Les Asiatiques en Égypte sous les XIIe et XIIIe dynasties (À propos d'un livre récent)...
Les Asiatiques en Égypte sous les XIIe et XIIIe dynasties (À propos d'un livre récent) Author(s): Georges Posener Source: Syria, T. 34, Fasc. 1/2 (1957), pp. 145-163 Published by: Institut Francais du Proche-Orient Stable URL: http://www.jstor.org/stable/4197025 . Accessed: 16/06/2011 07:17 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of JSTOR's Terms and Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp. JSTOR's Terms and Conditions of Use provides, in part, that unless you have obtained prior permission, you may not download an entire issue of a journal or multiple copies of articles, and you may use content in the JSTOR archive only for your personal, non-commercial use. Please contact the publisher regarding any further use of this work. Publisher contact information may be obtained at . http://www.jstor.org/action/showPublisher?publisherCode=ifpo. . Each copy of any part of a JSTOR transmission must contain the same copyright notice that appears on the screen or printed page of such transmission. JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact
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IES ASIATIQUESEN EGYIPTE SOUS [ES Xile ET Xiiie DYNASTIES PNR
GEORGES
POSENER
(a propos d'un licre recent) (1) A la fin du siecle passe, un egyptologue Charles Edwin
caine,
a effectue
Wilbour,
il a acquis de nombreux
au cours desquels
en 1896, les antiquites
tionneur,
et ces derniers les donnerent
amateur, plusieurs papyrus.
qu'il possedait
ou les leguerent,
de nationalite
ameri-
en Egypte
sejours
(2)
Apres la mort du collecpasserent
"a ses heritiers,
par tranches,
en 1916, 1935
et 1947, au musee de Brooklyn. de cet important
L'etude elle promet
d'etre
comme le montrent arameens
fructueuse
lot de manuscrits et reserve
les premiers
d'RElephantine edit's
papyrus
est a peine
des surprises publies.
par E. G. Kraeling,
dans le fonds Wilbour du musee de Brooklyn
(3),
commencee;
aux orientalistes,
En effet, les documents en 1953, ont e
trouves
et l'ouvrage de W. C. Hayes
dont nous rendons compte aujourd'hui est consacre a un autre manuscrit de la merme collection. Ce papyrus,
reconstitue
a partir de quelque cinq ou six cents fragments,
rnesure dans son etat actuel pres de 2 m. de long sur 30 cm. de haut. Les lacunes
restent
nombreuses,
et de certaines
(1) WILLIAM C. HAYES, A Papyrus of The Late Middle Kingdom in the Brooklyn Museum [Pap. Brooklyn 35.1446j. Publications of the Department of Egyptian Art, The Brooklyn Museum (New-York, 1955). 165 p. et 14 pl. doubles (reproduction photographique de l'orizinal hiera-tioue et transcrip-tion hieroglyphiSYRIA.
-
XXXIV.
pages
il subsiste
seulement
que au trait). (2) Voir Travels in Egypt. Letters of Ch. E. WVilbour,6dites par Capart en 1936. (3) KRAELING, The Brooklyn Museum Aramaic Papyri; cf. le compte rendu de CAZELLES, Syria 32, 75-87. 10
146
SYRIA
quelques lambeaux, assez toutefois pour comprendre l'eeonomie generale du texte et pour saisir son sens et son interet. Le rouleau provient en toute vraisemblance de Thebes, et il a ete utilise pendant quatre-vingt-dix ans environ; d'une part, il porte au recto des inscriptions qui remnontent semblet-il au regne d'Anmemne'mesIII de la XIle dynastie (1842-1797) (1') et d'autre part, la date la plus recente qu'on lit au verso est l'an II de Sebekhotep I-It de la XIJIe dynastie (vers 1742, selon WV.C. Hayes). Les etats, les deelarations, les ordonnances, etc. qui couvrent le papyrus ont en commun leur caractere legal et administratif. La relation entre ces textes n'est pas toujours aisee a determiner, et C'est seulement 'a titre d'hypothese que 1'editeur propose d'y voir des pieces d'un seul et ineme dossier destine a etablir les droits d'une femnme nomniee Senebtisy 'a la possession de 95 serviteurs (pp. 127-129). Les incertitudes qui entourent l'interpretation d'ensemble ne dimninuent pas l'interet du papyrus qui est un docunment de premiere importance. Par les differentes mains de scribes qu'on y trouve, il enrichit la connaissance de l'ecriture cursive et de son evolution, entre la fin de la XIle dynastie et l'epoque hyksos. L'apport est plus notable encore dans le domaine de la langue administrative et juridique. On peut glaner aussi, dans certaines sections du manuserit, des informations sur l'histoire encore mal connue de la XIIIe dynastie. C'est surtout l'organisation sociale et le fonctionnernent de la justice que le nouveau document perrnet de mieux discerner. Avee tine rare penetration servie par une erudition sans defaillance, l'editeur a su expliquer et mettre en valeur les differents aspects du mnanuserit qui, grace a lui, devient accessible et qui ne manquera pas de suseiter des commentaires chez les egvptologues e-t les historiens du droit oriental. La partie du texte qui interessera plus directement les semitisants est la liste nominative de 95 personnes qu'on lit au verso du papyrus (pp. 87-109 et pl. VIII-XIII). Ce catalogue, dispose en plusieurs colonnes, indique pour chaque individu son (( titre ), son nom et s'il y a lieu son surnom, ainsi que son occupation. Sur les 77 notices individuelles qui sont encore suffisaminent conservees pour determiner la nationalite, 29 appartiennent la (1) PourXlI les dates de
e dynastie, PARKER,
tIOUSavons
adopte
The Calendats of Anc.
Eg., 69.
