Almanach-SlowFood-2011---Français

December 16, 2017 | Author: Beatrice De Mahieu | Category: Africa, Fish, Brazil, Agriculture, People
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almanacH slow food

Empreintes L’Almanach 2011 a choisi de braquer ses projecteurs sur les territoires. Sur la région où s’incarne l’engagement de Dario, qui a choisi de recueillir des centaines de pommes de variétés anciennes dans les plaines du Piémont pour qu’elles ne soient pas définitivement perdues. Ou bien sur le territoire d’Aicha et Ghita, deux femmes marocaines, qui reproduisent les gestes exécutés depuis des siècles par d’autres mains de femmes dans les salines de Zerradoun. Avec ces cristaux, elles protègent le passé et s’engagent dans l’avenir. Les territoires héritent des empreintes laissées par Terra Madre. Le réseau mondial, composé de producteurs, coproducteurs, universitaires, jeunes et représentants des peuples indigènes, habite et façonne à sa manière les territoires : en Sentinelles, en Terra Madre nationales et régionales, en Marchés de la Terre, en jardins potagers urbains et cantines scolaires, en actions de mobilisation contre la menace des OGM, contre l’accaparement des terres et pour la protection des ressources halieutiques. Les empreintes laissées en 2010 sont nombreuses et sont reproduites dans ces pages afin d’être lues, regardées et écoutées. Des traces qui essaiment sur les terres du Brésil, où Dona Rosa produit de la farine de manioc et préserve sa culture ; où l’enthousiasme de David, cuisinier et entrepreneur, a permis la mise en place d’une formation qui propose des cours de cuisine aux enfants socialement défavorisés ; et enfin où le peuple indigène Guaraní fabrique de petites pépinières de palmier Juçara, pour ensuite en extraire le cœur au moyen de techniques durables. Des traces que l’on retrouve également chez les Balkans, dans le marché agricole qui se tient chaque week-end à Bucarest, ou bien dans la petite communauté de femmes bosniaques de Filipocvi, qui ont su sauvegarder la production traditionnelle des prunes slatkos, aujourd’hui réintégrées dans le marché local. Des traces qui ont su franchir les portes du Lagan College de Belfast, où un groupe d’étudiants, en collaboration avec des membres du convivium, s’est engagé à offrir davantage de produits locaux dans le contenu des assiettes des cantines, en prenant également en charge la gestion des déchets ainsi que la culture des légumes. Voilà la géographie de Terra Madre, celle qui dépasse les frontières et embrasse les identités.

ALMANACH DU MOUVEMENT INTERNATIONAL SLOW FOOD Rédactrice en chef Monica Mascarino Comité de redaction Silvia Ceriani, Monica Mascarino, Serena Milano Rédaction et photothèque Marcello Marengo, Cecilia Toso Éditeurs Juan Bureo, Eric Chenebier, John Irving, Annette Seimer Traductions Simona Caldera, Giulia Fabioux, Valentina García, Fernanda Ossorio, Carla Ranicki, Sarah Litterscheid, Davide Panzieri, Carla Ranicki Video Bodà Directeur artistique et mise en page Paolo Rubei Applicazione web Blulab Photogravure Imago, Marene (Cn) Imprimeur Rotolito Lombarda Seggiano di Pioltello (Mi) En couverture Sentinelle Slow Food du Safran de Taliouine, Maroc, © O. Migliore

Dépôt légal 31/06/2011 © Copyright 2011 Slow Food Piazza XX Settembre, 5 – Bra tel +39 0172 419611 fax +39 0172 421293 [email protected] www.slowfood.com

Le bureau international de Slow Food remercie la maison d’édition Slow Food Editore srl pour la collaboration.

SOMMAIRE NOTRE RÉSEAU

Chers adhérents L’inspiration Terra Madre

RENCONTRES ET CAMPAGNES

Le goût retrouvé des Balkans Des goûts et des génomes Le voyage de Dona Rosa Un jardin peu ordinaire Le réseau en fête Préservation des langues et des cultures Le Slow Fish, vite ! Territoires en solde Halte à la grande escroquerie

BIODIVERSITÉ

Le verger de l’Europe Le cuivre au secours du stroop New York, patrie de la Green Pippin Les pommes de l’Arche du Goût Le sel des roseaux Les femmes de Zerradoun La fleur du sel basque La saison du saliculteur Le Pain de l’Indien Les Gardiens de l’Ozette Le trésor de Bamberg Les pommes de terre de l’Arche du Goût

ÉDUCATION

6 8 10 12 14 18 24 26 30 34 40 44 48 52 54 58 62 64 66 70 74 76 78 82 84 86

Appétits d’Europe Gastromotiva Nourrir Milan Les fines papilles du nouveau-né Construire un avenir

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ANNExE

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Notre réseau

P.PANZERA P.PANZERA

Notre r 6

ALMANACH

réseau 7

WWW.EVENTOLIVE.IT

NOTRE RéSEAU

Chers adhérents, 2010 a été une bonne année pour Slow Food. Nous sommes à notre quatrième édition de Terra Madre et en décembre, pour la deuxième année consécutive, Terra Madre Day nous a montré combien notre réseau continue d’être actif. Ces résultats nous demandent avant tout, pour l’avenir, d’œuvrer à éliminer les ambiguïtés entre Slow Food et Terra Madre et à trouver les formules appropriées, associatives ou non, pour mieux faire comprendre notre réseau, à la fois à l’intérieur et à l’extérieur, comme un seul et même grand acteur international. Slow Food Italie, qui a tenu en 2010 son Congrès pour renouveler ses postes de direction, a écrit que « Slow Food est notre maison et Terra Madre est notre projet. » C’est une formulation parfaite. Elle peut servir de base à une clarification. La réalité actuelle nous apprend que dans différentes régions il existe de nombreuses façons d’aborder Terra Madre. Nous ne voulons pas uniformiser ou réduire cette diversité, qui est notre plus grande force, voire une de nos raisons de vivre, mais il est nécessaire d’expliquer une bonne fois pour toutes que Slow Food et Terra Madre ne sont pas deux identités séparées ou antithétiques, et encore moins dépendantes l’une de l’autre. Si Slow Food ne peut imposer un quelconque droit d’aînesse sur Terra Madre, Terra Madre, en interne, ne peut se passer de Slow Food. Parce qu’il arrive que, dans certains pays, Terra Madre soit essentiellement vécue par les membres comme un des nombreux projets à réaliser : il faut emmener les communautés de la nourriture à Turin, les impliquer et assister ses organisateurs en matière de logistique. Curieusement, cela se produit plus souvent dans les pays où l’association est historiquement plus forte, compte davantage de membres et d’années d’existence. D’autre part, dans de nombreux endroits sur la planète où Slow Food n’avait pas ou peu de membres, Terra Madre a permis de lancer de nouveaux conviviums. Nous comprenons donc bien que la

perception de Terra Madre n’est pas univoque : dans certains cas, on la néglige encore trop en ne se présentant que trop rarement aux rencontres de Turin, dans d’autres au contraire – en particulier quand l’association est très jeune – c’est le seul véritable moteur qui anime Slow Food. Dans le respect de toutes les diversités et des priorités que chaque pays s’est donné, il est important que Terra Madre ne soit jamais diminuée ou mise à l’écart, que le réseau soit alimenté continuellement par de nouveaux apports, des initiatives locales, régionales et nationales lancées par l’association. Nous devons abattre les barrières, à commencer par les formalités administratives, qui existent entre associés et membres des communautés, parce que s’il est vrai que notre mouvement est appelé à pratiquer la convivialité, alors nous ne pouvons pas faire sans les autres. Les producteurs ne peuvent rester sans coproducteurs, et vice-versa. Je ne pense pas que tout cela demande plus d’efforts que ceux que nous fournissons déjà. Simplement, peut-être, un peu d’inventivité et un peu d’ouverture. À bien regarder, Slow Food a déjà tout pour effectuer ce changement de perspective, que ce soit en termes de valeurs humaines, de principes communs et d’initiatives mises en œuvre. Il suffirait de renforcer la cohésion en quelque chose qui soit vraiment capable de changer le destin de notre alimentation. Il y a l’Arche du goût et les Sentinelles, les marchés d’agriculteurs, les jardins potagers et les initiatives d’enseignement, les dîners et les moments de rencontre dans les conviviums, les manifestations locales, régionales et nationales. Les instruments existent. Soyons créatifs. Soyons ouverts. Tournonsnous d’abord vers ceux qui nous sont les plus proches : les communautés de Terra Madre qui restent à intégrer de manière organique dans l’association. Carlo Petrini, Président de Slow Food

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NOTRE RéSEAU

L e s

v o i x

d u

Y o u t h

F o o d

M o v e M e n t

L’inspiration

terra-Madre Terra Madre n’est pas seulement une assemblée, mais aussi un réseau international dont l’impact politique augmente de plus en plus chaque jour. Il puise sa force dans la diversité, s’opposant à l’impérialisme politique contre la restauration rapide avec cette idée des communautés de la nourriture. Il réinvente la politique et la replace en tant que participation responsable contre une consumérisme insensé. Il nous rappelle la profonde implication des producteurs dans tous les coins de la Terre. Terra Madre est donc une plate-forme sur laquelle des milliers de personnes de tous niveaux peuvent échanger des

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ALMANACH

opinions sur des questions différentes, allant du changement climatique, à la perpétuation de la pauvreté et de la faim aux œuvres des multinationales ; de l’appauvrissement des ressources en eau aux politiques alimentaires et le coût réel des produits agricoles. Terra Madre est ma source d’inspiration et de réalisation. Elle renforce mon espoir dans la possibilité d’un monde de paix, d’amour et de bonheur reposant sur la reconnaissance du droit à la nourriture qui est bonne, propre et juste. C’est plus qu’un idéal, un mode de vie. En qualité d’ethnobotaniste tropical qui

P. MONTANARO, N. ROBECCHI

pavLos GeorGiadis

LE MOUVEMENT DES JEUNES BéNéVOLES SE DéVELOPPE AU NIVEAU INTERNATIONAL DANS LA DéFENSE DE LA NOURRITURE ET DE LA CULTURE ALIMENTAIRE.

Pour en savoir plus Lors de Terra Madre 2010, les jeunes de la YFM ont organisé de nombreuses rencontres dans l’Espace Jeunes (réservé aux moins de 18 ans) ainsi qu’un Eat-In.

Tous les liens Youth Food Movement

s’inquiète de la conservation de la biodiversité culturelle, je considère Terra Madre comme un outil unique pour rassembler différentes cultures. C’est un ensemble exceptionnel de savoirs traditionnels et d’innovations modernes, cette unité dans la diversité crée des opportunités et fournit des solutions aux problèmes contemporains. Dans un monde standardisé, Terra Madre est une nouvelle réponse à des défis sans précédent. En octobre dernier, nous sommes tous repartis de Turin déterminés à garantir aux générations futures le droit de vivre et de convaincre

TERRA MADRE GRAINS Qu’est-ce que Terra Madre ? De nombreux participants de 2010 ont répondu à cette question, parmi lesquels l’écrivain militant Raj Patel, l’éleveur français Jean Michel Berho et l’économiste Serge Latouche. écoutez leurs témoignages sur le site Terra Madre.

nos collectivités locales que l’on peut produire des aliments de manières qui respectent la diversité de notre planète. Enfin, Terra Madre est aussi la mère du Youth Food Movement, qui croît chaque jour davantage. Qu’il s’agisse d’un jardin potager urbain, d’un festival de cinéma, d’un simple dîner entre amis ou d’un eat in dans un campus, nos initiatives donnent des réponses concrètes aux questions posées. Nous sommes mus non par l’amour du pouvoir, mais par le pouvoir de l’amour : n’est-ce pas là précisément ce que Terra Madre célèbre à travers la nourriture ?

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RencontRes et campagnes

© O.MigLiOre

RencontR Rencont Res e 12

ALMANACH

et campagnes 13

reNCONtres et CAMpAgNes terrA MAdre BALkANs

BulgaRie T e r r a

M a d r e

B a l k a n s

Le goût retrouvé

des Balkans

Une scène, un laboratoire, une agora où se rencontrer et partager des expériences. Un lieu pour se connaître et se reconnaître, que ce soit à travers ses goûts du moment ou ses pratiques ancestrales, langages capables de surmonter sans effort la géographie et ses frontières. La première édition de Terra Madre Balkans qui s’est tenue à Sofia, capitale de la Bulgarie, du 16 à 18 juillet 2010, fut tout cela et bien davantage. Cent soixante délégués y représentaient dix pays (Albanie, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Croatie, Grèce, Kosovo, Macédoine, Roumanie, Serbie et Turquie). Des stands permettaient aux producteurs de présenter leurs produits aux consommateurs. Des rencontres thématiques, des

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ALMANACH

ateliers et des discussions se sont tenues sur l’écogastronomie et la production durable avec une attention portée sur le tourisme responsable. La décision de se réunir à Sofia, centre géographique de la péninsule balkanique, n’était pas fortuite. Riche de traditions gastronomiques très anciennes, la Bulgarie, ne se préoccupe de leur préservation que depuis quelques années. Le phénomène est d’ailleurs commun à presque tous les pays de la région. « Cette rencontre est importante pour sensibiliser les institutions qui ont du mal à intervenir de façon ciblée, » annonce Dessislava Dimitrova, biologiste et coordonnatrice de l’événement. Elle décrit un dialogue difficile et progressif avec

F. MArtiNO

Francesco Martino

la politique dont le rôle de l’Union européenne devient de plus en plus central. Certains pays de la région sont à l’origine d’initiatives louables. La Roumanie, ces dernières années, a vu émerger sur tout son territoire des Marchés de la Terre toujours plus riches et plus diversifiés. D’autres, tels que le Kosovo, font désormais les premiers pas dans le développement, non seulement politique mais aussi culturel, de la nourriture comme expression de soi. Du détroit du Bosphore à l’Adriatique se déclinent une grande diversité d’expériences, mais aussi de nombreux problèmes similaires. Par exemple, la présence sur le marché de quelques grands producteurs (presque une si-

tuation d’oligopole) face à de nombreux agriculteurs qui atteignent avec grand peine un niveau de subsistance. « Beaucoup d’agriculteurs pauvres pourraient devenir des producteurs d’aliments traditionnels qui, comme le montre notre expérience, ont un marché en croissance », soutient Teodor Frolu, un des animateurs de Slow Food en Roumanie. « Cependant, pour que cela puisse se produire, nous avons besoin de décisions politiques claires. » Dans les Balkans, les problèmes à résoudre sont non seulement politiques mais aussi culturels. « La collectivisation a rompu le lien entre l’agriculteur et la terre », déclare Tzvetan Dimitrov, maire du village bulgare de Tcherni Vit, qui se

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reNCONtres et CAMpAgNes terrA MAdre BALkANs

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bat pour faire reconnaître la tradition du seul fromage bleu des Balkans (ou fromage « vert » comme il est appelé dans la région). « Paradoxalement, il y a beaucoup de produits traditionnels, mais ce sont les communautés qui les produisent qui vont disparaître. » Voilà pourquoi la première édition de Terra Madre Balkans revêt une si grande importance. Dans cette partie de l’Europe, les producteurs n’ont pas le choix : il leur faut impérativement redécouvrir la valeur culturelle et identitaire des produits traditionnels qu’ils sont en mesure d’offrir s’ils veulent en faire

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ALMANACH

commerce de manière profitable. Témoin ce qui s’est produit à Filipovci, en Bosnie, près de Goražde. En 2004, le Salon du Goût de Turin a permis de présenter leur Slatko de prunes pozegaca, un produit en voie de disparition. Cette manifestation a communiqué l’enthousiasme et la confiance nécessaires à un groupe de femmes pour le réintroduire sur le marché local. Un succès local, certes, mais dont la portée symbolique est bien plus vaste. La circulation d’anecdotes comme celle-ci parmi les stands de Terra Madre Balkans pourrait montrer la voie à d’autres communautés agricoles dans la région.

F. MArtiNO, ArCHiviO sLOw FOOd, tiBeriu CAzACiOC

Terra M adre o de pr unes pozegaca La Sentinelle du slatk t age vert de Tcherni Vi La Sentinelle du from

Pour en savoir plus Le Slatko de prunes pozegaca et le fromage vert de Tcherni Vit sont pris en charge par le projet des Sentinelles Slow Food. Le réseau international des Marchés de la Terre, marchés de producteurs qui suivent la philosophie Slow Food, augmente chaque année. A Bucarest, le marché Targul Taranului a lieu tous les week-ends : vous pouvez connaître les producteurs et naviguer parmi les étals grâce à la galerie photo. 17

© d. p.rOssi viesi

reNCONtres et CAMpAgNes Le prOjet MArCOpOLO2010

géoRgie, chine, azeRBaïdjan, tuRkménistan, ouzBékistan, tadjikistan, kazakhstan l e

p r o j e T

M a r c o p o l o 2 0 1 0

des goûts et des génoMes siMona cerrato et PaoLo gasParini

Aimez-vous le jus d’orange ? Si oui, savez-vous pourquoi ? Peut-être appréciez-vous la couleur des sanguines, aux reflets de crépuscules siciliens ? À moins que ce ne soit cette odeur fraîche et pétillante qui taquine le nez lors des froides journées d’hiver ? Ou bien encore son goût acide et sucré ? Ou la certitude, à chaque gorgée avalée, qu’il s’agit d’un produit sain et riche en vitamines ? La réponse est probablement un mélange de toutes ces motivations, le résultat d’éléments culturels, biologiques et génétiques. C’est précisément l’étude des goûts et des pré-

férences alimentaires qui était l’objet de l’expédition MarcoPolo2010. Lancée en juillet 2010 après deux années de préparation, c’est à Trieste qu’elle a démarré, le 12 septembre. Un voyage d’environ 14 000 kilomètres, souvent inaccessible par routes, qui a conduit un groupe de généticiens à traverser 7 pays le long de la Route de la Soie, de la Géorgie à la Chine en passant par l’Azerbaïdjan, le Turkménistan, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Kazakhstan. Sur le chemin, ils ont pu rencontrer 29 communautés de la nourriture Terra Madre, récolter 700 échantillons

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d. rOssi, p. gAsperiNi

eN vOyAgeANt Le LONg de LA rOute de LA sOie, Les géNétiCieNs de MArCOpOLO2010 ONt reNCONtré 29 COMMuNAutés de LA NOurriture de terrA MAdre.

reNCONtres et CAMpAgNes Le prOjet MArCOpOLO2010

Pour en savoir plus

d’ADN, effectuer des milliers de tests de goût, de perception des couleurs, auditifs et olfactifs. Nous savons aujourd’hui que le goût, l’odorat, la vue et l’ouïe jouent un rôle déterminant dans la sélection et l’attrait d’un aliment. La science ne connaît pas encore précisément les fondements génétiques et les imbrications entre la biologie et la culture qui déterminent les préférences alimentaires. Pour mieux comprendre ces relations, il est nécessaire de mesurer la diversité alimentaire sur des territoires riches d’une grande diversité génétique. C’est pour cette rai-

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ALMANACH

son que fut choisie la Route de la Soie, l’un des rares passages où les peuples d’Orient se sont mélangés depuis des siècles avec ceux de l’Occident. En plus d’être un lieu de rencontre de différentes cultures, cette route a favorisé les croisements de génomes . Science à viSage humain L’expédition, rendue possible grâce au soutien de Terra Madre et à la collaboration des communautés qui ont fait partie intégrante du projet, est allée au-delà de l’expérience scientifique. À chaque étape, les chercheurs et tous

sLOw FOOd ArCHive i © p. viesi i ©p. pANzerA

Le film La spedizione in due minuti raconte le projet MarcoPolo2010 : 10 000 km de route, 7 pays, 700 échantillons pour des tests de goût, d’ADN, auditifs, olfactifs, de couleur effectués sur des populations qui vivent isolées. Parmi elles, la communauté de la nourriture des apiculteurs d’Ismaïlli en Azerbaïdjan. Les résultats du test sont disponibles sur le site.

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d. rOssi

M arcoPolo2010 ure de Terra M adre rit ur no la de té au un Les comm les membres de l’expédition ont été accueillis par les communautés de Terra Madre avec une grande hospitalité. Elles ont systématiquement partagé leur nourriture, leurs coutumes et leurs traditions, sans oublier les moments importants de leur vie quotidienne. Ce riche échange culturel a permis de créer un réseau de collaborations fondé sur une véritable compréhension mutuelle. MarcoPolo2010 présente une autre caractéristique inédite : il a été conçu, planifié et organisé avec la collaboration d’auteurs spécialistes de la vulgarisation scientifique.

