puisqu’il introduisit sa notice juste devant celle de Prime et Félicien [58], fêtés le 9 juin. La Vie de S. Clou, BHL 1735, attestée dans les manuscrits depuis le e e e XI s., fut sans doute rédigée à la fin du X ou au début du XI s. par un moine de Saint-Arnoul104. Elle n’évoque pas la translation du Xe s., ce qui ne signifie pas que celle-ci n’avait pas encore eu lieu105; son récit est en partie basé sur la notice de Paul Diacre106 et sur la Vie de S. Trond (BHL

103 Le Petit Cartulaire de Saint-Arnoul, § 64 (éd. GAILLARD, Le souvenir, p. 116 et n. 55), est seul à dater l’évènement de manière précise, mais ses renseignements sont contradictoires avec les calendriers messins, qui parlent d’une translation le 11 décembre, alors que le cartulariste avance la date du 6 septembre 959; dans le même temps, toutefois, il précise qu’Odelric était alors archevêque de Reims et Adalbéron évêque de Metz: or, Odelric ne devint archevêque qu’en 962, et Adalbéron mourut la même année. 104

Sur S. Clou et son dossier hagiographique, cf. Bibliotheca sanctorum, t. 4, Roma, 1964, col. 64; PHILIPPART – WAGNER, Hagiographie, p. 622 sq., GAILLARD, Le souvenir, p. 225 sq., ainsi que la notice de M. GOULLET in SHG X, p. 241 sq. La Vie BHL 1735 est éditée dans AASS, Iun. t. 2, p. 127-132. 105 La translation n’est pas davantage mentionnée par le Liber Ordinarius de Saint-Arnoul, vers 1240. Il est vrai qu’elle avait eu peu d’incidence pour les moines de Saint-Arnoul, qui avaient conservé le chef du saint; le reste du corps demeurait d’ailleurs dans leur dépendance, par l’intermédiaire du prieuré Saint-Christophe. 106 Cf. Paul Diacre, Liber de episcopis Mettensibus, éd. G. H. PERTZ, in MGH. Scr., t. 2, p. 264 et 267. Paul Diacre, qui écrivait vers 783, à la demande de l’évêque de Metz, Angilram, est assez succinct sur Clou, et son compte rendu ne lui est pas des plus favorables: fils aîné d’Arnoul, Clou aurait refusé que son père offre à l’Église de Metz la part d’héritage qui lui revenait; son frère cadet, Anchise, aurait en revanche accepté, ce qui lui aurait valu, par la suite, une descendance prestigieuse (Anchise était considéré comme l’ancêtre de Charlemagne); cet épisode est également rapporté par la Vita secunda d’Arnoul, sur la base du récit de Paul Diacre. L’hagiographe de S. Clou, BHL 1735, s’est donc efforcé de justifier l’attitude peu désintéressée de Clou par des considérations théologiques: Dieu ayant réservé au fils aîné d’Arnoul le siège de Metz, Clou se devait de conserver son héritage pour alimenter les aumônes qu’il ferait durant son ministère.

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8321-8322), d’époque carolingienne. Son auteur pourrait aussi avoir utilisé la Vita secunda de S. Arnoul (BHL 693)107. En plus de la Vie BHL 1735, nous disposons également des données recueillies vers 1300 par l’auteur du Petit Cartulaire de Saint-Arnoul108. Dans sa chronique, ce dernier évoque en effet succinctement l’épiscopat de S. Clou (§ 22-24), puis, beaucoup plus loin, relate sa translation à LaySaint-Christophe et les miracles qui s’y produisirent (§ 64-78)109; le récit de cette translation est lui-même précédé du dossier des chartes relatives à la donation, par la comtesse Ève et son fils, Odelric de Reims, de leur terre de Lay-Saint-Christophe à l’abbaye Saint-Arnoul (§ 60-63); c’est en effet sur cette terre que fut érigé le prieuré du même nom où fut accueilli le corps de S. Clou. Sans doute le cartulariste disposait-il de plusieurs documents, qui ne nous sont pas parvenus: les miracles de S. Clou à LaySaint-Christophe pourraient avoir été empruntés à un recueil constitué au prieuré; quant aux récits sur l’épiscopat et la translation du saint, ils pourraient dériver d’un hypotexte perdu, un éloge de S. Clou composé à l’époque de la translation, à un moment, donc, où on ne disposait pas encore de la Vie BHL 1735110. Le cartulariste se serait contenté d’y ajouter quelques informations sur des évènements plus récents, comme une élévation de reliques, qui eut lieu sous l’abbatiat de Richer de Bar (1208-1231). Le dossier de S. Clou est donc constitué de la Vie BHL 1735 et du Petit Cartulaire, deux pièces indépendantes l’une de l’autre, bien qu’on puisse y déceler, çà et là, quelques points communs: il n’est donc pas exclu que l’hagiographe de BHL 1735 ait eu, lui aussi, accès à la source perdue du Cartulaire111. Quoi qu’il en soit, il faudrait désormais ajouter à ces deux documents la Vie composite qui figure dans le légendier Charleville 177. 107

Cf. GOULLET, in SHG X, p. 244 sq.

108

Sur le Petit Cartulaire, voir ci-dessus, n. 11.

109

Dans le Petit Cartulaire, le dossier de S. Clou est donc fragmenté en deux unités textuelles distinctes (éd. GAILLARD, Le souvenir, p. 36-38 et 116-130). Mais, lorsque F. A. WEYLAND, Vies des saints du diocèse de Metz, t. 3, Guénange, 1909, p. 338-347, édita le dossier de S. Clou d’après le Petit Cartulaire, il réunit ces deux unités pour former un seul et même bloc textuel: c’est le produit de ce montage éditorial qui a été enregistré dans le Supplément de la BHL sous le numéro 1735a. 110 De fait, dans le Petit cartulaire, 24, une phrase évoque l’oubli dans lequel étaient tombés les Gestes de S. Clou à l’époque du narrateur. D’après GAILLARD, Le souvenir, p. 225, et GOULLET, in SHG X, p. 247, cette phrase pourrait remonter à l’hypotexte servilement reproduit par le cartulariste des années 1300. De fait, au moment de la translation du Xe s., on ne disposait probablement pas encore de la Vie BHL 1735, et un hagiographe pouvait donc alors légitimement déplorer le manque de sources sur un saint trop brièvement évoqué par Paul Diacre dans son Liber de episcopis Mettensibus. 111

Cf. GOULLET, in SHG X, p. 248.

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Celle-ci, en effet, ne se réduit pas à une simple combinaison des deux écrits précédents. Certes, les § 1, 5 et 8-9 de la Vie abrégée, reproduisent littéralement des lambeaux du Petit Cartulaire (extraits des § 22-24 et 6364)112; quant à son § 3, il correspond presque mot pour mot à celui de la Vie BHL 1735. Mais d’autres passages (§ 2, 4, 6-7) ne se retrouvent tels quels ni dans BHL 1735, ni dans le Petit Cartulaire. Le § 2, qui reprend la généalogie d’Arnoul, père de Clou, complète une notice de Jean de Mailly — elle-même dérivée des généalogies carolingiennes — avec des renseignements tirés de BHL 1735, § 2 (baptême de Clovis par Rémi, allusion aux frères d’Anspert): Charleville 177

AS. Suppl., 32 6-10

BHL 1735, § 2

Anspertus vir senatoria dignitate fulgens, Bliothildem filiam Glotarii rgis Francorum Ludo[i]vici filii in matrimonium sibi oppineravit (quem Lodowicum beatus presul Remigius Remensium sua cum omni gente baptizavit). Ex qua genuit auspitio felici Arnualdum, genitorem felicis Arnulphi, Ferreolum Ucetie episcopum et martirem, Modericum Arisidii presidem, et Tarsitiam virginem sacram que Redonis requiescens mortua mortuum suscitavit. Qui Anspertus non solummodo gloria filiorum felix, verum et fratrum quaterva insignis enituit.

Iterum prefatus Ansbertus vir senatorie dignitatis ut diximus accepit uxorem Bliotildem filiam Clotarii regis Francorum, filii predicti et genuit ex ea tres filios: Arnoaldum, Ferreolum, Modericum et filiam Tarsiciam. E quibus Ferreolus Lutecie episcopus et martyrio coronatus ibi requiescit. Modericus frater eius Arsidii episcopus Christi confessor ibidem quiescit. Tarsicia virgo Christi permanens et Redonis quiescens et mortua mortuum suscitavit. Porro Arnoaldus primo genitus genuit sanctum Arnulfum Metensem episcopum...

(...) Arnoaldus, quem dicimus, patrem habuit Anspertum; qui ditatus non solum rerum opulentia, verum fratrum dignitate et consociali excellentia gloriosus effulsit. Sanctum namque Aigulfum, Metensium Pontificem, ex filia Chlodovei Regis procreatum dicunt: qui Chlodoveus, praedicante S. Remigio Remensium Pontifice, et se et totam Franciam Christianae religioni primus subdidit...

Dans la Vita Glodulfi de Charleville 177, deux autres paragraphes (§ 4: élection de Clou; § 7: commande de la Vita Arnulfi par son fils Clou) font allusion à des évènements également rapportés par BHL 1735 (§ 4 et 15); mais il est impossible de déterminer si le compilateur a reformulé à sa manière la Vie BHL 1735, ou s’il a cité une autre source, qui rapportait les mêmes évènements en des termes différents. Ce qui est certain, en tout cas, c’est qu’il disposait sur S. Clou de documents variés, dont certains ne 112

Le compilateur, ici comme ailleurs, a du reste fait preuve de maladresse en citant littéralement le Petit Cartulaire: au § 9 (voir ci-dessous), il renvoie, comme son modèle, à la charte de donation des terres de Lay-Saint-Christophe (ut in cartha continetur); mais cette charte ne figure plus dans son abrégé, alors que, dans le Petit Cartulaire, elle précédait immédiatement le récit de translation, ce qui justifiait donc le renvoi interne du cartulariste.

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nous sont pas parvenus113: la vision rapportée au § 6, notamment, ne figure ni chez Paul Diacre, ni dans la Vie BHL 1735, ni dans le Petit Cartulaire. Elle n’est d’ailleurs pas dépourvue d’intérêt, car elle touche à la fondation de l’abbaye Saint-Martin-des-Glandières114. On sait qu’un faux diplôme de Louis le Pieux imputait cette fondation au père de S. Arnoul de Metz, Arnoul Bodagisel115; or, c’est à S. Clou, fils de S. Arnoul, que le récit du § 6 impute la fondation, en ce lieu, d’une domus orationis, appelée à devenir plus tard l’abbaye Saint-Martin. En d’autres termes, la vision du § 6 contredit le faux diplôme, lui-même mal daté: il est certainement postérieur à l’époque carolingienne, mais antérieur à 1421, date à laquelle il fut recopié dans un diplôme de l’empereur Sigismond. Il est donc possible que la version du ms. Charleville 177 soit antérieure à celle du faux diplôme; elle confirme en tout cas qu’on liait déjà volontiers la fondation de l’abbaye des Glandières à la dynastie arnulfienne. Dans l’édition qui suit, la mise en paragraphes respecte celle du manuscrit; les interventions du réviseur contemporain sont signalées entre crochets droits (suppressions) et obliques (ajouts). Un trait vertical, simple (|) ou double (||) indique le passage d’une colonne ou d’une page à la suivante. Les extraits du Petit Cartulaire sont en petits caractères, ceux qui proviennent de la Vie BHL 1735 en petits caractères espacés. La ponctuation est de mon fait. F. 50r-v: Vita sancti Glodulfi episcopi Metensis. 1. Sanctus igitur Clodulfus sanctissimo patre Arnulfo progenitus fuit, patrisque formam sanctitatis vel nobilitatis suis impressam moribus per|spicabilem tradidit. Cuius beati Arnulphi nobilitatis linea a Troianorum deducta nobilibus cousque116 processit divinitus, ut veluti zona lactea siderum frequencia celum decorat, noctium 113 On ne peut notamment exclure qu’en plus d’avoir utilisé directement le Petit Cartulaire, la Vie BHL 1735, et divers autres documents (dont la généalogie de S. Arnoul composée par Jean de Mailly), le compilateur ait eu également accès à la source perdue du Cartulaire. À Saint-Arnoul, on disposait encore, au XIVe s., de nombreux textes susceptibles d’alimenter la prose d’un compilateur soucieux de synthèse hagiographique. 114

Saint-Martin-des-Glandières (commune de Longeville-lès-Saint-Avold, en Moselle), dans le diocèse de Metz. Cette abbaye bénédictine est attestée pour la première fois dans un diplôme de Louis le Germanique daté de 875: cf. GAILLARD, D’une réforme, p. 76; L.-H. COTTINEAU, Répertoire topo-bibliographique des abbayes et prieurés. T. 1: A-L, Mâcon, 1939, p. 1290 et 1645. 115

Cf. GAILLARD, D’une réforme, p. 324 sq.; ce faux diplôme est daté du 15 mai 835: Louis y ordonne la restitution aux moines de Saint-Martin des biens qui leur avaient été donnés par Bodagisel, père de S. Arnoul (éd. A. CALMET, Histoire ecclésiastique et civile de la Lorraine, Nancy, 1728, t. 1, preuves, col. 300). Mais ce diplôme est un faux grossier, et le personnage de Bodagisel est lui-même une création tardive. 116

cousque: scil. quousque.

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tenebras irradiat, ita eiusdem fecunditas generis et morum luce et virtutum titulis Galliam tripertitam illustraverit. Quod ut plenius noscatur priorum paulo su-

perius propago replicetur. 2. Anspertus vir senatoria dignitate fulgens, Bliothildem filiam Glotarii rgis Francorum Ludo[i]vici117 filii in matrimonium sibi oppineravit118 (quem Lodowicum beatus presul Remigius Remensium sua cum omni gente baptizavit). Ex qua genuit auspitio felici Arnualdum, genitorem felicis Arnulphi, Ferreolum Ucetie episcopum et martirem, Modericum Arisidii presidem, et Tarsitiam virginem sacram que Redonis requiescens mortua mortuum suscitavit. Qui Anspertus non solummodo gloria filiorum felix, verum et fratrum quaterva insignis enituit. 3. Tandem p u e r v e n e r a b i l i s G l o d u l f u s , u t n o b i l i u m f i l i i s f i e r i s o l e t , s c o l i s t r a d i t u r l i b e r a l i b u s l i t t e r i s imbuendus. P r o f i c i e b a t que etate nec minus vero spiritualis doctrine affluentia ; in quo parabatur thesaurus desiderabilis qui requiesceret in eius ore. Studebantque pii et doctissimi magistri sui, ut eorum benignis simus auditor, tempore pr efinito effectus paterfamilias, sciret et haberet unde proferret nova et vetera. Hic itaque liberalis simus puer a pueritia in adolescentiam iuventutemque humanis divinisque rebus et studiis bene adultus proficiens, satagebat sollertissime Deo et omnibus bonis hominibus, verbis et factis perfectissimis complacere; malis autem favere et eorum amici c i i s v e l a d m o d i c u m i u n g i s i c e f f i c i e b a t 119 e t r e n i t e b a t u r , s i c u t p r a v a m v i t a m e t mo r e s i m i t a r i p r o r s u s a b h o r r e b a t a c d e s p i c i e b a t . Erat etate et sapientia maioribus subditus, erat equalibus equus, erat minoribus benignus et mitis, et mira benivolentia ab omni ordine sexu et professione dulcissime amabatur. 4. Beato Godone episcopo defuncto qui tercius post beatum Arnulphum Metensem rexit ecclesiam, plebs Metentum120 in timore Dei erudita et firmata, viros tantum probabilis vite sibi exobtabat preesse, perturbatoresque pacis fraterne honores121 ambitione procurabat procul abesse. Viros igitur industrios ad hoc regis ad aulam dirigunt, Clodulfum omni || bonitate conspicuum in presulem sibi concedi deposcunt, dignum quippe referunt fore ut preferatur ecclesie quem Dominus sue donis gratie assigna117

Ludo[i]vici: scil. chlodovei.

118

oppineravit: scil. oppigneravit.

119

efficiebat: le modèle suivi par l’abréviateur devait être corrompu; la Vie BHL 1735, § 3 (AASS, Iun. t. 2, p. 127) donne plus correctement effugiebat. 120

Metentum: scil. metensium.

121

honores: il faut sans doute comprendre honoris.

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verat sibi v[i]as esse perutile. Potestas ergo concedit regia quod unanimis expectebat Metensis ecclesia. 5. Vir itaque Deo amabilis Clodulfus deducitur, honore pontificis insignitur, consecratur, Deo laus et iubilatio redditur, fit lumen ecclesie decorum. Enimvero quia eius oculus intentionis fuerat lucidus, sequens prodidit actus, quantumque sibi placebat in cubiculo cordis, benignitas Dei notum fecit in populis. Gaudebat namque prodesse magis quam preesse, et dum solis celestibus inhiabat, nulli penitus invidebat. Quid plura ? Sic se spirituali exercitio mancipavit, ut et in brevi apicem sanctitatis vivendo continenter obtinuerit, et non modo cum civibus, sed et procul morantibus, operum lucerna, sanctitatis fama seu materia, vel incitamentum eximius fuerit ad celeste desiderium.

6. Est villa Metensi adiacens diocesi, cui ob glandifere quondam arboris copiam ab antiquis Glandaria inditum est nomen122. Ad hanc venerandus presul quodam die devenerat, dum gregem dominicum circuiens sibi commissum animarum in eis quereret lucrum; ubi dum corpusculum divinis operibus fatigatum, paulisper quieti dedisset, ecce illi visionis species angelice in sompno astitit. Iubetur presul sequi precedentem, et circumlatione thuribuli designatur locus illi, ubi precipitur Deo ara construi. Sacerdos igitur sanctus evigilans, ut viderat in visione, domum orationis studet effectui mancipare. Quo in loco favente Deo monachorum cetus postmodum congregatur, Deoque beati Martini meritis locus isdem dedicatur. Pulchre thuribulo domus designatur Deo construenda: non enim hic levitatum dissolutio, sed pro excessu negligentiarum fervens mentis debet esse compunctio. Hinc etiam mos antiquis inolevit ut in sanctorum solempniis thus circumferatur, quatinus in cordis conpunctionem Deo festa celebrare moneantur. 7. At vero Dei sacerdos Clodulfus divino ut diximus animum indulgens exercitio, evangelici exemplo paradigmatis in cordis agro mundi sparsit recte semen intentionis, quod in dies fructificans, primo actionis herbam tenere123 protulit, hinc spicam provectionis, mox perfectionis fructum, ab instabilitatis palea [celestum] | celesti horreo inferendum. Ad cumulum autem suorum meritorum, sui progenitoris gesta beatissimi Arnulfi litteris fecit annotari, eaque multorum utilitati affixit veluti specular quoddam recte vivendi. 8. Licet etiam inercia, rubigo studii, huius viri gesta concesserit oblivioni, vigilantia tamen eius in sibi commissum gregem que fuerit, quantum vita eius meritis probata extiteri[n]t Deo placita testis est corona illi demum a Christo reddita, et nisi 122

Cf. ci-dessus n. 114.

123

tenere: peut-être faut-il comprendre teneram.

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fides fluctuet, presens miraculorum gloria. Hic igitur virtutum plenus atque dierum, corporali absolvitur ergastulo evi anno sui centessimo tercio, presulatus quadragesimo secundo, ante idus iunii die septimo, atque manibus celicum 124 celesti presentatur Domino, feliciter regaturus cum eo. Cuius sacrum corpus a psallenti clero et frequenti populo, cum gemitu mixto lacrimarum ymbre prosecutum in basilica ubi125 tunc Ad apostolos dicebatur, honorifice sepelitur anno incarnationis Domini septingentesimo octavo decimo. Hic possessionibus ampliavit ecclesiam beati Stephani. Sedit annis quadraginta duobus et viginti quinque diebus.

9. Generosa etenim beati Arnulfi prosapia longe lateque diffusa adeo est divinitus exaltata, ut regni Francorum obtineret septra126. Ex horum germine nobili comes prodiit Arnulphus, clarissimi comitis quondam Hugonis filius. Qui paci iusticieque studens, dum obvia no[s]centibus, innocenter est trucidatus. Cuius corpus mater eius venerabilis, Eva nomine, procurans diligentissime ad beatissimi basilicam Arnulphi Metim devexit, illicque sepulture contradens, castrum sui iuris quod dicitur Laium pro filii suorumque requie ibidem, ut in artha continetur, delegavit. Processu vero temporis domno Odeixico127 Remensi archiepiscopo dicti superius defuncti germano, obtinente, et Metensi episcopo venerabili Adalberone eorum cognato, id libenter annuente, beatissimi ossa Clodulfi ab ecclesia sancti Arnulphi, priori128 capite reservato, apud Laium sunt translata, et ex beati Arnulfi cenobio fratres deputati, qui iugiter ibidem divino famul[i]atui insisterent. Quo in loco deinceps Dominus sanctum suum multis et magnis miraculis est dignatus honorare. ANNEXE 2: Une Vie et translation de S. Arnoul [118] S. Arnoul, conseiller de Childebert II († 596), puis du roi d’Austrasie Théodebert II († 612), participa au renversement de Brunehaut en 613 et à la réunion des royaumes francs entre les mains de Clotaire II († 629). L’année suivante, en 614, bien que laïc, il obtint l’épiscopat de Metz; Clotaire II en fit même, quelques années plus tard, le conseiller de son fils, Dagobert. En 628/629, Arnoul ne s’en retira pas moins dans un ermitage à Remiremont, où il mourut en 641/642. Son successeur sur le siège épiscopal de Metz, Goéric, se chargea de rapporter son corps et de l’inhumer 124

celicum: c’est aussi la leçon des manuscrits du Petit Cartulaire, 24 (GAILLARD, Le souvenir, p. 36); il faut néanmoins comprendre celicorum. 125 ubi: c’est la leçon de l’un des deux mss du Petit Cartulaire, 24, l’autre donnait tibi; GAILLARD, Le souvenir, p. 36, propose de suivre la correction de G. WAITZ, in MGH. Scr., t. 24, p. 533: que. 126

septra: scil. sceptra.

127

Odeixico: sans doute une faute de lecture pour Odelrico, Odelric, devenu archevêque de Reims en 962. Le Petit Cartulaire, 64 (GAILLARD, Le souvenir, p. 116), donne Udelrico. 128 priori: le Petit Cartulaire, 64 (GAILLARD, Le souvenir, p. 116), donne ici plus justement priori loco.

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dans l’église des Saints-Apôtres, renommée Saint-Arnoul au début du e VIII s. La mémoire d’Arnoul était particulièrement vive à Metz, aussi bien dans l’abbaye qui lui était consacrée que dans la cathédrale: son dies natalis était fêté le 16 août, sa translation, le 18 juillet. Le compilateur de Charleville 177 a visiblement privilégié le dies natalis, puisqu’il a inséré la Vie et translation d’Arnoul entre l’Assomption (15 août) et Bernard (20 août). Le dossier de S. Arnoul est plus étoffé et aussi plus ancien que celui de S. Clou129: outre les différentes notices qui le rattachent à la dynastie pippinide (BHL 694-701)130, l’évêque messin bénéficie de deux Vitae, dont la plus ancienne, BHL 689-692, remonte à l’époque mérovingienne: elle aurait été rédigée au VIIe s., probablement aux Saints-Apôtres, où était conservé le corps du saint. Cette Vita prima fut par la suite largement diffusée131, à la différence de la Vita secunda, BHL 693, qui demeura tout à fait confidentielle. De cette dernière, en effet, nous n’avons conservé aucun manuscrit; elle fut éditée en 1725 par le bollandiste Pierre van den Bossche, d’après un apographe de François Lahier: en 1647, ce dernier l’avait copiée sur un manuscrit, aujourd’hui perdu, de la chancellerie épiscopale de Vic-sur-Seille132. La Vita secunda est une amplification de la 129 Sur S. Arnoul et son dossier hagiographique, cf. Bibliotheca sanctorum, t. 2, Roma, 1962, col. 446-447; G. PHILIPPART, La Vie anonyme de S. Adelphe de Metz, plagiat de la Vie de S. Arnoul, in AB, 104 (1986), p. 185-186; L. J. ENGELS, Verses on St. Arnulf of Metz (Walther Nr. 6440), in Fructus centesimus. Mélanges offerts à Gerard J. M. Bartelink à l’occasion de son soixante-cinquième anniversaire, éd. A. A. R. BASTIAENSEN, et al. (= Instrumenta patristica, 19), Steenbrugge, 1989, p. 153-165; L. CRACCO RUGGINI, The Crisis of the Noble Saint: The «Vita Arnulfi», in Le septième siècle: changements et continuités. Actes du colloque bilatéral franco-britannique tenu au Warburg Institute, 8-9 juillet 1988, éd. J. FONTAINE – J. N. HILLGARTH (= Studies of the Warburg Institute, 42), London, 1992, p. 116-153; A. WAGNER, Saint Arnoul, évêque de Metz, in Les Cahiers Lorrains, 1999/4, p. 385-400; G. NAUROY, La Vita anonyme de saint Arnoul face à la tradition hagiographique antique, in Écrire l’histoire à Metz au Moyen Âge. Actes du colloque organisé par l’Université Paul-Verlaine de Metz, 23-25 avril 2009, éd. M. CHAZAN – G. NAUROY (= Recherches en littérature et spiritualité, 20), Bern, etc., 2011, p. 69-98; M. GOULLET, Lateinische Literatur des Mittelalters aus Metz (566-1300), in Mittellateinisches Jahrbuch, 43 (2008), p. 185-199 (p. 188 sq.); EAD. in SHG X, p. 212 sq. (avec bibliographie, p. 213 sq.); PHILIPPART – WAGNER, Hagiographie, p. 585 sq. La Vita prima BHL 689-692 a été éditée par B. KRUSCH, in MGH. Scr. rer. merov., t. 2, p. 432-446; la Vita secunda BHL 693 figure dans AASS, Iul. t. 4, p. 434 (prol.) et 440-444. 130

Parmi ces notices, dont certaines remontent à l’époque carolingienne, la plus illustre est sans doute celle du Liber de episcopis Mettensibus de Paul Diacre (BHL 694): y est notamment relaté le fameux miracle de l’anneau, jeté par Arnoul dans la Moselle, et retrouvé bien plus tard dans un poisson servi à la table de l’évêque. Paul Diacre s’est aussi efforcé de relier Arnoul aux souverains mérovingiens et à leurs successeurs carolingiens, présentés comme des descendants de l’évêque messin. 131 132

Cf. la liste des manuscrits établie par M. GOULLET, in SHG X, p. 216 sq.

Comme ce manuscrit contenait également des extraits du Petit Cartulaire, on peut penser qu’il était lui-même originaire de Metz, et n’était pas antérieur au XIIIe-XIVe s. Il con-

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Vie mérovingienne; elle fut sans doute composée par un moine de SaintArnoul133, à la fin du Xe ou au début du XIe s.: outre Paul Diacre et les généalogies carolingiennes de S. Arnoul, elle exploite en effet la Vita Goerici, BHL 3606/3607, rédigée à la fin du Xe s.; elle semble par ailleurs antérieure à la Vie de S. Clou, BHL 1735 (Xe-XIe s.), qui pourrait l’avoir utilisée134. La Vie et translation qui figure dans Charleville 177 (ci-après dénommée Vita tertia) présente de nombreuses similitudes de composition avec celle de S. Clou étudiée dans l’Annexe 2, ce qui permet de penser qu’elle fut assemblée par le même compilateur, maître d’œuvre du ms. Charleville 177: elle brasse des éléments empruntés aux deux Vies précédentes de S. Arnoul, et les complète avec des éléments inconnus de ses prédécesseurs, ou omis par eux. La Vita prima, BHL 689-692, a servi de source principale, tant pour la Vie d’Arnoul que pour sa translation135. Le compilateur, semble-t-il, utilisait un manuscrit de la «famille cistercienne» (= C), telle que définie par Krusch dans son introduction à la Vita prima136: cette famille se caractérise par un certain nombre d’interpolations, dont celle du miracle de l’anneau, inséré dans la Vita prima d’après le récit de Paul Diacre137. Dans la Vita tertia, le récit de ce miracle (§ 4 et 14) est certes tributaire de BHL 693 (§ 7 et 15), mais le compilateur y a joint une phrase directement extraite du texte «cistercien» de BHL 689-692138. De tenait également des miracles en français, qui pourraient correspondre à une traduction des miracles rapportés par BHL 689-692, car François Lahier les disait édités par Surius et Barral (AASS, Iul. t. 4, p. 445); or, c’est bien la Vita prima que ces derniers avaient éditée. 133

La Vita secunda fut attribuée à un certain Umno, sur la foi du prologue transcrit par BOSSCHE, in AASS, Iul. t. 4, p. 434; mais il est probable que ce nom résultait d’une faute de copiste pour la particule immo. L’éditeur de la Vita prima, B. KRUSCH, in MGH. Scr. rer. merov., t. 2, p. 428, estimait que le prologue de BHL 693 était une forgerie humaniste, mais GOULLET, in SHG X, p. 234, ne voit aucune raison de suspecter son authenticité médiévale. VAN DEN

134

Cf. GOULLET, in SHG X, p. 243 sq.

135

Les § 1 (cf. BHL 689-692, § 1-3), 6-12 (cf. BHL 689-692, § 7-13), 17-19 (cf. BHL 689692, § 18-20), et 25-31 (cf. BHL 689-692, § 23-29) de cette Vita tertia sont en effet directement tributaires de la Vita prima, dont ils reproduisent des paragraphes entiers, tout en les abrégeant. En revanche, les paragraphes 2-5 (cf. BHL 693, § 2-8), 14-15 (cf. BHL 693, § 16-17), 20-21 (cf. BHL 693, § 20-21) et 23 (cf. BHL 693, § 22) de la Vita tertia dérivent principalement de BHL 693. Ces longues citations ne sont d’ailleurs pas dépourvues d’intérêt, dans la mesure où la tradition textuelle de BHL 693 ne repose que sur l’apographe de François Lahier; les extraits reproduits par la Vita tertia, même s’ils sont fautifs par endroits, n’en éclairent pas moins certains passages corrompus de la Vita secunda. 136

Cf. KRUSCH, in MGH. Scr. rer. merov., t. 2, p. 430. Le texte «cistercien» de la Vita prima correspond à celui qu’avait édité J. MABILLON, in Acta OSB, t. 2, p. 150-157. 137

Cf. ci-dessus n. 130.

138

Cf. KRUSCH, in MGH. Scr. rer. merov., t. 2, p. 434, en note.

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toute évidence, il avait les textes de ses deux prédécesseurs sous les yeux, et n’a donc pas hésité à combiner leurs relations, lorsqu’ils rapportaient un même évènement139. À l’occasion, il s’est aussi permis quelques initiatives personnelles, ici, pour abréger, là, pour reformuler ou développer le récit des Vies précédentes140. Surtout, il a ajouté, à la fin de son récit, une série de cinq miracles totalement inédite141. Ces miracles ne sont pas datés142, mais ils sont manifestement tous originaires de Saint-Arnoul et obéissent à un objectif commun, celui de défendre les possessions et le prestige de l’abbaye contre tous ses rivaux, puissants laïcs et abbayes voisines (SaintClément). Peut-être furent-ils même, à l’origine, rédigés par un seul et même auteur143. Les principes d’édition de cette Vita tertia sont les mêmes que pour la Vie de S. Clou (cf. ci-dessus p. 316), à ceci près que les petits caractères signalent ici les emprunts à la Vita prima (BHL 689-692), et les petits caractères espacés, les emprunts à la Vita secunda (BHL 693). F. 101v-103v: De sancto Arnulpho episcopo Metensi. 1. Beatus Arnulphus prosapia genitus Francorum, altus satis et nobilis parentibus atque in rebus seculi opulentissimus fuit, sed deinceps nobilior in fide Christi permansit. Erat quidam peregrinus ab Ytalie partibus veniens, servus Dei in l o c o v i c i n o habitans, nomine Stephanus, prophetica voce exorsus ait: «Scitote omnes et attendite, quoniam puer iste qui natus est, magnus erit apud Deum et homines». 139 Voir notamment les § 13 (miracle du plat d’argent), 16 (conflit avec le roi Dagobert), 22 (vie exemplaire du saint devenu ermite) et 24 (mort du saint), qui mêlent des phrases empruntées à la Vita prima (§ 14, 17, 21, 22) et à la Vita secunda (§ 14, 18, 22, 23-24). 140 Ainsi, au § 5, l’épisode dans lequel Arnoul demande à ses fils de renoncer à leur héritage est directement tributaire de BHL 693, § 8. Mais, pour l’introduire, le compilateur a, de son propre chef, placé dans la bouche d’Arnoul un petit discours de style homilétique, en forme de réquisitoire contre la cupidité. 141 § 32: un moine de l’abbaye, qui souffrait d’une maladie de peau contractée lors d’une fugue, est guéri par S. Arnoul; § 33: un châtelain d’Épinal, qui détournait le blé de Saint-Arnoul, voit son grenier prendre feu, alors que, dans le même temps, celui des moines est épargné; § 34: le moine Angelran est agressé dans l’abbaye par le fantôme d’un défunt qui lui reproche d’avoir déplacé ses ossements au profit d’un chevalier récemment décédé; § 35: le moine Maurice bénéficie d’une vision au cours de laquelle un spectre, entre autres révélations, l’invite à réprimander les jeunes moines qui chahutent pendant l’office; § 36: le portier Wigericus est réveillé de nuit par le fantôme d’un «citain» de Metz, qui réclame d’être enseveli à SaintArnoul plutôt qu’à Saint-Clément. 142 Le dernier miracle (§ 36) semble cependant faire allusion aux luttes qui opposèrent la commune de Metz aux seigneurs riverains de la Moselle (cf. ci-dessous, n. 176): il ne saurait donc être antérieur au XIIe s. 143

Ils présentent en tout cas des analogies de langue et de style (maladresses, ruptures de construction, anacoluthes), qui laissent penser que le compilateur du ms. 177 les avait tous tirés d’un même recueil de miracles.

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Quod | deinceps verax probavit eventus. Enim cum tempus advenisset, studiis liberalibus traditur imbuendus.

2. Erat Christo in se habitante subditus cunctis, sed fide et caritate celsior omnibus. C u m q u e i a m d i s c i p l i n i s s c o l a r i b u s e s s e t s u f f i c i e n t e r i m butus, aule Theodeberti regis inducitur, et co nciliis palatinorum 144 admiscetur. Itaque Theodebertus rex venerabilem cunctisque honestate et admirabilem bellica fortitudine beatum Arnulphum palatii comitem constituit. Igitur beatus Arnulphus maior domus f a c t u s s e x p r o v i n c i a s s o l u s r e g e b a t . Erat namque cum civibus venerabilis, transgressoribus terribilis, subditorum pius moderator, hostium fortis expugnator. Nam sedulus in oratione, incumbebat operibus misericordie, sibi parcus erat, aliis largus145. Ea propter quia Deum honorabat, ab omnibus glorificabatur. 3. Interea vix cogentibus amicis atque parentibus, p u e l l a m n o b i l i b u s o r t a m n o m i n e D o d a m duxit in uxorem s i b i i n o m n i b u s b o n i s c o n cordem. Ex qua duorum gaudia filiorum susce pit, Glodulphi videlicet et Anchisi. Nam Glodulphus ecclesie pontifex fuit Me tensis, Anchisus signifer aule rega lis, idemque post non infimus m a r t i r . Electus domini beatus Arnulphus, cum ceteros in dispensatione regia palatinos precelleret, sagatitate floreret, v i r o i l l u s t r i n o m i n e R o marico archanum sui pectoris aperit, quia et idem vir celestibus inhiabat desideriis quamvis in palacio diversis floreret hono ribus. Qui Romaricus suadebat beato Arnulpho Lirinum adire mo nasterium, quia illic fervebat monachilis disciplina.

4. I n t e r e a d u m b e a t u s A r n u l p h u s s i b i c o m m i s s a s i n v i s e r e t provincias, forte Trevericam devenit ad urbem, ubi per pontem transitum haberet, profunditatemque Moselle fluminis qui subfluebat consideraret, quasi divino tactus instinctu celum suspexit, anulum quem digito ferebat in illam fluctuum profun d i t a t e m p r o i e c i t : «Tunc», inquiens, «me putabo culparum nexibus absolutum, quando istum quem prohicio anulum recepero». 5. Exhinc ad perfectionis sanctus Arnulphus culmen intendens filios suos advocat, eisque desiderium suum divulgat: «O filii, mee vite dulsedo146, pars viscerum meorum, quam necessarium est nobis in vita presenti conquirere regnum Dei ! Cum ad hoc fuerit conditus homo ut incorruptibiliter associaretur Deo, quid ei contulit avaricia ? Nil contulit, sed 144 venerabilem cunctisque: le ms. de la Vita secunda suivi par l’abréviateur était sans doute corrompu; l’édition de BHL 693, § 3 (AASS, Iul. t. 4, p. 441) donne une leçon plus compréhensible: venerabilem quoque cunctis.

TEIL

145 sibi parcus erat, aliis largus: cf. Jean Beleth, Summa de eccl. officiis, 118; éd. H. DOU(= Corpus Christianorum. Continuatio Medievalis, 41A), Turnhout, 1976, p. 221, l. 22-23. 146

dulsedo: scil. dulcedo.

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eum immortalitate spoliavit, labores atque angustias ei pro pristina felicitate accumulavit. Quod sancti patres nostri animadvertentes, elegerunt pocius in mondo peregrinari quam || eius curis illaqueari. Eapropter rogo dulcedinem vestram u t e a q u e i n f a c u l t a t i b u s m e i s m o b i l i b u s p o r t i o 147

pauperum dispartiri». contingit, benigne patiamini ad usque Sed prior filiorum Glodulphus hoc se implere negat. At vero Anchisus iunior filius patri per omnia libenter se obedire spon det. Venerandus pater filio gratias agit, in omni copia rerum eum benedixit, progeniemque de ipso nascituram in reg alem conscendere dignitatem predixit. Quod et factum est : vir amabilis Deo Arnulphus, accepta filii liberalitate, paup eribus opes suas distribuit. Palatium quod Metis pos[e] debat Virdunensi ecclesie largitus est hereditario iure. Coloniensi ac Trevirensi non minima m suaru m partem possessionum indulsit. Non minus 148 vana, elegit Treviros beata coniunx eius Doda mundi abdicatis 149 ducere vitam. His expletis peregrinandi in reclusione selibem consilium, quod cum venerando Romarico habuerat, versus Lirin u m e n i t e b a t u r a d i m p l e r e . S e d utriusque desideriis in hac causa voluntas Dei obfuit ob u t i l i t a t e m m u l t o r u m .

6. Cum ergo in hiis diversis bonis atque ceteris plurimis virtutibus tanquam auriga potentissimus iugiter invigilaret, forte fuit ut urbs Mettensium presule indigeret. Tunc una vox populorum Arnulphum domesticum atque consiliarium regis dignum esse episcopio acclamavit, quia et principi acceptissimus haberetur, et sacricolis actibus pollere nosceretur. Ille autem lacrimans et compulsus, quia Deo ita placitum fuit, urbem ad gubernandum suscepit, sic deinceps episcopales gestans infulas ut etiam domesticatus sollicitudinem atque primatum palatii ac si nolens ten[i]ret. Mox autem tanta tamque profusa munificentia in elemosinis pauperum accrevit, ut etiam de longinquis regionibus atque civitatibus fama currente innumera caterva pauperum ad sanctum Arnulphum pontificem refocilanda festinaret. Erat namque iugiter sollicitus atque intentus in cunctis actibus bonis, presertim in susceptione monachorum seu peregrinorum devotissimus invigilabat ita ut quos hospicio recepisset, manibus propriis pedes ablueret, illosque vestitos atque refectos deducens, mox alios eodem modo refocilandos susciperet. Indutus iugiter intrincecus occulte cilicio, post triduana aut eo amplius ieiunia, pane ordeaceo subleva|batur et aqua. Adversus demones spiritalem adeptus est potentiam virtute orationis pervigilis, plerumque tantum signo crucis abscens150 etiam vexatos curabat. 147 ad usque: le ms. de la Vita secunda suivi par l’abréviateur était sans doute corrompu; l’édition de BHL 693, § 8 (AASS, Iul. t. 4, p. 441) donne une leçon plus correcte: ad usus. 148 abdicatis: le ms. de la Vita secunda suivi par l’abréviateur était sans doute corrompu; l’édition de BHL 693, § 10 (AASS, Iul. t. 4, p. 442) donne une leçon plus correcte: abdicans. 149

selibem: scil. celibem.

150

abscens: scil. absens.

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7. In partibus Vosagi in predio sancti Stephani cum vir sanctus adesset, que151 dam mulier nomine Bettila a demonio nequiter arrepta . Cumque hec coram eo debachari cepisset, superventura nocte mulierem in vigiliis assistere precepit. Unde cum vir beatus in orationem sese dedisset, mox demonium clamans et eiulans a muliere discessit. 8. Per idem tempus quo triduanum ieiunium ecclesia conselebrat152, vir sanctus cum crucibus extra civitatem et cum populo processit. Et ecce ex mediis catervis mulier quedam a demonio arrepta insanire cepit ac rabida voce clamare. Hanc ille cum vidisset, vexilo crucis iniecto, mox a demonio ereptam sanavit.

9. Alio tempore infra urbem ad bazilicam sancte Crucis causa orationis accessit, ibique puellam nequiter a demonio invasam debacantem repperit. Quam cum vidisset, misericordia motus archidiacono suo dixit: «Nunc igitur, frater, hac nocte 153 pro ista orationium vigilias celebremus, et summo diluculo istuc pariter redeamus». Beatus Arnulphus episcopus abscens pro vexata orabat; demonium non ferens vim sanctitatis eius invasam reliquit, ita ut dum iuxta condictum in crastino illuc redissent, incolumem ipsam invenerunt. 10. Temporibus Dagoberti regis cum in palatio esset, eidem quidam leprosus clamare cepit, victum seu vestitum deposcens. At ille statim iussit in hospicium duci. Cumque erga illum secundum morem suum solitam impenderet pietatem, sciscitari cepit – quia barbarus erat – si baptismo purificatus esset. Respondit leprosus: «Nequaquam», ait, «domine mi: nam infelix ego et abiectus in populo, quis mihi daret baptismum ?» Et episcopus: «Ne verearis, frater Christi fide imbui et sacro fonte purificari. Possibile est Christo indulgentiam tuis dare peccatis et opem conferre sanitatis». Accepto igitur a sancto viro baptismi sacramento, repente ex corpore illius lepra discessit. Gratias Deo agens, triplici gavisus est

munere: ab errore liberatur, cute sanatur, episcopi liberalitate recreatur. 11. Post hec dum Turingorum r e g i o n e m cum eodem rege invisandam intrasset, forte fuit ut quidam procerum nomine Noddilo m a g n o a n g u s t i a b a t u r 154 m e r o r e . Erat ei a d o l e s c e n s quidam c o n s a n g u i n i t a t e propincus , sed infirmitate gravi premebatur. Rege quantocius ex eadem villa properante nichil aliud consilii erat, nisi ut languentis capite am||putato, cadaver ignibus traderetur comburendum. Sic iste Noddilo ad Domini sacerdotis confugit auxilium

qui nondum exierat hospicium155 regis. Cuius genibus advolutus, causam sui doloris narrat, sibi subcurrere implorat. Sacerdos Dei eius lacrimis compassus, preces suscipit, ad languentis lectum venit, preces fundit, more 151 arrepta: comprendre arrepta est; la Vita prima, BHL 689, § 9 (MGH. Scr. rer. merov., t. 2, p. 435), donne le texte suivant: nequiter a daemonio arrepta, discrimine suae vitae saepe fortiter quaciebatur. 152

conselebrat: scil. concelebrat.

153

orationium: scil. orationum.

154

propincus: scil. propinquus.

155

hospicium: il faut sans doute comprendre hospicio.

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ecclesiastico confessionem exigit, accipit, penitentiam iniungit; hinc aqua tepenti ipse presul faciem, pedes ac manus egroti propriis manibus lavat, tergit, oleo sacrato corpus eius perungit. Cerneres a facie presulis sic celeriter fugisse omnem vim egritudinis, veluti fugantur tenebre a lucis fulgore. Eodem namque die meritis sancti Arnulphi, adolescens qui fuerat proximus morti, sanus prosecutus est comitatum regis. 12. Alio tempore quidam homo nomine Noddo scelestus quadam die vino estuans sancto viro derogare ausus est, non esse cultorem Dei, sed pocius hominem deditum voluptati. Ad cuius lectum nocturnis horis cum rex et regina simul cum 156 detrahente venissent , iubente Deo accidit [et] omnia vestimenta illorum ignis circumdans vallaret. Ilico exilientes, aquam urgentibus vocibus deposcebant; sed aqua iniecta ignem divinitus inmissum extinguere nequibat: ardebant nequiter circa secretiora corporis loca, nec a se ipsa ardentia vestimenta exuere prevalebant. Quid plura ? Quia aliud facere non poterant, foras exiliunt et ad instar porchorum in luto volutabri sese vociferantes involvunt. Sed ignis eos magis cremabat. Tunc impletum videtur [quod] super illos quod scriptum est: Detrahentem secreto 157 proximo suo hunc persequebar . Nam postea in processu temporis prefatus Noddo cum sua prole incurrit offensam regis: Dominoque disponente, gladio regali cesus est uterque.

13. Per idem tempus cum iam pene omnes thesauros e c c l e s i e in usus pauperum erogasset, adhuc supererat eidem discus argenteus s a n c t o S t e p h a n o c o n s e c r a t u s , habens pondus librarum LXXII. H u n c H u g o q u i d a m d u m 158 pro eo in alimento pau p ecomparasset, vicissimque necessaria r i b u s d e d i s s e t , H u g o n e mortuo i s d e m d i s c u s regi Clotario est adlatus. Qui cum a narrantibus comperisset hunc a beato Arnulpho pro alimentis pauperum venundatum fuisse, miro mox inspiramine tanquam celitus actus, i u s s i t d i s c u m sancto presuli Metim deferri| superadditis centum aureis. 14. D u m b e a t u s A r n u l p h u s f o r t e i n V o s a g o d e m o r a r e t u r , f a miliarique contubernio sanctorum Agili, Amati et Romarici fueretur, procurator ipsius piscem precio emptum eide m presentavit, quem presu l vespertine cene parari fecit. Hunc minister dum more solito exinte rasset, anul[l]um reperit aureum. M i r a t u s q u o d a c c i d e r a t s a n c t o e p i s c o p o r e p r e s e n t a t . Quem beatus Arnulphus recognovit statim, s u o r u m i a m f i d u s a b s o l u t i o n e 156

Le texte de la Vita prima n’a pas été compris par le rédacteur, ou bien il était corrompu. Cf. BHL 689, § 13 (MGH. Scr. rer. merov., t. 2, p. 437): ... sed pocius hominem voluptati deditum, a cuius videlicet lectum nocturnis horis non solum rex, vero eciam et regina tamquam consilium flagitans properaretur. Cumque ergo stratum una cum detrahente socio petisset, iubente Domino... 157 158

Ps. 100.5.

Dans l’apographe de François Lahier, le texte de BHL 693, § 14 (AASS, Iul. t. 4, p. 443) était ici corrompu: il manquait quelque chose entre vicissimque et pro eo; peut-être était-ce justement le mot necessaria que l’on rencontre à cet endroit dans la Vita tertia.

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LE LÉGENDIER CHARLEVILLE-MÉZIÈRES, BM, 177 p e c c a t o r u m g r a t i a s D e o r e t u l i t ; ac deinceps non remicius

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vitam duxit, sed maiori se pocius abstinentia coartavit. 15. E a p r o p t e r a u r e s C l o t a r i i r e g i s l e g a t i s a c l i t t e r i s p u l s a v i t ut se presente successo r in episcopatu substitueretur. At rex dum i d c o m p e r i s s e t gravi p e r f u n d i t u r t r i s t i c i a : d o l e b a t e n i m s e t a n t i v i r i c o n s i l i o e t f a m i l i a r i t a t e p r i v a r i . Taliter e i d e m r e s c r i p s i t : « N i c h i l o mi n u s , d o mi n e a c p a t e r , q u i a s c r i p s i s t i s p e r v e s t r a m e p i s tolam ut in loco vestro alium deberemus eligere successorem, i s t u d n o s t r a p r e s u m p t i o f a c e r e n u l l a r a t i o n e a u d e t » . Hinc iterum inter reliqua ait: «Q u a n t u m [ e t ] < e x > d e v o t i o n e v e s t r a , q u a m e x amo nitione divina esse confidimus, vos a Domino fuisse com monitos gavisi recepimus, tantum iterum dolentes tractavimus q u o d n o n o p t a v i m u s d e vestro c o n s p e c t u e s s e a b s e n t e s . I m m o venerande pater, si qualibet devotione compulsi pro boni operis actu alicubi desideratis progredi, petimus ut nos sine pace vestra vel communione pro amore divino nullatenus relin q u a t i s » . Nam ipse rex Clotarius tantum dilexit eum ut f i l i u m suum D a gobertum in principatus culmine sublimatum, ipsi iam pridem 160 instruxit cum regno commendaverat, quem ipse altitissima disciplina.

16. Preterea cum insol[i]bili desiderio beatus Arnulphus ad heremum properare disponeret, voluit rex Dagobertus eum minis terrere dicens: «Dilecti filii tui, quia ita admissum habet, nisi nobiscum consistas, capud amputabo». At beatus Arnulphus: «Vita filii mei in manu Dei est; nam tu tuam non possides animam». Tunc rex iratus mucronem ex latere pendentem arripuit, virum Dei f e r i r e i n t e n d i t . Sanctus Dei constanti animo dixit: «Quid agis, o miserrime ? Ecce paratus mori pro mandatis illius qui pro me mortuus est. Exerce arma in sanguinem meum, ut tibi libet: ubi est regalis nunc discrecio et disciplina sublimitatis ?» Tunc q u i d a m n o b i l i s n o m i n e A u d o e n u s , q u i s u b mi l i t a r i h a b i t u e r a t e x i mi u s c u l t o r C h r i s t i — q u i q u a n t u s f u e r i t s a n c 161 t i t a t e , o m n i b u s n o t u m e s t i n R o t o m a g e n s i cui p r e s e d i t e c c l e s i a — , h i c dixit: «Noli impie agere contra temet||ipsum, o bone rex. Annon vides vrum sanctum cupidum esse ad martyrium [irretiri] ? F a v e igitur eius v o t i s ; v e n i a m posce quod eum exasperasti; festina ipsius te commendare sanctitati». Deferbuit itaque ira regis et adveniente regina uterque ad pedes viri Dei prostraverunt, et ut illis misereatur cum lacrimis exoraverunt, dicentes: «Perge, domine, ad heremum quo vis, tantummodo placatum te habeamus». Sanctus vir celeriter eos allevat, indulget, benignitate demulcet.

159

remicius: scil. remissius.

160

altitissima: scil. altissima.

161

cui: la Vita secunda BHL 693, § 18 (AASS, Iul. t. 4, p. 444) donne pour sa part civitate.

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17. Tunc vir sanctus data illis venia a palatio egreditur, et ecce reperit ante palatium diversorum pauperum multitudinem vociferantes: «O sancte pater, cur nos miseros derelinquis, aut quis miserebitur nostri, aut quis tribuet nobis victum et vestitum ?» Tunc sanctus pater permotus pietate in lacrimas benigna voce dixit: «O filii mei karissimi, nolite turbari de abscessu meo, quia qui dedit vitam presentem dabit alimoniam sufficientem. Dabitque vobis Dominus pastorem qui vos pascat in miseratione et misericordia». Et hiis dictis statim eos reliquit pergensque ad orationum certamina.

18. Actis post hec temporibus paucis sanctus Goericus huius successor eligitur. Digne factum est a Deo ut sancto sanctus succederet. Quo audito, sanctus Romaricus abbas a partibus Vosagi ad beatum Arnulphum pergit, et infra vasta heremi aptum locum eidem preparat. Sed mox eadem die superventura qua venerat nocte, quid miraculi per beatum Arnulphum infra urbem gestum fuerit, silere non debeo. 19. Casu contigit ut regis promptuarium f l a m m a vorax i n v a d e r e t atque eructuans domos affines circumquaque minaciter lamberet. Repente civitas tota trepidaque exicium sui videns in luctum conversa est. Romaricus statim ad sanctum Arnulphum ait: «Egredere, Deo amabilis: ecce equi nostri ante fores sunt, ne, quod absit, in hac urbe ignis iste te consumat». Ad hec ille: «Nequaquam, karissime, decet nos incendium divinitus immissum fugere. Sed deducite me illuc, et si ita placet Deo ut ardeam, in manu Dei sum: faciatque quod ipse voluerit». Quo ducto, invocato nomine Christi, s i g n u m c r u c i s contra ignem vibrat. Mox ignis162 tanquam celitus percussus, nil alicubi nocens, infra parietes in semetipsum totus retortus ignis ille interiit. Ilico autem cuidam e fra163 tribus talis apparuit. Intuens in celum vidit tanquam flammam ignis signaculum crucis depictum, et statim de celo ex oblico crucis vox facta est dicens: «Cernis hoc, inquit, signum ? Hac nocte Arnulphus episcopus per ipsum totam civitatem istam ab incendio liberavit». Mirantibus autem nobis omnibus virtutem quam de igne prostrato vidimus, frater ille visionem hanc narravit.| 20. Post hec beatus Arnulphus relictis omnibus istius seculi rebus, v a ledicens civibus, ab eis honorifice deducitur usque ad villam Areium dictam, ubi, dum resedisset ac multitudo plebis estus fervore laboraret siti, beatus Arnulphus compassus eis oravit ad D o m i n u m . Et statim o r a t i o n e f i n i t a , d u m b a c u l u m a v e l l i t q u e m humi defixerat, fons aque erupit, qui adhuc hodie persistit. 21. F o r t e d e v e n i t a d B u r g u l l i o n i s v i l l a m , u b i a m e n i t a t e p r a t i virentis placuit itineris su i ac sociorum relevare laborem. In quo prato ingens adstabat lapis supra quem v ir Dei, dum resedisset, 162 Le premier ignis est superflu; la Vita prima, BHL 689, § 20 (MGH. Scr. rer. merov., t. 2, p. 441), donne le texte suivant: Mox miro in modo tamquam caelitus percussus, nil alibi nocens, infra parietes totus retortus ignis interiet. 163 flammam: comprendre flamma, comme dans BHL 689, § 20 (MGH. Scr. rer. merov., t. 2, p. 441).

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quasi molle pulvinar lapis eum suscepit. Eoque recedente velud cera mollis effigiem artuum corporis eiu s ac manuum hactenus ostendit. Et quod amplius est reverendum, animalia deinceps ipsius prati pasta gramine periclitantur, exce ptis que ipsi sancto ac eius hominibus mancipantur.

22. T a n d e m a d h e r e m i l o c u m d e v e n i e n s p r e p a r a t u m , n o n e s t nostre operis evolvere, quam iugi Do mino adsistebat meditatione. Unde adsocians sibi quosdam monachos et leprosos, manibus propriis eorum vulneribus curam impendebat, calciamenta detrahebat, detergebat, lecta eorum frequenter et oportune renovabat. Nam et quoquine officio videres eum intendere, ipsum esurientem aliis cibum apponere, tocius benignitatem humanitatis indigentibus exibere in capitum et vestium ablutione. Ipse admodum victu insulso utebatur; lectisternio satis vili oculis hominum, obtutibus vero 164 angelorum satis laudabile , fessa relevabat menbra. 23. M o n s h e r e m i i n q u o d e m o r a t u s e s t v i r s a n c t u s p r i u s 165 vocatur mons di[s]cebatur Adventius, post ex h abitabitatore beati Arnulphi. In quo constat adh oratorium ab ipso con structum, ante quod arbor delectabilis visu ads tat ab ipso ut fertur plantata. Ipse mons eo tenus carebat aque beneficio, sed oratione viri Dei ad solatium laboris c ommorantium, fons ad cubiti modum altus e rupit qui adhuc usque cernitur. Qui quamv i s s i t p a r v u s , t a m e n , u t f e r t u r , o mn i u m h o m i n u m u s u i h a b u n d a n s indeficienter perseverat. 24. Hec supradicta bona dum perageret indefessus, omnipotens Deus suum adletham ad destinatum vellet vocare bravium, ad ultimum urgetur diem. Quo comperto adest sanctus Romaricus cum ceteris monachis, gloriosum prestolans eius egressum. Tunc sanctus Arnulphus eos alloquitur, p r e d i c e n s q u e eis s u a m r e s o l u t i o n e m : «Subvenite igitur || vestris precibus et obsecrate Christum ut non mecum intret in iudicium, quia sine sua misericordia, omnis actio mea invenitur prava. Ecce hora imminet in qua omnis qu[i]litas et quantitas cogitationum actuumque meorum apponentur». Hec vir sanctus ait quia iustus in primordio sermonis accusator est 166 sui . Interea sancto s a c r a m e n t o s u m p t o , f r a t r i b u s v a l e d i x i t e t i n t e r l e c t i o n e s sancti e w a n g e l i i o r a t i o n u m q u e f r e q u e n t i a m e i a s s i s t e n cium, felix anima carne solvitur, angelicis associatur choris. H[u]nc ecclesiastico more traditur sepulture. Obiit autem beatus Arnulphus XVII° kal. septembris, preseditque ecclesie Metensi XV annis, diebus decem.

164

laudabile: scil. laudabili.

165

habitabitatore: scil. habitatore.

166

Prov. 18.17.

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F. 103v-104v: Translatio sancti Arnulphi episcopi. 25. Igitur transacto fere unius anni tempore ex quo sacratissimum beati Arnulphi corpus sepulture traditum fuerat, vir electissimus successor eius Goericus episcopus consilio inito, coacervata clericorum seu populorum ingenti caterva, asscitis quoque duobus episcopis secum, una pariter pergunt ad heremum. Quo in loco excubias cum reverentia celebrantes, sancta ab urna membra lapidis auferentes grabatto imponunt atque mox arripientes itinera, cum gaudio remeant ad urbem. Nam et suavitatis odor ex his membris sacris cunctos replebat evehentes.

26. Cum autem gestantes veniunt ad quemdam rivum cuius riparum tellus scissa euntibus convallem atque lubricum pandebat meatum, illi posteriores qui feretrum portabant casu corruunt. Sed, ut reor, idem statim angeli susceperunt: nam priores vehentes nulloque retardantes gressu, grabato in aere sublato, gradi[i]untur libere, atque surgentes qui lapsi fuerant, iam transmeata convalle sese iungunt ad collegas. 27. Denique in illo itinere mox aliud emicuit miraculum. Quidam homo in pago Calvomontinse nomine Ciunta incestuosus fuit. Hunc ille cum sepius redar167 guens nec ad penitentiam emendationem perducere potuisset, in hac vita inpenitentem reliquit. Atque contigit ut in eiusdem incestuosi villa oratorium esset. Quo in loco itinerantibus congruum erat ut mansio pararetur, ideo vel maxime quia sanctum corpus oportebat excubiis in basilica debitis honorari. Venientes autem ad terminos prefati hominis incestuosi terre, repente figitur gressus portantium ita ut ulterius vectandi sacra membra facultatem haberent nec minimam. Ecce vero angustia sacerdotibus et univer populo quoniam ad mansionem quo verterentur | ignorabant, presertim cum iam dies declinata esset ad vesperum. Tunc Notto dux qui unus erat ex euntibus ait: Videtis quia terram incestuosi huius ingredi despicit ? Est autem procul villa mea, quo, si [con]tendere temptemus, ante nos nox occupabit quam venire valeamus. Sed et refectionis mihi omnis prorsus inibi deest apparatus, quo tantam multitudinem reficere possim, nisi tantummodo ut comperi in uno vasculo modicum quid cervise». Quibus auditis, universus populus iter retorquens, tanta velocitate pergunt ut potius geruli semetipsos portari quam portare sentirent. Atque diei adhuc lucem habentes ad destinatam perveniunt villam, que ex nomine possessoris Nothonis curtis168 vocatur. Tunc Nottho dux ait: «Nunc beatus Arnulphus pascat vos nocte ista, quoniam quod deest nobis, ipso intercedente adesse potest». Statim in tanta exuberantia adcrevit modicitas potus illius ut omnibus affatim saciatis, adhuc in crastinum superesset. Propter quod miraculum idem liberalissimus dux possessionem ipsam cum omnibus appenditiis Deo sancto Arnulpho tradidit.

167 penitentiam: comprendre penitentie, comme dans BHL 689, § 25 (MGH. Scr. rer. merov., t. 2, p. 443). 168

Nothonis curtis: Nossoncourt, dans le département des Vosges.

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28. Post hec autem cum magna prosperitate et leticia ad urbem perveniunt. Et ecce mox omnis civitas cum crucibus et cereis atque ingenti gaudio et admiratione obviam currit, et pastorem suum quem dudum veluti fuga[s]cem amiser[u]nt, celo iam regnantem recipiunt atque sacrum corpus illius in basilica sanctorum apostolorum cum reverentia et grandi exultatione sepulcro recondunt. Mox quippe sepultus qui apud Christum in heremo mercatus sit, suis civibus demonstravit miraculis. 29. Nam mulier quedam nomine Iulia, luminibus oculorum olim cecata, ad sepulcrum eius accessit, ubi dum prostrata cum fide orasset, absque mora lumen multorum annorum temporibus desideratum recepit, atque viarum exitus quos externa auxiliante manu calcare consueverat, propriis cernens luminibus ad diversorum leta remeavit. 30. Aliud deinde rursus miraculum non sileam, quod nuper narante viro religioso Arigisilo abbate comperi. Siquidem mulier quedam nomine Ceucerella in suburbio Mediomatrici degens, ausa fuit die dominica operari. Sed mox divinitus verberata utraque manu contracta est. Tunc magnis vallata angoribus ad suprascriptum abbatem pervenit. At ille precepit eidem quatenus ad sepulchrum sancti Arnulfi cum fide festinaret. Ubi cum affuisset, ostia obserata invenit: ilico ante valvas ecclesie oravit sanctum Arnulphum ut || eam sanaret. Et statim sanata est. 31. Fuit quidam homo nomine Ciaro nequiter pedibus contractus qui ex utroque latere auxiliantibus baculis vix pedetentim et cum ingenti iniuria callem nitebatur contingere. Hic cum croceis suis ad urnam sancti viri semetipsum sanandum in orationem prostravit. Statimque resolutis nervorum contractionibus surrexit sanus. 32. Quidam frater nostri loci fuga lapsus erat. Qui regressus angustia pruriginis cepit fatigari. Postea ipsa egritudo ita succrevit ut adiudicaretur leprosus esse. Consiliumque erat ut a cetu aliorum sequestraretur. Quod eger animavertens ad tumbam sancti Arnulphi procubuit, vovens non se prius victum sumere vel potum nisi adesse sibi beatum Arnulphum sentiret. Mira enim celeritate pristinam recepit sanitatem. 33. Quidam castellanus de Spinal169 frumenta ecclesie nostre que in vicino erant eius, in rapina suo inferebat horreo. Cumque nimia essent madida infusione pluviali, parvissima candele emunctione cum ipso cremata sunt horreo, cum eodem tempore, inmisso nostris edificiis igne, nullo modo valuerit ea concremare. 34. Quidam frater nomine Angelranus, cuius extitit tanta devotio ut frequenter iens a claustro ad sibi commissam preposituram Rumeliaci170, 169 Le château «de Spinal» (Épinal, dans les Vosges) avait été reconstruit au Xe s. par l’évêque Thierry de Metz. 170

Rumeliaci: la villa de Rémilly (Moselle) appartenait à l’abbaye Saint-Arnoul depuis le

IXe s.: cf. N. DORVAUX, Les anciens pouillés du diocèse de Metz (= Mémoires de la société d’ar-

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psalterium ex integro decantaret, et huic171 simili modo rediens ad claustrum — huic pri[i]dem commissa fuit providentia mortuos sepeliendi, atque contigit ut illustris quidam miles Solinarus nomine obiit172, locusque ipsius sepulture in claustro fieri deberet. Frater Angelranus sepulchrum parare iussit, rosu[e]leisque inventum et plenum ossibus vidit: aliasque ossa eadem transferre disponit. Defunctus cuius erat sepulchrum, cuidam fratri Alardo in visu apparens, conquerendo dixit: «Cur frater Angelranus alium173 me transposito meo sepulchro ponere disponit ? Noveris me pro beati Arnulphi bonorum defentione morte tenus decertasse; et idcirco veniam delictorum meorum meritis eius obtinuisse, ac proprium sepulture locum promeruisse. Dic ergo illi ut alias militem recens defunctum recondat». Evigilans Alardus Angelrano visa refert. Ille vero negligens ossa prioris defuncti, confusa in parte revolvit sepulcri, et sic sequentis corpus indidit. Verum tercia nocte transacta, cum isdem Angelranus transiret prope sepulturam, ecce ab invisibili subito percutitur, humi prosternitur, velut exanimis efficitur. Quidam fratrum matutinas exeuntes sic vexatum reperiunt, sciscitantes nichil ab eo nisi dolentis mugitum percipiunt: domo itaque infirmorum infertur, preces pro eo funduntur. Tandem in se reversus, | culpam confitetur, absolutionem consequitur, sed tamen sinistre auditu auris privatus, corporis sospitati174 post quinque reformatur menses. 35. Item alius frater Mauricius nomine vir spectabilis, omni honestate doctrinaque, cui tanta inerat gratia lacrimarum ut non in secreta missarum, sed etiam dum altisona caneret voce (erat enim dulcisonus cantor) videres inundantiam lacrimarum sine flegmatis vicio seu emuntionis ex ipsius oculis profluere — huic per soporem videbatur in medio esse monasterio sancti Arnulphi. Famaque in sopore ipso erat quod quidam ex antiquo tempore illic surrexerat atque altari sancto se representari debebat. Mauricium itaque quasi solitarium, sicut sibi videbatur, horror invaserat, verum illa subibat illum sententia, quod post resurrectionem carnis omnia nobis erunt pervia. Hinc stabat attonitus, prestolans quid adveniens facturus esset. Ille cum palma insigni, veste fulgenti, nusquam divertens ingreditur, altarique palmam imponens, humi se prosternebat, Deo et sancto Arnulpho grates chéologie et d’histoire de la Moselle, 18), Nancy, 1902 p. 440 sq.; GAILLARD, D’une réforme, p. 114. 171

huic: on attendrait plutôt hinc.

172

obiit: sic.

173

alium: il faut sans doute comprendre alio.

174

corporis sospitati: sic.

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pro sui liberatione agebat. Cui predictus frater occurrebat illumque adiurans dicebat: «Si tibi est fas mihi loqui ?» At ille: «Idcirco tibi est concessum me videre ut interroges : de quibus ?» «De loci huius, inquit, statu, quid arbitraris in divino respectu ?» «Ad presens, ait, clementer. Sed iuniorum levitantem175 obstrepentium, maioribus suis obsistencium, dispensationi divine [im]murmurantium, moneo castiges. Quod si neglegunt, noverint se multandos dissensione, dispersione, repentina morte — quod utinam factum nescissemus !» Plurima deinceps et de requie fratrum huius loci defunctorum preostensus vir revelavit, et de sanctorum erga prolapsos que ne fastidiant, supprimimus narrare. 36. Ortum forte fuerat bellum inter milites de valle ultra Mosellam et cives urbis176, in quo quidam de civibus est occisus. Cuius quedam pars amicorum apud sanct[a]m Clementem volebat eum intumulari, alii apud sanctum Arnulphum. Hanc diversitatem nox interfusa reliquit incertam. Interim frater quidam Wigericus, vice custodis, in oratorio excubans audivit quasi quendam propulsantem monasterii portas. Qui differens pulsanti respondere, isdem qui pulsabat a priori loco claustri officinas transvolat, atque fores iuxta quas predictus iacebat, denuo pulsat. Sibique ingressum pandere rogat. Wigericus alterna || portarum inpulsione attonitus, socios evocat. Quisnam foret pulsans interrogat, quid sibi sit, quid querat. At ille tremulo famine inquit: «Ego sum hesterno interfectus: beatum mihi Arnulphum defensorem quero, quia inimici mei oppido me insecuntur». Custodes adhuc aliquem forte latronem suspicantes, caute valvas pandunt: sed is, qui erat spiritus, quasi aure sibilus subintrans, deinceps evadit. Superveniente igitur matutino propinqui adsunt defuncti, qui necessaria sepulture preparantes, Deo disponente ibidem intumulaverunt pridie peremptum. Ut quid fratres hoc Deus voluit ostendere corporaliter quod apud se fiebat invisibiliter, nisi ut incredulos ad meritum sancti comprobandum excitaret ?

175 176

levitantem: scil. levitatem.

Ce miracle pourrait faire allusion à l’un des nombreux conflits qui opposèrent, entre le XIIe et le XIVe s., les «citains» (cives) de Metz, organisés en commune depuis le XIIe s., aux châtelains lorrains riverains de la Moselle. Entre Toul et Metz, en effet, tous les princes lorrains (évêques de Toul, de Verdun, de Metz, ducs de Lorraine, comtes de Bar) possédaient des forteresses qui dominaient la rivière et gênaient le commerce des Messins. Ces derniers conduisirent plusieurs expéditions outre Moselle pour détruire Dieulouard (1113), brûler Maidières (peu avant 1226), et attaquer Belleville (1322): cf. J. SCHNEIDER, La ville de Metz aux XIIIe et e XIV siècles, Nancy, 1950, p. 10 sq.