ASIATIQUES EN RGYPTE SOUS LES XIle ET XIIle DYNASTIES 147 a des Egyptiens et 48 "ades Asiatiques. I1 ne fait pas de doute qu'il s'agit d'esclaves, ce qui, en 1?gypte, ne signifiait pas une absence totale de droits (1). Le (( titre )) qui precede le nom n'indique pas une fonction, mais une categorie sociale; il est different pour les indigenes et les etrangers. Les Egyptiens sont appeles (( serviteurs (4m) du roi )) (fem. (( servantes )) (hm.t) tout court) et les etrangers, 'nnz (fem. 'sm.t), terme courant pour designer les Asiatiques. Les deux series sont traitees sur le meme pied et la distinction semble etre seulement ethnique. Parmi les etrangers, on trouve 7 hommes, 30 femmes et 9 enfants. Dans la colonne fort endommagee ou sont inscrites les occupations, on apprend que deux Asiatiques males etaient employes comme domestiques dans la maison (4irj-pr); deux autres etaient cuisiniers et un, brasseur. Les femmes etrangeres travaillaient, en majorite, au tissage et a la confection de vetements (18 personnes) et trois ou quatre servaient apparemment comme magasiniers. Cette liste est la plus longue qui soit actuellement connue pour des Asiatiques installes en Egypte. Le document, un des derniers qui aient ete inclus dans le papyrus, date du milieu de la XIIJe dynastie (vers 1743), epoque pour laquelle on ne possedait, jusqu'a present, rien de semblable. Il comble ainsi, en partie, la lacune entre les textes d'envoutement du Moyen Empire et les noms asiatiques des scarabees hyksos et des inscriptions du debut du Nouvel Empire. Les renseignements qu'il contient sont precieux a la fois pour I'etude de l'evolution du mode de transcription des langues etrangeres en egyptien et pour les recherches d'onomastique semitique qui trouvent ici un pourcentage eleve de noms feminins, d'habitude rares dans les textes. Pour examiner ce nouveau materiel et pour tenter d'identifier les noms etrangers de son manuscrit, W. C. Hayes a pris le sage parti de ceder la plume a W. F. Albright, autorite reconnue dans ce domaine. Les remarques de ce dernier sont incorporees, en abrege, dans le volume que nous examinons, et la discussion detaillee a paru, il y a quelque temps, sous forme d'un irticle independant (2). Dans cette etude admirablement documentee, W. F. Albright examine (1) Cf. BAKIR, Slavery int Pharaonic Egypt (Cahier 18 des ASAE).
(2)
JAOS, 74, 222-233.
148
SYRIA
d'abord l'orthographe utilisee par le scribe du papyrus de Brooklyn. Le fait saillant est l'emploi, plus frequent que sous la XlIe dynastie, du signe r qui remplace de plus en plus 3 dans la transcription de r/l semitique. On note aussi la reduction du nombre de signes biliteres en usage, ainsi que la presence de certains groupes inconnus ou peu usites auparavant et qui deviendront courants plus tard. L'ecriture s'achemine ainsi vers le systeme syllabique dtn Nouvel Empire. En passant de l'eeriture a l'onomastique, W. F. Albright constate que -tous les noms etrangers du papyrus de Brooklyn dont l'etymologie peut etre etablie avec surete appartiennent au groupe semitique du nord-ouest. Voici les principaux de ces noms. Le no 9 (mase.), 'pr-Rspw, que W. F. Albright compare a l'acead. Sinepiri, etc., fait partie de la serie theophore 'pr(w) + nom divin qui, fait curieux, n'est bien attestee, sous cette forme, que dans les textes egyptiens oiu les exemples sont nombreux (1). 'pr(w)-RSp(w) semble avoir ete le plus populaire de cette serie: a l'exemple du papyrus de Brooklyn et a celui que W. C. Hayes a trouve au Metropolitan Museum, sur un ostracon inedit de la XVJIIe dynastie (2), il faut ajouter deux mentions sur une tablette inedite de la XVIIPe dynastie (3) et celle que Ranke a relevee dans un texte du Nouvel Empire (4). Le no 10 (fem.), H3?2m', serait selon WN.F. Albright un compose avec (( ma mere )), dont on a d'autres exemples en egyptien: B3t-wmw aui tmml Moyen Empire (5), 'Istr-?rma la XVIIIe dynastie (6); voir aussi plus bas, sous le n? 13. W. F. Albright voit dans le premier element, h3, l'interrogatif hay: (( o "uest ma mere? )), en supposant que 3 n'a plus iei la valeur r/l qui est constante dans les transcriptions des listes d'envoCutement et qu'on trouve encore dans la liste de Brooklyn, n? 35 et 64. Ce dernier document emploierait done 3 d'une maniere inconsequente, ce qui est possible sans doute, mais ne manque pas d'etre genant. Une autre diffi(1) Cf. BOTTE~RO, Le Probleme des Liabirit, 172-173, ? 193. - Le meilleur parall6le est E pir-dAdad (IM), KAV, iio 19, v? 11, que me signale H. Cazelles. (2) JAOS, 74, 225. (3) Brit. Mus., n? 5647 b.
(4) Le Caire, J. E. 62306; RANKE, Ag. Personennamen I, 416 (25). (5) LOUD, M7egiddo II, pl. 203; Cf. ALBRIGIIT, JAOS, 74, 231. (6) Urk. IV, 11 6
ASIATIQUES EN 1GYPTE SOUS LES XIIe ET XIIIe DYNASTIES 149 culte viendrait du rapprochement, envisage par W. F. Albright, entre les nOS10 et 62 qui rendraient la menme particule hay, l'un par h3 et l'autre par h/. Une explication differente du no 10 serait la bienvenue, et il faudrait la chercher en laissant a 3 la valeur r/l. (1). Le no 11 (fem.), Mnktm', correspond 'a l'hebreu Menak4em : les scribes egyptiens n'indiquaient pas d'habitude les consonnes doubles. Le n? 13 (fem.), Skrtw, figure aussi au no 16 (fem.). Il contient l'element skr qui se retrouve dans les noms feminins des n? 14: 'Imskrw, 22: Skr'ptj (?) et 67 : Skr. Dans tous ces exemples, le scribe emploie le signe bilitiere sk (sorte de balai) deja rencontre, sous la XIIe dynastie, dans la transcription egyptienne de Sichem (Skmm), sur la stele de Khousebek (2). W. F. Albright propose le rapprochement vraisemblable avec Issachar biblique et montre que, dans tous les exemples du papyrus de Brooklyn, il s'agit de differentes formes de la racine skr, skrtw signifiant, selon lui, (( favorable, charmante et Lmskrw,(( Sukru (designation de quelque deesse) est ma miere )). Le n? 15 (fem.), 'Idwtw, est '.4duttu (( dame )) (W.F. Albright). Le n? 17 (fem.), 'htmr, n'est clair que dans sa premiere partie qui figurait sans doute aussi dans le nom mutile du n? 32 : CI;etest 'aViditu((seur)) comme 'hw des listes d'envoutement signifie ((frere )). W. F. Albright 'a qui on doit ces interpretations a montre que la presence de 'ayin dans les transcriptions egyptiennes ne fait pas difliculte. Malgre les reserves qui ont ete formulees (3), on serait porte a rattacher 'a la meme serie le nom d'une femme asiatique partiellement conserve dans un papyrus du Moyen Empire; au debut, 'h est certain, et l'ensemble n'a pas une allure egyptienne (4). Le n? 18 (masc.), TwtwLt, serait, selon W. F. Albright, pour *Dodl-i hu'at(u), (( il est mon adore )), qui apparait dans l'onomastique biblique, II Chron. 2037. Le n? 21 (fem.), Spr, est proche de Sapphira, Shiphrah. Le n? 23 (ferm.), 'Thr, est compare par W. F. Albright au nom de la tribu Asher. Le n? 25 (fe&m.),partiellement en lacune, de meme que le n? 59 (fem.), (1) Sur hr et hrm, cf. MAISLER, Rev. hist. julive en Egypte, 1, 46. 7Topogr. Bibliogr., V, 66. (2) PORTER-MOSS,
(3) ALBRIGHT, (4) GRIFFITH, 'h[..]