La génétique des peuples permet à la fois de mettre en évidence leur diversité et de mieux comprendre nos propres vies et notre propre société. Comme souvent, la science, lorsqu’elle sort des laboratoires se montre à visage humain, permet de surmonter des obstacles conceptuels, idéologiques et culturels. La richesse des comparaisons rendues possibles lors de cette expédition nous permet prendre conscience du monde qui nous entoure, de ce que nous pouvons faire pour mieux assumer nos responsabilités individuelles et collectives.

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reNCONtres et CAMpAgNes terrA MAdre BrésiL

BRésil

T e r r a

M a d r e

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a M é r i q u e

l aT i n e

Le voyage

de dona Rosa Marta Morais

Tous les liens Terra M adre Brésil Sentinelles Slow Food au Brésil

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ALMANACH

La 2e édition de Terra Madre Brésil a eu lieu à Brasilia du 19 au 22 mars 2010, au complexe culturel Funarte. L’événement a rassemblé 500 délégués et plus de 200 observateurs, parmi lesquels des représentants des institutions locales et de la société civile, des journalistes spécialisés et des professionnels de la production alimentaire. Durant ces quatre jours, les délégués ont pu participer à des ateliers thématiques pour traiter et discuter des questions d’intérêt commun. Dans le même temps, des ateliers d’éducation au goût pour enfants et adultes ont été organisés, ainsi que des parcours d’analyse sensorielle, de démonstrations gastronomiques assurées par des cuisiniers du réseau, des conférences et des séminaires consacrés à la qualité alimentaire, à la production durable et à la biodiversité agricole. Au Marché de la Biodiversité installé à l’extérieur du bâtiment accueillant la manifestation, les visiteurs ont pu découvrir, déguster et acheter les produits des communautés de la nourriture, de l’Arche du Goût et des Sentinelles brésiliennes.

maniocS de touS horizonS Terra Madre Brésil 2010 a renforcé le partenariat, mis en place au cours de l’édition précédente, entre Slow Food et le ministère du Développement agricole brésilien, qui est impliqué dans le rachat et la valorisation des produits artisanaux traditionnels et dans le dynamisme économique des zones rurales. La participation du Ministère de la Culture a encouragé le développement d’activités culturelles liées aux thèmes de l’alimentation, comme des expositions, des projections de longs-métrages, des spectacles de musique, de théâtre et de danse. Au cours de la manifestation, la question de la diversité culturelle et de la participation des populations autochtones a bénéficié d’une attention particulière. En outre, il a beaucoup été question de l’importance de promouvoir, valoriser et protéger le patrimoine gastronomique du pays. La gestion de la cantine a été confiée au cuisinier David Hertz et à un groupe de jeunes impliqués dans le projet Gastromotiva, une entreprise sociale offrant

© M. gArCiA

sLOw FOOd ArCHive

Pour en savoir plus L’émouvant documentaire Seu Bené vai para Itália (Monsieur Bené va en Italie) raconte la participation de Bené, producteur de farine de manioc au Brésil, à Terra Madre 2006 à Turin. des services de traiteur qui aide les jeunes confrontés à des difficultés et à l’exclusion sociale à se construire un avenir dans le secteur de la restauration. Dona Rosa Nascimento, productrice de farine de manioc du littoral de l’État de Santa Catarina est venue à Brasilia pour rencontrer d’autres petits producteurs et pour raconter son histoire. Elle a 53 ans et c’est la première fois qu’elle effectue un aussi long voyage, elle qui n’a jamais pris l’avion. L’extraordinaire diversité culturelle qu’elle a rencontrée dans la capitale fédérale l’a enthousiasmée. Son

histoire est très similaire à celle de Bené, producteur de farine de manioc de Bragança, protagoniste du documentaire Seu Bené vai para Itália (Monsieur Bené va en Italie), qui raconte sa participation à Terra Madre 2006 à Turin. La diversité reste l’un des aspects les plus intéressants du réseau Terra Madre. Comme le rappelle Maria Araújo de Barbalha, producteur de Ceará, « Un peuple qui perd sa culture, perd son identité. Nous ne pouvons pas imposer un changement de culture, mais nous pouvons y contribuer. »

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reNCONtres et CAMpAgNes OBjeCtiF: jArdiNs

continent afRicain T e c h n i q u e s

d u r a B l e s

e T

v a r i é T é s

l o c a l e s

un jardin peu oRdinaiRe serena MiLano

Le continent africain fut la première terre habitée par l’homme, il y a trois millions d’années. C’est un continent immense et riche en ressources, mais qui est aussi le plus déchiré par les guerres, les conflits ethniques et religieux, la sécheresse et la famine. Entre les années 1950 et 1960, presque tous les États africains ont accédé à l’indépendance et ont entamé une ère d’optimisme et d’espoir qui s’est très vite achevée. De l’époque coloniale, plusieurs nations ont hérité des structures administratives fragiles. La corruption s’est répandue. Les gouvernements se sont endettés. Une longue période de dépendance envers les aides économiques internationales a commencé. Selon plusieurs économistes – tels que l’Africaine Dambisa Moyo –, ces « aides » ont aggravé les problèmes en Afrique. Quelles en furent les conséquences sur l’agriculture et le territoire ?

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ALMANACH

Dans les années 1960, avec l’argent de la Fondation Ford, la Fondation Rockefeller et la Banque mondiale, la « Révolution verte » a déferlé sur tout le continent. Ses stratégies : un accroissement de la production alimentaire fondé sur la technologie et les monocultures, et un remplacement les produits traditionnels par une agriculture intensive. Les preuves de l’échec de cette stratégie sont incontestables : en 1970, 80 millions des personnes souffraient de sousalimentation en Afrique, en 2009 elles ont atteint 250 millions. Pourtant, au nom de la sécurité alimentaire, les mêmes personnes (avec l’appui d’un nouvel acteur en la personne de Bill Gates) essaient de la relancer. Il y a cinquante ans, les pays africains produisaient suffisamment de nourriture pour leur consommation intérieure et parvenaient à exporter. Maintenant ils importent la plus grande partie de leurs aliments.

Tous les liens

© p. viesi

tagers Un millier de jardins po Orti in Condotta

L’industrie agro-alimentaire occidentale, grâce à des subventions publiques énormes, place ses surplus sur les marchés pauvres (où l’on trouve des légumes espagnols, italiens, grecs) en ruinant les paysans locaux. Le riz importé a remplacé les céréales locales – le fonio, en particulier – ce qui bouleverse le régime alimentaire familial. Alors que les cultures traditionnelles sont caractérisées par une grande diversité génétique. La diversification assure une disponibilité de nourriture en toute saison, une protection contre les épidémies et les changements climatiques. Cela signifie être moins dépendant de l’oscillation des prix fixés par les marchés internationaux et, par conséquent, être moins vulnérable. C’est pourquoi la philosophie de Slow Food peut fournir des réponses à de nombreuses communautés africaines. « Pendant des années, les Occidentaux ont expliqué que tout ce qui nous faisions était mal, a affirmé un représen-

tant du Cameroun à Terra Madre, que nos techniques étaient inefficaces, que nos produits devaient être remplacés par des cultures plus productives. Maintenant, à Terra Madre, tout le monde dit que notre histoire est importante, que nous devons récupérer les connaissances de nos ancêtres, être fiers de nos racines, cultiver nos céréales, les fruits sélectionnés par nos pères. Ce sont des mots nouveaux pour nous. » nourriture et connaiSSanceS Des mots que Slow Food a l’intention de mettre en pratique en mobilisant tout son réseau international pour soutenir la création d’un millier de jardins potagers entre 2011 et 2012. Faire un jardin potager en Afrique consiste à produire des aliments sains et frais pour les communautés, transmettre les connaissances des anciens aux nouvelles générations, donner aux femmes un rôle, promouvoir

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reNCONtres et CAMpAgNes OBjeCtiF: jArdiNs une semaine de rencontres, de formation et de comparaison avec une vingtaine de représentants africains à Pollenzo a servi à jeter les bases du projet et à préparer du matériel de formation, d’accès et de diffusion facile, dans plusieurs langues africaines (le swahili, le wolof, l’oromo, l’amharique, le bambara, etc.). La Fondation Slow Food pour la biodiversité – une institution fondée pour réaliser des projets de soutien aux communautés de la nourriture de Terra Madre – gèrera les contributions et coordonnera les activités en Afrique.

F. dOswALd

la connaissance des produits et des recettes locaux, protéger l’environnement. Grâce à une grande mobilisation internationale, nous commençons à mettre en place des jardins potagers scolaires, communautaires et urbains dans une vingtaine de pays africains. Ils seront cultivés selon des techniques durables, auront des arbres fruitiers, des légumes et des herbes médicinales, et privilégieront les variétés locales. En janvier 2011, une trentaine de jardins potagers ont vu le jour entre le Kenya, l’Ouganda et la Côte-d’Ivoire. En mars,

dANs L’éCOLe priMAire et MAterNeLLe BuigA suNrise, à MukONO, sLOw FOOd A Créé L’uN des 13 jArdiNs pOtAgers sCOLAires OugANdAis.

Pour en savoir plus

© p. viesi

En may 2010, les jardins potagers adoptés étaient 171. Et aujourd’hui ? Sur le site, vous trouverez les données mises à jour et toutes les informations pour participer au projet. L’économiste Dambisa Moyo, auteure de L’Aide fatale : Les ravages d’une aide inutile et de nouvelles solutions pour l’Afrique, est intervenue à TEDx Brussels 2010 sur la question des aides économiques en Afrique.

Les réponses au défi Moustafa Maataoui est agriculteur et maire de sidi Boumehdi, une municipalité rurale du centre du Maroc. Mattia pantaleoni est l’un des fondateurs de spiazzi verdi, une organisation à but non lucratif active à venise qui a pour objectif de créer des expériences de vie en harmonie entre la terre et ses habitants. Moustafa et Mattia se sont connus à terra Madre en octobre dernier et ont échangé anecdotes et expériences. sur l’invitation de Mattia, Moustafa, avant de retourner au Maroc, a visité l’un des jardins potagers communautaires créés par spiazzi verdi et, une fois chez lui, il s’est consacré à l’organisation d’un jardin potager destiné à des activités éducatives pour les étudiants et les citoyens. Cette histoire est un des nombreux témoignages des différentes formes de soutien au projet Mille jardins potagers en Afrique, qu’elles soient économiques (dons et fonds recueillis par les conviviums pendant le terra Madre day, mais aussi dîners et événements), ou pratiques à travers l’échange d’expériences avec les jardins potagers africains, ou une aide concrète sur place. Le convivium suisse de Léman a permis à ce projet de s’exprimer sur la radio franco-suisse. en italie, les demandes d’adhésion au projet de la part des partisans et des associations actives en Afrique augmentent (la liste se rallonge chaque mois !). Les élèves des jardinsécoles (Orti in condotta) y ont également répondu, comme ceux de l’école primaire de padenghe sul garda, par des dons et des partenariats avec des potagers scolaires africains. en Afrique, pendant ce temps, les communautés de terra Madre et les conviviums locaux attirent l’attention sur plusieurs écoles et villages qui voudraient mettre en place un jardin potager. La Fédération des Associations des thérapeutes traditionnels des pays dogon, qui ne fait pas partie du réseau de slow Food, a apporté un soutien technique pour la culture de plantes médicinales traditionnelles. Marta Messa 29

reNCONtres et CAMpAgNes terrA MAdre dAy

125 paYs

c é l é B r e r

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n o u r r i T u r e

l o c a l e

Le réseau en fête siMone gie

Le 10 décembre 2010, plus de 170 000 personnes appartenant au réseau Slow Food et Terra Madre ont célébré la nourriture locale avec plus de 1150 manifestations, organisées dans 125 pays à travers le monde. Le Terra Madre Day, célébré pour la première fois en 2009 à l’occasion du 20e anniversaire de Slow Food, est devenue une grande occasion, pour les communautés de la nourriture et les conviviums, de se retrouver et présenter la philosophie de la nourriture « bonne, propre et juste » aux citoyens, médias et à ceux qui ont un pouvoir décisionnel. La journée a donné lieu à des initiatives très diversifiées : la célébration des traditions alimentaires de la population indigène des Dai en Chine, un eat-in itinérant dans le métro à Paris, une rencontre entre les pêcheurs traditionnels de la péninsule du Yucatan au Mexique et une soirée le long du fleuve Murray, en Australie. En 24 heures, les différentes manifestations organisées dans le monde entier ont montré non seulement l’étendue et la diversité du réseau, mais elles ont aussi fortement exprimé la détermination de tous les participants à construire un avenir meilleur à partir de la nourriture. Voici quelques témoignages des différents continents.

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afrique Kenya La communauté indigène des Ogiek vit depuis des siècles dans la forêt Mau, dans le nord-ouest du Kenya, où elle survit en pratiquant la chasse des animaux sauvages et la cueillette de plantes sauvages utilisées également pour la médecine traditionnelle. Parce que la forêt est essentielle pour leur survie, les Ogiek ont développé des méthodes de conservation traditionnelles telles que la chasse sélective, transmises de génération en génération. À l’occasion du Terra Madre Day, organisé par le Convivium Central Rift, les membres de la communauté ont présenté des produits alimentaires typiques, comme la viande de biche, les fruits sauvages et le miel, arborant fièrement les costumes traditionnels. « La manifestation a été un grand succès », rapporte le vice-président de Slow Food International John Kariuki. « Les 630 participants ont montré que les produits traditionnels ont toujours une place importante dans nos vies et ont exprimé l’engagement des communautés kényanes de Terra Madre de les protéger et de les promouvoir avec fierté. »

Tous les liens

ArCHiviO sLOw FOOd

Terra M adre Day

amérique du nord États-Unis Chaque automne, les membres de la communauté de Bellingham, baie de l’État de Washington, se réunissent pour partager la prise de la saison et la conserver pour les prochains mois. Le germon sauvage du Pacifique est un type de thon qui fait la une : les poissons sont pêchés à la ligne (et non au filet) et l’activité de pêche est certifiée par le Marine Stewardship Council et recommandée par le Seafood Watch du Monterey Bay Aquarium. Compte tenu de l’importance de la pêche dans cette région, plus de 50 membres des conviviums de Seattle, Port Townsend et Fourth Corner et de nombreux autres partisans ont participé au Terra Madre Day en coupant et en mettant en boîte le poisson, selon la recette traditionnelle bretonne. amérique du Sud Costa RiCa Dans les forêts tropicales Santa Barbara, au Costa Rica, plus de 50 personnes des villages voisins se sont réunies pour apprendre à construire un réchaud à énergie solaire. Ce dispositif, à isolation thermique, met à profit l’énergie solaire pour cuire les aliments, ce qui est particulièrement intéressant à une période où

les questions liées à la consommation d’énergie préoccupent de plus en plus, et le désir de réduire les émissions de gaz à effet de serre et la dépendance des sources d’énergie traditionnelles augmente. L’événement a été accueilli par les femmes de l’organisation Sol de Vida (Soleil de la Vie), une communauté de Terra Madre, qui promeut l’agriculture biologique, la préservation des graines locales et les techniques de culture traditionnelles. Les participants ont également pu échanger des semences et acquérir des compétences pratiques telles que la préparation d’engrais naturels et la mise en place d’une pépinière domestique. La journée s’est terminée par le partage d’un « banquet solaire », composé de plats préparés avec les réchauds solaires. « Nous avons voulu enseigner à nos invités quelquesunes des techniques qu’ils pourraient utiliser une fois rentrés chez eux – explique Fatima Montealegre de Sol de Vida – pour rappeler que chaque jour peut être un Terra Madre Day. » L’europe MaCÉdoine La recette traditionnelle du slatko de figues sauvages, une confiture de fruits, dernier produit à être devenu une Sentinelle Slow Food, est gardée précieusement par un

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Pour en savoir plus Retrouvez les comptes-rendus et les photos de toutes les manifestations de Terra Madre Day 2010 sur notre site.

petit groupe de femmes. Le slatko est traditionnellement préparé par les femmes des zones rurales du sud-est de la Macédoine, qui suivent patiemment le long et laborieux processus pour transformer ces fruits, autrement non comestibles, en un produit de grande qualité. À l’occasion du Terra Madre Day, un groupe de femmes a célébré ce patrimoine culinaire à travers un échange entre générations. « Notre Terra Madre Day a été une rencontre entre générations », explique Nada Karaivanova, responsable de la Sentinelle. « Les personnes âgées ont expliqué la recette du slatko aux plus jeunes, en révélant l’histoire qui se cachait derrière cette tradition. Les filles étaient très enthousiastes et, pour la soirée, ont décidé d’encourager les participants avec un délicieux slatko de figues sauvages, exactement comme celui que nos grands-mères préparaient il y a de nombreuses années. »

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aSie thaïlande Pour la population des Karen, le plus grand groupe ethnique du nord de la Thaïlande, le riz est un élément vital fondamental. « Même sans argent, tant que nous avons du riz, nous pouvons survivre », explique Surasit Donjaipraiwan de la communauté de la nourriture des Karen. Pour célébrer cet aliment, le 10 décembre 2010, des adultes et des enfants ont recueilli ensemble du riz et préparé un repas à base d’aliments traditionnels. « L’ancienne génération a rencontré les jeunes pour partager des histoires et des savoirs traditionnels, mais aussi discuter de l’avenir et sur la façon de prendre en charge les forêts », raconte Surasit. Les Karen pratiquent l’agriculture de subsistance et vivent dans les forêts, entre 800 et 1800 mètres. Autrefois, ils étaient un peuple semi-nomade,

Les chiffres du Terra Madre day Nombre d’événements

1153

Amérique du Nord

154

Amérique du sud

137

europe

671

Afrique

103

Asie et Moyen-Orient

75

Océanie

13

Nombre de pays participants

125

estimation du nombre total de participants 172 213

ArCHiviO sLOw FOOd

qui avait adopté des méthodes agricoles swidden (culture sur brûlis) et se déplaçait tous les sept ans. Depuis 1968, sous l’ordre du gouvernement thaïlandais, ils sont un peuple sédentaire, mais leur mode de vie est encore influencé par la culture traditionnelle. « Après les festivités, nous sommes retournés récolter du riz, pour continuer ainsi à profiter de la journée en l’honneur de la Terra Madre. » océanie noUvelle-ZÉlande C’est une chaude journée d’été à Kawakawa et Whangarei, villes du nord de la Nouvelle-Zélande. Les gens vont et viennent, prolongent les festivités et participent à l’atmosphère de convivialité. « La journée a vraiment cultivé l’esprit slow : les participants faisaient cuire leurs repas préférés, bavardaient, mangeaient, et écoutaient », rapporte

Jonette Chapman, coordinatrice de la communauté de la nourriture locale. « Ce fut une occasion pour se rencontrer : entre parents, amis et membres de la communauté. » Organisée par la communauté de la nourriture des producteurs d’aliments biologiques maoris de Aotearoa, la manifestation a été honorée par des plats typiques et traditionnels des jours de fête maoris, comme le mutton bird (un oiseau de mer), les kina (œufs de mer), la crème de paua (abalone), des moules et des huîtres. « Nous avons choisi le thème de la rencontre pour rappeler aux amis et à la famille comment utiliser les sens, goûter et apprécier la nourriture, et démontrer l’importance du partage d’un repas. Les participants se sont échangés des recettes, des conseils sur le jardinage, des graines, des histoires et des souvenirs. »