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ANNEXE 3: Les notabilia super legendas sanctorum [221] Parmi les chapitres qui forment aujourd’hui la fin du légendier Charleville 177 se trouve inséré un ensemble de notices regroupées sous le titre de Notabilia super legendas sanctorum. En fait de notices, il s’agit d’ailleurs plutôt de notes brèves, dans lesquelles sont listées et illustrées les principales vertus d’une vingtaine de saints, énumérés dans l’ordre du calendrier, depuis Nicolas jusqu’au pape Clément. Contrairement au reste du légendier, qui fait la part belle aux saints régionaux et même locaux, ces notabilia ne traitent que de fêtes universelles, celles sur lesquelles tous les prédicateurs étaient amenés à prêcher. De fait, la structure de ces notes, leur organisation mnémotechnique en trois ou quatre points177, eux-mêmes illustrés par des allusions narratives, font penser aux sermons des prédicateurs contemporains: l’auteur des notabilia partageait visiblement leur souci d’édification morale et religieuse, et c’est dans cet esprit qu’il a disposé sa matière hagiographique. La présence de telles notes dans un légendier abrégé semble tout à fait inédite178. L’éditeur de la Légende dorée et de l’Abbreviatio in gestis et miraculis sanctorum, Giovanni Paolo Maggioni, m’a confirmé n’avoir jamais rencontré semblable texte dans les très nombreux témoins de ces deux recueils. En revanche, Eleonora Lombardo, spécialiste de la prédication franciscaine, m’a annoncé avoir déjà croisé ce type d’annotations dans des manuscrits de sermons: le plus souvent, il s’agit de quelques lignes ponctuelles, en marge d’un sermon: elles récapitulent les trois ou quatre points saillants du texte, et servent ainsi d’aide-mémoire au prédicateur. Parfois, ces canevas mnémotechniques n’ont aucun rapport avec le texte placé en vis-à-vis, et paraissent donc, comme dans le ms. 177, jouir d’une parfaite autonomie179. Le légendier de Charleville a cependant 177 Quelques notices sont légèrement plus étoffées: celle de Cécile est en cinq points, celle de Jean l’évangéliste, en six points; la note de Martin (en deux paragraphes de six points chacun) et celle de Jean-Baptiste (en quinze points) font exception par leur longueur. 178 L’étude de ces Notabilia m’a amenée à consulter plusieurs spécialistes de la prédication médiévale (Nicole Bériou, Eleonora Lombardo) et des légendiers abrégés (Giovanni Paolo Maggioni). Qu’ils soient ici tous remerciés de l’aide qu’ils m’ont apportée. 179 E. Lombardo a notamment attiré mon attention sur un manuscrit d’Uppsala provenant d’Allemagne du Nord, dans lequel un canevas de cinq lignes sur S. Antoine de Padoue a été copié dans la marge d’un manuscrit de sermons, sans avoir aucun rapport avec le texte qui figure en vis-à-vis. En ce qui concerne Charleville 177, on notera que les éléments narratifs rapportés par les notabilia ne correspondent en rien aux passages relevés en marge, dans tout le reste du légendier, par des signes de note et d’exemplum (cf. ci-dessus, n. 36). Dans les notabilia eux-mêmes, on ne relève guère – à l’exception des sources bibliques – de renvois explicites aux textes narratifs sollicités par le rédacteur. D’après E. Lombardo, ce serait un signe,

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ceci d’exceptionnel — outre le fait d’être un manuscrit hagiographique, et non homilétique — d’avoir accordé à ces notes une ampleur inégalée: les notabilia y constituent un bloc d’une vingtaine de notices, copiées les unes à la suite des autres, en pleine page, et non reléguées dans les marges. Le compilateur leur attribuait donc une importance comparable à celle des différents chapitres de son légendier. Aussi ce dernier constitue-t-il un témoin singulier, mais exemplaire, de la relation étroite qui existait alors entre hagiographie et prédication. Dans le cas précis du ms. 177, il est toutefois bien difficile, à première vue, de déterminer l’origine de ces notes, et, partant, leur objectif: le compilateur s’est-il contenté de résumer la matière d’un recueil de Sermones de sanctis, de manière à en retenir la substance, ou bien a-t-il de lui-même, à partir de sources hagiographiques, rédigé des ébauches homilétiques, destinées à une prédication ultérieure ? Sans dépouiller l’ensemble des recueils de sermons disponibles, on peut cependant déjà observer que les notes du ms. 177 paraissent indépendantes des Sermones de sanctis de Jacques de Voragine, une collection alors largement diffusée, et que le compilateur aurait donc pu utiliser180. En revanche, il usait, sans doute directement, de plusieurs sources narratives: comme dans le reste du légendier, il s’est surtout appuyé sur Jean de Mailly et sur la Légende dorée181; pour quelques notices (Noël, Jean l’évangéliste, Jean-Baptiste), il s’est aussi servi de textes bibliques ou para-bibliques (préfaces, glose); et, pour la seconde partie de sa note sur Martin (§ 20), il a même utilisé l’œuvre de Sulpice Sévère, sans passer par l’intermédiaire de Jean de Mailly ou de Jacques de Voragine. Toute cette matière hagiographique a parmi d’autres, que ces notes n’étaient pas destinées à servir d’aide-mémoire au pieux lecteur du légendier: si tel avait été le cas, des renvois précis et détaillés l’auraient orienté vers le texte des légendes concernées, pour lui permettre d’approfondir sa méditation religieuse. 180

La comparaison des notabilia avec les sermons de Jacques de Voragine m’a été suggérée par G. P. Maggioni: le ms. 177 est en effet partiellement dédié à l’œuvre du dominicain italien, et les sermons de celui-ci connurent une belle postérité littéraire (ils sont attestés dans plusieurs centaines de manuscrits). En attendant leur édition critique, à laquelle travaille précisément G. P. Maggioni, on pourra se référer à l’édition Clutius: Jacobi de Voragine… Sermones aurei de praecipuis sanctorum festis quae in Ecclesia celebrantur, a vetustate et innumeris prope mendis repurgati per R.P. F. Rudolphum Clutium…, éd. R. CLUTIUS, Moguntiae, 1616. 181 L’Abbreviatio de Jean de Mailly constitue la source principale des Notabilia, alors que, dans le reste du légendier, le compilateur avait privilégié les notices de la Légende dorée pour les saints universels (cf. les chapitres du légendier consacrés à Grégoire le Grand [11], Benoît [13], Georges [25], Jacques le Mineur [36], Maurice [149], Jérôme [164], Denis [171], Cécile [198] et Clément [199]); la note consacrée à Laurent (§ 16), est toutefois essentiellement basée sur le récit de la Légende dorée, de même que la première partie de la notice sur Martin (§ 20). Parfois, le compilateur a combiné des éléments tirés des deux recueils (cf. aux § 8, 9 et 13, les notes consacrées à Agnès, Agathe et Marc).

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été réorganisée en catégories morales; le compilateur s’est donc affranchi de l’ordre narratif, au profit d’une logique exemplaire, à vocation homilétique182. L’utilisation, apparemment directe, de ces différentes sources hagiographiques, semble indiquer que les notabilia du ms. Charleville 177 pourraient être des canevas homilétiques originaux, et non de simples résumés de sermons préexistants: pour le compilateur à l’origine de leur confection et de leur insertion dans le ms. 177 — peut-être, comme on l’a vu plus haut, Jean de Metz lui-même —, ces notes constituaient un petit manuel de plans prêts à l’emploi, destinés à être utilisés et développés dans le cadre d’une prédication future. Les notabilia du ms. Charleville 177 constituent donc un document assez rare, à verser au dossier de la prédication hagiographique du XIVe siècle. On en trouvera ici une édition, établie sur les mêmes principes que pour les textes précédents: la mise en paragraphes respecte celle du manuscrit, et les interventions du réviseur contemporain sont signalées entre crochets droits (suppressions) ou obliques (ajouts); un trait vertical, simple (|) ou double (||), indique le passage d’une colonne ou d’une page à la suivante; la ponctuation est de mon fait. J’ai également souligné les références qui accompagnent, dans le cours du texte, les citations bibliques ou patristiques. F. 199-201: Incipiunt quedam notabilia super legendas sanctorum. 1. De sancto Nicholao episcopo. In beato Nicholao nota quattuor. Primo abstinentiam quia a mamilla ieiunare incepit. Secundo continentiam quia virgines a peccato et obprobrio conservavit. Tercio humilitatem quia foribus excubans ecclesie bonis operibus humiliter institit. Quarto caritatem et misericordiam quia omni necessitati misericorditer astitit, ut patet in vita sua: unde in signum misericordie et pietatis tumba eius oleum emittit183. 2. De sancta Lucia. In beata Lucia nota quattuor. Primum est fides viva qua matri salutem optinuit. Secundum est larga pietas quia omnia sua pauperibus dedit. Tercium est sancta continentia et castitas que in ea cor-

182 Dans la note consacrée au pape Clément (§ 22), le compilateur a ainsi bousculé, pour les besoins de sa démonstration, l’ordre des évènements rapportés par la Passion correspondante: il fait d’abord allusion au baptême du païen Sisinnius, pour illustrer l’efficacité de la prédication du pape, avant d’évoquer, dans un deuxième point, et pour illustrer, cette fois, l’efficacité de la prière papale, le miracle à l’origine de cette conversion. 183

Cf. AS, 3; cf. LA, 3.

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rumpi non potuit. Quartum est perfecta et firma patiencia qua martirium sustinuit184. 3. De sancto Thoma apostolo. In beato Thoma nota quattuor. Primum est fidei ipsius utilis tarditas || qua se ipsum et nos certificavit. Gregorius: Minus mihi Maria profuit que cito credidit quam Thomas qui dubitavit185. Secundum est fidelis largitas: unde totum censum regis pauperibus ei faciendo palacium in celis erogavit. Tercium est magna eius strenuitas qua pro multorum salute ad Yndiam properavit et suo magistro contra propriam voluntatem obedivit; unde ait: «Dominus meus es tu et ego servus tuus; fac de me quod vis». Quartum est firma eius stabilitas et perseverantia qua pro castitate proximi et fide Christi non expavit, sed firmus et stabilis permansit: unde cum rex apostolum misisset in carcerem, iuravit quod eum excoriaret et vivum incenderet186. 4. De nativitate Domini. Hoc signum vobis: invenietis infantem pannis involutum et positum in presepio187. Lucas II. Nota tria signa data pastoribus in nativitate Christi, scilicet puritatem, paupertatem et humilitatem. Puritas intelligitur per infantem; paupertas per pannorum involutionem; humilitas per presepis reclinationem. Hec tria signa Christum nobis demonstrant et tamen multis terribilia. Psalmus: Turbabuntur gentes et timebunt qui habitant terram a signis tuis188. Iohannes III: Testimonium eius — id est signorum eius — nemo accipit189 — id est pauci. Qui autem accepit signavit quia Deus verax est. 5. De sancto Stephano. In beato Stephano quattuor notanda sunt. Primum est lagitas190 qua non solum sua sed etiam se ipsum aliis serviendo exposuit; unde Apostoli VII: viros qui ministrantibus deservirent elegerunt, quorum primus fuit beatus Stephanus191. Secundum est eius predicatio et eloquentia efficax, unde iudei non poterant resistere sapientie et spiritui qui loquebatur per os eius. Tercium est castitas: ideo sanctis mulieribus prelatus fuit, virgo non erat. Quartum est mira eius patientia et caritas qui non solum lapides iudeorum patienter sustinuit, sed pro suis lapidatoribus 184

Cf. AS, 4; cf. LA, 4.

185

Cf. Grégoire le Grand, Hom. in ev., II.29.1; éd. R. ÉTAIX (= Corpus Christianorum. Series Latina, 141), Turnhout, 1999, p. 245. 186

Cf. AS, 5.

187

Lc. 2.12.

188

Ps. 64.8.

189

Io. 3.32.

190

lagitas: scil. largitas.

191

Cf. Act. 6.5; cf. AS, 9 7.

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diligenter Dominum exoravit sicut Dominus pro suis crucifixoribus fecit192. 6. De sancto Iohanne ewangelista. In beato Iohanne ewangelista V[I]I notanda sunt. Primum est quod Dominus eum a nupciis revocavit ut ei liberius serviret; in Prologo: quem Dominus volentem nubere vocavit de nuptiis193. Secundum est quod cena super pectus Domini recubuit194, ubi multa Dei archana hausit et relictis carnalibus deliciis, spirituales delicias habundanter degustavit. Tercium est quod Dominus ei matrem suam commendavit pendens in cruce, ut virgo virginem custodiret: hoc enim virgini debebatur195. Quartum est quod ei dum esset in exilio futura multa revelavit ut fideles instrueret et inforet; | Apocalypsis I: Dedit illi Deus palan facere servis suis que oportet fieri cito, etc.196 Quintum est [est] quod eum Dominus ad epulas paradysi per semetipsum invitavit; unde in vita sua legitur quod Dominus ait ei: «Veni ad me quia amodo tempus est ut epuleris in mensa mea cum fratribus tuis197». Sextum est quod sine dolore in magna claritate decessit ut nullus de eius gloria dubitaret; unde dicitur: Descendit in defossum, etc.198 7. De sancto Thoma. In beato Thoma quattuor. Primum est distri[u]cta penitentia qua diu cor suum oratione et lectione, corpus cilicio et ieiuniis cruciatus est; unde legitur in vita quod lectioni et orationi semper intendens, cilicio et ieiuniis carnem tormentabat. Secundum est larga misericordia de qua dicitur quod in vita sua199 secreciori cella sua XIII pauperum pedes cotidie curvatis genibus abluebat, et post plenam refectionem singulis quattuor argenteos dabat. Tercium est discreta iusticia qua propter hostes ecclesie, clericos et laicos multos et magnos, non declinavit. Unde intrepidus se opponens, cum multis dampnis iniuriis et contumeliis urgeretur, adversum episcopos et principes Anglie, ne eum iniuste condempnarent, sedem apostolicam appellavit. Quatum est leta pacientia, unde ait: «Ego pro Deo et pro asertione iusticie et pro libertate ecclesie mori libenter et gaudenter paratus sum200».

192

Cf. AS, 9.

193

Prol. Io. (STEGMÜLLER, Repertorium, n° 624; éd. DE BRUYNE, Préfaces, p. 173).

194

Cf. Io. 21.20.

195

Cf. Prol. Io. (STEGMÜLLER, Repertorium, n° 624; éd. DE BRUYNE, Préfaces, p. 173).

196

Apc. 1.1.

197

AS, 10 187.

198

Prol. Io. (STEGMÜLLER, Repertorium, n° 624; éd. DE BRUYNE, Préfaces, p. 173).

199

quod in vita sua: comprendre in vita sua quod in.

200

Cf. AS, 12.

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8. De sancta Agnete virgine. In beata Agnete nota quattuor. Primum est sapientia quia bene et sapienter ad omnia respondit; unde prefecto ait: «Quidquid vis age, quia quod vis optinere non poteris201». Secundum constantia quia nec minis nec blandiciis moveri potuit, nec coniugio consentire voluit; unde ait: «Nec sacrificabo ydolis, nec sordibus polluar alienis202. Iam enim ab alio amatore preventa sum, cuius pater virgo et feminam nescit, et mater virgo est203; anulo suo subarravit me, etc.204» Tercium est continentia, ut nulla libidine corrumpere[n]tur; unde cum lupanar esset ingressa, statim angelum Domini preparatum invenit, qui eam stola candida vestivit205, in qua notatur eius continencia et castitas. Quartum est paciencia, ut nullo tormento ab amore Christi posset separari; unde cum ei incendium non noceret sed alios concremaret, prefecti vicarius in gutture eius gladium figi fecit quod libenter sustinuit206. 9. De sancta Agatha virgine. In beata Agatha nota quattuor. Primum est nobilis humilitas expectabilis genere de servitute Christi voluit gloriari: «Ancilla, inquit, Christi sum207». «Summa, inquit, ingenuitas est, in qua servitus Christi comprobatur208». Secundum est fidelis castitas: || tradita est cuidam meretrici et novem eius filiabus meretricibus, ut per triginta dies ab eis deciperetur. Sed ipsa minis et promissionibus earum viriliter resistens immobilis permansit, ita ut ipse dicerent: «Facilius saxa molliri quam mentem Agathe a castitate revocari209». Tercium est leta paciencia quia letissime et glorianter ibat ad carcerem et quasi epulas invitata agonem suum Domino commendabat; unde dicebat: «Ego in hiis penis delector210». Quartum est longa perseverantia, unde: «Ipsum corde et labiis invocabo211».

201

AS, 27 8.

202

AS, 27 11.

203

Cf. LA, 24 10-12: iam ab alio amatore preventa sum ... cuius mater virgo est, cuius pater feminam nescit. 204

LA, 24 16.

205

Cf. LA, 24 31.

206

Cf. AS, 27 32-33.

207

LA, 39 26.

208

LA, 39 30.

209 Cf. AS, 37 6: Facilius possunt saxa molliri quam mens huius puelle ab intentione pristina revocari. 210

Cf. LA, 39 46-51.

211

AS, 37 55.

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10. De sancto Gregorio. In beato Gregorio nota quattuor: primum est humilitas per quam meruit exaltari; unde in vita sua legitur quod licet totis viribus Gregorium re[man]entem omnis populus Romanus elegit, et Mauricius imperator electionem approbavit et confirmavit. Secundum est penitentia unde tanta distri[bu]tione corpus suum afflixit quod tussi gravissima crederet se mori cotidie, et defunctis parentibus facultates suas erogavit et religionem intravit: in quo notatur penitentia eius et largitas. Tercium est pietas et misericordia per quam amari meruit, quia quasi pater pauperum omnibus serviebat et eos sustentare curabat; unde ad mensam suam peregrinos quoslibet invitabat et eis ad lavandum manus humiliter ministrabat. Quartum est eius sapientie utilitas per quam honorari meruit, quia domum ecclesie fundavit in veritate scientie212. 11. De sancto Benedicto. In beato Benedicto nota quattuor. Primum est abstinentia: in ruppe in pane et aqua ieiunavit. Secundum est continentia quia temptatus de luxuria in spinis et urticis diu se nudum volu[p]tavit. Tercium est caritas, quia monachorum volentium eum veneno interficere maliciam et invidiam Florencii tolerans, plus de illis quam de se doluit. Quartum est largitas quia tempore famis nil sibi nec monachis retinuit, sed modicum olei quod ei remanserat pauperibus erogavit213. 12. De sancto Georgio. In beato Georgio nota quattuor. Primum est devoto214 fidei et plenitudo, quia inter sacrificantes ydolis verum deum predicavit, et venenum sancta cruce sine dolore bibit, et sancta oratione templa ydolorum destruxit. Secundum est animi magnitudo qua honores habitos deseruit, unde omnibus erogatis que habebat, vestem exuit militarem et indutus veste christianorum in medio sacrificancium se inicit, honores oblatos respuit. Tercium est milicie fidelitas qua propter Deum nec de suis nec de se curavit, nec minis nec blandiciis vinci potuit, sed fideliter Domin[i] militavit. Quartum | est patientia qua tot et tanta tormenta et tam horribilia que in vita sua scripta sunt non expavit215. 13. De sancto Marcho. In beato Marcho ewangelista nota quattuor. Primum est fidei devotio qua ewangelium scripsit et predicavit. Secundum est Dei et proximi dilectio qua multos ad Christum convertit216. Tercium est humilitas qua sibi pollicem amputavit ne fieret episcopus217. Quartum 212

Cf. AS, 46. Cf. AS, 48. 214 devoto: scil. devotio. 215 Cf. AS, 53. 216 Cf. AS, 54; cf. LA, 57. 217 Cf. LA, 57 25. 213

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est pacientia qua a templorum pontificibus mortem horribilem sustinuit. Nam fune in collum eius misso dum per vicos traheretur emisit spiritum218. 14. De sancto Iohanne baptista. Fuit homo missus a[be] Deo cui nomen erat Iohannes, id est gratia Dei219. Iohannes I°. Iohannes gratia[m] interpretatur propter multiplicem gratiam que in eo fuit. Primo, quia prenominatus a Deo. Ysaias. XLIX: Dominus ab utero vocavit me de ventre [matris] matris mee, recordatus est mei nominis220. Secundo, quia ab angelo nunciatus. Lucas I: Ait ad illum, id est ad Zachariam, angelus: Ne timeas Zacharia, quoniam exaudita, etc.221 Tercio est quia sanctifica in utero. Ieremias I°: Priusquam exires de vulva sanctificavi te222. Quarto, quia ad adventum salvatoris in utero exultavit. Lucas I°: Exultavit in gaudio infans in utero meo223. Quinto, quia martyr. Mattheus VI: Herodes misso spiculatore precepit auferri capud eius, id est Iohannis, in disco, et decollavit eum in carcere224. Sexto, quia lucerna, ut dicitur de Iohanne: Ille erat lucerna ardens e lucens225, ardens in se per bona opera. Septimo, quia vox verbi per humilitatem. Ideo dicitur in Iohanne: Vox clamantis in deserto226. Octavo, quia testis. Iohannes I°: Hic venit in testimonium, etc.227 Nono, quia baptisma Domini, unde: Inter natus228 mulierum, etc.229 Decimo, quia propheta. Mattheus XI°: Quid existis in desertum videre prophetam, etc.230 Undecimo, quia fuit heremita. Mattheus I°: Fuit Iohannes in deserto baptizans, etc.231 Duodecimo, quia fuit angelus nuncians mundo et inferno adventum salvatoris, unde: Ecce mitto angelum meum, etc.232 Tertiodecimo, quia fuit precursor, unde: Ipse precedet ante illum, etc.233 218

Cf. AS, 54 14-17.

219

Io. 1.6, cum Glossa in Io. (STEGMÜLLER, Repertorium, n° 11830 3).

220

Is. 49.1.

221

Lc. 1.13.

222

Ier. 1.5.

223

Lc. 1.44.

224

Mattheus VI: sic (Mc. 6.27).

225

Io. 5.35.

226

Io. 1.23.

227

Io. 1.7.

228

natus: scil. natos.

229

Mt. 11.11; Lc. 7.28.

230

Cf. Mt. 11.9.

231

Mattheus I°: sic (Mc. 1.4).

232

Mc. 1.2; Lc. 7.27.

233

Lc. 1.17.

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Quartodecim°, quia fuit sagitta, unde: Posuit me quasi sagittam electam234. Quintodecimo, quia gratia in ipso facta est et parentibus eius. 15. De sancto Iacobo apostolo. In beato Iacobo nota quattuor. Primum innocentia quia ex utero matris sue sanctus fuit, sicut beatus Iohannes baptista, beatus Ieremias et beatus Nicholaus. Psalmus: In te confirmatus sum ex utero235. Secundum est penitentia qua omnia fideliter exercuit ac si fuisset magnus peccator. Tercium est fidelitas qua constanter Deo testimonium perhibuit quia diu vixit; unde ait Iacobus de Iesu: «Ipse sedet ad dexteram Dei patris iudicaturus vivos et mortuos». Quartum est caritas qua || moriens pro inimicis oravit; unde cum precipitassent eum, statim super genua se convertit et cepit orare pro eis236. Hec quattuor conveniunt beato Iohanni baptiste. 16. De sancto Laurentio. In beato Laurentio nota quattuor. Primum sapientia qua multos predicando ad Christum convertit, et cecos corporaliter et spiritualiter illuminavit. Secundum est innocentia qua benedictionem Domini accepit. Psalmus: Innocens manibus et mundo corde, id est innocenti, hic accipiet benedictionem a Domino237. Tercium est largitas et misericordia qua non solum238 sed etiam thesauros ecclesie dedit pauperibus, et ideo iusticia eius manet in seculum seculi239. Quartum est paciencia qua tormenta diversa et craticulam ardentem pacienter sustinuit, unde Laurencius nominatur, id est laureatus, vel coronatus triplici corona predicationis innocentie et martirii240. 17. De sancto Mauritio cum sociis suis. In sanctis martiribus Mauritio cum sociis eius nota tria. Primum est iusti[a] qua tot et tanti milites ad confirmandam fidem tantam peregrinationem assumpserunt, quia in loco241 in quo fidem christianam susceperunt, Romam iverunt ad sanctum Marcellum papam242, eligentes ante gladiis interire quam fidem Christi violare; imperatori tamen pessimo pro re publica serviebant. Secundum 234

Cf. Is. 49.2.

235

Ps. 70.6.

236

Cf. AS, 60. Bien que cette note soit consacrée à Jacques le Mineur (Mai. 1), le compilateur l’a insérée entre Jean-Baptiste et Laurent, donc à la place normalement dévolue à Jacques le Majeur (Iul. 25). 237

Cf. Ps. 23.4-5.

238

non solum: sic. Il manque sans doute un mot après solum.

239

Ps. 111.9; LA, 113 7.

240

Cf. LA, 113.

241

in loco: comprendre a loco.

242

Cf. AS, 144 8 (mais Jean de Mailly parle du pape Marcellin et non du pape Marcel).

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est concordia qua tot milites voto unius contra regis imperium de immolatione ydolis erant obedientes. Tercium est paciencia qua, cum possent se vindicare, proiectis armis cum gaudio occidi se permiserunt, concertantes quodam modo ut alter alterum ad mortem preveniret243. 18. De sancto Ieronimo confessore. In beato Ieronimo nota quattuor. Primum est scripturarum ardens dilectio, ut habetur in vita sua: puer baptizatus litteris grecis hebraicis et latinis plenissime eruditus; et in Prologo: Cernis me, o Paula, amore scripturarum raptum244. Secundum est bonorum despectio; unde cum esset cardinalis infugit. Tercium est viciorum obiurgatio qua monachorum et clericorum contra se maliciam provocavit. Quartum est corporis et carnis mortificatio, quia cottidie lacrime, cottidie gemitus erant; et cum sompniis eum invadebat, nuda humo corpus245 collidebat. Coctum aliquid sumere luxuriam esse dicebat; languens aqua frigida utebatur. Continue flebat et repugnantem carnem inedia subigebat246. 19. De sancto Dyonisio cum sociis suis. In beato Dyonisio cum sociis eius nota tria. Primum mirabilis sapientia, quia super omnes philosophos ipse Dionysius celesti sapientie intendens per tenebras innaturales deum nature pati ut hominem et collendum247 ut deum ostendit; unde ei altare dei ignoti erexit, et ait Dionysius adh[o]c philosophus: | «Verus deus et verus homo erit et ipse renovaturus est mundum, sed adhuc incognitus est hominibus, quoniam apud Deum in celo est conversatio eius. Secundum est humilis obedientia, quia cum devote doctrinam salutis audisset a Paulo, spretis ydolis se cum Damari uxore sua et familia sua baptizari fecit, et fidei christiane fideliter obedivit, et relictis omnibus ad preceptum Clementis pape, cum esset Ateniensis episcopus, ivit in Franciam cum Rustico presbitero et Eleuterio, ut gentiles ad Christum converteret. Tercium est virilis paciencia per quam convicia, vincula, verbera, carcerem, bestias, fornacem, crucem, gladium et mortem superavit248. 20. De sancto Martino. In beato Martino nota sex. Primum continentia quia nondum christianus armiger et miles inter Sarracenos virgi243

Cf. AS, 144.

244

Cf. Prol. Pentateuchi (STEGMÜLLER, Repertorium, n° 284; éd. DE BRUYNE, Préfaces, p. 6) = Jérôme, Epist., 53.9 (éd. I. HILBERG [= Corpus Scriptorum Ecclesiasticorum Latinorum, 54], 2e éd., Wien, 1996). 245

nuda humo corpus: il faut comprendre nudum humo corpus; le compilateur a été influencé par sa source, AS, 151 15 (nuda humo ossa). 246

Cf. AS, 151.

247

collendum: scil. colendum.

248

Cf. AS, 156.

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nitatem servavit249. Secundum est paciencia qua propter Deum venenum, exilium, hereticos, rusticos et clericos contrarios sustinuit. Tercium est humilitas, qua in statu militari miles famulo ministravit; in statu episcopali in cathedra numquam sedit et leprosum osculando liberavit. Quartum est largitas, qua supra ewangelii consilium pallium suum pauperi divisit, adhuc non baptizatus; et factus episcopus in tunica pauperis celebravit. Quintum est fidei magnanimitas, unde ait: «Ego signo crucis nunc clipeo protectus, etc.» Sextum est miraculorum sublimitas, qua in virtute trinitatis meruit fieri trium mortuorum suscitator magnificus. Notandum est quod sex fuerunt in beato Martino, in quibus nullus ei similis invenitur. Primum est quod fuit pauper lagus, quia pauperi partem sui clamidis dedit. Secundo fuit serviens dominus, unde cum uno tantum servo contentus esset, ei tamen versa vice dominus serviebat, ita quod calciamenta de pedibus servi extraheret250. Tercio fuit humilis prelatus: idem enim constantissime perseverabat qui prius fuerat; eadem in corde humilitas, eadem in vestitu eius vilitas fuit251 — scilicet postquam factus est episcopus. Quarto fuit continue orans, unde: oculis ac manibus in celum semper intentus invictum ab oratione spiritum relaxabat252. Quinto fuit magnam penitentiam in senectute agens; unde in morte dixit: «Domine si adhuc populo tuo sum necessarius, non recuso laborem — scilicet penitentie — fiat voluntas tua253». O virum ineffabilem, etc.254 Ideo fratribus ei compacientibus quod nimiam ageret penitentiam ait: «Non

249 La source de cette précision est inconnue: Sulpice Sévère, le biographe de Martin, se contente d’évoquer, assez brièvement, une tentation érémitique, alors que Martin était encore enfant (BHL 5610, § 2.4, éd. J. FONTAINE [= Sources Chrétiennes, 133], 2e éd., Paris, 2003), mais il ne parle ni des «Sarrasins», ni d’un quelconque péril ayant pesé sur la virginité de son héros. Les biographes ultérieurs de Martin, dont Jacques de Voragine et Jean de Mailly, n’en parlent pas non plus. Il pourrait donc s’agir ici d’une confusion entre les légendes de S. Martin et de S. Malc: ce dernier, contrairement à Martin, n’était pas soldat, mais moine; il aurait été capturé par des Bédouins en Syrie, réduit en esclavage, et contraint d’épouser une femme avec laquelle il aurait respecté son vœu de chasteté, avant de recouvrer la liberté et la vie monastique. La Vita Malchi (BHL 5190), composée par Jérôme, avait été abrégée par Jean de Mailly (AS. Suppl., 3), dont le récit qualifie les Bédouins de Sarraceni et évoque la virginité sauvegardée du moine syrien (servata virginitate). On notera que cet abrégé sur Malc était connu du compilateur, qui l’avait d’ailleurs inséré un peu plus haut dans son propre légendier [215]. Les cinq points suivants de la notice sur Martin sont en revanche dérivés du chapitre correspondant de la Légende dorée (LA, 162). 250

Cf. BHL 5610, 2.5 (éd. J. FONTAINE [= Sources Chrétiennes, 133]).

251

BHL 5610, 10.1-2 (éd. ibid.).

252

BHL 5613, 15 (éd. ibid.).

253

BHL 5613, 11 (éd. ibid.).

254

BHL 5613, 14 (éd. ibid.).

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decet, filii, christianum nisi in cinere et cilicio mori255». Sexto, secure moriens fuit, unde cum mori deberet videns dyabolum prope adsistere, ait: «Quid hic astas, cuenta bestia ? Nichil in me funeste reperies: sed sinus Abrahe me suscepiet256». || 21. De sancta Cecilia. In beata Cecilia quinque notanda sunt. Primum est fides quia a cunabilis in fide Christi nutrita est. Secundum virginitas, unde diebus ac noctibus virginitatem suam a Domino conservari precabatur. Tercium est penitencia eius devota, unde ad carnem cilicio induta, exterius auratis vestibus tegebatur; biduanis ieiuniis ac triduanis orans, sanctorum se orationibus commendabat. Quartum est efficax eius predicatio, qua Valerianum sponsum ad Deum convertit et eum a sancto Urbano baptizari fecit. Quintum est constans eius patientia, unde Almachius iussit eam in bulliente balneo concremari. Sed cum ipsa die integro et nocte in calidissimo balneo quasi in loco frigido permansisset illesa, iussit Almachius eam ibidem decollari. Omnia predicta inveniuntur in vita eius257. 22. De sancto Clemente papa. In beato Clemente nota tria. Primum est predicatio gratiosa, unde cum omnibus christianis iudeis et gentilibus placuisset, Domicillam neptem Domiciani imperatoris ad Christum convertit et eam sacro velamine consecravit; Theodoram uxorem Sisinni in castitate fecit manere; Sisinnium de fide instruens ipsum cum aliis de domo sua numero CCCCXXIII baptizavit. Secundum est oratio virtuosa qua Sisinnio visum et auditum reddidit, et populo christiano in exilio aquam impetravit. Tercium est patientia eius miraculosa qua exilium pacienter sustinuit; immo eum Traianus ad collum eius anchora ligata precipitavit in mari; sed statim mari diviso discipuli eius in mare intraverunt, ubi ad modum templi marmorei habitaculum invenerunt, in quo corpus beati Clementis posuerunt, anchora iuxta corpus collocata258. Summary. The Latin MS Charleville-Mézières BM 177 is an abridged legendary of Metz which originates from Saint-Arnoul, where it was copied in about 1300. It was designed to serve as a manual for hagiographic preaching: the excerpts taken from the Legenda aurea are accompanied by many other abridged Vitae, in part taken from Jean of Mailly and in part directly compiled from the Vitae of local saints. The legendary is remarkable in that it has two unedited Vitae of the bishops Clou and Arnoul of Metz and also because of a strange collection of hagiographic tales destined to be used and elaborated upon by the preacher. 255

BHL 5613, 14 (éd. ibid.).

256

Cf. BHL 5613, 16 (éd. ibid.).

257

Cf. AS, 173.

258

Cf. AS, 174; cf. LA, 166.

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PHILIPPART – WAGNER, Hagiographie = G. PHILIPPART – A. WAGNER, Hagiographie lorraine (950-1130). Les diocèses de Metz, Toul et Verdun, in Hagiographies. Histoire internationale de la littérature hagiographique latine et vernaculaire en Occident des origines à 1550, t. 4, éd. G. PHILIPPART (= Corpus Christianorum. Hagiographies, 4), Turnhout, 2006, p. 585-744. PELT, Études = J.-B. PELT, Études sur la cathédrale de Metz. La liturgie. T. 1: (Vee XIII s.), Metz, 1937. PONCELET, Miraculorum = A. PONCELET, Miraculorum B. V. Mariae quae saec. VIXV latine conscripta sunt index postea perficiendus, in AB, 21 (1902), p. 241360. SHG VI = M. GOULLET, Les saints du diocèse de Toul (SHG VI), in L’hagiographie du haut Moyen Âge en Gaule du Nord: manuscrits, textes et centres de production, éd. M. HEINZELMANN (= Beihefte der Francia, 52), Stuttgart, 2001, p. 11-89. SHG X = M. GOULLET, et al., Les saints du diocèse de Metz (SHG X), in Miracles, Vies et réécritures dans l’Occident médiéval. Actes de l’Atelier «La réécriture des Miracles» (IHAP, juin 2004) et SHG X-XII: dossiers des saints de Metz et Laon et de Saturnin de Toulouse, éd. M. GOULLET – M. HEINZELMANN (= Beihefte der Francia, 65), Ostfildern, 2006 p. 149-405. STEGMÜLLER, Repertorium = F. STEGMÜLLER, Repertorium biblicum Medii Ævi, t. 1, Madrid, 1940; t. 9, 1977. VAN DER STRAETEN, Saint Livier = J. VAN DER STRAETEN, Saint Livier. Notes sur son culte et sur sa légende, in AB, 86 (1968), p. 373-389. *

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INDEX SANCTORUM ET FESTIVITATUM (p. 293-312) Abdon et Sennen mm. [95] Abraham et Maria [217] Aegidius ab. in Occitania [132] Afra et soc. mm. Augustae Vindel. [102] Agapetus seu Agapitus m. Praeneste [124] Agatha v. m. [221] vide ANNEXE 3 Agatho ab. in deserto Scete [212] Agericus ep. [3] Agnes v. m. [221] vide ANNEXE 3 Albanus et soc. Verulamii mm. [66] Alexander p., Eventius et Theodulus mm. [39] – cf. Hermes Alexius conf. [80] Amator ep. [40] Ambrosius Mediolanensis ep. [22a] Andochius, Thyrsus et Felix mm. [147] Anonymi – Antiochena quaedam v. [32] – illi qui ordinaverunt missam [218c] – monachus quidam [222] – regina quaedam [27] – sanctimonialis quaedam [216]

Aper Tullensis ep. [151] Apollinaris Ravennas ep. [83] Arnulfus Mettensis ep. [118] vide ANNEXE 2 Arsenius erem. [211] Athanasius Alexandrinus ep. [41] Augustinus Hipponensis ep. [123] Barlaam et Iosaphat [213] Barnabas ap. [60] Bartholomaeus ap. [122] Beda Venerabilis [218b] Benedictus ab. [13] [221] vide ANNEXE 3 Benignus Divione m. [202] Bernardus Clarevallensis ab. [119] Brandanus seu Brendanus ab. Clonfertensis [159] Briccius Turonensis ep. [197] Caecilia v. m. [198] [221] vide ANNEXE 3 – cf. Valerianus et Tiburtius Callistus p. et soc. mm. [172] Carolus Magnus imp. [218d]

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Cassianus Hortanus ep. [104] Catharina Alexandriae v. m. [204] Chlodulfus ep. [57] vide ANNEXE 1 Christina v. m. [84] Christophorus m. in Lycia [86] Chrysanthus et Daria mm. [175] Chrysogonus m. [203] Cirycus et Iulitta mm. [62] Claudius Nicostratus et soc. mm. cf. Coronati Clemens I p. [199] [221] vide ANNEXE 3 Clemens Mettensis ep. [200] – Translatio [37] Cletus p. cf. Linus et Cletus Cornelius p. et Cyprianus ep. mm. [140] Coronati quattuor [191] Cosmas et Damianus mm. [161] Crispinus et Crispinianus mm. [182] Cyprianus Carthaginiensis ep. cf. Cornelius et Cyprianus Cyprianus Iustina et Theoctistus mm. [160] Cyriacus et soc. Romae mm. [110] Cyrillus puer m. [154] Damasus p. [8] Dedicatio ecclesiae [219] Digna et Merita vv. mm. [205] Dionysius ep. Rusticus et Eleutherius mm. [171] [221] vide Annexe 3 Dominicus fundator O. Praed. [105] Donatus ep. et Hilarianus mm. [107] Dormientes VII mm. [88] Eleutherius ep. et soc. mm. Romae [156] Elisabeth landgravia Thuringiae [192] Eucharius Treverensis ep. [4a] Eulalia v. m. [19] Euphemia Chalcedone v. m. [141] Eusebius pr. Romanus [116] Eusebius Vercellensis ep. [97] Eustachius et soc. mm. [185] Faro ep. cf. Otgerius Felicitas cum VII filiis mm. [76] Felix II p. [91] Felix et Adauctus mm. [128] Fides v. et soc. mm. Aginni [178] Fides, Spes, Caritas et Sophia mm. [103] Firminus Ambianensis ep. m. [148] Franciscus Assisiensis [167] Furseus ab. [162] Gallicanus m. [68] Genesius mimus m. [153] Gengulfus m. [49] Georgius Cappadox m. [25] [221] vide ANNEXE 3 Germanus Autisiodorensis ep. [96] Gervasius et Protasius mm. [65] Glodesindis abb. [87]

Goericus seu Abbo ep. [152] Gordianus et Epimachus mm. [47] Gorgonius et Dorotheus mm. Nicomediae [135] Gregorius I p. [11] [221] vide ANNEXE 3 Hadrianus et soc. mm. Nicomediae [134] Hermes m. Romae [125] Hieronymus pr. [164] [221] vide ANNEXE 3 Hippolytus Romanus pr. [115] Hyacinthus m. in Portu Romano [5] Iacobus Maior ap. [85] Iacobus Minor ap. [36] [221] vide ANNEXE 3 Iacobus Intercisus m. [207] Iesus Christus – Ascensio [45] – Crucis exaltatio [138] – Crucis Inventio [38] – Nativitas [221] vide ANNEXE 3 – Passio [16] – Resurrectio [18] – Sacramentum altaris [201] Iohannes ap. et ev. [43] [221] vide ANNEXE 3 Iohannes Baptista [67] [221] vide ANNEXE 3 – Decollatio [126] Iohannes erem. in Aegypto [209] Iohannes Chrysostomus ep. [139] Iohannes et Paulus mm. [69] Iulianus m. Brivate [127a] – Miracula [127b] Iustus puer Autisiodorensis [180] Lambertus Traiectensis ep. [142] Laurentius Romae m. [112] [221] vide ANNEXE 3 – cf. Romanus Leo I p. [70] Leodegarius Augustodunensis ep. [166] Leonardus Nobiliacensis conf. [173] Letania Maior et Minor [44] Linus et Cletus pp. [30] Livarius m. [188] Longinus miles m. [12] Lucas ev. [174] Lucia Syracusis v. m. [221] vide ANNEXE 3 Lucia et Geminianus mm. [145] Ludovicus IX rex Francorum [144] Lupus Senonicus ep. [130] Lupus Trecensis ep. [94] Machabaei fratres VII [98] Malchus mon. [215] Mamertinus ab. [23] [131] Marcellinus p. [29] Marcellinus et Petrus mm. [54] Marcus ev. [28] [221] vide ANNEXE 3 Marcus et Marcellianus mm. [64] Margarita seu Marina v. m. [79] Margarita dicta Pelagius [169] Maria v. – Annuntiatio [15] – Assumptio [117] – Conceptio [177] – Lamentatio [17] – Nativitas [133]

LE LÉGENDIER CHARLEVILLE-MÉZIÈRES, BM, 177 Maria Aegyptiaca paenitens [21] Maria Magdalena paenitens [82] Marianus Autisiodorensis mon. [24] Marina v. dicta Marinus [63] Martha v. hospita Christi [93] Martialis ep. [73] Martinus I p. [194] Martinus Turonensis ep. [196] [221] vide ANNEXE 3 – Translatio [75] Maternus Coloniensis ep. [4c] Matthaeus ap. [143] Matthias ap. [2] Mauritius et soc. mm. [149] [221] vide ANNEXE 3 Maurus ab. [10] Medardus ep. [158] Mennas Aegyptius m. [195] Michael archangelus [163] Moyses erem. [210] Nazarius et Celsus mm. [90] Nereus et Achilleus mm. [48] Nicolaus Myrensis ep. [221] vide ANNEXE 3 – Translatio [50] Odilia Hohenburgensis ab. [108] Omnium fidelium defunctorum commemoratio [190] Omnium sanctorum festivitas [189] Otgerius miles [26] Pachomius ab. [220] Pancratius m. [51] Pantaleon m. [89] Paphnutius ab. [214] Papula v. [109] Pastor ab. [208] Patricius ep. [14] Paulus ap. [72] Pelagia paenitens [168] Pelagius I p. [218a] – cf. Beda – cf. Anonymi: illi qui ordinaverunt missam – cf. Carolus Magnus Pentecoste cf. Spiritus sanctus Peregrinus Autisiodorensis ep. [55] Perpetua et Felicitas cum soc. mm. [6] Petronilla v. [53] Petrus ap. [71] – cathedra [1] – vincula [99] Petrus Martyr [33] Petrus Andreas Paulus et Dionysia mm. [150] Philippus ap. [35] Praxedis v. [81] Primus et Felicianus mm. [58] Priscus et soc. mm. [56] Privatus ep. m. [136]

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Processus et Martinianus mm. [74] Procopius lector m. [155] Protus et Hyacinthus mm. [137] Quintinus Viromandensis m. [184] Quiriacus (Iudas) ep. [42] Remigius Remensis ep. [165] Romanus miles m. [111] Romaricus ab. [7] Sabina m. Romae [186] Sabinianus et Potentianus Senonenses epp. mm. [181] Sabinianus et Sabina mm. Trecis [129] Saturninus Tolosanus ep. [206] Sebastianus cf. Marcus et Marcellianus – cf. Tiburtius Secundus Astensis m. [20] Serapia v. m. cf. Sabina Sergius et Bacchus mm. [179] Silvanus ab. [223] Simon et Iudas app. [183] Simplicius, Faustinus et Beatrix mm. [92] Sixtus II p. m. [106] Spiritus sanctus [46] Stephanus I p. m. [100] Stephanus protomartyr [221] vide ANNEXE 3 – Inventio [101] Susanna v. m. [114] Symeon stylita senior [59] Symphorianus m. [121] Thais paenitens [170] Thecla v. m. [146] Theobaldus erem. in dioec. Vicentina [157] Theodora dicta Theodorus [78] Theodora v. et Didymus m. cf. Anonymi: Antiochena quaedam v. Theodorus tiro Amaseae m. [193] Thomas ap. [221] vide ANNEXE 3 Thomas Cantuariensis ep. m. [221] vide ANNEXE 3 Tiburtius Romae m. [113] Timotheus et Apollinaris mm. [120] Trinitas [187] Undecim milia vv. [176] Urbanus I p. [52] Ursula et soc. vv. mm. cf. Undecim milia vv. Valerianus et Tiburtius mm. [22b] Valerius Treverensis ep. [4b] Victor et soc. Massilienses mm. [77] Vigilius Autisiodorensis ep. [9] Vitalis Ravennae m. [31] Vitus et soc. mm. [61] Waldburgis ab. [34]

François DOLBEAU PROLOGUE INÉDIT D’UN HOMÉLIAIRE-LÉGENDIER DES ANCIENS PAYS-BAS

Durant le haut Moyen Âge, les compilateurs d’homéliaires patristiques expliquaient et justifiaient souvent leur entreprise dans un prologue destiné au lecteur1, tandis que les éditeurs de légendiers s’abstenaient de le faire, à de très rares exceptions près2. La situation s’inversa à partir de la fin du XIIe siècle. Certes, les auteurs de nouveaux sermonnaires continuèrent de s’adresser à leur public3, mais les homéliaires patristiques, destinés à l’office de nuit ou au réfectoire, n’avaient plus besoin, du fait de leur emploi régulier, d’avertissement initial. En revanche, sous l’influence des martyrologes et surtout des légendiers abrégés, quelques recueils hagiographiques de type traditionnel se trouvèrent dotés d’une préface justifiant le culte des saints. En 2000, j’ai recensé quatre exemples de cette pratique, issus de l’aire germanique et du Limbourg belge4, série complétée en 2005 par un cinquième cas, localisé près de Bruxelles5. L’homéliaire-légendier ici étudié, Kraków, Biblioteka Jagelliońska, 1380, fin XIVe s. (= K), fournit une sixième attestation. *

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Le prologue de K relève clairement de la tradition des légendiers, non de celle des homéliaires. Il débute en effet par le réemploi d’une préface hagiographique, déjà exploitée par certains des cinq légendiers précédemment connus, plus précisément les deux originaires de l’actuelle Belgique: – Liège, Bibliothèque de l’Université, 210, t. 1, copié en 1366 par Martin de Venne à Saint-Trond (= L); – Bruxelles, Bibliothèque royale, 409 (VDG 3135), copié vers 1465 par Jean Back à Rouge-Cloître (= B). 1

R. GRÉGOIRE, Homéliaires liturgiques médiévaux. Analyse de manuscrits, Spoleto, 1980, p. 38-39 et passim. Les exemples les plus connus sont ceux d’Alain de Farfa et de Paul Diacre. 2 F. DOLBEAU, Les prologues de légendiers latins, in Les Prologues médiévaux. Actes du Colloque international organisé par l’Academia Belgica et l’École française de Rome… (Rome, 26-28 mars 1998), éd. J. HAMESSE (= Fédération internationale des Instituts d’études médiévales. Textes et études du Moyen Âge, 15), Turnhout, 2000, p. 345-393.

N. BÉRIOU, Les prologues de recueils de sermons latins, du XIIe au XVe siècle, ibid., p. 395-426. 3

4

DOLBEAU, Les prologues (cit. n. 2), p. 353-358.

5

F. DOLBEAU, Un prologue inédit de légendier latin, in AB, 123 (2005), p. 369-376.

Analecta Bollandiana, 133 (2015), p. 350-361.

PROLOGUE INÉDIT D’UN HOMÉLIAIRE-LÉGENDIER

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La préface en question se lit à la fois devant la Passio Chrysanthi et Dariae (BHL 1787)6 et en tête ou en conclusion de la Passio Anastasiae (BHL 400)7. Comme elle figure dans toute la tradition de BHL 1787, y compris dans une ancienne version grecque (BHG 313), alors que sa présence est sporadique dans le cycle d’Anastasie, généralement pourvu d’une autre préface (BHL 1795, 118, 8093, 401), le sens de l’emprunt — de Chrysanthe à Anastasie — n’est pas douteux. Mais en ce qui concerne les légendiers, j’hésiterais à me montrer aussi affirmatif, car le texte BHL 400 est attesté précisément à Louvain, c’est-à-dire dans la région où furent copiés au moins deux des recueils ainsi préfacés8. L’existence d’un réemploi commun à L, K et B laisse supposer une relation, au moins indirecte, entre ces manuscrits. Mais alors que L respecte jusqu’au bout la source qui traitait des seuls martyrs et que B se contente de substituer sanctorum à martyrum, K modifie maladroitement la dernière phrase afin d’introduire les autres types de sainteté: L et B

9

Horum itaque gloriis delectati respuamus mundum cum omnibus delectamentis suis, et martyrum (L, sanctorum B) gesta absque incredulitatis nubilo, mente serenissima, recitemus.

K Horum itaque gloriis delectati respuamus mundum cum omnibus delectamentis suis, et sanctorum diuersorum, apostolorum (ap. in marg.), martirum, confessorum ac uirginum, gesta, actus, uitam ac passiones, absque incredulitatis nubilo, mente serenissima, prout ex diuersis antiquorum patrum et doctorum scriptis et uoluminibus ea inuenimus, et fideliter collegimus, et successiue occurrebant scribenti, recitemus.

6 Éd. B. MOMBRITIUS, Sanctuarium seu Vitae sanctorum, t. 1, Paris, 1910, p. 271; AASS, Oct. t. 11, Bruxelles, 1864, p. 469. 7 Cf. J. NORET, Le prologue BHL 400 à la Passion de Ste Anastasie, in AB, 90 (1972), p. 116-117. Éd. d’après Bruxelles, Bibl. royale 581 (VDG 3137/1), XVe s., dans Catalogus codicum hagiographicorum Bibliothecae Regiae Bruxellensis. Pars 1 (= Subs. hag., 1), Bruxelles, 1886, t. 1, p. 263. Il s’agit du premier tome du légendier du Val-Saint-Martin, près de Louvain; le second, coté 380-382, porte l’indication suivante: Collatus eidem (sc. monasterio) a fratribus Swollensibus in subsidium fundationis primae, révélant qu’il s’agissait d’un don de la communauté des Frères de la Vie commune de Zwolle (Pays-Bas septentrionaux). 8

Comme le montre notre apparat critique, KLB et le prologue d’Anastasie (= A) s’accordent parfois contre le texte de Mombritius (= Mo); d’autre part, K semble un peu plus proche de A que LB. Mais faute d’une édition critique pour les deux Passions, il serait prématuré d’en tirer des conclusions. 9

Éd. DOLBEAU, Les prologues (cit. n. 2), p. 388 (= L); Un prologue (cit. n. 5), p. 371 (= B).

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En conséquence, si K et B dérivent indirectement de L, plus ancien qu’eux, ils ne peuvent le faire que de façon indépendante. Aussitôt après ce passage, les préfaces des trois recueils divergent. L consacre alors un développement aux confesseurs et aux vierges, puis expose, sous un titre spécial, la répartition en tomes de son passionnaire10. B s’inspire d’autres prologues passe-partout, avant de rappeler les objectifs du compilateur: honorer Dieu, louer les saints, édifier lecteurs et auditeurs, en alimentant leur dévotion par des exemples véridiques. La spécificité de K est d’être un homéliaire-légendier ou plutôt, comme beaucoup de pièces y sont tronquées, un lectionnaire du réfectoire hagiographique et homilétique11: après avoir évoqué les gestes des saints, le compilateur énumère les auteurs des sermons transcrits, puis, sans rupture, explique comment il faut utiliser la table qui suit. Ses propos, qui ont un réel intérêt codicologique, justifient quelques mots de commentaire. La table est plutôt un guide de lecture que le sommaire du manuscrit et remplit au moins trois fonctions: – elle rétablit d’abord, en débutant par la partie d’été12, un ordre liturgique correct, ordre bousculé dans le corps du manuscrit par le hasard des transcriptions de modèles successifs13; les premières Passions citées sont ainsi celles de Vital de Ravenne (28 avril) et de l’apôtre Philippe (1er mai), qui se trouvent respectivement aux feuillets 132v (olim CXXVI.a.) et 244 (olim CCXXXVII.d.); – elle guide l’utilisateur, en renvoyant, comme on vient de voir, à une foliotation en chiffres romains, précisés par les lettres a-b-c-d: le numéro (numerus ou quota) correspond au livre ouvert, soit à un verso suivi d’un recto; la lettre à une colonne, c’est-à-dire aux deux du verso (a-b) 10 Passage édité par M. COENS, Les saints particulièrement honorés à l’abbaye de SaintTrond, in AB, 73 (1955), p. 140-192, spéc. p. 144. 11

Par commodité, j’ai maintenu l’appellation d’homéliaire-légendier, qui est aussi plus parlante. L’usage au réfectoire est suggéré par les nombreux Tu autem marginaux. 12 13

Le 25 avril, fête de saint Marc et jour des Litanies majeures.

Ce qui est mentionné explicitement: Nec miretur quis de eo quod non omnia secundum ordinem debitum in suis sunt scripta et collocata locis, (…) cum subscripta, per collectorem et scriptorem huius operis, ex diuersis libris et uoluminibus secundum quod diuersis etiam temporibus occurrebant, collecta sunt et conscripta. Le rédacteur distingue deux agents (collector/ scriptor) et deux actions (collecta/conscripta), ce qui rend probable – mais non certaine – l’intervention de deux personnes distinctes. La difficulté d’organiser un recueil à partir de modèles divers était déjà évoquée dans un légendier de la seconde moitié du IXe s.: Roma, Biblioteca Nazionale Centrale, Farf. 29 (341); cf. F. DOLBEAU, Naissance des homéliaires et des passionnaires, in L’Antiquité tardive dans les collections médiévales: textes et représentations, VIe-XIVe siècle, éd. St. GIOANNI – B. GRÉVIN (= Collection de l’École française de Rome, 405), Rome, 2008, p. 13-35, spéc. p. 27-28.

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et aux deux du recto (c-d); le compilateur se représente donc le volume comme ayant quatre colonnes, non deux comme disent les modernes14; – enfin, la table décrit en partie le contenu d’un second livre, un homéliaire débutant à Pâques, relié séparément pour des raisons pratiques, mais complémentaire du premier; ces renvois, édités en annexe, proposent tantôt des textes plus longs (plenius), tantôt un autre choix de lecture. Le recueil lui-même commence au f. 7, avec un titre général annonçant la seule partie homilétique: Incipiunt omelie diuersorum sanctorum doctorum cum quibusdam sermonibus de sanctis per totum annum tam in specie quam in genere siue in communi. Sa conception mixte n’étant pas définie à l’avance, le désordre apparent du contenu pourrait donc résulter, comme l’affirme le prologue, de la transcription de modèles successifs. Cela est confirmé par la présence de doublons et par l’observation que deux de ces modèles se laissent découper, au moins approximativement: un livret réservé à des saints vénérés dans les Pays-Bas septentrionaux (f. 18-31: Lebuinus, Radbodus, Willibrordus, Bonifatius, Odulfus, Pancratius15, Servatius); un passionnaire d’apôtres qui conserve sa rubrique originelle (f. 216v-245). La foliotation médiévale ne débute qu’au f. 7v, dans l’angle supérieur gauche; le décalage avec la numérotation actuelle s’explique ainsi par le fait qu’elle n’incluait ni le prologue ni la table, copiés en dernier. *

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On aimerait en savoir davantage sur l’origine de K, que sa préface rapproche à l’évidence de deux légendiers belges. Mais l’excellente analyse du volume, procurée dans un catalogue récent16, reste à ce sujet peu explicite. K est apparemment dépourvu d’ex-libris, et il est difficile de tirer partie d’une mention d’achat ajoutée dans la marge supérieure du f. 1: D. Martini de Ilkusch emptus 1524 duobus aureis17. Une note de prix au f. 1v 14 Les deux phénomènes (foliotation s’appliquant à un verso et un recto consécutifs, numérotation des colonnes) sont attestés par de nombreux exemples, sans avoir reçu encore le traitement qu’ils mériteraient. Voir déjà F. DOLBEAU, Les usagers des bibliothèques, in Histoire des bibliothèques françaises, éd. A. VERNET, t. 1, Paris, 1989, p. 394-413, spéc. p. 410 n. 14 et 412 n. 101. Des exemples précoces sont fournis, du premier, par Paris, BnF, Nouv. acq. lat. 1669, fin du XIIe s. (graduel de Gubbio), du second, par Guibert de Nogent, Autobiographie, II, 3. 15

Martyr romain dont des reliques étaient conservées à Saint-Sauveur d’Utrecht.

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M. KOWALCZYK et al., Catalogus codicum manuscriptorum Medii Ævi latinorum qui in Bibliotheca Jagellonica Cracoviae asservantur, t. 9, Cracovie, 2008, p. 219-273 (notice due à R. Tatarzyński); en ce qui concerne les pièces hagiographiques, j’ai effectué un dépouillement sommaire de K, in AB, 133 (2015), p. 180-183. 17 Ce personnage est Martin Biem, copiste en 1494 de Kraków, Bibl. Jag. 1984, auteur en 1516 d’un projet de réforme du calendrier et reconnu comme l’un des fondateurs de la météo-

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et les saints mentionnés ont conduit le rédacteur à supposer une origine germanique (Palatinatus Rhenensis). L’étude du sanctoral permet, semblet-il, une précision plus grande; elle dirige l’enquête vers les anciens PaysBas et plus spécialement le diocèse d’Utrecht. Des lectures sont prévues en effet pour plusieurs évêques ou évangélisateurs de cette région: Wiro (8/V), Servatius (13/V), Bonifatius (5/VI) et trois de ses disciples Eobanus, Athalarius et Marc(h)elmus, Plechelmus (15/VII), Fredericus (18/VII), Gregorius (25/VIII), Willibrordus (7/XI), Radbodus (29/XI et 25/VI), ainsi que pour des prêtres ou diacres locaux: Odulfus (Utrecht, 12/VI), Lebuinus (Deventer, 25/VI et 12/XI), Werenfridus (Elst, 14/VIII), Odgerus (Roermond, 10/IX). Le relevé des doublons, c’est-à-dire des pièces copiées deux fois ou des saints mentionnés en deux endroits, renforce l’hypothèse: Willibrordus (f. 28v et 105), Bonifatius (f. 29, 135v), Odulfus (f. 29v, 136), Pancratius (f. 30, 288), Servatius (f. 30, 134v). D’après la table initiale, et conformément aux spécificités du calendrier d’Utrecht18, Lebuinus et Radbodus sont bien fêtés deux fois19; Adalbertus d’Egmond est commémoré avec eux le 25 juin; Benignus est fêté juste avant Pierre et Paul, c’est-àdire le 28 juin, et Pontianus devant Félix, le 14 janvier. K est donc, sans aucun doute, originaire du diocèse d’Utrecht, mais il est moins facile de désigner le lieu de copie ou l’établissement auquel il était destiné. Le rédacteur de la table a nettement privilégié deux saints, en détaillant le contenu des lectures possibles pour leurs fêtes: Lébuin de Deventer (dix-sept lignes au f. 3, deux au f. 4v, plus cinq au f. 3v pour Marcelmus, son compagnon20), et Martin, patron de l’ancienne cathédrale d’Utrecht (une ligne au f. 3 [translation] et quinze au f. 4v, avec vigile). D’autre part, deux saints franciscains, Claire d’Assise et Louis de Toulouse, dont les légendes figurent dans un supplément final, ont été ajoutés

rologie; il fut, à Cracovie, curé de Saint-Nicolas et vice-chancelier de l’Université, et mourut en 1540: cf. Bénédictins du Bouveret, Colophons de manuscrits occidentaux des origines au XVIe siècle (= Spicilegii Friburgensis Subsidia, 5), t. 4, Fribourg, 1976, n° 13226. Ilkusch (aujourd’hui Olkusz) est une ville minière proche de Cracovie. 18 H. GROTEFEND, Zeitrechnung des deutschen Mittelalters und der Neuzeit, t. 2, Hannover, 1898, p. 192-197. 19

Le dossier de Lébuin est spécialement fourni: BHL 4810b, 4812ab (avec les lettres d’accompagnement de Pierre de Cambrai et d’Odilon de Soissons) et 4814; Radbod, évêque d’Utrecht et auteur de BHL 4814, est commémoré à l’aide de BHL 7046b. 20

¶ De sancto Marcelmo confessore socio beati Lebuini confessoris Christi, require in legenda beati Lebuini. ¶ Item legitur de eo sermo: Ad sancti ac beatissimi istius patris nostri, et est sermo beati Maximi episcopi de uno confessore, folio CCLV.a. Le nom de ce disciple de Boniface apparaît aussi sous les graphies Marchelmus et Marcelinus.

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dans les marges de la table aux f. 3v et 421. Très instructive est la comparaison avec un bréviaire d’été à l’usage de la collégiale Saint-Lébuin de Deventer22, où reposaient les corps de Lebuinus et de Marcelmus: ces deux saints, mais aussi Wiro, Bonifatius, Odulphus, Adalbertus, Benignus, Plechelmus, Fredericus, Werenfridus, Willibrordus, y sont présents dans le sanctoral, qui possède en plus trois lectures pour l’octave de Lebuin, le 19 novembre, une fête apparemment absente de K. L’élément le plus significatif est la place accordée de part et d’autre, entre le 13 et le 15 juillet, à Marcelmus, disciple de Boniface et compagnon de Lébuin, mais absent de tous les calendriers d’Utrecht jadis dépouillés par Grotefend. Les recherches ultérieures devraient donc se concentrer, à mon sens, sur Deventer, ville importante du diocèse d’Utrecht et centre majeur de production de livres: deux homéliaires notamment, conservés aujourd’hui à Bruxelles et à Paris, y furent copiés in domo Florentiana ou domini Florentii, la maisonmère des Frères de la Vie commune23. Même si beaucoup de ses textes sont incomplets, le manuscrit de Cracovie revêt donc une certaine importance pour l’hagiographie des Pays-Bas. En tant que compilation, il représente une création unique à partir de modèles divers et une source nouvelle de l’histoire culturelle de l’ancien diocèse d’Utrecht. Il justifierait une comparaison plus approfondie avec d’autres homéliaires, légendiers, lectionnaires de l’office ou du réfectoire, produits dans le milieu de la Devotio moderna, particulièrement à Deventer et à Zwolle. *

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Nous donnons ci-dessous l’édition intégrale du prologue de K, dont l’initiale bleue se prolonge, dans la marge et l’entrecolonne, en filigranes rouges et bleus. De la table qui suit, seuls les premiers numéros ont été retenus, à titre d’exemple: chacune des entrées y est précédée d’un piedde-mouche, rouge ou bleu en alternance, et les majuscules à l’intérieur du texte sont rehaussées de rouge, afin de procurer une meilleure lisibilité.

21 En ce qui concerne Louis de Toulouse, il s’agit de la bulle de canonisation de Jean XXII en 1317 (BHL 5054), qui figure également dans le légendier donné au Val-Saint-Martin par les Frères de Zwolle (cf. supra n. 7): Bruxelles, Bibl. royale, 380-382, f. 167v-169v. 22 Porrentruy, Bibl. cantonale jurassienne, 8, premier quart du XVIe s., décrit par R. GAMPER – R. JUROT, Catalogue des manuscrits médiévaux conservés à Porrentruy et dans le canton du Jura, Dietikon-Zürich, 1999, p. 63-65 (fac-similé du manuscrit accessible sur le site www.e-codices.unifr.ch). 23

Bruxelles, Bibl. royale, 591-592 (VDG 1955), ca 1420-1430 (homéliaire du réfectoire pour le Val-Saint-Martin près de Louvain); Paris, Bibl. Mazarine, 697, a. 1416.

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En appendice, on trouvera cependant la totalité des renvois qu’a fait le rédacteur à l’autre volume (aliud volumen), dont l’éventuelle identification pourrait amener à préciser l’origine de l’homéliaire-légendier de Cracovie. École Pratique des Hautes Études

François DOLBEAU

54, rue Saint-Jacques F – 75005 Paris

Summary. Codex 1380 of the Jagellonian Library at Cracow is a hagiographic and homiletic lectionary of the 14th century. It is peculiar in that it is preceded by a prologue which uses that of a martyr’s Passion (BHL 400 or 1787) as do two legendaries of the southern Low Countries, those of Saint-Trond and Rouge-Cloître. Its sanctorale makes it possible to state that it originated in the diocese of Utrecht, probably at Deventer. An elaborate table which involves also another volume reestablishes the order of the calendar which was jumbled by the frequent recourse to variant exemplars.

SIGLES Témoin complet K = KRAKÓW, Biblioteka Jagelliońska, 1380, f. 2rv, fin XIVe s. Témoins partiels (première partie du prologue) L = LIÈGE, Bibliothèque de l’Université, 210, t. 1, f. 1, a. 1366 (prol. de légendier) B = BRUXELLES, Bibliothèque royale, 409, f. 4rv, ca 1465 (prol. de légendier) A = BRUXELLES, Bibliothèque royale, 581, f. 35v, premier tiers du XVe s. (prol. de la Passion de Ste Anastasie) Mo = B. MOMBRITIUS, Sanctuarium seu Vitae sanctorum, Paris, 1910, t. 1, p. 271 (prol. de la Passion des SS. Chrysanthe et Darie)

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Édition du prologue [absence de titre] Hystoriam prioruma sanctorum ad edificacionem nostram Deus uoluit peruenireb, non ut laudibus mortalium pasceret eos quos immortalitatis dapibus reficitc, sed ut nos exemplo eorum doceat presentis seculid blandimenta contempnere, et ade acquisicionemf sempiterneg glorie labentem et momentaneam angustiam non timere. Omnis enim dolor aut est leuish et sufferrii potest, aut grauis est et finem citok imponit. Sed si uterque timendus est, racio est ut ad euadendum illum qui eternus est, istel contempnatur. Si enim isti dolores qui hodie minanturm et cras euacuanturn, qui hodie exardescunt et cras refrigescunt, qui hodie oriuntur et cras finiuntur, tam diri et tam seui sunto, quam graues erunt illi doloresp qui sic inchoant ut magis crescantq, sic inicium capiunt ut omnino finiri non possint ? Hanc denique ymaginem tenent qui se permittuntr secaris a medicis, aut igniri cauteriist, aut amarissimis pocionibus sauciari. Mortis enim timore perterriti, et amaritudines appetunt, et ignes non metuunt, et ferrum non perhorrescuntu. Si ergo amore huius uite que fidem seruare non nouit, abx amantibusy auro comparantur dolores, ignes etz amaritudinesaa, gratulandum est grauibusab passionibus que ultro uenientes faciunt nos temporaliter humiles, ut imperpetuum exaltemur, faciunt nos amaritudines momentaneas incurrere, ut sempiternas dulcedines percipiamusac, faciunt nobisad ardores fugitiui incendiiae, ut refrigerii nos faciant participes sempiterni. Hoc intuitu omnes martires Christi, ut triumphum ex hostibus caperent, omnium passionum genera ridendo pocius quam timendoaf perpessi sunt, ridentesag quod gloriamah sempiternam acquirerent, temporalem respuendo, [ut] etai eternum ignem euaderent, presens incendium perferendo. Horum itaque gloriis delectati, respuamus mundum cum omnibus delectamentis suis, et sanctorumak diuersorum, apostolorumal, martirum, confessorum ac uirginum am, gesta, actus, uitam ac passiones an, a priorum om. B – b peruenire KacBA] peruenisse Mo, prouenire L, uerare (?) Kpc – refecit L – d huius saeculi Mo – e ad om. Mo – f acquisitione Mo, inquisitionem B – g superne B – h leuis est LBAMo – i ferri Mo – k cito] non L, om. Mo – l iste om. L – m imminuuntur Mo – n qui – euacuantur post qui – refrigescunt posuit Mo – o sunt et tam seui B – p erunt illi dolores] illi putandi sunt Mo – q magis crescant] c. quottidie Mo – r permittunt se Mo – s aut secari LBAMo – t causteriis Mo – u pertimescunt Mo – x om. Mo – y amantibus se Mo – z om. L – aa ignis et amaritudinis Mo – ab gratuitis Mo – ac capiamus LMo – ad nos B – ae dulces add. BA – af metuendo Mo – ag credentes Mo – ah et gloriam Mo – ai ut et K] et ut LBA, et Mo recte – ak martyrum L – al apostolorum in marg. scripsit K, non habent LBAMo – am diuersorum – uirginum non habent LBAMo – an actus – passiones non habent LBAMo c

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absque incredulitatis nubilo, mente serenissima, prout ex diuersis antiquorum patrum et doctorum scriptis et uoluminibus ea inuenimus et fideliter collegimus, et successiue occurrebant scribentiao, recitemusap. ¶ Inserentes et addentes quasdam omelias siue tractatus ac sermones beatissimorum doctorum et patrum Ambrosii, Augustini, Ieronimi, Gregorii, Venerabilis Bede presbiteri, Origenis, Leonis pape, Maximi, Johannis, Petri, Fulgencii et Bernardi, episcoporum aliorumque doctorum et uenerabilium patrum sancte matris ecclesie catholicorum, legendas in ecclesia dei si placet, per totum anni circulum in singulis festiuitatibus ac sollempnitatibus eorumdem sanctorum infrascriptorum. Quorum omnium et singulorum ordine suo adnotacio siue tabula ac rubrice inferius continentur. Nec miretur quis de eo quod non omnia secundum ordinem debitum in suis sunt scripta et collocata locis, ea que presens tabula demonstrabit et ad que remittit, cum subscripta, per collectorem et scriptorem huius operis, ex diuersis libris et uoluminibus secundum quod diuersis etiam temporibus occurrebant, collecta sunt et conscripta, prout superius est expressum. Sed respicienti tabulam subsequentem, que eciam ad aliud uolumen in diuersis locis remittit, de quo infra fit mencio, et in ea diligenter perquirenti, omnia et singula per ordinem clarius apparebunt. ¶ Sane quicquid in hoc uolumine minus est, in alio uolumine huic simili, per se et separatim propter maius commodum alligato, plenius contineturaq, prout patebit perquirenti in tabula illi uolumini eciam alligata. ¶ Sed ut facilior et clarior haberi poterit inuencio eius quod ad propositum est querendum, est sciendum quod cuicumque numero siue quote addidero litteram .a., designo quod in prima columpna folii circa quotam, siue ubi quota uel numerusar est positus, inueniatur quod queritur. Vbi uero quote siue numero apposuero litteram .b., designo quod in secunda columpna sequenti ab illa sit. Vbi uero .c. apposuero, designo quod in tercia columpna, que est prima folii sequentis. Vbi uero litteram .d. /f. 2v/ apposuero, secundam designo columpnam folii subsequentis, hoc est quartam columpnam a quota siue numero computando. [Début de la table] Incipiunt igitur capitula siue rubrice, aut actus siue passiones et omeliae infrascriptorum. Et primo a tempore estiuali inchoando.

ao

niunt –

prout – scribenti non habent LBAMo – ap post recitemus LBAMo aliter prologum ficontinentur K – ar numerus uel quota Kac

aq

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¶ In natali sancti Marci ewangeliste, ewangelium secundum Johannem: Ego sum uitis uera, et pater meus agricola est, folio I.a. Omelia beati Augustini episcopi de eadem leccione, ibidem. ¶ De rogacionibus siue letaniis unde sumpserunt exordium24, infra folio CCLXXI.d. ¶ Item de letania maiori, uide in alio uolumine sermonem beati Maximi episcopi de ieiuniis Niniuitarum, folio XXVI.d. ¶ Item de eisdem letaniis, ewangelium secundum Lucam: Quis uestrum habebit amicum, uide in alio uolumine, folio XXVII.c. Omelia venerabilis Bede presbiteri de eadem leccione, ibidem. ¶ De sancto Vitali martire, infra folio CXXVI.a. ¶ In natali beatorum Philippi et Iacobi apostolorum ¶ Passio beati Philippi apostoli, infra folio CCXXXVII.d. ¶ Item passio beati Iacobi minoris apostoli per se, infra folio CCXXXVIII.b. … * * * Appendice Sous le nom d’aliud uolumen, un homéliaire est régulièrement cité dans la table et parfois dans les marges de K (Kraków, Biblioteka Jagelliońska, 1380, fin XIVe s.). Afin d’en permettre l’identification, ces renvois ont tous été reproduits ci-dessous, non dans l’ordre où ils se lisent dans K, mais selon la foliotation ancienne de cet aliud uolumen, reprise en chiffres arabes en tête de chaque entrée25. Les erreurs que commettent les scribes à propos des chiffres romains sont banales, de sorte que, dans l’original, la succession réelle pourrait comporter quelques divergences. (f. 1) ¶ De festo pasche, uide plene in dicto alio uolumine, folio primo cum pluribus sequentibus foliis. (f. 14) ¶ In diuisione apostolorum (…). Item de hoc lege et uide in alio uolumine, feria sexta post pascha, folio XIIII.d. 24

Cette pièce correspond à la section finale d’Héric d’Auxerre, Homélie II 12 (à partir des mots: Rogationum celebrandarum consuetudinem…; éd. R. QUADRI – R. DEMEULENAERE [= Corpus Christianorum. Continuatio Mediaevalis, 116B], Turnhout, 1994, p. 101-103). Elle se trouvait aussi dans le manuscrit évoqué en appendice (au feuillet 16) et figure dans les deux recueils copiés à Deventer et cités à la note précédente. 25

La notice du catalogue (cf. supra n. 16) mentionne et reproduit seulement les renvois marginaux.