'3t[tjw(?)]f.
ap. HAYES, 96, n. 360. Kahun Pap., 1315; il
reste
150
SYRIA
a en comnmun avec ce dernier l'ele'ment initial 'n. Ils pourraient etre, pense W. F. Albright, des noms theophores composes avec le nom de la deesse Anat. Le n? 26 (fetn.), SnIStw, est un hypocoristique qui conserve le noni du dieu Shamash bien atteste dans l'onomastique des listes d'envoAutement. Le no 27 (mase.), 'I'sbtw, est compare par W. F. Albright an mot herbage )), hebreu 'eseb. Le n? 35 (fem.), B'3twI, est encore un hypocoristique d'un nom theophore, le prenier element etant ici Belt. Bacal et Ba'alat se rencontrent parfois dans des noms se'mitiques transcrits en egyptien, au Moyen Empire, comme on peut le voir dans l'article de W. F. Albright. Le nom mutile, no 64 (fem.), appartient a cette serie. ainsi que le n? 87 (fem.), ekbtwv, derivent de la Le n? 37 (fem.), ' racine 'Ekb,popularisee par le biblique Jacob. En Egypte, on la trouve dans l'onomastique hyksos (tJPIb-hr). Le n? 62 (fem.), IIjIbYW(?)w, est traduit par W. F. Albright ( oiu est mon pere, o dieu? )), un nom pour lequel ii cite des paralleles. Cf. plus haut, sous le n? 10. A cet ensemble, s'ajoutent quelques nomiis,les uns incomplets, les autres de lecture ou d'interpretation incertaine, ainsi que des appellations purement egyptiennes qu'on trouve chez presque tous les enfants et chez trois au moins des adultes. Ces derniers noms temoignent de l'assimilation des personnes qui les portaient au milieu oiu elles etaient amenees a vivre. Cette integration s'exprime aussi dans la disposition materielle de la liste qui enumere pele-mee les domestiques indigenes et etrangers, au lieu de les separer en deux series distinctes. Pourtant la grande majorite des etrangers porte encore des noms caracteristiqnes de leur pays d'origine, et le redacteur de la liste distingue ces eselaves des Egyptiens en les designant comme ((Asiatiques )).On peut donc conclure en toute seetcrite que leur introduction en Egypte etait de fraiche date. D'o 'u viennent-ils et quelles eirconstances les ont amenes dans la vallee du Nil? A la premnierequestion qui lui a ete posee par W. C. Hayes (p. 99), W. F. Albright repond que l'onomnastique ne permet pas de preeiser la provenance des Asiatiques figurant sur la liste et qu'il faut se contenter
ASIATIQUES EN 1GYPTE SOUS LES XIIe ET XIIIe DYNASTIES
151
de l'indication generale qui les rattache au groupe semitique du nord-ouest. Dans 1'etat actuel de nos connaissances, la reponse a la deuxieme question ne saurait etre beaucoup plus satisfaisante. Le probleme vaut cependant d'etre examine, car il touche un point d'histoire qui n'a pas regu, jusqu'a
present, toute I'attention qu'il me'ritait. En effet, la liste des esclaves '3m.w du papyrus de Brooklyn rappelle utilement un fait souvent note et jamais approfondi qui est la presence de nombreux Asiatiques dans l'Egypte du Moyen Empire. Les mentions sont disseminees dans les textes les plus varies, et si on ne rencontre pas, dans d'autres documents, des groupes aussi imposants que les 48 Asiatiques du nouveau manuscrit, la multitude des exemples compense leur brievete. Sans doute, la graphie du (( titre )) est-elle le plus souvent ambigue et fait hesiter entre les lectures '3m (e3m.t) (( Asiatique )) et km:3.w (km3.t) qui vandesignerait etymologiquement quelque chose comme (( vanneur ) neuse ))) (1). Les graphies pleines de 3rn(.t) qui rendent la confusion imposible sont rares (2), mais les noms propres etrangers qu'on lit parfois apres le titre abrege, les occupations des personnes qui le portent et le contexte dans lequel apparaissent les exemples rendent vraisemblable et tres souvent
certaine la transcription
'3m
(e3m.t).
Ainsi aucun doute n'est-il permis dans la plupart des exemples que fournissent les papyrus d'Illahoun, dates, en gros, de la fin de la XJJe dynastie. C'est d'abord, etabli en presence du vizir, un acte par lequel deux freres re ;oivent de l'administration quatre Asiatiques en payement pour des services non specifies (3). L'un des freres, etant devenu seul proprietaire des esclaves (4), les donne a son epouse, avec le droit de les laisser a n 'importe lequel de leurs descendants (5). I1 ne peut etre question ici de vanneurs )), car sur le nombre il y a deux enfants en bas age, dans l'etat norninatif du document le plus ancien (6). I1 s'agit donc bien d'esclaves (1) iVb., V, 341 ine cite que lexemple oii km3."3 est 6crit en toutes lettres (Le Caire 20214). Le contexte rend vraisemblable la leeture km3.t par ex. (lans plusieurs passages du petit manuscrit du pap. Boulaq XVIII qui emploie la graphie abr6g6e, exterieurement idenPap. de Boulaq I1, tique a 3m.t, e-F.MARIETTE,
pl. 48, 52, etc. (2) Par ex. Louvre C 170. (3)
GRIFFITH,
(')
ID.,
o.c.,
12 .
o.c.,
(5)
ID.,
o.c.,
1210-11.
(6)
ID.,
O.C.,
1317-18
139-18.
SYRIA
152
et ce dossier rnontre comment
asiatiques,
priete de l'Etat
entre les mains des particuliers.
distribuaient
Empire
Dans le cas pre'sent, l'homme
en question
qui est situe en province
du temple
de la capitale.
rapproche
par une lettre
qui
('), ce qui fait penser aux prisonniers de guerre
du temple
que les rois du Nouvel
est suggeree
et oiu, parmi des ouvriers, on trouve nomrne
d'Illahoun
egalement
un (( Asiatique
different
d'tun genre
Une alienation provient
passer de la pro-
ils pouvaient
Cinq
etre detache
parait
Avec les exemples
(2).
aux dieux.
genereusement
du service
suivants,
on se
sont nomrnes au nombre des danseurs
'r3ni.w
qui figurent au programmne des fetes celebrees dans le temple de Sesostris pres d'Illahoun sonnes
Une
(3).
parmi lesquelles
porte un nom egyptien
note contient
un ordre d'amener
figure un Asiatique (4).