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www.dOdesigN.COM.Br

reNCONtres et CAMpAgNes peupLes iNdigèNes

r i c h e s s e s

i n d i g è n e s

Préservation des langues et des cultuRes Lia Poggio

Le réseau Terra Madre est entré en contact avec la réalité du monde indigène grâce aux collaborations que Slow Food a développé depuis longtemps avec un bon nombre de ses communautés. Il en ressort de façon évidente que les peuples indigènes non seulement entretiennent un profond sentiment d’harmonie avec la nature – qui avec les paysans, les femmes et les personnes âgées se révèlent être les principaux gardiens des savoirs traditionnels – mais qu’ils expriment aussi culturellement une vision holistique de la relation de l’homme avec l’environnement. Ce sont donc des interlocuteurs importants pour le réseau de Terra Madre, exemples à travers lesquels on aspire à un rapprochement avec la nature et la culture de l’alimen-

tation. La vision holistique qui réunit les peuples indigènes nous rappelle que nous partageons tous la même responsabilité dans nos rapports avec l’environnement, la biodiversité, la production et la consommation des aliments. D’où la décision d’inaugurer l’édition 2010 de Terra Madre avec le discours dans la langue maternelle de cinq représentants indigènes qui soulignait le caractère central des diversités culturelles et linguistiques, la protection des ethnies et la valorisation de l’oralité et de la mémoire. Slow Food, suite à cette expérience, a choisi d’embrasser la cause indigène, en valorisant à l’intérieur du réseau Terra Madre la vision collective indigène de notre planète et l’importance des savoirs traditionnels dans notre relation avec l’environnement, l’alimentation et

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reNCONtres et CAMpAgNes peupLes iNdigèNes

Au cours de la cérémonie d’ouverture de terra Madre 2010, cinq représentants des peuples indigènes se sont succédés, un pour chaque continent, et ont salué les délégués dans leur langue traditionnelle. voici leurs mots. L’éthiopien Malebo Mancha Maze, représentant des agriculteurs de langue gamo, a commencé son discours

en bénissant les participants avec l’herbe verte de ses montagnes : « si nous voulons nous maintenir en vie et manger, nous devons tous savoir nous embrasser. » Les gamo sont une des plus anciennes communautés agricoles du sud de l’éthiopie, et leur langue est de tradition exclusivement orale. Adolfo vera timòtio Mirim est intervenu pour le Brésil, chef du peuple guaranì Mbya et responsable de la sentinelle du cœur de palmier juçara : « Nous devons

nous unir pour dire au monde qu’il existe d’autres façons de créer un rapport avec la nature et entre les hommes, nous pouvons avoir accès aux ressources de la terre sans la détruire pour autant, et dire qu’il existe des façons plus justes et plus durables d’organiser la société humaine, dans lesquelles dominent la justice, l’égalité et le respect entre les peuples et les différentes cultures. Organisation possible lorsque les différences sont acceptées et respectées par tous. » pour terminer son discours, Adolfo timòtio a salué le public avec une chanson qui célèbre les traditions guaranì. 36

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© O.MigLiOre, © p.MONtANArO

noTre Terre, noTre voix

Tous les liens re Indigenous Terra Mad

le changement climatique. La possibilité réelle de donner une visibilité et un espace pour les questions indigènes a été présentée avec le projet Indigenous Terra Madre, une rencontre consacrée aux peuples autochtones des cinq continents, créée à l’initiative du peuple Saami, qui vit dans le nord de la Suède. Indigenous Terra Madre (1719 juin 2011), organisé par le convivium Slow Food Sàpmi, et réalisé en collaboration avec Slow Food i Sverige et Slow Food, a rassemblé des délégués

www.dOdesigN.COM.Br

Le viLLage guaraní siLveira crée des peTiTes pépinières dans La forêT brésiLienne de paLMiers Juçara pour en exTraire ensuiTe, seLon des Techniques durabLes, Le cœur coMesTibLe. dans cerTaines régions du pays, ce processus se dérouLe de Manière inTensive eT cLandesTine, eT La pLanTe esT Menacée d’exTincTion.

indigènes à Jokkmokk, dans la terre des Sames, pour discuter des thématiques liées au climat, à la nourriture, aux savoirs traditionnels et à l’importance de sauvegarder l’agro-biodiversité dans l’optique de la philosophie de Slow Food. Cette manifestation a également renforcé la coopération et le partage des problèmes communs aux peuples indigènes afin de trouver des réponses concrètes pour préserver la diversité culturelle et obtenir la reconnaissance à l’autodétermination.

Terra Madre 2010

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puis ce fut au tour de Morilova Albina de prendre la parole, représentante de l’ethnie kamchadal, de la péninsule du kamtchatka, pour le continent asiatique : « Nous vivons au bord du fleuve, où le saumon dépose ses œufs. Les grandes entreprises pêchent de tout, sans laisser suffisamment de poissons pour la reproduction. elles ne se soucient pas de savoir si le poisson remontera la rivière l’année prochaine, elles ne se préoccupent absolument pas de l’avenir. » Aunty Beril van Oploo, aborigène australienne de darlington, a lancé un appel : « Nous devons travailler afin que les ressources de la terre soient assurées pour les générations futures. »

Ol-johan sikku, responsable du Convivium suédois sapmi, a clôturé la manifestation : « La colonisation des sami n’est pas intervenue de façon violente, en la comparant à ce qui s’est passé avec les Amérindiens par exemple, mais on nous a pris nos terres de manière plus subtile dans un processus beaucoup plus lent : on ne pouvait pointer du doigt un coupable et pourtant la colonisation avait lieu et elle continue encore aujourd’hui. » paulus utsi, un des poètes samis les plus célèbres de tous les temps, décrit ce concept en ces termes : « tant qu’on aura encore de l’eau, où les poissons pourrons nager / tant qu’on aura des terres où les rennes pourront brouter et errer / tant qu’on aura des forêts, où la faune pourra se cacher / Nous, nous serons en sécurité sur cette terre. »

© O.MigLiOre, © p.MONtANArO

Tous les liens

reNCONtres et CAMpAgNes sLOw FisH

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Le sLow Fish, vite !

Slow FiSh danieL PauLy

Tous les liens Campagne Slow Fish

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Le poisson est l’un des aliments les plus mondialisés, sinon le plus mondialisé. C’est pourquoi il n’est pas facile d’appliquer au poisson les principes du mouvement Slow Food. Mais nous pouvons essayer. Nous devons d’abord savoir ce qui est arrivé aux différentes espèces et aux réserves de poissons le long des côtes des pays où le mouvement Slow Food est le plus présent. En résumé, il s’agit de pays — comme l’Italie en Europe et le Japon en Asie — qui ont sacrifié la pêche artisanale au profit de la pêche industrielle pour fournir de grandes quantités de poissons peu coûteux à un marché en constante expansion. Nous subissons aujourd’hui les conséquences de ce « progrès ». Le nombre d’espèces de poissons en Europe et au Japon a connu une réduction drastique depuis les années 1960-70. Parallèlement, on a assisté au déclin des petites communautés de pêcheurs. La consommation de poisson dans ces pays et dans les pays riches de l’hémisphère nord s’est maintenue uniquement grâce à une pêche intensifiée et aux importations en provenance des pays en voie de développement et de l’hémisphère sud. Mais cette

situation ne peut durer. L’expansion des zones de pêche, qui s’est poursuivie au rythme d’un million de km² de 1959 à 1980 et qui est directement passée à 3-4 millions de km² dans les années 1980, n’existe presque plus aujourd’hui. La quantité de poissons ne cesse de diminuer.

interdictionS et protection Une alliance entre les partisans du Slow Food, les ONG environnementales et les représentants les plus lucides du secteur de la pêche artisanale pourra contribuer à inverser ces tendances. Les côtes d’Europe occidentale ont besoin de réserves ou d’aires marines protégées où les espèces de poissons décimées au cours de ces dernières décennies pourront se renouveler. Des petits pêcheurs pourraient naviguer dans une zone située à l’extérieur de ces réserves, attrapant les poissons les plus gros et les plus prisés qui en seraient issus. Pendant des siècles, les zones de pêche se sont construites à partir d’une division naturelle des espèces. Une partie étant les aires marines naturellement protégées (du fait de la profondeur, des

g. FAssiNO

pourquoi une caMpagne inTernaTionaLe sur Le poisson ? À table, le poisson nous apparaît simplement comme un aliment sain et savoureux. Mais les amateurs de poissons doivent savoir que : Les stocks ne sont pas illimités. Bon nombre d’entre eux sont surexploités. Le thon rouge risque de disparaître, le saumon sauvage, le cabillaud de l’Atlantique Nord, l’espadon et le requin sont gravement menacés. La pêche industrielle détruit les écosystèmes marins. Les progrès technologiques extraordinaires, ainsi que l’expansion d’une industrie de la pêche qui ne connait plus de limites géographiques ne permettent pas aux ressources marines de se renouveler. d’énormes quantités de poisson (environ 30 millions de tonnes) et d’autres formes de vie marine sont rejetées à l’eau, morts ou blessés, parce qu’ils n’ont pas de marché. C’est une véritable tragédie écologique et un gaspillage invraisemblable de nourriture. Le marché nous incite à choisir toujours les mêmes poissons, augmentant ainsi la pression exercée sur un nombre restreint d’espèces. Le poisson compte parmi les marchandises qui parcourent le plus de kilomètres pour arriver jusqu’aux consommateurs. L’aquaculture intensive, qui détruit les écosystèmes côtiers et consomme d’énormes quantités de farine de poisson ( qui aura auparavant été pêché !), n’est pas un remède à la surpêche. 41

fonds rocheux ou d’autres caractéristiques qui permettaient aux poissons d’être inaccessibles aux filets d’autrefois) et une autre celles qui étaient accessibles à la pêche. Au cours des dernières décennies, on a pu assister à une diminution de cette division naturelle au rythme développement technologique dans la pêche industrielle et toute la zone de distribution des es-

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pèces de poissons les plus exploités a été rendue accessible. Le résultat a été la disparition presque définitive de nombreuses espèces. Pour reconstituer les races autochtones du littoral européen — dont certains, comme le mérou de la Méditerranée, sont de grande taille et vivent longtemps — il faudra des décennies. Mais c’est possible.

iLLustrAtiON pierO LussO, g.FAssiNO

reNCONtres et CAMpAgNes sLOw FisH

Pour en savoir plus

La campagne internationale Slow Fish informe et encourage des choix responsables de la part des pêcheurs, consommateurs, poissonniers et cuisiniers. Tout le monde peut participer à la protection des ressources de poissons : sur le site, vous trouverez de nombreuses initiatives qui en témoignent. Le chef Dan Barber, dans son intervention à la conférence TED2010 intitulée « How I Fell in Love with a Fish » (« Comment je suis tombé amoureux d’un poisson »), raconte avec brio sa découverte d’un délicieux poisson d’élevage.

En attendant l’avènement du slow fish, songez au plaisir que vous procurera la préparation d’un plat avec un poisson pêché la veille par un pêcheur avec qui vous avez discuté au marché... Une telle carte postale peut nous aider à trouver la motivation nécessaire pour surmonter la réalité actuelle. Une réalité faite de ces bâtonnets de surimi faits de déchets de poissons enrichis

en protéines vendus au supermarché à proximité du bœuf aux œstrogènes et des blancs de poulets désossés, à moins que vous n’optiez pour les poissons volés par les chalutiers européens au large des côtes de l’Afrique du Nord-Ouest. Si nous voulons le slow fish en Europe et ailleurs, nous devons leur donner les espaces nécessaires pour grandir en paix.

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reNCONtres et CAMpAgNes stOp LANd grABBiNg r e s s o u r c e s

e T

n o u v e a u x

p r o p r i é T a i r e s

territoires en solde grain

land grabbing Tous les liens Grain Campagne “Stop Land grabbing”

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Le phénomène n’est pas nouveau : voici des siècles que se répète une véritable ruée vers les terres arables. Songeons par exemple à la « découverte » de l’Amérique et de ses conséquences sur les populations autochtones. Les phénomènes observés aujourd’hui ne sont pas moins violents. De la Chine au Pérou, pas un jour ne passe sans que ne surviennent de nouveaux affrontements motivés par des disputes territoriales. Les hauts plateaux d’Amérique du Sud sont envahis par les compagnies minières comme Barrick Gold ; aux Philippines, les entreprises alimentaires comme Dole et San Miguel s’accaparent progressivement les terres des agriculteurs. Aujourd’hui, ce phénomène a pris une tournure aussi inédite qu’inquiétante. Les deux grandes crises mondiales qui ont éclaté en 2008 — la crise alimentaire et financière — ont développé une nouvelle tendance à l’acquisition des terres pour une production alimentaire externalisée. Au cours des deux dernières années, les investisseurs ont cherché à prendre le contrôle des terres agricoles en Asie, en Afrique et en Amérique latine ; ils disaient vouloir ces terres pour la « sécurité alimentaire », leur sécurité alimentaire. En juillet 2008, avec l’aggravation de la crise financière, on a vu apparaître une nouvelle catégorie de spoliateurs : les hedge funds, groupes privés et autres banques d’investissement, dont un bon nombre ont leur siège aux États-Unis. Ces entités ont compris qu’elles pouvaient s’enrichir en investissant dans l’agriculture parce que la population mondiale continue d’augmenter, ce qui signifie que les prix alimentaires

demeureront à des niveaux élevés. Jusqu’à présent, plus de 40 millions d’hectares de terre ont été achetés, loués ou sont en cours de négociation, dont 20 millions en Afrique. L’association Grain estime que plus de 100 milliards de dollars pourraient changer de mains. Malgré des interventions sporadiques des gouvernements, ces affaires sont principalement conduites par des entreprises privées sans concertation avec les fonctionnaires du pays d’accueil ; en outre, la plupart des informations ne sont pas communiquées au public par crainte des conséquences politiques. En août 2009, le gouvernement de l’Île Maurice, à travers son Ministère des Affaires étrangères, a acquis 20 000 hectares de terres agricoles au Mozambique à des fins de production de riz. Le ministre de l’Agro-industrie de l’Île Maurice a immédiatement sous-loué les terres à deux sociétés, la première venant de Singapour (désireuse de développer le marché africain de ses semences hybrides de riz brevetées) et la seconde de Swaziland (spécialisée dans l’élevage de bétail, mais également présente dans le secteur des biocarburants en Afrique). Les terres arables sont à l’abri de l’inflation. Comme leur valeur ne fluctue pas (à l’instar de l’or), elles permettent aux investisseurs de diversifier intelligemment leurs portefeuilles. Mais il ne s’agit pas seulement de terres. La production joue aussi son rôle. Des données chiffrées manquent, mais il est certain que des milliards de dollars sont reversés pour l’achat de terres agricoles dans un nombre croissant

Pour en savoir plus Le rapport de la Banque mondiale “Rising Global Interest in Farmland — Can It Yield Sustainable and Equitable Benefits?” (L’intérêt croissant porté aux terres arables dans le monde – Peut-on en espérer des bénéfices justes et équitables ?) est basé sur des informations recueillies dans 14 pays du monde à travers des enquêtes directes et des rapports de presse. Visitez le site de Slow Food pour connaître les actions de mobilisation contre l’accaparement des terres mises en œuvre par l’association. Laissez votre témoignage et signalez les initiatives de protestation.

g

dénonçons L’accapareMenT des Terres !

©p. viesi

Le « land grabbing » doit tous nous alarmer en raison des conséquences désastreuses qu’il aura sur le développement de l’humanité, les droits des paysans et la conservation de la biodiversité, notamment car : il renforce un modèle agricole basé sur la concentration des propriétés et sur des monocultures intensives. un modèle que la plupart des spécialistes s’accordent à considérer comme un échec car il appauvrit le sol, réduit la disponibilité des ressources naturelles (en particulier de l’eau), nuit à la biodiversité agricole et alimentaire, entraîne la disparition des savoirs traditionnels, pollue l’environnement, met en danger la santé humaine, crée une dépendance vis-à-vis de quatre cultures (riz, maïs, blé et soja) et enfin car il soumet le prix des denrées de base aux fluctuations du marché et à la spéculation. il encourage la corruption, met en péril le droit des peuples à l’autodétermination et à la souveraineté alimentaire, exploite les populations les plus vulnérables, alimente le risque d’explosion de conflits sociaux et aggrave l’exode rural ainsi que le chômage. il provoque l’augmentation des surfaces destinées à la culture des céréales pour la production d’aliments pour animaux ou d’agrocarburants, accentuant ainsi le drame de la faim et de la malnutrition. 45

reNCONtres et CAMpAgNes stOp LANd grABBiNg de projets visant à s’enrichir rapidement. Une partie de ces dollars provient des économies durement gagnées pour la retraite des enseignants, des fonctionnaires et des ouvriers de pays comme les ÉtatsUnis ou le Royaume-Uni. Un puissant lobby d’intérêts privés est en train de se former. Son objectif : faciliter et protéger les investissements agricoles. Il prévoit de combattre les lois interdisant la propriété étrangère des terres, de supprimer les restrictions des pays d’accueil sur les exportations alimentaires et la réglementation sur les OGM. En bref, une version privatisée de la Révolution verte qui a eu lieu entre 1960 et 1990. Les multinationales américaines et européennes comme Cargill, Tyson, Danone et Nestlé, qui avaient l’habitude de faire la loi, se font désormais déborder par des conglomérats émergents comme COFCO (basé en Chine), Olam (Singapour), Savola, Almarai (tous deux basés en Arabie Saoudite) et JBS (Brésil). En bref, la future industrie alimentaire en Afrique reposera sur des capitaux brésiliens, chinois et arabes.

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ALMANACCO

exporter L’inSécurité aLimentaire Un leader des agriculteurs de Synergie Paysanne du Bénin estime que l’accaparement des terres « exporte en substance l’insécurité alimentaire ». Il répond aux besoins de certains —maïs ou argent — par la prise des ressources productives alimentaires aux autres. À la Conférence annuelle des terres de Washington, à la fin du mois d’avril 2010, la Banque mondiale, avec la FAO, l’IFAO et l’UNCTAD, a présenté un Code de bonne conduite comportant sept principes qui désignent l’accaparement des terres comme un « investissement agricole à large échelle », donc socialement acceptable. L’objectif principal de la Banque est de réduire les risques pour les investisseurs et d’atténuer les inévitables réactions sociales qui accompagnent ces accords. Tout ce discours sur des avantages pour tous n’est pas réaliste, on promet la transparence et une bonne gouvernante, mais ce n’est qu’une manière dangereuse de détourner l’attention du fait que la crise alimentaire

La Terre sous conTraT en afrique eT en asie pays Cambodge éthiopie Libéria Mozambique Nigéria soudan

projets

surface (1000 hectares)

61 406 17 405 115 132

958 1190 1602 2670 793 3965

Zones louées aux investisseurs internes au pays (% du total) 70 49 7 53 97 78

iLLustrAtiON pierO LussO, g. CuCCO

Les données se réfèrent à la période 2004-2009, sauf pour le Cambodge et le Nigéria, pour lesquels la période est 1990-2006. sources : Banque mondiale, rapport Rising Global Interest 2010 actuelle ne sera pas résolue par la grande agriculture industrielle, que ces acquisitions de terres sont destinées à promouvoir. Après des décennies de projets pour la Révolution verte et les programmes d’ajustement structurel, il n’y a jamais eu autant de personnes sur la planète qui meurent de faim. Au lieu de remettre en cause ce modèle, la Banque mondiale a décidé que la seule façon d’empêcher que le système alimentaire mondial

tombe en ruine c’est de mettre partout en place le grand agrobusiness, en particulier là où il n’est pas encore implanté. C’est le but de l’accaparement des terres actuel : étendre et installer pour de bon le modèle occidental des commodity value chains. En d’autres termes, la tendance apparaît donc être à la production alimentaire contrôlée par les multinationales et tournée vers l’exportation.