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F. DOLBEAU

(f. 16) ¶ Vnde rogaciones sumpserunt exordium (…). Et de hoc satis in alio uolumine, folio XVI.d. cum aliquot foliis sequentibus. (f. 19) ¶ Item eodem die, beati Thome, ewangelium secundum Iohannem: Thomas autem unus ex duodecim qui dicitur Dydimus non erat cum eis quando uenit Ihesus, in alio uolumine, folio XIX.d. Omelia beati Gregorii pape de eadem leccione, ibidem. [renvoi analogue en marge de K, édité p. 238 du catalogue: Ewangelium: Thomas unus de duodecim in alio uolumine, fol. XIX.d.]. (f. 26) ¶ Item de letania maiori, uide in alio uolumine sermonem beati Maximi episcopi de ieiuniis Niniuitarum, folio XXVI.d. (f. 27) ¶ Item de eisdem letaniis, ewangelium secundum Lucam: Quis uestrum habebit amicum, uide in alio uolumine, folio XXVII.c. Omelia uenerabilis Bede presbiteri de eadem leccione, ibidem. (f. 29) ¶ De Ascensione domini, uide in alio uolumine, folio XXIX cum pluribus foliis sequentibus. (f. 37) ¶ De festo Pentecostes, quere in alio uolumine, folio XXXVII.c. cum pluribus foliis sequentibus. (f. compris entre 30 et 39) [renvoi marg. à hauteur de: Ewangelium: Euntes in mundum… Omelia leccionis eiusdem, éd. p. 245 du catalogue] In alio uolumine, folio XXX// (texte rogné). (f. 48) [en marge de la table, à hauteur de: In diuisione apostolorum] Ewangelium: Conuocatis Ihesus, feria quinta post Pentecosten, eciam in alio uolumine fol. XLVIII.c. (f. 59) ¶ In dedicacione beati Michaelis archangeli (…). ¶ Item de eodem, in alio uolumine, folio LIX.d. (f. 117) ¶ Annunciacio beate Marie uirginis (…). ¶ Item eodem die, ewangelium secundum Lucam: Missus est Gabriel angelus, in alio uolumine, folio CXVII.c. Omelia venerabilis Bede presbiteri de eadem leccione, ibidem. [renvoi analogue en marge de K, éd. p. 258 du catalogue: Require in alia parte, in aduentu domini infra quatuor tempora, folio CXVII]. (f. 125) ¶ De festo natiuitatis domini nostri Ihesu Christi, uide plene de toto illo festo in alio uolumine, folio CXXV.d. cum pluribus foliis sequentibus. (f. 137) ¶ Ewangelium secundum Matheum: Accessit ad Ihesum mater filiorum Zebedei cum filiis suis (…) Omelia beati Ieronimi prebiteri de eadem leccione (…). Et uide plenius in alio uolumine, de sancto Stephano, folio CXXXVII.a. ¶ In natali sancti Stephani prothomartiris, uide plene in alio uolumine, folio CXXXVII.a. cum pluribus sequentibus foliis. (f. 140) [renvoi marg. à hauteur de: De transfiguratione domini nostri I. C. Ewangelium: Ecce ego mitto ad uos prophetas, éd. p. 247 du catalogue]. Sicut in die Stephani in alio uolumine, folio CXL. (f. 141) ¶ Iohannis ante portam latinam (…). ¶ Item de eodem quere in alio uolumine, in festo ipsius beati Iohannis, folio CXLI.a. cum aliquot foliis sequentibus. ¶ In natali beati Iohannis apostoli et euuangeliste, passio ipsius beati Iohannis (…). Cetera de eodem, uide plenius in alio uolumine, folio CXLI.a. cum duobus foliis sequentibus.

PROLOGUE INÉDIT D’UN HOMÉLIAIRE-LÉGENDIER

361

(f. 143) ¶ In natali sanctorum Innocentum, uide plenius in alio uolumine, folio CXLIII.d. cum aliquot sequentibus. (f. 146-148) ¶ De circumcisione domini, uide in alio uolumine, folio CXLVI.a. usque folio CXLVIII.d. (f. 145-164) ¶ De festo epiphanie domini, uide plene in eodem alio uolumine, fol. CXLV.c. usque folio CLXIIII.d. (f. 174) ¶ De festo purificacionis beate uirginis Marie, uide in alio uolumine, folio CLXXIIII.d. usque folio sequenti .d. (f. 201) [renvoi marg. à hauteur de: De transfiguratione domini nostri I. C.: Ewangelium: Assumpsit Ihesus Petrum et Iacobum, éd. p. 247 du catalogue] Quere istum euangelium in alio uolumine, folio CCI. (f. 209) ¶ Item eodem die, beati Jacobi, ewangelium secundum Matheum: Accessit ad Ihesum mater filiorum Zebedei cum filiis suis, in alio uolumine, folio CCIX.c. Omelia beati Ieronimi presbiteri de eadem leccione, ibidem. (f. 217) ¶ In uigilia assumpcionis beate Marie uirginis, ewangelium secundum Lucam: Extollens uocem quedam mulier (…). ¶ Item de hoc ewangelio, uide in alio uolumine, folio CCXVII.c. Omelia uenerabilis Bede presbiteri de eadem leccione, ibidem. (f. 244) ¶ Ewangelium secundum Iohannem: Facta sunt encennia in iherosolimis (…). ¶ Et de hoc euangelio quoad textum, uide aliam omeliam in alio uolumine, uidelicet feria quarta in ebdomada passionis Christi, folio scilicet CCXLIIII.c. (f. 247) ¶ De festo palmarum, uide in alio uolumine, folio CCXLVII.c. cum aliquot foliis sequentibus. (f. 272) ¶ De passione domini nostri Ihesu Christi, uide in alio uolumine, folio CCLXXII cum pluribus sequentibus. (f. 284) ¶ De festo sancte trinitatis, in eodem alio uolumine, folio CCLXXXIIII.c. cum aliquot sequentibus. (f. 288) ¶ De festo corporis Christi siue sacramenti, ibidem in eodem alio uolumine, folio CCLXXXVIII.c.d. [renvoi analogue, éd. p. 270 du catalogue: Sequitur legenda pulcherrima de festo sacramenti siue sacratissimi corporis Christi. Et de hoc uide eciam lacius in alio uolumine circa finem, folio CCLXXXVIII.a. cum foliis sequentibus].

Bernard JOASSART CORRESPONDANCE DES BOLLANDISTES A. TINNEBROECK, É. CARPENTIER, H. MATAGNE, R. DE BUCK, C. DE SMEDT, G. VAN HOOFF, J. VAN DEN GHEYN ET H. DELEHAYE AVEC JEAN GAGARIN ET JEAN MARTYNOV*

Au cours de la préparation de l’édition de la correspondance échangée entre le bollandiste Victor De Buck et ses confrères jésuites Jean Gagarin et Jean Martynov1, il fut possible de retrouver dans les archives de la Province jésuite de France (AFSI)2 et dans celles des Bollandistes, un certain nombre de lettres échangées entre les deux Russes et des collègues de De Buck ou certains de ses successeurs. Ces relations épistolaires sont nettement moins abondantes. Il paraissait cependant utile de les publier, car leur contenu complète ce que l’on peut découvrir dans les échanges entre Gagarin, Martynov et De Buck. Plusieurs documents sont difficilement compréhensibles, voire pas du tout; d’autres sont anodins et ne présentent que très peu d’intérêt. Dès lors, dans certains cas, le parti a été pris de ne pas les publier ou de n’en donner que des extraits ou un résumé. AU TEMPS DE VICTOR DE BUCK 1. Antoine Tinnebroeck et Jean Gagarin Antoine Tinnebroeck (1816-1855), originaire de Waalwijk, ville des Pays-Bas située dans la province du Brabant septentrional, entra dans la *

Cf. liste des abréviations, p. 429.

1

Pour plus de détails sur la carrière de ces trois jésuites, on se reportera au volume DANIELUK – JOASSART, Gagarin – Martynov – De Buck. Rappelons seulement ici que Victor De Buck (1817-1876, jésuite en 1835) fut auxiliaire des Bollandistes de 1840 à 1845, puis bollandiste en titre à partir de 1850. En dehors de sa tâche principale d’hagiographe, il s’intéressa de près à la vie politique nationale et internationale de son temps ainsi qu’aux relations entre l’Église catholique et les Églises anglicane et orientale. Ivan/Jean-Xavier Gagarin (1814-1882), prince et diplomate russe, embrassa le catholicisme en 1842 et entra dans la Compagnie de Jésus en 1843. Ivan/Jean Martynov (1821-1894), lui aussi passé au catholicisme, entra dans la Compagnie en 1845. Avec quelques confrères français, ils fondèrent les Études et l’Œuvre des Saints-Cyrille-et-Méthode, destinées à favoriser le rapprochement entre les Églises latine et orientale, en particulier par le biais de publications. 2 Les AFSI regroupent l’ensemble des archives des anciennes Provinces recouvrant l’actuel territoire français.

Analecta Bollandiana, 133 (2015), p. 362-432.

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

363

Compagnie de Jésus en 1836. Il fut auxiliaire des Bollandistes de 1840 à 1846, période durant laquelle il aida Joseph Van der Moere pour la préparation du dossier consacré à Ste Thérèse d’Avila3. Agrégé définitivement au corps des hagiographes en 1850, il collabora principalement à la préparation du tome 8 des Acta Sanctorum d’Octobre (1853). En même temps, il s’intéressa de près aux origines du christianisme en Russie et entreprit de rédiger un ouvrage consacré à ce sujet, sans pouvoir le terminer. Il mourut de phtisie à l’âge de 39 ans. La préparation du dossier de sainte Parascève de Tarnovo4 l’amena à prendre contact avec Gagarin, le 3 mars 1853. Et, pratiquement jusqu’au décès de Tinnebroeck, les deux jésuites seront en relation à propos de questions hagiographiques. C’est aussi Tinnebroeck qui mit Gagarin en contact avec Victor De Buck quand celui-ci commençait la rédaction de la biographie d’André Bobola5. Le courrier échangé entre les deux hommes est avant tout technique: le bollandiste cherchait à obtenir des informations sur différents saints alors qu’il tentait de comprendre le monde religieux oriental. On lira avec intérêt la lettre de Gagarin du 15 décembre 1853 [5] dans laquelle il répondait à la promesse de Tinnebroeck de prier pour le tsar Nicolas Ier6 à l’occasion de sa fête patronale. Il y exprimait la manière dont il envisageait la réconciliation entre les Églises latine et orientale, en particulier son souhait que l’Église orthodoxe soit libérée de la tutelle de l’État. 1.

Tinnebroeck à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Bruxelles, 3 mars 1853

Mon Révérend Père, P. C. Je prends la liberté de recourir à votre obligeance pour obtenir quelques renseignements sur Ste Parascève, mentionnée au 13 ou au 14 octobre dans les calendriers 3 Joseph Van der Moere (1791-1875) fit partie du premier groupe des nouveaux Bollandistes, de 1837 à 1847. Son œuvre majeure fut précisément son ample dossier de S te Thérèse d’Avila (AASS, Oct. t. 7 [1845], p. 109-790), au terme duquel il se retira du bollandisme. 4 Parascève, ermite du 11e siècle, originaire d’Épibatai, près de Constantinople; ses reliques sont conservées à Tarnovo (Bulgarie) (cf. R. JANIN – I. DUJČEV, in BS, 10 [1968], col. 331-333). Rangée parmi les Praetermissi du 14 octobre dans les AASS, Oct. t. 6 (1794), p. 400, elle fit l’objet d’un dossier dans les AASS Auctaria Octobris, p. 154*-*167. 5 André Bobola (1591-1657), originaire de Strachocina (Pologne), entra dans la Compagnie de Jésus en 1611. Ordonné prêtre en 1622, il œuvra en différents endroits du royaume polono-lituanien et fut particulièrement actif auprès des Congrégations mariales et dans le ministère de la prédication. Il attira de nombreux orthodoxes au catholicisme. Arrêté par les cosaques lors de leur soulèvement contre les Polonais, il fut tué avec une cruauté particulière. Il fut béatifié en 1853 et canonisé en 1938 (cf. B. NATOŃSKI, in DHCJ, 1, p. 465-466). L’article ici évoqué est DE BUCK, André Bobola. 6

Nicolas Ier (1796-1855), tsar de Russie en 1825.

B. JOASSART

364

et dans les livres liturgiques de l’Église russe. Voici en peu de mots l’histoire de sa vie et de son culte. Née, je ne sais à quelle époque, dans un lieu nommé Callicratia, elle se retira dans le désert après la mort de ses parents et y mena une vie angélique. Vers la fin de ses jours, elle alla à Constantinople, visita les églises de cette ville, et se rendit de là dans son lieu natal, où elle mourut et fut illustrée par un grand nombre de miracles. Longtemps après, l’an du monde 6701, son corps fut transféré à Tarnovo, capitale de la Bulgarie. Au 17e siècle, le même corps, conservé jusqu’alors sans corruption, se trouvait à Iassy en Moldavie, et y était tenu en grande vénération par les princes et les peuples, comme le rapporte le P. Papebroch d’après les témoignages de Jean Znini, ancien ambassadeur du roi de Pologne auprès du Kan des Tartares, et ensuite prêtre, du Père Adam Warełkowicz, S.J.7, qui avait [été] missionnaire en Moldavie, et de Jean-Baptiste Tinones8, médecin vénitien, qui paraît avoir vécu à la cour d’un prince de ce pays. Je désirerais savoir en premier lieu si les catholiques font l’office de cette sainte aussi bien que les schismatiques. Une raison pour résoudre cette question affirmativement, c’est que Kulczyński9, dans son Specimen ecclesiae ruthenicae, publié à Rome en 1733, donne en latin la légende de S te Parascève d’après un tryphologe ou anthologe ruthène imprimé à Léopol en 1643 par des typographes catholiques10. Mais comme Assemani11 remarque que, de l’aveu même de Kulczyński, la bonne foi de ces typographes a été surprise au sujet de quelques offices que les catholiques ne sauraient admettre, je tiendrais à être tout à fait rassuré que l’office dont la légende en question fait partie, n’est pas l’effet d’une intrusion schismatique. En second lieu, je trouve une difficulté dans les premiers mots de la légende, ou du moins de la traduction que Kulczyński en a faite. Il y est dit: Haec Sancta Parascevia nata est in Serbia, in oppido Epivatum nuncupato, quod est prope urbem Callicratiam. Or, je n’ai pu découvrir aucune ville du nom de Callicratia, ni en Servie12, ni aux environs de Thessalonique, auxquels la dénomination de Servie a été donnée pendant quelque temps au rapport de Constantin Porphyrogénète 13. La 7 Adam Warełkowicz (1629-1701, jésuite en 1650), missionnaire à Jassy en 1672-1675 (cf. Encyklopedia SJ Pol., p. 718). 8 Znini et Tinones sont cités dans le dossier de S te Parascève; toutefois, il n’a pas été possible d’en connaître plus sur ces deux personnages. 9 Ignacy Kulczyński (1707-1747), moine basilien polonais, compléta sa formation à Rome, fut secrétaire personnel du général de son Ordre, procureur général des Basiliens, enfin recteur de l’église des Saints-Serge-et-Bacchus. Rentré en Pologne, il s’établit à l’abbaye de Koloz. Il laissa plusieurs ouvrages d’histoire religieuse, dont le Specimen ecclesiae ruthenicae publié à Rome en 1733; Martynov en donna une réédition en 1859 (Paris – Tournai) (cf. J. DUCHNIEWSKI, in EK, 10 [2004], col. 169). 10

Cf. les p. 49-50 de la réédition par Martynov.

11

Giuseppe Simone Assemani (1687-1768), membre d’une famille maronite du Liban, fut évêque titulaire de Tyr, préfet de la Bibliothèque Vaticane et membre des Congrégations de la Propagande et de l’Inquisition. Il publia notamment une Bibliotheca orientalis (4 vol., Rome, 1719-1728) et les Kalendaria Ecclesiae universae (6 vol., Rome, 1755) (cf. G. LEVI DELLA VIDA, in DBI, 4 [1962], p. 437-441). Au sujet de Parascève, cf. le t. 5, p. 287-296 des Kalendaria. 12

Ou Serbie.

13

Constantin VII Porphyrogénète (905-959), empereur de Byzance à partir de 913.

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

365

seule Callicratia que je rencontre, c’est un endroit bien champêtre fort agréable aux environs de Constantinople14, et où l’on voit dans les historiens que Théodose, fils de l’empereur Maurice, se rendit à la chasse avec son beau-père germain peu de temps avant la catastrophe qui mit fin aux jours et au règne de son père15. Χῶρος γὰρ πρὸ τοῦ ἄστεος οὗτος, λίαν ὡς ἔπος εἰπεῖν ὡρικός, dit Théophylacte Simocatta16. Et ce qui me porte à croire que c’est cet endroit même que la légende de Ste Parascève doit indiquer, c’est que Théodore Balsamon17, commentant le canon 63e du concile in Trullo, rapporte que Nicolas Muzalon18, patriarche de Constantinople (1147-1151), fit détruire la Vie de Ste Parascève, qui était honorée dans le village de Callicratia (τῆς ἁγίας Παρασκευῆς τῆς ἐν τῷ χωρίῳ τῇ Καλλικρατείᾳ τιμωμένης), à cause de la manière peu convenable dont elle était rédigée, et chargea un diacre, nommé Basilique, d’en écrire une nouvelle. Je vous demanderais donc de bien vouloir, s’il vous était possible, examiner le texte slave, pour voir si la traduction de Kulczyński y est conforme. Car je soupçonne que ce texte, ou bien certainement le texte grec, doit présenter un tout autre sens. D’abord le mot rendu par Serbia ne pourrait-il pas dans l’original signifier simplement la campagne ? Ensuite Epivatum ne serait-ce pas l’adjectif ἐπιβατός, ayant par ex. le sens de fréquenté ou un autre analogue ? Enfin, d’après ces considérations et d’autres qu’on pourrait faire, la phrase grecque ne serait-elle pas telle à peu près: Αὐτὴ ἡ ἁγία Παρασκευὴ ἐγεννήθη ἐν τῷ ἀγρῷ, ἐν χωρίῳ ἐπιβατῷ τῷ πρὸ τοῦ ἄστεος, Καλλικρατείᾳ ὀνόματι: haec Sancta Parascevia nata est ruri, in vico frequenti prope urbem (Constantinopolim), Callicratia nomine19? Quant à la manière dont le corps de la sainte est venu au pouvoir des Bulgares, il ne me paraît pas improbable que ceux-ci s’en seront emparés ou se le seront fait donner par les Grecs dans les fréquentes incursions qu’ils firent au 12e siècle sur les terres de l’empire, et quelquefois jusque sous les murs de Constantinople. À la fin de ce siècle et au commencement du suivant, ils étaient en communion avec le SaintSiège, de sorte que l’archevêque de Tarnovo reçut le pallium d’Innocent III, et que Joannice fut couronné roi des Bulgares par un légat du même pontife20. Ainsi, c’était 14 Sur le toponyme kallikrateia, cf. A. KÜLZER, Ostthrakien (Eurōpē) (= Tabula Imperii Byzantini, 12; Österr. Akad. der Wiss., Philos.-histor. Kl. Denkschriften, 369), Vienne, 2008, p. 424-425. 15 Maurice, empereur de 582 à 602, fut assassiné avec ses cinq derniers fils sur ordre d’un de ses officiers, Phocas, qui briguait le pouvoir. Son fils aîné Théodose fut associé au gouvernement de l’empire en 590. 16 Théophylacte Simocatta († 638), auteur d’une histoire de l’empereur Maurice. Theophyl. Simoc., Hist., VIII, 8, éd. I. BEKKER, Bonn, 1834, p. 328, l. 8-9. 17

Théodore Balsamon (vers 1110/20-vers 1198) fut l’un des plus célèbres canonistes de l’Église grecque (cf. V. TIFTIXOGLU, in LTK, 1 [1993], col. 1375). Le passage en question a été édité par G. A. RHALLIS – M. POTLIS, Σύνταγμα…, II, Athènes, 1852, p. 453. 18

Nicolas IV Muzalon fut patriarche de Constantinople de 1147 à 1151.

19

L’interprétation proposée est erronée. Sur la localité d’Epibatai, voir KÜLZER, Ostthrakien…, p. 350-352. 20 En 1202, le tsar (1197) de Bulgarie Jean/Joannice (Ioniță) Kaloïan (1170-1207; il était le frère de Jean/Ivan Ier Asène, souverain de Bulgarie de 1189 à 1196) proposa au pape

366

B. JOASSART

bien par des catholiques que Parascève fut alors honorée comme sainte; mais bientôt après, ils se joignirent aux Grecs schismatiques. L’époque à laquelle le corps de Parascève fut porté de Tarnovo à Iassy n’est marquée nulle part, que je sache. On présume que cette translation aura eu lieu, lorsque les Turcs se sont rendus maîtres de la Bulgarie. Si vous aviez des données plus positives à me fournir sur ces faits, je les recevrais avec une extrême reconnaissance, ainsi que toutes les autres indications que vous pourriez me donner sur la sainte en question et sur le culte qui lui est rendu, si toutefois ce culte est légitime au point de vue catholique; car dans le cas contraire, nous n’aurions qu’en faire pour nos Acta Sanctorum, qui n’admettent que des saints de la véritable Église. J’ai fait ces recherches et je vous propose ces questions sur S te Parascève de Tarnovo ou d’Iassy, dans le dessein d’insérer, s’il y a lieu, un article sur elle dans le supplément au tome 6e d’Octobre des Acta Sanctorum, tome qui va être incessamment réimprimé. Nos prédécesseurs y ont placé Ste Parascève parmi les Praetermissi, en renvoyant ce qu’il y aurait à dire sur elle au 14 novembre, jour où le martyrologe romain mentionne une Ste Vénérande, autrement dite Venera, et en grec Παρασκευή, ses parents l’ayant nommée ainsi, dit-on, parce qu’elle était née un vendredi. Mais comme celle-ci est une martyre, évidemment distincte de son homonyme non martyre que les Russes honorent le 14 octobre, il me semble que ce renvoi des anciens Bollandistes est assez mal motivé. C’est avec plus de raison qu’ils ont laissé à leurs successeurs le soin d’examiner au 14 novembre si la sainte Vénérande des Latins est identique soit avec la Ste Parascève que les Russes honorent avec les Grecs au 26 juillet, soit avec celle qui figure dans leurs livres liturgiques au 28 octobre, l’une et l’autre avec le titre de muczenica. Je suis, mon Révérend Père, en union de vos SS. Sacrifices et de vos prières. Rae Vae servus in Xto, A. Tinnebroeck, S.J. 2.

Gagarin à Tinnebroeck [ms. boll. 759-3, n° 356]

Paris, 16 avril 1853

Mon Révérend Père, P. C. Je suis tout honteux d’être tellement en retard vis-à-vis de vous, mais croyez bien, je vous prie, qu’il n’y a pas eu de mauvaise volonté de ma part, ni de négligence. Ne me trouvant pas en état de répondre à vos questions par mes propres lumières, je me suis adressé d’abord à M. Terlecki 21, prêtre catholique du rite grécoInnocent III (1160-1216, élu en 1198) de rentrer dans la communion romaine et manifesta son désir de recevoir de ce pape la couronne bulgare. Le pontife accepta, à la condition que l’Église bulgare reconnaisse effectivement l’autorité de Rome. Après l’engagement du souverain, en 1204, le pape reconnut à Jean le titre de «roi des peuples de Bulgarie et de Valachie» et, le 8 novembre 1204, le cardinal Leone Brancaleone († c. 1230), légat pontifical, remit au souverain les insignes royaux. De son côté, Basile, archevêque de Zagora, puis de Tarnovo (fin 12e-début 13e s.), allié de Jean Kaloïan, reconnut la primauté romaine et fut investi de la dignité de primat bulgare avec le pouvoir de couronner et consacrer le souverain bulgare. L’union fut toutefois de courte durée et Basile se retira au Mont Athos (cf. R. JANIN, in DHGE, 6 [1932], col. 1161). 21 Hipolit Terlecki fut d’abord médecin à Cracovie, puis émigra à Paris après la mort de sa femme (1835). Il y devint prêtre catholique de rite oriental et élabora divers projets visant à promouvoir l’union ecclésiastique parmi les Slaves du sud de l’Europe; dans ce but il fonda un

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

367

slave établi à Paris; mais ni auprès de lui, ni dans sa bibliothèque, je n’ai rien trouvé qui pût vous satisfaire. Je me suis alors tourné du côté du chapelain schismatique de l’ambassade russe22, avec lequel je me trouve en assez bons rapports; seulement il est très loin de Vaugirard et je ne puis pas m’absenter facilement; de plus les offices du carême et de la Semaine Sainte des schismatiques formaient encore un obstacle; bref, j’ai été trois fois chez lui à votre intention et ce n’est qu’à la dernière fois que j’ai pu le voir. Dans le livre intitulé Prologue23, j’ai retrouvé en slavon la phrase que vous me citez; je soupçonne comme vous qu’il y a un contresens et la manière dont vous rétablissez la phrase, au moins pour epibate, me paraît très vraisemblable; mais le contresens doit avoir été le fait du traducteur slavon et Kulczyński a traduit très exactement et mot à mot sur le slave. Il faudrait donc avoir le Prologue en grec pour vérifier et je n’ai pas pu jusqu’à présent me le procurer. Ce qui vaudrait encore mieux: il faudrait se procurer les ménées grecques, non pas celles qui contiennent le propre de l’office des saints, mais celles qui contiennent les légendes. Elles n’existent pas en slavon, ni à la chapelle catholique, ni à la chapelle schismatique. Si je puis me les procurer en grec d’une manière quelconque, je tâcherai de vous satisfaire. Je possède en slavon les ménées (des offices); j’ai lu l’office de Ste Parascève, il y est question de Callicratia, nullement d’epibate, et rien n’indique que Callicratia soit une ville plutôt qu’un village. Je serais aussi disposé à croire que Callicratia est la traduction grecque de quelque nom de ville slave, p. ex. Krasnoselo ou quelque chose dans ce genre. Cette explication me semblerait plus probable que celle qui donnerait le nom de Servie ou Serbie aux environs de Constantinople. Maintenant, quant au temps où Ste Parascève a vécu et à son culte, je ne puis rien vous dire. À la lecture de son office, je suis disposé, je ne sais trop pourquoi, à croire son culte fort ancien et par conséquent catholique. Mais je n’ai aucune preuve à apporter à l’appui de ce qui n’est vraiment qu’un sentiment. | Nouvelles diverses concernant quelques jésuites français.

Vous verrez un de ces jours dans l’Univers un compte rendu que je lui [ai] envoyé d’un livre anglais assez curieux sur l’Église grecque. Il contient beaucoup d’erreurs et en particulier sur les saints et leur culte dans l’Église schismatique, mais je ne puis pas en parler dans un journal24.

séminaire, qui fut un échec, puis il retourna en Galicie. Auteur de quelques ouvrages, il fut membre de la Société des Amis de l’Orient (cf. ES/ЭС, 32A [1901], p. 956). 22 Iosif Vasil’ev (Vassilieff-Vassiliev/Иосиф Васильевич Васильев) (1821-1881) fut aumônier adjoint (1846-1849), puis aumônier de l’ambassade russe à Paris. Rentré en Russie, il fut à la tête d’un comité qui dirigeait les facultés orthodoxes. 23 24

Gagarin évoque ici le Synaxaire russe dans son édition moscovite de 1843.

Dans le numéro de L’Univers du 24 avril 1853, Gagarin fit une présentation de l’ouvrage de William Palmer (1811-1879), théologien anglican et spécialiste des églises orientales (il demanda même mais n’obtint pas son admission dans l’Église grecque car on exigeait qu’il fût rebaptisé), intitulé Dissertations on subjects relating to the Orthodox or Eastern Catholic Communion (Londres, 1853); Gagarin revint sur le sujet dans le n° du 11 mai suivant.

B. JOASSART

368

Veuillez présenter mes respects aux RR. PP. Van Hecke25 et De Buck. Si j’apprends quelque chose, je vous l’enverrai. Votre serviteur en N. S., Gagarin, S.J. 3.

Tinnebroeck à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Bruxelles, 22 avril 1853

Mon Révérend Père, P. C. Je vous remercie infiniment de l’excessive bonté que vous avez eue de prendre tant de peine pour satisfaire à mes demandes, aussi bien que des renseignements qui me sont fournis par votre bonne lettre. Aussi m’estimerais-je heureux de pouvoir à mon tour vous être utile en quelque chose, et je vous prie, le cas échéant, de disposer librement de moi pour tous les services que je serais à même de vous rendre. Maintenant, pour vous épargner des recherches que votre complaisance pour moi vous porterait peut-être encore à faire, sans que j’en eusse strictement besoin, il est juste que je vous dise à quel point mes notices sur Ste Parascève se sont complétées depuis que je vous ai écrit. J’ai découvert, il n’y a pas longtemps, dans un manuscrit de la Bibliothèque dite de Bourgogne, en cette ville26, la traduction latine d’une Vie de la sainte, écrite par Euthymius, patriarche de Tarnovo27. Le traducteur, qui se nomme Fr. Raphaël Levacovich, religieux croate de l’Ordre des FF. Mineurs de l’Observance28, l’a tirée d’un horologe slave imprimé à Venise en 154729. Elle est beaucoup plus étendue et plus circonstanciée que celle que Kulczyński a traduite et que vous avez retrouvée dans le Prologue slavon. Le lieu natal de la sainte, qui fut aussi celui de sa sépulture, y est nommé Epivati (au pluriel) et désigné comme situé en Thrace. Il n’y est pas fait mention de Callicratia, tandis que ce dernier nom, comme vous venez de me l’apprendre, est le seul dont il soit question dans l’office que vous possédez, et que Balsamon le donne aussi au lieu où la sainte était honorée du temps de Nicolas Muzalon, patriarche de Constantinople (11471151). Voilà donc une confusion de noms dont je ne sais comment sortir. L’époque à laquelle Ste Parascève doit avoir vécu, peut se déduire de cette circonstance, marquée dans la Vie dont je viens de parler, qu’elle était sœur d’Euthymius, évêque de Madytes30, célèbre par ses miracles. Or je trouve qu’Euthymius, 25 Joseph Van Hecke (1795-1874, jésuite en 1814) fit partie du premier groupe des nouveaux Bollandistes à partir de 1837. 26

C’est-à-dire ce qui est actuellement la Bibliothèque royale de Belgique.

27

Euthyme de Tarnovo (1325/30-1402) fut moine dans divers monastères de Constantinople avant d’être élu patriarche de Tarnovo en 1375. Il fut chassé de son siège en 1393 lors de la prise de la ville par les Turcs. Il œuvra notamment à la correction des livres liturgiques bulgares et fut un théologien fort renommé dans le monde oriental (cf. G. ELDAROV, in BSO, 1, col. 838-839). Cette Vie slavonne a été traduite en grec, au 17e s. (= BHG 1421). 28

Raphaël Levacovich (c. 1600-1650) dirigea l’imprimerie illyrienne installée à la Congrégation de la Propagande, et fut nommé archevêque d’Ochrid en 1647. La traduction ici évoquée se trouve dans l’actuel ms. 8306-17 de la KBR, f. 19-23v. 29 Il s’agit de l’édition de 1547 du «Florilège» de Božidar Vuković (après 1465-c. 1540), recueil spirituel de textes hagiographiques et de prières pour les différents moments de la journée. 30 Euthyme de Madyta (vers 910/915-989/996) fut moine à Constantinople pendant une trentaine d’années, puis évêque de Madyta (Thrace) pendant les quelque 40 dernières années de sa vie (cf. O. VOLK, in LTK, 3 [1995], col. 1021).

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

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honoré comme saint par les Grecs, fut contemporain de Michel Cérulaire31, qui doit avoir même été lié d’amitié avec lui; mais il paraît que cette liaison et la mort d’Euthymius, qui doit avoir été beaucoup plus âgé que Michel, furent antérieures à l’élévation de ce dernier sur le siège de Constantinople, et par conséquent au schisme, outre que ce schisme ne fut tout d’abord que le fait personnel de Cérulaire et de quelques autres, sans avoir encore les proportions d’une rupture complète entre l’Orient et l’Occident. D’après cela, je regarde comme certain que Ste Parascève a vécu et est morte dans la communion catholique. D’ailleurs, toujours d’après la même Vie, la translation de la sainte à Tarnovo fut l’œuvre d’un prince et d’évêques orthodoxes. Ce prince fut Jean Asen ou Joannice, uni de communion avec Innocent III, à l’autorité duquel il avait soumis tout son royaume. Il obtint le corps de Ste Parascève des Francs, devenus maîtres de Constantinople, et auxquels il venait de faire la guerre, non sans de grands avantages pour lui. Marc, évêque de Marcianopolis ou Preslava32, fut député à Constantinople pour recevoir les saintes reliques, et Basile, patriarche de Tarnovo, alla à leur rencontre avec le roi, le clergé et le peuple, pour les porter en grande pompe à l’église principale de la capitale des Bulgares. Les deux prélats que je viens de nommer avaient reçu le pallium du souverain pontife, comme on peut le voir dans l’Oriens Christianus de Lequien33 et dans l’Illyricum sacrum de Farlati34. Ce dernier ouvrage fournit aussi des preuves que les premières hostilités entre les Francs et les Bulgares ne nuisirent point à l’union de ceux-ci avec le SaintSiège. Ils ne s’en séparèrent que plus tard, lorsqu’ils se firent les alliés des Grecs. Si le récit de la translation de Ste Parascève, fait par le patriarche Euthymius, est exact, cette translation doit avoir été faite au plus tôt en 1204, année de la prise de Constantinople par les Croisés, et au plus tard en 1207, année de la mort du roi Joannice. Cependant la légende slave porte, d’après la traduction de Kulczyński: Anno mundi conditi 6701, a Nativitate vero Domini 1175 (mais ce dernier chiffre, comme Assemani le remarque avec raison devrait être 1195), et je trouve de même, dans une version latine d’un calendrier russe, faite pour les anciens Bollandistes en 1712 par le baron de Sparwenfeld35, les paroles suivantes: Item S. Matris nostrae Paraskeva, 31

Michel Cérulaire (v. 1005/1010-1059), patriarche de Constantinople de 1043 à 1058.

32

Ce n’est que par la Vie de Parascève que l’on connaît le nom de cet évêque.

33

Michel Le Quien (1661-1733, dominicain en 1681) fut assigné au couvent parisien Saint-Honoré où il passa toute sa vie comme bibliothécaire tout en se livrant aux travaux d’érudition. Il entreprit une édition, avec traduction latine, des œuvres de Jean Damascène; deux volumes (Sancti patris nostri Joannis Damasceni… Opera omnia…) sortirent de presse à Paris, en 1712; un troisième tome devait contenir les œuvres douteuses ou incertaines, mais ne vit pas le jour. Il est également l’auteur de l’Oriens christianus in quatuor patriarchatus digestus, in quo exhibentur Ecclesiae patriarchae caeterique praesules totius Orientis (3 vol., Paris, 1740) et de travaux sur les ordinations anglicanes (cf. C. I., in Catholicisme, 7 [1975], col. 432-433). 34

Daniele Farlati (1690-1773, jésuite en 1707) consacra une grande partie de sa vie aux travaux d’érudition, en particulier à l’histoire de l’Illyrie; il publia, avec son collègue Philippe Riceputi, les trois premiers tomes de l’Illyricum sacrum (Venise, 1751-1769), l’ouvrage ayant été continué par Coleti (cf. M. KORADE, in DHCJ, 2, p. 1376-1377). 35 Johan Gabriel Sparwenfeld (1655-1727), diplomate et orientaliste suédois, fit, de 1684 à 1687, un long séjour en Russie de 1684 à 1687, dont il a laissé une relation, et fut l’auteur d’un Lexicon slavicon.

B. JOASSART

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cujus reliquiae apportatae ex patria ejus in urbem Ternow anno 6701 sub imp. Johanne Asieno. Dans cette discordance de date, j’opinerais pour celle assignée par le patriarche de Tarnovo, non seulement parce qu’il rapporte avec détail les circonstances de la translation, mais aussi parce que je trouve que Joannice ne devint proprement roi des Bulgares qu’en 1195 ou 1196, après la mort de son frère Pierre Asen. D’après Strahl36 (Beiträge zur Russischen Kirchengeschichte), Grégoire Zam37 blak , Bulgare de naissance et premier métropolite de Kiev après la scission de l’Église russe en deux métropoles au commencement du 15 e siècle, doit avoir écrit une vie de Ste Parascève de Tarnovo, et établi la fête de cette sainte dans son diocèse. On rapporte que ce prélat se trouva au concile de Constance, qu’il fit beaucoup de démarches pour le rétablissement de l’unité catholique, qu’un synode de Moscou le condamna comme apostat, etc. D’où il semble permis de conclure que les Russesunis ont reconnu aussi bien que les schismatiques la sainteté de Parascève. Quant à ce que vous me dites des ménées grecques, nous en avons l’édition la plus récente (Venise, 1843); nous avons aussi l’index complet de l’ancienne édition que possédaient nos prédécesseurs. Ste Parascève n’y est pas même nommée, non plus que dans une foule de suppléments aux ménées imprimées que les anciens Bollandistes ont tirées des bibliothèques de Rome, de Venise, de Milan, de Florence et du Synaxarium Sirmondi38, si souvent cité dans les Acta Sanctorum. Ces suppléments ne consistent qu’en légendes, et les ménées imprimées contiennent aussi les légendes de tous les saints dont on y trouve l’office ou la mémoire. Je sais bien qu’autrefois le συναξαρίστης ou recueil de légendes formait un livre à part, mais il n’en est plus ainsi dans les éditions dont je parle. Vous aurez probablement jugé des ménées à cet égard d’après les livres slavons, où je vois, d’après ce que vous me dites, que les légendes sont séparées des offices. Vous m’avez parlé des offices du carême et de la Semaine Sainte des schismatiques comme ayant retardé votre entrevue avec le chapelain de l’ambassade [Vasil’ev]. Cette chose m’a frappé, par la raison que la Pâque des Russes et des Grecs doit tomber cette année-ci le 1er mai. Est-ce que l’ambassade russe à Paris se conforme ainsi aux Latins pour la célébration de la grande solennité ? Et faut-il regarder cela comme un acheminement vers l’adoption du calendrier grégorien, dont M. l’abbé Étienne39 a parlé dernièrement dans un article de l’Ami de la religion ? 36 Philipp Strahl, professeur à l’Université de Bonn, publia entre autres ouvrages sur la Russie les Beiträge zur russischen Kirchengeschichte (Halle, 1827), ici évoqués, Das gelehrte Russland (Leipzig – Bonn, 1828) et la Geschichte der russischen Kirche (Halle, 1830). 37 Grégoire Tsamblak (vers 1365-1419/20) entra dans un monastère de Tarnovo, vécut au Mont Athos, puis fut accueilli au monastère du Pantocrator à Constantinople, avant de vivre en Serbie. Il sera élu métropolite de Kiev en 1414. Il conduisit la délégation orthodoxe russolituanienne au Concile de Constance et mourut sur le chemin du retour; cf. F. J. THOMSON, Gregory Tsamblak, the Man and the Myths, in Slavica Gandensia, 25/2 (1998), p. 1-149. 38 Ce qu’on désigne comme étant le «Synaxaire de Sirmond» est un manuscrit qui contient une version du synaxaire de Constantinople, conservé en son temps au collège de Clermont, à Paris, à l’époque où le jésuite Jacques Sirmond (1559-1651) y était bibliothécaire; les anciens Bollandistes l’utilisèrent à plusieurs reprises; il se trouve actuellement à Berlin (SB, ms. Gr. 219). Il servit de manuscrit de base à Delehaye pour son édition du Synax. CP. 39

Cf. P. M. ÉTIENNE, Des chances du retour de la Russie à l’unité catholique, sous le

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

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Je tâcherai de me procurer votre compte rendu sur ce livre anglais dont vous me parlez. Nous ne recevons pas ici l’Univers, mais je puis l’avoir, si je veux, du rédacteur du Journal de Bruxelles, qui me l’envoie même souvent lorsqu’il s’y trouve quelque article remarquable. Je finis, mon Révérend Père, en vous témoignant encore une fois ma reconnaissance, et en me recommandant à vos SS. Sacrifices et à vos prières. Votre serviteur en J. C., A. Tinnebroeck, S. J. 4.

Tinnebroeck à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Bruxelles, 5 décembre 185340

Mon Révérend Père, P. C. J’ai fait tirer deux exemplaires de plus des feuillets de notre dernier Auctarium, qui contiennent la Vie de Ste Parascève et le commentaire que j’y ai ajouté41. C’était dans le dessein de vous les envoyer, l’un pour vous, et l’autre, si vous le jugiez à propos, pour le pope de la légation russe [Vasil’ev]. Si j’avais eu la certitude que vous n’aviez pas quitté le collège de Vaugirard, je vous les aurais déjà fait parvenir depuis longtemps. Votre réponse à la présente, que je vous adresse à tout hasard au susdit collège, me tirera d’incertitude, et vous aurez ces pièces sous peu. Malheureusement, par une bévue de l’imprimeur, il manque une page à l’un des deux exemplaires; j’y suppléerai au moyen d’une épreuve que j’avais conservée. Cet envoi sera un faible gage de ma reconnaissance pour les peines que vous vous êtes données à ma demande, en attendant que je puisse vous la témoigner d’une manière plus efficace. Maintenant, je vous écris à la demande d’un de nos Pères qui s’occupe d’une notice sur le bienheureux André Bobola42. Il me prie de vous demander si vous savez quel est le clergé qui dessert actuellement l’église du collège de la Compagnie à Polotsk, et qui a par conséquent la garde du corps du bienheureux. Le Père Guillemaint, vieillard qui a demeuré en Russie43, a dit dernièrement que ce sont des popes russes attachés à l’école des cadets établie dans ce collège, et dont parle le Dictionnaire géographique récent d’Adrien Guibert44. Il a même ajouté que les schismatiques honoraient le bienheureux martyr, et croyaient qu’il avait été mis à mort par des infidèles. La notice insérée dans l’Univers rapporte au contraire que lorsque la dépouille mortelle du bienheureux eût été transportée à Polotsk par ordre de l’em-

rapport actuel de ses populations, dans le n° 5501 du 15 mars 1853 de L’Ami de la religion. 40

Cf. la réponse de Gagarin du 15 décembre 1853 (lettre 5).

41

AASS, Auctaria Octobris, p. 154*-*167.

42

DE BUCK, André Bobola.

43

Il y avait en fait deux jésuites, d’ailleurs frères, portant ce nom: Henri Guillemaint (1771-1855) et Jean-Baptiste Guillemaint (1780-1857), tous deux entrés dans la Compagnie en Russie en 1805. Il est difficile de savoir lequel des deux est ici évoqué. L’aîné résidait hors de la Compagnie, le cadet dans la communauté de Gand. 44

Dictionnaire géographique et statistique, Paris, 1850. La notice consacrée à Polotsk (Biélorussie) se trouve à la p. 1437. Nous n’avons pas découvert d’autres indications biographiques au sujet de Guibert que celle de sa mort prématurée, intervenue peu avant la parution de son Dictionnaire.

B. JOASSART

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pereur Alexandre45, on l’y déposa dans l’église des RR. PP. Dominicains, et qu’elle y repose encore aujourd’hui, entourée de la vénération des peuples, et exhalant une odeur délicieuse. Mais le Père qui me prie de vous consulter, me fait observer que cette notice fourmille d’erreurs et d’inexactitudes. Comme ce Père est pressé et devrait achever son œuvre aussitôt que possible, j’ose vous prier de ne pas différer trop longtemps votre réponse. Il vous en sera infiniment obligé, comme je le serai aussi pour ma part. Je suis en union de vos SS. Sacrifices et de vos prières, R ae Vae servus in Christo, A. Tinnebroeck, S.J. Bruxelles, veille de la fête de St Nicolas, patron de S. M. le Tsar, pour lequel, comme aussi pour tout son peuple, j’implorerai tout spécialement l’intercession de ce grand saint. Je pense que c’est mieux de faire cela que de les maudire comme le font certains catholiques. 5.

Gagarin à Tinnebroeck [ms. boll. 759-3, n° 357]

Solesmes, 15 décembre 1853

Mon Révérend Père, P. C. Vous avez eu bien raison de penser que je n’étais plus à Vaugirard; depuis les premiers jours de septembre, je fais partie de la maison de Laval46, où j’ai l’honneur d’enseigner l’histoire ecclésiastique, ce qui peut me donner l’occasion de l’étudier. Pour le moment, je suis occupé à donner les Exercices de St Ignace aux RR. PP. Bénédictins, qui se préparent ainsi chaque année à la rénovation de leurs vœux. C’est ici que votre lettre m’est parvenue hier soir et je commence par vous dire que je suis confus de la peine que vous voulez bien prendre à mon sujet. Ce n’est pas la bonne volonté qui m’a manqué, mais enfin je n’ai su vous donner aucune lumière, aucun renseignement; je crains bien de ne pouvoir pas faire aujourd’hui pour le B. Bobola plus que je n’ai su faire pour sainte Parascève et ce serait un vrai chagrin pour moi de penser que vous finiriez par vous rebuter et que vous ne vous adresseriez plus à moi; je vous prie de me donner l’occasion de vous témoigner ma bonne volonté. Depuis que j’ai reçu votre lettre, j’en ai écrit trois pour tâcher d’obtenir les renseignements que vous me demandez; dès que j’aurai reçu les réponses, je vous transmettrai tout ce qui pourra vous être de quelque utilité. En attendant, je vous dirai qu’on parle avec éloge d’une vie du B. Bobola, écrite en italien, par un Père dont le nom m’échappe, mais qui n’est pas le P. Boero 47. On m’écrit qu’on travaille aussi à quelque chose sur le Bienheureux au collège de Vaugirard; je ne sais pas ce 45 Cette translation des reliques d’André Bobola se fit en 1808, sous le règne d’Alexandre Ier (1777-1815), tsar de Russie depuis 1801. 46 Gagarin fit partie du corps professoral du scolasticat de Laval durant l’année académique 1853-1854. 47

Giuseppe Boero (1814-1884, jésuite en 1830) fut archiviste à la curie généralice de la Compagnie de Jésus et postulateur des causes de canonisation des Jésuites. On lui doit plusieurs ouvrages historiques et hagiographiques. Il fut assistant d’Italie de 1876 à 1883 (cf. G. MELLINATO, in DHCJ, 1, p. 469). Il s’agit vraisemblablement de l’ouvrage du jésuite Filippo Monaci (1808-1892, jésuite en 1824), professeur de collège, puis prédicateur pendant une quarantaine d’années, intitulé Vita e martirio del b. Andrea Bobola, Rome, 1853 (cf. SOMMERVOGEL, 5, col. 1199-1200).

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

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que cela peut être, à moins que ce ne soit une amplification de Patrignani 48, ou une traduction de l’italien; il doit avoir paru depuis peu une autre vie en polonais, par M. Kajsiewicz49, prêtre polonais de la Société des Pères de la Résurrection. Une traduction française doit paraître, si elle n’a déjà paru. L’article de l’Univers m’a déplu et j’ai appris depuis qu’il avait fait la même impression à nos Pères de Rome, à la Curie. On nous écrit aussi de Rome pour démentir le bruit qu’on avait répandu au sujet des démarches de l’ambassade russe à Rome pour empêcher la béatification; le P. Chiereghini50 nie qu’il y ait eu aucune opposition de ce côté. Je vous remercie bien, mon Révérend Père, de vos bonnes prières pour la conversion de mes compatriotes; oui, certainement, il vaut beaucoup mieux prier pour eux que les maudire. Cependant je me permettrai de vous dire qu’en Allemagne et chez vous, il me semble qu’on est peut-être un peu trop porté à l’indulgence, ou plutôt, on ne saurait avoir trop d’indulgence, mais à mon avis elle n’est pas toujours placée là où elle devrait être. Je ne crois pas qu’on puisse avoir trop d’indulgence dans le cœur et sur les lèvres pour les pauvres fidèles abusés, je dis fidèles, parce qu’il y en a beaucoup qui ont la foi; et ceux-là mêmes qui n’ont pas l’excuse de la bonne foi méritent une extrême compassion; j’étends ces mêmes sentiments aux membres du clergé schismatique, prêtres, moines et évêques. Je sais bien qu’ils ne sont pas à beaucoup près ce qu’ils devraient être, mais pour être ce qu’ils devraient être, il faudrait qu’ils puissent participer à la vie surnaturelle de l’Église, et on ne se fait pas une idée exacte de la nature des barrières qui les séparent de la vérité et du centre de l’unité. Je n’hésite pas à penser que, prêtres et laïcs, ils rentreraient en très grand nombre dans le sein de l’Église s’ils n’étaient pas écrasés sous le joug de la puissance temporelle, qui pèse sur eux bien plus encore que sur les catholiques. C’est là qu’est l’obstacle: émancipez-les seulement autant que l’Église anglicane, donnez un peu de liberté à leurs relations avec le dehors, laissez-les lire, laissez-les écrire, laissez-les voyager et vous aurez un mouvement vers l’Église catholique incomparablement plus rapide et plus important que celui dont nous sommes témoins en Angleterre. L’obstacle est donc dans le pouvoir laïc, qui concentre à je ne sais quelle puissance tout ce que le joséphisme, tout ce que la bureaucratie ont de plus révoltant. En considérant cet état de choses, je suis tenté de lui appliquer le mot de Tertullien: Caesaris christiani esse non possunt, quia Caesaris51. Ce n’est pas qu’il ne 48 Giuseppe Antonio Patrignani (1659-1733, jésuite en 1680) enseigna la grammaire à Florence pendant quelque 30 ans et fut chargé de rédiger le Menologio di pie memorie di alcuni religiosi della Compagnia di Gesù dall’anno 1538 fino all’anno 1728 (4 vol., Venise, 1730) (cf. M. ZANFREDINI, in DHCJ, 3, p. 3058-3059). 49 Józef Hieronim Kajsiewicz (1812-1873), patriote polonais, participa au soulèvement antirusse de 1830; après la défaite, il vécut en exil, étudia la théologie et devint, en 1842, membre fondateur de la nouvelle congrégation religieuse des Résurrectionnistes, dont il sera le supérieur général de 1845 à 1847 et de 1855 à 1873. Il exerça son apostolat parmi les émigrés polonais, surtout en France et en Italie (cf. B. MICEWSKI, in EK, 8 [2000], col. 344-345). 50 Giuseppe Chiereghini (1788-1854, jésuite en 1823) fut procureur général de la Compagnie de Jésus de 1834 à 1853. 51

Cf. Les prescriptions, n° XXXVII.

B. JOASSART

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puisse surgir un Constantin, le plus acharné des persécuteurs peut être converti et Saul devenir un Paul, mais après un Constantin, il me paraît impossible qu’il n’y ait pas des Constance, des Valens, des Julien et tout le Bas-Empire52. Voilà au moins, mon Révérend Père, comment je vois les choses et voilà pourquoi, si je souffre de voir enveloppé dans un anathème injuste un peuple et même un clergé qui ne sont dignes que de compassion, et auxquels il faudrait tendre la main, je souffre tout autant de voir enveloppé, dans le même sentiment d’indulgence et de charité, un principe qui, indépendamment des hommes, est par lui-même essentiellement hostile à l’Église, pour laquelle il n’a que des mépris, et dont il ne reconnaîtra jamais la royauté et la divine origine. Je me suis laissé aller à vous dire ce que je pense sur ce sujet, justement parce que j’accorde un très grand prix à votre opinion. Maintenant je passe à un autre sujet. Dom Guéranger53 prépare une histoire des martyrs les plus célèbres dans l’Église. Cet ouvrage, qui doit être moins un livre d’érudition qu’un livre d’édification à introduire dans les familles chrétiennes pour leur montrer la perpétuité du témoignage du sang dans l’Église, doit avoir environ six volumes et la moitié serait consacrée aux martyrs des derniers siècles. Plusieurs de nos Pères y figureront; il en mettra même quelques-uns qui ne sont pas sur les autels, comme le P. Edmond Campion54. Il me demande des renseignements sur le B. Josaphat, archevêque de Polock55. Pourriez-vous lui indiquer quelque chose ? Vous voyez par son plan qu’il n’est question que d’une notice et je vous avoue que je tiendrais beaucoup à répandre parmi les fidèles la dévotion à cet illustre martyr qui est le plus beau et trop rare fruit que l’Église russe catholique ait envoyé au ciel. Vous savez que la Compagnie peut le revendiquer presque comme un des siens, tant il avait de liens avec elle, et tant il lui était dévoué et attaché. Il avait l’habitude de dire que c’était un signe de prédestination que d’aimer la Compagnie. J’ai quel52 Si Constantin fit preuve de bienveillance à l’égard du christianisme, Constance II (337 à 361) et Valens (364 à 378) se montrèrent favorables aux Ariens, tandis que Julien, dit l’Apostat, César en Gaule de 355 à 361, puis empereur romain à part entière de 361 à 363, est bien connu pour sa tentative de rétablir le paganisme. 53

Prosper Guéranger (1805-1875) fut un temps proche de Lamennais. Il s’établit à Solesmes en 1833, dont il devint abbé en 1837, et fut l’artisan principal de la restauration des Bénédictins en France. Liturgiste, il fut l’une des personnalités les plus marquantes de l’ultramontanisme et du catholicisme intransigeant (cf. G.-M. OURY, Dom Guéranger, moine au cœur de l’Église, 1805-1875, Solesmes, 2000). L’ouvrage ici évoqué est ce qui deviendra Les Actes des martyrs, depuis l’origine de l’Église chrétienne jusqu’à nos temps, traduits et publiés par les RR. PP. Bénédictins de la Congrégation de France, 4 vol., Paris, 1856-1863, ouvrage qui ne dépassera toutefois pas le 4e siècle. La préface est signée par Guéranger. 54 Le jésuite Edmond Campion (1540-1581), martyr anglais, fut béatifié en 1886 et canonisé en 1970. 55

Jean Kuncevyč naquit au sein d’une famille orthodoxe, fut en contact avec les Jésuites durant son éducation et devint moine basilien à Vilnius sous le nom de Josaphat. Ayant assumé différentes charges importantes dans plusieurs monastères et ordonné prêtre en 1609, il fut nommé archevêque coadjuteur uniate de Polock en 1617 et archevêque titulaire en 1618. Zélé dans l’administration de son diocèse, il n’en fut pas moins assez dur à l’encontre des orthodoxes et fut assassiné en 1623. Il fut béatifié en 1643 et canonisé en 1867 (cf. Ch. HANNICK, in DHGE, 28 [2003], col. 45-46).

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

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que idée qu’il y a déjà quelque chose sur lui dans les Acta Sanctorum, mais je n’ai jamais pu trouver l’endroit. Quant aux deux exemplaires de Ste Parascève, dont vous avez la bonté de me parler, vous pourriez les adresser au P. Carayon 56, procureur de Province, 35 rue de Sèvres, Paris. Je lui écrirai pour le prévenir; il m’enverra un exemplaire et fera partir l’autre chez le prêtre russe [Vasil’ev] avec une lettre que je lui enverrai à cette occasion. Je n’ai plus que la place nécessaire pour signer. R. V. servus in Xo, J. Gagarin S.J. Veuillez présenter mes respects au P. Van Hecke et au P. De Buck. 6.

Gagarin à Tinnebroeck [ms. boll. 759-3, n° 358]

Laval, 3 janvier 1854

Mon Révérend Père, P. C. Nous possédons à notre bibliothèque les quatre volumes des Acta Sanctorum que vous avez publiés; aussi un de mes premiers soins dès qu’ils sont revenus de chez le relieur, a été de lire votre notice sur Ste Parascève: je n’ai pas besoin de vous dire avec quel intérêt. Je regrette vivement de ne pas me trouver en état de vous procurer la Vie de la Sainte par Grégoire Zamblak, mais si elle me tombe jamais sous la main, vous pouvez être sûr que vous en ferez votre profit. Excité par la lecture de vos savantes observations, j’ai lu avec attention et la plume à la main l’office de la sainte dans les ménées grecques; il est fort long et contient entre autres deux canons en son honneur. Au milieu des phrases diffuses et poétiques qui sont familières aux offices des Grecs, j’ai noté quelques points qui me semblent former une vigoureuse objection à l’époque que vous assignez à notre sainte. En effet, il semble qu’elle aurait vécu à l’époque des iconoclastes; on y lit ces paroles adressées à la sainte: «vous baisez avec amour l’image peinte, honorable et sainte, vous détruisez les écrits des impies, vous crachez sur leurs édits sacrilèges et vous proclamez honneur et adoration à l’image du Christ»; et ailleurs: «vos éclatantes lumières, Parascève, dissipent les ténèbres de l’hérésie»; et ailleurs encore on l’appelle «guide de ceux qui sont égarés, fermeté de ceux qui sont ébranlés par les souffrances»57. Les autres points portent sur la grande quantité de miracles, sur l’austérité de la pénitence, l’amour de la solitude et du silence, le jeûne, les larmes, etc., et sur l’innocence conservée dès l’enfance. Un autre passage nous permet d’affirmer que cet office est antérieur à la translation du corps de la sainte de Callicratia à Tarnovo, puisqu’il parle des miracles qui se font au tombeau de la sainte à Callicratia.

56 Auguste Carayon (1813-1874, jésuite en 1841), bibliothécaire et historien, publia une Bibliographie historique de la Compagnie de Jésus (Paris, 1864) et plusieurs volumes de Documents inédits concernant la Compagnie de Jésus (23 volumes publiés à Paris et Poitiers entre 1863 et 1870) (cf. P. DUCLOS, in DHCJ, 1, p. 648). 57

Parascève est honorée le 26 juillet dans les Ménées grecs. Les pièces constituant son dossier sont encore inédites, sauf BHG 1420p, éditée par Fr. Halkin (cf. Subs. hag., 51).

B. JOASSART

376

J’ai lu ensuite l’office de Ste Parascève, martyre, au 28 octobre58. Je ne sais pas pourquoi Assemani parle d’Iconium, à moins que là encore il n’y ait eu une translation59. Les ménées ne parlent que de Rome, mais elles en parlent à plusieurs reprises et elles traitent Ste Parascève comme une des plus illustres martyres de Rome et du monde, à tel point que je me suis demandé si ce n’est pas une des saintes martyres que nous honorons dans l’Église romaine, dont le nom seul aurait été changé, d’autant plus qu’il est dit dans cet office que ce nom de Parascève ou Vendredi lui a été donné en l’honneur de la passion du Sauveur et qu’elle a bien correspondu à ce nom en souffrant le martyre. Tout indique une persécution du temps des païens; il est question de sacrifices aux idoles; Parascève est frappée à coups de bâton, a les os brisés, tourmentée par le fer et le feu, par les liens, elle méprise les bêtes et finit son martyre par le glaive, la décollation. Voici les paroles que l’on met dans la bouche de la sainte parlant au tyran: «Président (ἡγεμών) impie, pourquoi persécutes-tu les Chrétiens? Je ne t’ai point enlevé de royaume, je n’ai point détruit ta ville, mais tu prétends me persuader par tes folles paroles. Je ne fais aucun cas ni de toi ni de tes discours insensés; je n’épargne pas ma chair pour mon Christ, parce qu’il m’aime et qu’il me donne un royaume. C’est à lui que j’irai, c’est de lui que je serai l’épouse, c’est lui qui me sauvera des mains de mes ennemis et me donnera une vie éternelle». Je n’ai trouvé trace d’aucune autre sainte Parascève aux autres jours indiqués. Je n’ai trouvé non plus aucune trace de Ste Parascève, fille du duc de Polotsk et sœur de Ste Euphrosyne; il paraît que les schismatiques n’en faisaient pas la fête. Ils doivent cependant la faire depuis 1839, époque de la réunion violente des Grecsunis à l’Église schismatique60. Les catholiques du rite grec avaient conservé jusque là une croix soigneusement travaillée et qui avait appartenu à Ste Euphrosyne: cette croix était en grande vénération. Les schismatiques s’étant emparé de toutes les églises catholiques du rite grec en 1839, s’emparèrent de cette croix; ils la firent reproduire par la gravure, ils la firent voyager dans toute la Russie pour l’exposer successivement dans les différents diocèses à la vénération des fidèles (c. à. d. des schismatiques); ce fut le principal trophée de leur victoire impie. Je ne désespère pas de pouvoir me procurer ce dessin et quelques détails sur cette croix; mais vous ne pouvez en parler qu’au 12 novembre et quand viendra le 12 novembre! 61 En attendant, je vous envoie un petit extrait d’un calendrier russe pour les derniers jours d’octobre. Cela pourra peut-être vous servir à quelque chose. 58 Le 28 octobre, les Ménées grecs honorent Anastasie de Rome ! Sur Parascève d’Iconium, voir A. VINOGRADOV, Saint Parasceve of Iconium and Her «Lost» Greek Acts, in AB, 131 (2013), p. 276-279. Le 28 octobre a été malencontreusement associé à Ste Parascève par Papebroch (Ephemerides Graeco-Moscae, in AASS, Maii t. 1 [Anvers, 1680], p. XLIX. 59 Kalendaria Ecclesiae universae…, studio et opera J. S. ASSEMANI, t. V, Rome, 1755, p. 287-296 et 322. 60 61

En 1839, Nicolas Ier annula purement et simplement l’union de Brest-Litovsk (1596).

Lors de la révolution bolchevique, cette croix fut prise par le Musée des Armes à Moscou; en 1928, elle fut transférée au musée de Minsk et, en 1929, elle fut transportée à Moghilev. Pendant la Seconde guerre mondiale, elle aurait été découverte par l’occupant allemand; on perd alors sa trace. En 1996, le métropolite de Minsk institua une commission chargée d’en faire fabriquer une copie, qui fut réalisée à partir d’un négatif photographique datant de 1896.

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

377

J’attends toujours des nouvelles sur le P. Bobola; je n’ai pu obtenir jusqu’à présent que quelques renseignements du P. Szczepkowskij62, prof. de philosophie à Laval; je vous les envoie. De plus, à l’entrevue d’Olmutz, l’empereur d’Autriche63 a dû demander le corps du Bienheureux à l’empereur de Russie et s’il l’obtenait, il devait le restituer à nos Pères de Galicie; mais je ne sais pas si la demande a eu vraiment lieu, si la réponse a été formelle et si le corps a été rendu64. Encore un mot: je vous annonce en confidence que D. Guéranger travaille à une vie de S. Benoît qui doit paraître en 185565. C’est un cadre pour exposer et défendre la question des réguliers, pour redresser les idées fausses répandues sur cette matière dans le clergé français et ailleurs, il doit y avoir une discussion assez délicate sur ou plutôt contre M. de Rancé66 et les trappistes, comme peu fidèles à l’esprit de S. Benoît et s’étant laissé entamer par des influences jansénistes, etc., etc. Il va puiser largement dans votre ouvrage contre Verhoeven 67. Il [grille]68 de voir paraître d’une manière ou d’une autre votre 2 e volume. Je vous dis cela, parce que cela peut vous intéresser; maintenant, je pense qu’il serait peu flatté de laisser la chose s’ébruiter avant le temps. On dit Louvain furieux contre la Civiltà. Adieu, mon Révérend Père, veuillez me rappeler aux bons souvenirs de tous vos collègues et confrères. R. V. servus in Xo, J. X. Gagarin S. J. P. S. J’oubliais une chose importante sur Ste Parascève, vierge et martyre (28 oct.). Il est dit d’elle qu’elle a sauvé sa ville d’une attaque nocturne des Sarrazins. Cela pourrait justifier le surnom d’Iconiensis, que lui donne Assemani (Kalend. Eccl. gr. mosch. XIII octobr.) Il faudrait alors supposer que ses reliques ont été transportées de Rome à Iconium ?!

62 Kasper Szczepkowskij (1823-1899, jésuite en 1858), Polonais, avait étudié la théologie à Laval (1848-1852) avant d’y enseigner la philosophie (1853-1855), puis de rentrer dans son pays, où il fut supérieur, Provincial, maître des novices et instructeur du Troisième an. Il fut aussi l’initiateur de la réouverture du collège de Cracovie (cf. Encyklopedia SJ Pol., p. 659). 63

Lors des émeutes de 1848, la cour de Vienne se réfugia à Olmütz; François-Joseph Ier monta officiellement sur le trône le 2 décembre 1848 et reçut l’appui du tsar Nicolas I er. Au cours de la conférence qui se tint à Olmütz dans les derniers jours de novembre 1850 et qui réunissait l’empereur d’Autriche, le tsar et le roi de Prusse Frédéric-Guillaume IV, la Prusse renonça à son leadership en Allemagne au profit de l’Autriche. 64

Le corps de Bobola fut inhumé dans l’église du collège de Pinsk. En 1808, il fut transféré à Polock. En 1922, les bolcheviques l’emportèrent à Moscou; l’année suivante, le Vatican put le ravoir, d’où il fut transféré, en 1924, dans l’église du Gesù; il fut ramené à Varsovie en 1938. 65

Cet ouvrage ne parut jamais.

66

Armand Jean Le Bouthillier de Rancé (1626-1700), réformateur des Cisterciens.

67 Hollandais d’origine, Marien Verhoeven (1808-1850), prêtre en 1831, enseigna le droit canonique à l’Université de Louvain à partir de 1835 (cf. J. WILS, in BNB, 26 [1936-1938], col. 653-654). Il fut l’auteur du De regularium et saecularium clericorum juribus et officiis liber singularis, Louvain, 1847, auquel Tinnebroeck et De Buck répondirent par leur Examen historicum et canonicum libri R. D. Mariani Verhoeven... De regularium…, Gand – Bruxelles, 1847. 68

Mot incertain.

B. JOASSART

378 7.

Tinnebroeck à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Bruxelles, 9 janvier 1854

Mon Révérend Père, P. C. Vous aurez reçu, il y a quelques jours, une lettre du P. De Buck 69. Comme j’étais fort occupé d’un travail que je tenais à achever, j’ai différé alors de vous écrire pour ma part, et j’ai prié le P. De Buck de vous accuser réception de votre remarquable lettre du 15 décembre, et de répondre pour moi à votre demande au sujet du B. Josaphat. Il a ajouté à sa lettre quelques exemplaires de son essai sur le B. André Bobola; ce que voyant, j’ai cru pouvoir tout aussi bien vous adresser directement les feuilles sur Ste Parascève, au lieu de les expédier pour Paris. L’intérêt que vous avez pris à mon travail sur cette sainte m’a grandement flatté. Quant à votre objection, j’en ai pris note pour l’avenir, c’est-à-dire pour les addenda et mutanda du mois d’Octobre, qui ne pourront trouver place que dans le dernier volume de ce mois. Mais croyez-vous réellement que ces phrases de l’office indiqueraient que la sainte a vécu à l’époque des iconoclastes, tandis que ni le Synaxaire ni la Vie écrite par Euthymius n’y font la moindre allusion ? Ne pourrait-on pas dire qu’elles ont été uniquement inspirées au mélode par la grande aversion que les Grecs avaient conservée pour les ennemis des saintes images ? J’ai dit dans mon Comm. Praev. que je ne connaissais pas autrement le P. Raphaël Levacovich que par la traduction de la Vie de Ste Parascève. C’est qu’alors je ne me rappelais pas ce que j’avais néanmoins lu plus d’une fois dans les Prolegomena du Glagolita Clozianus de Kopitar70, que ce Père franciscain était celui que la Propagande avait chargé de soigner l’édition du Missel et du Bréviaire des Slaves du rite romain, qui parut en 1631-1648, et qu’avec l’aide de l’évêque russe Terlecki il avait introduit dans ces livres liturgiques de très malencontreuses réformes grammaticales, en substituant des ruthénismes aux véritables formes glagolitiques. Il fut plus tard archevêque d’Achride. Depuis l’impression de notre Auctarium, j’ai trouvé aussi que l’église nommée Prezswyntytelorum par le P. Warełkowicz dans la lettre que j’ai citée (num. 25) a été bâtie en 1622 par le prince Basile, surnommé le Loup71, en l’honneur des trois saints docteurs Basile, Jean Chrysostome et Grégoire de Nazianze. Il y a, comme vous savez, chez les Grecs et les Russes une fête solennelle de ces trois saints au 30 janvier; et si je ne me trompe beaucoup, c’est d’eux aussi que le vaisseau de guerre Tri Sviatitelia, dont les journaux ont récemment parlé, doit avoir tiré sa dénomination72. Je vous remercie des détails que vous me donnez sur l’office de la S te Parascève du 28 octobre. Nous savons par là dès à présent que pour ce jour nous pourrons 69 Celle des 31 décembre 1853 et 3 janvier 1854 (cf. DANIELUK – JOASSART, Gagarin – Martynov – De Buck, lettre 1). 70

Jernej (Bartholomaeus) Kopitar (1780-1844), linguiste slovène, est l’auteur de la première grammaire scientifique de sa langue maternelle. Tinnebroeck fait ici allusion à son ouvrage Glagolita Glozianus…, Vienne, 1836. 71

Basile le Loup (Vasile Lupu) (1595-1661), Albanais d’origine, fut voïvode de Moldavie de 1634 à 1653. Il introduisit la langue roumaine dans l’enseignement et la liturgie. 72 Ce navire russe de 120 canons participa à la bataille de Sinope (30 novembre 1853) qui opposa les marines turque et russe; cette bataille, qui eut lieu au début de la guerre de Crimée, fut le dernier grand affrontement impliquant la marine à voiles.