Enfin
(5),
'L.e lieu d'oiu on fait venir les deux
que ce ternme designe
un autre
document
comptait
dans son personnel
fonctions
de portier
(6).
abrege qu'ils portent moins certain. tiques
dependant
les emplois
de main-d'ceuvre
asiatique.
de Sesostris
11
regulier deux Asiatiques
A l'exception
dont un exergait les de 'Frw, les norns qui restent sont
et la lecture
'3tn
((
Asiatique
)) du titre
sauf dans le premier cas qui est
ressort du contexte,
L'interet
etrangers
comme nous le proposons
que le temple
nous apprend
chez tous ces hommes,
egyptiens
un camp
per-
'I'rw et son fils qui
appele
est designe par le rare mot wn.t, et il est possible, ailleurs
plusieurs
[1i
de ce groupe d'exemuples est de inontrer des Asia-
de I'administration
qu'elle leur confiait,
et de faire
sacerdotale
depuis la danse exotique
connaitre
jusqu'aux
fonc-
examine
leurs
des Asiatiques
dans
tions de portier qui est deja un poste de confiance. Si on passe textes et leurs
des papyrus representations,
la partie reservee
aux
gens
aux steles
privees
on trouve de inaison
et qu'on
d'abord
qui sont enumeres
dans le dernier regis-tre, apres les mernbres de la famille. rappelle (1) I D.,
souvent
celti
de la lis-te de Brooklyn
O.C.,3035.
Au lieu de HI.t-GIM, on serait teitit de b. lire {J.t-NbS, avec la ligature n (3) ID., o.c., 244-6, 13-14; cf. BRUNNIER-TIR ,Aur Der Tanz in alten Ag. (Ag. Forscli., 6), 454-t6. (4) SCIZARFV, /AS, 59, 45-t7 et X)1.93. (2)
(7),
(5) Mhd. Polotsky
Le contexte
ainsi (sous
generalement que
qui
d'autres
presse).
ZAS, 37, 98. (7) Certains domestiques egyptiens, nomiin&s sur les steles avec les Asiatiques, portenit les memes titres que les Egyptiens de la liste ie 13rooklyn; voir par ex. Louvre C 170 (date: (6)
BORCUIARDT,
ASIATIQUES EN E~GYPTE SOUS LES XIIe ET XIlIe DYNASTIES
153
faits (1), montrent qu'il s'agit bien de 'em.w (e3m.wt)(( Asiatiques ))et non de (;mr3.wt) (( vanneurs ) (( vanneuses ))); d'ailleurs, dans un cas, on km3.w trouve
la graphie
isoles trois
(5),
sont
egyptiens,
de quatre
de Brooklyn
soignee,
des
surtout
dans
l'usage
leurs n'est
(4),
de
des domestiques
de doutes
quant 'a l'origine part,
que dans le
egyptiens
D'autre
egyptien.
ni la
part, l'exen'est
secondaires,
pas d'individualiser
et que guere
les representa-
sur ce genre de monuments.
La certitude
est moins grande pour les exemples
steles de la XIIle
dynastie
qui portent
a adopter ici la lecture et non le vannage.
(8).
que fournissent
On voit sur ces monuments
le titre sous sa forme abregee
sentes en train de travailler
m.
aux champs. (m3.t),
Au surplus,
deux
un homme
et
et qui sont repre-
On serait porte, de prime abord,
mais les scenes representent
l'homme
autre scene ofu on le voit apporter 'a tout
ni le type physique,
parties
des
Les noms qu'ils portent
ont des noms
d'un surnom
souvent
de deux
groupes
On a vu, d'une
quelques Asiatiques
et en general
tions humaines,
homme
(7).
sont
les Asiatiques
pas susciter
en question.
sont pourvus
steles,
deux femmes
ne distinguent
ne doivent
des personnes
tous les autres cution
aussi en petits
et quand il y a des figurations,
Ces faits
etrangere
Ces Asiatiques
(2).
et meme de six personnes
(6)
ni l'habillement
indigenes. papyrus
de 'rn.t
se presentent
mais is
(3 ),
coiffure,
pleine
encore dans une
figure apparait
des jarres "aun brasseur.
faire et non un travailleur
specialise,
la moisson
C'est donc un
et son association
avec un brasseur rappelle la liste de Brooklyn qui signale un '3m exer?ant ce mnetier. Cependant les Asiatiques enumer's dans ce dernier texte ont des emplois trouve
bien definis
et qui demandent
pas, sur le nombre,
d'ouvriers
an 2 de Sesostris II: 1896); Le Caire 20227 k; 20549 e; Vienne 52 (Cat. WRESZINSKI, 26-28). (1) Ainsi, sur la stele 20549 du Caire, les '3m.wt sont des fillettes. (2) Louvre C 170. (3) Le Caire 20119 n; 20392 e; Brit. Mus. 313; Louvre C 170; cf. aussi DE MORGAN, Cat. mont. et inscr., I, 42, n? 7; Sinai, n? 81; Brit. Mus. 232; Stuttgart 19; je dois les deux der-
une certaine
agricoles
habilete;
ou de jardiniers,
on ne ceux-ci
niers exemples a Mile P. Krieger. (4) Vienne 52 (Cat. WRESZINSKI, 26-28). (5) Le Caire 20227 k; Vienrie 123 (RT 9, 33-36). (6) Le Caire 20549 e. (7) Marseille 227 (Cat. MASPERO, no 27); exemple signaae par Mile P. Krieger. (8) Louvre C 18 (BIFAO 30, 45-48); Ermitage 1064 (Me1. Maspero, I, 907-908).