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halte à la gRande escroquerie

no ogm Tous les liens Campagnes Stop aux OGM

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À cause des OGM (organismes génétiquement modifiés), nous courons le risque de transformer notre alimentation en une marchandise brevetée et contrôlée par quelques multinationales qui privent les agriculteurs et les consommateurs de leurs droits. Les OGM ne sont pas fiables (sur le plan scientifique), ne sont pas efficaces (sur le plan économique), ne sont pas durables (sur le plan écologique), n’ont pas été réellement étudiés (sur le plan de la santé humaine) et sont obsolètes (sur le plan technologique). Préservons notre terre et notre table des OGM parce que: iLS ne réSoLvent paS Le probLème de La faim danS Le monde De l’ensemble des OGM cultivés dans le monde, 99 % sont destinés à l’alimentation animale et aux agrocarburants, non à l’alimentation humaine. De même, les surfaces cultivées avec des OGM se sont étendues au détriment de la production alimentaire. ce n’eSt paS vrai qu’iLS produiSent davantage Les OGM n’ont pas contribué à augmenter la productivité. Selon des chiffres officiels du département américain de l’agriculture, l’USDA, la productivité des cultures de soja et de maïs n’a pas augmenté entre

les années qui ont précédé l’introduction des OGM et la période qui a suivi. iLS ne réduiSent paS Le recourS aux produitS chimiqueS de SynthèSe Les plantes modifiées résistent à des herbicides bien particuliers. Par exemple, Monsanto vend des semences de maïs génétiquement modifiées Roundup Ready et vend également le Roundup, un herbicide surpuissant, qui est le seul à pouvoir être utilisé dans ces cultures. Épandre l’herbicide Roundup sur les champs de maïs génétiquement modifié Roundup Ready ne permet pas d’éliminer la totalité des mauvaises herbes : certaines résistent, et cette résistance se renforce au fil des générations. Ces plantes deviennent ainsi des nuisibles qui nécessiteront l’invention de nouveaux produits chimiques. iLS appauvriSSent La biodiverSité Les OGM ont besoin de surfaces importantes et de monocultures intensives pour réduire leurs coûts de production. Ainsi, les paysans sont expropriés de leurs terres, abandonnent leurs cultures et perdent leurs savoirs. iLS mettent Le contrôLe de La nourriture aux mainS deS muLtinationaLeS Les multinationales qui brevettent et pro-

concenTraTion des cuLTures ogM dans Le Monde

ArCHiviO sLOw FOOd

pays états-unis Brésil Argentine inde Canada Chine paraguay pakistan Afrique du sud uruguay

région (supérieure à 1 million d’hectares)

% de la superficie totale cultivée en ogM

66,8 25,4 22,9 9,4 8,8 3,5 2,6 2,4 2,2 1,1

45,1 17,2 15,5 6,3 5,9 2,4 1,7 1,6 1,5 0,7

sources : rapport de l’isAAA, Global Status of Commercialized Biotech/GM Crops: 2010.

reNCONtres et CAMpAgNes stOp OgM duisent des OGM contrôlent la plus grande partie du marché des semences et, le plus souvent, produisent également des herbicides et des engrais. Elles prônent une agriculture intensive et entravent le développement de solutions alternatives. iLS compromettent La Souveraineté aLimentaire deS popuLationS Comment les agriculteurs biologiques, biodynamiques et conventionnels peuvent-ils être sûrs que leurs produits ne sont pas contaminés ? Une diffusion, même limitée, des cultures OGM en plein champ influerait sur la qualité et sur la situation de notre agriculture, réduisant à néant notre liberté de choisir ce que nous cultivons et ce que nous mangeons. iLS compromettent La Liberté de choix

deS conSommateurS Les lois qui portent sur l’étiquetage des OGM, à l’échelle internationale, sont inadaptées et insuffisantes. En Afrique et en Asie, il n’existe aucune réglementation à ce sujet. Aux États-Unis, aucune différence n’est reconnue entre les produits qui contiennent des OGM et les produits conventionnels, et par conséquent aucune obligation d’informer le consommateur sur la présence d’OGM n’est prévue. En Europe, la loi oblige à préciser sur l’étiquette la présence d’OGM dès lors que leur proportion est supérieure à 0,9 %. Mais, toujours en Europe, bien que la majorité des aliments pour animaux contienne du soja génétiquement modifié, aucune déclaration n’est obligatoire sur l’étiquette des produits dérivés (lait, viande, charcuterie).

Pour en savoir plus

iLLustrAtiON pierO LussO, ArCHiviO sLOw FOOd

Carlo Petrini, président de Slow Food International, a énuméré les dix raisons de dire non aux OGM. Le réseau de Slow Food a donné vie à un certain nombre d’actions de mobilisation contre les OGM dans la plupart des pays du monde. En 2009, la journaliste Marie-Monique Robin a écrit le livre-enquête Le Monde selon Monsanto (Editions Arianna), qui retrace l’histoire, dénonce les stratégies cachées et les différents objectifs du leader mondial de l’industrie transgénique. Le texte a été traduit en treize langues. Slow Food a interrogé l’auteure. Depuis 1996, il y a quatre espèces de plantes transgéniques qui ont réussi à se mettre en place : le soja, le maïs, le coton et le canola qui représentent, respectivement, 50 %, 31 %, 14 % et 5 % de la récolte actuelle (Sources : ISAAA).

BIODIVERSITÉ

© O.MigLiOre

BIODIVE 52

ALMANACH

ERSITÉ 53

BiODiVerSiTÉ SeNTiNeLLe

ITalIE U n e

S e n t i n e l l e

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p i e d

d e S

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Le verger

DE l’EuROpE Cinq pommes, pas une de plus. Entrez dans un magasin de fruits ou jetez un œil aux étals d’un marché et vous retrouverez, à chaque fois, les cinq mêmes variétés : l’American Red Delicious, la Golden Delicious et la Granny Smith, arrivées en Italie dans les années 1930, ou les Galas néo-zélandaises et les Fuji japonaises, introduites dans les années 1990. Ces cinq pommes représentent 90 % de la production courante. Le Piémont a pourtant longtemps été le verger de l’Europe. Au début du xxe siècle, il comptait des milliers de variétés, dont plusieurs appréciées à travers le monde. La quantité y est toujours — après le Trentin, c’est la deuxième région en Italie pour la production de pommes — mais la diversité a souffert. La culture de la pomme du Piémont jouit pourtant d’une antique et glorieuse histoire. C’est au Moyen Âge que les ordres monastiques se sont mis à cultiver les variétés qui ont survécu aux invasions barbares. Au xviiie siècle, de nouvelles implantations et techniques arrivèrent de France. Encore aujourd’hui, de part et d’autre des Alpes, il existe de nombreuses variétés identiques aux noms diffé-

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rents. Mais il ne s’agissait encore que de quelques pommiers isolés. Les premiers vergers sont nés au milieu du xixe siècle. Ils se multiplièrent rapidement. La pomme est un fruit précieux. Elle se conserve longtemps. Les premières sont cueillies en juillet ; les dernières mûrissent en hiver et durent jusqu’à l’arrivée des cerises, premier fruit de l’été. Jadis, de nombreuses maisons avaient une pièce — généralement la plus élevée, la plus fraîche et la plus aérée — où l’on disposait les pommes sur un lit de paille. Dans d’autres cas, les pommes de tout un village étaient conservées ensemble. À partir des années 1960, la pomme traditionnelle des montagnes a cédé la place à celle des plaines, plus rentable. Les variétés locales ont été rapidement remplacées par des variétés étrangères plus grosses, plus flatteuses et mieux adaptées aux techniques modernes. En à peine 40 ans, on a ainsi assisté à un incroyable appauvrissement. Cependant, nombre de variétés anciennes ont été préservées dans les régions dédaignées par l’agriculture industrielle. Certaines font aujourd’hui leur grande réapparition dans les marchés.

g. FASSiNO

serena miLano

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Sentinelle des variétés anciennes de pommes piémontaises Sentinelle de la pomme s rose des Monts Sibyllin

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Les arbres de dario Dario Martina a été l’un des principaux acteurs de la Sentinelle des Vieilles Pommes du Piémont, mise en place par Slow Food. Depuis des années, il rassemble des centaines de variétés anciennes dans le domaine expérimental de l’École Malva de Osasco. « Pour 400 variétés récupérées, au moins un millier ont été perdues à jamais, regrette Dario. Dans les années 1960, on a cru nécessaire de faire table rase de tout ce qui relevait de l’agriculture traditionnelle au profit des machines, des pesticides, des nouvelles variétés étrangères… Et surtout de la spécialisation dans l’agriculture. » Dario Martina s’inspire de ceux qu’il nomme les anciens « paysans généticiens » : les agriculteurs qui connaissaient d’expérience les terrains les plus appropriés pour la culture tel ou tel fruit ou légume, selon son rendement et sa résistance. Au milieu des années 1980, il a créé avec un groupe d’amis la coopérative « Le Fruit Autorisé ». Ils produisent fruits biologiques,

jus de fruits, confitures et conserves. En outre, Dario fut aussi un des pionniers de l’agrotourisme et de la vente directe. « Le bio représentait jadis 1 % du marché en Italie. Mais à partir de la fin des années 1990, ce pourcentage a augmenté, pour atteindre jusqu’à 15-20 % du marché ! Cette progression est due à une prise de conscience des risques courus par la biodiversité agroalimentaire. Slow Food a joué un rôle essentiel dans cette prise de conscience. Une augmentation considérable mais qui ne suffit pas à garantir un revenu adapté aux agriculteurs. Ceux qui achètent les anciennes variétés, le font par curiosité. Pour chaque caisse de vieilles pommes, ils en achètent trois de Golden ou de Red Delicious. Pourtant, la recherche commence à nous donner raison : selon une analyse de la région du Piémont, les valeurs nutritionnelles des anciennes variétés sont 3 ou 4 fois plus élevées que celles des variétés modernes, tant pour leur teneur en vitamines qu’en polyphénols et autres antioxydants. »

g. FASSiNO, ArCHiViO SLOw FOOD

Tous les liens

Les 7 pommes roses des monts sibyLLins

Pour en savoir plus Visitez le site des producteurs de la pomme rose des Monts Sibyllins, également en anglais.

La culture d’anciennes variétés de pommes fait l’objet d’une Sentinelle dans les Marches, sur les côtes des Monts Sibyllins. Dans les municipalités rurales d’Amandola, de Comunanza, de Montefortino, de Montemonaco, de Smerillo et d’autres petites villes de la province de Fermo et d’Ascoli Piceno, on cultive et on conserve encore la pomme rose du mois d’octobre jusqu’à la fin de l’hiver. L’appellation recouvre sept écotypes dont la peau verte

présente des nuances allant du rose pâle au violet voire rouge foncé. Petites et irrégulières, elles ont un parfum intense très aromatique. Forte d’à peine quelques arbres dispersés dans les champs en 2000, sa culture s’est aujourd’hui étendue, réunissant 17 agriculteurs au sein de la même association. Les fruits sont vendus directement sur les marchés locaux ou transformés en confitures. Raffaella Ponzio 57

w. OFFerMANS

BiODiVerSiTÉ SeNTiNeLLe

payS-BaS l e S

t e c h n i q U e S

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Le cuivre au secours Du STROOp

Il existe aux Pays-Bas, au sud du Limbourg — mais aussi dans les régions limitrophes de la Belgique et de l’Allemagne — une recette traditionnelle très ancienne pour la préparation du sirop appelé stroop. À l’origine, on l’utilisait pour la conservation des fruits pendant l’hiver. Elle s’étalait sur du pain, comme une confiture. Une famille ordinaire de la région en avait toujours un bon quintal en réserve. Chaque village abritait au moins un producteur. Depuis la Seconde Guerre mondiale, la production industrielle a progressivement remplacé sa version artisanale, à mesure que l’urbanisation a mené à la disparition progressive des arbres fruitiers de variétés locales. La préparation du sirop est laborieuse.

Selon la recette traditionnelle, il faut 60 % de poires et 40 % de pommes récoltées entre septembre et octobre dans les vergers de la région — exclusivement des arbres de variétés anciennes. Chaque variété a un goût unique et des pourcentages différents de sucre, de pectine et d’acides qui assurent ainsi un goût toujours différent au produit final. Seul un artisan expert sait choisir et doser les fruits, et suivre le processus de cuisson. Les pommes et les poires cuisent de quatre à six heures dans un chaudron en cuivre, en contact direct avec un feu plus ou moins intense selon l’étape de cuisson (la production industrielle privilégie l’acier et prévient tout contact avec la flamme).

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w. OFFerMANS

eN 2010, quATre PrODuCTeurS De LiMBOurg ONT rePriS L’ANCieNNe eT LABOrieuSe TeCHNique De PrÉPArATiON Du STrOOP.

Tous les liens La Sentinelle du sirop du Limbourg

Le jus ainsi obtenu est ensuite grossièrement filtré — de manière à obtenir la bonne consistance et un goût intense — puis remis à bouillir dans le chaudron en cuivre pendant 4 à 15 heures, selon la recette utilisée. Une fois parvenu à la bonne consistance, le sirop est immédiatement mis en bouteille. En 2010, quatre producteurs de la région ont renoué avec cette tradi-

tion et ses techniques. Le sirop est aujourd’hui préparé dans de nouveaux locaux avec d’anciens outils et équipements restaurés. Une des principales tâches de la Sentinelle — pour conserver la biodiversité du paysage du sud du Limbourg et le goût original du stroop — sera la réintroduction d’anciennes variétés de pommes et de poires.

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BiODiVerSiTÉ SeNTiNeLLe

ÉTaTS-unIS

p r o j e t S

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h i S t o i r e S

d ’ o U t r e - a t l a n t i q U e

neW York, patrie DE la GREEn pIppIn

La pomme commune (Malus pumila ou Malus x domestica) est l’une des cultures comestibles qui compte le plus grand nombre de variétés dans le monde. Rien qu’aux États-Unis, on estime le nombre variétés cultivées à travers l’histoire entre 15 et 16 000. Malheureusement, seules 3000 espèces sont aujourd’hui disponibles pour les agriculteurs. Les autres 80 % ont disparu, du moins commercialement. Les 11 variétés les plus répandues fournissent 90 % des pommes vendues en Amérique, l’incontournable Red Delicious dominant le marché en 2009 avec 41 % de la production totale (environ 11 millions de tonnes). La situation est la même un peu partout. À Terra Madre 2010, les producteurs de pommes du Piémont ont bien mis en évidence cette perte de diversité. À une extrémité de la table ils ont placé en cercle 500 pommes italiennes traditionnelles, à l’autre les cinq variétés dominant les

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marchés d’Italie et d’Amérique du Nord : la Red Delicious, la Gala, la Golden Delicious, la Granny Smith et la Fuji. La conséquence la plus immédiate de cet appauvrissement est la propagation d’un goût uniformisé et sans grand intérêt. Ces pommes n’ont pas été choisies pour leurs arômes particuliers ou pour un usage spécifique, mais parce qu’elles sont sucrées, résistantes au transport et peuvent être conservées pendant une longue période. Mais il est important de sauvegarder la diversité existante pour d’autres raisons : pour préserver les traditions ethniques, historiques et culturelles ; pour maintenir la diversité génétique ; pour protéger les variétés les mieux adaptées aux conditions locales spécifiques (qui, par conséquent, nécessiteraient peu ou pas de traitements chimiques) et développer le nombre de saveurs, pour nous et pour les générations futures.

C. FANTi

Ben Watson

Tous les liens La Sentinelle de la pomme Sébastopol Gravenstein CROP Boston Tea Party RAFT Alliance

des fruits civiques Aux États-Unis, plusieurs initiatives ont été lancées ces dernières années concernant les pommes, et Slow Food est intervenu à différents niveaux. Une Sentinelle à Sebastopol, en Californie du Nord, travaille ainsi à promouvoir la plantation et l’utilisation de la pomme Gravenstein. La Gravenstein est arrivée en Californie en 1820 avec une immigration de marchands venus de Russie. Le comté de Sonoma était d’ailleurs la capitale mondiale de la pomme Gravenstein les années 1970. De nos jours, la quasi-totalité des terres de la région est dévolue aux vignobles, bien plus rentables. Seule une douzaine d’agriculteurs, sur une superficie de 350 hectares, cultive encore la Gravenstein. Sur les 40 entreprises qui l’ont exploitée en 1958, on n’en compte aujourd’hui plus qu’une — certes importante — qui achète les productions

à la fin de l’été pour en faire des jus, des sauces et du vinaigre. Grâce aux efforts de nombreux groupes affiliés aux producteurs de la Sentinelle, parmi lesquels des grands cuisiniers de la région et le convivium Slow Food Russian River, cette spécialité saisonnière de courte durée, unique en termes de saveur et de qualité est enfin promue et commercialisée de manière efficace. Nous pourrions citer de nombreux autres exemples de projets locaux aux ÉtatsUnis, comme l’organisation CROP (Chicago Rare Orchard Project) qui veut instaurer des vergers de variétés anciennes dans les espaces urbains et la Boston Tea Party, une initiative récente, qui se propose de planter quelques pommiers traditionnels dans tous les jardins publics de Boston. Slow Food New York City s’est profondément impliqué pour introduire la pomme autochtone Green Newtown Pippin dans l’Arche du Goût et pour la promouvoir et la planter dans les espaces publics de la ville. L’Alliance RAFT (Renewing America’s Food Traditions Alliance) a également rassemblé quelques-uns des plus grands experts de pommes du pays pour l’instauration d’une série d’ateliers pédagogiques, dont un en collaboration avec des étudiants en architecture du paysage de l’Université du Maryland pour concevoir et planter un « verger du patrimoine » sur la propriété de la National Agricultural Library. Partout aux États-Unis on manifeste un regain d’intérêt pour les pommes anciennes. Les travaux peuvent prendre quelques années pour porter ses fruits, mais cela vaut la peine d’attendre le début de cette délicieuse récolte.

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BiODiVerSiTÉ ArCHe Du gOûT

lES pOmmES de L’arche du goût itaLie CAMPANIE Annurca de Sant’Agata dei Goti Ville de Sant’Agata dei Goti, province de Benevento De taille moyenne à petite et de forme aplatie, elle a la peau jaune-vert, à tendance rouge lorsqu’elle est exposée au soleil. La chair, blanche et croquante, a un goût sucré et plein d’arômes. Limoncella Sannio, province de Benevento Le fruit, petit et cylindrique, a une peau lisse qui varie du jaune-vert au doré. La chair blanche est ferme et croquante avec un goût sucré. Pomme à croquer, elle se consomme aussi cuite ou en jus de fruits. ÉMILIE-ROMAGNE Commerce Province de Forlì-Cesena Cultivar de 1865 d’origine américaine. Elle a une forme ronde et légèrement aplatie, la peau lisse de couleur jaune-rose vire au rouge à l’exposition au soleil. La chair, blanc crème, est ferme, croquante avec un goût légèrement acidulé. Francesca Province de Forlì Cesena Elle a une forme moyenne à petite et légèrement aplatie. La peau est vert-jaune et la chair est croquante, juteuse, parfumée et assez acidulée.

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ALMANACH

Pour en savoir plus L’Arche du goût cherche, catalogue, décrit et révèle des productions encore existantes mais risquant de disparaître lorsqu’elles ont un réel potentiel commercial. Si vous en connaissez, n’hésitez pas à nous les signaler !

Grigia di Torriana Province de Cuneo et de Turin Reine des pommes à cuire au four. La peau est jaunerouille (en dialecte piémontais, elle était connue sous le nom de pum rusnent, « pomme rouillée ») et rugueuse ; la chair est ferme, juteuse et sucrée. Calvilla blanche et rouge Province de Turin et de Cuneo Parmi les différents types de pommes d’autrefois de Calvillo, six ont survécu : les meilleures sont la blanche (petite, jaune) et la rouge en hiver (couleur lie-de-vin et goût acidulé).

Rosa Mantovana Province de Forlì Cesena De taille moyenne à grande, elle est un peu aplatie. La peau est épaisse et lisse, sa couleur est jaune pâle, tachetée de rose foncé. La chair tendre est légèrement acidulée. Variété résistante.

Carla di Finale Finale Ligure (province de Savona) et province de Cuneo Ce fruit est petit et irrégulier, avec une peau jaune paille mouchetée de rose et une chair très sucrée et juteuse. Délicat, il se mange fraîchement cueilli.

FRIOUL-VÉNÉTIE JULIENNE Zeuca Valle Zeuca Le fruit, de taille moyenne, est rond-oblong, avec une peau de couleur verdâtre et rouge. La chair est croquante. À maturité en hiver.

Roncallina Arrière-pays génois Cueillie à la fin de septembre, elle est petite, a une peau lisse sur fond jaune-vert striée de rouge en surface. La chair a une consistance croquante et un goût acidulé aromatique.

Buras Val Varait, province de Cuneo Pour la table et la cuisson au four. La peau, jaune vert, est légèrement rugueuse, la chair est croquante. Arrive à maturité entre septembreoctobre. Avec le temps, elle se ride et devient légèrement farineuse.

LIGURIE Teresa L’arrière-pays génois, Valle Scrivia Écotype appartenant probablement à la famille des reinettes d’origine française. Elle a un aspect peu attractif (de taille moyenne à petite, à la forme aplatie, de profile asymétrique), et un goût sucré.

PIÉMONT Anciennes variétés piémontaises (sentineLLe) Dominici Province de Turin Aromatique et parfumée, assez grosse, elle a une forme allongée. La peau rouge-jaune est légèrement rugueuse, la chair de couleur crème est croquante et acidulée.

