20. La Cruauté Tragique Dans Le Théâtre Racinien (Andromaque, Britannicus)

September 5, 2017 | Author: Kržan Marija | Category: Jean Racine, Tragedy, Philosophical Science, Science, Religion And Belief
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La Cruauté Tragique Dans Le Théâtre Racinien (Andromaque, Britannicus)...

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20. La cruauté tragique dans le théâtre racinien (Andromaque, Britannicus) Jean Racine est né un an après l’apparition du Cid, la célèbre tragi-comédie de Pierre Corneille qui sera son futur rival. L’œuvre de Racine est surtout marquée par le respect, ou plutôt la maitrise parfaite des règles classiques, formulées par d’Aubignac d’après la Poétique d’Aristote, mais aussi par la densité, la fatalité et la cruauté. Racine offre une vision de l’homme entièrement inverse à celle de Corneille. Il a composé 9 tragédies et une comédie, avant d’abandonner le théâtre a cause des conflits avec les jansénistes de Port-Royal. A partir de 1677 il se consacre à sa vocation d’historiographe royale avec Boileau. Il n’écrit pour le théâtre pendant 20 ans, alors il retourne avec deux tragédies d’inspiration religieuse, écrites pour les jeunes filles de la Maison royale de Saint-Louis à Saint Cyr, une école créée par Madame de Maintenon. En fait, Racine était très influencé par le dogme janséniste et ces œuvres traduisent cette influence. Comme dans la conception janséniste de prédestination, le héros racinien est soumis au destin. Contrairement au héros cornélien, il n’est pas maitre de sa vie et de ses passions et il ne peut pas échapper le péché. Dans l’univers racinien, l’homme dépend de la grâce divine. Pour sa vision pessimiste, ses sujets simples empruntés a la culture helléniste, son respect des règles d’unité, ainsi que la règle de médiocrité des héros (Aristote demande que les personnages tragiques ne soient ni tout a fait bon ni tout a fait méchants), on peut donner a Racine l’épithète d’ancien. Corneille, de l’autre coté, reflète l’idéologie des modernes, parce qu’il modifie les règles, adapte les sujets, mais aussi car il a une vision positive de l’homme, libre a choisir son destin. La Bruyère a dit que Corneille peint les hommes comme ils devaient être, alors que Racine les peint tels qu’ils sont. Racine est, donc, plus fidele a la tradition antique. Il emprunte a l’Antiquité le concept de la furor (fureur, c’est-a-dire folie) et de la cruauté, liée étymologiquement au sang (cruor au latin). Cruel est un mot de grande importance pour la préciosité et souvent utilisé dans les discours amoureux. Hermione l’utilise aussi en s’adressant à Pyrrhus dans la tragédie Andromaque. L’amour est, en fait, le sujet principal des tragédies raciniennes et la cruauté chez Racine se reflète surtout à travers les relations amoureuses. Ce n’est pas un amour réciproque empêché par des obstacles extérieurs, comme chez Corneille, mais un amour impossible, contre nature ou non-partagé. Andromaque offre l’exemple par excellence d’une chaine des amours non-partagées, telle qu’on trouve dans la pastorale. Oreste aime Hermione qui aime Pyrrhus qui aime Andromaque qui n’aime que son mari défunt Hector. Dans cette condition, ceux qui sont les plus puissants se servent de leur pouvoir afin d’éliminer ses rivaux et d’obliger ceux qu’ils aiment à les obéir. Cette cruauté va jusqu’au sadisme : dans Andromaque, on voit Pyrrhus prendre plaisir dans les plaintes d’Andromaque, et dans Britannicus, Néron s’amuse des larmes de Junie et des chagrins de Britannicus, après ce qu’il à forcé Junie à lui dire qu’elle ne l’aimait plus. De cette façon, il substitue en quelque sorte un bonheur irréalisable par la souffrance d’autrui. L’univers racinien est, donc, un univers des monstres, plein de meurtres et de cruauté. Cette cruauté a un double visage : outre la cruauté des hommes il y une cruauté des dieux qui punissent quelquefois des hommes bons qui ne méritent pas d’être punis. Il s’agit du concept de la vengeance divine, également présent dans la mythologie païenne et dans le christianisme.

L’Ancien Testament présent la notion de Dieu vengeur qui a persécuté les premiers hommes du jardin d’Eden. Les jansénistes ont insisté sur le concept du péché originel et sur l’impuissance de l’homme à gagner son salut. Racine, qui a fait les études chez les jansénistes de Port-Royal, intègre la conception de la vengeance divine dans son œuvre. Ses personnages sont souvent sortis des familles maudites et ils sont les victimes de la vengeance à cause d’un péché de ses ancêtres. Ainsi, dans Andromaque, Oreste est puni parce qu’il appartient a la dynastie des Atrides, et Hermione est punie parce que sa mère Helene a causé la guerre de Troie. Racine, qui respecte rigoureusement les règles, y compris celle des bienséances, ne montre rien qui peut choquer le public. La violence et la cruauté ne s’expriment que par le regard et par la parole. Dans Britannicus, Néron espionne les deux amants (Britannicus et Junie) et affirme ainsi son autorité, tout en évitant le regard de sa mère qui vise à réduire cette autorité et à affirmer la sienne. Quant à cruauté exprimée par la parole il faut mentionner les plaintes et les récits qui décrivent les événements obscènes défendus par la règle des bienséances. La plaine d’Andromaque, pleine de reproches est un bon exemple parce qu’elle s’appuie sur les souvenirs de la guerre de Troie et rappelle les massacres sanglantes auxquels Pyrrhus a participé.

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