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

379

utilement recourir à votre obligeance. Pour ce qui regarde Iconium, je vous ferai observer qu’Assemani n’est pas seul à mentionner cette ville; Kulczyński, cité par lui, en parle également (que n’ai-je l’ouvrage même de cet auteur !), et le calendrier traduit par le baron de Sparwenfeld porte à son tour: Et S. M. Parascevae dictae Piatnitsa, i. e. dies veneris, in Iconio passae sub Diocletiano anno 5590, filiae senatoriae (il faut lire probablement anno 5790). Il y a parmi les Collectanea des anciens Bollandistes à la bibliothèque de Bourgogne une Vie de Ste Parascève, fille du duc de Polotsk73. Ne l’ayant pas ici en ce moment, je ne puis en dire davantage; mais si vous teniez à en savoir quelque chose, je n’aurais qu’à faire prendre le manuscrit pour être à même de vous satisfaire. Tout ce que vous pourrez nous communiquer au sujet de la croix de Ste Euphrosyne, sera reçu par nous avec une extrême reconnaissance. Je prends maintenant le calendrier que vous avez eu la bonté de m’envoyer, et je vais vous soumettre un certain nombre d’annotations sur quelques saints qui y sont mentionnés, et pour lesquels le secours de votre charité et de vos lumières peut nous être d’une grande utilité. Suivent diverses indications de détail à propos de Hilarion de Moglena 74, la fête de la Vierge de Kazan, Jean de Rila75, Jacques Borovickij76, Arsène de Serbie77 et Abraham de Rostov78.

Il ne me reste d’espace, mon Révérend Père, que pour vous renouveler l’assurance de ma profonde gratitude pour toutes vos bontés. Je prie S te Parascève et les autres saints honorés dans votre patrie (à laquelle je m’intéresse tant, et que je recommande journellement au Seigneur) qu’ils daignent acquitter envers vous ma dette de reconnaissance. Rae Vae servus in Christo, A. Tinnebroeck, S.J. 73

Parascève de Polotsk mourut en 1239 au monastère du Sauveur Transfiguré. Cf. AEGS, p. 263 (Memoriae slavicae, 28 octobre) et l’article de Tinnebroeck Sainte Parascève, princesse de Polotsk, supérieure du monastère du Saint-Sauveur, près de Polotsk, in Précis historiques, 12 (1863), p. 489-494. La Vie ici évoquée se trouve dans le ms. KBR 8306-17, f. 8-9. 74 Hilarion de Moglena († 1164) est connu par une Vie écrite par Euthyme, dernier patriarche bulgare (1375-1393). Ce texte nous apprend qu’Hilarion eut à lutter contre les manichéens, les arméniens et les bogomiles (cf. DHGE, 24 [1993], col. 474). Cf. son dossier par V. De Buck, in AASS, Oct. t. 9 (1859) [21 octobre], p. 405-408. Martynov fit une assez longue présentation du personnage dans l’AEGS, p. 253-257. 75

Jean de Rila, moine bulgare ayant vécu entre les environs de 876 et 946 (cf. Chr. HANNICK, in DHGE, 27 [2000], col. 506-508). Cf. son dossier rédigé par V. De Buck, in AASS, Oct. t. 9 (1859) [22 octobre], p. 683-692. 76

Jacques Borovickij († 1540) est très peu connu. Selon une légende, en 1540, son corps, transporté par la rivière Msta, fut retrouvé à Boroviči, dans la région de Novgorod (cf. G. MAZZITELLI, in BSO, 1 [1998], col. 1018). Il fut présenté parmi les Praetermissi du 23 octobre dans les AASS, Oct. t. 10 (1861), p. 6. 77 Disciple préféré de S. Sabas, Arsène fut consacré archevêque de Serbie en 1231 et mourut en 1251 (cf. A. KOREN, in BS, 2 [1962], col. 481-482). Il fut présenté parmi les Praetermissi du 28 octobre dans les AASS, Oct. t. 12 (1867), p. 416. 78 Abraham de Rostov (12e s.; cf. G. GUAITA, in BSO, 1, p. 34-35). On verra plus loin les péripéties relatives à la préparation de son dossier par Matagne qui ne put le terminer, puis par Martynov.

B. JOASSART

380 8.

Gagarin à Tinnebroeck [ms. boll. 759-3, n° 359]

Paris, 25 octobre 1854

Mon Révérend Père, P. C. Il y a bien longtemps que je vous dois une réponse et je suis vraiment honteux de vous l’avoir fait attendre si longtemps; mais comme mes torts ne feraient que l’aggraver si je différais davantage, j’aime mieux vous avouer ma faute et vous en demander pardon. À Laval, je n’étais pas à même de résoudre les difficultés que vous aviez bien voulu me proposer; maintenant que je suis à Paris, j’espère pouvoir y parvenir plus facilement. Cependant, je ne le fais pas encore aujourd’hui; nous sommes dans les embarras d’un nouvel établissement et il faudra encore quelques jours ou même quelques semaines avant de pouvoir avoir sous la main les livres russes qui me seraient nécessaires pour répondre à vos questions. Aussi ces quelques lignes n’ont d’autre but que de faire un commencement de réparation vis-à-vis de vous et de vous offrir mes petits services; soyez bien persuadés, vous, mon Révérend Père et tous vos doctes collaborateurs, que je serai toujours très heureux de pouvoir vous être utile. Je voudrais aussi exprimer les mêmes sympathies et faire les mêmes offres de service au P. Terwecoren79; je prends le plus vif intérêt au succès de ses Précis. C’est une œuvre excellente et que je crois destinée à faire un très grand bien; je fais ce que je puis pour la faire connaître et la propager; je regrette seulement de ne pouvoir pas faire davantage. Nous avons eu l’autre jour ici le P. Gloriot80 qui nous a donné les renseignements les plus consolants sur l’action de la religion dans l’armée d’Orient 81; suivant lui, même à l’époque des croisades, on ne devait pas avoir sous les yeux un spectacle plus consolant que celui dont il a été témoin: il a reçu à Constantinople l’abjuration de deux officiers russes et il dit que les soldats sont très bien disposés pour la religion catholique; les soins qu’on a prodigués aux blessés russes, les sœurs de charité, les aumôniers ont profondément touché ces cœurs que le schisme tient plus éloignés du corps de l’Église que de son âme. Je me remue un peu pour les prisonniers de Bomarsund internés à l’Île-d’Aix82. Je trouve partout les meilleures dispositions et le plus grand empressement. On va leur envoyer des sœurs de charité, parmi lesquelles se trouvera une Russe convertie, la sœur Narychkin83; on leur enverra aussi 79 Édouard Terwecoren (1815-1872, jésuite en 1836) enseigna dans différents collèges et fonda en 1853 les Précis historiques, revue d’intérêt général centrée sur des questions d’histoire, et auxquels il fournit quantité d’articles (cf. O. VAN DE VYVER, in DHCJ, 4, p. 3783-3784). 80 Joseph Gloriot (1811-1855, jésuite en 1832) avait fondé la résidence jésuite de Dijon l’année précédente, quand il fut désigné comme aumônier du corps expéditionnaire français en Crimée. Au moment où est écrite cette lettre, il venait de rentrer en France pour accompagner les restes du maréchal de Saint-Arnaud, avant de repartir à Constantinople, où il mourut du typhus l’année suivante (cf. H. BEYLARD, in Jésuites Français, p. 134-135). 81

On était alors en pleine guerre de Crimée.

82

Bomarsund était une forteresse construite en 1832 par les Russes dans les Îles Åland, en mer Baltique, qui faisaient partie du Grand-duché de Finlande. Durant la guerre de Crimée, une expédition franco-britannique assiégea et prit la forteresse le 16 août 1854. Celle-ci fut détruite et ses défenseurs emmenés en captivité. 83

Nathalie Narychkin (1820-1874) appartenait à la haute noblesse russe et, malgré l’op-

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

381

des prêtres, et j’espère être du nombre, au moins pouvoir leur faire une visite. On parle beaucoup ici de nouvelles revues catholiques pour l’an prochain; il est question d’abord d’une revue gallicane, qui aurait à sa disposition beaucoup d’argent; il y aurait aussi une revue ultramontaine et traditionaliste, enfin il est fortement question d’une troisième revue qui doit se publier à Arras, avec l’approbation de Mgr Parisis84 sur chaque numéro; les principaux rédacteurs seraient les abbés Bouix85, Jules Morel86 et Martinet87. Cette revue, ultramontaine aussi, serait neutre sur la question du traditionalisme et sur celle des classiques chrétiens, elle s’abstiendrait. Les rédacteurs de La Civiltà m’ont envoyé l’autre jour un petit in-4°, qui contient l’apologie et l’histoire de leur œuvre, avec un très grand nombre de pièces justificatrices consistant en brefs, mandements, lettres, éloges, etc., etc. 88 C’est fort curieux; ils sont neuf, ils tirent à 12.000 exemplaires, ils ont leur imprimerie, qui imprime divers ouvrages dans l’intervalle entre les numéros, intervalle pendant lequel elle serait obligée de chômer; ils s’attendent à ne pas avoir toujours la même prospérité, ils font des épargnes, afin de pouvoir supporter les mauvais jours. Avez-vous connaissance de la vie du B. Claver par Daurignac ? C’est un pseudonyme, l’auteur est une femme qui se confesse au P. de Ponlevoy89, c’est d’elle qu’il est question dans le miracle du polype, Mlle S. au chapitre 37. En ce moment position de sa famille, passa au catholicisme en 1844. En 1848, elle entra chez les Sœurs de la charité de Saint-Vincent-de-Paul, à Paris. Elle vécut le reste de sa vie en France, étant entre autres supérieure de ses consœurs parisiennes de la paroisse Saint-Thomas-d’Aquin, rue SaintGuillaume, à Paris. Elle fut également souvent consultée par la grande-duchesse Hélène pour le gouvernement de sa congrégation de religieuses garde-malades (cf. J. GAGARIN, La sœur Natalie Narychkin des Filles de Saint Vincent-de-Paul, in Précis historiques, 23 [1874], p. 442-443). 84 Pierre-Louis Parisis (1795-1866), prêtre (1819) du diocèse d’Orléans, fut nommé évêque de Langres en 1834 et transféré au siège d’Arras en 1851. S’il se montra libéral dans le domaine de l’enseignement, il défendit le traditionalisme contre le rationalisme en matière de foi (cf. J.-O. BOUDON, in Sciences religieuses, p. 514-515). 85

Marie-Dominique Bouix (1808-1870) fut jésuite de 1825 à 1842. Vicaire à Paris, il séjourna à Rome de 1851 à 1855, puis fut vicaire général de l’évêque de Versailles, et sera conseiller de l’évêque de Montauban au concile Vatican I. Il contribua à restaurer les études de droit canonique en France, étant opposé au particularisme concordataire et gallican (cf. P. BRANCHEREAU, in Sciences religieuses, p. 91). 86 Jules Morel (1807-1890), ami de Lacordaire, fut d’abord disciple de Lamennais; à partir de 1845, s’étant soumis à Mirari vos, il collabora à L’Univers et fut un adversaire implacable du catholicisme libéral, publiant notamment une Somme contre le catholicisme libéral, 2 vol., Paris, 1877 (cf. Fr. LAPLANCHE, in Sciences religieuses, p. 487). 87

Antoine Martinet (1802-1874), prêtre du diocèse de Moûtiers.

88

Gagarin fait ici allusion à l’ouvrage intitulé Memorie della Civiltà Cattolica. Primo quadrienno 1850-53, Rome, 1853, et publié par les éditions de la revue. Imprimé à un petit nombre d’exemplaires, il n’était pas destiné à la vente mais à être offert aux amis de la revue. 89 Armand Frogier de Ponlevoy (1812-1874, jésuite en 1834) fut principalement prédicateur, spécialement en donnant les Exercices spirituels de S. Ignace. Il est notamment l’auteur d’une Vie du R. P. Xavier de Ravignan (Paris, 1860), son ami et maître, ainsi que des Actes de la captivité et de la mort des RR. PP. P. Olivaint, L. Ducoudray, J. Caubert, A. Clerc, A. de Bengy, de la Compagnie de Jésus (Paris, 1871; nombreuses rééditions). Il fut également Provincial de France de 1864 à 1873 (cf. P. DUCLOS, in DHCJ, 3, p. 3189-3190).

B. JOASSART

382

elle écrit la vie de St François-Xavier et elle n’a pour ainsi dire l’usage de sa main, de ses yeux et de sa tête que lorsqu’elle s’occupe de ce travail; tout le reste du temps, elle est incapable de rien faire. J’ai pensé que ces petits détails ne manquent pas d’intérêt pour un hagiographe90. Veuillez présenter mes respectueux hommages au P. Van Hecke, au P. De Buck, et ayez vous-même l’assurance de mon respectueux dévouement et de ma fraternelle amitié. R. V. servus in Xo, J. X. Gagarin, S.J. P.S. Nous avons dans la maison le P. Lerdo91, l’ancien Assistant d’Espagne, qui s’en va par Londres au Mexique. Il m’a dit que la béatification qu’on concéderait comme la plus prochaine parmi nos vénérables était celle du V. Berchmans 92. Le P. Perrone93 se remue beaucoup pour la faire marcher plus vite; il voudrait que la cérémonie se fît au Collège Romain pendant son rectorat. On dit, d’un autre côté, que le P. Perrone sera de la prochaine promotion au cardinalat94.

2. Édouard Carpentier – Jean Martynov Édouard Carpentier (1822-1868) naquit à Meulebeke (Flandre occidentale belge) et entra dans la Compagnie de Jésus en 1841. Il fut auxiliaire des Bollandistes entre 1846 et 1850, et définitivement agrégé à l’équipe en 1856. Il fournira une aide précieuse à Martynov pour la préparation de l’Annus ecclesiasticus graeco-slavicus, en particulier dans l’établissement des index. Il entreprit d’étudier de près l’hagiographie orientale. Entre autres dossiers destinés aux Acta Sanctorum, il rédigea ceux de S. Aréthas et ses compagnons, martyrs de Najrân95, et de Takla Hāymānot96, saint éthiopien qui vécut aux 7e-8e siècle97, à propos duquel il consulta Martynov à diverses reprises. D’autre part, il commença à composer 90

J. M. S. DAURIGNAC – pseudonyme de «Orliac» – , Histoire du bienheureux Pierre Claver, de la Compagnie de Jésus, Lyon – Paris, 1854. L’ouvrage en cours de rédaction sera publié sous le titre Histoire de saint François de Xavier…, 2 vol., Paris, 1857. 91

Ignace Lerdo (1786-1861, jésuite en 1817) fut Assistant d’Espagne de 1840 à 1853.

92

Jean Berchmans (1599-1621), scolastique jésuite, ne sera béatifié que le 28 mai 1865; sa canonisation sera célébrée le 15 janvier 1888. 93 Giovanni Perrone (1794-1876, jésuite en 1815) enseigna la théologie au Collège Romain à partir de 1824, où il sera aussi recteur et préfet des études. Consulteur de plusieurs Congrégations romaines, il fut un proche conseiller de Pie IX, notamment pour la préparation du dogme de l’Immaculée Conception et du concile Vatican I (cf. G. RAMBALDI, in DHCJ, 3, p. 3102). 94

Ce qui ne se fit pas.

95

AASS, Oct. t. 10 (1861) [24 octobre], p. 661-762.

96

Cf. le dossier dans les AASS, Oct. t. 12 (1867) [27 octobre], p. 383-390.

97

Cf. S. KUR, in Bibliotheca sanctorum, 12 (1969), col. 102.

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une histoire de la christianisation de l’Éthiopie sans toutefois pouvoir arriver au terme de son ouvrage. De santé fragile, il fut amené à séjourner à Monaco où il mourut prématurément sans avoir pu donner toute la mesure de son talent. 9.

Carpentier à Martynov [AFSI, BS Ma 2/6]

Bruxelles, 13 janvier [1862]

Mon Révérend Père, P. C. Évidemment, j’ai reçu votre excellent envoi, et je n’ai tardé de vous écrire que parce que je vous croyais dans la parfaite certitude qu’il m’est parvenu. Je vous remercie donc, mon Révérend Père, bien sincèrement de la peine que vous vous êtes donnée pour copier cette Vie et la traduire. Elle me semble écrite longtemps après les faits qu’elle rapporte et ne peut remonter tout au plus qu’au 7 e ou 8e siècle. En partie fondée sur les faits, elle y ajoute aussi beaucoup de choses controuvées mais me sera néanmoins très utile. Je vais écrire au R. P. Dutau98 que nous attendions l’envoi qu’il annonçait, mais je croyais qu’il était question de quelque partie de l’Usuard slave. N’étant pas attendu de sitôt, votre Gregorius ou Gregentius m’a fait d’autant plus de plaisir99. Je viens de lire le cardinal Scitovsky100 qui m’a beaucoup prédisposé en faveur des Hongrois. Mais on ne peut nier que leur séparation ne doive entraîner quatre ou cinq autres États à demander des concessions semblables, et affaiblir extrêmement l’Autriche. Que devient-elle alors à côté de la France et de l’Angleterre et que nous reste-t-il si certains pays viennent à déserter temporairement la cause catholique ? On oublie aussi que la Hongrie depuis longtemps paie une part relativement très faible dans le budget; et que fait-on de nos jours sans budget ? Quoi qu’on en dise, une constitution avec l’hérédité parlementaire basée sur la possession territoriale (non pas outrée cependant comme en Angleterre) est ce qu’il y a de plus solide de nos jours. Et il y a pour cela de magnifiques éléments et des éléments en grande partie catholiques en Autriche. Les autres systèmes ou n’ont pas encore subi l’épreuve des éléments de désorganisation que leur oppose la société moderne, ou bien ils l’ont ressentie fatalement. N’étant ni Autrichien ni Hongrois, pas plus l’un que l’autre, je désire plutôt ce qui est favorable à l’Église catholique tout entière, et voilà pourquoi je fais des réserves au sujet de ce beau travail101. 98

Adolphe Dutau (1829-1893, jésuite en 1848) résidait alors à l’école Sainte-Geneviève, à Paris, comme écrivain et étudiant en langues orientales. 99 Gregentios, évêque de Taphar, première moitié du 6e s., fêté le 19 décembre (cf. R. AUBERT, in DHGE, 21 [1986], col. 1385-1386). Il est pratiquement impossible de savoir ce que Carpentier vise ici, même si l’on sait par ailleurs que, suite à une autre lettre – non retrouvée –, Martynov répondit au bollandiste au sujet de divers manuscrits concernant ce personnage. 100 János Scitovszky (1785-1866), ordonné prêtre en 1809 dans le diocèse de Rozsnyó (Hongrie), enseigna la philosophie et la théologie avant d’être nommé, en 1828, évêque de son diocèse. Il fut transféré au siège de Pécs en 1839, puis à celui d’Esztergom en 1849, et créé cardinal en 1853. Carpentier fait ici référence à l’article de V. De Buck, Le cardinal Scitovsky, primat de Hongrie, in Précis historiques, 10 (1861), p. 545-553 et 569-580, repris en tiré à part publié à Bruxelles, en 1862. 101

Dans son article consacré à Scitovsky, De Buck mettait en évidence la situation parti-

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Pardonnez-moi ces réflexions qui me roulaient dans l’esprit, ayant commencé à vous écrire juste au moment où je terminais la lecture de l’étude. Je n’ai pas voulu dire cependant que la réalisation des projets centraux se fera, mais j’attache du prix au bon côté des tendances qui n’est pas à mépriser. Bref, je donne raison aux deux partis, mais à des points de vue différents. Tout à vous en N. S., Ed. Carpentier. Veuillez dire au R. P. Dutau que mes collègues préfèrent attendre pour décider si le tome X doit être remis à M. Delisle102, mais ils n’y sont pas contraires en principe. L’un d’eux croyait plus convenable, si la décision est affirmative, de ne présenter le volume qu’après la publication de l’article. Vous savez que nous faisons tout collegialiter103. 10. Carpentier à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

9 avril [1863]

Mon Révérend Père, Quelques détails concernant la correction des épreuves de l’AEGS.

Le P. V. De Buck désire que je fasse une table topographique des Memoriae slavicae et c’était bien mon idée, mais je vous enverrai la 1ère épreuve avec prière de corriger, car je ne connais pas le nominatif de toutes vos villes et provinces russes104. Quant à un Index rerum auquel j’avais d’abord songé, la préface peut en tenir lieu. Quelques détails concernant la correction des épreuves de l’AEGS.

Le sénateur de Lacoste105 me fait demander depuis trois semaines un exemplaire du Bulletin archéologique du cavaliere de Rossi106, ou du moins les renseiculière des possessions des Habsbourg, caractérisée notamment par la rivalité opposant Allemands et Hongrois; en même temps, il reconnaissait le bien-fondé de certaines revendications des Magyars dont le pays avait subi une profonde influence protestante; de plus il louait l’attitude à la fois ferme et prudente du cardinal en matière politique, le prélat occupant une place de premier plan dans la structure politique du pays. Il est vraisemblable que, vu les dissensions entre les différentes composantes des États des Habsbourg, Carpentier regrettait que cet État catholique ne puisse plus faire pièce à la France plutôt laïque et à l’Angleterre anglicane. Ajoutons enfin qu’en 1867, l’antagonisme entre Autrichiens et Hongrois trouvera un compromis avec l’instauration du dualisme consacrant l’existence de deux États sous un même souverain. 102 Léopold Delisle (1826-1910) entra à la Bibliothèque nationale de France en 1852, où il fut nommé conservateur des manuscrits en 1871, puis administrateur général en 1874, poste qu’il occupa jusqu’en 1905. On lui doit une œuvre particulièrement abondante en fait de publications d’érudition (cf. G. HUARD, in DBF, 10 [1965], col. 842-844). 103 Cette année-là, Dutau publia deux articles intitulés Les origines du christianisme en Arabie d’après les nouveaux Bollandistes, in Études, 7 (1862), p. 91-108 et 232-351, dans lesquels il présentait le dossier de S. Aréthas préparé par Carpentier. Il est probable que Dutau préférait que son étude paraisse avant que les Bollandistes envoient le tome 10 des AASS où figure le dossier. En outre, Carpentier évoque ici le fait que l’ensemble des Bollandistes prenaient – et prennent encore de nos jours – collégialement les décisions concernant la bonne marche de l’institution, de même qu’ils assument tous la responsabilité de leurs publications. 104 Les Memoriae slavicae de l’AEGS sont des notices plus ou moins longues sur des saints typiquement slaves, rédigées par Martynov; elles suivent les annonces des saints de chaque jour. L’index ici évoqué par Carpentier n’a pas été réalisé par lui. 105 Edmond de la Coste (1788-1870), belge, mena une carrière de fonctionnaire et d’homme politique, notamment comme sénateur libéral.

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gnements pour s’abonner. Le P. De Buck ne retrouve pas les livraisons qui lui sont parvenues jusqu’ici et dont il attend la suite. Pourriez-vous m’indiquer et, si ce n’est pas trop vous demander, le plus tôt possible, à quelle libraire on s’abonne à Paris, à quel prix et combien il y a de livraisons par an. On s’adressera de préférence à Durand, si l’on peut s’abonner à lui, ce que je crois assez probable. Mais veuillez ne pas encore prendre un abonnement. Je veux laisser la décision au noble vieillard qui mérite intérêt et dévouement. Vous recevrez aujourd’hui par le P. Maris107 tout ce qu’un chercheur comme Nicolaï108, au regard d’aigle, a pu découvrir. Mais écrivez-moi sans détours ce qui vous manque encore. Je m’efforcerai de vous procurer tout ce que vous désirez. Quelques détails de corrections des épreuves de l’AEGS.

Tout à vous in Xto, Ed. Carpentier. Autres détails de corrections des épreuves de l’AEGS.

J’ai inauguré une nouvelle manière de faire des tables de martyrologes, je vois avec plaisir que vous l’approuvez. 11. Carpentier à Martynov [AFSI, BS Ma 2/6]

Monaco, 21 décembre [1864]

Mon Révérend Père, P. C. En revenant de Courtrai à Bruxelles au mois de septembre, j’ai demandé à Nicolaï l’Annus ecclesiasticus sans gravures, dont nous avions parlé, mais cet incomparable commissionnaire l’avait déjà expédié à Paris. J’en ai alors pris provisoirement un autre à ma chambre pour écrire sur le culte d’un saint dont j’étais occupé, sauf à m’entendre ultérieurement avec V. R. Ayez la bonté de garder pour moi l’exemplaire sans gravures; l’été prochain, à mon retour à Bruxelles, où j’espère passer quelques mois, je renverrai celui que j’avais retenu. À moins que vous ne préfériez arranger cela directement avec Bruxelles. Faites ce que vous trouverez le plus commode. Je compte vous voir à Paris, Dieu aidant, l’été prochain. Le fr. Louis109 vous dira les nouvelles de ce petit pays. Quant à moi, je suis en retraite depuis cinq jours et ne puis écrire que le strict nécessaire. Mes respects et mes amitiés à l’occasion à tous les PP. que je connais à Paris. Commendo me plurimum R. V. SS. SS. et precibus. Rae Vae inf. servus in Xto Ed. Carpentier. 12. Carpentier à Martynov [AFSI, BS Ma 2/6]

Monaco, seconde moitié de 1865

Mon Révérend Père, P. C. J’avais demandé au P. De Buck qu’il me procurât à Paris une traduction de la Vie du moine éthiopien Tékla-Haimanot, que plusieurs regardent comme un saint 106 La publication du Bullettino di archeologia cristiana de Giovanni Battista de Rossi (1822-1894) commença précisément en 1863. 107

Lecture incertaine. Sans doute s’agit-il de Jean-Baptiste Maris (1814-?, jésuite en 1838), alors professeur de théologie au scolasticat de Vals. Il quitta la Compagnie en 1864. 108 109

Joseph Nicolaï (1806-1886, frère coadjuteur en 1844) était auxiliaire des Bollandistes.

Sans doute s’agit-il de Louis Tuerlings (1836-1897, frère coadjuteur en 1858) qui était entre autres infirmier du collège de Bruxelles.

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catholique. Il vivait au commencement du 7e siècle, quand les patriarches d’Alexandrie étaient tantôt orthodoxes (S. Jean l’Aumônier † 616)110, tantôt hérétiques (Benjamin111, etc.). Il était donc dans le cas des Russes dont parle Papebroch. Sa Vie existe en arabe à la Bibliothèque impériale. J’avais à Bruxelles le catalogue des manuscrits éthiopiens de M. Antoine d’Abbadie112 et il est peut-être en route pour Monaco dans la caisse de livres expédiée de Bruxelles le 8 décembre. J’ignore si dans ce catalogue se trouve la Vie éthiopienne de Tékla-Haimanot; elle n’est pas marquée dans mes notes113. Si elle y était, je voudrais qu’on demandât au nom des Bollandistes une traduction à M. d’Abbadie en latin ou en français. Ce serait à vérifier avant de faire aucune démarche. J’avais écrit au P. V. De Buck de faire la demande s’il y avait lieu parce que, résidant ici, je ne parais pas appartenir au bollandisme. Il l’a d’abord un peu négligée, puis, lorsque je lui ai écrit que je m’occupais d’autres travaux, n’ayant presque plus rien à faire pour les Acta, il m’a répondu que V. R. est de retour à Paris et Remi allait lui en écrire. Je ne sais où les choses en sont, mais vous ferez bien, s’il faut traduire de l’arabe, d’en écrire d’abord à Bruxelles, parce que je n’ai pas ici de quoi payer. Cette Vie est mal indiquée dans le catalogue des manuscrits arabes, in-folio, 1740, tome 1, si je ne me trompe vers le n° ou la page 100, verso, au haut de la 1 ère colonne. On écrit Iakla au lieu de Tékla, etc., confusion des points diacritiques. Si Antoine d’Abbadie a le manuscrit et s’il a envie de traduire, son nom sera mis dans les Acta; je lui adresserai aussi un Aréthas, mon dernier, si vous le trouvez utile. Je dis mon dernier; il m’en reste cependant un légèrement mutilé, qui a été racheté dans une vente de livres. À ce propos, je vous dirai que j’en ai envoyé un à votre ami de la Bibliothèque royale de Berlin, M. Gosche114, si je ne me trompe. Je ne me rappelle plus son nom avec certitude. J’ai appris par le P. V. De Buck et par d’autres voies, avec le plus grand plaisir, ce que la Providence a permis d’entreprendre encore pour le bien de vos compatriotes, la canonisation du B. Josaphat, etc.115 110

Jean l’Aumônier fut patriarche d’Alexandrie de 610/11 à sa mort en 617/18.

111

Benjamin Ier (vers 590-665), patriarche copte d’Alexandrie en 626.

112

Antoine Thomson d’Abbadie (1810-1897), né en Irlande d’un père basque et d’une mère irlandaise, est particulièrement connu pour le voyage d’exploration de l’Éthiopie qu’il fit pendant une dizaine d’années et l’amena à publier plusieurs ouvrages sur ce pays (cf. F. FROIDEVAUX, in DBF, 1 [1933], col. 35-41). L’ouvrage que Carpentier évoque est le Catalogue raisonné de manuscrits éthiopiens appartenant à Antoine d’Abbadie, Paris, 1859. 113 Comme l’indiquera Carpentier dans la lettre suivante, cette Vie est répertoriée sous le n° 40, p. 18, dans le catalogue d’Abbadie. 114

Richard Gosche (1824-1889) fut bibliothécaire de la Bibliothèque royale de Berlin à partir de 1847, où il était responsable des manuscrits arabes; il enseigna à l’académie militaire de Berlin à partir de 1860, puis les langues sémitiques à l’Université de Halle à partir de 1862 (cf. DBE, 4, p. 100). 115 Josaphat Kuncevyč (c. 1580-1623), archevêque de Polotsk et martyr, avait été béatifié en 1642. En 1864, Pie IX fit part de son intention de le canoniser; le 8 janvier 1865, il sollicita l’avis de la Congrégation des Rites qui répondit favorablement, cet avis étant avalisé par le pape le 2 mai suivant. La bulle de canonisation est datée du 8 juillet 1867.

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Ayez la bonté de remettre le billet ci-inclus au R. P. Toulemont116. Priez un peu pour un pauvre malade de Monaco. Rae Vae servus inf. in Xto, Éd. Carpentier S. J. D’Abbadie a déjà traduit de l’éthiopien le livre d’Hénoch. Voici le titre du livre que vous aurez peut-être à demander à la bibliothèque impériale pour vérifier: d’Abbadie, Catalogue raisonné de manuscrits éthiopiens appartenant à Ant. d’Abb., 1859, in 4to. Le point douteux est celui-ci: y trouve-t-on la Vie éthiopienne de TéklaHaimanot ? J’en doute quelque peu et dans ce cas d’Abbadie ne pourrait pas nous rendre service. 13. Carpentier à Martynov [AFSI, BS Ma 2/6]

Monaco, 8 janvier [1866]

Mon Révérend Père, P. C. Je viens de recevoir de Bruxelles une caisse de livres, parmi lesquels se trouve le Catalogue raisonné des manuscrits éthiopiens de M. Antoine d’Abbadie, Paris, 1859. À la page 48, sous le n° 40, j’y trouve la vie de Tekla Haymanot. La Vie occupe 12 pages seulement, et les miracles 14. Si vous pouviez obtenir de M. d’Abbadie la traduction des 12 pages de la Vie, vous rendriez le plus grand service aux hagiographes. Tekla Haymanot a été considéré comme un saint catholique pour les raisons que je crois vous avoir indiquées, au moins en partie; et d’ailleurs, sa Vie est importante pour l’histoire de l’Éthiopie. S’il est omis cette fois, il ne paraîtra plus jamais dans l’œuvre, parce qu’il ne se trouve dans aucun ménologe catholique, pas même dans le vôtre. Sa vraie place est cependant dans le tome XII où je donne tous les saints catholiques de l’Éthiopie. Il est vrai que j’ai son synaxarium ou elogium, tiré du grand Senkessar ou Synaxarium des Éthiopiens, mais c’est moins authentique que cette très ancienne Vie117. Mais en examinant l’analyse du codex 45 des mss éthiopiens du musée britannique (Dillmann118, Catalogue codd. mss oriental. qui in Musaeo Britannico asservantur, pars tertia, codices aethiop., Londini, 1847, pag. 49), qui contient également la Vie de Tekla Haymanot (fol. 1 à 112), je vois que le ms. de M. d’Abbadie doit être incomplet, ou bien c’est un abrégé; mais M. d’Abbadie dit cependant qu’il est écrit dans le gèz le plus pur. En tout cas, si vous pouvez me rendre M. d’Abbadie favorable, il pourrait me rendre les plus grands services. Pourquoi ne l’avez-vous pas dit plus tôt, me direzvous ? J’en ai écrit depuis longtemps au P. Victor De Buck, parce que je croyais que, de Bruxelles, on obtiendrait bien plus vite quelque chose que d’ici, et pour un 116

Pierre Toulemont (1826-1889, jésuite en 1856) fut envoyé à Paris en 1862. Il y passera toute sa vie comme «écrivain», entre autres en tant que rédacteur des Études (cf. SOMMERVOGEL, 8, col. 158-160). 117

Le synaxaire a été édité dans Patrologia Orientalis, 9/4, n° 44, 1913, p. 377 [581]-383 [587]; cf. D. NOSNITSIN, The Ethiopic Synaxarion: Text-Critical Observations on Täklä Haymanot’s Commemoration (24 Nähase), in Orientalia Christiana Periodica, 73 (2007), p. 141-183. 118

Christian Friedrich August Dillmann (1823-1894), orientaliste et bibliste allemand, enseigna dans différentes universités de son pays. Spécialiste des manuscrits éthiopiens, il contribua au renouveau de l’intérêt pour ce type de recherches (cf. F. W. BAUTZ, in BBK, 1 [1990], col. 1306).

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malade très menacé alors. Le P. Victor m’a écrit, le 20 novembre dernier, que vous étiez de retour à Paris et que son frère allait vous écrire au sujet de Tekla Haymanot. Mais ils sont fort occupés maintenant l’un et l’autre de la préparation du 12e volume119 et je ne sais si en réalité on vous a écrit à ce sujet. D’autre part je viens d’échapper complètement à la crise d’hiver, dont j’avais encore souffert un peu l’année dernière et ma santé semble assurée pour beaucoup d’années. J’ai même l’espoir maintenant assez fondé de m’acheminer lentement vers une guérison. Depuis que je suis ici, je n’ai jamais été aussi bien. Mes sœurs font sans cesse des neuvaines pour moi dans quelques couvents belges et je ne manque pas de m’y unir. On lit souvent dans les Vies des Bollandistes qu’ils ont été guéris par les saints, et il y a des raisons d’espérer la même chose pour moi. Je n’ai jamais eu plus de confiance. Mais jusqu’au mois d’août, ne connaissant pas la maladie, je faisais usage de mauvais remèdes et n’obtenais aucun progrès. Il y avait beaucoup moins d’espoir alors de guérir, ou même de vivre encore longtemps. Voilà pourquoi je ne songeais pas [du] tout à Tekla Haymanot. Voici en quoi je fais un appel à l’obligeance de M. Antoine d’Abbadie: 1° pour la Vie de Tekla Haymanot, si elle en vaut la peine; j’annoncerai dans ce volume la publication à faire tôt ou tard de la grande Vie indiquée par Dillmann pour stimuler au moins les successeurs; 2° ou bien la Vie d’Aragassi traduite pag. 52 du catalogue de M. d’Abbadie. Elle est importante quoique moins que la 1ère; 3° à la page 190 du même catalogue, il est fait une mention assez détaillée de la liste des évêques de l’Éthiopie, qui n’a jamais été publiée. Quoiqu’elle ne soit qu’une simple liste de noms propres, nos missionnaires, Ludolf120 et Sapeto121, en parlent souvent et ces noms propres par les synchronismes peuvent souvent aider à éclaircir l’histoire. Si donc vous pouvez l’obtenir de M. d’Abbadie, je la publierais comme extraite de ses mss. Je pense devoir être prêt pour Pâques. Il me tarde donc beaucoup d’avoir un mot de réponse de V. R. Si je retourne à Bruxelles, comme je l’espère certainement, comptez sur moi en toute occasion. J’ai ici votre Ménologe (thesaurus ingens) sur les tables duquel j’ai un mot d’explication à vous donner la prochaine fois. Tibi addictissimus in Xto, Ed. Carpentier, S.J. Dillmann, Zeitschrit d. deutschen morgenl. Gesellschaft, tom. 7, parle de cette Vie d’Aragawi122 très favorablement, pag. 348 et ibid. en note123. Ce qu’il en cite est exact. 119

C’est-à-dire le tome 12 des AASS d’Octobre.

120

Hiob Ludolf (1624-1704) étudia à Erfurt la médecine, le droit, la musique et surtout les langues orientales. Il fut l’un des meilleurs connaisseurs de l’Éthiopie de son temps et publia une Historia Aethiopica à Francfort en 1681 (cf. S. UHLIG, in Encyclopedia Aethiopica, 3 [2007], p. 601-603). 121

Giuseppe Sapeto (1811-1895), entra chez les Lazaristes et fut entre autres missionnaire en Éthiopie de 1838 à 1844 et de 1849 à 1855. Il quitta sa congrégation en 1862. Rentré en Italie, il fut professeur de langue et de civilisation arabes, tout en remplissant quelques missions diplomatiques destinées à favoriser l’expansionisme colonial italien (cf. Fr. SURDICH, in Encyclopedia Aethiopica, 4 [2010], p. 533-534). 122 Aragawi (Zamika’el Arägawi) (6e s.), moine syrien, est l’un des neuf saints de l’Église orthodoxe d’Éthiopie auprès de laquelle ils avaient trouvé refuge à l’époque des controverses

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3. Henri Matagne, Jean Gagarin et Jean Martynov Henri Matagne (1833-1872) naquit à Namur et entra dans la Compagnie de Jésus en 1851. Durant l’année académique 1855-1856, il s’initia aux travaux hagiographiques auprès des Bollandistes. Au terme de sa formation, il fut professeur de rhétorique au collège de Gand (1861-1862), puis d’exégèse et de langues orientales au scolasticat de Louvain (18631865) avant de rejoindre définitivement l’atelier bollandien où il se verra chargé d’étudier les saints de l’Orient chrétien. Lui aussi mourut prématurément, frappé de congestion cérébrale. On n’a conservé de lui que deux lettres à Gagarin. La première touche à un sujet fort éloigné de l’hagiographie: on est à la veille de Vatican I et elle traite de l’infaillibilité pontificale, objet de bien des débats. L’autre évoque son projet de préparer le dossier d’Abraham de Rostov, dossier qu’il ne pourra achever et que Martynov rédigera lui-même. Les échanges épistolaires avec Martynov furent plus abondants. On peut y voir le bollandiste, qui fait ses premiers pas dans le domaine oriental, regarder son confrère russe comme un maître, en particulier dans la recherche de manuscrits arméniens et d’instruments de travail. 14. Matagne à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Bruxelles, 21 octobre 1869

124

Mon Révérend Père, P. C. Je suis bien heureux d’avoir une conversation avec vous par lettre, puisque je ne puis pas espérer de l’avoir bientôt de vive voix. L’ouvrage de Mgr Maret125 et en général tout ce qui regarde le concile excite un vif intérêt parmi nous, pourvu que les pièces et les livres soient écrits en français. Les ouvrages allemands ne nous ar-

qui suivirent le concile de Chalcédoine (451). Ces personnages ont beaucoup contribué au développement du christianisme éthiopien, notamment par la traduction du Nouveau Testament en langue locale (cf. A. BRITA, in Encyclopaedia Aethiopica, 3 [2007], p. 1188-1191). 123

A. DILLMANN, Zur Geschichte des abyssinischen Reichs, in Zeitschrift der deutschen morgenländischen Gesellschaft, 7 (1853), p. 338-364. 124 Il est fort probable que Matagne avait discuté avec Gagarin du long article que Matignon (cf. note 128) préparait, Une résurrection du gallicanisme, in Études (t. 23, p. 614-650 et 659-693), et dans lequel il présentait l’ouvrage de Maret (cf. note 125), Du concile général et de la paix religieuse (Paris, 1869). 125 Prêtre (1830) du diocèse de Paris, Henri Maret (1805-1884) devint professeur de théologie (1841), puis doyen (1853) de la faculté de théologie de la Sorbonne. Il fut effectivement nommé évêque de Vannes par Napoléon III en 1860, mais sa nomination ne fut pas acceptée par Rome. Il sera toutefois sacré évêque titulaire de Sura en 1861. Mennaisien et traditionnaliste à la manière de Bonald, partisan d’une voie moyenne entre l’ultramontanisme ambiant et le gallicanisme de Bossuet, il s’opposa à la définition de l’infaillibilité pontificale (cf. Cl. BRESSOLETTE, in Sciences religieuses, p. 445-446).

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rivent guère; ainsi nous ne connaissons Janus126 que par les journaux. C’est assez vous dire que je ne puis vous répondre touchant les falsifications mentionnées par cet auteur. S’agit-il de reproches analogues à ceux que fait le pauvre Ffoulkes dans son livre Christendom’s divisions127 où il accuse les Latins de s’être servis bien souvent de documents apocryphes pour prouver l’infaillibilité du Pape et la procession du St-Esprit. Le fait est vrai, mais comme vous le savez, la bonne foi des Latins n’est pas en cause. La critique et les connaissances bibliographiques faisaient nécessairement défaut au Moyen Âge. J’attendrai donc des renseignements plus précis avant de répondre sur ce point. Quant à la seconde difficulté, il me semble qu’il n’y a pas de contradiction entre le P. Matignon128 et moi. Il est vrai que les théologiens emploient souvent les mots doctor privatus, lorsqu’il s’agit de documents qui n’émanent pas ex cathedra, ou en d’autres termes de documents non infaillibles. Mais on ne [se] sert pas d’ordinaire du mot lettres privées pour désigner les lettres où le Pape – parlant comme Pape – n’impose cependant aucune croyance de foi. J’avoue que je regarde l’expression doctor privatus comme mal choisie. En effet, le moyen de dire qu’Honorius, répondait à Sophronius sur une question qui divisait l’Orient tout entier, soit regardé comme doctor privatus129. Je réserverais cette expression pour les œuvres et les discours propres au Pape et ne renfermant aucune injonction, aucun enseignement adressé à tout le monde. Je distingue donc: 1°) les documents ex cathedra où le Pape impose une croyance; 2°) les actes pontificaux où le Pape, usant de son pouvoir, s’adresse à toute l’Église ou à quelques Églises en particulier, soit pour leur donner un avis, ou pour réprimander, ou pour encourager, ou pour accorder des faveurs, etc. La plupart des 126 Il s’agit d’Ignaz von Döllinger (1799-1890), ordonné prêtre en 1822, qui enseigna à l’université de Munich à partir de 1826. Ayant refusé d’accepter le dogme de l’infaillibilité pontificale, il fut excommunié et cessa tout ministère et toute pratique dans le catholicisme, sans toutefois rallier l’Église des Vieux-catholiques (cf. V. CONZEMIUS, in LTK, 3 [1995], col. 306-307). «Janus» était un pseudonyme sous lequel Döllinger publia Der Papst und das Konzil, Leipzig, 1869. 127 Edmund Salsbury Ffoulkes (1819/20-1894) étudia à Oxford où il devint fellow en 1843 et fut ordonné prêtre anglican. En 1855, il se convertit au catholicisme, mais revint à l’anglicanisme quinze ans plus tard. L’ouvrage ici évoqué est Christendom’s Divisions. Being a Philosophical Sketch of the Divisions of the Christian Family in East and West, Londres, 1865. 128

Ambroise Matignon (1824-1913, jésuite en 1845) enseigna pendant quelques années la théologie au scolasticat de Laval, mais fut suspecté d’ontologisme. Il fit partie de l’équipe des Études de 1858 à 1871. Certains de ses articles (notamment sur la liberté et sur l’infaillibilité du pape) suscitèrent les critiques de Pie IX qui le considérait comme trop libéral. Après 1871, il appartint à la résidence parisienne de la rue de Sèvres, où il fut supérieur, prédicateur et directeur spirituel (cf. P. DUCLOS, in DHCJ, 3, p. 2577). 129 La phrase est ainsi formulée par Matagne. Rappelons que le pape Honorius (625-638) fut pris dans la controverse monothélite, usant, dans certains documents, de formulations qui pouvaient laisser croire qu’il fût hérétique. Par ailleurs, il enjoignit à Sophrone, patriarche de Jérusalem (634-638) et opposant au monothélisme, de ne plus aborder la question (mais on ne connaît cette injonction que par le biais d’une lettre adressée à Serge, patriarche de Constantinople [610-638]). Le cas d’Honorius servit d’argument aux opposants à l’infaillibilité pontificale.

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brefs et des bulles et des anciennes lettres des papes appartiennent à cette catégorie. Je ne crois pas qu’on puisse les appeler lettres privées, ce qui signifie en français des lettres non officielles. Bien des instructions ou des avis émanant des conciles ont une valeur analogue. Exempli causa, le Decretum ad Armenos130. Ces actes ont une autorité plus ou moins grande d’après les circonstances, les termes, etc., mais ils ne sont pas irréformables. 3°) Les lettres purement privées. Les brefs du secrétaire des lettres latines, les allocutions au consistoire – par exemple –, le discours où Sixte V soutient que les papes sont infaillibles dans la canonisation. Ce sont des opinions particulières. Je dirai de ce discours avec Benoît XIV, locutus est ut doctor privatus131. Les approbations des conciles appartiennent à la première catégorie et sont des actes ex cathedra parce qu’ils mettent le sceau aux délibérations et aux décisions du concile. La lettre d’Honorius appartient à la seconde catégorie, ainsi que les réponses de Nicolas aux Bulgares132. Des erreurs peuvent s’y glisser. Rien de tout cela n’est contraire aux opinions du P. Matignon. Pas de nouvelles ici, si ce n’est que le P. Van Hecke a donné sa démission. Le P. Bossue devient praeses, le P. Remi De Buck procureur, et votre serviteur bibliothécaire. Le P. Victor attend pour partir qu’on l’appelle133. Il n’a aucune envie de partir longtemps avant l’époque où il faudra travailler. Il peut faire ici bien des choses qu’il ne ferait pas là-bas. Je me recommande à vos bons souvenirs. Votre tout dévoué H. Matagne. 15. Matagne à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Paris, 16 juillet [1870]

Mon Révérend Père, Je compte avoir le plaisir de vous voir dans le courant de la semaine prochaine, lundi ou mardi. J’ai dû retarder mon voyage, parce que je ne pouvais interrompre le dépouillement d’un imprimé que M. Dulaurier a bien voulu me confier pour quelques jours134. 130 En août 1439, une délégation arménienne se présenta au concile de Florence, désireuse de discuter certains points de doctrine et sollicitant l’aide de l’Occident face à l’Islam. Le décret Exultate Deo (22 novembre 1439) synthétisait les résultats de ces échanges, les Arméniens ayant accepté les formules élaborées selon la pensée thomiste à propos de la Trinité, de l’humanité du Christ et des sept sacrements. 131 Dans le livre 1, ch. 42, n° 2 de son De servorum Dei beatificatione, et beatorum canonizatione, Benoît XIV (1675-1758, élu en 1740) évoque le discours prononcé par Sixte V (1520-1590, élu en 1585) lors du consistoire de 1588 tenu pour la canonisation de S. Didace, dans lequel il défendait l’infaillibilité pontificale. Dans ce passage, Benoît XIV examine longuement cette question de l’infaillibilité des papes en matière de canonisation. 132

Lorsque Boris (†907), prince de Bulgarie, se convertit au christianisme, il n’obtint pas de Photius l’aide souhaitée pour l’organisation de la nouvelle Église; il se tourna vers Rome et posa au pape Nicolas Ier (858-867) une série de 106 questions concernant la foi, la morale et la discipline, auxquelles le pape répondit et qui alimenteront le différend entre Rome et Constantinople. 133 134

Il s’agit de son départ pour le concile Vatican I.

Édouard Dulaurier (1807-1881) étudia d’abord l’arabe et le turc, et s’intéressa surtout à l’Égypte ancienne. Puis, il se tourna vers la langue javanaise et celles du groupe malayo-

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Le P. Martinof me fait dire de Rome qu’il a l’histoire de Macaire 135 chez lui. C’est dommage, car c’est la principale source pour l’histoire d’Abraham de Rostov. En attendant le plaisir de vous voir, votre tout dévoué in Xto, H. Matagne.  ȗ ȗ ȗ 16. Matagne à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 14 novembre 1865

Mon Révérend et cher Père, P.C. La Russie est tellement orientale et orientaliste, qu’on ne peut faire un pas vers le Levant sans son aide. Cela veut dire en bon français que le P. Matagne, nouveau bollandiste, a le plus grand besoin du secours du P. Martynov. Il me faudrait quelques documents arméniens, comme V. R. le verra par ma lettre ci-incluse, adressée au P.+++136 à Venise. Si vous trouvez la chose bonne, ne pourriez-vous pas, M. R. Père, envoyer cette lettre à St-Lazare137 ? Ou bien, si vous jugiez devoir faire autrement, auriez-vous l’extrême obligeance d’adresser aux Méchitaristes, en votre nom, les demandes que contient ma lettre ? Enfin, faites tout pour le mieux: vous êtes, par votre Menologium slavicum, trop bollandiste pour ne pas être obligé par toutes les lois divines et humaines, de rendre service à un confrère. Mille remerciements par anticipation et salut bien cordial, bien amical, par-dessus le marché. Je me recommande aux prières de V. R. Servus in Xto, H. Matagne. 17. Matagne à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 11 février 1866

Mon bien cher Père, Demande d’éclaircissements sur un passage de l’Histoire, dogmes, traditions et liturgie de l’Église arménienne orientale, avec des notions complémentaires sur l’origine de cette liturgie, les sept sacrements, les observances, la hiérarchie ecclésiastique, les vêtements sacerdotaux et la forme intérieure des églises chez les Arméniens, traduction d’un ouvrage russe et arménien faite par Dulaurier (Paris en 1855); ce passage concerne une citation de l’historien arménien Moïse de Khorène à propos des saints Chryses et Soukias et de leurs compagnons respectifs, martyrs arméniens du 2e siècle.

polynésien (il fut un temps le seul Français à entendre ces idiomes). Enfin, il étudia plus particulièrement l’arménien, qu’il enseigna à l’École des langues orientales vivantes (cf. ROMAN D’AMAT, in DBF, 12 [1970], col. 71-72). L’imprimé ici évoqué n’a pas pu être identifié. 135 Makarij (Michail) Moskovskij (Макарий [Михаил] Mосковский) (1482-1563), fut moine de Saint-Paphnuce à Borovsk, ordonné évêque de Novgorod en 1526, et élu métropolite de Moscou en 1542. Il est l’auteur des Grands Ménées dont une édition fut commencée en 1868, mais qui, arrêtée en 1917, ne put toutefois pas être achevée (cf. St. VIRGULIN, in BSO, 2, col. 367-373). Martynov était alors à Rome comme expert au Concile Vatican I. Au sujet des Ménées de Macaire, cf. U. Zanetti, Les «Grands Ménées» de Macaire de Moscou. Inventaire et sources grecques (1-11 mars), in AB, 116 (1998), p. 331-353. 136

Il s’agit vraisemblablement de Sukias Baronian (1831-1904), moine mékhitariste de San Lazzaro à Venise et ordonné prêtre en 1854, auteur du Catalogue of the Armenian Manuscripts in the Bodleian Library, qui ne sera publié à Oxford qu’en 1918 par F. C. Conybeare. 137

San Lazzaro degli Armeni est une île de la lagune de Venise, occupée par un monastère arménien, siège de la congrégation des Pères Mékhitaristes.

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

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N’avez-vous pas de nouvelles de Venise ? Le R. P. Soukias Somal138 n’a-t-il pas donné signe de vie ? Je suis dans l’attente. Je n’ose presque [pas] me mettre à rédiger. Mon commentaire revêtira une tout autre forme si je n’ai pas les actes. J’ai trouvé dans notre bibliothèque un petit ouvrage liturgique slavon, le Часословъ [= livre d’heures ] imprimé à Moscou en 1813. Mais ce vieux caractère, ces abréviations m’effraient. Ne pourriez-vous pas me trouver à Paris une bible slavonne pour huit ou dix francs ? C’est peu, me direz-vous. Cependant qui sait ? On peut avoir du bonheur. En tout cas, si vous en trouviez une à ce prix, mettez la main dessus, en attendant une occasion pour l’envoyer avec d’autres livres. Vraiment je suis un égoïste. Je demande toujours et je ne donne jamais. Je voudrais avoir quelque occasion de vous rendre service. Vous verriez que je m’y mettrais de tout cœur. Je me recommande à vos prières. Inf. in Xo servus H. Matagne S.J. 18. Matagne à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, vers le 15 avril 1866

Mon bien cher Père, Détails concernant une lettre de Dulaurier où celui-ci donnait quelques indications à Martynov destinées à Matagne.

Je ne sais pas si vous avez signalé au savant arméniste, ce que je vous écrivis il y a deux mois touchant le petit ouvrage traduit par lui du russe et de l’arménien. Il vaut mieux peut-être n’en rien dire; l’erreur probable que j’ai notée à la p. 13 est probablement le fait de l’original. Auriez-vous la bonté de dire à Mr Dulaurier que je tiens fort à traduire moimême. Je sais bien que la traduction renfermera plus d’une faute, et qu’elle vaudrait mieux si elle sortait de la plume exercée de Mr Dulaurier, mais il y va un peu de l’honneur du bollandisme, de compter parmi ses membres un orientaliste (a wouldbe orientalist!). Il faut bien que je m’essaie à en remplir les fonctions. Pourriez-vous commander pour moi chez Mr Durand, Dulaurier, Étude sur les chants historiques … de l’Arménie, Paris, 1852; Chants populaires de l’Arm., Paris, 1852; Tableau de la litt. arm., Paris, 1856; Les Arméniens en Autriche, en Russie, etc.…, Paris, 1854; Cosmogonie de la Perse d’après Esnig, Paris, 1857 (adresse: M. Matagne, Coll. St-Michel). J’ai acheté Gogol, ed. Leipzig, 4 vol. Je me lance dans le russe. Je vais essayer de lire Мертвые души139. Lire, que dis-je malheureux ! Traduire péniblement, et quand je serai au bout, je pourrai lire passablement, ou plutôt comprendre le russe. Fiat. Priez pour moi. Guérissez-vous bien vite ? Votre tout dévoué H. Matagne.

138

Sukias (Placido) Somal (1776-1846) était originaire de Constantinople. Ordonné prêtre en 1804, il fut le premier directeur de l’école mékhitariste de Constantinople fondée en 1808. Par la suite, il deviendra abbé général des Mékhitaristes. Manifestement, Matagne a confondu ce personnage avec l’un de ses confrères, Sukias Baronian. 139

Les âmes mortes de Gogol, parurent pour la première fois en 1841.

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19. Matagne à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 29 juillet 1866

Mon Révérend Père, Le P. Victor De Buck m’apprit il y a quelque temps le bon succès de vos négociations avec les Pères Méchitaristes de Paris. Ceci m’encourage à vous demander encore autre chose; mais cette fois-ci, il ne faudra pas beaucoup de protocoles ni d’entrevues pour terminer l’affaire. Les Russes et autres peuples slaves font mémoire des SS. Capitoline et Eroteis au 27 octobre140, ainsi que les Grecs. Je trouve dans les ménées grecques imprimées quelques divergences assez notables avec le Ménologe basilien. Pourriez-vous me donner les renseignements suivants: Suit une série de demandes de détails concernant les textes.

Votre tout dévoué, H. Matagne. Nous avons égaré ou perdu le titre et les tables du dernier volume de 1865 des Études. De plus, nous n’avons reçu que la cinquième et la sixième conférences du P. Félix141 de 1866. Serait-il possible de compléter les deux volumes qui restent imparfaits ? 20. Matagne à Martynov [AFSI, BS Ma 2/6]

Bruxelles, 29 mai 1867

Mon Révérend Père, Je suis chargé d’une lourde dette à votre égard. Je ne vous ai pas encore remercié pour l’envoi de Schleicher142 et Miklosich143, et le prêt du volume de Mouraviev144. De plus, j’ai promis de renvoyer au plus tôt ce dernier ouvrage, et voilà 140

Le dossier de ces deux martyres sera intégré dans les AASS, Oct. t. 12 [1867] (27 octobre], p. 206-219. 141 Joseph Félix (1810-1891, jésuite en 1837) se rendit célèbre comme conférencier à Notre-Dame de Paris pendant 18 ans, à partir de 1853. Il y développa l’idée que le christianisme est source de vrai progrès, tant personnel que social, scientifique, etc. Il prêcha également de nombreuses retraites en province (cf. Jésuites Français, p. 114-115). 142

August Schleicher (1821-1868), linguiste, enseigna aux Universités de Prague et de Iéna (cf. DBE, 8, p. 663). L’ouvrage ici évoqué est Die Formenlehre der kirchenslawischen Sprache, Bonn, 1852. 143 Franz Miklosich (1813-1891), slovène d’origine, fit principalement sa carrière à la Bibliothèque impériale et à l’Université de Vienne, où il enseigna les langues slaves (cf. H. D. POHL, in NDB, 17 [1994], p. 493-494). Il s’agit de la brochure Vita S. Clementis episcopi Bulgarorum. Graece, Vienne, 1847. 144 Andrej Murav’ev (Mouraviev/Андрей Николаевич Муравьев) (1806-1874), viceprocureur du Saint-Synode et écrivain religieux, publia de nombreux ouvrages sur l’histoire, la théologie et la spiritualité de l’Église russe, notamment: История российской церкви (Histoire de l’Église russe; Saint-Pétersbourg, 1838). Certains de ses livres avaient une nette orientation polémique, tel Правда вселенской церкви о Римской и прочих патриарших кафедрах (La vérité de l’Église universelle au sujet du siège de Rome et d’autres sièges patriarcaux, Saint-Pétersbourg, 1841). Il fut toujours opposé à l’union avec Rome, comme en témoigne son ouvrage Question religieuse d’Orient et d’Occident (Moscou – Saint-Pétersbourg, 1856-1859). On lui doit aussi une collection intitulée Жития святых росс. церкви, также Иверских и Славянских (Vies des saints de l’Église russe, ainsi que géorgiens et slaves), 12 vol., SaintPétersbourg, 1857-1860 (cf. M. GORDILLO, in Enciclopedia Cattolica, 8 [1952], col. 1529).

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bien des mois et voilà plusieurs mois [sic] que je manque tout à la fois à la reconnaissance et à ma promesse. Je vous en demande pardon. J’ai toujours attendu, parce que j’espérais faire ensemble les deux choses. Or Mouraviev renferme, outre la Vie de St Néophyte145 qui est traduite et publiée, trois Vies que je voudrais encore traduire, celles de St Abraham de Rostov146, d’Étienne de Serbie147 et des moines Spiridon et Nicodème148. Impossible pour moi de faire cet ouvrage maintenant. Je pars dans quinze jours pour Londres, où je copierai du syriaque et du copte, et je ne serai peut-être de retour qu’au mois de septembre149. Me permettriez-vous de garder le volume encore six mois ? J’ai la ferme résolution de me mettre à la besogne aussitôt mon retour. L’impression du tome XII sera achevée dans quinze jours. Il est très varié: sans renfermer aucune très grande Vie, il contient beaucoup de notices intéressantes. J’y ai mis entre autres St Jacques de Sarug150, et St Néophyte151. Le P. Carpentier a des travaux sur l’Éthiopie, le reste, on peut le dire, des saints de ce pays: S. Frumence152, S. Elesbaan et quelques moines153. Le P. V. De Buck a de tout, à l’ordinaire; une Vie fort intéressante d’un évêque de Vich en Catalogne154, un bienheureux

145

Cf. les p. 417-421 du t. 10 de la collection de Murav’ev.

146

Cf. les p. 422-431 du t. 10 de la collection de Murav’ev.

147

Étienne Uroš III Dečanski (vers 1275-1331) devint roi de Serbie en 1322. Il connut une vie assez mouvementée, s’étant notamment trouvé en lutte avec son père qui lui avait fait crever les yeux, et plusieurs membres de sa famille. Il fit construire le monastère de Dečani et mourut vraisemblablement empoisonné par son fils (cf. G. ELDAROV, in BSO, 2, col. 10901091). Cf. les p. 432-484 du t. 10 de la collection de Murav’ev. 148

Cf. les p. 485-487 du t. 10 de la collection de Murav’ev.

149

Ce voyage scientifique à Londres eut lieu en juin et juillet 1867. Le ms. boll. 759-4 conserve quatre lettres du 21 juin et des 5, 11 et 28 juillet 1867, adressées à V. De Buck, dans lesquelles Matagne rend compte de ses recherches sur les manuscrits syriaques du British Museum, où il travaillait de 10 à 17 heures 30, de ses rencontres avec divers spécialistes et des membres du clergé anglican, de ses achats de livres, ainsi que de divers renseignements demandés par le bollandiste (cf. la brève présentation de ces lettres par Fr. HALKIN, Lettres du P. Henri Matagne, bollandiste namurois, in Études d’histoire et d’archéologie namuroises dédiées à Ferdinand Courtoy, t. 2, Namur, 1952, p. 985-989). 150

À propos de Jacques (451-521), évêque de Saroug en 519, auteur de nombreuses homélies et lettres à caractère théologique, cf. J.-M. FIEY, in DHGE, 26 (1997), col. 739-740. Son dossier parut dans les AASS, Oct. t. 12 (1867) [29 octobre], p. 824-831 et 927-929. 151

Matagne rédigea le dossier de Néophyte, évêque d’Urbnisi (Géorgie) (m. 7e s.) dans le t. 12 (1867) des AASS d’Octobre [28 octobre], p. 642-652 (cf. J.-M. SAUGET, in BS, 9 [1967], col. 807-809). 152

Frumence ou Ferēmenāṭos, début du 4e s., fut l’un des premiers évangélisateurs de l’Éthiopie (cf. E. CERULLI, in LTK, 4 [1995], col. 211-212). Son dossier a été publié dans les AASS, Oct. t. 12 (1867) [27 octobre], p. 257-270. 153

Le dossier de Kālēb Ella Aṣbeḥā bisi LZN, roi d’Aksum († avant 546; cf. H. BRAK– M. VAN ESBROECK, in LTK, 5 [1996], col. 1141), fut intégré dans les AASS, Oct. t. 12 (1867) [27 octobre], p. 296-337. MANN

154

Il s’agit de Bernard Calvò, cistercien, évêque de Vich (1233-1243); cf. AASS, Oct. t. 12 (1867) [26 octobre], p. 21-102.

B. JOASSART

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Jean de Chigi155, que la famille du nonce de Paris156 réclame comme un des siens, ce qui ne paraît guère fondé au P. Victor De Buck. Deux Macchiavelli, saints de fabrique, proprement dénichés157. Une Ste Eusébie158, que les Bergamasques regardent comme martyre, persuasion qu’ils ont endossée au Martyrologe romain, et qui est fondée tout simplement sur le sigle In pace B. M. mal lu et mal expliqué, etc., etc. Le P. Remi a plusieurs groupes d’évêques français. Tous les pays, ou à peu près, y trouvent des représentants. Dans un an, je me propose d’aller à Paris copier les manuscrits arméniens qui me mettront à même de compléter l’histoire de la conversion de l’Asie par les Apôtres et leurs premiers disciples159. Bien des choses de la part des deux Pères De Buck. Votre tout dévoué H. Matagne. 21. Matagne à Martynov [AFSI, BS Ma 2/6]

Bruxelles, 2 novembre 1867

Mon bien cher Père, P. C. Si vous ne vous étiez pas hâté de glisser quelques mots sur l’Introductio de Mr Lamy, j’aurais copié l’article que je venais de bâcler sur le même sujet pour vous l’envoyer160. Mais maintenant il ferait double emploi. Je n’y disais que ce que vous insinuez dans votre article. Seulement, j’étais cinq ou six fois plus long. Quant à faire davantage, je vous dirai franchement ce qui m’arrête. Si je parle directement du livre et si j’en fais la critique, je déplairai certainement à l’auteur. Si je profite de l’occasion pour exposer mes idées sur différentes questions, je cours [le] risque de froisser quelques individus, que je n’ai pas besoin de nommer, et qui ne me pardon155

Jean Chigi (1300-1363), moine augustin, fut attaché successivement aux monastères de S. Antonio de Valdaspra (Lecceto), de S. Pietro in Ciel d’Oro (Pavie), enfin de S. Agostino (Sienne); il remplit la charge de sacristain (cf. R. AUBERT, in DHGE, 26 [1997], col. 1406). Son dossier se trouve dans les AASS, Oct. t. 12 (1867) [29 octobre], p. 724-735. 156 Flavio Chigi (1810-1885), archevêque titulaire de Myre en 1856, nonce apostolique à Paris de 1861 à 1873 et créé cardinal en 1873 (cf. C. M. LIPARI, in DBI, 24 [1980], p. 751-754). 157

Tous deux prénommés Alexandre; AASS, Oct. t. 12 (1867), p. 170-172. Le terme «dénichés» signifie que ces saints furent, non pas trouvés, mais «sortis de leur niche», c’est-à-dire dont l’existence fut niée. 158

AASS, Oct. t. 12 (1867) [29 octobre], p. 817-824.

159

Ce voyage se fera en juin-juillet 1869. Le ms. boll. conserve quelques lettres de Matagne envoyées à Bruxelles (cf. leur brève présentation dans l’article de Fr. Halkin cité note 149). 160 Thomas Joseph Lamy (1827-1907), prêtre du diocèse de Namur en 1853, orientaliste et bibliste, enseigna à l’Université de Louvain de 1858 à 1900. Son œuvre majeure fut son édition des Sancti Ephraem Syri hymni et sermones (4 vol., Malines, 1882-1902) (cf. G. RYCKMANS, in BNB, 38 [1973-1974], col. 435-437). Au début de sa carrière, Lamy publia une Introductio in Sacram Scripturam, 2 vol., Malines, 1866-1867 (la bibliothèque des Bollandistes possède un exemplaire dédicacé à Matagne). Matagne fait ici référence à la présentation du 2e volume dans les Études, 18 (1867), p. 606-607. Cette présentation, anonyme et assez brève, dont voici l’essentiel, était finalement assez neutre: «L’ouvrage … est comme un cours classique destiné à être mis entre les mains des élèves de théologie. Bien qu’élémentaire dans sa forme et concis dans ses détails, il renferme des notions nettes, des discussions solides et pleines d’intérêt, il ne nous laisse étrangers à aucune des controverses engagées de nos jours avec le rationalisme. C’est un de ces résumés substantiels qui supposent dans leur auteur une érudition vaste et bien digérée».

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neraient pas mes témérités. Rappelez-vous comment, en diverses occasions, plusieurs Pères que vous connaissez ont reçu des tuiles sur la tête. Pour mon compte, après certaine expérience personnelle de Louvain, je me suis bien promis de ne pas toucher à la théologie tant que… Suffit. Intelligenti pauca. J’ai assez l’envie, depuis que j’ai revu les travaux du P. Carpentier, d’exposer les résultats assez remarquables de ses recherches sur l’Éthiopie. Mais d’un autre côté, le P. Victor De Buck me dit que vous avez jeté les yeux sur le même sujet. Je puis aussi dire quelque chose sur l’histoire de l’Église géorgienne; mais je pense qu’il vaut mieux laisser cela pour l’époque où j’aurai complété mes études. Je pense avoir trouvé aussi matière à un bon article dans les Analecta Nicaena de Harris Cowper, où se rencontre une liste syriaque des évêques présents au concile de Nicée. Je ne sache pas qu’on en ait fait usage jusqu’à présent161. Je suis assez embarrassé pour trouver le sujet d’un article, parce que jusqu’à mon arrivée au bollandisme, je m’étais surtout occupé de théologie et d’Écriture sainte. Mais c’est pour le quart d’heure du fruit défendu. Je me suis sagement interdit les questions scabreuses, qui avaient fait à peu près exclusivement le sujet de mes études antérieures. Je n’ai pas assez de livres pour écrire convenablement sur des questions philologiques, qui me sourient beaucoup. Je connais de nom l’ouvrage de Brosset que vous m’indiquez. L’histoire de la Géorgie étant postérieure à ces Rapports de voyage, je dois croire que l’auteur a profité de ces derniers pour écrire sa notice sur St Néophyte162. Je vous remercie beaucoup (car j’y suis le plus intéressé) du cadeau de Muralt163. J’y ai trouvé dans l’appendice une citation d’un auteur arabe qui dit, ce me semble, qu’Abdel-rahman et Salman dont je fais deux hommes, ne sont qu’un seul et même personnage. Si l’arabe a raison, je dois corriger ce que j’écris dans mon S t Néophyte. Mais c’est une chose de peu d’importance. J’ai oublié tout mon russe pendant ces trois mois de séjour en Angleterre. Je dois de nouveau chercher tous les mots. C’est une grande bonté de votre part de

161 Benjamin Harris Cowper, Analecta Nicaena: Fragments Relating to the Council of Nice, the Syriac Text from an Ancient Ms. in the British Museum, Londres – Édimbourg, 1857. 162 Marie-Félicité – dit Xavier – Brosset (1802-1880) fut jésuite de 1818 à 1822, étudia l’arabe et le chinois, puis le géorgien et l’arménien. Il s’établit en Russie en 1836, où il fit plusieurs voyages d’études, de même que dans d’autres régions, pour y découvrir des manuscrits orientaux, et séjourna en France de 1863 à 1869. Il revint en France définitivement en 1880, juste avant son décès. Il laissa bon nombre de publications ayant trait à la Géorgie et à l’Arménie (cf. F. MAROUIS, in DBF, 7 [1956], col. 436-437). Les deux ouvrages ici évoqués sont les Rapports sur un voyage archéologique dans la Géorgie et dans l’Arménie, exécuté en 18471848, 3 vol., Saint-Pétersbourg, 1849-1851, et une Histoire de la Géorgie depuis l’Antiquité jusqu’au XIXe siècle, traduite du géorgien, 4 vol., Saint-Pétersbourg, 1849-1858.  163 Édouard von Muralt (1808-1895), philologue suisse, vécut à Saint-Pétersbourg de 1834 à 1864, où il fut bibliothécaire à l’Ermitage à partir de 1840 tout en étant attaché à la paroisse luthérienne de la ville; par la suite, il enseigna à Berne (1864), puis à Lausanne (1869). Il est l’auteur du Catalogus codicum Bibliothecae Imperialis Publicae (Saint-Pétersbourg, 1840) et de l’Essai de chronographie byzantine (Saint-Pétersbourg, 1855) (cf. C. GOEHRKE, in Dictionnaire historique de la Suisse, 9 [2009], p. 6).