Runsé Région de Pinerolo, province de Turin Unique par sa couleur liede-vin et sa peau brillante. Elle a une chair blanc crème teintée de rose. Quand elle est mûre, elle a un goût de roses sauvages et de ronces (appelées runsé, dans le Piémont).

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© P. MONTANArO

L’Arche du Goût Magnana Province de Turin et de Cuneo Petite et anonyme, de couleur vineuse, la magnana, parmi les vieilles pommes, est l’une des meilleures, avec une chair blanc vert, sucrée et acidulée, ferme et compacte.

Esperiega Région de Rincón de Ademuz, province de Valence De taille moyenne à grande et de forme sphérique, elle a une chair jaune-vert et la peau striée de rouge. Adaptée pour la cuisson.

canada Nouvelle Écosse Gravenstein de Nouvelle Écosse Importée de la ville de Gravenstein, en Allemagne, au xviie siècle, elle est très juteuse. Pomme à croquer, elle se consomme également cuite et en cidre.

États-unis Gravenstein de Sebastopol (sentineLLe) Sebastopol, comté de Sonoma, Californie C’est l’une des premières pommes d’Amérique du Nord à être présente dans les marchés. La cueillette est compliquée en raison de sa courte queue et les différentes périodes de maturité des fruits.

esPaGne Ville de Errezil, province de Gipuzkoa Errezil Sagarra ou ibarbi sagarra C’est l’une des quelques pommes autochtones qui peuvent être consommées à la fois à table, en cidre et en pâtisseries.

Sierra Beauty Les régions côtières de la Californie Variété tardive, à la forme arrondie et de dimension moyenne à grande. La peau rugueuse est vert-

jaune avec des nuances rouges lorsqu’elle est bien mûre. Pour la table, tartes et confitures. Granite Beauty New Hampshire et le Maine, Nouvelle-Angleterre De taille moyenne, sa couleur est jaune avec des nuances de vermillon. Probablement en raison de sa lente croissance, la variété est peu commercialisée. Toutefois, elle est parfaite pour les petits vergers de maison. Newtown Pippin État de New York, en Virginie et en Californie Originaire de ce qui est maintenant devenue la ville de New York, c’est une variété tardive, de taille moyenne à grande et de forme aplatie. La peau est verte striée de jaune et la chair a un goût sucré et acidulé.

Harrison Comté d’Essex, New Jersey Elle a une forme arrondie et de couleur jaune, qui, dans la région du Moyen Atlantique, acquiert une légère teinte rougeâtre. Son goût rappelle celui du coing. Hauer pippin Comté de Santa Cruz, Californie De taille moyenne à grande, elle a une peau de couleur rouge vif en fin de saison. La chair est blanche, ferme, juteuse. Le goût, épicé et sucré, rappelle les clous de girofle. Capitol Reef Parc national de Capitol Reef, Utah Le parc est la patrie des pommes Capitol Reef, cultivées depuis 1880 dans les vergers historiques de Fruita Orchards. Sucrée, juteuse et croquante, elle est idéale pour les tartes.

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ArCHiViO SLOw FOOD

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KEnya U n

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Le seL DES ROSEaux katasi maina et eter namianYa

Tous les liens La Sentinelle du sel de roseau x du fleuve Nzoia

C’est au xiiie siècle que la communauté Bukusu de l’ouest du Kenya a découvert le kumunyu, ou « sel des roseaux ». Vivant dans une région entourée d’eau douce, avec les rivières descendant des montagnes voisines et le Lac Victoria à proximité, ils ont longtemps dépendu de l’océan Indien, situé à plus de 800 kilomètres de distance, pour s’en approvisionner. C’est en constatant que leurs animaux semblaient avoir un appétit particulier pour certains roseaux que les Bukusus découvrirent la forte teneur en sel de ces derniers. Bien plus onéreux que le sel marin, le sel kumunyu est privilégié par toutes les familles pour la préparation de légumes et de la viande séchée en raison de sa saveur. Le sel kumunyu s’obtient suivant un long processus. Le roseau est coupé à maturité, puis mis à sécher pendant trois

jours. Il est ensuite brûle à petit feu. La cendre collectée est ensuite filtrée pour n’en recueillir que la partie soluble. Pour le transport, on transforme le sel en cristaux en faisant évaporer l’eau restante. La cendre déshydratée est enveloppée dans des feuilles de bananier séchées et vendue environ 10 shillings kenyans (0,09 €) par paquet. Aux temps coloniaux, les Britanniques développèrent le réseau routier pour favoriser la distribution de produits alimentaires à travers le pays. C’est ainsi que le sel marin est devenu moins coûteux. La tradition du sel kumunyu a également beaucoup souffert de la déforestation massive. naissance de La sentineLLe Aujourd’hui, seule la communauté Bukusu, dans le Nabuyole de la région de Webuye produit le sel de roseau. La

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Pour en savoir plus Decouvrez les cinques Sentinelles du Kenya

LA COMMuNAuTÉ BukuSu exTrAiT Le SeL à PArTir De rOSeAux De MArAiS SeLON uN LONg PrOCeSSuS De FABriCATiON.

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technique a été transmise d’une génération à l’autre, même si l’arrivée du sel de mer sur les marchés locaux a eu un impact très négatif sur la transmission de cette connaissance. Grâce à la communauté Bukusu, le produit est toujours vendu chez quelques marchés de producteurs dans l’ouest du Kenya, mais en quantités très limitées. En 2009, suite à une recherche menée par des étudiants de l’UNISG sur les aliments traditionnels, une Sentinelle est née pour aider la communauté à améliorer la qualité du sel en fournissant les outils et l’équipement nécessaires et un soutien pour la commercialisation et les initiatives de promotion. Le « Self Help

Group » de Nabuyole a été lancé pour rassembler les 30 producteurs impliqués dans le projet de la Sentinelle, qui a permis de coopérer pour améliorer les techniques de production de sel. La Sentinelle, en collaboration avec la Fondation Slow Food pour la Biodiversité, a commencé à développer des projets pour le reboisement de la région afin de récupérer les marécages où poussent les roseaux kumunyu. En 2010, elle a également financé le voyage pour présenter le sel de deux agriculteurs de Terra Madre en Tanzanie et à Turin. Un protocole a été rédigé pour établir les lignes directrices pour la production du sel de roseau de la Sentinelle.

ArCHiViO SLOw FOOD, © O. MigLiOre

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Les femmes DE ZERRaDOun

© O. MigLiOre

micheLa Lenta

Sur les pentes inférieures des montagnes du Rif, au nord du Maroc, se trouve le village de Zerradoun, composé d’une poignée d’habitations éparpillées. Pour y parvenir, il faut emprunter la route reliant Ouezzane et Chefchaouen, puis faire un détour d’environ cinq kilomètres derrière les collines. Zerradoun a une particularité : entre deux vallées entourées de montagnes et de champs de blé et d’orge se trouvent deux sources d’eau saumâtre. C’est à partir de celles-ci que les femmes du village, rejointes depuis 1997 par la coopérative Al Wifak (mot arabe signifiant entente, accord), obtiennent un sel de qualité. Elles l’extraient en canalisant l’eau dans des bassins d’évaporation, avec des parois faites de murs de pierre, vieilles d’au moins 200 ans. Le processus d’extraction demande du temps et beaucoup d’efforts. L’eau de la source saline est recueillie dans une

citerne pour la première évaporation, puis acheminée dans les bassins où elle reste pendant cinq jours ; à ce stade on puise plus d’eau de la citerne et on laisse sécher le tout pendant deux jours. Puis le cycle recommence. La saison de production, qui nécessite beaucoup de soleil, commence vers la mi-mai et se poursuit pendant trois ou quatre mois. Les innovations techniques sont peu nombreuses : une pompe pour puiser de l’eau de la source et des bâches en plastique dans les bassins, plus hygiéniques et pratiques. territoire et PackaGinG La Sentinelle, née en juin 2010, produit également des sels de bain aromatisés (aux huiles essentielles de lavande, à la menthe et au menthol) et un produit exfoliant (composé de sel, d’argile verte, de bicarbonate de soude et de d’huile essentielle d’eucalyptus). Quant au sel

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Tous les liens La Sentinelle du sel de Zerradoun Univers sel 72

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de cuisine, il continue d’être vendu au marché local tous les samedis, conformément à la tradition. En septembre 2010, dans le cadre d’un projet en faveur des Sentinelles marocaines soutenu par la Région du Piémont, deux producteurs de la Sentinelle et le coordinateur du projet, membre du convivium Les Terroirs du Bouregreg de Rabat, ont visité l’association française

Univers Sel, à Guérande. Depuis 20 ans, celle-ci développe des techniques de production de sel et de riz. La visite a été l’occasion de comprendre le fonctionnement et l’organisation et des salines aux dimensions plus importantes ainsi que les méthodes de gestion adoptées par les producteurs indépendants. Le référent de la Sentinelle Ali Boulanuar, membre du convivium de Rabat, raconte :

© O. MigLiOre

à PArTir De L’eAu SAuMâTre De Deux SOurCeS, LeS FeMMeS Du ViLLAge MArOCAiN De ZerrADOuN exTrAieNT Le SeL COMMe AuTreFOiS.

« Mettre en réseau les producteurs de petite échelle signifie l’échange de connaissances à travers une comparaison sur des techniques de production, des problèmes, des solutions. La visite des producteurs de Guérande a ouvert de nouveaux horizons aux productrices de la Sentinelle. Aicha et Ghita ont pu comprendre qu’en améliorant la qualité, le packaging et le réseau de vente, même les petits producteurs peuvent valoriser leur territoire, leurs produits et vivre grâce à ce qu’ils savent faire depuis toujours. » La Sentinelle, en collaboration avec le convivium de Valence et avec le soutien de la région du Piémont, travaille depuis un an pour améliorer le produit (en particulier le packaging), acheter des machines pour moudre le sel et pour le stockage, et commercialiser différents types de sel. L’objectif est de rendre autonomes les 30 productrices. Univers Sel contribuera à l’amélioration de l’extraction du sel en substituant des matières naturelles aux matières plastiques utilisées actuellement.

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ESpaGnE l a

r e n a i S S a n c e

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S a l i n e S

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la flEuR du seL Basque gontzaL esteBan martínez

Valley Salado (la Vallée Salée) est l’un des sites les plus surprenants au monde. Sa beauté ne réside ni dans son architecture ou son histoire millénaire, ni dans ses caractéristiques géologiques ou la beauté de son paysage, mais dans la combinaison harmonieuse de tous ces éléments pris ensemble. Les salines d’Añana sont situées au pied des plus anciens villages du Pays Basque. Elles comptent plus de 5000 plates-formes d’évaporation sur pilotis en bois et en pierre, construites au fil des siècles. Avec la crise, au xxe siècle, de la production artisanale, l’extraction du sel a été quasiment abandonnée. Mais un projet ambitieux, promu et dirigé par la

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Fondation Vallée Salée d’Añana, est en train de redonner vie à ce site unique. L’une des stratégies adoptées pour relancer l’activité d’Añana est simple : favoriser la production d’un sel de haute qualité, susceptible de retrouve sa juste valeur sur le marché. Pour ce faire, la Fondation s’appuiera sur le talent de trois des meilleurs chefs au monde (Pedro Subijana, Martín Berasategui, Andoni Luis Aduriz). Les avantages et la qualité du sel d’Añana sont reconnus au niveau international depuis 1851, année dans laquelle les saliculteurs ont reçu un prix à l’Exposition universelle de Londres. Le sel basque est un produit de l’Arche du Goût de Slow Food depuis 2006.

Pour en savoir plus Ne manquez pas la visite virtuelle des salines d’Añana

Tous les liens Fondation Vallée Salée d’Añana

www.FOTOquiNTAS.COM

L’Arche du Goût

vue et PaLais Actuellement, la Fondation Vallée Salée d’Añana a mis sur le marché trois types de sel : la fleur de sel, le sel minéral, le chuzo. La fleur se crée au début du processus de cristallisation lorsque se forment sur la surface de la saumure des lames fines et irrégulières qui se récoltent à la main. Ces lames ont la capacité de rehausser le goût des aliments et sont riches en minéraux et en oligo-éléments, ne demandant aucun traitement industriel. Le sel minéral est très pur en raison des origines des matières premières et de sa production artisanale. La saumure qui jaillit des sources pro-

vient d’anciens dépôts de sel solide d’une mer disparue depuis 200 millions années. Ce liquide est disponible sur les aires, où il suffit d’attendre que le soleil et le vent fassent lentement évaporer l’eau pour obtenir un produit de haute qualité qui se recueille et se confectionne à la main directement dans la vallée. Le chuzo est un produit unique et rare : ce sont de fines stalactites formées naturellement par filtration des canaux des plates-formes. De très bonne qualité, de consistance fine et compacte, il se recueille à la main. Les analyses effectuées par l’Universidad del País Vasco montrent que ce sel fait partie des meilleurs dans le monde.

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ESpaGnE

F l e U r S

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la SaISOn du saLicuLteur isaBeL gonzáLez turmo

Le soleil de juillet se couche sur Cadix et Huelva. C’est ici que l’Europe se redécouvre, chaque soir, si proche et si éloignée de l’Afrique. Le mois s’achève. Le saliculteur s’apprête à honorer un rendez-vous millénaire. Depuis tant d’années, c’est à lui qu’il incombe de recueillir les fins cristaux de fleur de sel. Mais seulement lorsque la température de l’eau atteint les 40 °C, et que le vent cède la place à une douce brise à la tombée de la nuit. C’est alors que le miracle se produit : un millimètre de cristaux couvre la saline, comme une couche de neige. Le crépuscule approche. Le saliculteur est prêt. À lui de jouer. Il a connu des étés difficiles, n’atteignant pas plus de quatre ou cinq jours de cristallisation, d’autres plus généreux. Nous devons attendre, toujours. Le saliculteur se penche et

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commence à prélever, avec la précision d’une caresse, le givre immaculé. Après quelques minutes, le ciel se pare de reflets mordorés. Le saliculteur n’a pas besoin de montre. Son temps s’égrène au rythme de la récolte du sel. Il se redresse. Tâche éprouvante que la sienne. Reprenant son souffle, il contemple l’horizon. Il connaît l’importance de son rôle dans ce pacte passé entre les Hommes du Sud et la Nature. Son travail a commencé à la fin du printemps, quand la pluie a cessé. Après avoir nettoyé la saline, il a ouvert la vanne aux eaux-mères. Pendant un mois et demi, elles ont parcouru de petits bassins créés par les Phéniciens et les Romains. L’un après l’autre. Sans autre impulsion qu’une légère pente naturelle. Les puissants vents d’est et d’ouest ont ensuite fait évaporer les salines. C’est

M. ruiZ

ainsi que la nature élimine les métaux lourds et laisse l’iode, le potassium, le fer, le magnésium et les 80 autres éléments que seule possède la fleur de sel. Aucun lavage, aucun procédé artificiel n’est ensuite nécessaire : il suffit de le laisser sécher et de tamiser la fleur de sel. Comme hier, comme toujours. Rien ne serait possible sans la patience et le savoir-faire du saliculteur qui recueille le limon et nettoie la bouche des canaux pour le passage du courant, qui alimente les bassins et contrôle la couleur de l’eau, qui cultive la saline et récolte le sel, qui apprend et transmet des techniques accumulées au fil des ans. Malheureusement, c’est ce besoin de main-d’œuvre qui a causé la ruine de beaucoup de salines. Aujourd’hui, les saliculteur sont les témoins silencieux d’un monde menacé.

Leurs maisons simples, plus belles dans leur blancheur fanée, constellent le paysage plat et lumineux. Elles sont aujourd’hui inhabitées, lentement rongées par les vents et la pluie. Rares sont ceux qui relèvent encore le défi que représente la culture de la fleur de sel. Ces fils et petits-fils de saliculteurs sont pourtant déterminés à se battre pour offrir le meilleur sel. Quitte à faire preuve de créativité. Ils ont ainsi mis sur le marché des mélanges de fleur de sel avec la végétation des salines, les herbes des champs et les vins généreux de Jerez Oloroso, Pedro Ximénez, Moscatel. Parce qu’ils maintiennent et améliorent l’héritage transmis par les générations qui les ont précédés, ils méritent que les membres et les cuisiniers de Slow Food découvrent le sel bon, propre et juste qui fait leur fierté.

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pÉROu

SUrvie et viSion coSmiqUe danS andeS

Le pain DE l’InDIEn karissa siLva

Connue par les populations andines du Pérou sous le nom de mama jatha, la pomme de terre a toujours été l’un des aliments centraux dans la culture de ceux qui vivent sur ces terres. Le mot aymara jhata est la traduction du quechua ayllu, qui désigne l’unité politique et sociale de l’Empire Inca — une communauté familiale élargie, travaillant la terre de manière collective. La pomme de terre est la mère qui nourrit les hommes et les femmes des Andes. Sa présence dans la vie quotidienne est si importante que, par le passé, on utilisait une unité de mesure de temps équivalente à la durée de sa cuisson ! La pomme de terre a été domestiquée au cœur de la cordillère des Andes. Cette région héberge une biodiversité extraordinaire et de nombreux microsystèmes écologiques difficiles et froids mais très fertiles, grâce à l’ingéniosité des agriculteurs andins. Les Andes sont le berceau de grandes cultures et de civilisations, terre d’origine de nombreuses plantes comestibles et médicinales précieuses. On raconte que

l’on a commencé à cultiver la pomme de terre dans le deuxième millénaire avant notre ère dans les environs du lac Titicaca. Séchée, elle permettait de faire face aux famines. Ce n’est pas un hasard si c’est dans cette région aux hivers particulièrement rudes, avoisinant par endroits les 4000 mètres d’altitude, que l’homme et le tubercule ont tressé ensemble un scénario de survie mutuelle. 3000 variÉtÉs À haute altitude, les cultures pré-Inca et Inca, développèrent des variétés de pommes de terre résistantes aux climats les plus froids et un processus de lyophilisation, encore pratiqué de nos, qui a donné lieu à un produit déshydraté connu sous le nom de chuño, en quechua, tunta. Ces pommes de terre déshydratées se conservent pendant des mois, voire des années, dans une région où l’agriculture et la production alimentaire sont directement impactées par les précipitations atmosphériques. Le chroniqueur espagnol Bernabé Cobo en 1653, dans son étude intitulée La

Pour en savoir plus

© O. MigLiOre, © N. rAPeTTi

od Les Sentinelles Slow Fo tion des soutiennent la produc s de la pommes de terre andine uaca, en Quebrad a de Humah tes douces de Argentine, et des pata u. Pampacorral, au Péro

Historia del nuevo mundo, a attesté de l’existence de ce tubercule en le définissant « le Pain de l’Indien ». L’existence de plus de 3000 variétés de pommes de terre fait la fierté de la population locale : aucun autre pays n’en possède autant. Cependant, elles ne sont pas encore assez valorisées et les peuples andins ne réussissent pas à en tirer suffisamment de bénéfices. Aussi parce que la plupart de la récolte est destinée à une consommation domestique. La pomme de terre est présente dans les plats les plus caractéristiques, parmi eux : papas a la huancáina (avec une sauce au fromage piquant), papa rellena (fourré), carapulcra (plat préparé avec des pommes de terre séchées). Elle est également utilisée dans la préparation de l’ají de gallina (mélange de blanc de poulet), considéré, avec le ceviche (poisson cru mariné dans du jus

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BiODiVerSiTÉ SeNTiNeLLe

LA POMMe De Terre eST Au Cœur De LA Vie eT De LA CuLTure DeS PeuPLeS ANDiNS.

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© O. MigLiOre, © N. rAPeTTi

de citron), comme le plat typique de la cuisine péruvienne. Dans la région andine, la pomme de terre se cuit au four ou au gril. Parmi les plats les plus traditionnels nous citerons la pomme de terre waiko, bouillie et accompagnée de fromage de montagne ou d’ají, du piment rouge. À l’époque de la récolte et pendant la fête Inti Raymi, on prépare la huatia, pomme de terre cuite sous terre grâce à la chaleur des braises. Le tubercule est également servi comme soupe, en daube avec de la viande ou du fromage et de l’ají, et avec d’autres légumes.