154
SYRIA
etant tous des lRgyptiens. Ces faits s'accordent mal avec ce qu'on voit sur les deux steles et empechent de verser d'emblee les documents en question dans le dossier des Asiatiques. On revient sur un terrain plus solide avec les exemples ou le titre, sous sa forme abregee, est accole "aun nom de metier qu'il peut aussi bien preceder que suivre. On trouve dans cette serie des ((maitres d'hotel ))(wdpw)(1) et des ((serviteurs)) (hrj-pr), ceux-ci formant, dans un cas, un groupe de trois personnes (2). Dans la liste de Brooklyn, on a rencontre des Asiatiques remplissant ce dernier einploi, et ce parallele, ainsi que le contexte, assurent qu'il faut lire '3m dans ces exemples bien que l'apparence exterieure et les noms des honminesen question n'aient rien d'exotique. Les metiers qu'on trouve ici, aussi simples qu'ils soient, indiquent une specialisation et, "a cc titre, representent le premier pas qui eleve les eselaves etrangers dans l'echelle sociale (3). On en possede d'autres temoignages qui montrent aussi que la promotion ne s'arrete pas la et que ces domestiques finissent par prendre une place non negligeable dans les familles qu'ils servent. Citons d'abord les scenes qui representent des femmes en train d'apporter des victuailles et des fleurs au defunt (4) oU de dresser devant lui la table d'offrandes(5). Dans un exemple, une legende explique que la servante asiatique (( porte des provisions "ason maitre ,, (6). Du registre inferieur, ces femmes remontent ainsi dans la partie principale de la stele. Elles ne different pas des
Egyptiennesni par leur exterieur,ni par leursnoms(7). Elles portent le ressortdu fait que sur d'autres titre sous sa formeabregee,et la lecturecrnm.t
ste]es les me'mesfonctionssont souvent rempliespar des hm.wt(( ser(') Le Caire 20231 h (date: Ammenr6rnmsIIl 1842-1797); El Arabah, pl. 6, haut, stele (le gauche, I registre; Kahun, Gurob and iHawara, pl. 11, 2; cf. JANSSEN, CdE 51, 58-59. (2) Turin 93 (RT 3, 120); Cf. auissi Sinai, nO112 S. (3) Cf. supra, p. 152, la mention d'un portier asiatique. (4) Le Caire 20158 b; 20550 a et c. Voir aussi Meir II, pl. 5, 2, une porteuse de coffret doint la 1egende semble etre '3m.t.
(5) L Caire 20549 cl. Ori a deja not6 la meintion de quatre '3m.wt (lans le registre iMf6rieur de cette stele. (6) Le Caire 20164 h. (7) Noter que sur les steles 20550 c et 20549 a la servante poite le meme nom que son maitre; comparer h 20550 a oii la '3mn.ts'appelle comme la femme du patron et h Turin 93 (RT 3, 120) out un des Asiatiques porte le suirnom de son1 propriftaire.
ASIATIQUES EN 1AGYPTESOUS LES XIIe ET XIIIe DYNASTIES 155 vantes ,, (1) c'est l'alternance qu'on trouve dans la liste de Brooklyn dans laquelle les femmes se divisent en km.wt (( servantes (egyptiennes) )) et (( (servantes) asiatiques ). Les hommes '3m.w apportant des offrandes 3l.Wt sont plus rares (2). L'activite des domestiques etrangers ne se limite pas a ce role secondaire; lis prennent part aussi au culte funeraire, et on voit un ((Asiatique, maitre d'hotel )),((faire une libation)) au mort (3). Les liommes gagnent la confiance de leurs maltres: sur une stele, on voit un '3m sous le siege de son patron, c'est-a-dire 'a la place reservee au favori (4). Les femmes entrent dans les familles egyptiennes par le mariage; c'est le cas notamment d'une Asiatique du papyrus de Brooklyn (5) et d'une a utre Asiatique mentionnee sur une stele (6). I1 est diflicile de suivre plus avant la carriere de ces etrangers. Une fois leurs noms exotiques remplaces par des noms egyptiens et leur etiquette 'nm ('3m.t) enlevee, il ne reste plus rien qui permette de les reconnaltre dans les textes (7). On trouve, sans doute, des Asiatiques ou des descendants d'Asiatiques parmi les nombreux hommes qui portent le nom '3m et les femmes, plus nombreuses encore, qui s'appellent '3m.t (8). L'indice vaut autant que pour les Lombard, Catalan ou Lallemand de notre onomastique. Les documents permettent de saisir le mecanisme par lequel l'ethnique est devenu nom propre et de distinguer deux possibilite's. D'une part, ((l'Asiatique ))peut etre substitue 'a un noni etranger, difficile 'a prononcer et a retenir (9); d'autre
part, une personne
d'origine
asiatique,
mais portant
un nom egyptien, pouvait etre pourvue d'un sobriquet indiquant sa race (10). Toutefois il v avait certainement aussi des cas oiiude purs Egyptiens rece(1) Par ex. Le Caiie 20088 k, 20098 d et e, 20345 g. (2) Cf. El Arabah, I.c., I et II registre. (3) Kahun, Gurob and Hawara, pl. 11; voir aussi Le Caire 20103 d. (4) Florence 2521. (5) NO 7; Cf. HAYES, 93. (6) Le Caire 20114 e 4. (7) Au Nouvel Empire, les etrangers gardent souvent des marques qui aident a les identifier. Aussi connait-oni a cette epoque de nombreux
Asiatiques arriv6s a de bonnes situations en Egypte, cf. JANSSEN, CdE, 51, 50-62. Ag. Personennamen I, 59; II, (8) RANKE, 346. (9) Cas probable: Urk. IV, 1156; cf. le rio 51 de la liste de Brooklyn oui un Asiatique porte un nom commencant par '3m.w. (10) Bon exemple dans la liste de Brooklyni, no 58, out il s'agit du fils d'une servante asiatique; voir peut-etre GRIFFITH, Kahun Pap., 1430.
156
SYR IA pour une raison quelconque:
vaient,
le nom ou le surnom
'3m (3m.t)
type physique,
(').
I1 est impossible
de determiner,
d'une fa?on approximative,
le pourcentage
a cette
Le problenme se complique
derniere
graphies
et de la possibilite
abregees
Ce dernier nom, bien atteste
(tm3.t).
etait
categorie.
repandu
doivent
au Moyen
Empire
sans doute etre lus
criteres externes, ( vanneur Egypte,
doit etre vrai
rmn3.t ne soit pas atteste
lecture
certaine.
Faute
de
rendent precaire l'utilisation
'a l'etude
des Asiatiques
installes
en
que nous avons donnes et qu'il serait facile pouir etablir
d'une nombreuse
de Brooklyn,
enrichit
combien
de l'appellatif
sont suffisants
epoque,
du papyrus
que les Egyptiens
main-d'oeuvre
orientale.
loin d'etre isole, s'inscrit
considerablement.
notre documentation
penser que l'ampleur la liste
ambigus
au Moyen Empire.
de multiplier
qu'il
)). Ces incertitudes
fourni par l'onomastique
Les exemples a cette
d'exemples
le tri est plus difficile pour les noms que pour les titres
)) et (( Asiatique
du materiel
qui rende cette
de les lire /m:3.wv
le mme
(3);
bien que le nom propre
developpee
encore du fait des
sous sa forme pleine,
et beaucoup 3nz
meme
qui appartiennent
offrent
au masculin
et non
1nws.vw
aussi pour la fornie feminine, dans une graphie
(2),
des exemples
qu'elles
de vie, etc.,
conditions
Le nouveau etait incompl'ete
reelle du phenomene
disposaient,
Le temoignage
ainsi dans un ensemble
document jusqu'ici,
nous echappe
montre
d'abord
et il autorise encore.