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m’offrir la grammaire comparative de Miklosich164. Comment pourrais-je refuser ? Je viens d’écrire à Mr Wright165, du British Museum, pour avoir des renseignements sur les mss de Curzon. Votre tout dévoué, H. Matagne, S.J. 22. Matagne à Martynov [AFSI, BS Ma 2/6]

Bruxelles, 12 février 1872

Mon Révérend Père, Je vous remercie bien cordialement de la peine que vous avez prise de copier ou d’abréger les documents concernant Abraham de Rostov. L’ouvrage du comte Tolstoï me sera utile166. Vous savez qu’avec quelques indications trouvées de côté et d’autre, il y a parfois moyen de rédiger une notice passable. D’ailleurs, j’écris pour l’Occident, et non pour la Russie. On comprendra que je ne puis être complet sur un tel sujet. Je regrette beaucoup de n’avoir pas Macaire. Mais je comprends aussi que cet ouvrage est indispensable à vos études, et que ce serait chose impossible que de vous en séparer pour quelques mois. Patience. Lorsque je trouverai de l’argent, je profiterai de votre obligeance pour acheter Macaire. Mais comme, malgré ma qualité de bibliothécaire, je ne puis acheter d’après mes idées, force m’est d’attendre. Je me recommande à vos prières. Rappelez-moi aux bons souvenirs du P. Gagarin. Votre tout dévoué en J. C., H. Matagne.

4. Remi De Buck, Jean Gagarin et Jean Martynov Frère cadet de Victor, Remi De Buck naquit lui aussi à Audenarde en 1819 et entra dans la Compagnie de Jésus en 1838. De 1856 à 1863, il enseigna l’histoire ecclésiastique au scolasticat de Louvain, puis fut agrégé au groupe bollandien. Il rédigera la majeure partie des dossiers du tome 13 des Acta Sanctorum d’Octobre, qui ne paraîtra toutefois qu’en 1883, soit trois ans après le décès de De Buck, et dans des conditions assez difficiles167. 164

Miklosich publia une Vergleichende Grammatik der slavischen Sprachen, qui compta 4 tomes (Vienne, 1852, 1856 et 1868-1874). Il va de soi que Matagne ne peut parler ici que des deux premiers tomes. 165

William Wright (1830-1889), spécialiste des langues sémitiques, en particulier du syriaque, enseigna l’arabe à University College (Londres) (1855-1856), à Trinity College (Dublin) (1856-1861), enfin à Cambridge (1870-1889). 166

Michail Tolstoï (1812-1896), médecin et théologien, publia plusieurs ouvrages hagiographiques et religieux, dont Святыни и древности Ростова Великого («Choses sacrées et antiquités de Rostov-la-Grande»), Moscou, 1847. 167

Victor De Buck s’était opposé à la nomination de son frère comme bollandiste, ne le jugeant pas apte à une telle besogne. Les supérieurs de la Compagnie passèrent outre à l’objection. Au lendemain de la mort de Victor De Buck, le volume était prêt pour l’impression. On était alors en 1876; Charles De Smedt avait été nommé bollandiste et avait entrepris d’introduire les principes de la critique historique moderne dans le travail bollandien (cf. infra). Examinant le volume, De Smedt et ses collègues jugèrent qu’il était impossible de le publier sous

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Les rapports épistolaires entre Remi De Buck et Gagarin furent manifestement assez ténus. Nous n’avons retrouvé que quatre missives du premier au second (AFSI, BS Ga L4). Trois d’entre elles contiennent des nouvelles de la santé de Victor De Buck168; une autre traite d’une affaire relative au Journal de Bruxelles mais qu’il n’a pas été possible d’élucider169; la dernière concerne une lettre de recommandation sollicitée par R. De Buck pour deux professeurs de l’Université de Louvain qui allaient entreprendre un voyage en Scandinavie et en Russie170. N’a dès lors été retenue ici que celle du 14 juillet 1876 qui rappelle un projet plusieurs fois évoqué par V. De Buck et Gagarin, à savoir la publication en un volume des «Correspondances de Saint-Pétersbourg» publiées par le premier dans le Journal de Bruxelles, dans lesquelles il avait traité de divers aspects de la vie religieuse de l’orthodoxie russe; toutefois, ce projet ne fut jamais mené à bonne fin. R. De Buck y signale également l’intention de son confrère Vincent Baesten, d’écrire une biographie détaillée de V. De Buck dans laquelle il intégrerait l’apport de celui-ci à l’œuvre des SS.-Cyrilleet-Méthode, biographie qui ne verra jamais le jour. Les échanges entre R. De Buck et Martynov furent plus abondants: on a conservé vingt-deux missives. On y trouve notamment des requêtes de la part de De Buck faites dans le cadre de la préparation du tome 12 des Acta Sanctorum d’Octobre. On rencontre également plusieurs allusions aux difficultés qui accompagnèrent l’impression du tome 13, incluant le dossier d’Abraham de Rostov, objet de tension entre les deux hommes. 23. R. De Buck à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Bruxelles, 14 juillet 1876

Mon Révérend Père, J’ai reçu avec reconnaissance la lettre que vous m’avez adressée. Je suis à la recherche d’une collection de Journaux de Bruxelles. Je pense que j’en trouverai une dans ma famille. J’attends Mr Nève171 pour savoir quand ont commencé et fini peine de nuire à la réputation scientifique du bollandisme et en référèrent au Provincial. L’affaire commença à s’enliser. La situation se compliqua encore au moment de la mort de R. De Buck, en 1880, qui laissait un testament dans lequel il exprimait sa volonté que les dossiers préparés par lui (ainsi que les quelques autres rédigés par son frère aîné) soient imprimés tels quels. Au bout de bien des tractations entre les Bollandistes et leurs supérieurs, le volume finit par être imprimé en 1883. Dans la préface, les bollandistes du moment indiquaient sans détour qu’ils n’assumaient pas la responsabilité du contenu. On rencontre plusieurs échos de la préparation de l’impression de ce volume dans les lettres de R. De Buck à Martynov. 168

Lettres des 27 avril et 30 août 1873, et du 29 novembre 1874.

169

Lettre du 30 août 1873.

170

Lettre du 7 août 1878.

171

Paul Nève (1822-1901) fut propriétaire et directeur du Journal de Bruxelles de 1856 à 1863 (cf. DELMER, Carnets 1, p. 555).

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les correspondances russes de mon frère. Nous connaissons le plus grand nombre, je dirai presque toutes les petites publications de mon frère; mais si l’on en donnait une nouvelle édition, je pense qu’on n’en voudrait pas assez pour faire les frais. En Belgique, on n’y va pas comme en France. C’est le P. Baesten172 qui a écrit la petite notice sur mon frère173; il compte écrire une vie détaillée. Il serait heureux d’avoir de vous une relation de ce que mon frère a fait pour l’œuvre russe. Ainsi, j’attends cette relation d’un des excellents amis de mon frère. Rien de particulier en Belgique. En union de vos SS. Sacrifices. Tout à vous en J.-C. Remi De Buck. Mes compliments au P. Martynov. *

*

24. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

* Bruxelles, 3 novembre [1862]

Détails pratiques concernant l’impression de l’AEGS.

25. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, juin (?) 1864

Mon Révérend Père, Vous pourriez me rendre à Paris un grand service que voici. Je suis occupé à la Vie de S. Juste174, disciple de S. Hilaire de Poitiers175, et je viens de découvrir qu’il y a de ce saint deux biographies à la Bibliothèque de Paris. La première se trouve marquée au Catalogus codicum manuscriptorum Bibliothecae Regiae. Pars tertia tomus quartus, Parisiis, 1794, pag. 92, n. 5321, n° 1° Vita S. Justi confessoris. La seconde, pag. 110 ibidem 5365 Vita S. Justi confessoris Lemovicensis et discipuli S. Hilarii. Eh bien, mon Révérend Père, ne pourriez-vous pas me faire transcrire ces deux Vies, faisant cependant attention: 1° si la première est bien de S. Juste disciple de S. Hilaire, car si ce n’était pas de ce saint, elle ne me servirait [pas]; 2° si étant toutes deux de S. Juste, disciple de S. Hilaire, elles ne sont pas les mêmes, sauf quelques variantes, car si elles étaient les mêmes, la copie d’une seule me suffirait, pourvu que les variantes soient ajoutées. Vous comprenez, mon Révérend Père, que 172 Vincent Baesten (1824-1898, jésuite en 1841) fut professeur dans différents collèges avant d’enseigner l’histoire de Belgique et du Moyen Âge aux Facultés universitaires de Namur, entre 1872 et 1876, puis de devenir collaborateur des Précis historiques, dont il prit la direction en 1880 (cf. notice de J. L. D. in Précis historiques, 3e s., 7 [1898], p. 146-154). 173 Le R. P. Victor De Buck, de la Compagnie de Jésus, in Précis historiques, 25 (1876), p. 389-410. 174 Juste de Limoges est mal connu. Enfant, il fut baptisé par Hilaire de Poitiers, qui l’ordonna prêtre plus tard. Choisi pour remplacer Hilaire, il s’enfuit dans le Limousin, partit à Rome et mourut durant le voyage de retour. Il fut inhumé dans le village qui porte aujourd’hui son nom, à une dizaine de kilomètres de Limoges, ses reliques étant transférées dans cette dernière ville au début du 13e s. (cf. R. AUBERT, in DHGE, 28 [2003], col. 642-643). R. De Buck prépara son dossier pour les AASS, Oct. t. 12 (1867) [27 octobre], p. 234-254; il y édita la Vie BHL 4597 à partir des mss BNF Lat. 5321, f. 2r-14v et 5365, f. 153v-155v, mentionnés dans sa lettre. 175

Hilaire (vers 315-367), évêque de Poitiers (vers 350), particulièrement connu pour sa lutte contre l’arianisme (cf. M. DURST, in LTK, 6 [1996], col. 100-102).

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plus tard, je vous […]176 de bontés. Veuillez, s’il vous plaît, ajouter une note sur l’âge approximatif des manuscrits, etc., si c’est possible. Rien de particulier à Bruxelles, où tout le monde vous voit préférablement arriver que partir. Mais quoi qu’il en soit, l’Annus slavicus rappelle tous les jours votre souvenir. Mon frère vous salue. Item [le] P. Carpentier, etc., etc. En union de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C., Remi De Buck. Saluez de ma part votre R. P. Recteur177 et les autres Pères que je connais à Paris. 26. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 18 juillet 1864

Mon Révérend Père, J’ai à vous remercier infiniment de la bonté que vous avez eue de copier propria manu la Vie de saint Juste. Elle n’est pas, comme vous le disiez très bien, d’un grand intérêt, mais enfin elle se rencontre dans les calendriers, etc., etc., et que voulons-nous y faire. L’impression du vol.178 est à la page 840. Goemaere nous fait beaucoup attendre. Le P. Carpentier est en ce moment à Courtrai, où il respire l’air natal: il nous écrit qu’il gagne, mais plût à Dieu que ce fût vrai ! Il regrettait beaucoup de ne pas avoir un exemplaire de votre Annus ecclesiasticus; je n’ai pas osé lui dire que vous aviez été dans la ferme décision de lui en laisser un exemplaire. Je vous écris ceci pour que vous ne lui écriviez pas que mon frère vous l’a déconseillé; il en serait peiné. Il compte rester à Courtrai jusqu’à la mi-septembre. Votre Annus slavicus produit une bonne impression; on était généralement dans la persuasion que les Slaves avaient peu de représentants dans le ciel, et maintenant on est convaincu du contraire; seulement on ne tient pas à imiter les vertus de tous, par exemple de St Macaire; on laisse volontiers le soin de l’honorer aux Parmesans et au Père Martynov. Nous avons fait aujourd’hui la fête du P. Provincial [Bossaert]179: c’était au collège à faire; les trois communautés de Bruxelles étaient réunies à la grande salle des élèves, qui à cause de la kermesse de Bruxelles, sont en vacances pour deux jours. Je vous prie de saluer de ma part votre excellent Père Recteur [Pillon], et les Pères des Études et autres que j’ai l’avantage de connaître. En union de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C., Remi De Buck. P.S. Il y a une dissertation de Mr Haine180. Veuillez la remettre au P. Mertian181; c’est un cadeau qui m’a été fait. Il y a aussi des Précis pour le Père Carayon. 176

Il est impossible de lire quelques mots qui ont été recouverts d’un papier collé.

177

Adolphe Pillon (1804-1885, jésuite en 1823) fut, à partir de septembre 1861, recteur de la communauté Sainte-Geneviève, à Paris. De 1866 à 1872, il sera Provincial de Champagne. 178

C’est-à-dire le tome 11 des AASS d’Octobre.

179

Frédéric, patronyme du Provincial Bossaert, est fêté le 18 juillet. Au sujet de la kermesse de Bruxelles, cf. note 267. 180 Il s’agit vraisemblablement du De hyperdulia eiusque fundamento. Dissertatio historico-theologica, Louvain, 1864, d’Antoine-Joseph Haine (1825-1900), professeur de théologie dogmatique à l’Université de Louvain.

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27. R. De Buck à J. Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 24 juillet 1864

Mon Révérend Père, Menus détails.

Le but de cette lettre est de recourir de nouveau à votre obligeance. Il doit exister encore une autre Vie de S. Juste que celle que vous avez eu la bonté de me transcrire. Cependant, je ne saurais dire où: peut-être à la Bibliothèque impériale, car un témoin oculaire m’a dit que c’est incroyable comme il y a là de Vies de SS. manuscrites. Je sais entre autres que dans le fonds de Notre Dame, n° 101, f. 126, et dans le fonds de S. Germain, n° 502, il y a une Vie de S. Juste, il y a, mais je ne pourrais dire si c’est de S. Juste disciple de S. Hilaire. Il doit en outre exister des Vies de SS. dont les catalogues n’ont jamais été imprimés: peut-être y rencontrerait [-on] la Vie que je cherche. Voudriez-vous, mon Révérend Père, examiner cette affaire, et si vous trouvez ce qu’il faut, faire transcrire le parchemin et simplement collationner la copie et voir si elle est bonne. Car la transcrire vous-même serait trop de bonté. Notre excellent évêque de Boston182 se porte de mieux en mieux; il compte partir le mois prochain pour son diocèse en compagnie des prêtres belges qui vont présider à l’érection de son séminaire. Il prendra avec lui l’Annus slavicus. Les Acta SS. en sont à la page 870183; vous voyez que cela avance moins que votre Meletius184. Mais quand il s’agit du P. Martynov, tout vole. La mère du Père Van Caloen185 est administrée. C’est incroyable comme on travaille pour les élections. On est généralement d’accord que les catholiques l’emporteront186. La question des Jésuites est tombée. Il paraît que dans les provinces elle est morte. Cependant, on travaille la populace à Bruxelles; la bourgeoisie est revenue à son calme. Échos de l’affaire Benoît De Buck187. 181 Henri Mertian (1821-1901, jésuite en 1839) collabora aux Études de 1859 à 1864. Il fonda le collège de Reims en 1874, où il travailla pendant un quart de siècle (cf. H. BEYLARD, in Jésuites français, p. 196). 182 John Bernard Fitzpatrick (1812-1866) accomplit une partie de sa formation en France et fut ordonné prêtre en 1840. Il fut nommé évêque coadjuteur puis évêque de Boston respectivement en 1843 et 1846. Il fut soucieux de l’accueil des nouveaux émigrants et s’intéressa de près à tout ce qui concernait les questions d’enseignement, tout en se montrant ouvert aux protestants (cf. R. TRISCO, in DHGE, 17 [1971], col. 295-299). 183

Il s’agit du t. 12 des AASS d’Octobre en cours d’impression.

184

Il s’agit du Saulus et Paulus Ruthenae unionis sanguine B. Josaphat transformatus sive Meletius Smotriscius, de Martynov, publié en 1864. 185

Louis Van Caloen (1817-1912, jésuite en 1842) résidait alors au collège Saint-Michel à Bruxelles, comme «opéraire». 186 187

Ce qui ne fut pas le cas.

Cette affaire est ainsi désignée du nom du principal protagoniste, l’Anversois Benoît De Buck, qui n’avait d’ailleurs aucun lien de parenté avec les deux bollandistes. En 1862, ce De Buck envoya des lettres de menaces de mort au Provincial des Jésuites belges et à trois de ses confrères. Le délit fut dénoncé à la police en 1863 et l’affaire fut portée devant la cour d’assises

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Saluez de ma part l’excellent Père Pillon et les PP. Cahier, Mertian, etc., etc. En union de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C. Remi De Buck. 28. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 14 septembre 1864

Bref mot annonçant l’envoi de la gravure du B x Josaphat reproduite dans les AASS, et signalant que De Buck n’a pas de plus amples informations sur la Vie de S. Juste demandée dans la lettre précédente.

29. Martynov à R. De Buck [ms. boll. 759-4, n° 762] 20 janvier 1865 Mon Révérend Père, P. C. Je viens de recevoir le beau volume188 qui vient d’enrichir votre collection incomparable, et j’ai hâte de vous en exprimer toute ma reconnaissance. Je n’attendais que son arrivée pour vous écrire, afin que ma réponse fût de la sorte aussi complète que possible, et qu’aucun point de votre dernière lettre ne restât sans écho. Le point qui vous intéresse le plus, c’est, comme de juste, le Saint sur lequel vous m’avez demandé des renseignements. Mr Delisle et moi, nous avons dépouillé le cahier contenant par le menu tous les titres des Vies des saints indiquées d’une manière générale (Vitae Sanctorum) dans les deux catalogues, imprimé et manuscrit. Toutes nos recherches ont été inutiles jusqu’à présent, et M r Delisle, juge fort compétent dans ces matières, pense que des recherches ultérieures ne seraient pas plus heureuses. Je n’y renonce pas toutefois entièrement et la semaine prochaine, je tenterai de nouveau la fortune. La caisse aux livres m’est arrivée saine et sauve à part quelques blessures profondes qu’ont reçues deux de mes in-folio. Quant à ceux qui restent chez vous, je vous prierai de les donner à Mr Muquart189, sur la présentation de ma signature. Le ms. qui accompagnait le petit paquet est une bonne fortune pour les Études et le P. Toulemont n’aura pas manqué d’en remercier déjà le modeste auteur d’autant plus chaudement qu’il en a plus rarement occasion de le faire190. J’ai remis, en votre nom, au R. P. Recteur [Pillon] l’autre exemplaire destiné à la maison, et je lui ai fait part aussi d’inqualifiables attaques au bruit desquelles ce nouveau volume a fait son épiphanie. Rambler et Co… m’ont beaucoup amusé, comme les conclusions du président m’ont grandement édifié191. Au fond, ce bruit ne de Bruxelles en mai 1864. Très vite, le procès de l’homme se transforma en procès de la Compagnie, qui fut entre autres accusée de détournement d’héritage (un oncle de De Buck l’avait déshérité soi-disant sous l’influence des Jésuites). L’homme fut acquitté. L’affaire connut quelque retentissement car elle fut comme un symbole de la lutte entre catholiques et libéraux. 188

Le tome 11 des AASS d’Octobre.

189

Libraire d’origine allemande établi à Bruxelles.

190

Martynov fait sans doute allusion au manuscrit de l’article de V. De Buck, M. de Rossi et ses récents travaux sur les catacombes de Rome, in Études, 12 (1865), p. 133-157 et 333-357. 191

En 1860 déjà, le député libéral Louis Hymans (1829-1884) mit en cause le subside annuel que l’État belge versait aux Bollandistes, arguant que l’État n’avait pas à financer «de pareilles niaiseries» qu’étaient les Acta Sanctorum. Les débats furent très vifs entre opposants et partisans du subside, lequel sera octroyé aux Bollandistes jusqu’en 1869, année où Hymans eut finalement gain de cause (cf. M.-Th. DELMER, En marge des Acta Sanctorum. Saint «Jambonus», in AB, 105 [1987], p. 141-151). Précisément, en 1864, lors de la parution du tome 11

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peut que tourner à votre avantage et c’est une preuve de plus du mérite de la publication qui lui a donné lieu. Peut-être ce même bruit est-il la cause pour laquelle le Correspondant, préoccupé d’ailleurs de l’Encyclique192, a cru devoir différer l’insertion de l’article sur l’Annus graec. slav., avant de prendre connaissance du volume tout entier193. Jusqu’à présent, je n’ai lu que l’article consacré à St Rustique194, lequel va causer un plaisir infini à Mr Le Blant195, fort impatient de le lire, pressé qu’il est par l’imprimerie impériale à livrer la 2e partie de son second volume. Il va sans dire qu’il fut averti immédiatement de l’arrivée du volume, et je l’attends chez moi d’une heure à l’autre. Mr Le Blant prépare, pour le Correspondant, un compte rendu du dernier ouvrage du chevalier de Rossi196. J’ai envie de dire quelques mots sur le premier volume du Droit canon grec, que vient de publier le Card. Pitra197 et je profiterai certainement des pensées que vous et votre cher frère, vous voudrez bien me suggérer. Ma pensée est de parler du Pape, moteur de tant de publications analogues, et aussi du Nomocanon russe. Et de faire le travail personnel de l’éditeur se réduit à peu de chose.

des AASS d’Octobre, au cours des séances des 23 et 24 décembre, la Chambre des représentants fut à nouveau le théâtre de discussions sur l’opportunité de ce subside. L’allusion au Rambler et au second mot – illisible – n’a pas pu être élucidée. Ernest Louis Vandenpeereboom (18071875), fut président de la Chambre des représentants de 1863 à 1867. 192

C’est-à-dire Quanta cura (1864) de Pie IX condamnant le libéralisme.

193

L’AEGS sera finalement présenté par un ami de Martynov, Aleksander Chodźko (1803-1883; d’origine polonaise, il émigra en France et fut chargé du cours de langue et littérature slaves au Collège de France de 1857 à sa mort) sous forme d’un long article intitulé De la littérature sacrée chez les Slaves, in Le Correspondant, 65 (n° de juillet 1865), p. 594-636. 194 Le dossier de S. Rustique, évêque de Narbonne de 427 à sa mort en 461, fut rédigé par Benjamin Bossue (1804-1882, bollandiste en 1845), dans AASS, Oct. t. 11 (1864) [26 octobre], p. 860-883. Pour préparer ce dossier, Bossue, dans une lettre du 25 juin 1864, avait demandé à Martynov de vérifier si Le Blant parlait dans le premier tome de ses Inscriptions chrétiennes (cf. note suivante) d’une inscription narbonnaise relative à ce saint, et l’avait remercié de lui avoir rendu ce service, le 8 juillet suivant. Ces deux lettres n’ont pas été reproduites ici, de même qu’une troisième et dernière de Bossue à Martynov, datée du 10 septembre 1864, où il évoquait quelques nouvelles sans importance. Ces trois documents se trouvent dans les AFSI, BS Ma 2/6. 195 Edmond-Frédéric Le Blant (1818-1897) fut d’abord avocat, puis fonctionnaire au ministère des finances avant de se consacrer à l’archéologie, à la suite d’un voyage en Italie. Il assura la direction de l’École française de Rome de 1883 à 1888. On lui doit de nombreuses publications sur l’archéologie chrétienne de la Gaule et sur les martyrs (cf. B. WACHÉ, in Sciences religieuses, p. 395-396). Le Blant préparait alors le deuxième tome de ses Inscriptions chrétiennes de la Gaule antérieures au VIIIe siècle, 2 vol., Paris, 1856 et 1865. 196 Le Blant présentera le t. 1er (Rome, 1864) de la Roma sotterranea cristiana de de Rossi dans Le Correspondant, 65 (1865), p. 848-877, sous forme d’un article intitulé Les dernières découvertes aux catacombes de Rome. 197 Jean-Baptiste Pitra (1812-1889), prêtre en 1836, entra à l’abbaye de Solesmes en 1841. Il mena une carrière d’érudit, fut créé cardinal en 1863 et nommé bibliothécaire de la sainte Église (cf. L. SOLTNER, in Sciences religieuses, p. 536-538). En réalité Martynov ne fit qu’une brève présentation du premier tome des Juris ecclesiastici Graecorum historia et monumenta de Pitra (Rome, 1864), dans les Études, 11 (1864), p. 422-423.

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

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On vient de m’envoyer de Lemberg, [les] Monumenta Poloniae historica, où il n’y a presque de latin que ce titre; le reste est en polonais et en slavon. Entre autres, une légende de St Cyrille et de St Méthode, et toute la chronique de Nestor en paléoslave et polonais avec quelques commentaires peu développés198. Je vous parle de cela à cause de St Nestor, martyr, qui vient au 26 oct.199, et de Nestor, le chroniqueur russe200, qui figure parmi les vénérables de l’Église de Kiev, et qui est, en outre, auteur de la Vie de St Théodose de Kief201 et du récit touchant le martyre de St Boris et St Gleb202. Démétrius Bassarabe203, valaque, vient aussi ce même jour-là ou le 26. L’affaire de Constantinople est rare204. Le P. du Fougerais205 y partira mercredi prochain, pour être suivi, dans un bref délai, par d’autres Pères français. Si vous voulez [vous] mettre au courant de l’affaire, vous n’avez qu’à vous adresser à Mme de Moustier, femme de l’ambassadeur206, ces jours-ci de passage à Bruxelles. Mille amitiés au P. Victor. Rae Vae infimus servus, J. Martynov, S. J. 30. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 14 novembre 1865207

Mon Révérend Père, J’ai aussi recours à votre obligeance. Dans l’Annus ecclesiasticus slavicus, au 28 octobre, je rencontre SS. Terentius et Neonilla208, et j’y trouve qu’il en est fait 198

Le premier volume, qui porte aussi le titre Pomniki dziejowe Polski, édité par August Bielowski, parut à Lwów en 1864. Ce qui concerne Cyrille et Méthode se trouve aux pages 85122 et la chronique de Nestor aux pages 521-862. 199

Nestor, martyr (?) à Thessalonique à l’époque de Maximien (cf. J.-M. SAUGET, in BS, 9 [1967], col. 829-831). Il fut annoncé parmi les Praetermissi du 26 octobre (AASS, Oct. t. 11 [1864], p. 794) et présenté dans les AASS, Oct. t. 12 (1867) [27 octobre], p. 219-221. 200

Nestor, dit le Chroniqueur ou l’Annaliste, vécut au monastère de Théodose des Cryptes (Kiev), dans la seconde moitié du 11e s. et au début du 12e. Il est le prétendu auteur de la première source de l’histoire religieuse et civile des premiers siècles de la Rus’ de Kiev, et également d’une Vie des SS. Boris et Gleb (cf. D. STIERNON, in Catholicisme, 9 [1992], col. 11681169). Il fut inclus parmi les Praetermissi du 27 octobre dans les AASS, Oct. t. 12 (1867), p. 181. 201 Théodose de Kiev ou Feodosij Pečerskij (1029-1074), fondateur de la Laure des Grottes (cf. G. PODSKALSKY, in LTK, 3 [1995], col. 1232). 202 À propos de Boris (Romain) et de Gleb (David), fils de S. Vladimir et d’Anne de Bulgarie, morts martyrs le 24 juillet 1015, voir le dossier que leur consacra le bollandiste Jean Stilting, dans le t. 2 (1748) des AASS de Septembre [5 septembre], p. 633-644. 203

Démétrius Bassarabe, moine du 13e s. (cf. I. BOTA, in BSO, 1, col. 635-636).

204

Il était alors question de transférer l’Œuvre des Saints-Cyrille-et-Méthode à Constantinople, en même temps que d’y installer des jésuites siciliens, à quoi la France s’opposait. 205

Émile du Fougerais (1819-1893, jésuite en 1850) partit, en 1865, pour Constantinople où il enseigna le français; après une année, il revint en France et fut attaché à la résidence parisienne de la rue de Sèvres comme opéraire. 206

Lionel de Moustier (1817-1869) fut ambassadeur de France en Turquie de 1861 à 1866, et par la suite ministre des Affaires étrangères jusqu’en 1868. Il épousa en 1843 Françoise Ghislaine de Mérode (1825-1885). 207

Comme on l’apprend par la réponse de Martynov du 17 novembre suivant, cette lettre était jointe à celle de Matagne du 14 novembre 1865 (lettre 16).

B. JOASSART

406

mention dans l’Horologium slavicum. Ne pourriez-vous pas me procurer la traduction de ce passage ? J’ai appris avec bonheur que vous êtes de retour à Paris. Vous êtes pour nous le plus serviable des correspondants. En union de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C. Remi De Buck. P.S. Dans la lettre que le P. Matagne vous écrit209, il ne dit rien des frais que les Pères Méchitaristes devront s’imposer. C’est qu’il l’a oublié et il est sorti pour l’un ou l’autre jour. Je vous prie d’écrire aux PP. Méchitaristes que nous les indemniserons pour achat de livres et copie. 31. Martynov à R. De Buck [Ms. boll. 759-4, n° 766]

17 novembre 1865

Mon Révérend Père, P. C. Puisque vous avez bien voulu ajouter quelques lignes à la lettre du P. Matagne, votre nouveau collaborateur, et que ces lignes contiennent une demande, je me fais un plaisir d’y satisfaire sans tarder. Suit une série de renseignements demandés dans la lettre précédente.

Voilà, mon digne et vénérable Père, ce que votre serviable correspondant de Paris a à répondre à votre aimable invitation, en vous priant de lui pardonner les longueurs, qu’un trop long silence rend assez légitime. Quant à la recommandation, ajoutée dans le P. S.210, touchant les demandes faites aux PP. Méchitaristes par le P. Matagne211, je n’y manquerai [pas], et vous pouvez être sûr qu’elle partira dès demain vers le pays des lagunes. En attendant, et avant que je vous écrive sur mon voyage à St-Lazare, je vous charge de présenter mes hommages et mes amitiés les plus sincères à votre cher frère Victor, et de lui dire qu’il s’attende, sinon à une visite, au moins à une longue missive de la part de son et de votre très dévoué serviteur in Xto, J. Martynov, S.J. 32. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 11 février 1866

Mon Révérend Père, J’aime à croire que vous avez reçu les livres que je vous ai expédiés. J’ai payé un des B. Berchmans que vous m’aviez demandés, en sorte que je vous dois encore 5 francs, car vous en aviez payé 10 au Père Tirelli212 pour moi. Voudriez-vous exprimer à De Michelis213 mon étonnement de ce qu’il ne m’a pas encore envoyé la dernière livraison du Thesaurus linguae graecae, quoiqu’elle 208 Cf. p. 262 de l’AEGS. Cf. leur bref dossier rédigé par R. De Buck, in AASS, Oct. t. 12 (1867) [28 octobre], p. 512-513. 209

Cf. la lettre du 14 novembre 1865.

210

Il s’agit vraisemblablement de Carlos Sommervogel.

211

Voir la lettre 16 de Matagne, en date du 14 novembre 1865.

212

Francesco Tirelli (1815-1868, jésuite en 1836), membre de la Province romaine, était engagé dans le ministère paroissial à Modène (cf. SOMMERVOGEL, t. 8 [1898], col. 48-49). 213

de Paris.

De Michelis, libraire établi au 33, rue Saint-André-des-Arts dans le 6e arrondissement

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

407

ait paru depuis 8 mois. Je lui en ai déjà écrit deux fois, et chaque fois il me paye de raisons bien pauvres. En union, mon Révérend Père, de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C., Remi De Buck. 33. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 5 novembre 1873

Mon Révérend Père, Nouvelles de la santé de V. De Buck.

Quant à votre saint de Rostov, le P. Matagne n’a laissé que quelques notes. Mon frère vous en écrira214. Du reste, le P. Matagne n’a laissé aucun travail fait, mais seulement des notes sur différentes matières. Et votre comte de Chambord ! Je n’en reviens pas. J’ai été comme abasourdi en lisant sa lettre215, et comme hors [de] moi-même pendant un demi-jour. Mais après, je me suis dit: «Il est impossible que le bon Dieu n’écoute pas les prières qui ont été faites en France pendant tout l’été; si donc la combinaison Chambord échoue, c’est qu’elle ne pouvait porter bonheur, et [que] le bon Dieu ne trouve pas à propos qu’il vienne régner en France». Saluez de ma part les PP. Matignon, Gagarin, Tailhan, etc., etc. En union de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C., Remi De Buck. 34. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 14 septembre 1874

Mon Révérend Père, Si vous n’avez pas encore acheté les livres russes dont vous avez pris note, je vous prierais d’attendre quelque temps, parce que le successeur de Muquart, qui a fourni les premiers volumes au P. Matagne, vient de m’envoyer deux livraisons du tome IV du dictionnaire de Semenov, qui commencent à la page 481 et vont jusqu’à la page 869216, et qu’il me fait comprendre que le P. Matagne a pris l’engagement de prendre la continuation. Nouvelles de la santé de V. De Buck.

Bien des compliments au R. P. Matignon, Tailhan, Guilhermy, Gagarin, etc. En union de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C., Remi De Buck. 214

Aucune lettre adressée à Martynov à ce sujet par Victor De Buck n’a été retrouvée.

215

Après la chute de Napoléon III, la France hésita entre une restauration monarchique et le régime républicain. On fut très proche d’une restauration des Bourbons en la personne du comte de Chambord («Henri V»), petit-fils de Charles X. Le prince mettait comme condition sine qua non que le drapeau blanc fût adopté au lieu du drapeau tricolore, ce qu’il fit savoir par une lettre ouverte datée du 23 octobre 1873; cette exigence mit fin à toute tentative de retour d’un Bourbon sur le trône de France. 216 Il s’agit du Географическо-статистический словарь Российской империи (Dictionnaire géographique et statistique de l’empire russe), t. 1-5, Saint-Pétersbourg, 1863-1885, publié sous la direction de Petr Semenov (Петр Петрович Семенов) (1827-1914), géographe et homme d’État russe, membre de la Société impériale de géographie et auteur de nombreux écrits dans ce domaine. Pendant ses expéditions dans les montagnes de Tiensan et Altaj, il rassembla des matériaux sur la géographie et l’histoire de ces régions, qui seront publiés entre 1858 et 1867.

B. JOASSART

408

35. Martynov à R. De Buck [Ms. boll. 759-4, n° 795]

Paris, 9 janvier 1877

Mon cher Père, P. C. Chez nous autres, gens du Nord, l’année commençant 12 jours après la vôtre, il n’est pas trop tard de vous envoyer mes souhaits de nouvel an. Si je n’ai pas agi à l’occidentale, il y avait aussi une autre raison. Rostowski m’absorbe217. Pas un moment de loisir, depuis quelque temps surtout. Enfin, avec l’aide de Dieu, la besogne sera achevée sous peu. Une prière. Le P. de Guilhermy qui vous salue cordialement, me dit qu’il y a à Bruxelles des lettres de Lancicius218, aux archives, une liasse carton 30 (sur Lancicius); à la Bibliothèque de Bourgogne, Lanc. Epistolae, n° 4576. Auriez-vous la charité de jeter là-dessus un coup d’œil et de voir si cela vaut la peine d’en publier quelque chose; comme étrennes au public, dans mes appendices à Rostowski, et mon tiré à part de Lancicius219. Je vous en serai fort reconnaissant. Si la correspondance roule sur les corps des saints qu’il avait jadis donnés aux PP. Bollandistes et de Montmorency220, la chose serait moins importante pour moi. Indication à propos d’une affaire intéressant Prosper Van der Speeten (1835-1889, jésuite en 1852), opéraire à Bruxelles, mais qui n’a pu être élucidée.

Vous savez que l’excellent P. Pierling221 est avec nous, et fait partie de l’œuvre russe. Il est à la fois écrivain, procureur, bibliothécaire et charmant Père. J’espérais venir chez vous en décembre; pas moyen. Il faut bien cependant que 217 Stanisław Rostowski (1711-1784, jésuite en 1726) enseigna la philosophie et la théologie à l’Académie de Vilnius, et fut bibliothécaire et archiviste de la Province de Lituanie. Il écrivit l’histoire de sa Province dont la première partie, intitulée Lithuanicarum Societatis Iesu Historiarum Provincialium pars prima, fut publiée à Vilnius en 1768; la deuxième, restée à l’état de manuscrit, est perdue. Après la suppression de la Compagnie, il rejoignit les Jésuites établis en Biélorussie. Martynov rééditera son ouvrage en 1877, sous un titre quelque peu différent: Lituanicarum Societatis Iesu Historiarum libri decem (Paris – Bruxelles, 1877) (cf. L. GRZEBIEŃ, in DHCJ, 4, p. 3417). 218 Mikołaj Łęczycki, dit Lancicius (1574-1653, jésuite en 1592). Envoyé à Rome où il accomplit une partie de sa formation religieuse, il devint, en 1601, assistant de Nicolas Orlandini, historien officiel de la Compagnie. Rentré en Pologne, il fut professeur de théologie et d’Écriture Sainte dans divers collèges et fut supérieur de différentes maisons de son Ordre. En 1631, il fut nommé Provincial de Lituanie. Plus tard, il sera encore instructeur du troisième an et de nouveau professeur en Bohême. Il est aussi connu comme écrivain spirituel. Martynov éditera une partie de ses écrits sous le titre Collectanea Lanciciana (Paris, 1877) (cf. P. RABIKAUSKAS – L. PIECHNIK, in DHCJ, 3, p. 2317). 219

En 1877, Martynov publiera, à Paris, les Collectanea Lanciciana.

220

Florent de Montmorency (1580-1659, jésuite en 1599) fut supérieur de différentes maisons de son Ordre, Provincial de la Province gallo-belge (1619-1623 et 1638-1642) et de la Province flandro-belge (1623-1627), assistant de Germanie (1646-1649) et vicaire général en 1649 (cf. SOMMERVOGEL, 5, col. 1258-1259). 221 Paul Pierling (1840-1922) entra dans la Province jésuite d’Autriche en 1856. Au terme de sa formation, il fut envoyé, en 1871, à la Curie Généralice de la Compagnie. En 1876, il arriva à Paris et devint membre de l’Œuvre des Saints-Cyrille-et-Méthode qu’il dirigera de 1908 à 1922. Il sera chargé du transfert de l’Œuvre à Bruxelles, chez les Bollandistes, suite à l’expulsion des Jésuites de France au début du 20e siècle. Il étudia plus particulièrement les relations de la Russie avec le Saint-Siège (cf. H. BEYLARD, in DHCJ, 4, p. 3129-3130).

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

409

je vienne pour faire faire le calque de l’autographe de Bobola qui est à Bruges222. Le P. Van Derker223 à qui j’ai écrit ne m’a pas encore répondu. Le cartographe me retient aussi; mais surtout la table des matières, la plus agréable de toutes les besognes, comme vous le savez par expérience. Dès que j’aurai revu la 2 e épreuve de la carte, je viendrai à Bruxelles pour n’y rester que le temps strictement nécessaire à l’accouchement de l’ouvrage (cette semaine-ci peut-être). Lancicius me ravit. Je me chargerais volontiers de publier de nouveau sa Vie par Balbinus224, qui n’était rien moins que ce que dit son nom francisé, disciple de Lancicius, attiré par lui à la Compagnie. Il a dû écrire les gestes de son cher maître con amore. Si jamais on béatifie Leczycki, c’est cette vie que devraient publier les continuateurs de votre œuvre. Encore une fois, heureuse année. Votre tout dévoué in Xto, J. Martynov Kazanski. 36. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 19 février 1877

Mon Révérend Père, Vous me parliez de faire imprimer l’opuscule de Lancitius. Je ne vois pas pourquoi. Il n’y a rien qui nous y engage. Le P. Baesten l’a parcouru et n’y a rien trouvé de remarquable. Je préfère vous donner son jugement que le mien, parce que je suis prévenu contre les ouvrages de Lancitius. Je n’y ai jamais rien trouvé que de très vulgaire: multae voces. Je vous ai envoyé trois exemplaires de la dissertation de mon frère 225. On dirait que vous et votre archimandrite, vous n’êtes qu’un. Proficiat. Quoique vous soyez d’une grande capacité, je dois cependant vous dire qu’il me semble que le P. Gagarin m’inspire plus de confiance, quand il parle des Papes et des archimandrites russes. J’ai beaucoup appris à son école. Chez lui c’est: Amicus Plato, magis amica veritas226. 222

En regard de la page 384 de la réédition de l’ouvrage de Rostowski, Martynov fournit un fac-similé du texte autographe de la profession solennelle d’André Bobola. Aux pages VII-VIII de l’introduction, où il présente les deux listes des jésuites lituaniens ayant émis la profession solennelle, Martynov donne l’explication suivante: Confeci utrumque ex codice tribus voluminibus in 4° constante atque plus tercenta ejusdem formulae exemplaria autographa continente; inter quae exemplar Beati martyris Andreae Bobola manu exaratum, cujus ectypon a calligrapho Brugensi fideliter repraesentatum reperies ad pag. 384. Cimelium istud … servabatur olim in tabulario Lithuaniae provinciali, offendit in Germania apud antiquarum rerum venditorem Illmus ac Rmus D. Amatus Boone, canonicis Brugensis et cubicularius Suae Sanctitatis, emptumque Patribus domus nostrae Brugensis liberalissime donavit. 223

Jean-Baptiste Van Derker (1813-1893, jésuite en 1836), supérieur de la résidence de Bruges de 1862 à 1865. 224 Bohuslav Balbin (1621-1688, jésuite en 1636), membre de la Province de Bohême, professeur de collège, publia plusieurs ouvrages de littérature et d’histoire relative à son pays (cf. J. KRAJCAR, in DHCJ, 1, p. 326-327). L’ouvrage ici évoqué par Martynov est la Vita venerabilis Patris Nicolai Lancicii…, Prague, 1690, commencée par le jésuite Casimir Wijuk Kojalowicz (1617-1674) et achevée par Balbin. 225

Il est vraisemblable que R. De Buck évoque ici l’article de son frère, André Bobola.

226

ARISTOTE, Éthique à Nicomaque, I, 4.

B. JOASSART

410

N’amènerez-vous pas avec vous à Bruxelles le P. Pierling ? Je vous enverrai par la poste le dessin d’un tableau qui se trouve à l’hôpital de Beaune. On croit que des inscriptions slaves se trouvent dans les plis du manteau. L’aumônier de l’hôpital de Beaune (Côte d’Or) désire avoir des éclaircissements à ce sujet. Auriez-vous la bonté de lui écrire un mot à ce sujet ? Je lui ai fait dire que je me serais adressé à vous227. Vous ne me dites plus rien des lettres de mon frère. Vous m’avez promis de me rendre celles que vous avez, et que vous vous seriez adressé pour le même sujet à d’autres Pères228. L’impression du prochain volume des Acta Sanctorum est entrée dans une tout autre phase depuis que vous avez été à Bruxelles. Je pense que dans quelques jours je vous en dirai davantage: ceci entre nous. Je salue les PP. Guilhermy, Matignon, Tailhan, Balabine. En union de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C., Remi De Buck. 37. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 20 avril 1878

Bref billet concernant des manuscrits non précisés.

38. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 24 mai 1879

Bref billet concernant des manuscrits non précisés.

39. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 2 juin 1879

Mon Révérend Père, Le R. P. Provincial229 a décidé que le tome XIII d’Octobre sera imprimé et que l’on commencera sous peu l’impression. Il m’a chargé de vous en avertir pour que vous vous teniez prêt pour votre S. Abraham de Rostov230. En union de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C., Remi De Buck. P.S. Saluez de ma part les PP. Russes, les PP. Matignon, Tailhan, de Guilhermy, Daniel, etc. 40. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 11 octobre 1879

Mon Révérend Père, Je vous envoie une épreuve de la première page du nouveau volume. J’attends votre S. Abrahamius Rostoviensis231, accompagné de son auteur, ou au moins expédié à Bruxelles. Je pense que si [je] n’avais pas votre S. Abraham, tout achevé et censuré avant le 22 de ce mois, nous devrons stater232. 227 De Buck parle sans doute des pans du manteau du Christ du Jugement dernier, tableau de Rogier van der Weyden, propriété des Hospices de Beaune. 228

En tout état de cause, Martynov ne renvoya aucune lettre de V. De Buck à Bruxelles.

229

Joseph Janssens (1826-1900, jésuite en 1845), fut entre autres Provincial de Belgique de 1876 à 1880 et de 1894 à 1898, et recteur du scolasticat à Louvain de 1880 à 1888. 230

MARTYNOV, Abraham de Rostov.

231

Ibidem.

232

C’est-à-dire arrêter.

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

411

Saluez de ma part la colonie russe et les PP. de Guilhermy, Tailhan, Matignon, Daniel, etc., etc. En union de vos SS. Sacrifices et de ceux des autres Pères, tout à vous en J. C., Remi De Buck. Mr Vromant vous salue. 41. Martynov à R. De Buck [Ms. boll 759-4, n° 795]

[Paris,] 1er novembre 1879

Mon Révérend Père, Ce matin, la poste a dû emporter à Bruxelles le rouleau contenant mon manuscrit233. Je tenais absolument à vous l’expédier cette semaine-ci, dans quelques conditions qu’il fût, sauf à le compléter, au besoin, par quelques pages de plus. Suivent des indications sur la correction des épreuves du dossier d’Abraham de Rostov.

J’eus la bonne chance de pouvoir utiliser les bonnes feuilles du grand Ménologe de Macaire que publie la Commission archéologique et qui est arrivé déjà au 31 octobre234. On m’a envoyé le tout (19-30 octobre). Il était trop tard pour prendre ce texte pour base dans la traduction des Actes d’Abramius, et puis vraiment la chose n’était pas nécessaire, les deux textes n’offrant que de légères divergences. Cela encore a besoin d’être signalé au lecteur à la page 38 (J’ai utilisé aussi le peu qu’il y a dans les excerpta Matagniana). Et voilà tout, je pense. Au moins, je ne vois rien à ajouter. Quant aux pages supplémentaires, je vais les rédiger avant de commencer quoi que ce soit d’autre, ne fût-ce que pour vider le sac; mais il peut se faire que le travail envoyé soit condamné au pilon, j’attendrai de ses nouvelles avant de vous les envoyer. D’ici là, je pourrai respirer un peu à mon aise, ce dont j’ai grand besoin. Le temps que j’ai passé au sein d’Abraam a été rien moins que celui du repos. Mais les bienheureux dont nous célébrons la fête, qui est la vôtre par excellence, sont venus à mon aide, et ils ont relevé ma confiance. Qu’ils vous protègent aussi, vous et votre œuvre, que j’estime du fond de l’âme et à laquelle je serais heureux d’avoir contribué pour ma faible part. Votre tout dévoué en N. S., J. Martynov, S.J. P. S. Pierling est depuis longtemps à Rome, et Gagarin depuis deux semaines, interné dans sa chambre par une forte grippe; pourtant il va mieux. À propos, quel est le saint qui a été coulé dans un bœuf d’airain, à Éphèse, ou dans les environs ?235 42. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 17 décembre 1879

Mon Révérend Père, Vous recevrez aujourd’hui une partie de la Vie du B. Abraham236; demain vous recevrez le reste. 233

C’est-à-dire les épreuves de MARTYNOV, Abraham de Rostov.

234

Cf. note 135.

235

Il s’agit d’Antipas, peut-être évêque et martyr à Pergame, évoqué dans Ap. 2, 13. D’après sa Passion, il aurait été traîné dans le temple de Diane et enfermé dans un taureau de bronze chauffé à blanc.

B. JOASSART

412

Vous m’avez écrit ure, seca237. J’ai été heureux d’avoir cette autorisation, car elle m’a paru très nécessaire. Le malheur a été que vous n’avez pas pris au sérieux la lettre que je vous avais écrite au commencement de juin dernier de la part du R. P. Provincial [Janssens], et pour le dire franchement, j’en ai été étonné, car je ne me crois pas tête légère et surtout lorsque j’écris de la part du R. P. Provincial sur une matière si importante. Si au moins vous m’aviez demandé à moi ou au R. P. Provincial si la chose était sérieuse, vous ne nous auriez pas causé tous les désagréments que nous avons eus. Il en est résulté que votre travail nous est arrivé loin d’être achevé. Certainement, si vous vous étiez mis à l’ouvrage quand je vous ai écrit, vous auriez soigné le latin, vous n’auriez pas répété plusieurs fois la même chose, vous ne vous seriez pas étendu sur les choses peu importantes, et qui après avoir été traitées par plusieurs auteurs et par vous restent sans solution. Vous direz avec moi, mon Révérend Père, que si vous aviez eu le temps de revoir et de bien méditer votre ouvrage, vous l’auriez énormément raccourci, car il n’entre pas dans le cadre des Acta Sanctorum de traiter si longuement des choses auxquelles il n’y a pas d’issue. Ce que vous auriez fait, je l’ai fait, aidé du frère Gerste 238, scholastique adjoint aux Acta Sanctorum. J’y ai travaillé trois semaines du matin au soir, et lui un mois entier. Comme vous n’aviez indiqué que rarement en marge le contenu, etc., etc., il nous a fallu souvent lire et relire votre travail pour saisir votre pensée. C’est ce qui nous a fait dire que si nous ne vous comprenions pas bien, d’autres vous auraient probablement encore moins compris. J’ai donc suivi votre conseil ure, seca. Je ne pense pas m’être éloigné une seule fois éloigné [sic] de votre pensée ou manière de voir. Auriez-vous la bonté, mon Révérend Père, de nous renvoyer le plus tôt possible les épreuves et d’y faire les corrections que vous croyez utiles. Je dis le plus tôt possible, par suite de la présente mésaventure, nous statons239 depuis sept semaines. Nous vous envoyons la seconde épreuve. J’espère, mon Révérend Père, que vous ne prendrez pas en mauvaise part ma franchise; je vous connais; vous me connaissez. J’ai fait pour le mieux, et si vous aviez été à ma place, vous auriez fait comme moi. En union, mon Révérend Père, de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C., Remi De Buck. 43. R. De Buck à Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 25 décembre 1879

Mon Révérend Père, Je vous remercie de votre lettre. Je ne suis littéralement offensé en rien, et n’ai pas eu l’intention de vous offenser, ce dont vous devez être persuadé au superlatif. Cependant, je dois un petit mot de réponse. 236

MARTYNOV, Abraham de Rostov.

237

Dans sa lettre du 1er novembre 1879 où il annonce l’envoi du dossier d’Abraham de Rostov, Martynov avait effectivement donné cette autorisation à R. De Buck; l’expression est tirée des Politicorum sive civilis doctrinae libri sex (Leyde, 1589), de Juste Lipse. 238

Achille Gerste (1845-1920, jésuite en 1873) venait de terminer ses études de philosophie à Louvain et avait été désigné comme auxiliaire des Bollandistes, tâche qu’il remplit pendant trois ans. 239

Comprendre «faisons du sur place».

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

413

Long passage où De Buck répond aux «reproches» que Martynov lui a adressés dans la lettre ci-dessus évoquée mais qui n’a pas été retrouvée.

Vous vous étonnez de ce que je crois ne m’être éloigné en rien de votre manière de voir. C’est sincère. Le P. Gerste et moi avons eu la meilleure volonté du monde pour saisir toutes les nuances. Si vous étiez venu à Bruxelles, nous aurions pu vous consulter, ou plutôt vous auriez pu faire le remaniement. Je suis assuré que plus d’un Polonais relégué en Sibérie n’a pas eu la tâche aussi dure que nous. Si c’eût été mon travail, je n’aurais donné d’autre Vie que celle qui se trouve dans l’office, car en dehors, je ne crois presqu’à rien de ce qu’on raconte de lui: on sent partout l’enthousiasme lyrique. Suite des réponses aux reproches adressés par Martynov.

Enfin, expliquons comment la censure a été faite. Le jour de la commémoration des âmes, votre écrit est arrivé. Aussitôt, je l’ai parcouru, et ai vu que les choses essentielles étaient de nature à satisfaire. Le lendemain matin, commençant ma retraite, j’ai prié le frère Gerste d’aller chez le R. P. Provincial avec votre ms. et lui ai dit de dire un mot de ma part au R. P. Provincial, que j’avais vu les choses essentielles et qu’elles étaient satisfaisantes, mais que je ne répondais pas du reste. Je l’ai aussi prié de remettre au R. Père vos deux lettres et de demander qui devaient [sic] vous censurer. Toutefois, je suggérais au R. P. Provincial de charger d’une partie du travail (évidemment la moins importante) le frère Gerste, jeune homme intelligent et modeste. Le R. P. Provincial approuva ma proposition, et me nomma, avec le P. De Smedt, votre censeur240. Lorsque le fr. Gerste eût fini, il en conféra à mon insu, mais avec la meilleure intention, avec le P. De Smedt. Celui-ci, également à mon insu, fit son rapport au R. P. Provincial [Janssens], qui le chargea de me dire que le fr. Gerste et moi nous aurions arrangé votre écrit. Je suppose, mon Révérend Père, que [si] votre écrit eût été discuté in corpore, qu’en serait-il résulté ? D’abord, au moins, un bollandiste se serait récusé, sous le prétexte qu’il n’était pas au courant du russe, etc. Il a fait [une] chose analogue pour un écrit de mon frère; les autres ou n’auraient pas eu le temps de l’examiner, etc., etc. Nous n’aurions absolument abouti à rien. Ou bien votre écrit aurait été rejeté, comme on a fait de certains écrits du P. Van Hecke. Si j’ai seul averti que le volume XIII allait s’imprimer, c’est que seul j’en ai été chargé par le R. P. Provincial. De plus, les autres n’avaient rien de préparé. Et ils avaient des raisons pour garder le silence. Moi, je parlais peu, d’autant plus que le R. P. Provincial m’avait conseillé de ne pas trop triompher. Si vous étiez venu à Bruxelles pendant l’été, vous auriez su davantage. J’ai fait de mon mieux. Remerciez de ma part le P. Tailhan: j’ai tout reçu. Tout à vous en J. C., Remi. 44. R. De Buck à J. Martynov [AFSI, BS Ma 2/4]

Bruxelles, 26 août 1880

Mon Révérend Père, Votre lettre m’a fait infiniment de plaisir. Je sais maintenant où vous êtes, que vous vous portez bien, et que votre amitié est inaltérable. 240

Au sujet de Charles De Smedt, cf. infra.

B. JOASSART

414

Le P. Van Hooff241 est en ce moment à Hatwijk (près de Leyden, Hollande); il y reste encore quelques jours. Le volume des Bollandistes en est à la page 230. Dorénavant nous irons plus vite. L’Anglais dont vous me parlez, c’est Monsieur Edmond Waterton 242; il est établi en ce moment à Deeping. Son adresse est: Edmond Waterton Esq. Deeping Waterton, Market Deeping Lincolnshire. Je lui ai écrit, il y a quelque temps, mais je n’ai pas reçu de réponse. Je suppose qu’il voyage sur le continent. Je vous remercie beaucoup des timbres-poste. Il y a ici beaucoup de changements dans le personnel. Suit l’énumération des changements de «status» de plusieurs jésuites belges.

Saluez, s. v. p., de ma part, Mr le comte de Riant243, et à l’occasion les PP. Gagarin et Balabine. En union de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C. Remi D. B. P. S. Vous m’avez promis de me donner les lettres que mon frère vous a écrites. Je suppose que vous ne l’avez pas oublié. 45. R. De Buck à J. Martynov [AFSI, BS Ma 2/4] Bruxelles, 3 septembre 1880 Mon Révérend Père, Je vous envoie trois exemplaires de votre S. Abraham244. Si j’avais pu m’imaginer que vous désiriez des tirés à part, je vous en aurais procuré tant que vous en auriez désirés. Peut-être retrouverai-je un quatrième exemplaire. Si j’ai ce bonheur, je vous l’enverrai. Quant à notre compatriote martyrisé à Berne, je connais son histoire245. Vous me parlez de documents qui le concernent. Je crois avoir vu ces documents vers 1870. Un prêtre suisse me les a communiqués pour un ou deux jours. Les a-t-il donnés depuis, je n’en sais rien. Comme bien des choses qui devraient venir à ma connaissance n’y viennent pas, il se pourrait bien qu’il en soit ainsi du document en question. On vous a parlé beaucoup à Paris des difficultés qui m’ont été suscitées, vous savez par qui. Fiesole246 a tranché le nœud tout à fait en ma faveur, avec défense pour mes adversaires de parler ou d’écrire sur la matière. 241

Au sujet de Guillaume Van Hooff, cf. p. 416.

242

Edmund Waterton (1830-1887), ancien élève du collège jésuite de Stonyhurst, collectionneur d’éditions du De imitatione Christi. 243

Paul-Édouard-Didier Riant (1836-1888), historien français, spécialiste de l’histoire des croisades, fondateur de la Société de l’Orient latin (1875) et membre de l’Académie des Inscriptions (1880), publia notamment les Exuviae sacrae constantinopolitanae (Genève, 1876). 244

MARTYNOV, Abraham de Rostov.

245

Ce personnage n’a pas pu être identifié.

246

De 1873 à 1895, en raison des difficultés faites aux Jésuites en Italie, la curie généralice s’établit dans cette ville (province de Florence). De Buck fait ici allusion aux difficultés rencontrées pour la publication du tome 13 des AASS d’Octobre et sa formulation signifie que le Général avait tranché la question relative à l’impression du volume, qui, on l’a vu, ne fut toutefois pas suivie d’effet immédiat (cf. supra).

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

415

Liste de «status» de différents jésuites belges.

En union de vos SS. Sacrifices, tout à vous en J. C., R. De Buck.

AU TEMPS DE CHARLES DE SMEDT Charles De Smedt (1833-1911) occupa une place importante dans l’histoire du bollandisme: lors de sa nomination comme bollandiste en 1876, il introduisit la méthode positive dans les travaux bollandiens247. Avant cela, il avait enseigné l’histoire ecclésiastique au scolasticat de Louvain, de 1864 à 1876, et durant ces années, de 1869 à 1870, il résida à Paris comme membre de l’équipe rédactionnelle des Études. Il publia dans la revue une série d’articles consacrés à la critique historique, réunis plus tard dans un volume intitulé Principes de la critique historique248. Nul doute qu’il eut alors des contacts avec les collaborateurs des Études, dont Gagarin et Martynov; on n’en a toutefois pas conservé de traces épistolaires. Pour la période postérieure à 1876, deux lettres seulement ont été retrouvées. La première, du 28 mai 1884249, est une requête de Martynov à son confrère bruxellois pour qu’il procède à quelques vérifications concernant la Vie BHL 1851 de Clément de Rome. La seconde fut écrite le 15 décembre 1888250. Au cours d’un séjour à Paris, De Smedt avait demandé à Martynov «quel [était] le meilleur ouvrage sur la langue slavonne». Ayant indiqué l’ouvrage de Miklosich, Martynov précisa qu’était aussi paru le Handbuch der altbulgarischen (altkirchenslawischen) Sprache. Grammatik. Texte. Glossar, d’August Leskien251. Martynov ajoutait de brèves indications sur des manuscrits concernant les «Vies inédites» de Théodora de Thessalonique († 892) et les Vies BHG 1247 et 1248 de Meletius de Myopolis († 1105), et d’une traduction slavonne d’une Vie de Théodore d’Édesse (9e s.). Il informait éga247

Au sujet de la rénovation de la méthode des recherches bollandiennes, cf. JOASSART, Delehaye, p. 127-137. 248 Cette série comporta les articles suivants: De la critique historique, in Études, 22 (1869), p. 218-247; Des règles de la critique historique, ibid., p. 695-729 et 23 (1869), p. 161184; Études sur la critique historique, in Études, 24 (1870), p. 68-92 et 513-532. Ils seront complétés par les Études sur la critique historique, in Précis historiques, 31 (1882), p. 361-375 et 645-654. Toutes ces contributions seront rassemblées dans les Principes de la critique historique, Liège – Paris, 1883. 249

Ms. boll. 207bis.

250

Ms. boll. 207bis.

251

Une première édition du Handbuch d’August Leskien (1840-1916), professeur à l’Université de Leipzig, parut à Weimar en 1871; une deuxième édition sortit de presse en 1886.

B. JOASSART

416

lement le bollandiste de la parution prochaine de son article À propos de la légende dite italique, réponse à diverses critiques adressées à un article antérieur intitulé La légende italique des SS. Cyrille et Méthode252. 1. Guillaume Van Hooff, Jean Gagarin et Jean Martynov Dès son retour parmi les Bollandistes, De Smedt entreprit de constituer une équipe disposée à mettre en œuvre ses principes méthodologiques pour la rédaction des Acta Sanctorum. Ce ne fut certes pas chose aisée. Un Remi De Buck continua à travailler essentiellement sur la base des règles qu’il avait appliquées jusqu’alors et mourut quelques années plus tard. Benjamin Bossue demeura lui aussi membre du groupe, dont il était d’ailleurs praeses depuis 1871, mais sans plus fournir de réel travail scientifique. Toutefois, il put compter sur la collaboration de bollandistes déjà en place, qui acceptèrent de travailler selon ses principes. Ce fut le cas de Guillaume Van Hooff (1840-1906), Hollandais d’origine, nommé bollandiste en 1873 au terme de son troisième an accompli en Belgique. Il eut quelques contacts épistolaires avec Gagarin et Martynov; mais on n’a conservé que les lettres qu’il leur adressa253. Plusieurs ne présentent guère d’intérêt. Aussi n’en ai-je retenu ici que certaines. Les unes concernent le travail bollandien proprement dit, tel cet extrait d’une lettre envoyée de Lille, le 6 juin 1878 [46], et la lettre expédiée de Rome le 14 juillet 1880 [51] où Van Hooff énonce les étapes des voyages scientifiques durant lesquels les Bollandistes visitaient des bibliothèques dont ils dressaient l’inventaire des manuscrits hagiographiques qui y étaient conservés — c’était là une nouveauté voulue par De Smedt afin de garantir la meilleure édition critique des textes —, ou encore cette note sur le dossier des SS. Thalasius et Baius rédigé par R. De Buck et jugé mauvais [49]. D’autres datent de 1878 et touchent à des sujets concernant la vie de la Compagnie, en particulier la nécessité pour l’Ordre d’enseigner la doctrine de S. Thomas: Léon XIII venait d’être élu pape, et l’on sait qu’il allait faire de la pensée du docteur angélique l’armature de l’enseignement de l’Église [47 et 48].

252

La légende italique… fut publié dans la Revue des questions historiques, 36 (1884), p. 110-166; À propos de la légende… fut inséré dans le t. 41 (1887), p. 220-232, de la même revue. 253 De Smedt put également compter sur le concours de Joseph De Backer (1843-1918), bollandiste de 1874 à 1901. Je n’ai cependant pas retrouvé de traces de contacts épistolaires de ce dernier avec les deux jésuites russes.

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

417

D’autres encore soulignent la recrudescence de l’anticléricalisme en France comme en Belgique, spécialement à propos de tout ce qui concernait les écoles catholiques [49]. L’ultime lettre de Van Hooff, envoyée à Martynov de Maastricht le 3 avril 1888 [53], est plus personnelle: elle évoque le rappel en Hollande du bollandiste désigné pour enseigner l’Écriture sainte au scolasticat de cette ville. 46. Van Hooff à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Lille, 6 juin 1878

Mon Révérend Père, P. C. Nous avons commencé nos voyages littéraires en explorant les bibliothèques. Valenciennes nous a donné un seul codex précieux que nous avons collationné, le P. De Smedt et moi. Maintenant nous sommes à Lille. De Lille, nous irons à S tOmer, Douai, Arras, Cambrai, Amiens peut-être, et ensuite j’aurai le bonheur de voir Votre Révérence à Paris. […] 47. Van Hooff à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Bruxelles, 18 octobre 1878

Mon Révérend Père en J. C., P. C. […] On vous aura communiqué, comme ici, je pense, la lettre du T. R. P. Général qui nous impose la volonté du Souverain Pontife quant à la doctrine de St Thomas dans la philosophie254. Ici, on raconte que le Pape avait voulu imposer comme auteur Sanseverino 255 mais, à la prière du P. Général, il se serait contenté de Liberatore256. Voilà une occasion précieuse pour un grand nombre d’exercer une belle obéissance qui ne me coûterait guère d’effort, car je n’ai jamais eu de la certitude, ni pour le système de materia et forma, ni pour l’atomismus chimicus, beaucoup moins encore pour les entia simplicia. Seulement, je me réjouis que c’est le Pape et non pas le Général par sa propre autorité, qui nous impose cette doctrine. Car pour le Général, on pouvait douter si 254

Dans une lettre du 4 octobre 1878 adressée à tous les Provinciaux de la Compagnie, le Général relayait la volonté de Léon XIII ut in scholis nostris philosophia tradatur juxta doctrinam S. Thomae Aquinatis. Le 1er novembre suivant, le Général reviendra plus en détail sur le même sujet. 255 Gaetano Sanseverino (1811-1865), prêtre du diocèse de Naples, fut bibliothécaire de la Bibliothèque royale de Naples et enseigna la philosophie à partir de 1846. Il lança la revue Scienza e fede, qui se proposait de répondre aux questions posées à la foi catholique par le scientisme montant, et fonda une académie de philosophie thomiste (cf. G.-H. BAUDRY, in Catholicisme, 13 [1993], col. 814). 256 Matteo Liberatore (1810-1892, jésuite en 1826) fut l’un des fondateurs de La Civiltà Cattolica, à laquelle il collabora pendant 42 ans; il y publia de nombreux articles traitant de philosophie, de théologie, de droit, d’économie, des relations entre l’Église et l’État, etc. Il fut l’un des artisans du néothomisme voulu par Léon XIII et contribua largement à la préparation de l’encyclique Rerum novarum (cf. G. MELLINATO, in DHCJ, 3, p. 2353-2354).

B. JOASSART

418

un tel commandement se trouve intra limites Instituti; mais pour le Pape, il est bien clair qu’il a le droit. Du reste, cette volonté du Pape ne fait que répéter ou renouveler un ancien précepte dans la Compagnie, qu’on jugeait aboli par la force des choses. Dieu veuille maintenant que les professeurs agissent avec la prudence nécessaire, la matière étant d’une délicatesse extrême à l’endroit du concile de Vienne en Dauphiné, à l’égard de l’information de l’homme. Il faut bien en convenir: voilà un triomphe pour Liberatore cum suis, comme l’histoire de la Compagnie en a peu à enregistrer. Je me recommande en les [sic] prières de Votre Révérence. Totus tuus in Cho, G. J. Van Hooff, S.J. 48. Van Hooff à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Bruxelles, 21 octobre 1878

Très Révérend Père, P. C. […] J’ai vu avec le plus grand plaisir que nos collèges vont si bien à Paris. Ici, en Belgique, il y a également de quoi remercier le bon Dieu. Pour la raison du précepte papal quant à la doctrine de St Thomas, tout en croyant que le goût personnel du Pape s’y est porté bien volontiers, je pense pourtant que la raison qui a déterminé Sa Sainteté, a été une autre. Je crains qu’on n’ait pas eu la prudence nécessaire, et qu’on ait traité la doctrine de S. Thomas de fausse et d’absurde. Prouver la fausseté sera toujours chose difficile; personne, selon moi, ne l’a fait jusqu’ici. Et certainement, elle est loin d’être absurde. En outre, j’ai entendu de mes oreilles qu’on traitait fort lentement un des termes de la définition dogmatique de Vienne, c’est donc le terme de forma. Or il n’y a pas de dispute parmi les docteurs sur la valeur et la signification de forma dans cette définition. Je crois que le Pape, qui après tout est réellement savant, a pensé qu’il y avait peut-être plus de passion que de raison dans le mépris qu’on commençait à avoir pour cette doctrine. Ma faible intelligence n’a jamais réussi à trouver un argument philosophique pour la doctrine de St Thomas sous ce rapport; et la théologie m’offrait des difficultés sérieuses que le peu d’esprit que Dieu m’a donné n’est jamais parvenu à dissiper. D’autres aussi ne m’ont jamais pu donner les lumières que je manquais. Pour l’atomisme chimique, je ne trouvais non plus des arguments irréfutables, mais cela me mettait à l’aise pour la théologie. Je crois que c’était précisément cette difficulté que St Anselme voulait résoudre à son lit de mort, et pour laquelle il demandait encore peu d’heures à vivre, Deo aliter visum. J’attends en paix la suite. Je m’étonne qu’on ne vous a pas communiqué la lettre du P. Général; vous en trouverez ici la copie. La lettre est très sérieuse. On ne sait à qui cette lettre doive être communiquée, si ce n’est à des hommes qui s’occupent d’études sérieuses. Je me recommande pour les nouvelles que V. R. peut avoir de l’université de Poitiers257. Il y a toujours, je crois, le P. Wilmers258, un de nos plus savants philo257

En 1872, sous l’épiscopat du cardinal Pie (1815-1880), évêque de Poitiers (1849), fut

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

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sophes et théologien accompli. J’avais entendu que certain professeur des Nôtres, des Allemands, s’était empressé de demander au R. Père Général de pouvoir enseigner exclusivement la doctrine de St Thomas quant à la materia prima et forma substantialis. Je ne sais quelle réponse on lui a donnée. Ici tout le monde se porte bien. Je me recommande en vos bonnes prières et salue tout le monde, en particulier les Pères Pierling et Martinof. Totus tuus in Cho, G. J. Van Hooff, S.J. 49. Van Hooff à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Bruxelles, 27 février 1879

Très Révérend Père en J. C., P. C. J’ai reçu votre petit livre259; je l’ai lu, ou plutôt dévoré de suite, et je m’empresse de remercier votre Révérence. Inutile de vous dire que je l’ai trouvé fort intéressant et fort curieux. Votre Révérence me permettra-t-elle de lui exprimer toute l’admiration qui m’a saisi en voyant avec quelle liberté d’esprit, avec quelle indépendance vous racontez des choses qu’une âme moins grande tâcherait de cacher. Assurément, mon Père, je ne suis qu’un homme de rien, et mon jugement n’a que très peu de valeur, mais souffrez que je vous dise que ce petit livre a fait accroître encore le respect que j’avais déjà pour Votre Révérence. Depuis que le bandeau est tombé de mes yeux et [qu’]une amère expérience m’a prouvé combien la grandeur d’âme est rare, ainsi que la vraie sincérité, je suis ravi de trouver des hommes qui se recommandent par ces précieuses qualités. Pour nous, nous sommes bien éloignés de la fin de nos misères. Vous aurez entendu que le P. Remi a imprimé son commentaire de SS. Thalasio et Baio260. Voilà un soufflet qui nous est administré in forma; seulement, c’est avec un gant de papier, qui se déchire par le coup même. Je ne sais plus que penser, ni où nous en sommes. Si j’avais eu le malheur d’écrire une chose pareille, il me semble que j’irais me cacher sous la terre. Tout ce qu’il sait sur ces saints, il peut le dire en une page, car on ne sait presque rien, et le voilà qui trouve moyen de remplir 31 pages d’une façon déplorable, d’une incohérence fatale. Enfin, videant consules. La chose publique en Belgique va très mal, comme Votre Révérence le sait bien. Heureusement que les évêques et les fidèles se lèvent comme un seul homme

créée dans cette ville une faculté de théologie confiée à la Compagnie, qui était conçue comme l’embryon d’une future université catholique, mais qui ne connut qu’une existence éphémère et fut dissoute en 1880. 258

Wilhelm Wilmers (1817-1899, jésuite en 1834) enseigna la philosophie et la théologie dans différents établissements d’Europe, dont la faculté de théologie de Poitiers, entre 1876 et 1880. Son Lehrbuch der Religion (4 vol., Münster, 1851) est son ouvrage le plus célèbre. Il fut un initiateur de la philosophie scolastique en Allemagne (cf. J.-P. GRAUSEM, in DTC, 15 [1950], col. 3543-3544). 259

Sans doute s’agit-il de la Vie du P. Marc Folloppe, de la Compagnie de Jésus, Paris,

260

Cf. AASS, Oct. t. 13 (1883) [30 octobre], p. 351-358.