Le plat qui exprime le mieux la conception du monde andine est le « pot de terre », pachamanca — du quechua pacha, terre, et manka, pot — où on célèbre la fertilité de la pachamama (Terre-Mère). Il s’agit d’une recette traditionnelle basée sur la cuisson par réverbération, grâce à des pierres préchauffées, de viande d’agneau, de porc, du poulet et de cochon d’inde, marinée aux épices, à laquelle on ajoute des pommes de terre. Cette préparation est la manifestation spirituelle, sociale, rituelle de l’équilibre et de l’harmonie entre la population humaine et Mère Nature.

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BiODiVerSiTÉ SeNTiNeLLe

ÉTaTS-unIS d e S

c o n q U i S t a d o r S

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m a k a h S

Les gardiens DE l’OZETTE gerrY Warren

Dans les années 1980, une petite pomme de terre presque oubliée a été reconnue comme l’aliment de base au régime alimentaire de la population autochtone de la côte du Pacifique, les Makahs. Ils occupent la région autour de Neah Bay, dans l’État de Washington. Selon la tradition tribale, la pomme de terre a été utilisée par ces populations pendant deux siècles. Les Makah l’avaient appelée Ozette du nom d’un de leurs cinq villages situés dans cette région. Les pommes de terre sont originaires d’Amérique du Sud et on pensait que toutes les variétés ont d’abord été exportées en Europe par les Espagnols, puis en Amérique du Nord. Mais en 2004, une analyse phylogénétique effectuée à la Washington State University a montré que la pomme de terre (Solanum tuberosum groupe tuberosum) avait certainement été importée directement d’Amérique du Sud. Histoire d’une conquête Après avoir conquis l’Amérique du Sud, les Espagnols entreprirent une expédition pour étendre leur empire sur la côte ouest de l’Amérique du Nord. Au printemps de 1791, ils construisirent un fort à Neah Bay et, comme c’était la coutume, mirent en place un jardin potager qui comprenait sûrement ces pommes de terre en provenance du Mexique. Au

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cours de l’hiver 1791, les conditions climatiques de la région s’avérèrent trop rudes pour permettre la halte des navires espagnols. Le fort fut abandonné. On pense que le peuple Makah, à la recherche de féculents, a ainsi trouvé quelques spécimens de la plante, restés dans le jardin potager du fort, l’adoptant et la gardant dans leurs jardins pendant plus de 200 ans. Ce n’est qu’à la fin des années 1980, près de deux siècles plus tard, que la pomme de terre a commencé à être cultivée à l’extérieur de la région des Makahs. La chair ferme et la consistance crémeuse de cette pomme de terre à la peau fine et au goût unique rappelant la noix et la terre sont appréciées autant par les chefs que pour la cuisine ménagère. nature contre nature La Sentinelle a été créée par Slow Food Seattle, en collaboration avec la nation Makah, Full Circle Farm, Pure Potato (un laboratoire qui produit et sélectionne les semences de pommes de terre) et l’Agricultural Research Station de l’USDA de Prosser, Washington, et la section de Seattle de l’organisation Chefs Collaborative. Les efforts de promotion de la Sentinelle ont permis d’élargir suffisamment la demande de cette pomme de terre pour assurer une augmentation régulière de

Tous les liens

C. BLOOMBerg

mme La Sentinelle de la po de terre Ozette

la production de graines certifiées (selon les estimations près de 23 tonnes en 2010) par Pure Potato. Le nombre d’agriculteurs et des personnes qui cultivent la makah ozette a significativement augmenté en raison de la disponibilité des semences. Le cultivar s’est trouvé une place dans les marchés agricoles et dans les menus des restaurants de la région en automne. Une boulangerie artisanale importante de Seattle a utilisé environ 90 tonnes de makah ozette pour préparer « le meilleur pain de pommes de terre au monde » et a promis d’en faire un produit phare de sa production saisonnière. En 2010, une inondation a dévasté les zones de culture de la pomme de terre et les semences de Pure Potato. Cette perte a été un coup dur pour la Sentinelle : trois ans seront nécessaires pour atteindre de nouveau ces niveaux de production de graines de première génération de 2009. Les agriculteurs se sont abstenus de vendre leurs maigres récoltes de l’année 2010 afin de pouvoir disposer de graines de deuxième génération pour la plantation au printemps 2011. Dès que les niveaux de production seront retrouvés, la Sentinelle poursuivra ses activités de promotion dans le Nord-Ouest et se joindra à Pure Potato pour introduire les semences dans les marchés de tout le pays.

BiODiVerSiTÉ SeNTiNeLLe

allEmaGnE m i l l e

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v i l l e

Le trésor DE BamBERG

Ce n’est pas un hasard si la Sentinelle de la Corne de Bamberg (ou Bamberger Hörnla), a fait son apparition à Bamberg, en 2009. La ville, surnommée « Ville des Jardiniers », a une très ancienne tradition d’horticulture qui a marqué son développement urbain. En effet, depuis le début du Moyen Âge, il y avait le Gärtnerviertel, le quartier des jardiniers, qui fait partie intégrante du magnifique centre historique de la ville, aujourd’hui au patrimoine de l’Unesco. Les artefacts historiques attestent de la présence jusqu’en 1200 de petites zones cultivées au bord des rues centrales et une carte connue de 1602 signalait

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des petites zones vertes cultivées derrière les maisons, où l’on trouvait principalement des légumes, des herbes aromatiques, des arbres fruitiers et des vignes. Dans le milieu du xixe siècle, on comptait plus de 500 Stadthauernhöfe (fermes avec de grands jardins potagers), qui représentaient environ un tiers des bâtiments de la ville et qui étaient gérés par 540 professeurs d’horticulture. Ces fermes, en plein centre de la ville, avaient une architecture commune : un portail en bois très large pour permettre l’accès des charrettes tirées par des bœufs, la maison familiale donnant sur la cour

g. MüLLer-LANg

veronica veneziano

Tous les liens mme La Sentinelle de la po de terre de Bamberg intérieure, au fond de la cour un grenier qui servait d’entrepôt et, à l’arrière de la maison, un jardin potager d’environ 1000 mètres carrés. Aujourd’hui, une vingtaine de ces exploitations ont survécu, et l’une d’elles est le siège du Musée des horticulteurs. Ces grands jardins potagers urbains servaient notamment à cultiver chou, chourave, chou rouge, chou-fleur, chou frisé, radis, betteraves, poireaux, pommes de terre, oignons, ail, concombres, courges, pois, haricots, épinards, salsifis, asperges, ciboulette, marjolaine, aneth, anis, d coriandre, persil et cerfeuil. Les variétés de tubercules cultivées en ville et dans toute la Franconie, la région où se situe Bamberg, étaient très nombreuses, mais il en est resté très peu aujourd’hui. La Bamberger Hörnla, comme la plupart des autres variétés, était principalement destinée à la consommation familiale ; seulement une petite partie des surplus de production était vendue sur les marchés de Monaco ou de Erfurt. Sélectionnée par les familles et exclue des listes nationales, elle n’est toujours pas cultivée au-delà des frontières de la Franconie bavaroise. En 2008, elle a été nommée pomme de terre de l’année et, en mars 2009, grâce au travail de Slow Food Hohenlohe-

Tauber-Main-Franken et d’une association de producteurs, elle est devenue l’objet d’une Sentinelle qui implique une vingtaine de cultivateurs et d’horticulteurs, d’amateurs et de professionnels. La plante de la Bamberger Hörnla est petite, très délicate, avec des feuilles très fines et des fleurs blanches, et a besoin d’un sol léger et riche en éléments nutritifs. Le tubercule a une peau lisse et soyeuse, de couleur beige clair avec des petites rainures rougeâtres, tandis que la chair a une couleur jaune foncé, au goût intense et d’une consistance unique, souvent appelée speckig (qui signifie littéralement « graisseuse »), très compact, même après la cuisson. Hörnla, signifie « corne » et fait référence à la forme des tubercules : petits, de 3 à 10 cm de long, d’une épaisseur ne dépassant pas les 4 cm. En cuisine la Hörnla Bamberger n’est pas reléguée à la fonction de légume d’accompagnement : sa consistance et son léger goût de noisettes la rendent idéale pour la recette principale régionale, la salade de pommes de terre. Il existe de nombreuses variantes. Mais que la pomme de terre soit cuite dans un bouillon ou dans l’eau, et qu’on y ajoute des concombres, de l’oignon ou des œufs durs, à Bamberg, pour préparer une bonne Kartoffelsalat, il faut la Hörnla.

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BiODiVerSiTÉ ArCHe Du gOûT

Les pommes de terre DE l’aRchE Du GOûT

itaLie LIGURIE Pomme de terre quarantina Arrière-pays génois, les Apennins de Savone et de La Spezia White Torriglia, Montoggio blanc, blanc Reppia Quarantaine ou blanc… sont les différents noms donnés à la plus ancienne et traditionnelle pomme de terre de l’arrière-pays génois. Adaptée aux sols sablonneux dans les montagnes, elle ne peut se cultiver qu’au-dessus de 300 mètres, elle a une peau lisse de couleur claire, une chair blanche ainsi qu’une texture fine et compacte. Son goût est excellent, propice à toutes les préparations culinaires, idéale pour le stockfish et le ragoût.

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TOSCANE Pomme de terre rouge de cetica Ville de Cetica (région d’Arezzo) La pomme de terre rouge de Cetica est une variété ancienne, dont la culture s’est développée dans le Pratomagno Casentinese au début du siècle dernier. Elle a une forme arrondie, voire sphérique, une peau rouge vif et une chair blanche et compacte avec des petites nuances rougeâtres. Elle résiste bien à la cuisson et est idéale pour la préparation des gnocchi et une autre spécialité du Casentino, les tortelli de pommes de terre.

aLLemaGne Pomme de terre bamberg (sentinelle) Franconie, Bavière Ces tubercules sont petits, de 3 à 10 cm de long, 1,5 à 4 cm d’épaisseur, et ont une forme de corne, d’où leur nom de Hörnla. Leur peau est lisse et soyeuse, de couleur claire avec des stries rouges. Leur chair est jaune foncé, et son goût rappelle les noisettes. Sa consistance unique et souvent appelée speckig (« graisseuse »). Elle est très compacte, même après la cuisson.

Grande-bretaGne Pommes de terre Jersey royal L’Île de Jersey, Canal Petite (sa forme rappelle celle d’un rein) à la peau fine et fragile, elle a une chair ferme et compacte. En saison, de mars à juin, son goût est parfumé et rustique, presque terreux.

ArCHiViO SLOw FOOD

esPaGne Les villages de Nigüelas et de Güéjar-Sierra, région montagneuse de la Sierra Nevada Pommes de terre méditerranéennes de haute montagne connue sous le nom de « flocon de neige » dans la sierra nevada La pomme de terre méditerranéenne de haute montagne est cultivée dans la chaîne montagneuse de la Sierra Nevada (entre 1000 et 2000 m d’altitude) depuis le xviiie et xixe siècles. De taille moyenne, elle a une forme arrondie, bosselée. La peau est de couleur ivoire terre, l’intérieur est très blanc, raison pour laquelle cette pomme de terre est appelée « flocon de neige », typique des tubercules de haute montagne.

Pommes de terre Gorbea Plaine d’Alava les petites cultures de montagnes d’Alava La culture de la pomme de terre Gorbea, typique du territoire d’Alava (Pays Basque), remonte au xixe siècle. De forme arrondie, elle a une peau jaune pâle très fine, une chair blanche et un goût excellent.

Pommes de terre bufet Comarca d’Osona, Garrotxa, Ripollès, Cerdagne, Urgell, Solsonès C’est la pomme de terre la plus adaptée aux terres fertiles des comarques espagnoles. Il existe deux variétés de ce tubercule de montagne : la Bufet blanche (la plus connue) et la Bufet violette (d’un meilleur goût, mais en danger d’extinction). Son aspect extérieur est irrégulier, caractérisé par la présence de bourgeons ou yeux de taille moyenne. Elle a une consistance crémeuse et très aromatique, avec une tendance sucrée qui rappelle les châtaignes.

États-unis Pommes de terre ozette (sentinelle) La région nord-ouest de l’État de Washington Les principaux caractères organoleptiques de cette pomme de terre de forme bosselée sont une chair compacte, une texture crémeuse, une peau fine et un goût de noisette et de sous-bois.

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ÉDUCA

M. MAreNgo/ArCHivio SLow Food

ÉDUCATION

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ATION 89

ÉdUCATioN ÉCoLe

EUrOpE

N o u v e l l e s

h a b i t u d e s

a l i m e N ta i r e s

Appétits

D’EUrOpE Certes, il est possible de bien manger avec peu de moyens. Mais on ne peut nier que la culture et l’économie contribuent à déterminer le contenu de nos assiettes. La preuve : l’obésité la plus répandue et la consommation la plus faible de fruits et légumes se retrouvent chez les plus démunis. Comment impliquer la société tout entière pour améliorer les habitudes nutritives ? Une réponse est sans aucun doute l’éducation alimentaire et gustative, à mettre en place dans les écoles. C’est en effet pendant l’enfance que se forment les goûts et les comportements alimentaires. Mais comment l’enseigner ? Très souvent, l’accent est mis sur la santé, ce qui génère des angoisses liées à la nourriture et occulte la dimension de la culture et du plaisir.

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En 2009, un réseau de cantines scolaires s’est formé pour réunir leurs efforts et partager leurs expériences dans le but d’améliorer l’alimentation des élèves. Grâce au soutien de la Commission Européenne, ce réseau, connu sous le nom d’European Schools for Healthy Food (Écoles européennes pour une alimentation saine), rassemble aujourd’hui dix pays européens de l’Est à l’Ouest du continent. Les contextes géographiques et culturels sont extrêmement variés. En Irlande, les écoles n’offrent que très rarement un service de restauration. Élèves et professeurs achètent ou apportent leur repas. En France, au contraire, l’État mène une campagne pour promouvoir l’utilisation d’aliments issus de l’agriculture biologique dans la restauration

ArCHivo SLow Food

mAriAgiuliA mAriAni

Tous les liens y Food

scolaire. En Lettonie, le principal problème est la rareté des fonds et des produits locaux. Les denrées alimentaires y sont habituellement importées par le biais de grandes plates-formes de distribution. Dans la plupart des écoles du réseau, l’outil pédagogique indispensable est le jardin potager de l’école. Celui-ci permet d’initier les enfants à la terre et de leur enseigner les saisons, les variétés locales, le respect envers les activités agricoles, le travail de groupe et l’échange intergénérationnel. Ainsi que le plaisir de récolter et de manger ce qui a été semé ou planté de ses propres mains. L’autre approche consiste à utiliser les différents sens : les entraîner à goûter avec attention est un facteur déterminant pour l’instauration de modèles alimentaires positifs. On sensibilise les

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enfants à savourer la nourriture, qui peut devenir une vraie source de plaisir. Grâce au kit d’éducation, « Aux origines du goût », conçu et traduit par Slow Food en 12 langues, toutes les écoles du réseau ont commencé à intégrer l’éducation des cinq sens dans leurs programmes scolaires. Le kit contient également des informations sur la façon d’améliorer la qualité et la durabilité du service de restauration dans ses différents aspects : de l’approvisionnement à l’élimination des déchets. Après la présentation des premiers résultats de Terra Madre 2010, des séminaires régionaux ont été organisés dans dix pays participants. Ces rencontres ont eu pour double objectif de promouvoir les meilleurs exemples en Europe et de contribuer à renforcer le réseau des European Schools for Healthy Food.

ArCHivio SLow Food, © M. PoSzoNy

Health European Schools for

Pour en savoir plus Les écoles impliquées dans le réseau European Schools for Healthy Food peuvent rester en contact et s’échanger informations, photos et vidéos sur le site The Dream Canteen. Le kit d’éducation « Aux origines du goût » est un des différents outils d’éducation alimentaire et du goût réalisés par Slow Food.

Les projets en roumanie, en BuLgarie et en irLande du nord À l’école maternelle de Turda, en roumanie, des enseignants et des bénévoles de Slow Food cultivent leur propre jardin potager pour en faire ainsi un véritable outil éducatif sur les aliments bons, propres et justes. Les bénéficiaires sont plus de 40 enfants, entre 4 et 7 ans. Le projet Slow Food dans les cantines scolaires est en train de se développer dans huit autres écoles limitrophes, fréquentées par 200 étudiants, enseignants et 30 bénévoles. en outre, Slow Food Turda organisera la youth european for Sustainable Food, une école d’été (summer school) pour sensibiliser les enfants à la philosophie Slow Food et au réseau Terra Madre. en Bulgarie, dans l’école primaire de Tcherni vit, village balkan, l’éducation au goût est enseignée et un recueil de recettes pour la préparation de conserves typiques de la région est en cours de réalisation. À la cantine, on mange avec un budget très serré : 30 centimes sont payés par les étudiants et autant par l’État. À ce tarif, on pourrait à peine proposer une assiette de frites, mais les cuisiniers parviennent à s’en sortir en cuisinant les aliments locaux. en irlande du Nord, un groupe d’étudiants de Lagan College de Belfast, soutenu par le Convivium local, travaille à mettre davantage de produits locaux à disposition dans les cantines. il s’occupe également de la gestion des déchets et encourage les moments d’éducation au goût et à la culture des légumes.

© gASTroMoTivA

ÉdUCATioN SoCieTÉ

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gAstromOTIvA liA poggio

David Hertz, chef de Terra Madre, professeur de cuisine et entrepreneur social, a un rêve : encourager et aider des personnes en difficulté à se construire un avenir dans le secteur de la restauration. C’est pourquoi, depuis 2005, il s’efforce de venir en aide à des jeunes défavorisés de la banlieue de São Paulo, la plus grande ville du Brésil. Son projet, Gastromotiva, les forme et leur permet de lancer localement des activités durables dans le secteur de la gastronomie. David Hertz a récemment ouvert son propre convivium Slow Food pour défendre le principe de la nourriture bonne, propre et juste dans ces communautés. « Nous voulions utiliser la nourriture, langage universel pour l’ensemble de l’humanité, comme un outil social afin de donner aux jeunes, dans des situations de malaise social et privés de formation, la possibilité de devenir une génération d’entrepreneurs capables de sortir leurs familles et leurs communautés de la pauvreté et de la faim », explique Hertz. Chaque semestre Gastromotiva offre 30 places à des jeunes défavorisés dans son cours de cuisine qui propose des leçons pratiques et théoriques, des activités de développement des aptitudes personnelles et des visites pédagogiques dans les entreprises. Les élèves apprennent des techniques culinaires basées sur la cuisine régionale traditionnelle brésilienne et sur les concepts et les valeurs de l’écogastronomie ; les thèmes du programme comprennent gestion, recyclage des déchets ali-

mentaires, agriculture biodynamique et restauration. « La mission de Gastromotiva est de préparer ses étudiants à un métier et de leur en trouver un » ajoute Hertz. Pour les meilleurs, l’organisation met chaque année deux bourses d’études universitaires à disposition. InItIatIve socIale « La formation met l’accent sur le rôle et les responsabilités de chacun dans la société, et elle constitue un facteur clé qui permet de donner aux jeunes d’aujourd’hui la possibilité de changer leur situation et leur avenir », affirme Hertz, qui, après avoir parcouru le monde, s’est installé à São Paolo, non en raison des débouchés professionnels qui s’offraient à lui, mais dans l’espoir de réaliser son rêve de travailler avec la population pauvre d’une grande ville. Parallèlement à la formation professionnelle, une pépinière d’entreprises a été créée pour soutenir les étudiants qui veulent lancer des activités dans le secteur alimentaire capables de créer des emplois dans les régions pauvres. Grâce à cette aide, un groupe de jeunes d’une favela locale a créé un service de traiteur, et espère attirer des investisseurs pour au moins six nouvelles activités à l’année ce qui créerait, au cours des cinq prochaines années, plus de 500 emplois à São Paulo. La branche commerciale de l’organisation, une entreprise de traiteur, réinvestit 100 % des bénéfices dans les activités à but non lucratif. L’entreprise se spécialise

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ÉdUCATioN SoCieTÉ

Visitez le blog de la Gastromotiva, riche en actualités et en vidéos. Pour plus d’informations, vous pouvez écrire à David Hertz, et Duarte Szeles Bogado Renata, responsable du Convivium Gastromotiva de São Paolo. 96

ALMANACH

© g. BerNd, © r.SToCkLer/NA LATA

Pour en savoir plus

Tous les liens Gastromotiva

dans les événements sociaux et corporatifs, et a fourni ses services à Terra Madre Brésil en mars 2010. « Pour ne pas juste attirer l’attention sur les produits frais et biologiques, nous essayons d’utiliser des aliments en voie d’extinction comme les noix Baru ou la gelée d’umbu, et nous sommes en train de planifier une chaîne pour la production d’aliments durables en collaboration avec les petits producteurs locaux. » Le convivium Gastromotiva, créé il y a quelques mois et géré par des étudiants, est né pour apporter des informations et des activités socialement

utiles dans les communautés à faible revenu avec la conviction que chacun a le droit à une nourriture bonne, propre et juste. Le convivium travaillera sur des projets tels que l’éducation des sens dans les communautés locales. Gastromotiva recherche actuellement des partenaires et des sponsors pour 2011 et 2012 parmi les organisations brésiliennes et internationales. Son objectif à long terme est de reproduire ce modèle dans d’autres villes brésiliennes et dans le monde, afin d’offrir des possibilités de croissance professionnelle pour les jeunes les plus démunis.