'a
Gr'ace a
de Brooklyn,
des unites
(4),
on sait que ces Asiatiques n'etaient pas seulement mais qu'ils pouvaient aussi compter par dizaines, et ceci,
non pas dans le Delta, particuliers
vivant
ni dans une institution
en Haute
En revanche,
I'absence
de la puissance
car le groupe le plus important
(1) Voir par ex. Sinouhie qui, a soin retour en Egypte, apres une vie aventuireuse pass6e en Syrie, est compare ironiquement a un Asiatique, Sin B 265. Cf. peut-ktre 1. C. GRIFFITIr, (2) RANKE, O.C. I, 334. (3) La lecture km3.w est a postuler dans tous les cas out un w final est exprime, car '3m in'a pas de desinence.
mais chez des
Rgypte. On voit aussi que la presence
esclaves n'est pas a mettre en relation avec l'apogee nique, sous la XJJe dynastie,
publique,
de w in'est
de ces pharao-
dont nous ayons
pas un argument en faveui de la lecture '3m car il peut s'agir d'une graphie defective de km3.w'. (4) Jusqu'ici les groupes les plus nombreux etaient de cinq personnes, cf. Le Caire 20549 a et e; pap. Kahun 244-6, 13-14; uine fois, de six personnes, Marseille 227.
ASIATIQUES
EN 1GYPTE
SOUS LES XIIe ET XIIle DYNASTIES
157
connaissance est atteste sous la XIIIe dynastie. Sans doute, la liste de Brooklyn date-t-elle de la renaissance sans lendemain qui s'est produite au milieu de la XIIJe dynastie et qu'il faut attribuer, moins aux rois de cette epoque, qu'a la forte personnalite du vizir Ankhou. Quelle que fCut son ceuvre de restauration, l'etat des choses d'alors n'est pas 'a comparer a la situation sous Sesostris III et Ammenemes III. Meme aux temps de la XIIe dynastie, la presence des Asiatiques en Egypte n'est pas facile 'a expliquer. A la difTerence de ce que nous apprennent les inscriptions du Nouvel Empire qui parlent constamment de l'importation en Egypte de prisonniers de guerre faits par les pharaons en Palestine et en Syrie, les textes du Moyen Empire sont muets sur un mouvement semblable de la main-d'oeuvre asiatique. D'ailleurs les occasions de faire des captifs en Asie semblent avoir manque a%cette epoque. La Prophetie de Neferty qui date du debut du regne d'Ammenemes I (vers 1990) annonce dans des termes aussi brefs que vagues la defaite des Asiatiques (1), et on pourrait comprendre de la meme fagon un passage mal copie d'une inscription autobiographique qui date du meme regne et qui se trouve dans une tombe de Beni Hassan (2) OU, dans une scene martiale, figurent des Asiatiques (3). Le general Nesoumontou raconte sur sa stele qui est de l'an 24 d'Ammenemes I (1968) qu'il a fait la guerre aux Asiatiques et detruit leurs forteresses, mais il n'en 'donne pas la localisation (4). Dans 1'Enseignement d'Ammenemes I qui date de la mort de ce roi (1962) et qui presente le bilan de son ceuvre, il est dit seulement qu'il (( a fait en sorte que les Asiatiques marchent comme des chiens ) (5). Pour apprendre quelque chose de plus precis, il faut descendre jusqu'au regne de Sesostris III (1878-1843) qui, d'apres l'inscription de Khousebek (6), a fait une expedition en Palestine au cours de laquelle l'armee egyptienne est parvenue jusqu'a Sichem. Apres cette campagne, on n'entend plus parler d'entreprises militaires en Asie, et si les derniers rois de la XIIe dynastie, ainsi
(') Pap. Ermitage 1116 B r?, 63. Urk. VII, 125-6. (3) Beni Hasan, I, pl. 47. (4) Stele C I du Louvre, cf. PORTER-MOSS,
(2)
Topogr. Bibliogr., VII, 382 (il est inexact que cette stele ait ete trouvee en Palestine). (5) Pap. Millingen, 33. (6) PORTER-MOSS, o.c. V, 66.
158
SYRIA
que certains pharaons de la XIIIe, sont connus en Syrie par quelques monuments (1), cela n'indique pas qu'ils y avaient porte la guerre. On peut considerer, au contraire, comme des temoignages d'amitie nombre des objets egyptiens du Moyen Empire decouverts en Asie. Au debut de cette periode, le roman de Sinouhe, dont l'action se situe sous le regne independant cle Sesostris 1 (1962-1928), presente les Asiatiques sonls un jour favorable et parle cle leurs relations pacifiques avee l'Egypte. Les inscriptions du Sinai attestent, de leur cote, que les envoyes de la XIIe dynastie, notamment sous Ammenemes III (1842-1797), entretenaient de bons rapports avec les indigenes qui venaient collaborer avee les Egyptiens a l'exploitation des m-ines de la presqu'ile (2). Si reellement les relations etaient, dans l'ensemble, amicales et les campagnes militaires, rares a MIoyen Emnpire, it devient diffieile de voir des prisonniers dans les Asiatiques qu'on trouve alors dans la vallee du Nil. On est ainsi aniene a se demander si, au lieni de provenir du butin de guerre, ils ne representaient pas une -narchandise vendue par leurs congeneres aux Egyptiens. MIais les textes observent le mutisme le plus complet au sujet du commerce international d'esclaves, et on est reduit, comme le fait WV.C. Hayes ( p. 99), 'a citer comme exemple Joseph vendu par les Midianites 'a Putiphar. Une autre possibilite qui me;rite d'etre envisagee est celle des personnes qui, de leur propre gre, venaient chercher du travail en Egypte. Nous savons qu'au Moyen Empire, comme plus tard, sous la XJXe dynastie, les Bedouins se rendaient, avee l'autorisation des autorites frontalieres, dans le Delta oriental pour faire paitre leurs troupeaux (3). La tentation etait certainement grande de rester dans l'opulente Egypte, et certains nomades etaient sans doute prets a sacrifier leur independance pour realiser ce desir. On est ici en plein dans le domaine des conjectures, et si on s'autorise (1) Ainsi Ammen6mes I11 (1842-1797) est. attest6 a Gaza, a Bvblos, a Ras Shamra et a Neirab; Ammenemes IV (1798-1790), h B-blos et a Beyrouth; un Neferhotep, a Gaza, a Megiddo et a Byblos; S6bekliotep IV, dans la region de Baalbek. Noter que la liste de Brook-
lyni est proche dans le temps (le ces deux derniiers rois. (2) (3)
ArOr, 7, 384-389. Pap. Ermitage 1116 B rO, 66-68;
(ERN'\,
Aniastasi
VI, 51-61;
cf. G6n. It6324712.
pap.