1877.

B. JOASSART

420

contre les lois d’iniquité qu’on forge261. Jamais le vieux Guillaume262 ne leur a fait tant de mal. Je suis curieux de voir avec quels sentiments ils vont célébrer le jubilé de leur indépendance des Hollandais, couchés, comme ils sont, sous le joug le plus ignoble; j’en ai vraiment compassion, car je les aime bien. Votre Révérence est sans doute charmée en voyant la grandeur, la sagacité et l’angélique activité du Souverain Pontife. Puisse Dieu nous sauver par lui. Je finis en saluant cordialement Votre Révérence. Totus tuus in Cho, G. J. Van Hooff, S.J. 50. Van Hooff à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Bruxelles, 22 juillet 1879

Très Révérend Père, P. C. Je remercie vivement Votre Révérence de la part qu’elle prend à nos tribulations, qui sont pourtant bien inférieures aux vexations qu’on vous fait subir. Inutile de vous dire que nous en sommes participes compatiendo. Tout ce qui fait souffrir mes frères de la Compagnie me touche vivement; mais surtout, je suis péniblement affecté des épreuves de la Compagnie en France. Je rends grâce à Dieu que nos Pères ne restent pas silencieux, mais se défendent vivement. Si dans le siècle passé on avait pu se défendre comme maintenant dans cette même France, je crois que nos ennemis n’auraient pas triomphé à si peu de frais. N’est-ce pas le Père …263 qui a dit à l’occasion de la défense faite aux Jésuites français de se défendre, par leur Provincial, «qu’on ne savait pas trop lequel des deux était le plus aveugle, le commandement ou l’obéissance» ? Nous avons lu avec un vif intérêt les lettres du P. Clair. C’est bien comme ça qu’il faut s’y prendre. Le R. P. Provincial [Janssens] a fait préparer un écrit tiré en grande partie des lettres du P. Clair pour répandre en Belgique, où les mêmes calomnies se répandent avec le discours de M. Paul Bert, qui est répandu à foison264. Or l’affaire de notre Nicolaï a 261 Van Hooff évoque ici ce qu’on a appelé la loi Van Humbeek, dite «loi de malheur» (1879), qui, à l’instigation des libéraux, prévoyait que chaque commune ait une école communale laïque et neutre, sans qu’y soit dispensée une instruction religieuse, et que les instituteurs soient recrutés uniquement parmi les diplômés des écoles normales dirigées par l’État. L’épiscopat prit très vigoureusement position contre cette loi et encouragea la création d’écoles «libres» – c’est-à-dire catholiques –, qui connurent un franc succès, tandis qu’ils interdisaient de donner les derniers sacrements aux instituteurs des écoles officielles et aux parents qui y inscrivaient leurs enfants. Si le roi Léopold II intervint pour que les cours de catéchisme soient assurés dans les écoles officielles en dehors des heures de classe, la tension entre Bruxelles et Rome fut telle que les relations diplomatiques furent rompues. En 1884, les libéraux perdirent les élections et les catholiques revinrent au pouvoir; la loi de 1879 fut abrogée et remplacée par une autre, nettement plus favorable aux écoles catholiques. 262 Guillaume Ier (1772-1843), roi des Pays-Bas de 1815 à 1840, fut le souverain de la Belgique de 1815 à 1830; il se rendit rapidement impopulaire en Belgique par ses mesures autoritaires et souvent peu amènes à l’égard des catholiques. 263 264

Nom propre illisible.

La France connaissait une situation semblable à propos de l’école. Paul Bert (18331886), juriste et médecin de formation, adepte du scientisme le plus radical, entré en politique, fut, avec Jules Ferry, l’un des pères de l’école laïque et obligatoire. Le 5 juillet 1879, il prononça deux discours très virulents contre l’école catholique en général et la morale des jésuites en particulier. Clair lui répondit par deux «lettres ouvertes» intitulées Lettres à Paul Bert en réponse

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

421

puissamment aidé à faire acheter cette apologie par les libéraux de toute espèce265. Voici comment. Dimanche266, kermesse de Bruxelles267, des crieurs catholiques couraient partout, portant en main l’imprimé susdit et criaient: Les Jésuites etc. Tout le monde croyait qu’on vendait quelque chose sur le compte de Nicolaï, et on achetait avec ardeur; on lisait de suite avec avidité, et on était trompé; on avait lu en partie du moins la réfutation de Paul Bert. On voyait des acheteurs pleins de colère, qui déchiraient en pleine rue leur exemplaire. Ce qui n’empêchait pas les passants, dont la curiosité venait d’être excitée, d’acheter encore (le journal a distribué 15.000 exemplaires du supplément)268. On avait donné la même feuille comme supplément aux journaux catholiques, mais le Journal de Bruxelles n’en a pas voulu. On ne peut pas nier que ce journal affiche une étrange modération. Seul parmi tous les journaux catholiques du pays, il n’a pas voulu prendre le deuil lors de la loi malheureuse; seul pour ainsi dire, il a recommandé chaudement de célébrer les fêtes de 1880269, ce qui a déplu à plus d’un de ses meilleurs amis. Pour notre cher Nicolaï, comme vous l’aurez lu ce matin, il est rentré hier après-midi, liberatus non absolutus. Le brave homme se porte assez bien. Je ne raconte pas ici l’histoire, car Votre Révérence a les journaux qui sont au courant. La Belgique passe par une épreuve redoutable. La loi scolaire force les catholiques à des sacrifices inouïs; s’ils réussissent à doter chaque paroisse du pays d’une école catholique, comme on veut le faire, ils auront fait un miracle.

à ses deux discours contre l’enseignement catholique, Paris, 1879; il publia aussi ses Lettres à MM. Jules Ferry et Paul Bert en réponse à leurs attaques contre l’enseignement catholique, Paris, 1879. 265 Tandis que l’on discutait de la «loi de malheur» (cf. note 261), un certain Van Hamme accusa, faussement, le frère Nicolaï, aide des Bollandistes, de l’avoir chargé de placarder en ville un pamphlet contenant des injures et des menaces contre le Roi. La justice fut saisie. Le 16 juillet au soir, les forces de l’ordre perquisitionnèrent au collège Saint-Michel et, le lendemain, le frère fut arrêté. L’affaire, ridicule en soi, mais qui pouvait donner de l’eau au moulin des anticléricaux, se termina quelques jours plus tard: l’accusateur fut bien forcé de se rétracter, le frère fut libéré le 21 juillet suivant et, le 9 août, fut rendu un jugement qui le lavait de tout soupçon. Cet incident fut relaté assez longuement dans les Litterae annuae Provinciae Belgicae Societatis Jesu ab anno 1873-74 ad annum 1881-82, 1ère partie, Historia domorum, Roulers, 1906, p. 13-14. 266

C’est-à-dire le 20 juillet.

267

À cette période de l’année se tenaient alors trois «kermesses» ou fêtes foraines dans la ville de Bruxelles: sur la Grand-Place, à la place des Martyrs et à la place du Vieux Marché aux Grains. Par la suite, le conseil communal de la ville décida de réunir ces trois kermesses en une seule qui se déroulerait au Boulevard du Midi. Cette tradition s’est perpétuée jusqu’à nos jours, la «Foire du Midi» commençant le samedi qui précède le 21 juillet, jour de la fête nationale. 268 Dans un recueil de varia bollandiens, j’ai retrouvé une feuille de format journal intitulée «Les Jésuites. Réponses aux calomnies de M. Paul Bert propagées par la Petite République française»; le titre courant du recto est Supplément à notre numéro de ce jour. L’examen de ce document, non daté, indique de manière nette qu’il s’agit de l’«écrit» préparé à la demande du provincial Janssens. 269

C’est-à-dire les festivités entourant le cinquantenaire de l’indépendance de la Belgique.

B. JOASSART

422

À ce moment j’entends une triste nouvelle. Tout près de Bruxelles vient d’expirer l’évêque Martin de Paderborn270. Personne ici ne se doutait de son séjour si près de nous. On assure que Mgr Dumont de Tournay a signé son abdication. Est-elle reçue par le Pape ? Je l’ignore271. Je salue Votre Révérence de tout cœur, en me recommandant en ses saintes prières. Totus tuus in Cho, G. J. Van Hooff, S.J. 51. Van Hooff à Gagarin [AFSI, BS Ga L 4]

Rome, 14 juillet 1880

Très Révérend Père en J. C., P. C. Quelle agréable surprise que vos bonnes lettres. Votre Révérence garde donc encore le souvenir du pauvre Père Van Hooff. Je vous suis très reconnaissant. Je remercie le bon Dieu du succès pour les peuples slaves. Plût à Dieu ut sit unum ovile et unus pastor !272 J’espère que le séjour aux bains fasse du bien à Votre Révérence, ut corpore valeat non minus quam animo et spiritu. Permettez, très Révérend Père, que je vous le dise: il est doux au cœur d’un jeune homme d’honorer un homme comme Votre Révérence. Je vous porte le plus grand respect avec une véritable affection filiale. Je prie Dieu de vous bénir, de vous conserver, de vous guérir, de vous faire voir encore ici-bas de beaux jours. Pour moi, je ne fais que voyager et étudier273. J’ai parcouru les Gaules cis- et transalpines, l’Italie, c’est-à-dire Rome, Florence, Viterbe, Tivoli, Grottaferrata avec ses doctes moines basiliens, Subiaco, Mont-Cassin, Naples, Bénévent, Nole, Capoue, Terracine. J’ai trouvé partout un grand travail et très bon accueil. Dans deux jours, je quitte Rome. J’irai à Ravenne, Venise, Brescia, Vienne, Munich et puis à Bruxelles. À Rome, tout me plaît ce que Jésus-Christ y a constitué; hors de là plusieurs choses me déplaisent. Mon enthousiasme pour Rome a tourné en profonde commisération. Le monde paraît être sur le point de tomber dans un gouffre affreux, et ici on joue des comédies philosophiques devant le successeur de Pierre. Les diocèses d’Italie s’étiolent par manque de vocations ecclésiastiques. Et si tous les maux avaient amené une effervescence de sainteté, je vous réjouirais, mais je n’en vois rien. Pour notre Compagnie, je constate avec bonheur partout une grande régularité, mais il faut bien le dire, un état anormal très visible. 270 Konrad Martin (1812-1879), prêtre (1836) du diocèse de Cologne, fut nommé évêque de Paderborn en 1856. Il était décédé le 16 juillet précédent, à Mont-Saint-Guibert (commune belge du Brabant wallon), où il s’était réfugié après avoir été démis de ses fonctions par le gouvernement prussien pour s’être opposé au Kulturkampf. Pasteur zélé, il se montra un défenseur vigoureux de l’infaillibilité pontificale, tout en ayant des positions peu œcuméniques et très défavorables aux Juifs. 271 Edmond Dumont (1828-1892) fut nommé évêque de Tournai en 1873. Certes fort actif dans son diocèse, il se lança dans une lutte sans merci contre les libéraux, ce qui le mit en porte-à-faux en particulier à l’égard du reste de l’épiscopat belge. D’abord remplacé par un administrateur apostolique en novembre 1879, il fut démis de son siège l’année suivante (cf. A. SIMON, in BNB, 30 [1958], col. 351-352). 272 273

Jn 10, 16.

À la date du 16 novembre 1880, le diaire des Bollandistes signale seulement de manière fort laconique que Van Hooff fut absent du 4 décembre 1879 au 19 août 1880.

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

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Je ne puis que louer grandement le courage du Provincial de Naples274, qui a ouvert un noviciat, tout rempli d’excellents jeunes gens; il s’en présentent [sic] un grand nombre, mais on est sagement réservé pour l’admission. Il faut bien l’avouer, notre Compagnie passe par une crise tellement violente que, selon moi, si elle en sort intacte, il faudra bien hautement avouer que le bras de Dieu est là. Prions-le pour qu’il conserve sa petite et chère Compagnie. Car je le vois bien, les hommes ne la protègent guère. Je ne crois pas que nous avons beaucoup d’amis au Vatican. On dit, et je le crois, que le Pape est fort triste du mauvais succès de toutes ses entreprises avec les gouvernements, mauvais succès qui ne m’étonne pas du tout. Adieu, très Révérend et très vénéré Père. Portez-vous bien et souvenez-vous dans vos prières de votre très humble serviteur G. J. Van Hooff, S.J. ȗ

ȗ

52. Van Hooff à Martynov [AFSI, BS Ma 2/6]

ȗ Bruxelles, 24 juin 1877

Mon Révérend Père en J. C. Je viens accomplir un devoir de reconnaissance envers Votre Révérence, en vous remerciant du bel exemplaire de Rostowski275 que j’ai reçu il y a quelques jours. Je ne pouvais pas supposer, malgré toute votre générosité connue à [= de] moi, que Votre Révérence eût eu la pensée de me gratifier deux fois d’un exemplaire. Vous vous rappelez que vous aviez dit à l’imprimeur de m’envoyer successivement l’exemplaire destiné à moi, quaterne par quaterne à mesure que cela s’imprimait. Il est vrai qu’après le premier quaterne ou le second, l’imprimeur a continué de m’oublier jusqu’à la fin, et par conséquent, je n’avais rien. Seulement j’avais eu le bonheur d’avoir lu cette admirable histoire. Mais voilà que je reçois un des appendices tout hérissé de noms ineffables, dans le vrai sens grammatical du mot, et je n’ose pas le corriger. C’est pourquoi je prie l’imprimeur de l’envoyer à Votre Révérence. Cela fait, je ne reçois plus rien, et c’est ce qui m’a surpris: j’avais corrigé le précédent de si bon cœur. Pour avoir une explication quelconque de ce fait, j’avais dit au Père Carbonnelle276: «dites au P. Martynov que j’ignore ce qu’est devenue l’histoire». Car je suis très vexé quand je vois qu’on me croit difficile en fait de charité. Jugez donc de ma confusion lorsque je lisais dans votre bonne lettre que vous aviez eu la bonté de me destiner encore un exemplaire de votre édition. J’étais confus et de votre bonté et de la pensée que les paroles du P. Carbonnelle avaient nécessairement l’air de vous rappeler au devoir, comme si un exemplaire m’était dû. Tandis que je vous croyais persuadé que j’étais déjà [depuis] longtemps en possession du livre. Enfin Vromant oubliait encore une fois la commission, et 274

Caietano Mascalchi (1823-1897, jésuite en 1837) fut provincial de Naples du 9 octobre 1876 au 16 février 1881. 275 276

Cf. note 217.

Ignace Carbonnelle (1829-1889, jésuite en 1844). Mathématicien, il partit, en 1860, comme missionnaire aux Indes; il enseigna au collège de Calcutta et collabora à la rédaction du journal catholique The Indo-European Correspondence. En 1868, il rentra en Europe et fut nommé membre de l’équipe des Études. Il fonda également la Société Scientifique de Bruxelles pour laquelle il travaillera jusqu’à sa mort (cf. G. MEESSEN, in DHCJ, 1, p. 649).

B. JOASSART

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moi qui ne voulais pas le faire rougir, je n’osais pas aller réclamer, j’attendais à peu près un mois; alors, je me [suis] dit: «si je ne réclame pas, j’ai l’air de dédaigner la charité du P. Martinof», et j’envoie Nicolaï chez Vromant avec votre lettre pour lui montrer la page 1 dans laquelle Votre Révérence m’écrit que le procureur de Namur avait été chargé par vous de faire la commission à Vromant. Celui-ci proteste de son ignorance et remet de suite un bel exemplaire entre les mains de Nicolaï. Voilà, mon Révérend Père, la raison pour laquelle cette lettre de remerciement vient si tard. Je vous prie de m’en croire que je serai toujours prêt à vous rendre service en tout. Veuillez seulement ne pas m’épargner. Demain je pars avec le P. De Smedt pour aller voir les bibliothèques de Leyde, de La Haye et d’Utrecht. Le bollandisme est encore dans la plus triste condition. Je ne cesse de me répéter souvent: O curas hominum, quantum est in rebus inane !277 Je n’oublierai pas de parler à nos Pères en Hollande de votre belle histoire de Rostowski et de la leur recommander. Tout à vous dans N.S., G. J. Van Hooff, S.J. 53. Van Hooff à Martynov [AFSI, BS Ma 2/6]

Maastricht, 3 avril 1888

Mon Révérend et bien cher Père, P. C. L’aimable lettre que vous avez bien voulu m’adresser il y a 6 semaines, m’a confondu. Votre Révérence a positivement trop bonne opinion du pauvre Père Van Hooff; mais je ne puis pas vous cacher que j’ai été très heureux d’apprendre votre jugement sur mes travaux. Laudari est peu de chose, mais laudari a laudato viro, cela peut être précieux. Du reste, j’ai travaillé pour l’honneur de Dieu et de ses saints, et de la sainte vérité. Vous êtes étonné de ce que le rapporteur dans les Études de Paris ne dit rien de mes travaux. Mais, mon Révérend Père, il énumère plusieurs de mes travaux sur les saints de France; seulement, il n’a pas voulu dire que c’était le P. Van Hooff qui a traité ces saints. Cela n’était pas nécessaire non plus. Soyez bien assuré, mon Rév. Père, que le bollandisme ne perd rien en me perdant; tout le monde fera aussi bien que moi, et peut-être beaucoup mieux. Sachez pourtant que je [ne] suis pour rien dans mon départ. Je n’y pensais pas plus que l’Empereur d’Allemagne. Je combinais juste mon futur voyage avec le P. Houze 278. Ma santé était excellente, le feu sacré n’avait jamais été plus vif en moi, j’avais les plus beaux désirs, et alors, le bon Dieu me fit dire: «Guillaume, allez à Maastricht expliquer mes saints livres», et je suis parti. Et je suis heureux comme un ange. J’étais bollandiste de tout cœur, et de tout cœur j’ai quitté le bollandisme; et si demain on veut me faire le plaisir de m’envoyer aux Indes ou en Afrique, j’irai de tout cœur et je serai heureux comme un ange. Pourquoi donc, direz-vous, [vous] êtes277 278

PERSE, Satires, 1, 1.

Charles Houze (1842-1907, jésuite en 1869) fut attaché au Musée bollandien de 1885 à 1889, puis enseigna la théologie morale au scolasticat de Louvain. Il fut nommé recteur du collège de Namur en 1891, puis de celui de Tournai en 1895. Il dut abandonner cette charge pour raison de santé et, à partir de 1897, il vécut dans différentes maisons. Je n’ai pas trouvé de traces de ce voyage de Houze et de Van Hooff.

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vous séparé du bollandisme ? Je ne le sais pas. Je pense que deux volontés ont travaillé sur moi pour obtenir le même but. Le Prov. de Belgique en me repoussant, et le Prov. de Neerlande en m’attirant279. Vous direz pourquoi pensez-vous cela ? C’est bien simple. Non placebam satrapis. Mais je sais encore que la très douce providence de Jésus-Christ, qui a eu toujours pour moi des attentions infinies, a encore accompli un désir de mon cœur, qui n’était connu d’aucun mortel, et que j’avais sacrifié depuis 15 ans, c’est-à-dire d’expliquer les Saintes Écritures. Voilà, mon Révérend Père, tout ce que je sais. Du reste, je vous suis extrêmement reconnaissant des bonnes paroles d’affection et d’estime que votre bon cœur vous a fait écrire dans votre lettre. Je me recommande bien instamment en vos saintes prières. [Suivent quelques nouvelles de confrères belges]. Mais surtout moi, qui vous aime beaucoup, je vous salue cordialement en N. S. Totus tuus in Cho, G. J. Van Hooff, S.J.

2. Joseph Van den Gheyn, Hippolyte Delehaye et Jean Martynov Dans son entreprise de rénovation du bollandisme, De Smedt chercha parmi ses jeunes confrères en religion d’aucuns capables d’être formés à ses principes. Deux d’entre eux auront quelques contacts avec Martynov, ayant en outre l’occasion de le rencontrer lors de séjours à Paris. De Joseph Van den Gheyn280, qui s’intéressa de plus près au monde byzantin et oriental, on conserve trois brèves lettres adressées à Martynov281. Signalons seulement ici que dans la première, du 29 août 1890, le bollandiste remercie Martynov pour son appréciation positive de son article paru dans les Études consacré à S. Joannice282: «ne vient-elle pas du lecteur le plus compétent que j’ai eu ?», écrit-il. Et dans celle du 5 juillet 1891, il interroge rapidement Martynov au sujet d’Isaac de Ninive, appelé aussi Isaac le Syrien, moine nestorien et auteur spirituel du 7e siècle, et à propos de Nahum de Bulgarie ou d’Ochrid († 910), disciple des SS. Cyrille et Méthode. Hippolyte Delehaye fit aussi partie de la jeune génération de bollandistes engagés par De Smedt — il rejoignit le corps bollandien en 1891 —

279

Le Provincial de Belgique était Joseph Van Reeth (1843-1923) et celui de Hollande Frédéric Heynen (1828-1892). 280 Joseph Van den Gheyn (1854-1913) fut bollandiste de 1888 à 1905. En outre, à partir de 1896, il fut conservateur du cabinet des manuscrits de la Bibliothèque royale de Belgique, dont il devint conservateur en chef en 1909. 281 AFSI, BS Ma 2/6. Elles sont toutes envoyées de Bruxelles et respectivement datées des 29 août 1890, 5 juillet 1891 et 13 mars 1893. 282

Un moine grec au neuvième siècle: saint Joannice le Grand, abbé en Bithynie, in Études, 50 (1890), p. 407-434.

B. JOASSART

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et se spécialisa en hagiographie byzantine283. Onze lettres de Delehaye à Martynov ont été conservées, qui vont du 12 septembre 1891 au 3 septembre 1892; mais une seule du Russe à son confrère belge nous est parvenue, datée du 5 janvier 1894284. Je ne relèverai ici que certains éléments et passages plus significatifs dans ces documents qui traitent souvent de points de détail. D’une part, les lettres de Delehaye concernent quelques-uns de ses premiers travaux, en l’occurrence le dossier de S. Wolfgang, paru en 1894 dans le tome 2/1 des Acta Sanctorum de Novembre (p. 527-597) et ses deux articles Vita S. Pauli Iunioris, in monte Latro, cum interpretatione latina Iacobi Sirmondi S.I. et La Vie de saint Paul le Jeune († 956) et la chronologie de Métaphraste285. Il ressort de ces missives que Delehaye se trouvait alors devant une difficulté que Martynov pouvait aider à résoudre, à savoir la compréhension de travaux rédigés en langue russe. C’était le cas d’une dissertation de Vasili Regel286, utile pour la préparation du dossier de S. Wolfgang, et d’une étude de Vassiljevskij287 relative à Paul le Jeune. Martynov se prêta volontiers à la traduction de ces travaux. D’autre part, Delehaye désirait entrer en contact avec des spécialistes du monde byzantin, d’autant plus que l’étude de cet univers connaissait alors un essor remarquable dans les pays d’Europe orientale. Après la parution de son article consacré à Paul le Jeune dans les Analecta Bollandiana288, il écrit, le 25 août 1892, à Martynov: 283

Au sujet de Delehaye (1859-1941, jésuite en 1876), cf. JOASSART, Delehaye. Rappelons qu’en plus de son éminente compétence en hagiographie byzantine, il se fit remarquer par ses travaux de synthèse et de méthodologie, dont le plus célèbre fut Les légendes hagiographiques (1905), qui lui valut d’être soupçonné de modernisme, sans toutefois être mis à l’Index. 284 Les lettres du bollandiste se trouvent actuellement dans les AFSI, BS Ma 2/6, celle de Martynov dans les archives bollandiennes. 285

Ces articles furent publiés respectivement dans les AB, 11 (1892), p. 5-74 et 136-182, et dans la Revue des questions historiques, 54 = N. S. 10 (1893), p. 49-85. 286 Vasili Regel (1857-1932), issu d’une famille noble protestante, fit ses études à l’Université de Saint-Pétersbourg, et y fut Privatdozent de 1888 à 1898. Professeur d’histoire à l’Université de Dorpat, il créa une revue consacrée aux études byzantines, le Vizantijskoe obozrenie, qui parut de 1915 à 1917. En 1917, l’Université de Dorpat fut transférée à Voronezh, où Regel continua à enseigner. À la p. 541 du dossier, Delehaye note à propos de Regel: «Scripsit dissertationem de Privilegiis dioecesis Pragensis, in Sbornik statei po slavíanovedeniou izdannyi outchenikami Lamanskago, Petropoli, 1883, 8°, p. 265-330, quam ad usus nostros gallicam fecit R. P. Ioannes Martinov, de opere nostro haud semel optime meritus. Breviter idem argumentum attingit in opusculo Ueber die Chronik des Cosmas von Prag, Dorpat, 1892, 8°, 105 pp.». 287

Vasili Vassiljevskij (1838-1899) étudia à l’Université de Saint-Pétersbourg, puis fut l’élève de Theodor Mommsen (1817-1903) et de Gustav Droysen (1838-1908), avant d’enseigner l’histoire médiévale à Saint-Pétersbourg. 288

Il s’agit du texte BHG 1474, publié sous le titre Vita S. Pauli Iunioris in Monte Latro

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

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«N’avez-vous pas quelques adresses de savants avec lesquels on pourrait avantageusement entrer en relations, M. Vasilievskij par exemple ? Je voudrais envoyer Paul de Latros en Russie, mais à qui ?»

Au fil des années, Delehaye se constituera d’ailleurs un réseau de relations avec bon nombre de savants de ces régions. Et Martynov gardera en mémoire ce désir de l’hagiographe, puisque dans sa dernière missive envoyée à Bruxelles le 5 janvier 1894, il écrit: «Pour les Vies des saints en grec, publiées dans des collections russes, vous devriez vous adresser à Mr Loparev, avec qui vous avez déjà entamé des rapports289. Il est à même de vous renseigner mieux que tout autre, excepté peut-être M. Vasilievski. D’autant plus qu’il prépare sa thèse de licence dont les sujets sont les Vies des SS. grecs du VIIIe et IXe siècles, comme source historique. Soyez sûr qu’il s’empressera de vous rendre le service demandé. Il a été extrêmement flatté de [la] mention faite, dit-il, par les Bollandistes de son Ἄθλησις de St Modeste, patriarche de Jérusalem; il en a envoyé un exemplaire en promettant d’en expédier bientôt un autre tiré à part contenant la Vie de Ste Eudocine. Que voulez-vous de plus ?290»

Enfin, Delehaye — et sans doute avec lui l’ensemble des Bollandistes — attendaient de Martynov qu’il rédigeât une étude approfondie sur les saints Cyrille et Méthode, ainsi que le laisse entendre la lettre du premier datée du 12 septembre 1891: «J’espère que nous entendrons bientôt parler de votre grand travail sur les SS. Cyrille et Méthode: nous ne manquerons pas de lui consacrer un long article dans les Analecta».

cum interpretatione latina Iacobi Sirmondi S. I., in AB, 11 (1892), p. 5-74 et 136-182. 289

Chrysante Loparev (1862-1918) étudia l’histoire et la philologie à l’Université de Saint-Pétersbourg (1882-1886), puis fut attaché au personnel de la Bibliothèque publique impériale de cette ville à partir de 1896. Il fit un voyage au Mont Athos et à Constantinople (1896) et en Italie (1902), afin d’y étudier de près les manuscrits hagiographiques grecs (cf. L. N. ZALIVALOVA, Ch. M. Loparev: učenie i ego rukopisnoe nasledie, in I. P. MEDVEDEV [dir.], Archivy russkich vizantinistov v Sankt-Peterburge, Saint-Pétersbourg, 1995, p. 213-225). 290 Les archives bollandiennes conservent quelques lettres de Loparev adressées à Delehaye. Dans l’une d’elles, non datée, il écrit: «Je viens de recevoir une feuille du ‘Bulletin des publications hagiographiques’, dans laquelle se trouve une appréciation de l’Ἄθλησις τοῦ ἁγίου Μοδέστου ἀρχιεπίσκόπου Ἱεροσολύμων, publiée par moi: permettez-moi de vous en exprimer ma reconnaissance la plus profonde*. J’envoie à votre honorable Société un exemplaire de cette publication et je le ferai suivre dans un bref délai le Βίος τοῦ ἁγίου καὶ δικαίου Εὐδοκίμου publié par moi, mais qui jusqu’à présent n’a pas été publié en grec**». *L’Ἄθλησις… (BHG 1299) publiée dans la collection Pamjatniki drevnej pismennosti, n° 91, Saint-Pétersbourg, 1892, fut recensée dans les AB, 12 (1893), p. 473-474. Cette recension n’est pas signée, mais il y a tout lieu de croire qu’elle fut rédigée par Van den Gheyn car, dans sa lettre du 13 mars 1893, le bollandiste demanda à Martynov de lui envoyer cette publication. ** L’ouvrage, éditant le texte BHG 607, publié dans la même collection, n° 96, Saint-Pétersbourg, 1893, fut recensé par Joseph Van den Gheyn dans les AB, 13 (1894), p. 299.

B. JOASSART

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Espoir déçu. Le 5 octobre 1891, Delehaye écrit: «Ce que vous me dites au sujet de Cyrille et Méthode m’afflige, et me pousse à vous dire combien nous serions heureux d’apprendre que vous trouveriez au collège St-Michel, où vous avez travaillé autrefois, le milieu favorable pour l’achèvement de votre œuvre. Avec quelle joie vous seriez reçu ici, je n’ai pas besoin de vous le dire. Peut-être l’idée ne vous était-elle pas venue de reprendre le chemin de la Belgique, où le Musée bollandien vous a abrité si longtemps. Je voudrais vous avoir suggéré le moyen de pousser activement un travail que vous seul êtes en état de mener à bonne fin et qui sera le couronnement de tous ceux que vous avez produits jusqu’ici».

Le 5 janvier 1894, Martynov, en convalescence à Cannes, envoyait sa dernière lettre à Delehaye: «Vous voyez d’où vous arrivent ces lignes. Voilà juste 2 mois que je me trouve ici pour soigner ma bronchite, sans ressentir aucune amélioration, et compte rester jusqu’au prochain printemps. J’espérais trouver ici du repos et du beau temps; je n’ai joui ni de l’un ni de l’autre. Pas du dernier parce qu’il faisait défaut, et pas du premier parce qu’il était sans cesse interrompu par des demandes venant de toutes parts de personnes inconnues ou connues. Et puis, lecture obligée des ouvrages envoyés avec des hommages intéressés et sollicitant quelques lignes d’imprimé».

Et après avoir donné diverses indications scientifiques à Delehaye, il terminait par ce post-scriptum, certainement motivé par le souvenir des séjours accomplis en Belgique tout au long de sa carrière et qui lui avaient permis de connaître bon nombre de ses confrères belges: «Un catalogue de votre Province (1893-1894) serait pour moi d’excellentes étrennes. Il m’intéresse tant».

C’est là l’ultime trace du dialogue épistolaire engagé par les deux fondateurs russes des Études et de l’Œuvre des Saints-Cyrille-et-Méthode. Le 26 avril 1894, Martynov mourut. Delehaye ne s’y attendait manifestement pas, puisque le 1er mai suivant, il écrivait à Franz Ehrle: «Avez-vous appris la mort du P. Martinov ? Cette triste nouvelle m’a d’autant plus affecté que j’allais à Paris en grande partie pour le voir»291. Société des Bollandistes

291

Bernard JOASSART

Cf. B. JOASSART, Franz Ehrle et Hippolyte Delehaye, in AB, 132 (2014), p. 151.

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV

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Abréviations AEGS = Annus ecclesiasticus graeco-slavicus. AFSI = Archives de la Province jésuite de France. BBK = Biographisch-bibliographisches Kirchenlexikon. BNB = Biographie nationale [de Belgique]. BS = Bibliotheca Sanctorum. BSO = Bibliotheca Sanctorum Orientalium. Catholicisme = Catholicisme, hier, aujourd’hui, demain. DANIELUK – JOASSART, Gagarin – Martynov – De Buck = R. DANIELUK – B. JOASSART, Au service de la réconciliation des Églises. Jean Gagarin, Jean Martynov et Victor De Buck. Correspondance (= Tab. hag., 7), Bruxelles, 2014. DBE = Deutsche biographische Enzyklopädie. DBF = Dictionnaire de biographie française. DBI = Dizionario biografico degli Italiani. DE BUCK, André Bobola = V. DE BUCK, Essai historique sur le bienheureux André Bobola de la Compagnie de Jésus, béatifié par Sa Sainteté le Pape Pie IX, in Collection de précis historiques, 3-4 (1853), p. 565-628; cet article fut repris en brochure autonome (Bruxelles, 1853); une 3e éd. «considérablement corrigée et augmentée» paraîtra sous le même titre, à Bruxelles, en 1856. DHCJ = Ch. E. O’NEILL et J. Ma DOMÍNGUEZ (dir.), Diccionario histórico de la Compañía de Jesús biográfico-temático, 4 vol., Rome – Madrid, 2001. DHGE = Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques. DTC = Dictionnaire de théologie catholique. EK = Encyklopedia katolicka. Encyklopedia SJ Pol. = L. GRZEBIEŃ (dir.), Encyklopedia wiedzy o jezuitach na ziemiach Polski i Litwy, 1564-1995 [Encylopédie des Jésuites dans les territoires de Pologne et de Lituanie, 1564-1995], 2e éd., Cracovie, 2004. ES/ЭС = Enciklopedičeskij Slovar’/ Энциклопедическiй Словарь, 86 vol., SaintPétersbourg, 1890-1907. Jésuites Français = P. DUCLOS (dir.), Les Jésuites (= Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, 1), Paris, 1985. JOASSART, Delehaye = B. JOASSART, Hippolyte Delehaye. Hagiographie critique et modernisme (= Subs. hag., 81), Bruxelles, 2000. KBR = Bibliothèque royale de Belgique, Bruxelles. LTK = Lexikon für Theologie und Kirche. MARTYNOV, Abraham de Rostov = Dossier d’Abraham de Rostov rédigé par Martynov dans les AASS, Oct. t. 13 (1883) [29 octobre], p. 36-51. NDB = Neue deutsche Biographie. Sciences religieuses = Fr. LAPLANCHE (dir.), Les sciences religieuses (= Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, 9), Paris, 1996. SOMMERVOGEL = C. SOMMERVOGEL, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, 12 vol., Bruxelles, 1890-1932.

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B. JOASSART INDEX NOMINUM in pagellas 362-429

Abbadie, Antoine d’: 386-387 Abraham de Rostov (S.): 379, 389, 392, 395, 398-399, 407, 410-411, 414 Alexandre Ier, tsar de Russie: 372 André Bobola (S.): 363, 371-372, 377-378, 409 Anselme de Cantorbéry (S.): 418 Aragawi (S.): 388 Aréthas de Najrân (S.): 382 Arsène de Serbie (S.): 379 Assemani, Giuseppe Simone: 364, 369, 376377, 379 Baesten, Vincent, SJ: 399-400, 409 Baius (S.): 416 Balabin[e], Evgenij, SJ: 410, 414 Balbin, Bohuslav, SJ: 409 Balsamon, Théodore: 365, 368 Baronian, Soukias: 392 Basile de Césarée (S.): 378 Basile le Loup: 378 Basile, patriarche de Tarnovo: 369 Basilique, diacre: 365 Beckx, Pierre, SJ: 417-419 Benjamin Ier, patriarche copte d’Alexandrie: 386 Benoît (S.): 377 Benoît XIV: 391 Berchmans, Jean (S.): 382 Bert, Paul: 420-421 Boero, Giuseppe, SJ: 372 Boris / Romain et Gleb / David (SS.): 405 Bossaert, Frédéric, SJ: 401 Bossue, Benjamin, SJ: 391, 416 Bouix, Dominique: 381 Brosset, Marie-Félicité, dit Xavier: 397 Cahier, Charles, SJ: 403 Capitoline (Ste): 394 Carayon, Auguste, SJ: 375, 401 Carbonnelle, Ignace SJ: 423 Carpentier, Édouard, SJ: 382, 395, 397, 401 Chiereghini, Giuseppe, SJ: 373 Chigi, Flavio: 396 Chrysus ou Osgi (S.): 392 Clair, Charles, SJ: 420 Clément de Rome (S.): 415 Constance II, empereur romain: 374 Constantin le Grand (S.): 374 Constantin VII Porphyrogénète: 364 Coste, Edmond de la: 384

Cowper, Benjamin Harris: 397 Cyrille et Méthode (SS.): 405, 425, 427-428 Daniel, Charles, SJ: 410, 411 Daurignac, J.-M.-S. (pseudonyme): 381 De Buck, Benoît: 402 De Buck, Remi, SJ: 386, 391, 396, 398-399, 403, 416, 419 De Buck, Victor, SJ: 362-363, 368, 371, 375, 378, 382, 384-388, 391, 394-397, 399401, 405-407, 409-410, 413 De Smedt, Charles, SJ: 398, 413, 415-417, 424-425 Delehaye, Hippolyte, SJ: 425-428 Delisle, Léopold: 384, 403 Démétrius Bassarabe (S.): 405 Demichelis: 406 Dillmann, Christian Friedrich August: 387388 Döllinger, Ignaz von: 390 Droysen, Gustav: 426 Dulaurier, Jean-Paul-Louis-François-Édouard: 391-393 Dumont, Edmond: 422 Dutau, Adolphe, SJ: 383-384 Edmond Campion, SJ (S.): 374 Ehrle, Franz: 428 Elesbaan (S.): 395 Eroteis (Ste): 394 Étienne de Serbie (S.): 395 Étienne, Jean-Baptiste: 370 Eudocine (Ste): 427 Euphrosyne (Ste): 376, 379 Eusébie (Ste): 396 Euthyme, patriarche de Tarnovo (S.): 368369, 378 Euthymius, évêque de Madyta: 368-369 Farlati, Daniele, SJ: 369 Félix, Joseph, SJ: 394 Ffoulkes, Edmund Salisbury: 390 Fitzpatrick, John Bernard: 402 Fougerais, Émile du, SJ: 405 François-Joseph Ier, empereur d’Autriche: 377 François-Xavier (S.): 382 Frumence (S.): 395 Gagarin, Jean, SJ: 362-363, 389, 398-399, 407, 409, 411, 414-416 Gerste, Achille, SJ: 412, 413 Gloriot, Joseph, SJ: 380 Goemaere, Henri: 401

CORRESPONDANCE BOLLANDISTES-GAGARIN-MARTYNOV Gogol, Nicolas: 393 Gosche, Richard: 386 Gregentios de Taphnar (S.): 383 Grégoire de Nazianze (S.): 378 Grégoire Tsamblak: 370, 375 Guéranger, Prosper, OSB: 374, 377 Guibert, Adrien: 371 Guilhermy, Élesban de, SJ: 407-408, 410-411 Guillaume Ier, roi des Pays-Bas: 420 Guillemaint, Henri, SJ: 371 Guillemaint, Jean-Baptiste, SJ: 371 Haine, Antoine-Joseph: 401 Hénoch: 387 Henri, comte de Chambord: 407 Hilaire de Poitiers (S.): 400, 402 Hilarion de Moglena (S.): 379 Honorius: 390-391 Houze, Charles, SJ: 424 Hymans, Louis: 403 Ignace de Loyola (S.): 372 Innocent III, pape: 365, 369 Isaac le Syrien (S.): 425 Jacques Borovickij (S.): 379 Jacques de Sarug (S.): 395 Janssens, Joseph, SJ: 410, 412-413, 420 Jean Chrysostome (S.): 378 Jean de Chigi (Bx): 396 Jean de Rila (S.): 379 Jean l’Aumônier (S.): 386 Joannice de Bithynie (S.): 425 Joannice, roi des Bulgares: 365, 369, 370 Josaphat Kuncevyč, archevêque de Polock (S.): 374, 378, 386, 403 Julien l’Apostat: 374 Juste de Limoges (S.): 400-403 Kajsiewicz, Józef Hieronim: 373 Kopitar, Jernej (Bartholomaeus): 378 Kulczyński, Ignacy: 364-365, 367-369, 379 Lamy, Thomas Joseph: 396 Le Blant, Edmond-Frédéric: 404 Le Quien, Michel, OP: 369 Łęczycki, Mikołaj, SJ: 408-409 Léon XIII, pape: 416-418, 420, 422-423 Lerdo, Ignace, SJ: 382 Leskien, August: 415 Levacovich, Raphaël, OFM: 368, 378 Liberatore, Matteo, SJ: 417-418 Loparev, Chrysante: 427 Ludolf, Hiob: 388 Macaire (S.): 401 Macaire, métropolite de Moscou (S.): 392, 398, 411 Marc, évêque de Marcianopolis: 369 Maret, Henri: 389

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Maris, Jean-Baptiste, SJ: 385 Martin, Konrad: 422 Martinet, Antoine: 381 Martynov, Jean, SJ: 362, 382, 389, 392, 399402, 415, 423, 425-428 Mascalchi, Gaetano, SJ: 423 Matagne, Henri, SJ: 389, 392, 406-407 Matignon, Ambroise, SJ: 390-391, 407, 410411 Maurice, empereur de Constantinople: 365 Meletius de Myopolis (S.): 415 Mertian, Henri, SJ: 401, 403 Métaphraste, Syméon: 426 Michel Cérulaire: 369 Miklosich, Franz: 394, 398, 415 Modeste, patriarche de Jérusalem: 427 Moïse de Khorène: 392 Mommsen, Theodor: 426 Montmorency, Florent de, SJ: 408 Morel, Jules: 381 Moustier, Françoise Ghislaine de Mérode, épouse de: 405 Moustier, Lionel de: 405 Muquart, libraire: 403, 407 Muralt, Édouard von: 397 Murav’ev [Mouraviev], Andrej: 394 Muzalon, Nicolas: 365, 368 Nahum d’Ochrid (S.): 425 Narychkin, Nathalie: 380 Néophyte (S.): 395, 397 Nestor l’Annaliste/le Chroniqueur (S.): 405 Nestor, m. (S.): 405 Nève, Paul: 399 Nicodème (S.): 395 Nicolaï, Joseph, SJ: 385, 420-421, 424 Nicolas de Myre (S.): 372 Nicolas Ier, pape: 391 Nicolas Ier, tsar de Russie: 363, 372 Papebroch, Daniel, SJ: 364, 386 Parascève (Ste): 376-379 Parascève de Polotzk (Ste): 376, 379 Parascève de Tarnovo (Ste): 363-372, 375, 378 Parisis, Pierre-Louis: 381 Patrignani, Giuseppe Antonio, SJ: 373 Paul (S.): 374 Paul le Jeune (S.): 426 Perrone, Giovanni, SJ: 382 Pierling, Paul, SJ: 408, 410-411 Pierre Asen: 370 Pierre Claver (S.): 381 Pillon, Adolphe, SJ: 401, 403 Pitra, Jean-Baptiste, OSB: 404 Ponlevoy, Armand Frogier de, SJ: 381 Rancé, Armand Jean le Bouthillier de: 377

432

B. JOASSART

Regel, Vasili: 426 Riant, Paul-Édouard-Didier: 414 Rossi, Giovanni Battista de: 384, 404 Rostowski, Stanisław, SJ: 408, 423-424 Rustique de Narbonne (S.): 404 Sapeto, Giuseppe: 388 Schleicher, August: 394 Scitovsky, János: 383 Semenov, Petr: 407 Simocatta, Théophylacte: 365 Sixte V: 391 Somal, Soukias: 393 Sophronius: 390 Soukias (S.): 392 Sparwenfeld, Johan Gabriel: 369, 379 Spiridon (S.): 395 Strahl, Philipp Carl: 370 Szczepkowskij, Gaspar: SJ, 377 Tailhan, Jules, SJ: 407, 410-411, 413 Takla Hāymānot (S.): 382, 385-388 Térence et Neonilla (SS.): 405 Terlecki, Hipolit: 366, 378 Tertullien: 373 Terwecoren, Édouard, SJ: 380 Thalasius (S.): 416 Théodora de Thessalonique (Ste): 415 Théodore d’Édesse (S.): 415 Théodose de Kiev (S.): 405 Théodose, fils de Maurice: 365 Thérèse d’Avila (Ste): 363

Thomas d’Aquin (S.): 416-419 Tinnebroeck, Antoine, SJ: 362-363 Tinones, Jean-Baptiste: 364 Tirelli, Francesco, SJ: 406 Tolstoï, Michail: 398 Toulemont, Pierre, SJ: 387, 403 Tuerlings, Louis, SJ: 385 Valens: 374 Van Caloen, Louis, SJ: 402 Van den Gheyn, Joseph, SJ: 425 Van der Moere, Joseph, SJ: 363 Van der Speeten, Prosper, SJ: 408 Van Derker, Jean-Baptiste, SJ: 409 Van Hecke, Joseph, SJ: 368, 375, 382, 391, 413 Van Hooff, Guillaume, SJ: 414, 416-417 Vandenpeereboom, Ernest Louis: 404 Vasil’ev [Vassilieff/Vassiliev], Iosif: 367, 370-371, 375 Vassiljevskij, Vasily: 426-427 Vénérande (Ste): 366 Verhoeven, Marien: 377 Vromant, Alfred: 411, 424 Warełkowicz, Adam, SJ: 364, 378 Waterton, Edmond: 414 Wilmers, Wilhelm SJ: 418 Wolfgang de Ratisbonne (S.): 426 Wright, William: 398 Znini, Jean: 364

Jean-Marie SANSTERRE SIGNES DE SAINTETÉ ET VECTEURS DE VIRTUS DANS LES MIRACLES POSTHUMES DU CARME ALBERT DE TRAPANI RELATÉS AUX XIVe-XVe SIÈCLES Dans un article récent, je suis revenu, pour les saints autres que la Vierge dans l’Italie médiévale, sur le processus de substitution des images aux reliques évoqué par André Vauchez et plusieurs historiens et historiens de l’art après lui1. Attesté plus tôt qu’on ne le pense d’ordinaire, ce phénomène s’accentua sans conteste dans les derniers siècles du Moyen Âge, mais l’ample corpus étudié invite à ne pas en surestimer l’importance. Les portraits des saints assuraient certes leur présence et, dans une certaine mesure, leur pouvoir loin de leur tombeau — et cela sans doute plus que ne le laissent entendre les textes, qui pouvaient filtrer la réalité ou ne pas s’y intéresser —, mais les reliques de contact et les restes corporels souvent infimes y contribuaient au moins autant. «Les enquêtes des procès de canonisation concernant les miracles à distance font [même] plus volontiers état de l’efficacité des reliques que de celle des images, comme si la virtus des premières constituait une preuve plus évidente de sainteté»2. La recherche ne pouvait être exhaustive malgré le nombre de textes pris en compte. Des témoignages m’ont certainement échappé dans l’un ou l’autre des dossiers étudiés3 et a fortiori dans une documentation fort

1 J.-M. SANSTERRE, «Virtus» des saints, images et reliques dans les miracles de guérison ou d’autres bienfaits en Italie du VIIIe au XVe siècle, in Hagiographica, 20 (2013), p. 25-78. Cf. la bibliographie ibid., n. 1 et 2, surtout A. VAUCHEZ, La sainteté en Occident aux derniers siècles du Moyen Âge d’après les procès de canonisation et les documents hagiographiques (= Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome, 241), éd. revue et mise à jour, Rome, 1988 [1re éd. 1981], p. 524-529. 2

SANSTERRE, «Virtus» des saints, p. 78.

3

Par ex. dans le «Processo Castellano» sur Catherine de Sienne (Venise, 1411-1416); SANSTERRE, «Virtus» des saints, p. 64-66. Il convient d’ajouter un passage d’une lettre de Fra Giovanni Dominici: la guérison, dans sa jeunesse, d’un trouble de la langue qui l’empêchait de réaliser sa vocation dominicaine est mise en relation avec la prière et un vœu devant une image de Catherine à Sienne, sans être attribuée pour autant à un pouvoir de ladite figure, éd. M.-H. LAURENT, Il Processo Castellano (= Fontes Vitae S. Catherinae Senensis Historici, 9), Sienne – Milan, 1942, p. 446-447; trad. italienne T. S. CENTI – A. BELLONI, Il Processo Castellano. Santa Caterina da Siena nelle testimonianze al Processo di canonizzazione di Venezia (= Biblioteca di Memorie Domenicane, 2), Florence, 2009, p. 371; cf. D. GIUNTA, Iconografia cateriniana: committenza, aree di diffusione, tipologie, in Virgo digna Coelo. Caterina e la sua eredità. Raccolta di studi in occasione del 550° anniversario della canonizzazione di santa Caterina da Siena (1461-2011), éd. A. BARTOLOMEI ROMAGNOLI – L. CINELLI – P. PIATTI (= Pontificio co-

Analecta Bollandiana, 133 (2015), p. 433-441.

434

J.-M. SANSTERRE

dispersée. Je voudrais m’arrêter brièvement sur l’un d’eux, celui des miracles posthumes du carme Albert de Trapani (Alberto degli Abbati ou Abati), un personnage mal connu en raison de l’insuffisance des sources, qui fut supérieur provincial de l’Ordre en Sicile et mourut à Messine en 13074. Les miracles accordent aux images du bienheureux une réelle attention qui ne relègue cependant pas les reliques au second plan. La Vie d’Albert où sont relatés ces miracles est postérieure à 1385, date donnée pour l’avant-dernier de ceux-ci. Filippo Burgarella suppose qu’elle fut compilée «in vista del capitolo generale dell’Ordine dei Carmelitani tenutosi a Brescia nel 1387 e concluso da una disposizione pro canonisatione beati Alberti ordinis nostri»5; il est possible aussi qu’elle l’ait été pour le chapitre général tenu en 1399 au couvent «delle Selve» près de Florence, où l’on retrouve la même disposition6. En tout cas, elle précède de plusieurs décennies la reconnaissance du culte d’Albert par la papauté, d’abord vivae vocis oraculo (Calixte III en 1457), puis par une bulle de Sixte IV en 14767. L’œuvre est transmise par diverses copies et recensions qui n’ont malheureusement pas encore fait l’objet d’une étude et d’une édition systématiques8. J’utiliserai ici les éditions de quatre recensions faites par des carmes. Deux d’entre elles figurent sous le numéro 228 de la BHL: celle éditée par le P. Van Ortroy d’après un recueil de pièces hagiographiques carmélitaines copiées à la fin du XVe siècle9 et celle, reprise mitato di scienze storiche. Atti e documenti, 35), Cité du Vatican, 2013, p. 585-618, ici p. 587588. Sur un plan plus général, il faut tenir compte à présent de l’important ouvrage Catherine of Siena. The Creation of a Cult, éd. J. F. HAMBURGER – G. SIGNORI (= Medieval Women: Texts and Contexts, 13), Turnhout, 2013. 4 Cf. notamment L. SAGGI, Alberto degli Abati, in Dizionario biografico degli Italiani, 1 (1960), p. 740-741; ID., Alberto degli Abati, da Trapani, in Bibliotheca sanctorum, 1 (1961), col. 676-680; M. STELLADORO, Il dossier agiografico di Alberto degli Abati, in Bollettino della Badia greca di Grottaferrata, n. s., 54 (2000), p. 437-448, ici p. 444-448; F. BURGARELLA, Sant’Alberto degli Abbati nella Sicilia del suo tempo, in Carmelus, 53 (2006), p. 131-156, repris avec quelques additions in «Un santo vivo nel cuore della nostra gente». Atti del Convegno VII centenario del transito al cielo di S. Alberto degli Abbati, 1307-2007 (Trapani, 8-10 maggio, 2006), éd. E. CASTORO – V. LA VIA COLLI, Rome, 2006, p. 15-51. 5 BURGARELLA, Sant’Alberto, in Carmelus, p. 132, cf. p. 155; in Atti, p. 17, cf. aussi p. 49. J’ajoute la référence à l’édition de G. WESSELS, Acta capitulorum generalium Ordinis fratrum B.V. Mariae de Monte Carmelo, vol. I, Rome, 1912, p. 102. 6

WESSELS, Acta capitulorum, I, p. 124: pro canonizatione beati Alberti de Trapano.

7

Texte dans AASS, Aug. t. 2 (voir infra, n. 10), p. 216-217.

8

Les manuscrits sont recensés par STELLADORO, Il dossier agiografico, p. 437-444.

9

F. VAN ORTROY, Hagiographica carmelitana ex codice Vaticano latino 3813, in AB, 17 (1898), p. 314-336, plus précisément p. 317-336 [ici Vita A]. L’éditeur indique en notes les divergences des autres recensions mentionnées ici, celle de Giovanni Maria Polucci (cf. infra, n. 12) lui étant connue de façon indirecte.

MIRACLES POSTHUMES D’ALBERT DE TRAPANI

435

dans les Acta Sanctorum, d’une réécriture humaniste de Vicenzo Barbaro publiée à Palerme en 153710. La troisième (BHL 229) a pour auteur Théodore de Aquis au XVe siècle11. La quatrième (BHL 229a), par Giovanni Maria Polucci, fut imprimée à Venise en 1499; elle a été retrouvée et éditée par le P. Wessels12. Gênante en soi, l’absence de stemma ne pose pas trop problème pour mon propos puisque les récits miraculaires concordent le plus souvent13. On notera seulement deux points: contrairement aux autres, la recension éditée par le P. Van Ortroy ne parle pas de la partition du corps, d’abord enseveli à Messine, entre le couvent de cette cité «où il avait mené sa vie sainte» et celui de Trapani, sa ville d’origine14; par ailleurs, Polucci a supprimé des miracles et en a ajouté quelques autres survenus plus tard surtout à Venise et à Bologne15. La Vie ne manque pas de souligner que de nombreuses guérisons eurent lieu dès le début près de la sépulture du saint à Messine 16; mais celleci n’est au centre que du premier récit racontant la profanation du tombeau lors d’une guerre intestine, la vue du corps glorieux à genoux comme pour demander vengeance à Dieu, le châtiment des coupables et la translation solennelle du corps dans un nouveau couvent des Carmes à l’intérieur de la ville17. Après la mention, dans trois recensions, de la partition du corps18

10

AASS, Aug. t. 2, Anvers, 1735, p. 226-235 [ici Vita B], avec l’important commentarius praevius de Pierre VAN DEN BOSSCHE, p. 215-226. 11 Éd. DANIEL A VIRGINE MARIA, Speculum carmelitanum sive Historia Eliani ordinis fratrum beatissimae Virginis Mariae de Monte Carmelo, vol. II, Anvers, 1680, p. 631-642 [ici Vita C]. Le Speculum carmelitanum se trouve en ligne sur le site de la Bayerische Staatsbibliothek (Münchener Digitalisierungszentrum). 12 G. WESSELS, Vita S. Alberti Confessoris O.N., in Analecta Ordinis Carmelitarum, an. VI, vol. 3 (1914), p. 52-78 [ici Vita D]. Cette édition n’est pas mentionnée dans le Novum supplementum de la BHL, mais bien dans AB, 34-35 (1915-1916), p. 332. 13 Les différences les plus nombreuses portent sur des détails, la forme et certaines dates. Comme il serait trop long de citer les diverses recensions, je me limiterai, selon les cas, à un résumé ou une paraphrase. 14 Cf., d’une part, Vita A, c. 27, p. 331, et, d’autre part, Vita B, c. 26, p. 232; Vita C, p. 638 (erronément 636), § 2205; Vita D, p. 70. Voir, à propos de cette partition, VAN DEN BOSSCHE, Commentarius praevius, p. 225, c. 35, et supra n. 4, pour le lieu d’origine du saint, Trapani plutôt que Monte di Trapani (Erice). 15

La Vita D quitte la relation commune à partir de la p. 75, l. 28.

16

Vita A, c. 15, p. 325; Vita B, c. 24, p. 232; Vita C, p. 638 (erronément 636), § 2202; Vita D, p. 69. 17 Vita A, c. 26, p. 330-331; Vita B, c. 25, p. 232; Vita C, p. 638 (erronément 636), § 2205; Vita D, p. 70. 18

Voir supra, n. 14.

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J.-M. SANSTERRE

et d’un miracle de guérison près du couvent19, on quitte Messine pour montrer le rayonnement du saint ailleurs en Sicile. Deux miracles viennent justifier la rapide promotion de la sainteté d’Albert par les Carmes de l’île au dam de certains clercs, ce qui fait écho aux controverses et aux conflits d’intérêt des Carmes avec d’autres Ordres religieux et surtout avec le clergé séculier20. Dans un prêche, le prieur du couvent de Lentini avait proclamé que le bienheureux Albert était un saint. Un clerc l’accusa de mensonge; il fut miraculeusement amené par la douleur, puis la guérison, à faire l’expérience de cette sainteté21. À Piazza Armerina, des clercs jaloux de la pieuse affluence lors de la fête du saint célébrée par les Carmes du lieu décidèrent de détruire son image pendant la nuit. Apprenant cela, un homme paralysé depuis dix ans regretta de ne pas être en bonne santé pour défendre l’image; il pria Albert de le guérir pour être en mesure de le faire et fit le vœu de consacrer dans ce cas tous ses biens à accroître son culte. Le saint lui apparut en songe, sous des traits semblables à ceux de son portrait, et lui ordonna de se lever. L’homme se précipita alors pour dissuader ceux qui s’apprêtaient à faire l’œuvre du diable en détruisant l’image. Sa guérison miraculeuse les convainquit et l’on édifia une chapelle en l’honneur du bienheureux22. En 1420, le chapitre général de l’Ordre des Carmes qui se tint à Montpellier ordonna que fût peinte dans tous les couvents l’imago beati Alberti cum radiis23, c’est-à-dire comme un bienheureux avec des rayons autour de la tête et non comme un saint canonisé avec une auréole ronde24. Il semble que l’on n’ait pas attendu cette injonction en Sicile pour représenter Albert et il n’est pas sûr du tout que l’on ait respecté une distinction assez floue dans la pratique25. Toujours est-il que, selon le récit qui pré19 Du fils d’un Génois, Vita A, c. 27, p. 331 (en précisant que le père de eius reliquiis in Ianuam … transportavit); Vita B, c. 26, p. 232-233; Vita C, p. 639, § 2205 (sans mention de l’origine); Vita D, p. 70-71. 20

Cf. A. JOTISCHKY, The Carmelites and Antiquity. Mendicants and their Pasts in the Middle Ages, Oxford, 2002, p. 18-25; C. ANDENNA, La costruzione dell’identità nella «vita religiosa». L’esempio degli agostiniani e dei carmelitani, in Religiosità e civiltà. Identità delle forme religiose (secoli X-XIV). Atti del Convegno internazionale (Brescia, 9-11 sett. 2009), éd. G. ANDENNA (= Le Settimane internazionali della Mendola, n.s., 2), Milan, 2011, p. 95. 21

Vita A, c. 28, p. 331 (miracle daté de 1300, la mort d’Albert l’étant de 1282); Vita B, c. 27, p. 233 (daté de 1308); Vita C, p. 639, § 2206; Vita D, p. 71 (vers 1300). 22 Vita A, c. 30, p. 332-333 (miracle daté de 1304, cf. note précédente); Vita B, c. 29, p. 233 (daté de 1309); Vita C, p. 639, § 2208; Vita D, p. 72-73 (vers 1304). 23

WESSELS, Acta capitulorum…, I, p. 165; VAN DEN BOSSCHE in AASS, Aug. t. 2, p. 216.

24

Sur la distinction, VAUCHEZ, La sainteté… (cf. supra, n. 1), p. 101-102.

25

Vauchez (ibid., p. 99-104) souligne cette fluidité.

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cède, Albert intervient en personne pour empêcher la destruction d’un portrait qui affirmait sa sainteté. Mais, au lieu d’agir à travers sa représentation, il procède de façon indirecte en guérissant le pieux paralytique désireux de la défendre. Signe de sainteté, l’image n’apparaît aucunement dotée de pouvoir. En terre de Trapani, un joueur avait perdu tous ses biens. Désespéré, il vint à l’endroit où se trouvaient les images de la Vierge et d’Albert ou une image les représentant tous deux. Il reprocha à Albert de ne pas l’avoir exaucé alors qu’il l’avait souvent invoqué et il affirma ne plus le reconnaître comme saint; quant à la Mère de grâces, elle était restée sourde à ses prières. Prenant une épée, il fendit les deux figures d’où s’écoulèrent aussitôt des gouttes de sang. Il se précipita hors de l’église et fut foudroyé26. Nous avons là une variante originale du miracle courant de l’image blessée (entre autres par des joueurs malchanceux) puisqu’elle associe à la représentation de la Vierge celle d’un religieux d’un Ordre qui plaçait la vénération de Marie au centre de sa spiritualité et de son identité; la sainteté d’Albert ainsi manifestée est celle d’un «des frères de Notre-Dame», comme on appelait les Carmes27. Sur un autre plan, le sang s’écoulant de l’image constitue un miracle «réflexif» et non «transitif», c’est-à-dire qu’il concerne le saint lui-même en se manifestant sur sa représentation, ce qui le rend présent — au sens fort du terme —, au lieu de s’exercer sur une autre personne28. Le sacrilège est foudroyé non pas devant les effigies, mais hors de l’église. À Palerme, la mère d’un enfant hydropique trop pauvre pour recourir à un médecin vint supplier le saint aux pieds de son image. Elle prit l’huile

26 Vita A, c. 31, p. 333 (daté de 1319); Vita B, c. 30, p. 234 (dix ans après – post secundam Olympiada ! – le miracle de 1309); Vita C, p. 640, § 2212; Vita D, p. 73 (vers 1318). 27

Pour la spiritualité et l’identité mariales des Carmes, bien présentes dans la Vita, cf. entre autres T. BRANDSMA, Carmes, I, in Dictionnaire de Spiritualité, 2 (1953), col. 156-171, ici col. 158-160; ANDENNA, La costruzione dell’identità… (cf. supra, n. 20), p. 98. Pour les images blessées, cf. J.-M. SANSTERRE, L’image blessée, l’image souffrante: quelques récits de miracles entre Orient et Occident (VIe-XIIe siècle), in Les images dans les sociétés médiévales: pour une histoire comparée, éd. J.-M. SANSTERRE – J.-C. SCHMITT (= Bulletin de l’Institut historique belge de Rome, 69), Bruxelles – Rome, 1999, p. 113-130, ainsi que les titres indiqués dans ID., Vivantes ou comme vivantes: l’animation miraculeuse d’images de la Vierge entre Moyen Âge et Temps modernes, in Les images miraculeuses de la Vierge au premier âge moderne, entre dévotion locale et culte universel = Revue de l’Histoire des Religions, 232 (2015), p. 155-182. 28 Selon la distinction faite par B. FLUSIN, Miracle et hiérarchie, in Hagiographie, cultures et sociétés, IVe-XIIe siècles. Actes du colloque organisé à Nanterre et à Paris (2-5 mai 1979), Paris, 1981, p. 299-316, ici p. 305.

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de la lampe et en enduisit le ventre de son enfant qui guérit29. Il doit s’agir, en l’occurrence, de la lampe brûlant devant le portrait du saint dont la virtus, transmise par une substance intermédiaire, semble bien s’exercer à la place de ses reliques. Cette pratique, qui ne constituait qu’une des modalités par lesquelles on pouvait recueillir le pouvoir d’une image sainte30, se retrouve précisément à Palerme au XIVe siècle dans un miracle du franciscain Gérard de Valenza († 1342). Le procédé est un peu plus élaboré: Gérard toucha la langue d’un possédé avec une petite branche de cyprès qu’il avait mise en contact avec une fresque représentant S. Louis de Toulouse et qu’il avait plongée dans l’huile de la lampe brûlant à cet endroit31. Le recours à l’huile ainsi chargée de virtus n’avait sans doute rien d’exceptionnel. Elle n’apparaît pourtant que rarement dans les sources italiennes32 et une seule autre fois dans les miracles d’Albert, sans que soit précisé l’objet devant lequel brûlait la lampe. À Agrigente, une femme est guérie après s’être rendue dans la chapelle de S. Albert, s’être enduit le sein malade de l’oleum lampadis sancti Alberti, l’oleum sancti Alberti, et avoir entendu la messe en son honneur33. Plus qu’à l’huile, c’était à l’eau mise en contact avec des reliques du saint selon une pratique fort répandue, c’était à l’aqua reliquiarum, l’aqua sancti Alberti, à laquelle on avait recours au point qu’elle devint et est encore un trait caractéristique du culte d’Albert, ce qui suppose une large 29 Vita A, c. 35 (daté de 1375), p. 334-335; Vita B, c. 35, p. 235 (1375); Vita C, p. 641, § 2216; ne se trouve pas dans Vita D. 30 Outre la simple mise en présence de l’image, il y avait le toucher (par ex. SANSTERRE, «Virtus» des saints, p. 33-35, 52, 59, 61, 74) ou le «vinage», obtenu en plongeant une image dans de l’eau comme on le faisait pour les reliques, une pratique dont je n’ai toutefois pas trouvé de témoignages pour les images dans le corpus italien. Des exemples de «vinage»: J.-M. SANSTERRE, Sacralité et pouvoir thaumaturgique des statues mariales (Xe siècle-première moitié du XIIIe siècle), in Revue Mabillon, n.s. 22 (= t. 83) (2011), p. 53-77, ici p. 73-74; ID., L’image «instrumentalisée»: icônes du Christ et statues de la Vierge, de Rome à l’Espagne des Cantigas de Santa Maria, in Hagiographie, idéologie et pouvoir au Moyen Âge en Occident. Actes du colloque international du Centre d’Études supérieures de Civilisation médiévale de Poitiers, 11-14 sept. 2008, éd. E. BOZÓKY (= Hagiologia, 8), Turnhout, 2012, p. 463-476, ici p. 476. 31 Bartolomeo Albizi, Legenda s. Gerardi O.F.M. (BHL Nov. Suppl. 3434b), c. 59, éd. F. ROTOLO, La leggenda del B. Gerardo Cagnoli, O.Min. (1267-1342) di Fra Bartolomeo Albizi, O.Min († 1351), in Miscellanea Francescana, 57 (1957), p. 367-446, ici p. 414-415, cf. SANSTERRE, «Virtus» des saints, p. 41. 32

Un exemple de l’Antiquité tardive et un autre en milieu italo-grec: SANSTERRE, «Virtus» des saints, p. 27 et 32-33. 33 Vita A, c. 29, p. 332 (daté de 1304); Vita B, c. 28, p. 233 (1309); Vita C, p. 639, § 2207; Vita D, p. 71-72 (1304). La femme avait promis notamment d’offrir une image d’argent, in honore ipsius (Vita C), ad altare eius (Vita D).

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dissémination de reliques34, qui ne peuvent être que des reliques de contact ou de petites parcelles du corps. — Comme on pouvait s’y attendre, la Vita souligne que déjà aux funérailles d’Albert des morceaux de ses vêtements arrachés s’avérèrent miraculeux; c’est ainsi qu’une noble dame aurait subtilisé un bout de son couvre-chef qui, fréquemment imposé sur les têtes, guérissait toute infirmité des yeux35. — Lorsqu’en 1375 le jeune roi Frédéric, fils du roi Pierre de Sicile, tomba gravement malade, les frères, selon toute vraisemblance du couvent de Palerme, posèrent sur lui des reliques d’Albert et lui firent boire de l’eau où ils les avaient plongées36. De même, pour guérir le fils du comte Guillaume de Peralta, on amena des reliques du saint et on les trempa dans de l’eau que but l’enfant37. C’est encore cette eau que le prieur du couvent de Catane donna à boire à un enfant malade dans la chapelle du bienheureux38 et avec laquelle une noble dame de Caltanissetta se lava le sein putréfié39. La recension de Théodore de Aquis s’achève par ces mots: est autem consuetudo in multis partibus benedicendi aquam per reliquias S. Alberti, qua multi ab infirmitatibus liberantur, praestante Domino nostro Jesu Christo40. Un miracle que Fra Giovanni Maria Polucci prêcha en 1496 en présence du miraculé évoque cette eau de façon originale41. Un prêtre vénitien atteint de très fortes fièvres envoya sa servante au couvent carme pour obtenir l’aqua sancti Alberti. Par ignorance ou plutôt par la volonté de Dieu, elle revint sans celle-ci. Le prêtre se fit alors apporter une coupe (ciatus: cyathus) avec un peu d’eau claire. Et ciato manibus suis assumpto sacerdos devote inquit: «O pater sancte Alberte, scis me singulis annis tuam vigiliam et festum solenniter observare; te igitur rogo, ex eo quod tuis sanctissimis reliquiis aquam benedictam habere non potui, ut hanc aquam tua sancta benedictione benedicas. Et tu, dulcissime Jesu Christe, qui benedixisti aquas Jordanis, te rogo ut par merita tui servi sancti

34 SAGGI, Alberto degli Abati... (cf. supra, n. 4), col. 680; E. PINCI, Notizie e folklore in onore di Sant’Alberto, in Un santo vivo... (cf. supra, n. 4), p. 91-96, ici p. 94-95. 35 Vita A, c. 13 (in fine)-14, p. 324; Vita B, c. 22, p. 232; Vita C, p. 637-638, § 2201; Vita D, p. 69. 36 En 1364: Vita A, c. 34, p. 334; Vita B, c. 31, p. 234; Vita C, p. 640, § 2211. La Vita D ne reprend pas ce miracle et ceux mentionnés aux n. 37-39, mais on va voir qu’elle évoque par d’autres récits l’eau du saint. 37

Vita A, c. 36, p. 335; Vita B, c. 36, p. 235; Vita C, p. 641, § 2216.