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ÉdUCATioN viLLe

ITAlIE u N e

a g r i c u lt u r e

d e

p r o x i m i t é

nourrir

mIlAN

Nutrire Milano, selon Slow Food, signifie faire une réelle expérience territoriale. L’idée est en effet de reconstruire dans cette ville des possibilités d’échange avec la banlieue et le Parc agricole du sud de Milan, à travers une chaîne alimentaire de qualité. Une bonne façon de bien consommer les produits locaux et de célébrer et représenter la plus urbaine des villes italiennes, siège de l’Expo 2015. Trois projets pilotes ont été lancés. Le premier est le Marché de la Terre de Milan, qui fait partie du réseau international des marchés agricoles de Slow Food dont 10 éditions ont déjà été réalisées au Parc Vittorio Formentano. À chacune d’elles, quarante-cinq producteurs viennent se réunir pour participer à ce programme provenant principalement du Parc agricole du Sud de Milan et des régions agricoles de Milan, Lodi, Bergame, Monza et Brianza, Lecco, Côme, Varese et Pavie, dans un rayon de 40 km. Le Marché de la Terre de Milan a pour ob-

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jectif de devenir le lieu de rencontre privilégié entre la campagne et la ville. Le deuxième projet est la reconstruction d’une courte chaîne de production et d’approvisionnement de froment, de farine et de pain, sur le territoire du Parc agricole du Sud de Milan. Grâce à cette chaîne contrôlée, on peut accorder un prix juste et garanti aux entreprises qui s’engagent à produire des graines de qualité favorables à l’environnement. Pour les citoyens, à travers la réduction des étapes intermédiaires, il est possible d’acheter un excellent pain artisanal à un prix raisonnable. La promotion du secteur des fruits et légumes du Parc agricole du Sud de Milan est au cœur du troisième projet pilote. L’objectif est d’améliorer la production des légumes et des fruits, et de réaliser des services de distribution en faveur de la ville, grâce à des méthodes agricoles à faible impact environnemental, afin de préserver la biodiversité du parc

M. MAreNgo/ArCHivio SLow Food

lucA bernArdini

SLow Food ArCHive

Le MArCHÉ de LA Terre de MiLAN A ÉTÉ iNAUgUrÉ Le 12 dÉCeMBre 2009. AUjoUrd’HUi, 45 ProdUCTeUrS SoNT iMPLiqUÉS, eT qUeLqUeS SeNTiNeLLeS SLow Food ÉTAieNT PrÉSeNTeS.

Pour en savoir plus Une grande ville peut être le territoire d’excellentes productions et de matières premières de qualité, le lieu où l’on rencontre producteurs et coproducteurs. C’est ce qu’ont mis en évidence les trois Ateliers du Goût, intitulé « Nourrir la ville », organisés au Salon du Goût de Turin de 2010, et dédiés respectivement à Paris, Berlin et Milan. Vous pouvez lire le compte-rendu des trois réunions/ dégustations du journaliste Pascale Brevet, publié sur le site du magazine américain The Atlantic. 99

ÉdUCATioN viLLe

M. MAreNgo/ArCHivio SLow Food

Le MArCHÉ de LA Terre oFFre UNe oCCASioN de rAPProCHer LA rÉALiTÉ MÉTroPoLiTAiNe À CeLLe d’UNe CAMPAgNe voiSiNe iNCoNNUe PoUr LA MAjoriTÉ deS CiTAdiNS.

et d’accroître sa valeur paysagère. Ce programme démarrera en 2011. Les premières vraies récoltes verront le jour au plus tard en 2015, juste à temps pour l’Expo. Pour la deuxième année de Nutrire Milano, on verra se mettre en place la filière viande. La première étape sera, dans le cadre du projet des Sentinelles Slow Food, la restauration et la valorisation de la Varzese, la seule race bovine autochtone de la Lombardie. On prévoit également de proposer un panier bio (Cassetta del contadino), un

Tous les liens Nutrire Milano Expo 2015 Milan M arché de la Terre de

service de livraison hebdomadaire de produits frais du terroir. Par ailleurs, une plateforme multimédia a été réalisée. Elle comprend : des renseignements sur le projet et les étapes de réalisation avec la publication de données chiffrées ; des fiches d’information sur les producteurs ; des cartes thématiques du territoire ; des calendriers des événements ; des fonctions de navigation sociale et des flux RSS ; des fonctions de commentaires sur les pages ; des forums de discussion ; des blogs.

ÉdUCATioN SoCiÉTÉ

rOyAUmE-UNI

slow Food baby : graNde ambitioN pour les plus petits

lEs fINEs pApIllEs du nouveAu-né Les familles qui attendent un enfant sont bombardées par une quantité impressionnante d’informations sur la nutrition des nouveaux nés. La liste de ce que vous devez et ne devez pas manger pendant la grossesse et sur la meilleure façon de nourrir son bébé durant la première année de sa vie est souvent contradictoire, favorisant confusion et incertitude. Les ateliers Slow Food Baby, conçus par Slow Food UK, se proposent de faire en sorte que le plaisir de la nourriture soit partagé par les parents, les enfants et la famille élargie. Bien que l’élaboration de la partie théorique a bénéficié de recommandations théori-

102

ALMANACH

ques de nutritionnistes, elle n’est pas destinée à fournir des conseils nutritionnels spécifiques, mais plutôt de mettre l’accent sur l’importance du goût et de sa connexion à des choix éclairés et plus sains. Informer les familles permet de les rendre plus confiantes dans leurs choix alimentaires et nutritionnels, à mesure que leurs modes de vie et habitudes alimentaires changent et que leurs enfants grandissent. L’atelier souligne également l’importance de développer le goût, surtout pendant la première année de vie, et les facteurs clé pour le faire. Les supports réalisés, qui recourent à des personnages de bande dessinée,

© P. vieSi

Jen mArsden

Pour en savoir plus Slow Food UK soutient différents projets d’éducation alimentaire pour les enfants et les jeunes comme Taste Adventure (l’Aventure du goût), un parcours des sens à travers le pays, et Slow Food on Campus (Slow Food à l’université), qui encourage étudiants et universitaires à réfléchir à des modifications concrètes des pratiques alimentaires actuelles.

Tous les liens Slow Food Baby

sont accessibles à un large public, avec des recettes appropriées pour toutes les cultures, budgets et communautés. « Au huitième mois de leur vie utérine, les enfants possèdent toutes les papilles gustatives nécessaires à leur vie d’adulte et sont capables de distinguer les saveurs », affirme Rhonda Smith, conseillère à Slow Food UK. « Il a été démontré que l’introduction d’aliments et de textures de toutes sortes au cours de la période de sevrage, à partir du sixième mois après la naissance, permet à votre enfant de continuer l’aventure gustative et de jeter ainsi les bases pour pouvoir apprécier une grande variété d’aliments

tout au long de sa vie. » Le laboratoire, divisé en cinq zones différentes — personnel, plaisir, jeu, patience, et personnes — a été élaboré en collaboration avec des groupes de parents, des familles qui attendent un enfant, des experts et des praticiens. Les membres de Londres, Ludlow et Solent ont pris part à un projet pilote qui a fourni de précieux conseils pour pouvoir passer à la prochaine étape du développement de l’initiative. Lancé au printemps dernier, Slow Food Baby est impliqué dans la recherche de participations et de soutien tant au niveau national que régional.

103

ÉdUCATioN rÉFLÉxioNS

ITAlIE l e

m a N i F e s t e

p o u r

l ’ é d u c at i o N

d e

s l o w

F o o d

construire UN AvENIr

Nous vivons dans un monde fait de relations intangibles, de communautés virtuelles et de besoins imposés. Nos sociétés multiculturelles, axées sur des modèles standardisés, étouffent tout savoir individuel. Notre paysage politique est verrouillé. Les gouvernements — le cas italien est emblématique — délaissent la recherche et la culture, stérilisent la pédagogie prodiguée par l’école publique et reprennent à leur compte les logiques d’un marché prônant la flexibilité, c’est-à-dire la précarité, pour les jeunes. Il serait temps de porter un regard à la fois critique et constructif sur les logiques qui animent et caractérisent cette réalité. Et c’est sur l’éducation que doit principalement porter notre effort. Pour nous, membres de Slow Food, éduquer signifie remettre en cause le présent avec une énergie renouvelée pour mieux construire l’avenir. Lorsque les institutions ne suffisent pas à répondre aux besoins de formation, il ne faut pas hésiter à proposer des parcours éducatifs complémentaires

104

ALMANACH

et à inclure, en synergie, les autres acteurs du territoire : associations, coopératives, centres culturels – voire les familles. Il est important de rendre aux communautés leur rôle de garants de la transmission de tous les savoirs liés à la culture matérielle et sociale. Redevenues des centres névralgiques, elles pourront réactiver des économies saines et vertueuses, en particulier dans les champs de la culture et des économies liées à l’alimentation. Voici des années que nous nous sommes engagés en faveur de l’éducation alimentaire et gustative, et ce malgré un contexte valorisant un modèle alimentaire standardisé. Nous le faisons en impliquant les acteurs de la chaîne alimentaire de produits concrets, sur des territoires précis, en proposant des dégustations et des moments de connaissance directe du « système alimentaire », en promouvant l’échange des savoirs, la comparaison entre les cultures et la valorisation des diversités. Ce sont des activités éducatives

M. MAreNgo/ArCHivio SLow Food

vAleriA cometti

introduction au manifeste pour L’éducation de sLow food Conscients que l’éducation et la formation des prochaines générations ne peuvent être entièrement assumées par les institutions existantes, nous pensons qu’un complément de pédagogie est nécessaire, et que celui-ci doit impliquer l’ensemble des acteurs du territoire, en synergie. L’éducation est une responsabilité individuelle et publique. elle est à la fois intime et collective. il revient aux écoles, aux politiques, aux associations, aux coopératives, aux centres culturels, aux familles et à toute entité volontaire de la prendre en charge et de la mettre en pratique. il est essentiel de restituer aux communautés leur rôle dans ce processus. Ainsi, elles redeviendront les garantes de la transmission de tous les savoirs liés à la culture matérielle et sociale, dont la culture de l’alimentation. La nourriture constitue en effet un véhicule idéal pour expérimenter et promouvoir une éducation articulée, complexe et créative, donnant de la valeur à l’interdépendance, à l’environnement et au bien commun. Slow Food estime que l’éducation devrait être un droit de tous, sans distinction de sexe, de langue, d’ethnie, ou de religion. elle doit être accessible partout et à tous les âges. N’attendons pas la prochaine génération pour améliorer ce qui peut l’être dès aujourd’hui. Seule une population préparée, critique et motivée peut permettre à chaque pays de donner le meilleur de soi. Le droit à l’éducation ne peut se résumer à une déclaration abstraite : des grands principes sans application concrète restent lettre morte. 105

ÉdUCATioN rÉFLÉxioNS

Pour en savoir plus

conçues pour être agréables et pour stimuler l’appréciation critique et, nous l’espérons, pour favoriser des consommations plus durables. La nourriture constitue le véhicule idéal pour expérimenter et promouvoir une éducation articulée, complexe et créative, valorisant les principes d’interdépendance, d’équilibre entre l’homme et la nature et le respect du bien commun.

Tous les liens L’éducation selon Slow Food M anifeste pour l’éducation 106

ALMANACH

agIr sans attendre Promouvoir les changements et les comportements alimentaires sains et responsables exige, de notre part, une forte conscience de ce que nous proposons quand nous créons et menons une activité pédagogique. Pour cette raison, nous avons lancé il y a deux ans un débat au niveau international, sur le sens d’« éduquer et former » à Slow Food. Le Manifeste pour l’éducation est le premier fruit de cette réflexion. Ce do-

cument ouvert et dynamique est l’outil de référence pour ceux qui exercent une activité pédagogique dans notre association. Il identifie les modèles et les principes pédagogiques auxquels nous aspirons, de l’approche socioculturelle aux expériences des Écoles Actives, sans oublier les théories de John Dewey et de Kurt Lewin, et quitte à reformuler l’approche constructiviste de façon originale en quatorze points qui résument notre conception de l’éducation. Dans ce manifeste, nous suggérons un changement culturel radical, en promouvant une éducation participative, accessible à tous, « partout et à tous les âges, afin que l’on n’attende pas la prochaine génération pour améliorer ce qui peut l’être dès aujourd’hui ». Nous sommes absolument convaincus que « seule une population préparée, critique et motivée peut permettre à chaque pays de donner le meilleur de soi. »

M. MAreNgo/ArCHivio SLow Food

Le Manifeste pour l’éducation, adopté lors du Conseil international de Slow Food à Hemavan (juin 2010), a également été partagé et discuté avec le réseau Terra Madre pendant les groupes de comparaison thématiques, qui se sont tenus à Turin en octobre 2010.

manifeste pour L’é

ducation

L’éducation selon Slo w Food... • est un plaisir, une occasion ludique et c onviviale qui permet de se sentir bien, d’a pprendre avec légèr eté • enseigne la valeur de la lenteur, le respe ct de ses propres rythmes et de ceux des autres • c’est apprendre e n faisant, car l’expér ience directe alimen et renforce l’apprent te issage • valorise la divers ité des cultures, des savoirs, des compétences et des points de vue • reconnaît les bes oins et stimule les int érêts et les motivations de chac un • affronte les sujet s dans leur complexit é, en mettant l’accen sur le rapport entre t les différentes discip lines et domaines impliqués. • c’est prendre le t emps qu intérioriser et élabore ’il faut pour comprendre, r une vision propre • encourage la par ticipation en facilitan t le dialo libre expression, la co opération, l’écoute et gue, la réciproque l’acceptation • est un parcours i ntime q expérientielle, affectiv ui intègre la dimension cognitive, e et émotive • se nourrit du cont exte dans lequel elle e st si la mémoire, les savo irs et les cultures loc tuée, et valorise ales • facilite la mise en lien de réseaux loca ux et renforce le sens de la communauté. • développe la cons cience de soi, de notre propre rôle et de nos propres actions • stimule la curiosit é et entraîne l’intuition et le sens critique • promeut le change ment en générant de s p en comportements nouv eaux et plus responsa sées et des bles.

107

Annexe

© A. PeroLi

Ann 108

ALMANACH

nexe 109

ANNexe

Les sentineLLes sLow Food à trAvers le monde 149 projets dAns 51 pAys 193 sentinelles en itAlie D e

m a i

2 0 1 0 )

Western Europe Austria

• Lungau Tauern Rye • Pit Cabbage • Vienna Gemischter Satz Wine • Wiesenwienerwald Chequer Tree • Wachauer Saffron

Cyprus

• Tsamarella Salted Goat’s Meat

France

• Barèges-Gavarnie Mutton • Béarn Mountain Pasture Cheese • Breton Pie Noir Cow • Gascon Chicken • Gers Mirandaise Ox • Haute-Provence Einkorn • Lorient Cabbage • Noir de Bigorre Pig • Pardailhan Black Turnip • Pélardon Affiné Cheese • Roussillon Dry Rancio Wine • Rove Brousse Goat Cheese • Saint-Flour Golden Lentil

Germany

• Bamberger Hörnla Potato • Champagner-Bratbirne Perry • Franconian Grünkern Spelt • Limpurg Ox

Great Britain • Artisanal Somerset Cheddar • Fal Oyster • Gloucester Cheese • Old Gloucester Beef • Three Counties Perry

110

ALMANACH

Ireland

• Irish Raw Milk Cheeses

Netherlands

• Aged Artisanal Gouda • Chaam Chicken • Drenthe Heath Sheep • Kempen Heath Sheep • Lakenvelder Cattle • Limburg Syrup • Oosterschelde Lobster • Texel Sheep Cheese

Norway

• Artisan Sognefjord Geitost Cheese • Hedmark and Oppland Counties Pultost Cheese • Møre og Romsdal Salted Cod • Sørøya Island Stockfish • Sunnmøre Cured and Smoked Herrings • Villsau Sheep

Portugal

• Mirandesa Sausage

Spain • Ballobar Capers • Carranzana Cara Negra Sheep Cheese • Euskal Txerria Pig • Ganxet Bean • Jiloca Saffron • Maestrat Millenary Trees Extra-Virgin Olive Oil • Mungia Talo Corn Cake • Sitges Malvasia Wine • Zalla Violet Onion Sweden

• Jämtland Cellar Matured Goat Cheese • Öland Island Brown Beans • Reindeer Suovas (Smoked Meat)

P. PANzerA

( D o n n é e s

Romania

Uzbekistan

Lebanon

• Jabal ‘Amel Freekeh Corn • Kechek el Fouqara Cheese

North America Canada • Red Fife Wheat • United States of America • American Raw Milk Cheese • Anishinaabeg Manoomin Wild Rice • Cape May Oyster • Makah Ozette Potato • Navajo-Churro Sheep • Sebastopol Gravenstein Apple

• Rosson Wild Fruits and Infusions

Bosnia and Herzegovina

• Bostanlyk Ancient Varieties of Almonds

Middle-East Afghanistan • Herat Abjosh Raisin

Central and Eastern Europe Armenia • Motal Cheese Belarus

• Bugeci Mountains Brânza de Burduf Cheese • Saxon Village Preserves • Pamir Mulberry

• Cheese in a Sack • Pozegaca Plum Slatko Preserve

Bulgaria

• Karakachan Sheep • Smilyan Beans • Tcherni Vit Green Cheese

Latin America Argentina • Quebrada de Humahuaca Andean Potatoes • Yacón Root

Croatia

• Ljubitovica Šarak Garlic

Bolivia

• Pando Barzil Nut

Georgia

• Georgian Wine in Jars

Brazil

Hungary

• Mangalica Sausage

• Aratu Crab • Baru Nut • Juçara Palm Heart • Piancò Valley Red Rice • Sateré-Mawé Canudo Nectar • Sateré-Mawé Native Waranà Fruit • Serra Catarinense Araucaria Nut • Umbu Fruit

Macedonia Poland

112

• Wild Fig Slatko Preserve

• Oscypek Cheese • Polish Mead

ALMANACH

© o.MigLiore, F. SottiLe, © P.VieSi

• Bedretto Valley Pastefrolle Cookies • Dörrbohnen Runner Beans • Farina Bóna Flour • Locarno Valley Cicitt Sausage • Muggio Valley Zincarlin Cheese • Müstair Valley Rye Bread • Pays d’Enhaut Chantzet Sausage • Raw Milk Butter • Raw Milk Vacherin Friburgeois Cheese • Swiss Brenzerkirsch Cherry Brandy • Tafeljura Plum Orchards • Traditional Matured Emmentaler Cheese • Traditional Valais Rye Bread

Switzerland

Chile

• Blue Egg Chicken • Merkèn Spice • Purén White Strawberry • Robinson Crusoe Island Seafood

Dominican Republic

• Nacional Cacao

Ecuador Guatemala

• Huehuetenango Highlands Coffee • Ixcán Cardamom • Honduras • Campara Mountain Coffee

• Chinantla Vanilla • Chontalpa Cacao • Seri Fire Roasted Mesquite • Tehuacán Amaranth

Mexico

Peru

• Sierra Cafetalera Coffee

• Andean Kañihua Grass • Pampacorral Sweet Potatoes • San Marcos Andean Fruit

Africa Cape Verde

Madagascar

Mali

• Dogon Somè Shallots

Egypt

• Siwa Date

Ethiopia

• Harenna Forest Wild Coffee • Wenchi Volcano Honey • Wukro White Honey

Kenya

• Lare Pumpkin • Mau Forest Dried Nettle • Molo Mushunu Chicken • Nzoia River Reed Salt • Pokot Ash Yoghurt

• Imraguen Women’s Mullet Bottarga

Mauritania Morocco

• Alnif Cumin • Argan Oil • Taliouine Saffron • Zerradoun Salt • Saloum Island Wild Fruit Juices

Senegal

South Africa

• Zulu Sheep

Asia China

• Tibetan Plateau Yak Cheese

India

• Dehraduni Basmati Rice

Japan

• Unzen Takana Vegetable

Malaysia • Matured Planalto de Bolona Goat Cheese

• Alaotra Lake Dista Rice • Mananara Vanilla

• Bario Rice • Rimbàs Black Pepper

New Caledonia

• Lifou Island Taro and Yam

Pour en savoir plus : Fondation Slow Food pour la Biodiversité

113

ANNexe

m a n i f e s t a t i o n s , c a m p a g n e s , à u n r y t h m e l e n t

r e n c o n t r e s

temps Forts

Europe CRoAtIE • Ston (Dubrovnik) Kino oKus – Festival du cinéma et du goût 9-12 septembre L’association Kino Okus et Slow Food Dubrovnik organisent le premier festival dédié aux courts métrages et documentaires sur l’alimentation. Un espace éducatif et un marché d’agriculteurs du littoral dalmate sont prévus.