ASIATIQUES EN EAGYPTESOUS LES XIIe ET XIIIe DYNASTIES 159 a envisager des solutions qui ne reposent pas sur des temoignages concrets, on doit aussi, revenant sur ce qu'on a dit, se demander si, apres tout, les domestiques etrangers ne pouvaient pas etre, au moins en partie, des prisonniers de guerre. On sait que, pendant la Premiere Periode Intermediaire, les Bedouins, profitant de la faiblesse de l'Egypte, sont venus en nombre dans le Delta oriental qu'ils ont devaste. L'Enseignement pour Merikare qui a ete ecrit vers 2070 nous apprend qu'Akhthoes III, auteur presume de ce texte, s'est attache a combattre les intrus et a fait parmi eux des captifs (1). Des infiltrations de nomades ont du se reproduire par la suite et ne cesser qu'au temps d'Ammenemes I (1991-1962) qui, au commencement de son regne, a fortifie la frontiere orientale, comme nous l'apprend la Prophetie de Neferty (2). Des operations de nettoyage sont "apostuler jusqu'a ce moment et avec elles, la capture d'Asiatiques. Nous avons, dans ces faits, une possibilite d'expliquer la presence d'esclaves orientaux en Egypte, possibilite qui est valable pour le debut du Moyen Empire et qu'on peut envisager aussi pour l'epoque trouble qui a suivi la XIe dynastie. Pour la periode de l'apogee on cherchera des elements de comparaison dans la politique africaine qui etait alors pratiquee par les pharaons. Ammenemes I envoie une expedition en Nubie (3), et son Enseignement miee(4). En l'an 30 du raconte que des Medjays sont ramenes en captivite pharaon (1962), son fils et coregent Sesostris I fait une campagne contre les Libyens et revient avec de noinbreux prisonniers (5). Plus tard dans la dynastie, on peut citer l'exemple de Sesostris III (1878-1843) qui decrit ses succes contre les pays du sud d'o u il a ramene des captifs hommes et femmes (6). Or, sous la XIIe dynastie, on trouve en Egypte de nombreux Asiatiques et guere de Nubiens et de Libyens (7). La situation est para(1) Pap. Erinitage 1116 A rO, 96; cf. Rev. d'Eg., 7, 178-179. (2) Pap. Ermitage 1116 B r?, 18-19, 32-33, 35-36, 66-68. (3) PORTER-MOSS, o.c.,
VII,
Pap. Milliingen, 32-3. (5) Sinouhe R 13-16. de l'an (6) Steles frontieres
84.
(4)
16 (1863),
cf.
o.c., VII, 143 et 151 et en derPORTER-MOSS, nier lieu JANSSEN, JNES, 12, 51-55. d'Illahoun qui mentionne (7) Le papyrus des danseurs asiatiques signale aussi des darnseurs medjays, cf. supra, p. 152, n. 3. Sur une stele, on voit une servante originaire de Pount, BIFAO 30, 111 et 113.
160
SYRIA
doxale, et on est conduit a se demander
si les renseignements
du AMoyen Empire
sur les guerres asiatiques
ne sont pas incomplets.
legende de Sesostris transmise par les auteurs classiques, a ce heros national
une expedition
victorieuse
et l'emploi
sur les chantiers
de construction,
massif, tures au cours de la campagne Les occasions betail
venu
une
(1929-1895),
scene
de Bersheh,
legende
(5)
que Blackman
(6)
(1)
capet le
avee l'oecupation on trouve
en Egypte
du
de AMeirqui date d'Ammenemes
II
ramenes
une
figure
tout l'Orient
des prisonniers
un troupeau,
represente
(( boeufs des Asiatiques
precise: tombe
Dans une tombe
d'Asie.
pa s
(2)?
Sous la XIJe dynastie,
de protectorat.
regime
La
n'attribue-t-elle
a travers
la guerre subsistaient
qu'offrait
qu'on possede
seene
et la legende
de (ou comme) analogue
a traduite
... )
(3).
mutilee Dans une
accompagnee
(4)
..... betail
du Retenou
d'une ... Vous
avez foule le sable, vous marchez de cette tombe,
prietaire
1843), et Blackman
sur l'herbe ..... )). Le pro(maintenant) vivait sous Sesostris III (1878Djehoutyhotep,
a suppose que son troupeau provenait
par ce roi de sa campagne
contre Sichem dont nous avons parle plus haut.
Mais le reeit que nous possedons
de cette expedition
pris a l'ennemi.
On sait maintenant
D)jehoutyhotep
et le pays d'origine
la statue service
de cet important
commande
(7).
suivante
l'inscription
qu'il existe
( le majordome
entre
En effet, on a trouve en
ont livre un scarabee
portant
du betail
)
comptable
et exploitaient
loufseneb
suggere que les Egyptiens ses ressources
qui n'est pas a negliger
Selon les circonstances
les Asiatiques
directe
(8).
tenaient
en troupeaux.
Le
etre vrai pour le betail humain.
Cette possibilite envisagees.
une relation
a Me'giddo oiu il a d'u resider
fouilles
Ce dernier fait, rapproche des precedents, meme pourrait
ne parle pas de betail
de son troupeau.
personnage
Les memes
le pays sous leur controle
du butin ramene
qu'on trouve
du moment
en Egypte,
(1) Voir notamment Herodote, II. 102-103 et 106; Diodore, 1, 55. (2) Herodote, II, 107-108; Diodore, 1, 56. (3) Meir III, 13 et pl. 4; cf. II, 18, n. 1. (4) El Bersheh I, pl. 18.
s'ajoute
a celles qu'on a deja
et les conditions
locales,
sous les XIIe et XIJle dynasties,
(5) Urk. VII, (6) JEA,
5113-524.
2, 13-14.
(7) WILSON,
AJSL,
(8) 'Imj-r3 pr
hb
Mlegiddo II, pl. 149,
no
58, 225-236 et pl. 1-3. h.w 'Jw.f-4nb; LOUD, 32.
ASIATIQUES EN RGYPTE SOUS LES XIIe ET XIIIe DYNASTIES
161
oriental,
des
dans le Delta
prox enir des rafles des indesirables
pouvaient
militaires,
expeditions
des requisitions,
actuelle
La carence de notre documentation
volontaire.
et de l'enrolement
du commerce
d'arriver
empeche
a une plus grande precision. Si l'origine
de l'Egypte
l'histoire
etudiera
lorsqu'on
il reste
determinee,
qui est acquis et dont il faudra tenir compte
le fait meme de leur presence a l'avenir,
a etre mieux
demande
de ces esclaves
Empire
au Moyen
et
a l'epoque qui l'a suivi. On peut entrevoir deja certaines de ses consequences. Ainsi, on a observe depuis longtemps
cation
sans
reste
l'influence
des echanges
le resultat
tie. On y voyait
doute
il y a l'invasion
rapide
progressif.
egyptienne;
Or nous voyons le
de
maintenant par
et le papyrus
asiatique,
pris la couronne chiffres livres
de l'Etat
par le nouveau a atteint
SYRIA.