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En 1385: Vita A, c. 37, p. 336; Vita B, c. 37, p. 235; Vita C, p. 641, § 2217.

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La même année: Vita A, c. 38, p. 336; Vita B, c. 38, p. 235. Ne figure pas dans Vita C.

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Vita C, p. 642, § 2219; cf. Vita B, c. 39, p. 235-236.

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Vita D, p. 77.

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Alberti hanc aquam benedicas. In nomine Patris et Filii etc.», dicens eam cum tribus Pater noster et totidem Ave Maria devote et cum bona fide bibit.

Albert lui apparut dans son sommeil et lui enjoignit de se lever et de rendre grâce à Dieu. Comme le médecin l’interrogeait sur le remède employé, le prêtre répondit qu’il s’agissait de la virtus aquae benedictae sancti Alberti. La bénédiction conjointe du Christ et de son serviteur appelée par la prière sacerdotale charge ainsi l’eau de virtus sans que le contact avec les reliques soit nécessaire, une façon de prévenir toute interprétation magique de l’aqua sancti Alberti. Mais elle en justifie en même temps la pratique et en montre l’importance. Le dernier récit de Polucci se passe à Bologne quodam tempore42. Un éminent citoyen et procurator de la ville avait été frappé de la peste avec d’autres membres de sa famille. Buvant avec dévotion l’aqua sancti Alberti, il fit le vœu de faire peindre l’image d’Albert dans la cathédrale s’il échappait à l’épidémie ainsi que toute sa maison. Exaucé, il voulut remplir sa promesse, mais l’évêque l’en empêcha, car il n’avait jamais entendu le nom du saint et préférait que la dépense servît à son église. La nuit, Albert lui apparut de façon menaçante et le frappa d’une forte fièvre. L’évêque se fit porter de l’eau du saint, la but avec une grande dévotion, permit au procurator d’accomplir son vœu et ordonna de célébrer tous les ans l’office de S. Albert dans son église. Il fut aussitôt libéré de la fièvre; le procurator vero imaginem fieri cito mandavit, quae in praesenti cernentibus a parte dextra apud altare magnum apparet. Conséquence et non pas médiateur du miracle, le tableau donné en ex-voto proclame ainsi la sainteté d’Albert dans la cathédrale. Somme toute, le témoignage des miracles posthumes d’Albert de Trapani rejoint les conclusions de la recherche précédente. En tant que vecteurs d’une virtus loin du corps saint partagé entre Messine et Trapani, les effigies d’Albert retiennent moins l’attention des hagiographes que les reliques largement disséminées et, en l’occurrence, l’eau mise au contact de celles-ci. Mais elles apparaissent nettement comme des signes d’une sainteté qu’elles contribuent à construire. Université libre de Bruxelles (ULB)

Jean-Marie SANSTERRE

UR Sociamm (Histoire, arts, cultures des sociétés anciennes, médiévales et modernes) Avenue F. D. Roosevelt, 50 CP 133/01 B – 1050 Bruxelles

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Vita D, p. 78.

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Summary. Carmelite Albert of Trapani’s posthumous miracles are examined here on the basis of four recensions of his Vita, written between 1385 and the end of the 15th cent. Images of Bl. Albert are often mentioned as signs of his sanctity, as well as contributing to build that sanctity. Considered as carriers of the saint’s virtus, even though they may be located far away from his body (divided between Messina and Trapani), their importance remains nonetheless secondary respect to the widely diffused relics and the practice of drinking some water which has been in contact with them.

BULLETIN DES PUBLICATIONS HAGIOGRAPHIQUES Saint Jean, higoumène de Scété (VIIe siècle). Vie arabe et épitomé éthiopien. Édités et traduits par Ugo ZANETTI (= Subs. hag., 94). Bruxelles, Société des Bollandistes, 2015, 141 et 73* doubles pages [ISBN 978-2-87365-031-5] Lors d’un séjour effectué au monastère Saint-Macaire à Scété entre la fin de 1980 et le début de 1982, U. Z. mit la main sur une copie de la Vie arabe de S. Jean de Scété, l’un des derniers pères spirituels de Basse-Égypte. Il en donna une édition provisoire dans les AB, 114 (1996), p. 273-405. Un nouveau voyage effectué en Égypte, en 2002, devait lui fournir l’occasion d’examiner un second témoin du texte, dont la lecture lui permit de combler une lacune et de résoudre plusieurs passages difficiles. Un résumé inédit de la même Vie, agrémenté de quelques épisodes originaux et déniché cette fois dans les catalogues de manuscrits éthiopiens, vint entretemps grossir le dossier. Ces découvertes ouvraient la voie à la confection d’une editio maior critica de la Vie de Jean de Scété. Les textes édités dans la collection des Subsidia hagiographica viennent opportunément compléter les informations éparses que l’on pouvait glaner jusqu’à présent dans l’Histoire des Patriarches d’Alexandrie, dans le Synaxaire copte à la date du 30 khoiak (26 décembre), dans le Martyre des Quarante-neuf martyrs de Scété (BHO 584), dans la Vie de S. Samuel de Kalamon (BHO 1036), et celle (toujours inédite, mais résumée en son temps par Evelyn White d’après le ms. Paris Arabe 4888) de deux disciples de Jean, Abraham et Georges de Scété. Jean – à ne pas confondre avec son prédécesseur, Jean le Petit ou le Nain (κολοβός), ascète à Scété au IVe s. – naquit vraisemblablement entre 587 et 595, à Jepromenesin, dans le nome d’Arwāṭ en Basse-Égypte. À l’âge de 18 ans, il se fit moine. Progressant dans l’ascèse, il fut ordonné prêtre, à Scété, et devint higoumène. Tandis qu’il assumait cette fonction, il dut se réfugier dans les marécages pour échapper aux soldats chargés d’obtenir le ralliement des moines au Tome de Léon. C’est là qu’il fut capturé par des Berbères, qui l’emmenèrent en esclavage. Il endura cette condition plusieurs années, pendant lesquelles il dut résister aux avances de plusieurs femmes indigènes. Il réussit finalement à s’enfuir et convainquit un ermite chalcédonien de racheter sa liberté auprès des Berbères. Ayant regagné Scété, il assista notamment le patriarche Benjamin I er (622-661) lors de la translation des reliques des Quarante-neuf martyrs de Scété. Parvenu à l’âge de 90 ans, il mourut après une courte maladie, un 30 du mois de khoiak, entre 677 et 685 sous le patriarcat de Jean III d’Alexandrie. La réputation du défunt était déjà si grande que la foule se précipita pour arracher des lambeaux de son linceul, chacun voulant emporter une relique, ce qui perturba fortement l’inhumation. Le texte, originellement composé en copte bohaïrique, se présente comme une homélie prononcée le jour de la fête du saint ascète, soit le 26 décembre, devant ses fils spirituels. L’orateur anonyme, qu’il faut rechercher parmi ces derniers, affirme avoir repris et complété un éloge écrit par l’un des anciens disciples du saint, le paAnalecta Bollandiana, 133 (2015).

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triarche Jean III d’Alexandrie (677-686). Gratifiés d’une pagination distincte (p. 1*-73*), le texte arabe et sa traduction française ont été divisés en chapitres et en petites sections ou versets (281 au total), tandis que la traduction française du texte éthiopien, naturellement plus court, est munie de paragraphes correspondant aux chapitres arabes, ce qui facilite la mise en parallèle des deux sources. Dans les deux cas, les changements de feuillet survenant dans les manuscrits auxquels recourt U. Z., sont signalés dans les marges de l’édition des textes orientaux. Chose rare de nos jours, la publication est pourvue de plusieurs index: un index biblique, un index des auteurs, œuvres et personnages anciens, un index des auteurs et personnages modernes, un index des manuscrits cités, un index hagiographique, un index linguistique (copticismes, langue arabe et termes remarquables), un index géographique et un index thématique. Même si l’aspect biographique y prédomine, la Vie de Jean fournit de précieux détails concernant plusieurs pratiques liturgiques en usage dans la communauté de Scété, à savoir la célébration mensuelle de la Vierge Marie, le rituel de l’ordination sacerdotale, le jeûne eucharistique, la célébration d’une messe le Samedi Saint, la désignation à la dernière minute du prêtre qui la célèbre, le déroulement de la communion eucharistique, le rituel de préparation des oblats dans le pastophorion et celui de la consignation. La Vie de Jean n’honore pas seulement la mémoire d’un saint, mais elle offre également un témoignage unique sur le monachisme copte durant les dernières décennies de liberté qui précédèrent les vexations infligées aux moines durant le VIIIe siècle.

Jerome. Vita Malchi. Introduction, Text, Translation, and Commentary by Christa GRAY (= Oxford Classical Monographs). Oxford University Press, 2015, XVIII-365 p. [ISBN 978-0-19-872372-1] Le titre choisi par Jérôme pour cet opuscule était De captivo monacho, un titre soulignant le caractère d’exemplum de ce récit, traditionnellement considéré, avec la Vita Pauli et la Vita Hilarionis, comme constituant l’œuvre hagiographique du grand docteur latin. Rarement ce texte aura été l’objet d’une attention aussi scrupuleuse. Le principal mérite de Chr. G. est de nous offrir un commentaire extrêmement détaillé (214 p. pour un texte qui en fait 8), phrase par phrase et parfois mot à mot, mettant en valeur les caractéristiques de la langue, les réminiscences tant classiques que bibliques et chrétiennes, les diverses interprétations proposées, etc. Le texte (accompagné d’une traduction anglaise en vis-à-vis) n’est pas à proprement parler une édition critique – il n’y a pas d’apparat – mais l’éditeur, prenant pour base les éditions de Mierow (1946) et de Morales (2007 dans les Sources Chrétiennes: cf. AB, 125 [2007], 202-204), a collationné cinq manuscrits appartenant aux groupes considérés comme de grande valeur par H. C. Jameson (Studies in the Text Tradition of St Jerome’s Vitae Patrum, ed. W. A. OLDFATHER e. a., Urbana, Ill., 1943), ceci afin d’éclairer une centaine de passages pour lesquels plusieurs lectures sont possibles. Se fondant aussi sur l’usage de Jérôme dans ses autres œuvres, sur la traduction grecque (réalisée entre le début du Ve et le milieu du VIIe s.), ainsi que Analecta Bollandiana, 133 (2015).

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sur les clausules, Chr. G. a opéré ses propres choix, dont elle fournit la liste à la fin de l’introduction (p. 75-76). Celle-ci explore principalement les aspects littéraires et la grande diversité des influences perceptibles à travers le texte de Jérôme, même si, comme l’éditrice en est consciente, elles ont pu s’exercer de façon indirecte. En ce qui concerne la valeur historique du texte, sans doute le personnage de Malchus peut-il n’être qu’une invention (totale ou partielle) de Jérôme; néanmoins, de nombreux détails révèlent sa connaissance du désert syrien, des nomades sarrasins et de la vie monastique. Outre un exemplum de chasteté, le récit présente une évidente analogie avec la relation entre Jérôme et Paula: en proposant Malchus et sa compagne comme modèles de sainteté, Jérôme entendait faire taire les critiques. Quant à son immense talent littéraire, l’analyse minutieuse de Chr. G. le fera encore mieux apprécier à des générations de lecteurs. R. GODDING

The Funerary Speech for John Chrysostom. Translated with an Introduction and Commentary by Timothy D. BARNES and George BEVAN (= Translated Texts for Historians, 60). Liverpool University Press, 2013, XIII-193 p., 1 carte [ISBN 978-1-84631-888-7] L’importance de ce discours funèbre en l’honneur de Chrysostome n’est plus à démontrer: plusieurs travaux publiés par le bollandiste Fl. van Ommeslaeghe au siècle dernier ont mis en évidence qu’il s’agit d’un témoignage de première importance sur la vie du prélat. Le texte qui nous est parvenu n’est pas celui qui fut prononcé sous l’épiscopat d’Atticus (406-425) par un partisan du patriarche déposé, peu après l’annonce du décès de ce dernier, survenu en déportation, à Comane le 14 septembre 407, mais plutôt une version dont le processus de préparation pour la publication ne fut pas mené à son terme; on ne s’étonnera donc pas de trouver, dans ce morceau d’éloquence, nombre d’anacoluthes et de passages obscurs, tous dûment signalés dans la nouvelle traduction. Le texte grec de référence provient de l’édition procurée par M. Wallraff en 2007 (voir AB, 126 [2008], p. 187-188); la nouvelle traduction annotée comble un vide dans la bibliographie disponible en langue anglaise et devrait contribuer à mieux faire connaître le contenu de ce panégyrique, à une époque où la maîtrise du grec est de moins en moins assurée. Le livre contient également la traduction de trente lettres envoyées par Chrysostome durant son exil, soit à des personnages en vue à Constantinople, soit à des ecclésiastiques occidentaux, ou encore à des dames appartenant à l’aristocratie romaine, en vue d’obtenir leur soutien. Les lettres retenues se succèdent, à une exception près, selon l’ordre chronologique proposé par Delmaire (Les “lettres d’exil” de Jean Chrysostome. Études de chronologie et de prosopographie, in Recherches augustiniennes, 25 [1991], p. 71-180), et portent dans la PG 52 les numéros 194, 83, 236, 193, 188, 189, 196, 95, 220, 197, 190, 205, 204, 122, 113, 201, 31, 147, 124, 58, 61, 149, 155, 182, 79, 128, 168, 169, 170 et 132. Ces documents attestent l’isolement de Jean, petit à petit lâché par ceux qui, à Constantinople, l’avaient autrefois soutenu, mais qui s’efforçaient désormais de ne pas compromettre leur propre situation. Ce n’est donc pas un hasard si la réhabilitation de Chrysostome a été ini-

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tiée dans sa patrie, Antioche (cf. Theod. Cyr., Hist. eccl. 5.35.5), pour aboutir finalement au rapatriement de sa dépouille dans la Capitale, le 27 janvier 438. Deux introductions (p. 1-33, pour le panégyrique; p. 121-134, pour la correspondance) fournissent tout ce que requiert la compréhension des œuvres traduites. Aucune question n’a été éludée. On lira avec intérêt les p. 6-12 (sur l’attribution – peu probable à nos yeux – du discours à Cosmas, un diacre des Saints-Apôtres mentionné dans l’Elenchus scriptorum de vita Chrysostomi, BHG 881a), 24-32 (sur la nature des relations tumultueuses entre l’impératrice Eudocie et Chrysostome) et 168-170 (sur la date de l’intronisation de Jean, à situer le 15 décembre 397, immédiatement après son élection, au lieu du 26 février de l’année suivante). Un index général couvre l’ensemble de la publication et permet aisément de retrouver tel passage textuel ou de mettre la main sur l’information désirée. X. LEQUEUX

Espace sacré, mémoire sacrée. Le culte des évêques dans leurs villes (IVe-XXe siècle). Actes du colloque international de Tours, 10-12 juin 2010. Éd. Christine BOUSQUET-LABOUÉRIE – Yossi MAUREY (= Hagiologia, 10). Turnhout, Brepols, 2015, 352 p. + 16 pl. [ISBN 978-2503-54531-8] De la toponymie aux traditions, de l’identité civique au paysage urbain, du choix des prénoms à la liturgie: les liens, souvent posthumes, entre un saint évêque fondateur et la cité où il fut actif s’observent dans nombre de domaines. C’est, grosso modo, autour de ce thème captivant qu’un colloque s’est tenu à Tours en 2010. Riches de 19 contributions (dix en français, neuf en anglais), ses actes offrent des perspectives diachroniques intéressantes sur les figures épiscopales sanctifiées, leur culte et leur possible instrumentalisation ultérieure, mais, dans le même temps, apparaissent très hétéroclites – même trop pour dégager des éléments de synthèse – et de valeur assez inégale. Précisons que les communications sont centrées sur le seul monde occidental, principalement sur la France (onze études), et que la matière est répartie au sein de quatre parties thématiques (I. «Tensions et rivalités» / II. «Naissances idéologiques des communautés urbaines» / III. «Reliques, édifices, images» / IV. «Cultes épiscopaux dans quelques communautés urbaines et rurales»), ce qui impose de fréquents allers-retours, parfois incommodes, dans la chronologie. Voici le contenu détaillé de ce volume, par ailleurs pourvu de deux index (des noms et des lieux) et d’une liste de résumés. I. Dans Apostolic Founding Bishops and Their Rivals: The Examples of Limoges, Rouen, and Périgueux [p. 15-35], S. KAHN HERRICK suggère que le statut apostolique attribué à divers fondateurs de diocèses en Gaule, prétention qui atteint son acmé au XIe s., ne généra pas seulement des rivalités entre sièges concurrents, mais put aussi donner lieu à de sérieuses crispations au sein même des cités concernées. À Limoges, la rédaction de la Vita prolixior (BHL 5552), faisant de Martial un cousin de Pierre et un ami de Jésus, fut vite dénoncée, dès 1029, par un moine étranger, Benoît de Chiusa, qui relayait sans doute les frustrations des chanoines de la cathédrale à l’encontre de l’abbaye Saint-Martial, détentrice des reliques. À

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Rouen, la métamorphose du prêtre martyr Nicaise en évêque fondateur envoyé par le pape Clément, opérée à l’occasion de la translation de ses reliques en 1032, déclencha une riposte des chanoines de la cathédrale contre l’abbaye Saint-Ouen et inaugura une âpre rivalité. Enfin, à Périgueux, si la Vita Frontonis dépeint déjà peu avant 800 son héros comme le fondateur du siège, missionné par S. Pierre, l’érection à la fin du Xe s. d’une abbaye destinée à abriter son tombeau et le renouvellement des Vitae du saint au XIe s., suscitèrent l’ire des chanoines de la cathédrale qui devront patienter jusqu’en… 1464 pour obtenir des reliques de Front. Dans les trois cas, le conflit oppose une église-cathédrale, dont l’origine est intimement liée à un saint fondateur, à une abbaye, située extra muros, qui possède les reliques de celui-ci. Magnifier le saint, en associant son œuvre à une mission apostolique, comportait un double risque – spirituel et économique – pour la cathédrale: un telle réécriture de la genèse chrétienne de la cité était susceptible de remettre en cause la hiérarchie ecclésiastique existante et, dans le même temps, renforçait l’attractivité des reliques du saint, de leur sanctuaire et du bourg avoisinant, parfois au détriment du vieux centre urbain. L’étude laisse deviner la position ambiguë des évêques, à la fois séduits par le prestige que conférait à leur siège une origine apostolique mais aussi confrontés au ressentiment de leur chapitre. Elle n’innove pas totalement, mais présage de l’intérêt de l’ouvrage en préparation, dont elle forme un chapitre. – C’est manifestement aussi une rivalité qui amena les chanoines de la cathédrale de Tours à promouvoir le culte de S. Gatien dans la seconde moitié du XIIIe s. au moyen d’un nouvel office chanté: Y. MAUREY, Saint Gatien ou l’importance d’être le premier à Tours [37-53]. Quasi inconnu jusqu’alors, celui que Grégoire de Tours présente comme un missionnaire du IIIe s. se voit transformé en disciple du Christ et pionnier de l’évangélisation de la Touraine. L’A. dégage avec clarté les axes de ce nouvel office: ce dernier entend exalter la figure du saint en affirmant non seulement sa priorité chronologique sur S. Martin mais aussi le modèle de vie qu’il pût constituer pour celui-ci. La miniature du ms. Tours, BM 212, figurant l’apôtre des Gaules agenouillé en prière devant S. Gatien, traduit remarquablement cette visée en images. Sur le plan littéraire, Y. M. établit que le nouvel office s’inspire de celui de S. Julien du Mans, composé par Létald de Micy, mais détecte aussi «l’ombre tutélaire» de la liturgie martinienne, un réel paradoxe quand on sait que son ambition était précisément de concurrencer l’aura omniprésente de Martin à Tours. On eût aimé que l’A. resitue ce texte liturgique peu diffusé (BHL 3268) dans le dossier hagiographique du saint (BHL 3266-3270). Cet office permit-il d’atténuer la rancœur des chanoines de la cathédrale à l’égard de la notoriété insolente de la collégiale Saint-Martin ? C’est possible mais, comme le note Y. M., l’incorporation de la Martinopolis au sein de l’enceinte urbaine, imposée par la Guerre de cent ans, y contribua sans doute encore davantage, favorisant l’émergence d’une identité citadine commune. – Pourquoi S. Zénobe, premier évêque de Florence dont le culte prospéra au Moyen Âge, ne devint-il pas le patron de la ville ? Cette question sous-tend l’étude de M. C. MILLER, Invoking Saint Zenobius, Embracing Saint John: The Bishop of Florence, his Palace, and the Growth of the City [55-70]. Après avoir montré comment le souvenir de Zénobe s’inscrivit dans les lieux et les traditions, rappelant notamment son rôle primordial dans le rituel

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florentin d’investiture épiscopale, l’A. tente de comprendre pourquoi le patronage de la cité fut attribué à S. Jean-Baptiste. À ses yeux, ce choix s’expliquerait par la titulature du palais épiscopal, issue du baptistère dont il était adjacent, et qui devint plus tard celle du magistrat. Nous aurions donc ici un cas insolite où c’est un lieu, de liturgie et de pouvoir, qui conditionna, davantage que le prestige lié au premier évêque, le patronage de la ville. II. S. Hilaire, pourtant Père de l’Église, connut de semblables difficultés pour s’imposer comme figure tutélaire de Poitiers, ville dont il fut l’un des premiers évêques, surtout après la destruction de ses reliques en 1562. A. COUTELLE livre une réflexion stimulante sur Le culte de ‘Monsieur Saint Hilaire’ à Poitiers au e XVII s.: un saint évêque à la reconquête de sa ville [73-93]: les efforts menés pour revitaliser le culte du grand théologien – comme l’érection en 1616 d’une colonne commémorative ou l’acquisition de nouvelles reliques provenant du Puy en 1657 – semblent avoir été insuffisants pour contrer son «effacement progressif» des cérémonies civiques du temps. Le succès rencontré par les cultes de S. Ignace, promu par les Jésuites (qui, lors des fêtes de la canonisation en 1622, opèrent un subtil amalgame entre leur fondateur et Hilaire), et de Ste Radegonde, favorisé par la régente Anne d’Autriche, explique en partie ce «rendez-vous manqué» entre l’évêque et sa ville. L’apathie du chapitre St-Hilaire, dont les membres se souciaient manifestement plus de défendre leurs prébendes exorbitantes que de la glorification d’Hilaire, fournirait une autre clé d’explication. – L’article de D. BARBE, Saints évêques bâtisseurs et recherche d’unité en Italie et en Gaule (IVe-VIIe s.) [95-109] propose une subtile plongée dans la théologie de l’époque paléochrétienne. S. Ambroise et, à sa suite, d’autres pontifes, tel Victrice de Rouen, auraient encouragé une dévotion globale à l’ensemble des saints, en vue de promouvoir l’idée d’unité de l’Église et le concept de communion des saints. Divers exemples laissent penser que ces évêques cherchèrent à traduire cette notion de culte collégial dans les sanctuaires qu’ils firent bâtir – dans leur aménagement comme dans leur décoration (le baptistère d’Albenga, en Ligurie, en offre sans doute le plus beau témoignage). – Au cœur de cette construction symbolique se trouvait l’autel, auquel furent associées les reliques et bientôt les tombes, matérialisant «l’union des vivants et des morts aux saints, dans une même participation au mystère eucharistique, réactualisé à chaque messe» (p. 102). Malgré de réels efforts pédagogiques, cette visée théologique supposée se solda en fin de compte par un «demi-échec». Plusieurs des basilicae apostolorum érigées aux IVe et Ve s. (Milan, Brescia, Die, Nantes…) abandonnèrent leur vocable collectif initial au profit d’une titulature individuelle, célébrant le fondateur de l’église ou le saint dont on conservait les reliques. Cette évolution atteste sans doute la difficulté pour les fidèles de comprendre cette notion de communion des saints et le besoin de nouer un rapport personnalisé avec un saint précis. Si le fil de l’argumentation est parfois ardu à saisir, certaines formulations stimulent une profonde réflexion. – St. MOURÉ, Saint-Denis et saint Denis: de la capitale du royaume à la tête du corps politique [111-129], considère, sous l’angle de l’ancien droit public, les rapports entre le patronage de S. Denis, l’églisenécropole des rois au nord de Paris et l’émergence d’un sentiment d’appartenance au royaume de France. Du cri de ralliement «Montjoie Saint Denis !» à la profana-

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tion des sépultures royales dans la basilique en 1793, l’A. propose diverses interprétations au sujet de la fonction tutélaire de Denis – dont certaines nous sont apparues abscondes ou au contraire aller de soi – et suggère, à juste titre, que celle-ci s’estompa au fil des siècles, le saint n’étant plus à l’époque moderne qu’un «lointain auxiliaire de la monarchie». – Des extraits du Liber Pontificalis, et plus encore de la Vita S. Gregorii (BHL 3641), écrite par Jean Diacre entre 873 et 876, amènent Br. JUDIC à affirmer que La protection de Grégoire le Grand sur la Ville au IXe s. [131144], fut une réalité nouvelle à Rome, succédant à un culte relativement discret jusque-là. L’A. commente ces passages, parfois cocasses, qui d’une part illustrent la présence «fantasmatique» du saint (il s’agit surtout d’apparitions survenues au monastère Saint-André du Caelius qu’il avait fondé) dans la ville, où il incarne la papauté et sert la revendication de la primauté romaine, et d’autre part attestent l’existence de reliques étonnantes lui étant alors associées, comme son lit, un fouet et un antiphonaire. – Le courant ascétique, favorable à l’austérité et au célibat, qui se propage en Occident aux IVe et Ve s., fut-il compatible avec une gestion épiscopale efficace au service de la cité ? C’est l’une des questions auxquelles s’intéresse M. S. SKINNER dans Respected Bishops and Holy Women: Caught between Cities and Ascetic Communities in the Western Empire (350-450 CE) [145-169], à travers l’analyse, compacte et originale, de quatre paires d’évêques (Damase de Rome / Ambroise de Milan – Martin de Tours / Priscillien d’Avila – Paulin de Nole / Augustin – Honorat d’Arles / Hilaire d’Arles). Ces portraits illustrent la diversité des destinées et des sensibilités – de Damase, représentant d’une Église impériale hostile au mouvement ascétique, à Paulin de Nole, exemple «that an ascetic leader could also be a successful bishop», en passant par Priscillien, martyrisé pour ses initiatives rigoristes. En tout état de cause, l’ascétisme occidental fut plus modéré qu’en Orient, la majorité de ses partisans évêques «gardant leur statut et leur influence d’aristocrates». Les relations de ces prélats avec les femmes, annoncées dans le titre de l’article, sont envisagées à partir des exemples de Thérasia, épouse de Paulin de Nole, et par les deux Mélanie, en contact avec Augustin. – L’Office de S. Brice (VIIIe-IXe s.), prototype de l’office épiscopal «dynastique» dans l’histoire du chant grégorien ?: la brève analyse de J.-Fr. GOUDESENNE [p. 171-187], qui édite ce texte liturgique méconnu, vraisemblablement élaboré entre 800 et 850 à partir de la Vita Briccii (BHL 1452) et de l’office majeur de S. Martin, suggère une réponse affirmative à cette question. Le «binôme» Martin / Brice, prélats se succédant à la tête de l’Église tourangelle, paraît avoir donné naissance à une «nouvelle typologie d’office», adaptée aux dynasties épiscopales, ayant ensuite servi de modèle dans le nord de la Gaule franque aux Xe et XIe s. (une annexe énumère ces «offices épiscopaux de type dynastique»). La composition de cet office, quelques décennies après celui de Martin, illustrerait par ailleurs le «souci propre aux églises des temps carolingiens (…) de ne pas se focaliser sur un seul saint». Ce postulat mériterait, à lui seul, une étude spécifique. III. E. SZAŁEK, Saint Adalbert. A Patron of Gniezno, Poland and Europe [191-201], se limite à rappeler la place occupée par l’évêque martyr († 997), dont la dépouille fut rachetée à prix d’or et ramenée à Gniezno par le prince Boleslas, dans l’histoire de la ville et la genèse de l’État polonais. La présence de ses reliques

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contribua, on le sait, à faire de Gniezno le premier archevêché de Pologne, y attirant des personnalités politiques (d’Otton III en 1000 aux premiers ministres de cinq pays européens en 2000), et y stimula la production d’œuvres d’art, d’un récit hagiographique (disparu) et de plusieurs hymnes liturgiques que l’A. passe, très sommairement, en revue. – M. HUTTERER, Sculpted Processions: Flying Buttresses and the Delineation of Sacred Space in the Thirteenth Cent. [203-214] s’intéresse aux statues ornant, à partir du début du XIIIe s., les contreforts extérieurs (ou les pinacles) de plusieurs églises gothiques et à leur portée symbolique. Dans les cinq cas considérés – Reims, Chartres (l’un des plus anciens exemples de ce type d’aménagement), Saint-Quentin, Rouen et Beauvais –, ces statues à taille humaine figurent le plus souvent des anges ou des évêques, vraisemblablement les saints-évêques du siège. Ces derniers apparaissent donc, de manière allégorique, comme le «physical support» de l’édifice, de même qu’ils furent ceux qui jetèrent les fondations de l’Église dans leur ville. Si l’article, parfois redondant, s’arrête à des évidences – on se serait ainsi douté que ces programmes iconographiques marquent une zone de transition entre l’espace sacré et le monde extérieur… –, il véhicule aussi une interprétation nouvelle, à savoir que ces statues, plutôt que de commémorer des personnages précis, célèbrent dans la pierre «through their rythmic placement» l’autorité rituelle des évêques et, plus précisément, «some processionnal action, and sometimes more explicitly call to mind the processions performed as part of consecration ceremony». Une extension de l’enquête aux miniatures aurait peut-être permis d’étayer une telle théorie. – S. LUTAN-HASSNER, Candes-Saint-Martin: Sacred Space, Fateful Memory [215-233], étudie le programme iconographique de la belle collégiale de Candes (Indre-et-Loire), où S. Martin rendit l’âme en 397. Si on regrette quelques erreurs (ex. p. 216, ce n’est pas «Grégoire le Grand», mais bien Grégoire de Tours, qui décrivit la mort de Martin), et des illustrations trop peu nombreuses, l’article avance divers arguments suggérant d’identifier les bienfaiteurs de l’église aux Plantagenêts. La présence d’une chapelle surélevée, conçue dans la tradition carolingienne, et l’expertise du porche nord, en particulier des magnifiques têtes royales sculptées vers 1180-1190, plaident notamment en ce sens. Plus globalement, l’investissement des Plantagenêts dans la collégiale de Candes témoignerait de leur intérêt pour S. Martin (l’A. rappelle ainsi que le De reversione b. Martini a Burgundia tractatus [BHL 5653], composé à Marmoutier entre 1137 et 1156, conférait déjà un rôle majeur à Ingelger, fondateur mythique de leur lignée, dans le rapatriement du corps saint). – A. TÜSKES signe une note minimale sur Le culte de S. Louis d’Anjou (ou S. Louis de Toulouse) en Hongrie aux XIVe-XVIIIe s. [235-239], égrenant quelques indices de son culte (église et abbaye à Lipova, miniatures, textile liturgique, statues…), promu d’abord par la dynastie angevine auquel il était apparenté, puis, aux XVIIe et XVIIIe s., par les Jésuites et les Franciscains. IV. J. MCMULLEN, Re-locating Sacred Space: Creating Place through Nature Miracles in Early Irish Hagiography [243-258] illustre, à partir de trois récits du e VII s. – la Vie de S. Columba par Adomnán (BHL 1886), les écrits de Muirchú (BHL 6497) et Tírechán (BHL 6496) sur S. Patrick – et de la Vie tardive de S. Berach, la fréquence dans l’hagiographie irlandaise des miracles impliquant des éléments naturels. Plusieurs exemples, forcément spectaculaires, montrent en effet

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la neige, le brouillard, le feu, la terre, les vents, les rivières et même les monstres (celui du Loch Ness dans la Vita Columbae) obéir à l’injonction d’un saint. Ces prodiges traduisent la puissance de ce dernier mais créent aussi des espaces sacrés, qui conservent parfois un lien avec lui ou sa paruchia, à travers leur toponyme. L’A. émet quelques réflexions susceptibles d’expliquer cette densité de miracles spécifique au monde celtique et à cette île longtemps dépourvue de véritables villes. – Dans Quimper et les fêtes de saint Corentin entre 1886 et 1914: renouvellement d’une dévotion [259-268], G. RIOU montre comment la remise à l’honneur, en 1886, d’une relique du premier évêque supposé de Cornouaille, attestée depuis le e XVII s. mais tombée en déshérence, amorça un vif regain d’intérêt pour le saint. La restauration de cette fête patronale, orchestrée par l’archiprêtre de la cathédrale, fut confortée par d’autres initiatives ecclésiastiques (création d’un triduum, décoration de la chapelle, procession du bras-reliquaire…). Elle s’accompagna d’une réinterprétation de la vie de S. Corentin qui, mise au goût du jour, permit à l’Église de dénoncer les attaques qu’elle estimait subir de la part de la République, et plus généralement, la laïcisation de la société. – L’attribution d’un prénom reflète-t-il une dévotion délibérée et ardente à un saint ? L’étude d’É. COURIOL, Quand tous les enfants que Claude Gay tenait sur les fonts baptismaux étaient prénommés Nizier ou Niziere…: saints évêques lyonnais et dation des prénoms aux XVIIe et XVIIIe s. [269-280], entend examiner la question. Explorant les registres paroissiaux de Lyon du milieu du XVIIe s. à la Révolution française, l’A. conclut que les habitants portaient à leurs saints évêques – au nombre de 16, mais sans véritable figure emblématique selon nous (Pothin, Irénée, Eucher et Nizier sont les plus connus) – un «attachement incontestablement fort», même si la dation du prénom de ces évêques constitue une pratique très minoritaire. Pour l’observateur extérieur, les chiffres donnés (dix nouveau-nés portent ainsi le nom de S. Ennemond… en 140 ans) invitent plutôt à relativiser cet engouement... La popularité du prénom Nizier s’avère certes un peu plus nette mais s’explique parfois par un rapport avec la paroisse éponyme de Lyon, très peuplée (la seconde de France, en importance), davantage que par la recherche d’un lien personnel avec le saint. Le cas du libraire Claude Gay, choisi comme parrain de huit enfants prénommés Nizier entre 1683 et 1709, paraît en revanche illustrer une réelle dévotion à l’égard du saint évêque lyonnais. Si ses conclusions restent donc à étayer, cette étude offre des observations instructives sur la manière de conférer un prénom (souvent celui du parrain et de la marraine) à un enfant durant l’époque moderne et sur la dimension religieuse que cet acte recèle ou non. – T. ISSARTEL, Les saints évêques de Beneharnum (Lescar): enjeux religieux et politiques de la mémoire épiscopale dans la souveraineté de Béarn (XVIe-XVIIe s.) [281-300], signe un excellent article sur la postérité, modeste, de deux «sansgrades» de l’hagiographie: S. Julien, considéré comme le premier prélat de Lescar et dont la légende, tardive, fut calquée sur celle de S. Martial, et l’évêque S. Galactoire, ami supposé de Clovis et patron principal de la ville. T. I. met successivement en évidence les efforts menés par l’évêque Jacques de Foix, dans son bréviaire de 1541, pour privilégier le second et en faire une figure antihérétique fédératrice, les turbulences liées à l’établissement du calvinisme en Béarn culminant avec la destruction des reliques en 1569, le rétablissement du culte des saints évêques à partir

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de 1620, et le rôle joué dans ce processus par Pierre de Marca, futur ministre de Louis XIV, désireux de relancer le culte de S. Galactoire. Une entreprise qui n’aboutit pas vraiment, l’Église favorisant alors une sainteté plus consensuelle et universelle, à travers la dévotion à la Vierge et au Saint-Sacrement. – M. P. DIAS PACHECO, De civitate Dei: The Architectonic Campaigns of Saint Friar Bartolomeu dos Martíres in Braga (1559-1582) [301-314] brosse le portrait du bienheureux archevêque de Braga, modèle de réformateur tridentin, dont les initiatives architecturales, marquées par le style maniériste, façonnèrent le visage de la cité. Obnubilé par l’éducation – de son clergé comme des fidèles –, ce dominicain édita (ou promut) pas moins de 42 traités et fit édifier, en plus de routes, de ponts et d’hospices, de vastes lieux de formation: principalement le collège Saint-Paul (incluant «l’église jésuite la plus austère de tout l’empire portugais»), confié à la Compagnie de Jésus mais contrôlé par l’archevêque, et le Seminário Conciliar, «premier séminaire construit dans la péninsule ibérique après le Concile de Trente». Barthélemy, qui avait dans sa jeunesse été le prédicateur de la maison royale, renonça à son poste pour terminer humblement sa vie († 1590) dans une cellule du couvent de Viana do Castelo. – Enfin, Á. EGILSDÓTTIR, Constructing Space, Cult, and Identity: Saintly Bishops in Medieval Iceland [315-322] se focalise sur deux des plus anciens saints locaux de l’île, restée longtemps rurale: Þorlákr Þórhallson († 1193), évêque de Skálholt, et Jón Ögmundsson († 1121), évêque d’Hólar. Si leurs traditions hagiographiques s’avèrent contemporaines (début du XIIIe s.), celles-ci transmettent une conception assez divergente de la sainteté: alors que la très conventionnelle Þorláks saga exalte l’autorité cléricale et masculine et dépeint le saint comme un modèle absolu, distant de ses semblables, la Jóns safa présente au contraire un évêque proche de ses ouailles, dont les interventions posthumes concernent avant tout les petites gens, des deux sexes. Fr. DE VRIENDT

Estudios de filología e historia en honor del profesor Vitalino Valcárcel. Ed. Ińigo RUIZ ARZALLUZ, e. a. (= Veleia. Anejos, series minor, 32). Vitoria-Gasteiz, Universidad del País Vasco, 2014, XXV-1144 p. en 2 vol., ill. [ISBN 978-84-9082-048-3] Quiconque est confronté à l’hagiographie latine hispanique rencontre nécessairement le nom de Vitalino Valcárcel. Pour célébrer l’accession à l’éméritat de l’éminent philologue, membre du comité de lecture des AB, ses collègues lui ont offert d’imposants mélanges, riches de pas moins de 71 contributions. Nous relèverons ici seulement celles qui concernent l’hagiographie. Volume I: M. del Mar AGUDO ROMEO, Tópicos hagiográficos en la Cronica actitatorum temporibus Benedicti pape XIII de Martín de Alpartir (1-17). Cette chronique contemporaine due à un partisan de l’antipape aragonais Pierre de Luna le présente comme un semi-martyr. – P. FARMHOUSE ALBERTO, Commemorando a los mártires en la Hispania Visigótica: los tituli in basilica de Eugenio de Toledo (27-42): présentation de deux des quatre épigrammes composés par Eugène pour des édifices de culte, la basilique de Ste Engracia et des 18 martyrs et celle de SaintAnalecta Bollandiana, 133 (2015).

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Vincent à Saragosse. – J. ARAGÜÉS ALDAZ, Ramon Llull: la invención del milagro mariano (91-109). Dans le Llibre d’Ave Maria et le Llibre de santa Maria, Raymond Lull propose une série de miracles mariaux qui tiennent davantage de l’exemplum, puisqu’ils tendent à illustrer des questions théoriques complexes et mettent en scène des personnages fictifs. Dans l’Arbre exemplifical, on voit même la Vierge se faire narratrice. – W. BERSCHIN, Der Kreuzfahrer Aldo von Piacenza bringt aus Konstantinopel eine Vita der hl. Justina mit ein weiteres Werk des GriechischÜbersetzers Johannes von Amalfi (a. 1101) (129-136): cette Vita, publiée par B. Møller Jensen en 2012, constitue un nouveau témoignage sur l’œuvre du traducteur Jean d’Amalfi, devenu âgé et presque aveugle. – E. D’ANGELO, Dall’Umbria alla corte di Spagna. L’opera agiografica di Alessandro Geraldini (207-222): édition critique de la Vie de S. Albert évêque de Montecorvino (BHL 231) par Alessandro Geraldini di Amelia, lequel deviendra ensuite évêque de Santo Domingo († 1524). – J. M. DÍAZ DE BUSTAMANTE et M. E. LAGE COTOS, El latín como signum de santidad in fieri: observaciones sobre la vida y la obra de la venerable María Antonia Pereira, O.C.D. († 1760) (223-237). Dans son autobiographie, cette carmélite prétend avoir appris d’elle-même à lire et à écrire; le bréviaire lui aurait servi pour apprendre le latin. – J. M. ESCOLÀ TUSET, La prosa de las encíclicas mortuorias como testimonio de la tradición literaria en la cultura medieval (255-268): montre comment ces lettres encycliques (ou rouleaux des morts) par lesquelles est annoncé le décès d’un personnage important (abbé ou bienfaiteur) reflètent le niveau culturel des monastères où elles sont rédigées. – A. DO ESPÍRITO SANTO, Influências de Cassiano no Pro repellenda iactantia de S. Martinho de Braga (269-284): Martin de Braga a subi l’influence tant spirituelle que littéraire de Jean Cassien. – A. FERREIRO, St. Vicent Ferrer’s Catalán Sermon on St. Thomas of Canterbury (285-301): aspects théologiques, moraux et pédagogiques de ce sermon basé sur le récit de la Legenda aurea, qu’il n’hésite pas à embellir. – C. FERRERO HERNÁNDEZ, Pasión y muerte del franciscano Andrés de Espoleto († Fez, 1532) (303-318): édition des textes latin et castillan de ce martyre, sur la base d’opuscules publiés respectivement à Toulouse en 1532 et à Medina del Campo en 1543. – J. GONZÁLEZ FERNÁNDEZ, Epigrafía cristiana de la Bética. Nuevos testimonios (355-367): quatre inscriptions inédites (dont l’épitaphe d’une Perpetua) provenant de collections privées. – A. GUIANCE, Un ejercicio de reescritura hagiográfica: los Milagros de san Millán, de Braulio de Zaragoza a Rodrigo de Cerrato (409-427): les miracles contenus dans la Vita Aemiliani de Braulion de Saragosse (BHL 100) connurent trois réécritures au XIIIe s., l’une en latin due au moine Ferdinand du monastère de San Millán (BHL 103), les deux autres en castillan, par Gonzalo de Berceo et Rodrigo de Cerrato; ces textes reflètent des intentions différentes et offrent leur interprétation propre des miracles. – P. HENRIET et J. C. MARTÍN-IGLESIAS, Le dossier hagiographique de Zoïle de Carrión dans le manuscrit Madrid, BNE, 11556 ( XIIe siècle): étude et édition (429-457). Ce recueil datable des années 1131-1140 et dû au moine Raoul, probablement identique au moine de La Chaise-Dieu, auteur d’une Vie d’Allaume de Burgos (BHL 71), comprend trois pièces éditées ici: trois miracles en prose rimée dus à un hagiographe antérieur; une Passio, Inventio, Translatio, vingt Miracula et deux hymnes; un récit lacunaire de miracle sans doute antérieur à

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Raoul. – J. E. LÓPEZ PEREIRA, Martín de Braga, de la Galia a Gallaecia (543556): l’analyse des deux poèmes composés par l’archevêque de Braga le montrerait originaire, non de la Pannonie, mais de la Gaule. Volume II: J. MARTÍNEZ GÁZQUEZ, Cambios en la Vita Mahomat de R. Jiménez de Rada en el ms. 1515 de la BNE (617-632). La version contenue dans ce ms. (publiée à la suite de l’article) modifie divers passages du texte original dans un sens dénigrant. – A. A. NASCIMENTO, Lenda de santa Iria: de virgem a mártir (a dificuldade de retomar os tempos que se atrasam) (751-779). Initialement vénérée comme vierge, Iria (Irène, Eyrea), dont le culte à Scallabis remonterait à l’époque wisigothique, fut ensuite honorée comme martyre. – C. PÉREZ GONZÁLEZ, Significado e importancia del compromiso de Caspe (1412) en la producción hagiográfica latina relativa a san Vicente Ferrer (781-793): Vincent fut l’un des neuf notables envoyés à Caspe pour désigner le successeur à la couronne d’Aragon après la mort du roi Martin Ier, resté sans descendance. L’A. analyse le traitement de cet épisode dans l’hagiographie vincentienne. – E. PÉREZ RODRÍGUEZ, Las Meditaciones poéticas sobre la Virgen de Juan Gil de Zamora: edición crítica (813-825). Il s’agit de deux séquences latines concluant le Liber de Maria. – E. REDONDO MOYANO, Autobiografía griega en época imperial romana (877-891): concerne Aelius Aristide, Lucien de Samosate, Libanios. – G. RODRÍGUEZ, El paisaje sonoro en los relatos de cautivos de Los Milagros de Guadalupe (península ibérica y norte de África, siglos XV y XVI) (903-920): récits de libérations miraculeuses de captifs chrétiens aux mains de musulmans. – E. SÁNCHEZ SALOR, Biografía de los mártires. De las Actas proconsulares a las Vidas noveladas de la Edad Media (971995): confronte les récits de martyres de la Legenda aurea aux Acta martyrum et aux Passiones des VIe-VIIe s. – Fr. STELLA, Las mujeres del Antiguo Testamento en la poesía de la Alta Edad Media: Judith y las otras (1035-1057). Les héroïnes bibliques apparaissent comme modèles de vertu chez Venance Fortunat, Avit, Dracontius, Prudence, Sidoine Apollinaire, Aldhelm de Malmesbury et Milon de SaintAmand. – E. TARRIÑO RUIZ, Los verbos de movimiento eo y venio en la Peregrinatio Aetheriae (1059-1073). – Chaque contribution est suivie d’une bibliographie. L’ouvrage est dépourvu d’index. R. GODDING

Laurent CAPRON. Codex hagiographiques du Louvre sur papyrus (P.Louvre Hag.) (= Papyrologica Parisina, 2). Paris, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2013, XXV-189 p., 40 pl. + 1 CD-ROM [ISBN 978-2-84050-894-6] Le lot de papyrus mis en valeur dans ce livre a été acquis par le Musée du Louvre, en 1881, et fit l’objet d’une première investigation menée par Wessely, lequel en tira plusieurs publications, toutes parues à Vienne, en 1889. Lors des travaux d’aménagement de nouvelles réserves au Louvre, L. C. reprit le lot pour s’apercevoir qu’il était plus riche que les travaux de Wessely ne le laissaient supposer. Aussi décida-t-il d’y consacrer sa thèse de doctorat, sous la direction d’A. Blanchard. Cette thèse a été reçue en Sorbonne, le 13 mars 2010. Analecta Bollandiana, 133 (2015).

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La nouvelle publication présente les résultats obtenus par L. C. au terme de son patient travail de restauration. L’ensemble des fragments, tous écrits en majuscule alexandrine, a pu être rattaché à trois codex: • Un premier codex fournit le bifolium (fin du Ve s. ou VIe s.) recelant un passage de la Vie grecque de Ste Eupraxie (BHG 631-631b), dont le mérite de l’identification revient à L. C. • Ce qui subsiste du deuxième codex (seconde moitié du VIIe s.) contient, comme l’avait établi Wessely, les vestiges d’une copie des Vies grecques de S. Abraham de Qidun (BHG 5-6e) et de Ste Théodora d’Alexandrie (BHG 1727-1729e). Ici aussi, plusieurs fragments inédits ont pu être raccordés à ceux édités naguère, si bien que l’on dispose désormais de six bifolia provenant de trois quaternions successifs. • Dix fragments, très parcellaires, proviennent d’un troisième codex ( VIIe ou début du VIIIe s.); le texte qui se laisse entrevoir est visiblement de nature chrétienne mais n’a pu être identifié. Dans ces conditions, ranger ces derniers fragments sous l’appellation P.Louvre Hag. relève du pari ! Devant l’impossibilité de prendre en considération l’ensemble de la tradition manuscrite des textes concernés, L. C. a pris le sage parti d’étudier les passages correspondants dans un certain nombre de manuscrits grecs accessibles, ainsi que, pour la Vie d’Abraham, dans l’original syriaque (BHO 16-17). Ces collations lui ont permis d’isoler dans chacune des traditions les principales familles de témoins, et de situer dans l’ascendance de ces derniers la position occupée par le texte des papyrus. Les investigations menées sur la Vie d’Abraham de Qidun invitent en outre à revoir le classement traditionnellement proposé pour les différentes recensions répertoriées dans la BHG et ses suppléments (p. 68-69). Tous les fragments font l’objet d’une édition minutieuse: transcription diplomatique dans la colonne de droite et reconstitution du texte dans celle de gauche; une reproduction du feuillet fournie en regard, également consultable dans le format jpg à partir du CD-Rom, permet de s’assurer de l’exactitude des lectures. Sous l’apparat critique figure une traduction française. Dans l’annotation qui suit chaque édition, L. C. s’attache à expliciter les realia et porte une attention particulière sur la tradition textuelle médiévale des textes qu’il édite. À ce propos, on ne s’étonnera pas de constater que les leçons proposées par les papyrus se trouvent comme éparpillées dans les manuscrits grecs conservés, lesquels transmettent un état de texte plus récent. Contrairement à l’avis de P. Odorico (Ideologia religiosa e contestazione politica in una opera agiografica tardo antica, in Ricerche di storia sociale e religiosa, 15-16 [1979], p. 5975), qui estimait que la Vie d’Eupraxie, considérée comme un démarquage de la Vie de la diaconesse Olympias (BHG 1374-1375), commémorée le même jour, était une condamnation voilée de la cour impériale critiquée par Chrysostome et émanait par conséquent de la Capitale, L. C. suggère de situer la rédaction du texte dans une Thébaïde soucieuse de disposer d’une sainte matrone, qui, à l’exemple d’Olympias ou de Mélanie la Jeune, adopta un genre de vie en rupture avec les règles en vigueur dans les hautes sphères de la société (p. 22). Le milieu de rédaction doit-il être situé à Constantinople ou à Alexandrie ? Le débat est lancé. L. C. identifie dans la Vie de Théodora d’Alexandrie cinq épisodes, comprenant chacun deux parties, une structure qui rappelle celle du théâtre classique (p. 127-128). On observera à ce propos que les répliques de Théodora dans la scène de l’adultère possèdent la truculence caractéristique des mimes de l’Antiquité. X. LEQUEUX

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Leonzio di Neapoli – Niceforo prete di Santa Sofia. Vite dei Saloi, Simeone e Andrea (BHG 1677, 115z). Premessa Augusta ACCONCIA LONGO. Introd. Lennart RYDÉN. Cur. Paolo CESARETTI (= Testi e studi bizantino-neoellenici, 19). Dipartimento di scienze dell’Antichità, «Sapienza», Università di Roma, 2014, 397 p., cartes [ISBN 978-88-940045-2-6] En 1990, P. C. publiait, chez l’éditeur Oscar Mondadori à Milan, un livre de poche intitulé «I santi folli di Bisanzio» et contenant la traduction italienne de deux Vies de saints byzantins excentriques, en l’occurrence André le Fou (VAND; BHG 115z-117c) et Syméon d’Émèse (VSYM; BHG 1677-1677d), célèbres pour avoir simulé la folie. La publication d’allure modeste connut un certain retentissement pour deux raisons. Tout d’abord, on y trouvait la première traduction en langue moderne de la Vie d’André, réalisée à partir du texte grec alors inédit, que Rydén allait publier en 1995 dans la collection Studia Byzantina Upsaliensia (cf. AB, 114 [1996], p. 192-193). La seconde raison résidait dans l’introduction signée par le même érudit, qui était alors incontestablement le meilleur connaisseur des deux textes retenus. Malheureusement, la méritoire publication de P. C. devait subir le sort des livres distribué dans les grandes librairies et disparut trop rapidement des rayons. Sur la suggestion avisée d’A. Acconcia Longo et avec les encouragements d’autres collègues italiens, P. C. se proposa de fournir une seconde édition de son opus. La nouvelle publication contient l’introduction originale de L. R., précédée cette fois d’une ample bibliographie. C’est l’exploitation de celle-ci qui a fourni la matière d’une abondante annotation, beaucoup plus développée par rapport à la première édition, un impératif imposé par le public désormais visé. Au sein des deux traductions, intégralement revues par la même occasion, P. C. a conservé les soustitres de la première édition, mais a ajouté dans les marges les références aux éditions critiques procurées par L. R. en 1963 pour VSYM et en 1995 pour VAND. En ce qui concerne les sources de VSYM, P. C. (p. 101-102, notes 243-244) reprend à son compte l’hypothèse d’un paterikon disparu, avancée par C. Mango (A Byzantine Hagiographer at Work: Leontios of Neapolis, in Byzanz und der Westen... [= Österr. Akad. der Wiss. Philos.-Historische Kl. Sitzungsberichte, 432], Vienne, 1984, p. 25-41), et considère que l’usage de ce recueil constitue la source des singularités de la seconde partie de la VSYM, elle-même introduite par une espèce de «proemio al mezzo» (éd. RYDÉN, p. 144, 17 - p. 145, 18).

Les deux traductions sont suivies, chacune, d’une série d’apparati: un index des noms propres, un index des passages cités et quelques cartes (pour VSYM: les monastères du désert de Judée, les chaussées romaines de la Palestine et de l’Arabie à l’époque proto-byzantine, les déplacements de Syméon en Terre Sainte, et l’Orient dans VSYM; pour VAND: un plan de Constantinople). À l’exemple de ce qui se pratique lors de la réédition des albums musicaux, la publication est gratifiée de trois bonus: • p. 353-357: un commentaire philologique d’un passage tiré de la seconde partie de VSYM (éd. RYDÉN, p. 157, 17-158, 8), jugé représentatif du low style, tel que l’a défini Ševčenko; Analecta Bollandiana, 133 (2015).

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• p. 359-382: un vade mecum de la spiritualité du fou pour le Christ, articulé en trente rubriques; • p. 383-396: sur le caractère novateur de l’introduction de Rydén et son influence sur la recherche ultérieure. Quelques notes de lecture pour terminer: – À propos de la note 306 de la p. 110, cf. AB, 115 (1997), p. 403-405. – Pour un petit complément de bibliographie en langue espagnole et russe, cf. Erytheia, 36 (2015), p. 299 et 300. – Sur l’existence d’une troisième Vie géorgienne de S. Syméon, jusqu’ici inconnue, cf. Oriens christianus, 81 (1997), p. 237. – Sur le caractère peut-être pas aussi fictif qu’on l’a prétendu du personnage d’André le Fou, cf. Le Muséon, 116 (2003), p. 268-270. X. LEQUEUX

Herman the Archdeacon and Goscelin of Saint-Bertin. Miracles of St Edmund. Edited, with an Introduction and Notes, by Tom LICENCE. Transl. by T. LICENCE with the Assistance of L. LOCKYER (= Oxford Medieval Texts). Oxford, Clarendon Press, 2014, CXXXIV-402 p. [ISBN 978-0-19-968919-4] Le culte de S. Edmond, roi d’East Anglia, vénéré comme martyr († 869), eut son centre à Beodricesworth, lieu où son corps fut transféré peut-être dans les années 890, et qui devint Bury St Edmunds. Une Passio (BHL 2392) fut écrite par Abbon de Fleury vers 985/988. Un siècle plus tard, en 1095, l’abbé Baudouin transférait les reliques dans une nouvelle église de style roman, dont les dimensions devaient refléter le statut d’Edmond comme saint patron du peuple anglais et de ses rois. C’est à cette occasion que le moine Herman devait achever la composition des Miracula (BHL 2395-2396) édités ici. Il s’agit d’un texte exceptionnel, tant par son contenu que par sa qualité littéraire. Le titre de Miracula désigne habituellement un recueil de récits de miracles, simple enchaînement d’événements ponctuels dépourvu d’une plus ample trame narrative. Au contraire, nous avons affaire ici à l’histoire des reliques d’Edmond et de leur culte dans le contexte historique de l’Angleterre des rois Ethelred et Knut, de Guillaume le Conquérant et de son fils Guillaume le Roux. S. Edmond y est réinterprété comme le député d’un Dieu intéressé aux affaires de l’Angleterre. Ce récit est l’œuvre d’un historien qui sait tenir son public en haleine, autant que celle d’un fin lettré. Son nom, Herman, nous est dévoilé au détour d’un récit de miracle. L’enquête approfondie menée par T. L. nous permet aujourd’hui d’en savoir un peu plus sur ce personnage hors du commun. Né vers 1040 au plus tard, en territoire germanique (comme nous le révèlent certains traits d’écriture), il aurait reçu sa formation à l’abbaye Saint-Vincent de Metz et aurait pu même y être disciple de Sigebert de Gembloux, qui y était actif entre 1050 et 1070: les Miracula présentent en effet des parallèles avec la Vie de l’évêque Thierry I er de Metz par Sigebert (BHL 8055) comme avec le De diversitate temporum, œuvre historique peu diffusée due au moine Alpert de la même abbaye Saint-Vincent. C’est là que l’abbé Baudouin, ancien moine de Saint-Denis puis prieur de Lièpvre (Alsace), deAnalecta Bollandiana, 133 (2015).

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venu abbé de St Edmunds en 1065, serait venu chercher Herman pour lui confier la composition des Miracula du saint roi martyr. D’autres clercs du continent devaient faire carrière de la même façon dans une Angleterre en manque d’écrivains capables de manier le latin avec élégance. Toujours est-il que, au début des années 1070, nous retrouvons Herman au service de l’évêque de Thetford Herfast, dont il est le secrétaire et probablement l’archidiacre, et ce jusqu’à la mort du prélat en 1084/85. En 1092, il est de retour à St Edmunds où il est sans doute le cantor ou le sous-prieur. Il meurt en 1097/98, frappé d’une maladie que – ironie suprême – le saint martyr aurait infligée à son hagiographe pour avoir traité ses reliques avec désinvolture (selon le récit que nous en fait son continuateur). Les Miracula semblent avoir été composés en deux temps: une première partie, qui pourrait avoir été rédigée vers 1070, se conclut avec la Conquête normande; la seconde poursuit le récit jusque vers 1094. Lors de la translation de 1095, une première version devait donc être disponible, qu’Herman veilla ensuite à mettre à jour, cette fois en enchaînant les miracles récents dans un ordre plus strictement chronologique. De quelles sources disposait notre hagiographe ? Il connaissait évidemment la Passion composée par Abbon. Il fait allusion à un autre ouvrage, écrit d’une plume «extrêmement difficile et, pour ainsi dire, impénétrable», mais nous n’en avons aucune trace, et il pourrait bien s’agir d’un simple artifice littéraire de sa part. Pour le reste, il a recouru à la Chronique Anglo-Saxonne ainsi qu’à certaines annales. Il a également reçu la déposition orale de plusieurs témoins et lui-même a assisté à quelques miracles. Quant à sa culture littéraire, elle est vaste et diversifiée: outre la Bible, omniprésente, il cite Horace et Térence, Cicéron, Salluste, Ovide, Lucain; et parmi les chrétiens, Arator, Sedulius, Prudence, Boèce, Isidore de Séville, Orose, Jordanès, Bède, Jérôme, Augustin… Peu de bibliothèques monastiques possédaient l’ensemble de ces auteurs; les riches abbayes de Saint-Vincent de Metz et de St Edmunds faisaient exception. Bien sûr, on y trouve aussi l’écho de la Règle de S. Benoît et de diverses pièces liturgiques. Son style est alambiqué, son latin recherché, son vocabulaire riche de grécismes, d’archaïsmes et de néologismes. Il apprécie les proverbes vernaculaires, n’hésite pas à énoncer un trait d’humour noir, à proposer des métaphores comiquement paradoxales. Pour préciser ces traits, T. L. consacre trois excursus au style, au vocabulaire, ainsi qu’au cursus et à la métrique (quelques hexamètres surgissent çà et là dans le texte). La version longue des Miracula nous est conservée par un seul témoin, qui sert donc de base à l’édition: Londres, British Library, ms. Cotton Tiberius B. II. Copié vers 1100 (soit presque immédiatement après la dernière rédaction), ce manuscrit de luxe contient seulement la Passio d’Abbon et les Miracula. Mais le texte de ces derniers est incomplet: des espaces ont été laissés vierges pour y insérer des miracles. Sept de ces miracles se trouvent dans le ms. Oxford, Bodleian Libr., Bodley 240, daté de 1377 et contenant une compilation des miracles de S. Edmond attribuée à d’anciens auteurs. T. L. les édite en appendice, accompagnés d’une traduction. Il existe une version brève des Miracula, qui omet tout le contexte historique, réduisant le texte d’Herman à un banal recueil de miracles. On en conserve deux témoins manuscrits, tous deux des libelli remontant aux premières décennies du XIIe s. Cette série est également éditée et traduite en appendice. La longue fa-

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miliarité de l’éditeur avec Herman lui permet en outre d’attribuer au moine de St Edmunds, sur la base de critères stylistiques, un poème anonyme sur l’hérésie simoniaque. Cette satire de cinquante hexamètres s’en prend à deux clercs normands, Robert Losinga et son fils Herbert, pour avoir acheté de hautes dignités ecclésiastiques (ceci avant la fin de 1091). Elle est également éditée et traduite. Quelques années après la mort d’Herman, vers 1100, une version entièrement revue et augmentée des Miracula, réécriture radicale, devait voir le jour (BHL 2397). Elle nous est conservée par un manuscrit unique: New York, Pierpont Morgan Libr., ms. M 736, un recueil datable des années 1120/30, composé à St Edmunds, contenant divers textes liturgiques et hagiographiques relatifs à S. Edmond, et illustré de magnifiques enluminures. Cette version omet huit chapitres d’Herman et se conclut par le récit de la mort de l’hagiographe (précédée de celle du sacristain Toli), ainsi que par deux miracles rapportés par Lambert, abbé de SaintNicolas à Angers. Transmis de façon anonyme, ce texte est écrit dans un style plus sobre; l’auteur se montre versé surtout dans les œuvres d’Augustin, de Jérôme et de Grégoire le Grand. Une analyse du vocabulaire et du style amène T. L. à attribuer l’ouvrage à Goscelin de Saint-Bertin. Sa démonstration ne laisse aucune place au doute. Le texte est édité (et traduit) ici pour la première fois. L’édition des Miracula de S. Edmond a donc offert à l’éditeur l’occasion d’élucider brillamment une série de questions: nous en savons plus désormais sur le moine Herman et sur sa formation; son récit, jusqu’ici lacunaire dans l’unique manuscrit conservé, se voit complété de sept miracles; un poème resté anonyme peut lui être attribué; la version brève des Miracula, de même que leur réécriture, sont édités pour la première fois et l’auteur de cette dernière est identifié. On se réjouit de disposer également d’une traduction anglaise de ces textes parfois difficiles. Précédant l’index général, un index des citations et allusions, ainsi qu’un index des mots inusuels et significatifs, concluent utilement le volume. R. GODDING

Kirsten WOLF. The Legends of the Saints in Old Norse-Icelandic Prose (= Toronto Old Norse and Icelandic Series, 6). Toronto – Buffalo – London, University of Toronto Press, 2013, XIII-405 p. [ISBN 978-14426-4621-6] En 1963, O. Widding, H. Bekker-Nielsen et L. K. Shook publiaient The Lives of the Saints in Old Norse Prose. A Handlist (Mediaeval Studies, 25, p. 294-337). Ce précieux répertoire de la littérature hagiographique en vieux norrois devait rendre les plus grands services. Mais c’est précisément le développement de la recherche au cours du dernier demi-siècle qui nécessitait sa mise à jour. Le présent volume reprend la structure du Handlist (ordre alphabétique des noms de saints, avec le jour de leur fête). Chaque Vie est identifiée par un titre en vieux norrois ou en latin; la source du texte est indiquée, avec éventuel renvoi à la BHL. Viennent ensuite les références des manuscrits (avec datation) et des éditions. Une nouveauté consiste en la mention des traductions en langues modernes: un élément qui ne pourra qu’encourager un plus grand nombre de chercheurs à prendre connaissance de cette Analecta Bollandiana, 133 (2015).

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littérature. La transformation la plus visible par rapport au Handlist réside dans l’abondante bibliographie fournie pour chaque texte, témoignage de la vitalité des études dans ce domaine. Un index des manuscrits conclut le volume. C’est là que l’on trouvera la clé des abréviations utilisées dans le corps du répertoire (et qui ne figurent pas dans la liste des Abbreviations and Symbols de la p. XIII). Remercions K. W. de nous avoir procuré ce magnifique répertoire. R. GODDING

Thérèse au tribunal en 1910. Actes du colloque international pour le centenaire du procès de béatification de Thérèse de l’Enfant-Jésus (Lisieux, 3-5 sept. 2010). Sous la dir. de Dominique-Marie DAUZET – Claude LANGLOIS. Paris, Éditions du Cerf, 2015, 444 p. [ISBN 978-2-204-10029-8]. Deux remarques d’entrée de jeu. D’une part, ce volume rassemble plus que les actes du colloque de septembre 2010; Cl. Langlois a en effet, de manière judicieuse, apporté d’importants compléments qui constituent une bonne moitié du livre. D’autre part, attirons d’emblée l’attention sur les exposés de B. Joassart, Le procès de Thérèse et les normes en vigueur, et de Cl. Langlois, Le procès ordinaire de Thérèse de Lisieux et les pièces de son procès, auxquels il faut ajouter le glossaire des termes techniques réalisé par le second (p. 419-428): ils permettent de comprendre les spécificités d’un procès de canonisation, qui obéit à des principes et à des critères fort différents des législations séculières, et ainsi d’éviter une lecture erronée. Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face meurt en 1897. En 1910, débute officiellement le procès en vue de sa béatification, laquelle intervient en 1923, suivie deux ans plus tard de sa canonisation. Compte tenu de la législation canonique et des usages du temps en la matière, voilà qui est pour le moins vite mené. Mais cette rapidité n’est pas la seule originalité du procès. Loin s’en faut. Thérèse et la sainteté de son temps. Tel est le titre de la première contribution due à Philippe Boutry. En partant des écrits de Thérèse, l’A. présente brièvement les saints qui, pourrait-on dire, forment le paradis de la carmélite; ils sont une soixantaine en tout, qui couvrent les 18 siècles de l’histoire chrétienne; ses préférés sont Marie-Madeleine, Véronique, et des jeunes – Tarcisius entre autres – et quelques martyrs. Dans un deuxième temps, Ph. B. montre très bien qu’à partir de la seconde moitié du 19e s., les canonisations, rares jusqu’alors, augmentent sensiblement en nombre, où sont proportionnellement très présents des saints martyrs et français. La mise en route du procès – certes sans aucun caractère officiel – commença pratiquement dès le jour du décès de Thérèse. Indépendamment de la lettre circulaire nécrologique habituelle dans le réseau carmélitain qui exalte les vertus de toute religieuse défunte, C. Bessette a relevé dans La préhistoire du procès de béatification de Thérèse, les «petits miracles au monastère [qui], suivant le décès d’une sœur sont assez fréquents dans les communautés». Elle présente également «L’‘effet’ histoire d’une âme»: très vite, l’ouvrage devint un succès de librairie et contribua largement à propager la conviction que Thérèse méritait d’être reconnue comme sainte, succès dont profita Mère Marie de Gonzague pour se lancer dans l’aventure Analecta Bollandiana, 133 (2015).

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d’une procédure en vue de la béatification. On sera particulièrement intéressé par la dernière partie de cette étude: pour qu’un procès soit engagé, il fallait un vote de la communauté; sur la base de témoignages divers, l’A. a tenté de déterminer ce qu’aurait été le vote de la communauté du carmel de Lisieux si un tel vote avait été sollicité en 1900, c’est-à-dire auprès de la communauté qui avait connu Thérèse et à qui l’on avait demandé l’avis; l’A. conclut que sur 18 votantes, 9 auraient de toute évidence émis un avis favorable; les 9 autres auraient sans doute été opposées ou à tout le moins hésitantes; voilà qui contraste singulièrement avec le vote unanime émis en 1909 par la communauté telle qu’elle était composée alors, une bonne partie des religieuses n’ayant pas côtoyé Thérèse. Le choix du postulateur ne se fit pas dans la plus parfaite quiétude. D.-M. Dauzet rappelle tout d’abord l’affaire Eugène Prévost (1860-1942). Ce Canadien était entré dans la Congrégation des Pères du Saint-Sacrement en 1881; il la quitta, non sans quelques remous, pour fonder son propre institut, composé d’une branche masculine et d’une féminine, destiné à aider les prêtres malades, âgés ou «tombés», comme on disait alors. Fort notamment d’amitiés au sein de la curie romaine et excellent organisateur, il fut séduit par l’Histoire d’une âme, tant et si bien qu’il prit contact avec le carmel de Lisieux et se lia d’amitié avec Isidore Guérin, oncle de Thérèse, lequel, parce qu’il s’était occupé de celle-ci durant sa jeunesse, s’estimait en quelque sorte dépositaire de son héritage spirituel. Prévost va tout entreprendre pour se faire nommer postulateur de la cause, y compris en essayant de rassembler des fonds à cette fin, sans que cette dernière opération soit parfaitement transparente. Il fut sur le point de réussir. Toutefois, après bien des rebondissements (les carmélites elles-mêmes faillirent se laisser prendre à son jeu) et entre autres devant l’opposition de Mgr Lemonnier, évêque de Lisieux, il sera récusé au profit du Père Rodrigue de Saint-François de Paule, postulateur général de l’Ordre du Carmel, tandis que Mgr Marie François Roger Le Comte de Teil sera désigné comme vicepostulateur et sera la cheville ouvrière du procès ordinaire. Il revint précisément à M.-B. Brandet de présenter Mgr de Teil, vice-postulateur de la cause. Ce prêtre, originaire des Deux-Sèvres, mais incardiné dans le diocèse de Paris, avait parfait sa formation en théologie et en droit canonique à Rome, et avait acquis une solide expérience en matière de procès de canonisation, en particulier par celui des martyrs de la Révolution française et plus spécifiquement encore par celui des carmélites de Compiègne. L’homme était certes d’une extrême rigueur et d’une égale prudence, mais se révéla d’une redoutable efficacité, assuré par ailleurs de la confiance du postulateur romain, de l’évêque et des carmélites de Lisieux. Cette contribution est complétée par l’édition de cinq missives du prélat à l’évêque de Lisieux durant la période préparatoire au dossier. Dans sa tâche, du Teil fut efficacement épaulé par le chanoine capitulaire Eucher Deslandes (1849-1922), désigné notaire du procès; dans sa communication, G. Marie-Mauger évoque la carrière de cet ecclésiastique, d’origine modeste, mais qui devint un excellent spécialiste de l’histoire du diocèse de Bayeux fort estimé de ses pairs. Ajoutons qu’on trouvera aux pages 379-381 les notices biographiques des membres du tribunal diocésain, et aux pages 383-391, une prosopographie sommaire de l’ensemble des acteurs du procès.