114

ALMANACH

ALLEMAGNE • Stuttgart slow Food messe 2-5 avril Manifestation commerciale dédiée au bon, propre et juste, déclinée selon l’œnogastronomie allemande. Il s’agissait de la quatrième édition, accueillant environ 40 000 visiteurs. Une vidéo décrit l’événement.

ItALIE • Vigevano i sapori del riso (les saveurs du riz) 17- 19 septembre Des mots, des voix, des images et des saveurs consacrés à la culture du riz en plein cœur de la plus grande région de production européenne. La manifestation est organisée en collaboration avec Slow Food Lombardie.

GRèCE • Athènes eat-in 28 décembre Dans le quartier Thiseio, on célèbre le premier Eat-in grec grâce à la collaboration du Troo Food Liberation, groupe de militants qui défend le rôle de la nourriture dans nos vies.

ItALIE • Imperia mare terra 18 septembre Les produits typiques et les protagonistes du monde piscicole, vinicole et de l’huile ainsi que ceux de la culture gastronomique de la Ligurie. Créé par Slow Food Ligurie.

ItALIE • Île d’Elbe, Giglio, Capraia archipel slow 10- 12 septembre Une occasion de rencontre et de réflexion avec les producteurs et les pêcheurs des trois îles. Organisée par Slow Food Toscane, la Région Toscane et la Fondation Slow Food pour la Biodiversité. ItALIE • Rovigo terre d’acqua 28-30 mai Réflexion sur les aspects les plus significatifs de l’eau, ses usages et ses caractéristiques pour un développement durable. ItALIE • Turin salon international du goût terra madre 21-25 octobre La 4e rencontre mondiale du réseau de Terra Madre se déroule en même temps que la 8e édition du Salon International du Goût qui célèbre la nourriture de qualité et ceux qui la produisent. Les deux piliers de Slow Food.

ItALIE visite des jardins scolaires du piémont et de la ligurie 26-27 octobre À l’issue de Terra Madre 2010, le délégué haïtien Jean Ronel Vaillant visite quatre écoles primaires participant au projet jardinsécoles (Orto in condotta). Il apparaît que le jardin potager est une réponse au problème de la sécurité alimentaire sur l’île. RoyAUME-UNI • Winchester slow Food on campus (slow Food à l’université) octobre Des activités dans les jardins des campus, des marchés à l’intérieur du campus et une cantine locale. Ce programme, créé par les étudiants, s’est répandu dans neuf groupes étudiants parmi les universités et les collèges du Royaume-Uni. 13 autres sont en préparation.

115

GéoRGIE • Tbilissi terra madre georgia 30-31 juillet Une centaine de délégués de différentes régions ont participé à la première édition de cette rencontre. La productivité des sols, des technologies à faible impact et l’accès au marché étaient au cœur des débats. Les producteurs de la Sentinelle de Vin en amphores étaient présents. INDE • Mumbai mumbai’s First organic Farmers’ marKet (le premier marché des agriculteurs biologiques de bombay) mars Kavita Mukhi, délégué à Terra Madre, fonde le marché des agriculteurs à Bombay. Pour la première fois, les paysans des zones rurales situées autour de la ville peuvent directement vendre directement leurs produits au public. KAzAKHStAN • Alma Aty terra madre KazaKhstan 2 septembre L’agriculture biologique, les traditions alimentaires et la production locale est au cœur de cette manifestation. Agriculteurs, membres d’ONG et experts en nutrition et en génétique ont participé à l’évènement. Pour les étudiants, des activités d’éducation sensorielle.

Amérique Latine ARGENtINE • Buenos Aires terra madre argentina 8-11 juillet Un an après l’événement de 2009 s’ouvre de nouveau un espace de rencontre entre agriculteurs, pêcheurs, producteurs, cuisiniers, étudiants, universitaires et coproducteurs. MExIqUE Et éqUAtEUR échange entre sentinelles 24 mai-2 juin Trois représentants de la Sentinelle du cacao de la Chontalpa visitent les lieux de production et de transformation du cacao Nacional, en Équateur.

©P. VieSi

Asie

Amérique du nord

Afrique

étAtS-UNIS dig in! 25 septembre Day of Action correspond à 180 manifestations simultanées où les gens, d’un bout à l’autre du pays, aident les agriculteurs, construisent des serres et des infrastructures pour les jardins potagers scolaires. Pour redécouvrir le lien avec la terre, la pioche à la main.

éGyPtE • Le Caire journée mondiale de l’environnement 21 juin Le convivium Fayoum accueille à la manifestation plus de 1000 participants dont des étudiants, des groupes environnementaux, des experts et le public. Les produits des communautés de la nourriture égyptiens y sont présentés et des activités éducatives et de dégustations y sont organisées.

étAtS-UNIS Foodcorps mars Slow Food USA et la National Farm to School Network a lancé un programme pour résoudre le problème de l’obésité chez les enfants, en créant une nouvelle génération d’agriculteurs et de responsables de la santé publique.

Pour en savoir plus

Vous voulez en savoir plus ? Consultez la publication mensuelle électronique de Slow Food et Terra Madre adressée à tous les membres.

étHIoPIE wolisso août Un cours sur la gestion des coopératives agricoles, impliquant 24 représentants d’associations d’apiculteurs du réseau « Miels d’Éthiopie », soutenu par Slow Food. KENyA • Espagne échange entre les communautés de producteurs La communauté des producteurs du sel d’Añana, dans le Pays Basque espagnol, visite celle du sel des roseaux de la rivière Nzoia, au Kenya, pour un échange réciproque sur les techniques et sur les méthodes de travail. oUGANDA • Kampala Fruit and juice party 10 avril Environ 200 enfants de 18 écoles cuisinent des fruits locaux pour cette fête. Organisée par le projet éducatif Disc, soutenu par Slow Food.

ANNexe

AU CoeUr

des CHiFFres l e s

f i n a n c e s

e t

l’a s s o c i at i o n

ADHéRENtS INtERNAtIoNAUx 88.468

90.000

83.981

85.000

82.809

80.000 72.241

75.000 70.000 63.929

65.000 59.899

60.000 55.000

51.113

51.678

56.483

50.000 45.000 40.000 35.000 30.000 25.000 20.000 15.000 10.000 5.000 0 2002

2003

2004

2005

2006

Au 31 octobre 2010, Slow Food comptait 82 809 adhérents actifs.

118

ALMANACH

2007

2008

2009

2010

RéPARtItIoN INtERNAtIoNALE DES ADHéRENtS

ASIE Et oCéANIE 5%

ItALIE 31% EURoPE 31%

AMéRIqUE LAtINE 3,5%

AFRIqUE Et MoyEN-oRIENt 2% AMéRIqUE DU NoRD 27,5%

CRoISSAnCE Du noMBRE D’ADhéREnTS DAnS LES pAyS éMERGEnTS 4.854

5.000 4.510

4.500 4.187 3.962

4.000 3.500 3.000 2.500

2.291

2.000 1.500 1.000

843

963

2003

2004

1.182

765

500 0 2002

2005

Dans les pays émergents, la croissance la plus significative du nombre d’adhérents a eu lieu avec Terra Madre 2006.

2006

2007

2008

2009

2010

De 2002 à 2009, leur représentation dans l’association est passée de 1,5 % à près de 6 %.

119

ANNexe

tERRA MADRE : oRIGINE GéoGRAPHIqUE DES PARtICIPANtS ASIE Et oCéANIE 10% AFRIqUE Et MoyEN oRIENt 14%

ASIE Et oCéANIE 7%

2006

2004 AMéRIqUES 32%

AMéRIqUES 30% ASIE Et oCéANIE 9% AFRIqUE Et MoyEN oRIENt 12%

ASIE Et oCéANIE 9% EURoPE 49%

2010 AMéRIqUES 28%

AMéRIqUES 30%

SLoW FooD à tRAVERS LE MoNDE LES CoNVIVIUMS SLoW FooD 113 pays 1380 conviviums LES ADHéRENtS DE SLoW FooD 145 pays tERRA MADRE Et SLoW FooD 161 pays

ALMANACH

EURoPE 49%

AFRIqUE Et MoyEN oRIENt 14%

2008

120

EURoPE 47%

AFRIqUE Et MoyEN oRIENt 14%

EURoPE 46%

tERRA MADRE: PRoFILS DES PARtICIPANtS UNIVERSItAIRES 18% CHEFS Et CUISINIERS 30%

PRoDUCtEURS DES CoMMUNAUtéS DE LA NoURRItURE 77%

GIoVANI 18%

2006 UNIVERSItAIRES 6%

JEUNES 11%

2008

CHEFS Et CUISINIERS 14%

UNIVERSItAIRES 7% CHEFS Et CUISINIERS 11%

2010

PRoDUCtEURS DES CoMMUNAUtéS DE LA NoURRItURE 62%

PRoDUCtEURS DES CoMMUNAUtéS DE LA NoURRItURE 71%

© o. MigLiore, © iSottA DArDiLLi/CoLorS/FAbbriCA

BénéVoLES à TERRA MADRE: 754 En 2008, 1143 En 2010.

Miriam Bacchin, bénévole italienne: « J’ai été si émue par la cérémonie d’ouverture ! »

121

ANNexe

BILAN SLoW FooD 2010 En 2010, Slow Food a fonctionné en disposant d’un budget d’environ 2 181 000 euros, dérivant principalement des frais d’inscription internationaux et des contributions des entités publiques et privées pour la mise en œuvre des projets. Frais d’inscription Contributions pour l’organisation des événements Contributions pour les projets et les dons Contributions pour le réseau des communautés de Terra Madre Autres recettes total des recettes slow Food

ˆ

832.030 50.000 558.452 700.000 41.511 2.181.993

ˆ ˆ ˆ ˆ

ˆ

Activités du développement associatif Projets de coopération Communication Coûts du personnel Coûts structurels Autres coûts total des coûts slow Food

ˆ

ˆ

228.623 550.184 89.634 876.678 268.709 167.966 2.181.794

résultat d’exploitation

ˆ

199

ˆ ˆ ˆ ˆ ˆ

SoURCES DE FINANCEMENt DE SLoW FooD EN 2010 AUtRES RECEttES 2% CoNtRIBUtIoNS PoUR LES CoMMUNAUtéS DE tERRA MADRE 32%

FRAIS D’InSCRIpTIon 38%

CoNtRIBUtIoNS PoUR LES PRoJEtS Et LES DoNS 26%

122

ALMANACH

CoNtRIBUtIoNS PoUR L’oRGAnISATIon DES MANIFEStAtIoNS 2%

Les frais d’inscription ont représenté la principale source de financement de Slow Food (38 %). Des manifestations internationales ont permis de réaliser 2 % de bénéfices, les dons et les contributions pour des projets, de la part des fondations, des associations et des mécènes, ont représenté 26 %. Les contributions pour le réseau de Terra Madre (32 %) sont destinées à couvrir les coûts liés à la coordination et au développement du réseau des communautés de la nourriture.

RéPARtItIoN DES CoûtS DE SLoW FooD EN 2010 DIVERS 8% CoûtS StRUCtURELS 12%

CoûtS DU PERSoNNEL 40%

ACtIVItéS DE DéVELoPPEMENt ASSoCIAtIF 11%

PRoJEtS DE CooPéRAtIoN 25%

CoMMUNICAtIoN 4%

En 2010, les activités de développement associatif (11 % des ressources) ont inclus les coûts des services aux membres, ceux des voyages et de l’accueil. La communication a requis 4 % des ressources, en utilisant comme outils pour les membres les bulletins d’information, les activités liées à la diffusion des thématiques du mouvement. Les projets de coopération ont représenté 25 % des investissements réalisés en 2010. Les bénéficiaires de ces fonds sont les producteurs agricoles des Sentinelles des pays émergents et certaines communautés de la nourriture de Terra Madre où des activités éducatives et des manifestations ont été réalisées. Les ressources humaines représentent le poste de dépenses le plus important (40 %). Les coûts structurels (12 %) correspondent aux locations et aux services publics, aux systèmes d’information et de téléphonie, aux honoraires administratifs. L’entrée « Autres coûts » comprend les coûts relatifs aux frais bancaires et impôts (2 %), la provision pour créances douteuses, la provision pour dépréciation des titres de participation, et la provision pour les catastrophes environnementales qui ont constitué un total de 8 % des coûts.

123

ANNexe

LA FoNDAtIoN SLoW FooD PoUR LA BIoDIVERSIté La Fondation Slow Food pour la Biodiversité s’est engagée à soutenir les communautés de producteurs des Sentinelles et des Marchés de la Terre. Le budget pour 2010 était d’environ 1 195 000 euros et la valeur ajoutée nette, qui est identifiable dans le concept de quantification de l’impact des activités de la Fondation sur le milieu environnant, s’élève pour 2010 à 90 % du total des recettes. Ce pourcentage a été redistribué entre les différents intervenants de la Fondation.

BILAN FoNDAtIoN SLoW FooD PoUR LA BIoDIVERSIté 2010 Recettes des membres Contributions du monde Slow Food Manifestations Recettes des projets 5 ‰ (dons déductibles) Autres recettes total des recettes Fondation slow Food pour la biodiversité Projets de Sentinelles Marchés de la Terre Communication et sensibilisation des communautés Autres projets Coûts du personnel Coûts structurels Taxes total des coûts Fondation slow Food pour la biodiversité résultat d’exploitation

ˆ

518.832 108.358 7.198 417.855 63.893 79.318 1.195.454

ˆ ˆ ˆ ˆ ˆ ˆ ˆ

478.903 35.069 35.363 133.704 365.662 135.381 11.312 1.195.394 ˆ

ˆ ˆ ˆ ˆ ˆ ˆ ˆ

60

RéPARtItIoN DE LA VALEUR AJoUtéE EN 2010 CoMMUNICAtIoN INStItUtIoNNELLE 3%

AUtRES PRoJEtS 13%

INVEStISSEMENt DANS LES SENtINELLES 46%

CoLLABoRAtEURS DE tERRAIN ARCHE 10% DU Goût 1%

CoNtRIBUtIoNS PoUR LES SENtINELLES 29%

FoRMAtIoN SENtINELLES 19%

RéMUNéRAtIoN DU PERSoNNEL 35%

124

ALMANACH

MARCHéS DE LA tERRE 3%

PARtICIPAtIoN AUx MANIFEStAtIoNS 14%

MISSIoNS 9% PRoDUCtIoN DE LA DoCUMENtAtIoN 9%

LA FoNDAtIoN tERRA MADRE Le réseau des communautés de la nourriture est géré par la Fondation Terra Madre, qui au cours de l’année 2010, a réussi à rassembler près de 3 022 000 euros à travers les contributions des partenaires fondateurs et les autres donateurs, publics et privés. La rencontre mondiale Terra Madre 2010 a représenté le principal coût, incluant ceux de l’organisation et la réalisation de la manifestation turinoise ainsi que les frais de voyage et d’accueil des délégués des différentes communautés de la nourriture. Les coûts sont également liés au personnel et au maintien de la structure, qui permettent une constante expansion ainsi que le bon fonctionnement du réseau Terra Madre tout au long de l’année.

BILAN tERRA MADRE 2010 Contributions recueillies pour le soutien de la communauté total des recettes Fondation terra madre Coûts de la manifestation Terra Madre Voyages Coûts de l’accueil Communication institutionnelle Coût du personnel Coûts structurels Autres coûts total des coûts Fondation terra madre résultat d’exploitation

ˆ

3.022.901 3.022.901 ˆ ˆ

ˆ

988.999 846.939 538.609 141.334 804.191 233.844 49.440 3.603.357 ˆ

-580.456

ˆ ˆ ˆ ˆ ˆ ˆ

RéPARtItIoN DES CoûtS DE LA FoNDAtIoN tERRA MADRE EN 2010 ACCUEIL 15% AUtRES CoûtS 1%

VoyAGES 24%

CoûtS DE LA MANIFEStAtIoN tERRA MADRE 28%

CoMMUNICAtIoN 4% CoûtS StRUCtURELS 6% CoûtS DU PERSoNNEL 22%

125

L’oRGAnIGRAMME Le mouvement international Slow Food est coordonnée par un Conseil international et dirigé par un Conseil international. Les positions sont attribuées pour une durée de quatre ans. Le siège international de Slow Food se trouve en Italie (Bra, Piémont). Dans certains pays - Italie, USA, Allemagne, Suisse, France, Japon, Royaume-Uni, les Pays-Bas - l’activité associative est organisée de façon autonome via un leadership national, responsable devant le Comité international de la présidence.

CoMIté INtERNAtIoNAL DE PRéSIDENCE PRéSIDENt Carlo Petrini (Italie) VICE-PRéSIDENtS John Kariuki Mwangi (Kenya) Vandana Shiva (Inde) Alice Waters (USA) SECRétAIRE Paolo di Croce (Italie)

eN 2010, Le CoNSeiL iNterNAtioNAL De SLow FooD A eu Lieu à HeMAVAN DANS Le NorD De LA SuèDe, où Vit Le PeuPLe iNDigèNe SAMi.

126

ALMANACCo

MEMBRES Roberto Burdese (Italie) Gerry Danby (Royaume Uni) Ursula Hudson (Allemagne) Jean Lhéritier (France) Rafael Perez (Suisse) Hans van der Meulen (Pays-Bas) Josh Viertel (USA) Hirotoshi Wako (Japon)

ArCHiVio SLow FooD

ANNexe

CoNSEIL INtERNAtIoNAL* ItALIE Silvio Barbero Massimo Bernacchini Mark Brogiotti Roberto Burdese Daniel Buttignol Valeria Cometti Antonello Del Vecchio Andrea Pezzana étAtS-UNIS Erika Lesser Jeff Roberts Joel Smith Josh Viertel ALLEMAGNE Rupert Ebner Andreas Eichler Lars Jaeger Walter Kress SUISSE Markus Gehri Rafael Perez George romaine RoyAUME-UNI Gerry Danby Louise Smith

JAPoN Yutaka Kayaba Hirotoshi Wako FRANCE Lucien Biolatto Jean Lhéritier

KENyA Samuel Karanja Muhunyu MExIqUE Raul Garciadiego BRéSIL Roberta Sá Marins de

PAyS-BAS Bea Logtenberg Hans van der Meulen

INDE Vandana Shiva

AUStRALIE Ann Shaw Rugie

BULGARIE Dessislava Dimitrova

CANADA Sinclair Philip

REPRéSENtANtE DE LA FoNDAtIoN SLoW FooD PoUR LA BIoDIVERSIté Serena Milan (Italie)

ESPAGNE Mariano Gomez AUtRICHE Manfred Flieser SUèDE Buckard Ola

REPRéSENtANtE DE L’unIVERSITé DES SCIENCES GAStRoNoMIqUES Cynthia Scaffdi (Italie)

IRLANDE Darina Allen

* Tous les membres du Comité international du Bureau sont également membres du Conseil international. Les membres du Conseil international ont été élus en 2007 lors du 5e Congrès international Slow Food Congrès et assumeront leur charge jusqu’au prochain Congrès, en 2012.

Slow Food©

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