--
XXXIV.
du Nil
de
la
(2).
pendant
main-d'oeuvre
que ce trafic s'est poursuivi
manuscrit
meme soutenir,
le maximum
On n'insistera JEA,
37, 57-
ALT,
Die Herkunft
en comparant
a ceux des textes
dans le nombre des esclaves
(1) Voir SXVE-SODERBERG1I,
Voir en dernier lieu
a la vallee
continuelle montre
On pourrait
59. (2)
par une
brusquement,
a ete precede,
que ce mouvement
l'introduction
d'Egypte.
national.
est que
ete, au co ntraire, lent et dans la marche orientale
leur domination
de Brooklyn
qu'il y a eu progression l'importation
decades
peu eloigne de celui oiu les premiers princes hyksos ont
un moment
jusqu'a
quelques
r aussi a prendre pied, profitant organises dans le Delta de l'Est, les
s'etant
a etendu
Empire,
Moyen
en Egypte
avec le temps,
auraient,
auraient
aurait
par des infiltrations
I1 aurait debute
de la faiblesse lyksos
de l'Egypte
le processus
militaire;
ou les Asiatiques
introduit
qui tend a se generaliser
L'opinion
ne se sont pas empares
conquete
maintenant
lui aj outer
qui s'est produite
hyksos
apres la fin du Moyen Empire. les Hyksos
expli-
de leur pays d'origine.
techniques
Ensuite,
on peut
qui auraient
asiatiques
(1), et cette
commerciaux
mais
valable,
des travailleurs
certaines
a partir de la fin de la XIle dynas-
de l'Egypte,
materielle
dans la civilisation
asiatiques
d' elements
l'apparition
d'intensite
venant
les
plus anciens, d'Asie et que
a la veille de l'ecroulement
pas sur ce point,
car la documentation
der Hyksos in neuer Sicht (Berichte iiber die Verhandlungen der sdchs. Ak. Wiss. Leipzig, 101, 6). 11
162
SYRIA
dont on dispose est encore trop fragmentaire pour qu'on puisse tracer une courbe, en toute securite. Le seul accroissement qui soit certain est celui de la population asiatique en Egypte otu on peut suivre son afflux pendant plusieurs generations. Sans aller jusqu'a preter 'a ces etrangers le role actif d'une cinquieme colonne et pour s'en tenir a la formule de W. C. Hayes (p. 149), ii est permis de penser que leur presence a eu pour effet de diminuer la resistance de la population indigene a la conquete et 'a la domination hyksos. Les Egyptiens avaient pris l'habitude de voir et de connaitre les Asiatiques. Les Aventures de Sinouhe qui ont joui d'une grande vogue etaient bien faits pour les rendre symnpathiques aux yeutx de l'opinion indigene. Nous avons vu qu'ils etaient meles a la vie des familles egyptiennes et qu'il y avait des mariages mixtes. Le climat etait donc propice a 1'entreprise des envahisseurs. Au surplus, ces derniers ne venaient pas directement de l'etranger; leu1rsejour dans le Delta oriental leur avait donne une teinture egyptienne, et is devaient apparaitre aux Egyptiens un peu comme des de l'interieur, ce qui avait po-ur consequence d'augmenter la confusion 3M.W' des esprits. I1 ne senible pas que les Hyksos aient ete ces barbares cruels et impies dont la tradition manethonienne a garde le souvenir. Cette tradition derive apparemment de la propagande tendancieuse de ceux qui les ont combattus et finalement expulses (1). Elle serait d'origine thebaine et, dans le nord, les sentiments a l'egard des llyksos paraissent avoir ete plus indulgents. Le Canon Royal de Turin, qui reflete, semble-t-il, l'opinion memphite (2), ne les exclut pas de la liste des rois, et, encore sous la XXIIe dynastie, un pretre de Memphis, peu sensible 'a l'accusation qui etait faite a l'encontre des Hyksos d'avoir neglige tous les dieux d'Egypte et d'avoir adore seulement Soutekh (3), nomnine ces souverains etrangers cote a cote avec les pharaons indigenes (4). (1) Voir h ce suijet les iemarques de SAvYo.c., 53-71. (2) PIEPER, ZAS, 47, 161; 51, 99. (3) Aiiisi dans le Conte d'Apopi et de Sklenenre, pap. Sallier I r?, V3;VOiI SXVE-S6DERSODERBEGIGH,
BERGH, o.c., 56 et 64, qui signale aussi d'autres r6cits semblables. (4) Stele publiee par BORCHARDT, Die Mittel zwr' zeitlichen Festlegutng von Punkten der dg. Gesch., pl. 2-2 a.
ASIATIQUES EN EGYPTE SOUS LES XIIe ET XIlIe DYNASTIES 163 Des sources plus anciennes confirment que les Hyksos etaient loin d'etre consideres comme des envahisseurs abhorres. T. Save-Soderbergh (1) a signale quelques faits significatifs 'a cet egard, notamment certains passages de la grande inscription historique de Kames. La deuxieme partie de ce texte, decouverte en 1954 a Karnak (2), dit nettement que les Hyksos avaient des partisans dans le pays et que le roi thebain s'est acharne contre ces collaborateurs (3). Sans doute, des questions d'interet sufllraient-elles pour expliquer, dans beaucoup de cas, l'attitude tolerante et meme favorable envers les Hyksos, en particulier dans les milieux dirigeants (4), D'une fa,on plus generale, il ne fait pas de doute que le succes des conquerants etrangers avait eu des raisons determinantes d'ordre purement egyptien. 11 n'est pas indifferent de lui trouver aussi des causes indirectes et des signes precurseurs dans les rapports que le pays des pharaons entretenait avec l'Asie au cours du Moyen Empire. Georges (1) OC., 69-70. (2) Cf. LABIB HABACEII, ASAE, 53, 195-202 et pl. 1; ID., Rev. dii Caire, 33 (no sp6cial), 52-58; VIKENTIEV, o.c., 111-115; HAMMAD, edition critique de CdE, 60, 198-208. -Une ce texte, par Labib Habachi, est en prepara-
tion.
-
Voir
JANSSEN,
POSENER
AEB,
1955,
n0?
3930,
3933, 3934t. (3) Lignes 17-18. Teti de Nefrousi dont il est question dans la premiere partie du texte est a classer parmi eux. (4) Cf. SXVE-S6DERBERGH, O.C., 70.