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Cl. Langlois s’est quant à lui penché sur Le choix des témoins, entre habileté tactique et finalité spirituelle. On peut voir la finesse du vice-postulateur qui, précisément par ses choix judicieux, devint, à sa manière, un «témoin du message de Thérèse». Parmi les contributions relatives aux témoins, relevons celle de D.-M. Dauzet, qui a étudié de près le cas de Léonie Jezeweska, entrée au carmel de Lisieux en 1873 sous le nom de Thérèse de Jésus du Cœur de Marie. Cette religieuse connut un destin particulier en raison de sa complexion psychologique – d’aucuns la considérèrent comme folle, hystérique et sans jugement équilibré – à tel point qu’en 1908 elle sera privée de son droit de participer au chapitre et que l’année suivante elle sera exclue de la communauté. Elle ne fit donc pas partie du groupe des témoins appelés par du Teil. Elle n’en laissa pas moins un témoignage sur Thérèse, adressé à Mgr Lemonnier en date du 9 novembre 1907 (à l’époque, le prélat, réticent à l’idée de lancer la procédure, avait toutefois demandé aux sœurs lexoviennes de mettre par écrit leurs souvenirs). Thérèse de Jésus reconnaissait des qualités chez sa jeune consœur, tout en disant que, plus qu’appréciée par Mère Marie de Gonzague, elle avait manifestement été une «enfant fêtée, choyée, adulée, toujours mise sur le pinacle», et que ses sœurs «l’adoraient. C’était pour elles un phénix, toujours lui faisant des compliments, lui disant qu’elle était une sainte et le reste ! Ah, je me disais: ‘Les imprudentes’. C’était une enfant encensée. À trois ans, quand on lui coupait les cheveux, on les conservait comme des reliques. Il est facile d’être aimable, quand on est encensé» (p. 237-238). Le manque de jugement dont on taxe aussi Thérèse de Jésus était-il bien réel ? Et du Teil n’aurait-il pas été intéressé par ce témoignage rentré ? Pour sa part, A. Guise-Castelnuovo a étudié Les miracles du procès. Ici aussi, du Teil joua un rôle tout à fait particulier dans le choix retenu. Autre acteur majeur, le promoteur de la foi. En l’occurrence, ce fut Mgr Alessandro Verde, dont la réputation de sévérité n’était plus à faire quand il s’agissait de traquer les failles dans une prétendue réputation de sainteté. A. Langlois s’est penchée précisément sur Les objections de Mgr Verde. On peut résumer ces objections par ces quelques lignes: la «grande interrogation [de Verde] est la suivante: peut-on juger en toute objectivité de la vie intérieure de quelqu’un si on ne la connaît que par ce qu’il en dit lui-même ? Question annexe : que peut-on savoir de l’humilité réelle de quelqu’un qui disait être une petite sainte ?» (p. 203). En d’autres termes, Verde ne manquait pas d’être interpellé par quelqu’un qui – en particulier par le biais de l’Histoire d’une âme – affirmait: «vous allez me déclarer sainte parce que je vous dis que je le suis», ce qu’A. L. exprime dans la seconde partie du titre de sa communication: «Thérèse, une sainte autoproclamée». Cette méfiance de Verde ne le transformera toutefois pas en ennemi irréductible de la cause de Thérèse; face aux réponses des avocats, il finira par se montrer favorable à la canonisation de la carmélite. Attardons-nous quelque peu sur deux autres interventions. Fr. Trémolières examine Le «moment 1910». Contexte spirituel du procès ordinaire de Thérèse Martin. Au moment où débute ce procès, on est en pleine crise moderniste et la sainteté – particulièrement étudiée par un Henri Bremond – est source de bien des questions. Ce qui n’est d’ailleurs pas sans inquiéter les autorités ecclésiastiques. Et

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on lira avec grand intérêt L’incompréhensible sourire de la dernière venue. Regard théologique sur un procès de canonisation, de G. Berceville. Même si le sous-titre insiste sur l’aspect théologique, on pourrait également soutenir que cette approche s’apparente à ce que l’on trouve dans la partie gloria posthuma des Acta Sanctorum. L’A. montre d’abord que le processus allant de l’ouverture du procès en 1910 jusqu’à la canonisation 15 ans plus tard, est fondamentalement une prise de position anti-moderniste, Thérèse invitant à dépasser les trois grands principes philosophiques dénoncés dans Pascendi (1905), à savoir le phénoménisme, l’immanentisme et l’évolutionisme. Dans un deuxième temps, G. B. examine l’approche de Thérèse par G. Bernanos qui, dans Jeanne relapse et sainte, évoqua «la dernière venue, si étrange, si secrète, suppliciée par les entrepreneurs et les simoniaques, avec son incompréhensible sourire», de même qu’il traita de la sainteté dans plusieurs de ses ouvrages, notamment à travers le personnage de Chantal de Clergerie dans Sous le soleil de Satan. Cela lui valut de la part du dominicain Antoine Lemonnier une critique assez vive, qui estimait que l’écrivain n’envisageait la mystique que sous la forme de la souffrance et de la mort, alors que Thomas d’Aquin propose une théologie de la joie et de la vie. G. B. fait remarquer qu’en réalité son confrère des années 30, certes très sensible à l’esprit d’enfance et à la simplicité évangélique de Thérèse, n’a pas perçu que ce qui était «au cœur de la recherche de l’écrivain [n’était] pas l’expression du sentiment mystique et de la dénonciation de ses contrefaçons médiocres, mais un témoignage rendu au Mystère de la Rédemption» (p. 260), que le salut des pécheurs était le souci majeur de tant de personnages créés par Bernanos, ce que Lemonnier aurait pu pressentir s’il avait retenu la seconde partie du nom de Thérèse – «de la Sainte-Face» –, référence au Serviteur souffrant d’Isaïe qui précisément apporte le salut. Enfin, G. B. s’est intéressé de plus près au doctorat d’Église décerné en 1997 par Jean-Paul II à la carmélite, qui s’inscrit dans le mouvement de renouveau théologique suivant la Seconde guerre mondiale. Voici comment l’A. résume son propos: «Thérèse est reconnue docteur de l’Église, parce qu’elle renouvela non seulement la vie morale et spirituelle, mais encore l’intelligence même de la foi» (p. 262). Lors de sa béatification puis canonisation, elle était comme un antidote au modernisme; par la suite, elle fut un levier pour une approche approfondie de la miséricorde divine qui sauve. Tout n’est évidemment pas dit par ces rapides présentations de la majorité des contributions et des ajouts de la seconde partie du volume. Je formulerai un petit regret: l’absence d’index onomastique général, toujours utile. Ayant eu l’occasion de participer moi-même à ce colloque, il me semble qu’on peut raisonnablement affirmer qu’il eut le mérite d’aborder tant le personnage de Thérèse de Lisieux que plus largement la réalité de la sainteté en essayant d’en explorer toutes les facettes, ou peut-être plus exactement d’être réellement historique et religieux dans toute la rigueur des termes. B. JOASSART The Language of Byzantine Learned Literature. Ed. M. HINTERBERGER (= Βυζάντιος. Studies in Byzantine History and Civilization, 9). Turnhout, Brepols, 2014, V-228 p. [ISBN 978-2-503-55237-8]. — Souvent considérée comme le simple décalque diachronique du grec classique, la langue utilisée par les érudits byzantins

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DES PUBLICATIONS HAGIOGRAPHIQUES

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dans leurs diverses compositions n’a guère retenu l’attention des philologues et autres linguistes jusqu’à présent. Il convenait de réparer cette négligence en étudiant la «hochsprachliche Literatur der Byzantiner» comme un système linguistique à part entière, susceptible de receler, sous un conservatisme apparent, des innovations qui lui sont propres. C’est cette nouvelle approche que veut promouvoir M. H., qui a consacré à la thématique un atelier tenu à Nicosie, en 2011. La publication reprend les contributions des intervenants, auxquels J. Noret est venu s’adjoindre entretemps: I. MANOLESSOU, Learned Byzantine Literature and Modern Linguistics (p. 13-33): sur les causes du désintérêt de la linguistique contemporaine pour un langage artificiel, châtié et jouissant d’une audience limitée. – M. KARYOLEMOU, What Can Sociolinguistics Tell us about Learned Literary Languages ? (p. 34-51): les textes littéraires byzantins devraient être considérés comme des «variable linguistic practices», combinant de manière fluctuante des usages de la langue vernaculaire avec ceux de la langue classique, et autorisant l’innovation par la création de hapax lexicaux ou par l’application abusive des règles classiques. – A. GIANNOULI, Education and Literary Language in Byzantium (p. 52-71): sur l’organisation, le contenu, la pédagogie mise en œuvre et la finalité de l’enseignement de la langue et de la rhétorique à Byzance. – J. SIGNES CODOÑER, The Definition of the Middle Voice in Ancient and Byzantine Grammars: A Guide for Understanding the Use of the Verb in Byzantine Texts Written in Classical Greek (p. 72-95). – J. NORET, L’accentuation byzantine: en quoi et pourquoi elle diffère de l’accentuation «savante» actuelle, parfois absurde (p. 96-146): sur les principales caractéristiques des enclitiques et leur traitement pratique dans les manuscrits, à l’époque byzantine. – K. BOČKOVA LOUDOVÁ, On the Category of Particles in Byzantium (p. 147-169): de l’usage des particules au travers une confrontation du Βασιλικὸς Ἀνδριάς de Nicéphore Blemmydès (° 1197) avec sa métaphrase (début XIVe s.). – S. WAHLGREN, Case, Style and Competence in Byzantine Greek (p. 170-175): se concentre sur le cas du datif. «The dative was still alive in the spoken language, at least to some extent, until the tenth century. Interestingly, in the centuries after that period, the frequency of datives in classicizing texts increases significantly as does the variety of its functions» (p. 175). – M. HINTERBERGER, The Synthetic Perfect in Byzantine Literature (p. 176-204): «During the early Byzantine period, for a lexically restricted group of verbs the synthetic perfect forms were used with aorist meaning (and replacing the aorist) also in simple, low level texts and probably in the spoken language, too. Beyond this limited number of verbs, the synthetic perfect forms signal the classicizing register, and their usage is linked to the authors’ stylistic aspirations» (p. 204). Il ressort de la lecture de cet ouvrage que la frontière entre langue érudite écrite et langue populaire parlée est moins hermétique qu’il n’y paraît à première vue et que la dichotomie classiquement admise pour caractériser le grec byzantin est beaucoup trop rigide. X. L.

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PUBLICATIONS REÇUES Un grand nombre de chercheurs nous font l’honneur et l’amitié de nous envoyer un exemplaire (volume, tiré à part ou photocopie) de leurs travaux. Qu’ils en soient remerciés. Plusieurs des titres mentionnés feront l’objet d’un compte rendu dans un prochain numéro de la Revue. I. HAGIOGRAPHICA Benedetto XIV (Prospero Lambertini). La beatificazione dei servi di Dio e la canonizzazione dei beati. Vol. III/1. Città del Vaticano, Congregazione delle cause dei santi – Libreria Editrice Vaticana, 2015, 1002 p., ill., ISBN 978-88-209-9640-6. BOSC-TIESSÉ, C. – DERAT, M.-L. De la mort à la fabrique du saint dans l’Éthiopie médiévale et moderne, in Afriques. Débats, méthodes et terrains d’histoire, 3 (2011), 25 p., ill. [en ligne]. Des dieux civiques aux saints patrons (IVe-VIIe siècle). Textes réunis par J.-P. CAILLET – S. DESTEPHEN – Br. DUMÉZIL – H. INGLEBERT (= Textes, Images et Monuments de l’Antiquité au haut Moyen Âge, 12). Paris, Éditions A. & J. Picard, 2015, ISBN 978-2-70841004-6. DORNA, M. Von der Hagiographie zur Diplomatik. Daniel Papebrochs Lehre zur Erkennung von frühmittelalterlichen Urkundenfälschungen, in Archiv für Diplomatik, Schriftgeschichte, Siegel- und Wappenkunde, 60 (2014), p. 165-189. EBANISTA, C. Le sepolture vescovili ad sanctos. I casi di Cimitile e Napoli, in Aristocrazie e società fra transizione romano-germanica e Alto Medioevo. Atti del Convegno internazionale di studi (Cimitile-Santa Maria Capua Vetere, 14-15 giugno 2012). Cur. C. EBANISTA – M. ROTILI. San Vitaliano, Tavolario Edizioni, 2015, p. 47-80, ill. Guiberto di Nogent. Le reliquie dei santi. Introd., trad. e note a cura di M. SALAROLI (= Corpus Christianorum in Translation, 24). Turnhout, Brepols, 2015, 178 p., ISBN 978-2-50355584-3. Juan Gil de Zamora. Legende sanctorum et festivitatum aliarum de quibus ecclesia sollempnizat. Leyendas de los santos y de otras festividades que celebra la Iglesia. Introd., ed. crítica y trad. anotada a cargo de J. C. MARTÍN IGLESIAS – E. OTERO PEREIRA (= Iohannis Aegidii Zamorensis Opera Omnia, 2). Zamora, Instituto de Estudios Zamoranos “Florián de Ocampo”, 2014, 890 p., ISBN 978-84-96100-75-6. KAKLAMANOS, D. A. Мάρτυρες καὶ ομολογητὲς τῆς ἐποχῆς τοῦ Ἰουλιανοῦ. Thessalonique, Ἐκδόσεις Βάνιας, 2007, 349 p. + 15 pl., ISBN 978-960-288-201-6. —, Νέα Πανηγυρικὰ στὸ Ἅγιον Ὄρος κατὰ τὸ 15° αἰώνα. Τὰ Πανηγυρικὰ τῆς Μονῆς Βατοπεδίου (κώδ. 631-637) καὶ ὁ συντάκτης τους, in Τὸ Ἅγιον Ὄρος στὸν 15° καὶ 16° αἰώνα. Πρακτικὰ συνεδρίου (Θεσσαλονίκη 25-27 νοεμβρίου 2011) (= ΣΤ΄ διεθνὲς ἐπιστημονικὸ συνέδριο). Thessalonique, Ἁγιορειτικὴ Εστία, 2012, p. 263-277, ill. LANÉRY, C. Cum sociis plurimis: la mémoire des martyrs à l’épreuve du cycle hagiographique, in La Cour céleste: la commémoration collective des saints au Moyen Âge et à l’époque moderne. Actes du colloque de Villetaneuse et de Paris (31 mai-2 juin 2012). Éd. O. MARIN – C. VINCENT-CASSY, et al. (= Les études du RILMA, 6). Turnhout, Brepols, 2014, p. 75-96. PASCHALIDIS, S. A. Ἡ διόρθωση τῶν μηναίων ἀπὸ τὸν Καισάριο Δαπόντε καὶ ἡ πατριαρχικὴ ἔκδοσή τους τὸ 1843, in Γηθόσυνον σέβασμα. Ἀντίδωρον τιμῆς καὶ μνήμης εἰς τὸν μακαριστὸν καθηγητὴν τῆς Λειτουργικῆς Ἰωάννην Μ. Φουντούλην († 2007). T. 2. Ed. P. I. SKALTSI – N. A. SKRETTA. Thessalonique, Ἐκδοτικὸς Oἶκος Ἀδελφῶν Kυριακίδη, 2013, p. 1497-1531, ill.

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Le Passioni dei martiri aquileiesi e istriani. Parte II. Cur. E. COLOMBI (= Fonti per la storia della Chiesa in Friuli. Serie medievale, 14). Roma, Istituto storico italiano per il Medio Evo – Udine, Istituto Pio Paschini per la storia della Chiesa in Friuli, 2013, 1068 p. en 2 vol., ISBN 978-88-87948-35-6. [Cantius, Cantianus et Cantianilla mm. Aquileiae; Iustus m. Tergestinus; Maurus Afer m. Romae; Pelagius m. patronus Constantiae in Helvetia; Quirinus ep. Sciscianus m.; Servulus m. Tergesti; Germanus m. Polae in Istria; Donatus et soc. mm. Concordiae; Maximilianus m. in Norico; Anastasius m. Salonae; Domnio ep. Salonitanus et soc. mm.; Donatus, Macarius et Theodorus mm. in Aegypto] Reliques et reliquaires. L’émotion du sacré. Sous la dir. de B. BERTHOD. Lyon, Musée d’art religieux de Fourvière, 2014, 80 p., ill., ISBN 978-2-85443-562-7. The Slavonic Patria of Mount Athos (BHG 1054u + BHG 2333). Ed. G. R. PARPULOV. Plovdiv, 2013, 61 p., ill. [à compte d’auteur]. [Maria Deipara; Patres Athonenses] STAROWIEYSKI, M. Z historii wczesnego chrześcijaństwa. Biblia, męczennicy, poganie i inni. Kraków, Wydawnictwo Petrus, 2015, 270 p., ISBN 978-83-7720-074-2. [Paulus ap.; Photinus ep. Lugdunensis et soc. mm.; Ignatius Maloyan ep. Mardin.] SCHENA, G. La precoce diffusione del culto di San Luigi Gonzaga in Valtellina, in Bollettino storico Alta Valtellina, 16 (2013), p. 145-172, ill. [Aloysius Gonzaga S. I.] PAPATHANASIOS, Chr. K. Μέγας Ἀθανάσιος. Ὁ στῦλος τῆς Ὀρθοδοξίας. Λόγος ἐκφωνηθεὶς εἰς τὸν Ἱ. Ναὸν Ἁγ. Ἀθανασίου Πολυδρόσου (Χαλανδρίου). Athènes, Ἐκδόσεις Τηνός, 2013, 16 p. [Anastasia v. m. Romae] PAPATHANASIOS, Chr. K. Λόγος εἰς τὴν Ἁγίαν Ἀναστασίαν τὴν Ῥωμαίαν. Athènes, Ἐκδόσεις Τηνός, 2013, 16 p., ill. [Athanasius ep. Alexandrinus] TOLLO, R. Santa Caterina d’Alessandria. Icona della Teosofia. Contributo della tradizione agostiniana di M. RONDINA (= Monografie Storiche Agostiniane, n. s., 10). Tolentino, Biblioteca Egidiana, 2015, 128 p., ill., ISBN 978-88-98033-21-8. [Catharina v. m. Alex.] VAUCHEZ, A. Catherine de Sienne. Vie et passions. Paris, Éditions du Cerf, 2015, 254 p., ISBN 978-2-204-09808-3. [Catharina Senensis] Tommaso da Celano. Leggenda di santa Chiara vergine. Introd., trad. e note di M. GUIDA (= Letture cristiane del secondo millennio, 55). Milano, Paoline Editoriale Libri, 2015, 216 p., ISBN 978-88-315-4667-6. [Clara v. Assisiensis] PAPATHANASIOS, Chr. K. Λόγος εἰς τὸν Ἅγιον Διονύσιον τὸν Ἀρεοπαγίτην. Εἰς τὸν πανηγυρικὸν Ἐσπερινὸν τῆς 2-10-2013, χοροστατοῦντος τοῦ Μακαριωτὰτου Ἀρχιεπισκόπου Ἀθηνῶν καὶ πάσης Ἑλλάδος κ. Ἱερωνύμου Βˊ. Athènes, Ἐκδόσεις Τηνός, 2014, 20 p., ill. [Dionysius Areopagita ep. Athen.] TORCIVIA, M. Francescanesimo mistico a Palermo. La Venerabile serva di Dio suor Febronia Ferdinanda di Gesù (Caccamo 1657 – Palermo 1718) clarissa del monastero di S. Chiara. Soveria Mannelli, Rubbettino Editore, 2015, 302 p., ill., ISBN 978-88-498-4433-7. [Febronia Ferdinanda a Iesu] La Passione di Felice martire, vescovo di Nola (BHL 2869). Ed. critica e trad. a cura di R. MANFREDONIA – E. D’ANGELO (= Edizione nazionale dei testi mediolatini d’Italia, 32). Firenze, SISMEL – Edizioni del Galluzzo, 2013, 97 p., ISBN 978-88-8450-533-0. [Felix ep. Nolanus m.] BARTOLI, M. – DALARUN, J. – JOHNSON, T. J. – SEDDA, F. François d’Assise au miroir de la liturgie. Trad. J. DALARUN, avec la collab. de J.-B. LEBIGUE – M. OZILOU – D. POIREL – M. A. POLO DE BEAULIEU (= Sources franciscaines). Paris, Éditions franciscaines, 2015, 320 p., ISBN 978-2-850-20387-9. [Franciscus Assisiensis] CASSIO, G. – MESSA, P. Il cibo di Francesco. Anche di pane vive l’uomo. Milano, Edizioni Terra Santa, 2015, 96 p., ill., ISBN 978-88-6240-339-9. [Id.]

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HAGIOGRAPHICA

PAROLINI, M. Gervasio e Protasio, valenti medici di nostra patria. Accenni sul culto e l’iconografia in Valtellina, in Bollettino storico Alta Valtellina, 17 (2014), p. 255-286, ill. [Gervasius et Protasius mm. Mediolani] KAKLAMANOS, D. A. Remarques sur l’éloge du patriarche de Constantinople Nil Kerameus à saint Grégoire Palamas (BHG 719). Prolégomènes en vue d’une édition critique, in Βυζαντινά, 33 (2013-2014), p. 423-428. [Gregorius Palamas] WESTERGREN, A. A Relic In Spe: Theodoret’s Depiction of a Philosopher Saint, in Papers presented at the Sixteenth International Conference on Patristic Studies held in Oxford, 2011. Ed. M. VINZENT. Vol. 16: From the Fifth Century Onwards (Greek Writers) (= Studia Patristica, 68). Leuven, Peeters, 2013, p. 25-29. [Iacobus mon. in Syria] NICOLOTTI, A. Sindone. Storia e leggende di una reliquia controversa (= Einaudi Storia, 59). Torino, Giulio Einaudi editore, 2015, XVI-370 p. + 16 pl., ISBN 978-88-06-21304-6. [Iesus Christus. Sudarium] Gädlä Abunä Yonas Zä-Bur, Eritrean Saint of the 15th Century. Geʻez Text. Ed. and transl. TEDROS ABRAHA (= Patrologia Orientalis, 53 – fasc. 2 – n° 236). Turnhout, Brepols, 2015, 178 p., ISBN 978-2-503-56548-4. [Ionas ab. Dekhukhan in Erythrea] HIGGINS, D. H. Saint Jordan of Bristol: Foundations of English Christianity and Culture in the West of England in the Seventh Century. [London], New Generation Publishing, 2015, VI250 p., ill., ISBN 978-1-78507-277-2. [Iordanus conf. in Anglia] TOMEA, P. Il culto e la memoria di Lorenzo a Milano (sec. V-XIII), in Il culto di san Lorenzo tra Roma e Milano. Dalle origini al Medioevo. Cur. R. PASSARELLA (= Studia Ambrosiana, 8). Milano, Biblioteca Ambrosiana – Roma, Bulzoni editore, 2015, p. 55-114. [Laurentius diac. m. Romae] SANSTERRE, J.-M. Vivantes ou comme vivantes: l’animation miraculeuse d’images de la Vierge entre Moyen Âge et époque moderne, in Revue de l’histoire des religions, 232 (2015), p. 155-182. [Maria Deipara. Miracula] PAPATHANASIOS, Chr. K. Λόγος εἰς τὴν Ἁγὶαν Μαρίαν τὴν Μαγδαληνὴν τὴν μυροφόρον & ἰσαπόστολον. Athènes, Ἐκδόσεις Τηνός, 2014, 14 p., ill. [Maria Magdalena] EL KHOLI, S. Die Martinsvita des Johannes Rhagius Aesticampianus, in Archiv für mittelrheinische Kirchengeschichte, 67 (2015), p. 271-343. [Martinus ep. Turonensis] ROCCIA, Fr. San Mercurio di Eclano e San Mercurio di Cesarea di Cappadocia martiri. Lectio certa est: “Apulia civitate Eclano Mercurii martyris”. [Saronno], Associazione Padre Monti, 2015, 120 p., ill., ISBN 978-88-65350-96-6. [Mercurius m. Caesareae Cappad.] STICHEL, R. König Salomon, der Hl. Methodios von Olympos/Patara und die byzantinische Polemik gegen die Juden, in Πολυίστωρ. Scripta slavica Mario Capaldo dicata. Red. C. DIDDI. Moscou – Rome, Издательство Индрик, 2015, p. 281-296. [Methodius ep. Patarensis] PASCHALIDIS, S. A. Ἡ αὐτόγραφη νεομαρτυρολογικὴ συλλογὴ τοῦ μοναχοῦ Καισαρίου Δαπόντε (1713-1784). Εἰσαγωγή, κριτικὴ ἔκδοση κειμένου, παράρτημα, πίνακες. Εἰκονολογικὸς σχολιασμός G. TSIGARAS (= Νεομαρτυρολογικὰ σύμμεικτα, 1). Thessalonique, Ἐκδόσεις Μυγδονία, 2012, 415 p., ill., ISBN 978-960-7666-71-0. [Neomartyres] PAPATHANASIOS, Chr. K. Λόγος εἰς τὴν ἔνδοξον ὁσιοπαρθενομάρτυρα Ἁγίαν Παρασκευήν ἐκφωνηθεὶς εἰς τὸν Ἑσπερινὸν τῆς ἑορτῆς τῆς Ἁγίας τὴν 25ην Ἰουλίου 2008 εἰς τὸν πανηγυρίζοντα Ἱ. Ν. Ἁγίας Παρασκευῆς Ἀττικῆς. Athènes, Ἐκδόσεις Τηνός, 2011, 15 p., ill. [Parasceve m.] Chluba pustyni czyli żywot Najchwalebniejszego Patriarchy i Nauczyciela Świętego Pawła z Teb, pierwszego pustelnika, napisany przez Św. Hieronima kapłana [trad. polonaise de l’édition de M. Fuhrmann]. Trad. J. WOJTCZAK-SZYSZKOWSKI. Warszawa, Wydawnictwo Zakonu Paulinów, 2014, xx-355 p., ill., ISBN 978-83-921188-3-1. [Paulus Thebaeus] CAGGIA, M. P. La collina di San Filippo a Hierapolis di Frigia: osservazioni sulle fasi di occupazione bizantina e selgiuchide (IX-XIV sec.), in Fra il Meandro e il Lico. Archeologia e storia in un paesaggio anatolico. Giornata di studio (Roma, 30 marzo 2012). Cur. Fr. [Philippus ap.] GUIZZI = Scienze dell’Antichità, 20 (2014), p. 143-161, ill.

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—, The Termal Building of the Sanctuary of Saint Philip in Hierapolis (Phrygia, Turkey), in 25 siècles de bain collectif en Orient. Proche-Orient, Égypte et péninsule Arabique. Actes du 3e colloque international Balnéorient (Damas, 2-6 nov. 2009). Éd. M.-Fr. BOUSSAC, et al. (= Institut français d’archéologie orientale. Études urbaines, 9.2). Le Caire, Institut français d’archéologie orientale, 2014, p. 1-20, ill. [Id.] D’ANDRIA, Fr. Conversion, Crucifixion and Celebration. St. Philip’s Martyrium at Hierapolis Draws Thousands over the Centuries, in Biblical Archaeology Review, 37/4 (2011), p. 3446, ill. [Id.] —, Storia di un libro sul Martyrion di Hierapolis di Frigia, in Orizzonti. Rassegna di archeologia, 14 (2013), p. 125-138, ill. [Id.] VANDERPUTTEN, S. Imagining Religious Leadership in the Middle Ages. Richard of SaintVanne and the Politics of Reform. Ithaca (NY), Cornell University, 2015, XVI-244 p., ill., ISBN 978-0-8014-5377-9. [Richardus ab. S. Vitoni Virdunensis] BOLLE, P. Archival Documents, Early Printed Books, and Manuscripts: The Backwards TextTradition of St. Roch “of Montpellier”, in The Saint Between Manuscript and Print: Italy 1400-1600. Ed. A. K. FRAZIER (= Essays and Studies, 37). Toronto, Centre for Reformation and Renaissance Studies, 2015, p. 143-182, ill. [Rochus conf. Montepessulan.] DORMEIER, H. La peste, il commercio internazionale e il culto di san Rocco a Lubecca. Proposte di metodo e prospettive di ricerca, in Sanctorum, 10 (2013), p. 101-126, ill. [Id.] La Passio sanctae Salsae (BHL 7467). Recherches sur une Passion tardive d’Afrique du Nord. Avec une nouvelle édition critique de A. M. PIREDDA et une traduction annotée du GRAA. Études réunies par S. FIALON – J. MEYERS (= Scripta Antiqua, 72). Bordeaux, Ausonius Éditions [diffusion De Boccard], 2015, 315 p., ill., ISBN 978-2-35613-130-0. [Salsa v. m. Tipasitana] EFTHYMIADIS, S. Une hagiographie classicisante et son auteur: la Vie longue de sainte Thomaïs de Lesbos (BHG 2455), in «Pour une poétique de Byzance». Hommage à Vassilis Katsaros. Ed. S. EFTHYMIADIS – C. MESSIS – P. ODORICO – I. POLÉMIS (= Dossiers byzantins, 16). Paris, ÉHÉSS, 2015, p. 113-131. [Thomais Lesbia] Die romanische Neumarktkirche zu Merseburg und ihr Patron Thomas Becket von Canterbury. Förderkreis Museum Schloss Merseburg, 2014, 239 p., ill. [Thomas ep. Cantuariensis] DE VRIENDT, Fr. Alsengemme, amulette, bijou, relique: l’énigmatique «Benoîte Affique» de sainte Waudru à Mons, in Revue du Nord, 96 (2014), p. 747-780, ill. [Waldetrudis abb. Montensis] Ricognizione delle reliquie di san Zeno. Eredità di fede e ricerca scientifica. Diocesi di Verona – Cierre Edizioni, 2014, 176 p., ill. [Zeno ep. Veronensis] *

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II. VARIA A. Opera BAR, J. R. – WYSOCZAŃSKI, J. Znak miłości w Peru. O życiu dwóch misjonarzy franciszkańskich i ich męczseństwie. Kraków, Wydawnictwo OO. Franciszkanów „Bratni Zew”, 2015, 160 p. + 16 pl., ISBN 978-83-7485-257-9. Bibliotheca Gregorii Magni manuscripta. Censimento dei manoscritti di Gregorio Magno e della sua fortuna (epitomi, florilegi, agiografie, liturgia) / Census of Manuscripts of Gregory the Great and His Fortune (Epitomes, Anthologies, Hagiographies, Liturgy). 1: Aachen – Chur. Cur. F. BOCCINI. Firenze, SISMEL – Edizioni del Galluzzo, 2015, XXX-207 p., ISBN 978-88-8450-650-4.

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VARIA

CASPERS, Ch. Zacht, doch krachtdadig. Anna Catharina van Hees en de oorsprong van de Congregatie Dochters van Maria en Joseph. Baarn, Adveniat geloofseducatie, 2015, 192 p., ill., ISBN 978-94-9209-311-0. Clairvaux, l’aventure cistercienne. Sous la dir. de A. BAUDIN – N. DOHRMANN – L. VEYSSIÈRE. Paris, Somogy éditions d’art – Conseil général de l’Aube, 2015, 568 p., ill., ISBN 978-27572-0934-9. Clavis des auteurs latins du Moyen Âge. Territoire français, 735-987. T. IV.1. Ed. M.-H. JULLIEN (= Corpus Christianorum. Continuatio Mediaeualis). Turnhout, Brepols, 2015, XIV-129 p., ISBN 978-2-503-55599-7. Les constitutions des chanoines réguliers de Windesheim / Constitutiones canonicorum Windeshemensium. Texte latin et introd. par M. HAVERALS. Trad. par Fr. J. LEGRAND (= Sous la règle de saint Augustin, 14). Turnhout, Brepols, 2014, 275 p., ISBN 978-2-503-54083-2. DEMPSEY, G. T. Aldhelm of Malmesbury and the Ending of Late Antiquity (= Studia Traditionis Theologiae, 16). Turnhout, Brepols, 2015, XIII-358 p., ISBN 978-2-503-55490-7. GLIŃSKA, K. A. Geta Witalisa z Blois. Komedia elegijna na tle prądów intelektualnych w XIIwiecznej Francji (= Scripta, 4). Warszawa, Uniwersytet Warszawski. Instytut Filologii Klasycznej – Wydawnictwo Naukowe Sub Lupa, 2012, 314 p., ISBN 978-83-931033-5-5. Katalog der lateinischen Handschriften der Bayerischen Staatsbibliothek München. Die Handschriften aus St. Emmeram in Regensburg. Bd. 4: Clm 14401-14540. Neu beschr. F. HELMER – J. KNÖDLER. Unter Mitarb. von G. GLAUCHE (= Catalogus codicum manu scriptorum Bibliothecae Monacensis, IV. Series nova. Pars 2, 4). Wiesbaden, Harrassowitz, 2015, XXXIV-607 p., ISBN 978-3-447-10273-5. Katalog der mittelalterlichen Handschriften der Universitäts- und Landesbibliothek Bonn. Beschr. J. GEIß. Berlin, Walter de Gruyter, 2015, LXVIII-482 p. + 16 pl., ISBN 978-3-05006462-8. I manoscritti datati della Provincia di Cremona. Cur. M. D’AGOSTINO (= Manoscritti datati d’Italia, 26). Firenze, SISMEL – Edizioni del Galluzzo, 2015, X-94 p. + 50 pl., ISBN 97888-8450-665-8. I manoscritti datati delle province di Brescia, Como, Lodi, Monza-Brianza e Varese. Catalogo a cura di M. PANTAROTTO. Direzione scientifica di N. GIOVÈ MARCHIOLI (= Manoscritti datati d’Italia, 24). Firenze, SISMEL – Edizioni del Galluzzo, 2014, X-149 p. + 84 pl. + 1 CD-ROM, ISBN 978-88-8450-577-4. Manuscripta theologica. Die Handschriften in Quarto. Bearb. von K. WIEDEMANN (= Die Handschriften der Universitätsbibliothek Kassel, Landesbibliothek und Murhardsche Bibliothek der Stadt Kassel, 1/2). Wiesbaden, Harrassowitz Verlag, 2015, XVI-261 p., ISBN 978-3-447-10332-9. Les origines de l’abbaye cistercienne d’Orval. Actes du colloque organisé à Orval le 23 juillet 2011. Sous la dir. de J.-M. YANTE (= Bibliothèque de la Revue d’histoire ecclésiastique, 99). Turnhout, Brepols, 2015, 118 p., ill., ISBN 978-2-503-55529-4. PAPAVASILIOU, A. N. Κριτικὴ ἀποτίμηση τοῦ θεολογικοῦ διαλόγου μὲ τοὺς ἀντιχαλκηδονίους. Nicosie [Ὁδος Ῥωμανοῦ, 8, Λυκαβητὸς – 1070 Λευκωσία], 2015, 113 p. PASCHALIDIS, S. A. Προσκυνητάριον Ἱερᾶς Μονῆς Ξενοφῶντος. Daphni, Ἔκδοση Ἱερᾶς Μονῆς Ξενοφῶντος, 2012, 194 p., ill., ISBN 978-960-86299-5-0. Praising the Otherness. Linguistic and Cultural Alterity in the Roman Empire: Historiography and Panegyrics. Ed. M. P. GARCÍA RUIZ – A. J. QUIROGA PUERTAS = Talanta. Proceedings of the Dutch Archaeological and Historical Society, 45 (2013) [paru en 2014], 175 p., ISBN 978-90-72067-17-3. Pseudo-Filon. Księga starożytności biblijnych. Przekład i opracowanie Ł. LASKOWSKI (= Pisma Apokryficzne, 7). Kraków, Wydawnictwo WAM – Księża Jezuici, 2015, 325 p., ISBN 978-83-7767-018-7.

PUBLICATIONS REÇUES

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Jews. Personalities, Conflicts, and Perspectives from the 13th to the 20th Century. Hg. E. H. FÜLLENBACH – G. MILETTO (= Quellen und Forschungen zur Geschichte des Dominikanerordens, n. F., 14). Berlin, de Gruyter, 2015, p. 475-490. MÜHLENBOCK, C. – BRU, H. – LAFLI, E. Dédicaces de Phrygie à Zeus Alsènos au Medelhavsmuseet de Stockholm, in Revue archéologique, 59 (2015), p. 23-34, ill. TRIO, P. Obituaries or Anniversary Books: Handle with Care ! The Example of the Ypres Confraternity of Our Lady, in Living memoria. Studies in Medieval and Early Modern Memorial Culture in Honour of Truus van Bueren. Ed. R. DE WEIJERT, et al. (= Middeleeuwse studies en bronnen, 137). Hilversum, Verloren, 2011, p. 179-193. —, The Social Positioning of Late Medieval Confraternities in Urbanized Flanders: from Integration to Segregation, in Mittelalterliche Bruderschaften in europäischen Städten. Funktionen, Formen, Akteure / Medieval Confraternities in European Towns. Functions, Forms, Protagonists. Hg. M. ESCHER-APSNER (= Inklusion/Exklusion, 12). Frankfurt am Main, Peter Lang, 2009, p. 99-110. —, What Factors Contributed to the Establishment of the Mendicant Orders in ThirteenthCentury Ypres ?, in Franciscan Organisation in the Mendicant Context. Formal and Informal Structures of the Friars’ Lives and Ministry in the Middle Ages. Ed. M. ROBSON – J. RÖHRKASTEN (= Vita Regularis, 44). Berlin, Lit Verlag, 2010, p. 97-111, carte.

INDEX SANCTORUM Indicem in pagellas 175-204, 282-345, 362-429 (partim) videsis supra p. 205-208, 347-349, 430-432 Abraham et Georgius Scetiotae mon.: 442 Abraham anachor. et Maria paenit.: 454 Acacius centurio m. Byzantii: 235 Adalbertus diac. Egmondae: 354-355 Adalbertus ep. Pragensis m.: 125, 141, 144, 448 Adelelmus ab. Burgis in Hispania: 452 Aemilianus Cucullatus conf. Tarracon.: 235, 452 Afra, Hilaria et soc. mm. Augustae Vindel.: 310 Agape, Chionia et Irene vv. mm.: 161 Agilus ab. Resbacensis: 326 Albanus m. Moguntiae cultus: 114, 125 Albartus seu Albertus frater S. Erhardi: 144 Albertus conf. Ord. Carm. Messanae: 433-441 Albertus ep. Montis Corvini: 452 Alexander p., Eventius, Theodulus et soc. mm.: 114, 144 Aloysius Gonzaga S. I.: 465 Altmannus ep. Pataviensis: 104, 137, 151 Amantius ep. Rutenus: 232 Amatus ab. Habendensis: 326 Ambrosius ep. Mediolanensis: 113, 161, 236, 447-448 Ambrosius Traversari: 236 Ammon lector m. in Pentapoli: 241 Anastasia m. in insula Palmaria: 351 Anastasia v. m. Romae: 465 Anastasius Persa m.: 123, 142, 145, 147, 152, 154 Anastasius m. Salonae: 465 Anatolia m.: cf. Victoria et Anatolia Andreas salus seu stultus CP: 235, 455456 Andreas Spoletanus m.: 452 Angelus (seu Agnellus) de Pisis: 64 Anna prophetissa filia Phanuelis: 245, 248

Antoninus ep. Florentinus: 210 Antonius de Padua: 27, 45-46, 214, 220, 334 Antonius Rubino S.J.: 236 Antonius ab. in Thebaide: 148, 235 Apollonius: cf. Philemon, Apollonius et soc. Apophthegmata Patrum: 290 Arnulfus ep. Mettensis: 283-285, 289, 304, 311, 313-318, 319-333 Arsenius erem. in monte Scethi: 157 Athanasius ep. Alexandriae: 235, 465 Audoenus ep. Rotomagensis: 327 Augustinus ep. Cantuariensis: 144 Augustinus ep. Hipponensis: 172, 448 Autbertus ep. Cameracensis: 235 Babylas ep. Antioch. m.: 148, 235 Balbina: cf. Quirinus m. Romae Bardo ep. Moguntinus: 144 Barnabas ap.: 290 Barsanuphius et Iohannes mon.: 213 Bartholomaeus ap.: 145, 147 Bartholomaeus de Martyribus ep.: 451 Basilides et soc. mm. Romae: 299 Basilius ep. Caesareae: 96, 249, 252 Beda Venerabilis: 112, 152 Benedictus ab. Anianensis: 212, 233 Benedictus fundator pontis Avenion.: 233 Benedictus ab. Casinensis: 148 Benedictus, Iohannes et soc. (quinque fratres) mm. in Polonia: 151 Benignus m. Divione: 125 Benignus ep. m. cultus Ultraiecti: 354-355 Berachius ab. ep. in Hibernia: 449 Bernardinus Senensis: 236 Bernardus ab. Claraval.: 25, 150, 275-276 Bernica (Veronica) et Prosdoca vv. cum matre Domnina mm.: 224 Bertrandus ep. Convenarum: 212

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INDEX SANCTORUM

Bertrandus ab. Grandis Silvae: 212 Birgitta Suecica: 213 Blasius ep. Sebastenus m.: 213 Bonifatius ep. Mogunt. m.: 114, 126, 353355 Bonifatius m. Tarsi: 113 Brendanus ab. Clonfert.: 115 Briccius ep. Turonensis: 448 Brigida v. Kildariae: 132, 142-145, 147, 152 Briocus (Brioccius) ep.: 209 Caesaraugustani mm.: 451 Caesarius diac. et Iulianus mm.: 294 Calocerus et Parthenius mm. Romae: 311 Cantius, Cantianus et Cantianilla mm. Aquileiae: 465 Carolus Blesensis dux Brit.: 209-210 Carolus Magnus imp.: 257, 285 Castulus m. Romae: 115 Catharina v. m. Alexandriae: 465 Catharina Senensis: 433, 465 Christina Mirabilis v.: 167 Chromatius ep. Aquileiensis: 96, 117 Chrysanthus et Daria mm.: 213, 351 Clara v. Assisiensis: 66, 354, 465 Clemens I p.: 343, 446 Clemens ep. Mettensis: 284, 286 Clodulfus ep. Mettensis: 285, 289, 313319, 320-321 Coemgenus, al. Keivinus, ab. Glendaloc.: 132 Colomannus m. in Austria: 102, 119 Columba ab. Hiensis: 126, 449-450 Columba v. m. Senonensis: 97 Columba de Tir dà glas: 236 Corentinus ep. Corisopitensis: 450 Cosmas et Damianus mm.: 39, 65, 213214 Cronanus ab. Roscreensis in Hibernia: 236 Crux Christi: 103, 236 Cyprianus magus Antiochenus, Iustina et Theoctistus mm.: 452 Cyprianus ep. Carthag. m.: 128 Cyprilla, Rhoa et Lucia mm. cum Theodoro ep. Cyrenae: 241-248

Cyrillus et Methodius Slavorum apost.: 214-215 Damasus p.: 448 Damianus: cf. Cosmas et Damianus Daniel propheta et tres pueri: 255 Dionysius Areopagita ep. Athen.: 465 Dionysius ep. Parisiensis: 125, 447-448 Dominicus ab. Exiliensis: 235 Dominicus fundator O. P.: 277, 284 Domnio ep. Salonitanus m.: 465 Donatus, Macarius et Theodorus mm. in Aegypto: 465 Donatus et soc. mm. Concordiae: 465 Dormientes septem Ephesi mm.: 161, 258, 263-264, 269, 272 Eberhardus ep. Salisburgensis: 134 Edmundus rex Angliae Orient. m.: 236, 456-458 Eduardus rex dictus Confessor: 256-281 Egeria mon. peregrina: 453 Elisabeth thaumaturga: 235 Elisabeth landgr. Thuringiae: 112, 115 Elisaeus propheta: 231 Engratia v. m. Caesaraugustae: 451 Ennemundus ep. Lugdunensis m.: 450 Eobanus, Athalarius et Marcelmus soc. S. Bonifatii mm.: 354-355 Epiphanius ep. Constantiae in Cypro: 113, 130-131, 134 Erhardus ep. cultus Ratisbonae: 143 Eucherius ep. Lugdunensis: 450 Eugenius ep. Toletanus: 451 Eulalia v. m. Barcinone: 289 Eulalia v. m. Emeritae: 289 Euphemia v. m. Chalcedone: 225 Euphrosyna v. Alexandriae: 148 Eupraxia v. in Thebaide: 454 Euprepius ep. Veronensis: 236 Eusebius ep. Caesar. historiographus: 96 Euthymius ab. in eremo S. Civitatis: 235 Faro ep. Meldensis: 296 Febronia Ferdinanda a Iesu: 465 Febronia v. et soc. mm. Sibapoli: 141

INDEX SANCTORUM

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Felicitas cum VII filiis mm. Romae: 236 Felix presb. Nolanus m.: 354, 465 Fina v. in Tuscia: 230 Flannanus ep. Killaloensis: 132 Florianus m. Laureaci in Norico: 114 Florus ep. Lodovensis: 233 Franciscus Assisiensis: 23-86, 220-221, 235, 236, 465 Franciscus Zirano O.F.M. m.: 237 Fridericus ep. Traiectensis: 354-355 Frontonius ab. in Aegypto: 114, 161, 446 Fructuosus ep. Tarracon., Augurius et Eulogius mm.: 143 Fulcrannus ep. Lodovensis: 233 Furseus ab. Latiniacensis: 237

Gregorius Palamas archiep. Thessal.: 466 Gregorius ab. Porcetensis: 161 Gregorius ab. Traiectensis: 354 Guntherus erem. in Bohemia: 237

Galactorius ep. Lascurrensis: 450-451 Gallicanus, Iohannes et Paulus mm.: 113, 114, 123, 153 Gamalbertus presb. in Bavaria: 144 Gatianus ep. Turonensis: 446 Gaugericus ep. Cameracensis: 235 Gebehardus ep. Salisburg.: 101, 134, 143 Gengulfus m. Varennis: 144, 284 Georgius Cappadox m.: 114, 142-144, 161, 217, 220 Geraldus comes Auriliacensis: 233 Geraldus ab. Silvae Maioris: 212 Gerardus fund. Ord. Hospit. S. Iohannis Hierosol.: 233 Gerardus de Valentia: 438 Germanus ep. Parisiensis: 143 Germanus m. Polae in Istria: 465 Gertrudis abb. Nivialensis: 237 Gervasius et Protasius mm.: 466 Glodesindis abb. Mettis: 284-285 Godehardus ep. Hildesheimensis: 114 Goericus seu Abbo ep. Mettensis: 319, 321, 328, 330 Gorgonius: cf. Sebasteni XL mm. Gothalmus conf. cultus Mellicii: 119 Gregentius ep. Tepharensis in Arabia: 224 Gregorius Magnus p.: 448 Gregorius VII p.: 99, 134, 143, 211 Gregorius thaumaturgus ep. Neoc.: 146147, 149-150

Iacobus Minor ap.: 114, 359 Iacobus mon. in Syria: 466 Ianuarius m. Romae: 236 Ieremias propheta: 342 Iesus Christus: 51, 72, 75, 82, 445-446 Ascensio: 360 Circumcisio: 361 Clavi: 59-60, 65 Epiphania: 361 Eucharistia: 451 Imago / Imagines: 214, 227-228 Lancea: 229 Miracula eucharistica: 225-229 Nativitas: 57-58, 360 Passio: 59-60 Sanguis: 60, 226 Sepulchrum: 227 Sudarium: 466 Transfiguratio: 361 Vulnera: 58-60, 65 Ignatius de Loyola: 447 Ignatius Maloyan ep. Mardin.: 465 Innocentes mm.: 361 Iob patriarcha: 231 Iohannes I p.: 143 Iohannes ap.: 214, 269, 273, 286, 360 Iohannes Baptista: 114, 161, 231, 342, 446-447 Inventio capitis: 148 Iohannes Cassianus: 452

Habacuc propheta: 255 Heimeradus presb. Hasungensis: 152, 154 Henricus II imp.: 146-147, 149 Hieronymus presb.: 96, 117, 443-444 Hilarion ab. in Palaestina: 443 Hilarius ep. Arelatensis: 448 Hilarius ep. Pictavensis: 447 Hildegundis, al. Ioseph, v. Sconaug.: 137 Hildulfus chorep. Treverensis: 126 Honoratus ep. Arelatensis: 448

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INDEX SANCTORUM

Iohannes Chrysostomus ep. CP: 143, 172, 444-445, 454 Iohannes Ögmundarson ep. in Island.: 451 Iohannes Scetiota ab.: 442-443 Iohannes Paulus II p.: 462 Ionas ab. Dekhukhan in Erythrea: 466 Iordanus conf. in Anglia: 466 Irenaeus ep. Lugdunensis m.: 450 Irene v. m. culta Scalabi in Lusitania: 453 Isabella v. filia Ludovici VIII regis Franciae: 237 Ita v. in Hibernia: 132, 142 Iudicael rex mon. in Britannia Arm.: 209 Iulianus, Basilissa et soc. mm.: 143, 155 Iulianus ep. Cenomannensis: 446 Iulianus ep. Lascurrensis: 450 Iulius et Iulianus culti in dioec. Novariensi: 148 Iustus m. Tergestinus: 465 Kenelmus puer m. in Anglia: 258 Laurentius diac. m. Romae: 466 Leander ep. Hispalensis: 237 Lebuinus presb. Daventriae: 353-355 Legenda aurea: 97-98, 115, 211, 282312, 335, 344, 452-453, Leo I p.: 172 Leo II: 146-147, 149 Leo IX p.: 112, 114, 152, 154, 158, 161 Leopoldus Pius, marchio Austriae: 102 Lidwina v. Schiedamensis: 230-232 Liudgerus ep. Monasteriensis: 114 Lucia v. m. Syracusis: 213 Lucillianus, Paula et pueri IV mm.: 235 Lucius Cyrenensis m.: 241-242, 244, 246 Ludovicus IX rex Francorum: 283 Ludovicus ep. Tolos.: 354-355, 438, 449 Lullus ep. Moguntinus: 124 Luxorius et soc. mm. in Sardinia: 99 Magistranus et soc. (senes XLIX) mm.: 442 Maglorius ep. Dolensis: 209 Maianus conf. in Vasconia: 233 Malchus mon. captivus: 237, 344, 443-444

Marcellus p. et soc. mm.: 342 Marciana v. m. Caesareae in Maurit.: 235 Marcus evangelista: 352, 359 Margarita de Ipris: 230 Maria Aegyptiaca: 113, 146-148, 153, 155-156 Maria a Bethania, soror Lazari: 233 Maria Deipara: 39, 67, 93, 219, 229, 237, 245, 248, 437, 443, 451, 453, 465 Annuntiatio: 360 Assumptio: 150 Dormitio: 93 Imagines: 437 Miracula: 134, 156, 452-453, 466 Maria Antonia Pereira: 452 Maria Magdalena: 210, 233, 459, 466 Marianus fund. monast. Scottorum Ratisbon.: 116-117, 136-137, 142, 145, 147 Marina m. Antiochiae: 213 Marius erem. Mauriacensis: 233 Martha v. hospita Christi: 245, 248 Martialis ep. Lemovicensis: 113, 445, 450 Martinus ep. Bracarensis: 452-453 Martinus ep. Turonensis: 318, 354, 446, 448-449, 466 Martyres DCCC Hydruntini: 213 Mathildis regina: 143 Matthaeus ap.: 213-214 Matthias ap.: 137 Maurus Afer m. Romae: 465 Maurus disc. S. Benedicti ab. Glannafol.: 148 Maximilianus ep. Laureacensis m.: 465 Maximinus ep. Treverensis: 114, 284 Maximus confessor CP: 7-8, 11-12, 18, 237 Melania senior matrona Romana: 448 Melania iunior matrona Romana: 224, 448, 454 Melorus seu Melarius m. in Britannia Armorica: 209 Mercurius m. Caesareae Cappad.: 466 Methodius ep. Patarensis: 466 Mevennus ab. in Britannia Armorica: 209 Michael archangelus: 75, 213-214, 237, 360

INDEX SANCTORUM Mochoemocus ab. Liatmorensis: 236 Mochulleus ep. in Hibernia: 117, 132, 142, 147, 153-155, 158, 163-164 Mocius m. Byzantii: 235 Moyses legislator et propheta: 12 Narrationes animae utiles: 249-255 Nazarius et Celsus mm. Mediol.: 213 Neomartyres: 466 Nicasius seu Nigasius m. in pago Vulcassino: 446 Nicetius ep. Lugdunensis: 450 Nicolaus ep. Myrensis: 213-220, 342 Nicolaus hegum. Sionita: 216 Nicolaus Možajskij: 220 Nicolaus Zarajskiensis: 220 Nonnosus diac. cultus in Molzbichl: 148 Odgerus diac. Ruraemundae: 354 Odilia vid. Leodiensis: 230 Odulfus presb.: 353-355 Olympias diaconissa CP: 454 Oswaldus rex Nordanhymbr. m.: 270 Otto ep. Babenbergensis: 99, 136-137, 152, 154-155, 158 Pachomius ab. Tabennensis: 135, 144, 289, 312 Pachomius ab. in Thebaide: 289, 312 Pancratius m. Romae: 353-354 Parasceve m.: 466 Patiens ep. Mettensis: 286 Patres Athonenses: 465 Patricius ap. Hibernorum: 132, 145, 147, 149, 237, 449 Patrum Vitae: 143, 288, 290, 298 Paula vidua Romana: 143, 343, 444 Paulinus ep. Nolanus: 448 Paulus ap.: 67, 343, 354, 465 Paulus Aurelianus ep.: 209 Paulus Thebaeus erem.: 148, 443, 466 Pelagius m. patronus Constantiae: 465 Perpetua et Felicitas mm.: 123 Petrus ap.: 67, 286, 296, 354, 445-446 Petrus Faber S.J.: 237 Petrus ep. Oxomensis: 209

475

Phantinus iunior mon.: 223 Philadelphus m.: 224 Philemon, Apollonius et soc. mm. Antinoi: 113-114 Philippus ap.: 114, 352, 359, 466-467 Phocas ep. m. Sinope: 148 Photinus ep. Lugdun. et soc. mm.: 450, 465 Pinianus et Lucina mm.: 126 Pius a Pietrelcina: 214 Placidus disc. S. Benedicti et soc.: 93 Plechelmus ep. cultus Ruraemund.: 354355 Pontianus m. Spoleti: 354 Potitus m.: 213 Primus et Felicianus mm. Romae: 125-126 Procopius lector m. Caesareae: 241, 247 Protus et Hyacinthus mm. Romae: 294 Quiriacus (Iudas) ep. m. Hierosol.: 114 Quirinus m. Romae: 148 Quirinus ep. Sciscianus m.: 113, 465 Radbodus ep. Ultraiectensis: 353-354 Radegundis regina Francorum: 447 Raimundus Capuanus: 210 Remigius ep. Remensis: 315, 317 Richardus ab . S. Vitoni Virdunensis: 467 Rochus conf. Montepessulan.: 233, 467 Romaricus ab. Habendensis: 326, 328-329 Ronanus ep. in Hibernia: 132 Roselina de Villanova, O. Cartus.: 233 Ruadanus seu Rodanus ab. Lothrensis: 236 Salsa v. m. Tipasitana: 235, 467 Samson ep. Dolensis: 209 Samuel Kalamunensis in Aegypto: 442 Sancti Aquitaniae: 211-212 Sancti Britanniae Armoricae: 209-210 Sancti Germaniae: 211 Sancti Hiberniae: 130-132 Sancti Hispaniae: 211 Sancti Islandiae: 458-459 Sancti Leodienses: 212 Sancti Lusitaniae: 211 Sancti Norvegiae: 458-459 Sancti Siciliae: 210

476

INDEX SANCTORUM

Sancti Umbriae: 210-211 Saturninus ep. Tolosanus: 115 Scholastica v. in Monte Cassino: 155 Sebaldus erem. Norimbergensis: 118 Sebasteni XL mm.: 150 Sebastianus m. Romae: 238 Segolina abb. Troclarensis: 284 Senanus ep. Iniscathensis: 132, 146-147, 149 Serapia v. m. Romae: 307 Serapion lector m. in Pentapoli: 241 Servatius ep. Tungrensis: 353-354 Servulus m. Tergesti: 465 Severinus presb. in Norico: 143 Sigismundus rex Burgund.: 125 Silvester p.: 107 Simon puer m. Tridenti: 227 Simplicius ep. Augustodunensis: 284 Sophronius patr. Hierosolym.: 5-22 Stephanus protomart.: 150, 326, 360 Stephanus institutor Ord. Grandimont.: 233 Stephanus ab. Obazinensis: 238 Stephanus rex Ungariae: 146-147, 149 Stephanus Uroš III: 217, 219 Symeon salus apud Emesam: 235, 455456 Syrus ep. Ianuensis: 287 Tarcisius acolythus m. Romae: 459 Teresia a Iesu Infante: 238, 459-462 Thais paenitens in Aegypto: 115 Thecla v. discipula Pauli: 150 Theodericus ep. Mettensis: 456 Theodora et Didymus mm. Alex.: 124125, 130, 152 Theodora Alexandrina: 454 Theodorus ep. Cyrenae m.: 241-248 Theodorus ep. m. in Pentapoli: 241 Theodosia v. m. Caesareae: 113 Theophilus vicedominus eccl. Adanensis: 113 Theudarius ab. Viennensis: 143 Thomais Lesbia, matrona CP: 467

Thomas ap.: 238, 360 Thomas Aquinas: 462 Thomas ep. Cantuariensis: 259, 266, 452 467 Thorlacus ep. Skalholtensis: 451 Thyrsus, Leucius, Callinicus et soc. mm. in Asia: 143 Trinitas: 290 Trudo ab. in Hasbania: 313 Urbanus I p.: 345 Valens ep. m. cultus in Augia Divite: 126, 142, 144, 162 Veronica matrona Hierosolymit.: 459 Veronica: cf. Bernica Veronus conf. cultus Lembecae et Montibus: 238 Victoria et Anatolia mm. Romae: 310-311 Victricius ep. Rotomagensis: 447 Vincentia et Margarita mm.: 161 Vincentius diac. m. Caesaraugust.: 452 Vincentius Ferrerius Ord. Praed.: 452-453 Virgilius ep. Salisburgensis: 135 Visio Baronti: 118 Visio Esdrae: 143 Visio Tnugdali: 118, 143 Visio Wettini: 118, 143 Vitalis et Valeria mm.: 359 Vitalis m. Ravennae: 352 Vitus, Modestus et Crescentia mm.: 213 Waldburgis abb. Heidenheimensis: 143 Waldetrudis abb. Montibus: 238, 467 Werenfridus presb. cultus in Elst: 354-355 Wernerus puer m. Wesaliae: 227 Willelmus dux, mon. Gellonensis: 238 Willibrordus ep. Traiectensis: 353-355 Wiro ep. Scottus, conf. Ruraemund.: 354355 Zeno ep. Veronensis: 467 Zenobius ep. Florentinus: 446 Zoilus et soc. mm. Cordubae: 452

INDEX OPERUM RECENSITORUM

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INDEX OPERUM RECENSITORUM Barnes – Bevan, cf. The Funerary Speech for John Chrysostom Bousquet-Labouérie – Maurey, cf. Espace sacré, mémoire sacrée Branchi, Lo scriptorium e la biblioteca di Nonantola 202 Bretscher-Gisiger – Kamber – Mangold, cf. Katalog der mittelalterl. Hss des Klosters St. Urban Bugayevsky, cf. ÄÎÁÐÛȇ ÊÎÐÌ×ÈÈ Caldelli, et al., cf. I manoscritti medievali della provincia di Arezzo Capron, Codex hagiographiques du Louvre sur papyrus 453 Caspers, Een bovenaardse vrouw 230 Catalogo dei manoscritti Polironiani. II. Bibl. Comunale di Mantova 188 Catalogus codicum manuscriptorum Medii Ævi latinorum qui in Bibl. Jagellonica Cracoviae asservantur, 7-10 178 Cesaretti, et al., cf. Leonzio di Neapoli – Niceforo prete. Chmelewsky – Pierling – Śliwowska, L’affaire Gagarine 233 Славяно-русский пролог по древнейшим спискам [The Slavo-Russian Synaxarium] 221 Corradini – Golinelli – Zanichelli, cf. Catalogo dei manoscritti Polironiani Crociani – Leardini – Palma, et al., cf. I manoscritti datati di Grottaferrata, Subiaco e Velletri Dalarun, La Vie retrouvée de François d’Assise 220 Dauzet – Langlois, cf. Thérèse au tribunal en 1910 De Robertis – Di Deo – Marchiaro, et al., cf. I manoscritti datati della Bibl. Medicea Laurenziana di Firenze De Robertis – Miriello, cf. I manoscritti datati della Bibl. Riccardiana di Firenze

Dom Fr. Plaine et les Bollandistes 209 ÄÎÁÐÛȇ ÊÎÐÌ×Èȇ [The Good Helmsman. The Cult of St. Nicholas] 215 Espace sacré, mémoire sacrée. Le culte des évêques dans leurs villes 445 Estudios de filología e historia en honor del prof. V. Valcárcel 451 Fournié – Hurel – Le Blévec, cf. Historiens modernes et Moyen Âge méridional The Funerary Speech for John Chrysostom 444 Giovè Marchioli – Granata, cf. I manoscritti medievali delle provincie di Belluno e Rovigo Giovè Marchiolo – Pantarotto, cf. I manoscritti datati della Bibl. Queriniana di Brescia Giovè Marchioli – Granata – Pantarotto, et al., cf. I manoscritti medievali di Vicenza e provincia Goullet, cf. Hagiographies Gray, cf. Jerome. Vita Malchi Guigon, cf. Dom Fr. Plaine et les Bollandistes Hagiographies, t. VI 210 Die Hss der Signaturenreihe Hdschr. der Staatsbibl. zu Berlin – Preußischer Kulturbesitz. Teil 1 176 Hauke – Ikas, cf. Katalog der lat. Fragmente der BSB München Havlíkova – Ivanič – Hetényi, In the Footsteps of St. Cyril and Methodius 214 Herman the Archdeacon and Goscelin of St-Bertin, Miracles of St Edmund 456 Heydeck, cf. Die Hss der Signaturenreihe Hdschr. der Staatsbibl. Zu Berlin Hinterberger, cf. The Language of Byzantine Learned Literature Historiens modernes et Moyen Âge méridional 232

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INDEX OPERUM RECENSITORUM

Jerome. Vita Malchi 443 Katalog der lat. Fragmente der BSB München. Bd. 3 190 Katalog der mittelalterl. Hss des Klosters St. Urban 184 The Language of Byzantine Learned Literature 462 Leonzio di Neapoli – Niceforo prete. Vite dei Saloi, Simeone et Andrea 455 Licence, cf. Herman the Archdeacon and Goscelin of St-Bertin, Miracles of St Edmund I manoscritti datati dell’Archivio Storico Civico e Bibl. Trivulziana di Milano 201 I manoscritti datati della Bibl. Medicea Laurenziana di Firenze. T. I 200 I manoscritti datati della Bibl. Naz. Centrale di Firenze. T. 3 201 I manoscritti datati della Bibl. Queriniana di Brescia 199 I manoscritti datati della Bibl. Riccardiana di Firenze. T. 4 202 I manoscritti datati di Grottaferrata, Subiaco e Velletri 200 I manoscritti medievali della Bibl. comunale di Trento 194 I manoscritti medievali della provincia di Arezzo 177 I manoscritti medievali delle province di Belluno e Rovigo 197 I manoscritti medievali di Trento e provincia 194

I manoscritti medievali di Vicenza e provincia 195 Medieval & Renaissance Manuscripts in the Princeton University Library 192 Merback, Pilgrimage and Pogrom 225 Otranto – Aulisa, cf. Puglia Paolini, et al., cf. I manoscritti medievali della Bibl. comunale di Trento Paoloni, et al., cf. I manoscritti medievali di Trento e provincia Pelle – Russo – Speranzi – Zamponi, cf. I manoscritti datati della Bibl. Naz. Centrale di Firenze Pontone, cf. I manoscritti datati dell’Archivio Storico Civico e Bibl. Trivulziana di Milano Prokopenko, et al., cf. Славяно-русский пролог по древнейшим спискам Puglia [Santuari d’Italia] 213 Querelles autour de l’hagiographie bretonne, cf. Dom Fr. Plaine Ruiz Arzalluz, et al., cf. Estudios de filología e historia S. Jean, higoumène de Scété 442 Santuari d’Italia, cf. Puglia Skemer, et al., cf. Medieval & Renaissance Manuscripts in the Princeton University Library Thérèse au tribunal en 1910 459 Wolf, The Legends of the Saints in Old Norse-Icelandic Prose 458 Zanetti, cf. S. Jean, higoumène de Scété

TABLE DES MATIÈRES

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TABLE DES MATIÈRES TABLE OF CONTENTS

Basile MARKESINIS. Les débuts du monoénergisme. Rectifications concernant ce qui s’est passé entre Cyrus d’Alexandrie, Serge de Constantinople et S. Sophrone de Jérusalem . . . . . .

5

Jacques DALARUN. Thome Celanensis Vita beati patris nostri Francisci (Vita brevior). Présentation et édition critique . . . .

23

Diarmuid Ó RIAIN. The Magnum Legendarium Austriacum: A New Investigation of One of Medieval Europe’s Richest Hagiographical Collections . . . . . . . . . . . . .

87

Bernard JOASSART. Godefroid Kurth, dédicataire des Légendes hagiographiques . . . . . . . . . . . . . . 166 Bernard JOASSART. Un volume de Louis Duchesne non recensé par les Bollandistes. . . . . . . . . . . . . . 169 François DOLBEAU. Catalogues de manuscrits latins. Inventaire hagiographique (trente-deuxième série).

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. 175

Xavier LEQUEUX. La Passion grecque abrégée de sainte Cyprille, martyre à Cyrène en Libye (BHG 2093) . . . . . . . 241 Sergey A. IVANOV. The Right Hand Fetid, the Left Unclean. An Unknown Byzantine Spiritually Beneficial Tale . . . . . . 249 Francesco MARZELLA. Al diavolo la tassa ! Un episodio interpolato della Vita S. Ædwardi regis et confessoris di Aelredo di Rievaulx 256 Cécile LANÉRY. Hagiographie et prédication: le légendier CharlevilleMézières, BM, 177. . . . . . . . . . . . . 282 François DOLBEAU. Prologue inédit d’un homéliaire-légendier des anciens Pays-Bas . . . . . . . . . . . . . 350 Bernard JOASSART. Correspondance des bollandistes A. Tinnebroeck, É. Carpentier, H. Matagne, R. De Buck, C. De Smet, G. Van Hooff, J. Van den Gheyn et H. Delehaye avec Jean Gagarin et Jean Martynov . . . . . . . . . . . . . . 362

TABLE DES MATIÈRES

480

Jean-Marie SANSTERRE. Signes de sainteté et vecteurs de virtus dans les miracles posthumes du carme Albert de Trapani relatés aux XIVe-XVe siècles . . . . . . . . . . . . . 433

Bulletin des publications hagiographiques .

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209 442

Publications reçues .

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Index Sanctorum .

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Index operum recensitorum .

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Table des matières – Table of Contents .

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Résumés – Summaries: 22, 33, 160, 248, 255, 278, 345, 356, 441

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Analecta Bollandiana: vol. 1 (1882) – 127 (2009)

Xavier LEQUEUX. La Passion grecque abrégée de sainte Cyprille, martyre à Cyrène en Libye (BHG 2093) . . . . . . . 241

Each annual volume (2 issues): 110 € 25 € + shipping Minimum purchase of 4 volumes

Sergey A. IVANOV. The Right Hand Fetid, the Left Unclean. An Unknown Byzantine Spiritually Beneficial Tale . . . . . . 249

– Just published –

Francesco MARZELLA. Al diavolo la tassa ! Un episodio interpolato della Vita S. Ædwardi regis et confessoris di Aelredo di Rievaulx 256

SUBSIDIA HAGIOGRAPHICA 94

Cécile LANÉRY. Hagiographie et prédication: le légendier CharlevilleMézières, BM, 177. . . . . . . . . . . . . 282

Saint Jean, higoumène de Scété (VIIe s.) Vie arabe et épitomé éthiopien

François DOLBEAU. Prologue inédit d’un homéliaire-légendier des anciens Pays-Bas . . . . . . . . . . . . . 350 Bernard JOASSART. Correspondance des bollandistes A. Tinnebroeck, É. Carpentier, H. Matagne, R. De Buck, C. De Smet, G. Van Hooff, J. Van den Gheyn et H. Delehaye avec Jean Gagarin et Jean Martynov . . . . . . . . . . . . . . 362 Jean-Marie SANSTERRE. Signes de sainteté et vecteurs de virtus dans les miracles posthumes du carme Albert de Trapani relatés aux XIVe-XVe siècles . . . . . . . . . . . . . 433

Bulletin des publications hagiographiques

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Publications reçues

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Index Sanctorum .

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Index operum recensitorum

Table des matières – Table of Contents

Édités et traduits par Ugo ZANETTI 2015, 288 p.

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Au service de la réconciliation des Églises Jean Gagarin, Jean Martynov et Victor De Buck Correspondance Présentation, édition et commentaire par R. DANIELUK et B. JOASSART € 45*

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Querelles autour de l’hagiographie bretonne à la fin du XIX e s. Dom François Plaine et les Bollandistes Correspondance Présentation, édition et commentaire par Philippe GUIGON 2015, 128 p.

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A NALECTA

ANALECTA BOLLANDIANA Revue critique d’hagiographie – A Journal of Critical Hagiography

ANALECTA BOLLANDIANA

La Revue paraît deux fois par an

The Journal is published twice a year

B OLLANDIANA

(en juin et enparaît décembre); La Revue deuxchaque fois par an livraison compte 240 pages. (en juin et en décembre); chaque livraison compte 240 pages.

(in June and December) in issues The Journal is published twiceof a 240 pages each. year (in June and December) in issues of 240 pages each.

Volume 134 (2016)

Volume 131 (2013) Abonnement Papier 3UL[GHO¶DERQQHPHQW

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2015 — ANALECTA BOLLANDIANA. — T. 133-II

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TOME 133 II – décembre 2015

TOME 131 II - Décembre 2013

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